Ah voilà une réédition qui tombe à pic !
Marcel Labrume fut primé au festival d'Angoulême en 1984, et les deux tomes édités en 1983 par les Humanos étaient depuis longtemps introuvables. Fortes d'une déjà belle histoire d'amour avec l'oeuvre du maître italien, les Editions Mosquito ont décidé de rendre cette oeuvre à nouveau disponible. Dotée d'une nouvelle traduction, d'un nouveau scannage des planches originales, l'intégrale qui vient de sortir propose donc un bel objet, à même de ravir les amateurs d'aventures exotiques et guerrières.
Marcel Labrume est un journaliste qui ne fait pas de reportage, mais essaie plutôt de passer entre les gouttes de la seconde guerre mondiale. Il espère qu'en s'exilant au Proche-Orient, puis en Lybie, il pourra y échapper ; mais non, hélas ! Doté d'un dessin d'un grand classicisme, le héros est tout sauf un enfant de choeur, encore moins un homme sûr de ses convictions, on est loin du cliché du bel aventurier au coeur d'or. Comme le dit Micheluzzi lui-même, Marcel est un homme qui attire avec son potentiel de séduction un peu perverse, par son statut de personnage trouble, sans idéal, totalement immergé dans son abominable égoïsme. Un personnage plein de contradictions donc, balancé dans les soubresauts d'une belle saloperie, une guerre qui fera le vide autour de lui, alors qu'il n'aspire qu'à s'échapper de tout ça. Marcel le mérite-t-il ? C’est un personnage égoïste, brutal, grossier, violent... Mais il est à l'image du monde qui s'agite autour de lui, un monde en plein chaos, avec des gens très différents qui s'affrontent au bout du monde, pour des idéaux qui les dépassent...
Marcel disparaît à la fin du premier tome (il ne meurt pas), mais à la demande générale des lecteurs de l'époque, Micheluzzi le fera revenir dans un second tome, plus classique dans son déroulement et ses thématiques.
Je l'ai dit, Micheluzzi fait preuve dans cette oeuvre, peut-être son apogée, d'une belle maîtrise du dessin classique, directement hérité de Milton Caniff, dont il a bien digéré l'influence, et qui lui permet de s'exprimer dans un noir et blanc parfois somptueux, dans des cases propres (contrairement à l'édition française originale). La documentation technique est de tout premier choix, puisque tout, y compris les mitrailleuses et les voitures des années 1940, est criant de vérité.
Je ne suis pas trop preneur des récits guerriers et/ou historiques. Pourtant le vrai sujet de ce diptyque est ailleurs, puisqu'il est construit comme un polar, noir, dramatique. L’atmosphère, le déroulement de l'histoire, le bad guy, la pépée blonde qui surgit comme un météore dans la vie de Marcel, tout ressemble à s'y méprendre à un polar des années 1940/50, du moins dans la première partie, la seconde, bien que dramatique, ressortissant plus aisément du genre "aventures historiques".
Au final, j'ai lu une grande série, qui fait indubitablement partie des classiques de la bande dessinée européenne de par la qualité de sa narration, le soin apporté aux ambiances et aux cadrages magnifiés par le noir et blanc, mais par laquelle je n'ai pas été très touché, étant assez peu sensible à ce genre d'histoire (Corto Maltese me gonfle prodigieusement, par exemple).
Pour la seconde fois je me suis laissée tenter par un Jodorowsky grâce à la magnifique couverture qui en dit déjà long, et au graphisme de Théo pour lequel j'ai failli manquer d'air à l'ouverture de la bd. Chose surprenante car la colorisation de Sébastien Gérard - dont il est indispensable de citer le nom - est informatisée, mais de très belle façon, elle ne gâche pas du tout le dessin, comme cela peut arriver, mais au contraire s'accorde parfaitement avec lui dans une absolue beauté.
Ce premier tome est à double face, d'un côté il peut sembler un peu léger et d'un autre, l'histoire avançant assez vite elle donne une impression de relative longueur. Ne connaissant pratiquement pas le Pape Jules II, et bien que l'histoire soit contée du côté caché de l'Histoire, où sexe, meurtres, trahisons et manipulations ont la première place, on peut tout de même penser que l'auteur doit être bien proche de la réalité.
Ça fornique et ça blasphème à volonté, enfin des serviteurs de Dieu à la hauteur de leur charge ! Quelle merveilleuse satisfaction ! Voici une bd où il n'y a pas ou presque de femmes, - ce que je ne peux souffrir en général - mais les hommes sont là pour les remplacer et il faut dire qu'ils tiennent leur rôle à la perfection. J'adore spécialement lorsqu'ils se donnent du "chéri" ou du "poussin" de manière tellement naturelle que c'en est un régal. Adolsi le favori de Jules II est un personnage presque énigmatique, parfois très viril et à d'autres moments très efféminé, il a cette dualité qui le rend attirant. L'humour est presque omniprésent mais sans tomber dans la caricature.
Ce petit tome, mine de rien, m'a donné envie de lire les autres séries de Jodorowsky.
Difficile de s'imaginer qu'un tel bouquin avec ce titre à rallonges et une couverture certainement moins alléchante que n'importe quel titre de Manara puisse me laisser le sourire aux lèvres et une satisfaction toute simple et évidente.... Oui cette lecture rend heureux et fait du bien...
Le tout est enrobé par un auteur que je ne connaissais pas, des dessinateurs talentueux tout à fait inconnus à mes yeux et une colorisation toute douce et aussi sucrée qu'une fraise tagada.
Les histoires n'ont pas grand chose en commun en apparence (à l'exception de la première et dernière nouvelle qui sont connectées entre elles) si ce n'est qu'elles mettent en scène des personnes banales, de celles que l'on croise tous les jours dans un supermarché, un métro ou dans la rue à moins que ce ne soit nous mêmes ?
Que ces nouvelles au nombre de 15 fassent deux pages ou plus, le constat est le même, on est surpris par tant de maitrise et de bons sentiments.
Pourquoi tout ne serait que du noir dans des histoires banales ou dramatiques ? On peut y voir de l'espoir ou y trouver un moment de réconfort dans l'attente de jours moins roses...
Pourquoi un moment d'intimité et donc de retard au boulot ne constituerait il pas une bonne excuse ?
Faire l'amour pour la première fois à une personne est il plus émouvant que le faire en sachant que ce sera la dernière fois ?
Voici un panel des questions soulevées dans cet ouvrage qui prendront une réponse tout à fait libre puisqu'elles interpellent en douceur son lecteur...
Un petit trésor que je m'apprête à offrir à ma soeur pour son anniversaire que nous fêterons demain, une personne banale au coeur grand comme ça qui a adoré Le Combat ordinaire de Larcenet et dont cette compilation se trouve être à mes yeux un prolongement...
A lire absolument.
Après l’écolier « Titeuf » et la consécration qui a suivi, « Les Filles Electriques » parlant des adolescents boutonneux et de leurs premières expériences amoureuses ou encore « L'enfer des concerts », le grand Zep revient avec un album sur le sexe : « Happy Sex » !
« Happy Sex » sort dans un contexte bien particulier. Zep a depuis quelques temps travaillé sur la sexualité avec notamment « Le guide du zizi sexuel » ou encore l’exposition éducative pour les enfants appelée « Le zizi sexuel » (à l’Arena de Genève en 2009).
Zep a décidé de dédramatiser le sexe et d’aborder avec humour de nombreuses thématiques : sex-toys, masturbation, cunnilingus, fellation, plan à trois, etc. Aucun tabou dans ce beau one shot. Zep nous parle de tout avec la justesse et légèreté de ton qui le caractérise depuis ses débuts avec « Titeuf ».
Les gags sont dans l’ensemble très réussis et j’avoue ne pas relever de mauvaise blague. Je peux même dire que certaines planches sont mythiques, tout simplement. Par son ton, sa vista, sa pédagogie, son humour et son intelligence, Zep a réussi son pari : aborder le sexe sans tabou et de façon amusante.
Côté dessin, pas de surprise. On reste dans le style Zep déjà vu dans ses autres séries. Son trait fin et ses personnages transmettent pourtant idéalement le message qu’il tente de faire passer.
« Happy Sex » est déjà un best seller. Le seul défaut que je pourrais trouver en pensant à cet album est son prix un petit peu trop élevé, surtout pour une couverture souple. Mais ne vous y trompez pas, Zep a encore frappé un grand coup. A condition de garder cet album hors de portée des plus jeunes, consommer « Happy Sex » sans modération, c’est un régal !
Ce premier volume d'une série-fleuve reflète un défi : réaliser dix pages par jour pendant un mois. Le résultat, ce sont 300 pages avec un rythme effréné, surprenantes. L'auteur y conte sas galères de graphiste et d'auteur BD, oscillant sans cesse entre plusieurs mondes : bandes dessinées, cinéma, jeu vidéo.
Je pense qu'il s'agit de quelqu'un de connu, qui a voulu s'offrir une parenthèse inhabituelle sans toutefois choquer son public. La façon dont il présente le fameux #84 me conforte dans cette impression. Mais ayant la flemme de faire des recherches, je me suis attaché à mon plaisir de lecture, non négligeable. Malgré un style graphique ressemblant quelque peu à du montage photo, je n'ai pas détesté cette initiation, ce début, qui nous montre par le menu les aléas de la vie d'artiste, surtout quand on n'a pas forcément du talent, comme le dit la Grenouille noire.
Ca se lit très bien, on a envie de savoir comment il s'en sort et c'est intelligemment raconté.
Le tome 1 est quant à lui une pure fiction, l'histoire de deux frères siamois et de deux frères jumeaux aveugles qui s'entraident à survivre à leur condition de reclus dans la cave d'un couvent en s'engouffrant dans la création littéraire, puis dans la chimie... Cela donne un récit surprenant, qui se disperse peut-être un peu, mais l'exercice est, dans le pire des cas, intéressant.
Un petit 3,5/5.
La première chose qui m’a marqué lors de cette lecture, c’est la qualité de sa reconstitution historique. Tant l’architecture (navale ou terrestre) que le contexte m’ont été dévoilé avec un talent rare.
Graphiquement, je rapprocherai Delitte de Pellerin (« L'Epervier »). Ces deux artistes disposent d’un trait précis et d’une rigueur proche de la maniaquerie dans leur souci de véracité. Mais Delitte supplante Pellerin dans la composition de ses planches. Certaines doubles planches sont vraiment superbes. Elles permettent de mieux saisir l’aspect colossal des navires de l’époque tout en aérant la lecture.
La narration est, elle aussi, très bonne. Il n’est pourtant pas évident de rendre vivante pareille reconstitution historique. Le nombre de personnages, leur influence dans le contexte de l’époque, les bâtiments présentés tout au long du récit, tout nous est expliqué avec clarté sans alourdir inutilement la lecture et tout en conservant un aspect romanesque à l’ensemble (alors, là ! Moi, je dis « chapeau ! »)
Le scénario, en lui-même est le seul point faible à mes yeux. Delitte s’attarde sur les quais de Rochefort et ne laisse finalement que peu de place à l’aspect « histoire de corsaire » de cette aventure. Le combat final se résume vraiment à très peu de chose et des séries comme « Barbe-Rouge » ou même « Surcouf » m’ont bien plus rassasié de ce point de vue.
Il n’en demeure pas moins que, dans son genre historique et rigoureux, cet album est tout simplement excellent, et m’a vraiment donné l’envie de découvrir « Black Crow », une autre série du même auteur qui se déroule à la même époque et dans le même milieu.
Enorme surprise !!!
J’avais peur que l’Association ait mangé son pain blanc mais il n’en est rien.
Ce premier tome est un vrai régal. Malgré la fatigue, je n’ai pas réussi à m’arrêter en cours de lecture.
Le dessin N&B est simple, précis et convainquant. Il fait dans l’efficace.
Le scénario est basique mais s’appuie sur un postulat ingénieux : Une quête façon jeu de rôle pour 4 jeunes dans la vie réelle. Rapidement, on passe dans la fiction mais le récit est déjà bien lancé et le mélange des genres opère. La suite déroule avec maestria. La narration est très efficace, la traduction semble sérieuse.
L’humour est omniprésent, les personnages sont complémentaires et attachants même si ils sont caricaturaux et extrêmes.
Sans avoir lu les deux autres tomes, je suis déjà déçu de savoir que la série ne soit qu’un triptyque. Et pourtant je fuis les séries à rallonge en temps normal. Il s’agit tout simplement d’un coup de cœur pour cette petite production savoureuse.
J’attends avec impatience la suite.
Idée intéressante de la vie après la mort et surtout des interactions entre les deux mondes. De plus, ça donne à réfléchir sur le destin de chacun et de son rôle sur cette bonne vieille Terre. L'histoire part du postulat que chaque personne a un destin, et certaines un destin « majeur ». Des anges gardiens sont désignés pour que ce destin soit respecté. On suit Kim et Alicia, deux sœurs adolescentes dont la vie va être bouleversée.
Les personnages sont attachants et intéressants, on y retrouve la dualité des 2 sœurs très différentes et assez opposées. Mais aussi des personnages secondaires par l'intermédiaire desquels différents sujets sont abordés comme les familles reconstituées, le suicide, le racisme, la hiérarchie, la rébellion etc.
La période de noël durant laquelle se déroule tout le scénario et qui est habituellement une période festive contraste bien avec la lutte entre les forces de la vie et la mort. Le dessin est réaliste, agréable, classique et peu être un peu enfantin mais encore une fois il correspond parfaitement à l'ambiance de Noël et angélique.
Le tout reste très agréable à lire, et nous tient en haleine avec un suspense soutenu, des courses poursuites, des bons enchaînements entre les scènes avec du dynamisme et des retournements de situation. J'ai passé un très bon moment à la lecture de cette série.
C’est parfait, tout simplement …
Le duo Loisel / Le Tendre nous prend par la main pour un grand voyage riche en émotion. Après un départ mouvementé et quasiment burlesque (l’humour est omniprésent au début de cette série), la quête gagnera en émotion et en profondeur tout le long de ces quatre tomes pour se terminer d’une manière incroyablement touchante (j’en ai encore les yeux embués).
L’univers créé par le duo d’artistes est d’une merveilleuse richesse et d’une belle inventivité. Les personnages secondaires sont souvent excellents (le Rige, par exemple) et peu d’éléments de cette quête me semblent gratuits tant chacun contribue à la construction du récit.
Bien sûr, le thème de la quête est tellement classique que les auteurs n’évitent pas certains clichés, mais ils parviennent à les détourner. Et le plus bel exemple en est donné par ce Mystérieux Inconnu, l’élément humoristique du début, le maladroit qui se met toujours dans des situations inextricables et qui quittera cette quête empli de maturité et de sagesse.
Graphiquement, le premier tome est encore assez brouillon à mes yeux. Le trait de Loisel est encore incertain et les planches sont couvertes de traits, au détriment de leur lisibilité. Mais l’artiste allait rapidement évoluer vers un style plus net tout simplement excellent. Ses créations graphiques sont majestueuses et permettent au lecteur que je suis de rentrer dans ce monde à la fois fantastique et proche du nôtre.
Que dire d'autre que "culte" ?
"Nemi" est une série-phénomène qui nous vient de Norvège. On compare son succès à celui de la série Millenium, de Stieg Larsson, qui lui était Suédois. Après avoir été publiée dans de nombreux journaux et tous les pays occidentaux, elle arrive en France.
C'est l'histoire d'une jeune fille, qui enchaîne les petits boulots, se pose des questions sur les mecs, se bourre de chocolat entre deux virées au pub. C'est aussi une fille qui se donne des allures gothiques mais rêve de sortir avec Batman ou de se balader dans les Terres du Milieu... Bref un personnage bien dans son époque, qui est perdu entre sa vie compliquée et ses rêves d'enfant ou d'adolescent.
C'est très sympa, même si parfois des références, ou plutôt la chute de certains strips tombe un peu à plat. Mais il s'agit d'exceptions, Nemi se positionnant en citoyenne du monde, les situations décrites pouvant se passant dans n'importe quel pays occidental. Le dessin, assez typique des strips ango-saxons, est extrêmement lisible, sans être simpliste cependant. Soulignons le bon travail de la traductrice, qui a su transposer certaines références dans la culture française sans dommages ou presque. A noter que la chanteuse Tori Amos a écrit la préface du premier tome.
Universelle, Nemi. Un personnage à découvrir.
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Marcel Labrume
Ah voilà une réédition qui tombe à pic ! Marcel Labrume fut primé au festival d'Angoulême en 1984, et les deux tomes édités en 1983 par les Humanos étaient depuis longtemps introuvables. Fortes d'une déjà belle histoire d'amour avec l'oeuvre du maître italien, les Editions Mosquito ont décidé de rendre cette oeuvre à nouveau disponible. Dotée d'une nouvelle traduction, d'un nouveau scannage des planches originales, l'intégrale qui vient de sortir propose donc un bel objet, à même de ravir les amateurs d'aventures exotiques et guerrières. Marcel Labrume est un journaliste qui ne fait pas de reportage, mais essaie plutôt de passer entre les gouttes de la seconde guerre mondiale. Il espère qu'en s'exilant au Proche-Orient, puis en Lybie, il pourra y échapper ; mais non, hélas ! Doté d'un dessin d'un grand classicisme, le héros est tout sauf un enfant de choeur, encore moins un homme sûr de ses convictions, on est loin du cliché du bel aventurier au coeur d'or. Comme le dit Micheluzzi lui-même, Marcel est un homme qui attire avec son potentiel de séduction un peu perverse, par son statut de personnage trouble, sans idéal, totalement immergé dans son abominable égoïsme. Un personnage plein de contradictions donc, balancé dans les soubresauts d'une belle saloperie, une guerre qui fera le vide autour de lui, alors qu'il n'aspire qu'à s'échapper de tout ça. Marcel le mérite-t-il ? C’est un personnage égoïste, brutal, grossier, violent... Mais il est à l'image du monde qui s'agite autour de lui, un monde en plein chaos, avec des gens très différents qui s'affrontent au bout du monde, pour des idéaux qui les dépassent... Marcel disparaît à la fin du premier tome (il ne meurt pas), mais à la demande générale des lecteurs de l'époque, Micheluzzi le fera revenir dans un second tome, plus classique dans son déroulement et ses thématiques. Je l'ai dit, Micheluzzi fait preuve dans cette oeuvre, peut-être son apogée, d'une belle maîtrise du dessin classique, directement hérité de Milton Caniff, dont il a bien digéré l'influence, et qui lui permet de s'exprimer dans un noir et blanc parfois somptueux, dans des cases propres (contrairement à l'édition française originale). La documentation technique est de tout premier choix, puisque tout, y compris les mitrailleuses et les voitures des années 1940, est criant de vérité. Je ne suis pas trop preneur des récits guerriers et/ou historiques. Pourtant le vrai sujet de ce diptyque est ailleurs, puisqu'il est construit comme un polar, noir, dramatique. L’atmosphère, le déroulement de l'histoire, le bad guy, la pépée blonde qui surgit comme un météore dans la vie de Marcel, tout ressemble à s'y méprendre à un polar des années 1940/50, du moins dans la première partie, la seconde, bien que dramatique, ressortissant plus aisément du genre "aventures historiques". Au final, j'ai lu une grande série, qui fait indubitablement partie des classiques de la bande dessinée européenne de par la qualité de sa narration, le soin apporté aux ambiances et aux cadrages magnifiés par le noir et blanc, mais par laquelle je n'ai pas été très touché, étant assez peu sensible à ce genre d'histoire (Corto Maltese me gonfle prodigieusement, par exemple).
Le Pape Terrible
Pour la seconde fois je me suis laissée tenter par un Jodorowsky grâce à la magnifique couverture qui en dit déjà long, et au graphisme de Théo pour lequel j'ai failli manquer d'air à l'ouverture de la bd. Chose surprenante car la colorisation de Sébastien Gérard - dont il est indispensable de citer le nom - est informatisée, mais de très belle façon, elle ne gâche pas du tout le dessin, comme cela peut arriver, mais au contraire s'accorde parfaitement avec lui dans une absolue beauté. Ce premier tome est à double face, d'un côté il peut sembler un peu léger et d'un autre, l'histoire avançant assez vite elle donne une impression de relative longueur. Ne connaissant pratiquement pas le Pape Jules II, et bien que l'histoire soit contée du côté caché de l'Histoire, où sexe, meurtres, trahisons et manipulations ont la première place, on peut tout de même penser que l'auteur doit être bien proche de la réalité. Ça fornique et ça blasphème à volonté, enfin des serviteurs de Dieu à la hauteur de leur charge ! Quelle merveilleuse satisfaction ! Voici une bd où il n'y a pas ou presque de femmes, - ce que je ne peux souffrir en général - mais les hommes sont là pour les remplacer et il faut dire qu'ils tiennent leur rôle à la perfection. J'adore spécialement lorsqu'ils se donnent du "chéri" ou du "poussin" de manière tellement naturelle que c'en est un régal. Adolsi le favori de Jules II est un personnage presque énigmatique, parfois très viril et à d'autres moments très efféminé, il a cette dualité qui le rend attirant. L'humour est presque omniprésent mais sans tomber dans la caricature. Ce petit tome, mine de rien, m'a donné envie de lire les autres séries de Jodorowsky.
La Vieille Dame qui n'avait jamais joué au tennis et autres nouvelles qui font du bien
Difficile de s'imaginer qu'un tel bouquin avec ce titre à rallonges et une couverture certainement moins alléchante que n'importe quel titre de Manara puisse me laisser le sourire aux lèvres et une satisfaction toute simple et évidente.... Oui cette lecture rend heureux et fait du bien... Le tout est enrobé par un auteur que je ne connaissais pas, des dessinateurs talentueux tout à fait inconnus à mes yeux et une colorisation toute douce et aussi sucrée qu'une fraise tagada. Les histoires n'ont pas grand chose en commun en apparence (à l'exception de la première et dernière nouvelle qui sont connectées entre elles) si ce n'est qu'elles mettent en scène des personnes banales, de celles que l'on croise tous les jours dans un supermarché, un métro ou dans la rue à moins que ce ne soit nous mêmes ? Que ces nouvelles au nombre de 15 fassent deux pages ou plus, le constat est le même, on est surpris par tant de maitrise et de bons sentiments. Pourquoi tout ne serait que du noir dans des histoires banales ou dramatiques ? On peut y voir de l'espoir ou y trouver un moment de réconfort dans l'attente de jours moins roses... Pourquoi un moment d'intimité et donc de retard au boulot ne constituerait il pas une bonne excuse ? Faire l'amour pour la première fois à une personne est il plus émouvant que le faire en sachant que ce sera la dernière fois ? Voici un panel des questions soulevées dans cet ouvrage qui prendront une réponse tout à fait libre puisqu'elles interpellent en douceur son lecteur... Un petit trésor que je m'apprête à offrir à ma soeur pour son anniversaire que nous fêterons demain, une personne banale au coeur grand comme ça qui a adoré Le Combat ordinaire de Larcenet et dont cette compilation se trouve être à mes yeux un prolongement... A lire absolument.
Happy Sex
Après l’écolier « Titeuf » et la consécration qui a suivi, « Les Filles Electriques » parlant des adolescents boutonneux et de leurs premières expériences amoureuses ou encore « L'enfer des concerts », le grand Zep revient avec un album sur le sexe : « Happy Sex » ! « Happy Sex » sort dans un contexte bien particulier. Zep a depuis quelques temps travaillé sur la sexualité avec notamment « Le guide du zizi sexuel » ou encore l’exposition éducative pour les enfants appelée « Le zizi sexuel » (à l’Arena de Genève en 2009). Zep a décidé de dédramatiser le sexe et d’aborder avec humour de nombreuses thématiques : sex-toys, masturbation, cunnilingus, fellation, plan à trois, etc. Aucun tabou dans ce beau one shot. Zep nous parle de tout avec la justesse et légèreté de ton qui le caractérise depuis ses débuts avec « Titeuf ». Les gags sont dans l’ensemble très réussis et j’avoue ne pas relever de mauvaise blague. Je peux même dire que certaines planches sont mythiques, tout simplement. Par son ton, sa vista, sa pédagogie, son humour et son intelligence, Zep a réussi son pari : aborder le sexe sans tabou et de façon amusante. Côté dessin, pas de surprise. On reste dans le style Zep déjà vu dans ses autres séries. Son trait fin et ses personnages transmettent pourtant idéalement le message qu’il tente de faire passer. « Happy Sex » est déjà un best seller. Le seul défaut que je pourrais trouver en pensant à cet album est son prix un petit peu trop élevé, surtout pour une couverture souple. Mais ne vous y trompez pas, Zep a encore frappé un grand coup. A condition de garder cet album hors de portée des plus jeunes, consommer « Happy Sex » sans modération, c’est un régal !
Les Carnets de la Grenouille Noire
Ce premier volume d'une série-fleuve reflète un défi : réaliser dix pages par jour pendant un mois. Le résultat, ce sont 300 pages avec un rythme effréné, surprenantes. L'auteur y conte sas galères de graphiste et d'auteur BD, oscillant sans cesse entre plusieurs mondes : bandes dessinées, cinéma, jeu vidéo. Je pense qu'il s'agit de quelqu'un de connu, qui a voulu s'offrir une parenthèse inhabituelle sans toutefois choquer son public. La façon dont il présente le fameux #84 me conforte dans cette impression. Mais ayant la flemme de faire des recherches, je me suis attaché à mon plaisir de lecture, non négligeable. Malgré un style graphique ressemblant quelque peu à du montage photo, je n'ai pas détesté cette initiation, ce début, qui nous montre par le menu les aléas de la vie d'artiste, surtout quand on n'a pas forcément du talent, comme le dit la Grenouille noire. Ca se lit très bien, on a envie de savoir comment il s'en sort et c'est intelligemment raconté. Le tome 1 est quant à lui une pure fiction, l'histoire de deux frères siamois et de deux frères jumeaux aveugles qui s'entraident à survivre à leur condition de reclus dans la cave d'un couvent en s'engouffrant dans la création littéraire, puis dans la chimie... Cela donne un récit surprenant, qui se disperse peut-être un peu, mais l'exercice est, dans le pire des cas, intéressant. Un petit 3,5/5.
L'Hermione
La première chose qui m’a marqué lors de cette lecture, c’est la qualité de sa reconstitution historique. Tant l’architecture (navale ou terrestre) que le contexte m’ont été dévoilé avec un talent rare. Graphiquement, je rapprocherai Delitte de Pellerin (« L'Epervier »). Ces deux artistes disposent d’un trait précis et d’une rigueur proche de la maniaquerie dans leur souci de véracité. Mais Delitte supplante Pellerin dans la composition de ses planches. Certaines doubles planches sont vraiment superbes. Elles permettent de mieux saisir l’aspect colossal des navires de l’époque tout en aérant la lecture. La narration est, elle aussi, très bonne. Il n’est pourtant pas évident de rendre vivante pareille reconstitution historique. Le nombre de personnages, leur influence dans le contexte de l’époque, les bâtiments présentés tout au long du récit, tout nous est expliqué avec clarté sans alourdir inutilement la lecture et tout en conservant un aspect romanesque à l’ensemble (alors, là ! Moi, je dis « chapeau ! ») Le scénario, en lui-même est le seul point faible à mes yeux. Delitte s’attarde sur les quais de Rochefort et ne laisse finalement que peu de place à l’aspect « histoire de corsaire » de cette aventure. Le combat final se résume vraiment à très peu de chose et des séries comme « Barbe-Rouge » ou même « Surcouf » m’ont bien plus rassasié de ce point de vue. Il n’en demeure pas moins que, dans son genre historique et rigoureux, cet album est tout simplement excellent, et m’a vraiment donné l’envie de découvrir « Black Crow », une autre série du même auteur qui se déroule à la même époque et dans le même milieu.
Dungeon Quest
Enorme surprise !!! J’avais peur que l’Association ait mangé son pain blanc mais il n’en est rien. Ce premier tome est un vrai régal. Malgré la fatigue, je n’ai pas réussi à m’arrêter en cours de lecture. Le dessin N&B est simple, précis et convainquant. Il fait dans l’efficace. Le scénario est basique mais s’appuie sur un postulat ingénieux : Une quête façon jeu de rôle pour 4 jeunes dans la vie réelle. Rapidement, on passe dans la fiction mais le récit est déjà bien lancé et le mélange des genres opère. La suite déroule avec maestria. La narration est très efficace, la traduction semble sérieuse. L’humour est omniprésent, les personnages sont complémentaires et attachants même si ils sont caricaturaux et extrêmes. Sans avoir lu les deux autres tomes, je suis déjà déçu de savoir que la série ne soit qu’un triptyque. Et pourtant je fuis les séries à rallonge en temps normal. Il s’agit tout simplement d’un coup de cœur pour cette petite production savoureuse. J’attends avec impatience la suite.
Mèche rebelle
Idée intéressante de la vie après la mort et surtout des interactions entre les deux mondes. De plus, ça donne à réfléchir sur le destin de chacun et de son rôle sur cette bonne vieille Terre. L'histoire part du postulat que chaque personne a un destin, et certaines un destin « majeur ». Des anges gardiens sont désignés pour que ce destin soit respecté. On suit Kim et Alicia, deux sœurs adolescentes dont la vie va être bouleversée. Les personnages sont attachants et intéressants, on y retrouve la dualité des 2 sœurs très différentes et assez opposées. Mais aussi des personnages secondaires par l'intermédiaire desquels différents sujets sont abordés comme les familles reconstituées, le suicide, le racisme, la hiérarchie, la rébellion etc. La période de noël durant laquelle se déroule tout le scénario et qui est habituellement une période festive contraste bien avec la lutte entre les forces de la vie et la mort. Le dessin est réaliste, agréable, classique et peu être un peu enfantin mais encore une fois il correspond parfaitement à l'ambiance de Noël et angélique. Le tout reste très agréable à lire, et nous tient en haleine avec un suspense soutenu, des courses poursuites, des bons enchaînements entre les scènes avec du dynamisme et des retournements de situation. J'ai passé un très bon moment à la lecture de cette série.
La Quête de l'Oiseau du Temps
C’est parfait, tout simplement … Le duo Loisel / Le Tendre nous prend par la main pour un grand voyage riche en émotion. Après un départ mouvementé et quasiment burlesque (l’humour est omniprésent au début de cette série), la quête gagnera en émotion et en profondeur tout le long de ces quatre tomes pour se terminer d’une manière incroyablement touchante (j’en ai encore les yeux embués). L’univers créé par le duo d’artistes est d’une merveilleuse richesse et d’une belle inventivité. Les personnages secondaires sont souvent excellents (le Rige, par exemple) et peu d’éléments de cette quête me semblent gratuits tant chacun contribue à la construction du récit. Bien sûr, le thème de la quête est tellement classique que les auteurs n’évitent pas certains clichés, mais ils parviennent à les détourner. Et le plus bel exemple en est donné par ce Mystérieux Inconnu, l’élément humoristique du début, le maladroit qui se met toujours dans des situations inextricables et qui quittera cette quête empli de maturité et de sagesse. Graphiquement, le premier tome est encore assez brouillon à mes yeux. Le trait de Loisel est encore incertain et les planches sont couvertes de traits, au détriment de leur lisibilité. Mais l’artiste allait rapidement évoluer vers un style plus net tout simplement excellent. Ses créations graphiques sont majestueuses et permettent au lecteur que je suis de rentrer dans ce monde à la fois fantastique et proche du nôtre. Que dire d'autre que "culte" ?
Nemi
"Nemi" est une série-phénomène qui nous vient de Norvège. On compare son succès à celui de la série Millenium, de Stieg Larsson, qui lui était Suédois. Après avoir été publiée dans de nombreux journaux et tous les pays occidentaux, elle arrive en France. C'est l'histoire d'une jeune fille, qui enchaîne les petits boulots, se pose des questions sur les mecs, se bourre de chocolat entre deux virées au pub. C'est aussi une fille qui se donne des allures gothiques mais rêve de sortir avec Batman ou de se balader dans les Terres du Milieu... Bref un personnage bien dans son époque, qui est perdu entre sa vie compliquée et ses rêves d'enfant ou d'adolescent. C'est très sympa, même si parfois des références, ou plutôt la chute de certains strips tombe un peu à plat. Mais il s'agit d'exceptions, Nemi se positionnant en citoyenne du monde, les situations décrites pouvant se passant dans n'importe quel pays occidental. Le dessin, assez typique des strips ango-saxons, est extrêmement lisible, sans être simpliste cependant. Soulignons le bon travail de la traductrice, qui a su transposer certaines références dans la culture française sans dommages ou presque. A noter que la chanteuse Tori Amos a écrit la préface du premier tome. Universelle, Nemi. Un personnage à découvrir.