La lecture est parfois austère, mais elle n’est jamais ennuyeuse, bien au contraire !
Les près de 350 pages se lisent même assez rapidement (il n’y a le plus souvent que peu de texte par page). Car le sujet est intéressant, et traité intelligemment.
C’est une réflexion sur la solitude. Autour de quelques moments de la vie de l’auteure (d’une trentaine d’années), mais aussi en utilisant des citations d’auteurs divers et surtout des études de spécialistes (au passage, le long passage autour des expériences menées par un chercheur américain avec des singes fait froid dans le dos, avec ces tortures horribles et répétées qui dépassent le sadisme le plus noir – alors même qu’au final elles ont pu aboutir à plus d’empathie de la part des parents envers leurs enfants !).
L’étude de Kristen Radtke permet aussi en filigrane d’apercevoir une Amérique un rien schizophrène, avec un mythe du cow-boy solitaire et une folie des armes à feu qui transforment chaque habitant en un camp retranché.
Une lecture intéressante en tout cas. Qui entraîne une réflexion sur sa propre expérience, immanquablement.
Maintenant l’incommensurable fleur du présent allait devoir s’ouvrir.
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Ce tome contient un récit complet, indépendant de tout autre. Son édition originale date de 1994. Il a été réalisé par Alejandro Jodorowsky pour le scénario, et par Mœbius pour les dessins. Il s’agit d’une bande dessinée en noir & blanc qui comprend soixante-neuf pages. Elle se termine avec une postface, un texte d’une page, rédigé par Diana Widmaier-Picasso. Dans celui-ci, elle évoque les circonstances dans lesquelles ce magnifique ouvrage lui a été offert, la dédicace que lui avait faite le scénariste (Pour Diana, avec une érection angélicale), les griffes de l’ange qui offrent autant de plaisir que de douleur, la communication artistique de ses deux créateurs, le parcours d’une belle jeune femme cherchant à se libérer par l’accomplissement de ses fantasmes les plus enfouis.
Une femme nue, recroquevillée sur elle-même gît à même le sol parmi des feuilles, au pied d’une foule indifférente, une corde passant sous elle. Une jeune femme se tient debout, les mains jointes, dans une belle robe de cérémonie. Une jeune femme se dévêtit totalement en ne gardant que son chapeau de deuil avec sa voilette, au pied de la croix de la tombe de son père qui vient d’être enterré. Les obsèques durèrent des heures : le cadavre de son père s’obstinait à sortir du cercueil pour aller danser avec ses veuves. Il fallut six gardiens pour venir à bout de sa résistance épileptique et sceller le couvercle. En guise de terre, ils remplirent la fosse avec les corps des veuves. Elle retournait seule en ville. Elle savait bien que la maison était abandonnée depuis un demi-siècle, il fallait pourtant qu’elle y dirige ses pas : de ses fenêtres ouvertes se dégageait l’appel d’une épaisse odeur de sperme.
La jeune femme s’est détournée de profil, ses longs cheveux flottant au vent derrière elle, alors qu’elle contemple une sorte de larve en suspension devant ses yeux. La fille éplorée par la mort de son père marche dans la rue et se dirige vers une maison. Elle n’utilisait pas de tampons ; cependant, au lieu de couler, le sang menstruel se cristallisait dans son vagin, formant peu à peu un diamant rouge… Devant la porte d’entrée l’attendait son père, murmurant avide, de lui donner ce joyau. Elle monte les marches du perron et se dirige vers lui alors qu’il tient son sexe en érection dans ses mains. La jeune femme s’incline devant la larve qui est devenu un long tentacule. La jeune femme en robe de deuil s’agenouille devant l’homme qi est peut-être son père. Elle retrousse ses jupes et elle dépose le caillot entre ses mains, tout en tenant son sexe de la main droite. Il s’éleva dans l’air pour se mutiler l’asperger d’une pluie sanglante. Il l’interpelle en l’appelant Griffes d’ange, et en lui disant qu’elle est désormais invulnérable. Elle peut maintenant explorer le passé, lui dit-il d’une voix qui ne jaillissait pas de sa gorge mais de la plaie ouverte comme une bouche entre ses cuisses. Passée la porte, un abîme s’ouvrit derrière elle qui avala le monde extérieur.
Quel album singulier ! Et ce n’est rien de le dire, même si un homme averti en vaut deux. Pour commencer sa forme : il s’ouvre avec un dessin en pleine page, la forme d’une jeune femme nue recroquevillée sur elle-même, à terre, sous le regard de badauds dont on ne voit que les pieds. Puis viennent soixante-huit pages conçues comme des doubles pages. Sur celle de gauche se trouve une seule case en haut à gauche consacrée à une jeune femme à la longue chevelure vêtue d’une tunique plus ou moins longue selon les pages, parfois d’un pantalon ou d’une robe, semblant contempler une créature ayant une forme de grosse larve en lévitation, parfois une forme de tentacules, parfois plusieurs larves animées d’un mouvement de vol autonome. À côté de cette case un texte de quelques lignes, à la longueur variable, évoquant la situation d’une femme, semblant toutefois sans rapport avec ce qui est dessiné dans la case. La page en vis-à-vis comporte une unique illustration en pleine page, en lien direct avec le texte sur la page de gauche. À une exception près (la femme se dirigeant vers la maison), il s’agit d’un dessin de nature érotique ou pornographique où la nudité est présente, pour partie ou en totalité, parfois des gros plans sur une zone érogène ou une partie génitale, allant jusqu’à la pénétration, avec quelques pratiques sortant de l’ordinaire, pouvant être qualifiées de sadomasochistes ou même de déviantes. Ces représentations peuvent être de nature réaliste, ou teintée d’exagération en particulier pour les pratiques qui font mal, ou encore de fantastique et même de science-fiction, la narration visuelle se faisant alors métaphorique.
Pour autant, le lecteur peut percevoir que le texte raconte une histoire avec une progression dramatique, une intrigue même. Tout commence par cette mention des obsèques qui durent des heures, celles du père de la jeune femme. Puis elle le retrouve dans cette maison isolée au milieu de la ville. Il s’en suit un mélange d’expériences sexuelles, et de cheminement spirituel. L’histoire évoque aussi bien des détails anatomiques (le sperme, les tétons, la chair, le corps, le sexe, la poitrine, le clitoris, le pénis), que des notions comme le rapport au père, à la mère, des expériences de transgression liées aux excréments, aux fluides corporels, à la douleur, une clef en forme d’infini, un arc-en-ciel d’albâtre, la perte d’identité, le recours à l’usage de masques, la mutilation symbolique, un acte rituel, la discipline et la méditation, un accouplement avec un ange, le piège de la pesanteur, etc. La femme traverse différents rites ou subit différentes initiations, reprenant parfois l’initiative, ayant évolué d’une manière ou d’une autre. Elle se trouve confrontée à des interdits, parfois des tabous, liés à sa féminité, au plaisir de la chair, au refoulé de nature psychanalytique. Elle entend une voix lui dire : Quand on perd l’espoir, on perd la peur. Elle déclare que : Au programme de son école n’était inscrite qu’une seule matière : apprendre à vivre… Il n’y avait qu’un professeur : elle-même. Jour après jour, on n’y méditait qu’une phrase : Aujourd’hui la discipline.
Dans le même temps, le lecteur peut également approcher sa lecture comme une suite d’illustrations, celles des pages de droite, au nombre de trente-cinq. Passé la première illustration, celle de l’ange déchu à terre et celle de la troisième, il compulse alors un recueil de dessins allant de l’érotisme à la pornographie, le plus souvent très explicites. Fellation, exhibitionnisme, domination, saphisme, mutilation, piercings extrêmes jusqu’à l’impossible, latex, soumission, humiliation, fétichisme, tentacules… et même une simple étreinte vraiment amoureuse. Le trait de plume de l’artiste est fin et précis avec une décontraction élégante, apportant une touche de vie dans ces poses. Les dessins sont précis et cliniques, sans aucune hypocrisie montrant explicitement chaque chose, d’un parcmètre à des jambes écartées dévoilant un sexe épilé, en passant par des giclées de sang, un fouet ou une paire de chaussures choisie avec soin. L’artiste se situe dans le concret, représentant tout avec le même degré de réalisme, y compris les éléments fantastiques.
Le lecteur approche alors chaque illustration comme un tableau se suffisant à lui-même. La fille éplorée se débarrassant de ses vêtements devant une tombe, la femme recevant des giclées de sang sur son opulente poitrine dénudée, la femme se cousant les lèvres du sexe, celle avec d’immenses aiguilles en guise de piercing des tétons, celle agenouillée, bâillonnée et ligotée en sous-vêtements, on encore celle dénudée lévitant à quelques centimètres au-dessus du sol. Le lecteur prête attention aux accessoires et aux détails, aussi bien ceux normaux, que ceux incongrus ou relevant du fantastique ou de la science-fiction. Des toiles accrochées au mur d’un couloir, les maillons d’une chaîne, une clef en forme d’infini, des masques à fermeture éclair, une tapisserie aux motifs incas, une statue d’art primitif du continent africain aux attributs généreux, un bureau de maîtresse devant un tableau, une serrure, des chaussures talons aiguilles… des sortes de larves flottant dans l’air. Comme un écho de celles se trouvant dans certaines petites cases de la page de gauche. D’ailleurs ces cases, à raison d’une par page de gauche, semblent former à elles seules leur propre trame narrative, qui rejoint l’histoire portée par les textes accompagnant les illustrations sur la page de droite.
Peut-être que le scénariste a écrit son texte à partir d’une collection d’images réalisées par l’artiste, et peut-être celles-ci ont-elles été réalisées à partir de thèmes du scénariste imposés comme autant de défi au dessinateur ? Quoi qu’il en soit, le texte forme lui aussi une narration, celle d’une suite de rituels et d’épreuve pour la femme, et aussi des pistes d’interprétation et de réflexion sur les situations. Jodorowsky s’en donne à cœur joie avec la récurrence de l’image du père, la figure paternelle à enterrer, à embrasser, comme prisme déformant du regard porté sur chaque homme, avec la figure maternelle de laquelle la fille doit s’émanciper pour devenir femme et autonome. Il met en scène d’autres symboles et métaphores telles celle du masque, des fluides corporels (sang, sperme, urine), la force de la pulsion sexuelle, la quête de l’identité, le poids du passé, le sceptre du pouvoir obscur comme image phallique, la voracité des hommes dépravés par le désir sexuel, jusqu’à la transfiguration du personnage féminin, se libérant du dernier piège, le plus antique la pesanteur. En cours de narration, le lecteur relève la maxime relative à l’espoir (Quand on perd l’espoir, on perd la peur), le passage à l’âge adulte (L’enfant qui m’avait possédée depuis l’âge de neuf ans cessa d’orienter mes pas. Désormais le guide, c’était moi.), la notion d’éducation pour apprendre à vivre (aujourd’hui, la discipline). Le texte oscille entre flux de pensées, association libres, images métaphoriques (celles de la serrure par exemple), autour d’une trame de la transformation de soi pour se libérer.
Une bien singulière expérience de lecture. Dans sa forme, une image à gauche accolée à un texte, un dessin en pleine page à droite, en rapport avec le texte. Des solutions de continuité d’une double page à la suivante, et aussi des éléments récurrents trouvant leur écho d’une scène dans une autre. Un voyage d’épreuves pour se libérer dans comportements et valeurs de la société, des souffrances libératrices, et des plaisirs, voire jouissances, transcendants, tout en restant dans le registre de l’hétérosexualité. Des dessins délicats et impitoyables, explicites et insoutenables, oniriques et méticuleux. Un voyage plus qu’une destination, une expérience plus qu’une lecture, une libération éprouvante. Entre surréalisme et pornographie.
Alors moi j'aime autant Le vaisseau de Pierre que La croisière des Oubliés ! Je trouve que s'il en avait fait d'autre, Bilal aurait eu son cycle de Bretagne, pas arthurien mais rêveur tout de même. Et révolté, et proche du peuple ! Ici, on a le vieux terroriste qui ne veut finalement pas de l'utopie de l'errant proposant des utopies diverses, dans La Ville qui n'existait pas et La croisière des Oubliés. L'indépendantisme breton semble-t-il classé à droite n'est pas trop bien vu, même si le personnage est intégré au reste du village.
Alors ? Les habitants du village vont obtenir ce qu'ils veulent autrement que par la violence et que ceux de La croisière des Oubliés… Qui veut savoir comment sera, je l'espère, tenté de lire Bilal ! Le fantastique fait une apparition très bienvenue, les personnages vous le diront. J'aime aussi l'ambiance dans le bar, les brumes…
Les opposants sont-ils caricaturés ? Dur à dire, il y a de tout partout. Il faut juger la valeur des opposants aux gens que l'histoire montre dans leur droit, dans toute l'œuvre. Dans la plus réaliste, La ville qui n'existait pas, comme le dit le cadre le plus lucide à l'héritière, quels moyens n'utilisez-vous pas avec les… têtes faibles, peut-être ? Le plus capable obtient en récompense de sa lucidité, le pouvoir sur le groupe pourvu qu'il fasse vivre La ville qui n'existait pas ! Et un coup à droite, un coup à gauche, en somme, il y a pas mal de nuls aussi chez les soviétiques dans Partie de chasse. Je diagnostique que Bilal ne se fait pas d'illusion sur la capacité de la plupart des dirigeants à voir loin. Je pense aussi qu'il n'ignore pas les tares de la nature humaine, même si sa chaude fraternité pour les dominés renvoie cela à l'arrière-plan.
Prophétique Bilal annonçant la fin de l'URSS, avec ces hauts dignitaires soviétiques dont nous voyons les réalisations, crimes et échecs ! La pétrification des hommes de pouvoir par leur visage semblables à de la pierre effritée est sublimement rendue. Le sang envahissant les cases quand il le faut pour l'intérêt de l'histoire comme pour ajouter à la splendeur du graphisme et à son expressivité est éblouissant. La chasse fait partie des traditions humaines les plus ancrées, et surtout chez les dirigeants. Ainsi, il y a du réalisme dans partie de chasse, aussi bien que du symbolisme : en fait, une telle chasse sacrificielle* aurait ma foi bien été possible
La femme hantant le dignitaire soviétique maître du jeu, elle qu'il a sacrifié à l'ogre Staline pour survivre est aussi un leitmotiv fort bien trouvé. On a le rigide dignitaire de la RDA et le fantaisiste retraité accueillant tout le monde et sa fable avec des oiseaux de proie. Quelle comédie humaine. Aucune case qui ne soit parfaite en soit et insérée dans le flux de la narration… J'ai lu et relu cette œuvre à user l'ouvrage et mon goût pour lui comme lors de ma phase jus de tomate enfant, je n'en pouvais plus… Et puis, ne s'ouvre-t-on pas forcément à d'autres œuvres ? Mais je pense que j'y reviendrais, comme l'augure mon cycle de critique sur Bilal.
* Qui est intrigué par cette expression n'a qu'à lire l'œuvre !
La ville qui n'existait pas fait exister et la ville réelle, du nord, de l'industrie et de ses conflits entre les patrons et les ouvriers, et une ville nouvelle utopique. Les deux ont leurs limites, les deux se lisent l'une dans l'autre, comme on ne le voit jamais mieux que dans les deux enfants toujours en manque de quelque chose dans l'une et dans l'autre. Vaut-il mieux une ville de misère mais de conflit ou une ville de loisirs et de beauté où l'héritière règne bienveillamment sur ses gens ? La majorité préfère fuir le travail aliénant, le chômage, les luttes qui ne mènent souvent pas à grand-chose, mais les syndicalistes rivaux préfèrent s'exiler pour lutter ailleurs, et le conseiller de l'héritière - et du village de La croisière des Oubliés - partent loin de l'utopie pour retourner dans le monde de boue, crasse et injustice, parce que c'est de lui qu'ils tirent leur identité et leur vitalité.
Et pourquoi pas ? Des héros aimés par des femmes de rêve offrant l'éternelle jeunesse retournent bien dans le monde de la souffrance, que ce soit Ulysse fuyant Calypso et tant d'autres. Mais la majorité préfère tout de même la vie meilleure proposée par l'héritière. Laquelle est un peu triste de ce que son conseiller parte vers d'autres aventures, handicapée sur son fauteuil roulant délivrée de sa culpabilité pour le fait que ses ancêtres aient exploité les ouvriers, mais sans la compassion et la souffle de l'aventure de celui dont les discussions avaient fait naître le désir d'utopie en elle . Souvent, on a des utopies parfaites, souvent, on a des dystopies, ici, on a l'utopie nostalgique entre parenthèse du monde.
Il me plait que les méchants fascistes - les vrais, pas des phantasmés par des excités ! - et les "gentils" opposants à ces affreux terroristes soient tous des vieux. Voilà qui change ! Et met en miroir le passé et le présent, savoir de l'époque de la création de l'œuvre.
Les fascistes ne se sont pas améliorés, témoins, les attentats qu'ils commettent… Lesquels sont dessinés de façon aussi dramatique que belle par Bilal, des images qu'on n'oublie pas. Les antifascistes eux, sont toujours aussi courageux et plus tolérants qu'autrefois, mais se pose à la fin la question de savoir s'ils ne ressemblent pas un peu trop aux fascistes. Enfin, ce genre d'interrogation du narrateur montre qu'ils sont tout de même nettement plus lucides ! Le rythme de l'histoire, lent et rapide selon les nécessités de l'intrigue ? Parfait. Il y a même un soupçon d'humour plutôt inhabituel chez Bilal. Mais comme on n'est pas dans La croisière des oubliés, pas dans une fable fantastique mais dans un monde violent, il n'y a pas de happy end.
Ah, comme je regrette que la production de légendes d'aujourd'hui ait cessé !
De pierre et d’os est un véritable coup de cœur. Le scénario adopte un rythme lent, assumé, mais construit avec une progression constante qui rend la lecture de plus en plus prenante. Le travail sur les relations humaines est particulièrement fort, notamment dans la manière dont sont abordées la violence masculine, la condition des femmes et, surtout, la fragilité comme état fondamental de l’existence. La résilience est au cœur du récit, sans jamais être idéalisée ni simplifiée.
L’univers proposé est à la fois dur et profondément doux. Il agit comme une confrontation directe avec nos repères occidentaux, que ce soit dans le rapport à la famille, à la sexualité, à la nature ou à la spiritualité. L’intégration de chants, de récits et de fables enrichit considérablement le monde décrit et renforce cette sensation d’immersion culturelle, sans lourdeur explicative.
Graphiquement, le dessin ne correspond pas forcément aux canons qui me séduisent d'habitude le plus, au premier abord, mais sa justesse est indéniable. Il est parfaitement en phase avec le contexte, sert le récit avec intelligence et possède une esthétique forte en tant que telle. Cette cohérence entre fond et forme contribue largement à faire de De pierre et d’os une œuvre sensible, profondément humaine et que je recommande.
Excellente série de science-fiction d’anticipation, construite sur des récits indépendants par tome, chacun explorant une planète, un contexte et une problématique spécifique. Malgré une structure habituellement peu propice à l’attachement, la série parvient ici à créer une vraie implication grâce à un bon équilibre entre univers, enjeux et caractérisation des personnages. Chaque récit fonctionne de manière autonome tout en donnant envie de poursuivre la découverte de l’univers global.
Le scénario privilégie des thématiques classiques mais solides de la SF (colonisation, rapport à l’altérité, manipulation politique, responsabilité humaine), traitées avec suffisamment de nuance pour éviter la simple mécanique. Le lien entre l’environnement planétaire et la trajectoire des personnages est particulièrement bien exploité, ce qui donne une cohérence interne forte à chaque album.
Graphiquement, le dessin réaliste est très maîtrisé et constant, avec une mise en scène lisible et efficace.
Du Bilal presque à son sommet, qui est à mon avis Partie de chasse. Et en plus, c'est une bd facile et qui fait du bien. Le dessin et la couleur sont très lisibles quoique le style Bilal soit là, et bien là, les constructions ne s'effritent pas trop en secrète ruine, et le visage des personnages n'est pas ravagé par l'exercice du pouvoir. En plus, nous sommes et dans la ruralité, savoir le village, et dans la croisière, il vole ! Tant qu'à dire que le propos politique est trop appuyé, il est des bd bien plus démonstratives qu'on ne critique pas pour si peu, alors… Et sinon, on ne fait pas que comprendre les personnages, on s'attache à eux, et ça finit bien. Alors que demande le peuple ?
*Entrée fracassante avec coup de pied violent dans la porte*
Okay, après avoir laissé traîner depuis belles lurettes, il est enfin temps pour moi de rédiger mon avis sur Bloom into you !
La série d'amour lycéen qui avait su réveiller en moi la midinette qui se cachait jusque-là, l'histoire qui a fait germer tant de questions quant aux relations romantiques et qui m'a fait réaliser que je me trouvais probablement dans le spectre de l'aromantisme et de l'asexualité (même si ici il s'agira surtout d'une question d'aromantisme), l'un des yuris récents les plus encensés par les milieux connaisseurs, … Bref, une série avec un beau palmarès à mes yeux, que j'avais découverte par hasard via des scans en ligne il y a quelques années et qui a su pourtant me rester en mémoire.
L'œuvre est elle parfaite ? Non, elle souffre en grande partie de ses envolées métaphysiques parfois bien peu naturelles, mais j'avoue que même ce défaut objectif me paraît charmant, inséparable de cette histoire dans mon esprit. Certaines personnes pourraient aussi regretter l'absence de réel antagonisme dans le récit, car bien que l'histoire aborde certaines questions un peu dures comme le deuil, le fait que pour aider quelqu'un il faut parfois refuser d'aller dans leur sens ou encore le fait qu'un des personnages essai malgré elle de se détruire, de disparaître derrière l'image qu'elle renvoie aux autres (façon "destruction du soi"), tout est finalement assez doux, tendre et gentil. On pourrait aussi regretter que l'histoire soit finalement bien cliché, cochant pratiquement toutes les cases du yuri classique (on passe même par le rendez-vous à l'aquarium), mais j'avoue que cela ne me dérange pas plus que de raison. L'histoire est classique, parfois étrangement verbeuse et flottante, mais elle parvient tout de même à me toucher, et c'est déjà très bien.
L'histoire, puisqu'il faut la présenter, est une histoire d'amour. Dans son sens le plus basique, tout d'abord, puisqu'il s'agit in fine d'un triangle amoureux lycéen, mais également une histoire sur l'amour dans sa globalité, sur ce que cela signifie d'aimer quelqu'un, sur ce que c'est, finalement, quelqu'un. Oui, comme je l'ai dit plus haut, l'histoire pose contre toute attente une pelletée de questionnements poussés sur l'identité, le fait que nous existions techniquement à travers le regard d'autrui et le fait que le nous est un ensemble d'étiquettes quasiment infini et toujours évoluant (qui me rappelle toujours "Nos identités meurtrières" d'Amin Maalouf). Qu'est-ce qui défini un individu si celui-ci change sans-cesse et se présente différemment face à divers autres individus ? Que signifie aimer quelqu'un si nous ne parvenons pas à pleinement définir ce qu'est au final ce quelqu'un ? Est-il juste de dire à quelqu'un que l'on aime à un instant T si au final cette personne a déjà changer, possède sans doute aussi déjà de nombreuses facettes qui nous sont inconnues ? Tant de questions qui peuvent sans doute vous paraître anodines ou sans importances mais qui portent pourtant le récit tout du long.
L'histoire est celle de Yû, une jeune fille se sentant éloignée des autres car incapable de tomber amoureuse, qui va un beau jour se voir proposer une offre des plus étranges de la belle Tôko, une fille d'apparence parfaite n'étant jamais retourné les sentiments de qui que ce soit : accepter de sortir avec elle, la laisser l'aimer et promettre de ne jamais tomber amoureuse d'elle en retour. Une jeune fille populaire mais cachant un profond mal-être, qui cherche désespérément à aimer quelqu'un et à ce que quelqu'un puisse l'aimer en retour, malgré tout ce qu'elle cache d'elle, malgré toute la complexité de sa personne et qui par peur d'être rejetée préfère s'isoler des autres ; une jeune fille isolée des autres car incapable de pleinement comprendre ce que signifie aimer quelqu'un romantiquement, à un âge où les histoires d'amour et les sentiments romantiques sont pourtant au cœur de la vie sociale, et souhaitant elle aussi secrètement pouvoir être aimer telle qu'elle est vraiment ; une autre jeune fille (oui, je n'ai pas encore eu le temps de présenter Sayaka, mais elle est importante aussi) ayant découvert son homosexualité récemment, meilleure amie de Tôko, l'aimant en secret mais souhaitant toujours privilégier le bonheur de son amie plutôt que ses sentiments égoïstes. Bref, il s'agit ici d'une histoire on ne peut plus adolescente, avec des personnages perdus, en plein questionnement sur eux-mêmes, sur leurs liens avec les autres, qui évoluent et surtout vont de l'avant.
Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise ? J'aime les histoires d'amour, le sentiment de perdition adolescente est traitée avec beaucoup de justesse, les questionnements et réflexions soulevées dans cette histoires sont intéressantes, j'ai de l'affection pour les personnages, ... Je ne suis peut-être pas pleinement objective mais l'oeuvre est bonne, très bonne. J'aurais même pu lui ajouter un coup de cœur lors de ma première lecture. Aujourd'hui, même si j'aime toujours autant ce récit, je me montrerais plus mesurée.
Un petit mot rapide quand à la dimension "aromantique" de cette romance (attention, spoiler).
Oui, Yû et Tôko finissent bien officiellement en couple, et Yû finira bel et bien par tomber amoureuse de Tôko. Cela n'empêche pas techniquement Yû de toujours pouvoir se trouver dans le spectre de l'aromantisme puisque ces sentiments n'ont commencés à se manifester qu'une fois un lien très fort avec Tôko a été établi (ce qui pourrait parfaitement correspondre à quelqu'un de demi-romantique), mais je comprend parfaitement si cette histoire n'est pas interprétée de la sorte (on pourrait après tout interpréter ce récit comme celui d'un éveil à l'amour très classique et de ne voir l'évolution de leur relation que comme deux personnes envieuses des relations sincères des autres et se sentant pourtant incapable d'y prendre part). Pourtant, quoi qu'il arrive, l'aromantisme reste un questionnement central de ce récit, puisque Yû se questionne tout du long sur son incapacité à ressentir d'attraction romantique et qu'un personnage secondaire important (Maki) est quant-à lui bel et bien aromantique (et un aromantique pur et dur de surcroît).
Si j'ai pris le besoin de spécifier cet état de fait c'est parce que j'ai déjà vu beaucoup de gens se questionner pour savoir si oui ou non cette série était une bonne représentation du sujet de l'aromantisme et que je tenais à apporter mon grain de sel. Non, si vous cherchez un récit qui traite pleinement d'une relation de couple entre deux individu-e-s lorsqu'au moins l'un-e d'entre elleux est aromantique cette série ne sera pas optimale. Mais en tant qu'histoire d'amour ouvrant sincèrement la question sur le sujet elle reste parfaitement acceptable à mes yeux.
(J'adore quand mes petits mots rapides finissent par devenir des paragraphes entiers).
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Seek You: Un voyage dans la solitude contemporaine
La lecture est parfois austère, mais elle n’est jamais ennuyeuse, bien au contraire ! Les près de 350 pages se lisent même assez rapidement (il n’y a le plus souvent que peu de texte par page). Car le sujet est intéressant, et traité intelligemment. C’est une réflexion sur la solitude. Autour de quelques moments de la vie de l’auteure (d’une trentaine d’années), mais aussi en utilisant des citations d’auteurs divers et surtout des études de spécialistes (au passage, le long passage autour des expériences menées par un chercheur américain avec des singes fait froid dans le dos, avec ces tortures horribles et répétées qui dépassent le sadisme le plus noir – alors même qu’au final elles ont pu aboutir à plus d’empathie de la part des parents envers leurs enfants !). L’étude de Kristen Radtke permet aussi en filigrane d’apercevoir une Amérique un rien schizophrène, avec un mythe du cow-boy solitaire et une folie des armes à feu qui transforment chaque habitant en un camp retranché. Une lecture intéressante en tout cas. Qui entraîne une réflexion sur sa propre expérience, immanquablement.
Griffes d'Ange
Maintenant l’incommensurable fleur du présent allait devoir s’ouvrir. - Ce tome contient un récit complet, indépendant de tout autre. Son édition originale date de 1994. Il a été réalisé par Alejandro Jodorowsky pour le scénario, et par Mœbius pour les dessins. Il s’agit d’une bande dessinée en noir & blanc qui comprend soixante-neuf pages. Elle se termine avec une postface, un texte d’une page, rédigé par Diana Widmaier-Picasso. Dans celui-ci, elle évoque les circonstances dans lesquelles ce magnifique ouvrage lui a été offert, la dédicace que lui avait faite le scénariste (Pour Diana, avec une érection angélicale), les griffes de l’ange qui offrent autant de plaisir que de douleur, la communication artistique de ses deux créateurs, le parcours d’une belle jeune femme cherchant à se libérer par l’accomplissement de ses fantasmes les plus enfouis. Une femme nue, recroquevillée sur elle-même gît à même le sol parmi des feuilles, au pied d’une foule indifférente, une corde passant sous elle. Une jeune femme se tient debout, les mains jointes, dans une belle robe de cérémonie. Une jeune femme se dévêtit totalement en ne gardant que son chapeau de deuil avec sa voilette, au pied de la croix de la tombe de son père qui vient d’être enterré. Les obsèques durèrent des heures : le cadavre de son père s’obstinait à sortir du cercueil pour aller danser avec ses veuves. Il fallut six gardiens pour venir à bout de sa résistance épileptique et sceller le couvercle. En guise de terre, ils remplirent la fosse avec les corps des veuves. Elle retournait seule en ville. Elle savait bien que la maison était abandonnée depuis un demi-siècle, il fallait pourtant qu’elle y dirige ses pas : de ses fenêtres ouvertes se dégageait l’appel d’une épaisse odeur de sperme. La jeune femme s’est détournée de profil, ses longs cheveux flottant au vent derrière elle, alors qu’elle contemple une sorte de larve en suspension devant ses yeux. La fille éplorée par la mort de son père marche dans la rue et se dirige vers une maison. Elle n’utilisait pas de tampons ; cependant, au lieu de couler, le sang menstruel se cristallisait dans son vagin, formant peu à peu un diamant rouge… Devant la porte d’entrée l’attendait son père, murmurant avide, de lui donner ce joyau. Elle monte les marches du perron et se dirige vers lui alors qu’il tient son sexe en érection dans ses mains. La jeune femme s’incline devant la larve qui est devenu un long tentacule. La jeune femme en robe de deuil s’agenouille devant l’homme qi est peut-être son père. Elle retrousse ses jupes et elle dépose le caillot entre ses mains, tout en tenant son sexe de la main droite. Il s’éleva dans l’air pour se mutiler l’asperger d’une pluie sanglante. Il l’interpelle en l’appelant Griffes d’ange, et en lui disant qu’elle est désormais invulnérable. Elle peut maintenant explorer le passé, lui dit-il d’une voix qui ne jaillissait pas de sa gorge mais de la plaie ouverte comme une bouche entre ses cuisses. Passée la porte, un abîme s’ouvrit derrière elle qui avala le monde extérieur. Quel album singulier ! Et ce n’est rien de le dire, même si un homme averti en vaut deux. Pour commencer sa forme : il s’ouvre avec un dessin en pleine page, la forme d’une jeune femme nue recroquevillée sur elle-même, à terre, sous le regard de badauds dont on ne voit que les pieds. Puis viennent soixante-huit pages conçues comme des doubles pages. Sur celle de gauche se trouve une seule case en haut à gauche consacrée à une jeune femme à la longue chevelure vêtue d’une tunique plus ou moins longue selon les pages, parfois d’un pantalon ou d’une robe, semblant contempler une créature ayant une forme de grosse larve en lévitation, parfois une forme de tentacules, parfois plusieurs larves animées d’un mouvement de vol autonome. À côté de cette case un texte de quelques lignes, à la longueur variable, évoquant la situation d’une femme, semblant toutefois sans rapport avec ce qui est dessiné dans la case. La page en vis-à-vis comporte une unique illustration en pleine page, en lien direct avec le texte sur la page de gauche. À une exception près (la femme se dirigeant vers la maison), il s’agit d’un dessin de nature érotique ou pornographique où la nudité est présente, pour partie ou en totalité, parfois des gros plans sur une zone érogène ou une partie génitale, allant jusqu’à la pénétration, avec quelques pratiques sortant de l’ordinaire, pouvant être qualifiées de sadomasochistes ou même de déviantes. Ces représentations peuvent être de nature réaliste, ou teintée d’exagération en particulier pour les pratiques qui font mal, ou encore de fantastique et même de science-fiction, la narration visuelle se faisant alors métaphorique. Pour autant, le lecteur peut percevoir que le texte raconte une histoire avec une progression dramatique, une intrigue même. Tout commence par cette mention des obsèques qui durent des heures, celles du père de la jeune femme. Puis elle le retrouve dans cette maison isolée au milieu de la ville. Il s’en suit un mélange d’expériences sexuelles, et de cheminement spirituel. L’histoire évoque aussi bien des détails anatomiques (le sperme, les tétons, la chair, le corps, le sexe, la poitrine, le clitoris, le pénis), que des notions comme le rapport au père, à la mère, des expériences de transgression liées aux excréments, aux fluides corporels, à la douleur, une clef en forme d’infini, un arc-en-ciel d’albâtre, la perte d’identité, le recours à l’usage de masques, la mutilation symbolique, un acte rituel, la discipline et la méditation, un accouplement avec un ange, le piège de la pesanteur, etc. La femme traverse différents rites ou subit différentes initiations, reprenant parfois l’initiative, ayant évolué d’une manière ou d’une autre. Elle se trouve confrontée à des interdits, parfois des tabous, liés à sa féminité, au plaisir de la chair, au refoulé de nature psychanalytique. Elle entend une voix lui dire : Quand on perd l’espoir, on perd la peur. Elle déclare que : Au programme de son école n’était inscrite qu’une seule matière : apprendre à vivre… Il n’y avait qu’un professeur : elle-même. Jour après jour, on n’y méditait qu’une phrase : Aujourd’hui la discipline. Dans le même temps, le lecteur peut également approcher sa lecture comme une suite d’illustrations, celles des pages de droite, au nombre de trente-cinq. Passé la première illustration, celle de l’ange déchu à terre et celle de la troisième, il compulse alors un recueil de dessins allant de l’érotisme à la pornographie, le plus souvent très explicites. Fellation, exhibitionnisme, domination, saphisme, mutilation, piercings extrêmes jusqu’à l’impossible, latex, soumission, humiliation, fétichisme, tentacules… et même une simple étreinte vraiment amoureuse. Le trait de plume de l’artiste est fin et précis avec une décontraction élégante, apportant une touche de vie dans ces poses. Les dessins sont précis et cliniques, sans aucune hypocrisie montrant explicitement chaque chose, d’un parcmètre à des jambes écartées dévoilant un sexe épilé, en passant par des giclées de sang, un fouet ou une paire de chaussures choisie avec soin. L’artiste se situe dans le concret, représentant tout avec le même degré de réalisme, y compris les éléments fantastiques. Le lecteur approche alors chaque illustration comme un tableau se suffisant à lui-même. La fille éplorée se débarrassant de ses vêtements devant une tombe, la femme recevant des giclées de sang sur son opulente poitrine dénudée, la femme se cousant les lèvres du sexe, celle avec d’immenses aiguilles en guise de piercing des tétons, celle agenouillée, bâillonnée et ligotée en sous-vêtements, on encore celle dénudée lévitant à quelques centimètres au-dessus du sol. Le lecteur prête attention aux accessoires et aux détails, aussi bien ceux normaux, que ceux incongrus ou relevant du fantastique ou de la science-fiction. Des toiles accrochées au mur d’un couloir, les maillons d’une chaîne, une clef en forme d’infini, des masques à fermeture éclair, une tapisserie aux motifs incas, une statue d’art primitif du continent africain aux attributs généreux, un bureau de maîtresse devant un tableau, une serrure, des chaussures talons aiguilles… des sortes de larves flottant dans l’air. Comme un écho de celles se trouvant dans certaines petites cases de la page de gauche. D’ailleurs ces cases, à raison d’une par page de gauche, semblent former à elles seules leur propre trame narrative, qui rejoint l’histoire portée par les textes accompagnant les illustrations sur la page de droite. Peut-être que le scénariste a écrit son texte à partir d’une collection d’images réalisées par l’artiste, et peut-être celles-ci ont-elles été réalisées à partir de thèmes du scénariste imposés comme autant de défi au dessinateur ? Quoi qu’il en soit, le texte forme lui aussi une narration, celle d’une suite de rituels et d’épreuve pour la femme, et aussi des pistes d’interprétation et de réflexion sur les situations. Jodorowsky s’en donne à cœur joie avec la récurrence de l’image du père, la figure paternelle à enterrer, à embrasser, comme prisme déformant du regard porté sur chaque homme, avec la figure maternelle de laquelle la fille doit s’émanciper pour devenir femme et autonome. Il met en scène d’autres symboles et métaphores telles celle du masque, des fluides corporels (sang, sperme, urine), la force de la pulsion sexuelle, la quête de l’identité, le poids du passé, le sceptre du pouvoir obscur comme image phallique, la voracité des hommes dépravés par le désir sexuel, jusqu’à la transfiguration du personnage féminin, se libérant du dernier piège, le plus antique la pesanteur. En cours de narration, le lecteur relève la maxime relative à l’espoir (Quand on perd l’espoir, on perd la peur), le passage à l’âge adulte (L’enfant qui m’avait possédée depuis l’âge de neuf ans cessa d’orienter mes pas. Désormais le guide, c’était moi.), la notion d’éducation pour apprendre à vivre (aujourd’hui, la discipline). Le texte oscille entre flux de pensées, association libres, images métaphoriques (celles de la serrure par exemple), autour d’une trame de la transformation de soi pour se libérer. Une bien singulière expérience de lecture. Dans sa forme, une image à gauche accolée à un texte, un dessin en pleine page à droite, en rapport avec le texte. Des solutions de continuité d’une double page à la suivante, et aussi des éléments récurrents trouvant leur écho d’une scène dans une autre. Un voyage d’épreuves pour se libérer dans comportements et valeurs de la société, des souffrances libératrices, et des plaisirs, voire jouissances, transcendants, tout en restant dans le registre de l’hétérosexualité. Des dessins délicats et impitoyables, explicites et insoutenables, oniriques et méticuleux. Un voyage plus qu’une destination, une expérience plus qu’une lecture, une libération éprouvante. Entre surréalisme et pornographie.
Le Vaisseau de Pierre
Alors moi j'aime autant Le vaisseau de Pierre que La croisière des Oubliés ! Je trouve que s'il en avait fait d'autre, Bilal aurait eu son cycle de Bretagne, pas arthurien mais rêveur tout de même. Et révolté, et proche du peuple ! Ici, on a le vieux terroriste qui ne veut finalement pas de l'utopie de l'errant proposant des utopies diverses, dans La Ville qui n'existait pas et La croisière des Oubliés. L'indépendantisme breton semble-t-il classé à droite n'est pas trop bien vu, même si le personnage est intégré au reste du village. Alors ? Les habitants du village vont obtenir ce qu'ils veulent autrement que par la violence et que ceux de La croisière des Oubliés… Qui veut savoir comment sera, je l'espère, tenté de lire Bilal ! Le fantastique fait une apparition très bienvenue, les personnages vous le diront. J'aime aussi l'ambiance dans le bar, les brumes… Les opposants sont-ils caricaturés ? Dur à dire, il y a de tout partout. Il faut juger la valeur des opposants aux gens que l'histoire montre dans leur droit, dans toute l'œuvre. Dans la plus réaliste, La ville qui n'existait pas, comme le dit le cadre le plus lucide à l'héritière, quels moyens n'utilisez-vous pas avec les… têtes faibles, peut-être ? Le plus capable obtient en récompense de sa lucidité, le pouvoir sur le groupe pourvu qu'il fasse vivre La ville qui n'existait pas ! Et un coup à droite, un coup à gauche, en somme, il y a pas mal de nuls aussi chez les soviétiques dans Partie de chasse. Je diagnostique que Bilal ne se fait pas d'illusion sur la capacité de la plupart des dirigeants à voir loin. Je pense aussi qu'il n'ignore pas les tares de la nature humaine, même si sa chaude fraternité pour les dominés renvoie cela à l'arrière-plan.
Partie de chasse
Prophétique Bilal annonçant la fin de l'URSS, avec ces hauts dignitaires soviétiques dont nous voyons les réalisations, crimes et échecs ! La pétrification des hommes de pouvoir par leur visage semblables à de la pierre effritée est sublimement rendue. Le sang envahissant les cases quand il le faut pour l'intérêt de l'histoire comme pour ajouter à la splendeur du graphisme et à son expressivité est éblouissant. La chasse fait partie des traditions humaines les plus ancrées, et surtout chez les dirigeants. Ainsi, il y a du réalisme dans partie de chasse, aussi bien que du symbolisme : en fait, une telle chasse sacrificielle* aurait ma foi bien été possible La femme hantant le dignitaire soviétique maître du jeu, elle qu'il a sacrifié à l'ogre Staline pour survivre est aussi un leitmotiv fort bien trouvé. On a le rigide dignitaire de la RDA et le fantaisiste retraité accueillant tout le monde et sa fable avec des oiseaux de proie. Quelle comédie humaine. Aucune case qui ne soit parfaite en soit et insérée dans le flux de la narration… J'ai lu et relu cette œuvre à user l'ouvrage et mon goût pour lui comme lors de ma phase jus de tomate enfant, je n'en pouvais plus… Et puis, ne s'ouvre-t-on pas forcément à d'autres œuvres ? Mais je pense que j'y reviendrais, comme l'augure mon cycle de critique sur Bilal. * Qui est intrigué par cette expression n'a qu'à lire l'œuvre !
La Ville qui n'existait pas
La ville qui n'existait pas fait exister et la ville réelle, du nord, de l'industrie et de ses conflits entre les patrons et les ouvriers, et une ville nouvelle utopique. Les deux ont leurs limites, les deux se lisent l'une dans l'autre, comme on ne le voit jamais mieux que dans les deux enfants toujours en manque de quelque chose dans l'une et dans l'autre. Vaut-il mieux une ville de misère mais de conflit ou une ville de loisirs et de beauté où l'héritière règne bienveillamment sur ses gens ? La majorité préfère fuir le travail aliénant, le chômage, les luttes qui ne mènent souvent pas à grand-chose, mais les syndicalistes rivaux préfèrent s'exiler pour lutter ailleurs, et le conseiller de l'héritière - et du village de La croisière des Oubliés - partent loin de l'utopie pour retourner dans le monde de boue, crasse et injustice, parce que c'est de lui qu'ils tirent leur identité et leur vitalité. Et pourquoi pas ? Des héros aimés par des femmes de rêve offrant l'éternelle jeunesse retournent bien dans le monde de la souffrance, que ce soit Ulysse fuyant Calypso et tant d'autres. Mais la majorité préfère tout de même la vie meilleure proposée par l'héritière. Laquelle est un peu triste de ce que son conseiller parte vers d'autres aventures, handicapée sur son fauteuil roulant délivrée de sa culpabilité pour le fait que ses ancêtres aient exploité les ouvriers, mais sans la compassion et la souffle de l'aventure de celui dont les discussions avaient fait naître le désir d'utopie en elle . Souvent, on a des utopies parfaites, souvent, on a des dystopies, ici, on a l'utopie nostalgique entre parenthèse du monde.
Les Phalanges de l'ordre noir
Il me plait que les méchants fascistes - les vrais, pas des phantasmés par des excités ! - et les "gentils" opposants à ces affreux terroristes soient tous des vieux. Voilà qui change ! Et met en miroir le passé et le présent, savoir de l'époque de la création de l'œuvre. Les fascistes ne se sont pas améliorés, témoins, les attentats qu'ils commettent… Lesquels sont dessinés de façon aussi dramatique que belle par Bilal, des images qu'on n'oublie pas. Les antifascistes eux, sont toujours aussi courageux et plus tolérants qu'autrefois, mais se pose à la fin la question de savoir s'ils ne ressemblent pas un peu trop aux fascistes. Enfin, ce genre d'interrogation du narrateur montre qu'ils sont tout de même nettement plus lucides ! Le rythme de l'histoire, lent et rapide selon les nécessités de l'intrigue ? Parfait. Il y a même un soupçon d'humour plutôt inhabituel chez Bilal. Mais comme on n'est pas dans La croisière des oubliés, pas dans une fable fantastique mais dans un monde violent, il n'y a pas de happy end. Ah, comme je regrette que la production de légendes d'aujourd'hui ait cessé !
De pierre et d'os
De pierre et d’os est un véritable coup de cœur. Le scénario adopte un rythme lent, assumé, mais construit avec une progression constante qui rend la lecture de plus en plus prenante. Le travail sur les relations humaines est particulièrement fort, notamment dans la manière dont sont abordées la violence masculine, la condition des femmes et, surtout, la fragilité comme état fondamental de l’existence. La résilience est au cœur du récit, sans jamais être idéalisée ni simplifiée. L’univers proposé est à la fois dur et profondément doux. Il agit comme une confrontation directe avec nos repères occidentaux, que ce soit dans le rapport à la famille, à la sexualité, à la nature ou à la spiritualité. L’intégration de chants, de récits et de fables enrichit considérablement le monde décrit et renforce cette sensation d’immersion culturelle, sans lourdeur explicative. Graphiquement, le dessin ne correspond pas forcément aux canons qui me séduisent d'habitude le plus, au premier abord, mais sa justesse est indéniable. Il est parfaitement en phase avec le contexte, sert le récit avec intelligence et possède une esthétique forte en tant que telle. Cette cohérence entre fond et forme contribue largement à faire de De pierre et d’os une œuvre sensible, profondément humaine et que je recommande.
Conquêtes
Excellente série de science-fiction d’anticipation, construite sur des récits indépendants par tome, chacun explorant une planète, un contexte et une problématique spécifique. Malgré une structure habituellement peu propice à l’attachement, la série parvient ici à créer une vraie implication grâce à un bon équilibre entre univers, enjeux et caractérisation des personnages. Chaque récit fonctionne de manière autonome tout en donnant envie de poursuivre la découverte de l’univers global. Le scénario privilégie des thématiques classiques mais solides de la SF (colonisation, rapport à l’altérité, manipulation politique, responsabilité humaine), traitées avec suffisamment de nuance pour éviter la simple mécanique. Le lien entre l’environnement planétaire et la trajectoire des personnages est particulièrement bien exploité, ce qui donne une cohérence interne forte à chaque album. Graphiquement, le dessin réaliste est très maîtrisé et constant, avec une mise en scène lisible et efficace.
La Croisière des Oubliés
Du Bilal presque à son sommet, qui est à mon avis Partie de chasse. Et en plus, c'est une bd facile et qui fait du bien. Le dessin et la couleur sont très lisibles quoique le style Bilal soit là, et bien là, les constructions ne s'effritent pas trop en secrète ruine, et le visage des personnages n'est pas ravagé par l'exercice du pouvoir. En plus, nous sommes et dans la ruralité, savoir le village, et dans la croisière, il vole ! Tant qu'à dire que le propos politique est trop appuyé, il est des bd bien plus démonstratives qu'on ne critique pas pour si peu, alors… Et sinon, on ne fait pas que comprendre les personnages, on s'attache à eux, et ça finit bien. Alors que demande le peuple ?
Bloom into you
*Entrée fracassante avec coup de pied violent dans la porte* Okay, après avoir laissé traîner depuis belles lurettes, il est enfin temps pour moi de rédiger mon avis sur Bloom into you ! La série d'amour lycéen qui avait su réveiller en moi la midinette qui se cachait jusque-là, l'histoire qui a fait germer tant de questions quant aux relations romantiques et qui m'a fait réaliser que je me trouvais probablement dans le spectre de l'aromantisme et de l'asexualité (même si ici il s'agira surtout d'une question d'aromantisme), l'un des yuris récents les plus encensés par les milieux connaisseurs, … Bref, une série avec un beau palmarès à mes yeux, que j'avais découverte par hasard via des scans en ligne il y a quelques années et qui a su pourtant me rester en mémoire. L'œuvre est elle parfaite ? Non, elle souffre en grande partie de ses envolées métaphysiques parfois bien peu naturelles, mais j'avoue que même ce défaut objectif me paraît charmant, inséparable de cette histoire dans mon esprit. Certaines personnes pourraient aussi regretter l'absence de réel antagonisme dans le récit, car bien que l'histoire aborde certaines questions un peu dures comme le deuil, le fait que pour aider quelqu'un il faut parfois refuser d'aller dans leur sens ou encore le fait qu'un des personnages essai malgré elle de se détruire, de disparaître derrière l'image qu'elle renvoie aux autres (façon "destruction du soi"), tout est finalement assez doux, tendre et gentil. On pourrait aussi regretter que l'histoire soit finalement bien cliché, cochant pratiquement toutes les cases du yuri classique (on passe même par le rendez-vous à l'aquarium), mais j'avoue que cela ne me dérange pas plus que de raison. L'histoire est classique, parfois étrangement verbeuse et flottante, mais elle parvient tout de même à me toucher, et c'est déjà très bien. L'histoire, puisqu'il faut la présenter, est une histoire d'amour. Dans son sens le plus basique, tout d'abord, puisqu'il s'agit in fine d'un triangle amoureux lycéen, mais également une histoire sur l'amour dans sa globalité, sur ce que cela signifie d'aimer quelqu'un, sur ce que c'est, finalement, quelqu'un. Oui, comme je l'ai dit plus haut, l'histoire pose contre toute attente une pelletée de questionnements poussés sur l'identité, le fait que nous existions techniquement à travers le regard d'autrui et le fait que le nous est un ensemble d'étiquettes quasiment infini et toujours évoluant (qui me rappelle toujours "Nos identités meurtrières" d'Amin Maalouf). Qu'est-ce qui défini un individu si celui-ci change sans-cesse et se présente différemment face à divers autres individus ? Que signifie aimer quelqu'un si nous ne parvenons pas à pleinement définir ce qu'est au final ce quelqu'un ? Est-il juste de dire à quelqu'un que l'on aime à un instant T si au final cette personne a déjà changer, possède sans doute aussi déjà de nombreuses facettes qui nous sont inconnues ? Tant de questions qui peuvent sans doute vous paraître anodines ou sans importances mais qui portent pourtant le récit tout du long. L'histoire est celle de Yû, une jeune fille se sentant éloignée des autres car incapable de tomber amoureuse, qui va un beau jour se voir proposer une offre des plus étranges de la belle Tôko, une fille d'apparence parfaite n'étant jamais retourné les sentiments de qui que ce soit : accepter de sortir avec elle, la laisser l'aimer et promettre de ne jamais tomber amoureuse d'elle en retour. Une jeune fille populaire mais cachant un profond mal-être, qui cherche désespérément à aimer quelqu'un et à ce que quelqu'un puisse l'aimer en retour, malgré tout ce qu'elle cache d'elle, malgré toute la complexité de sa personne et qui par peur d'être rejetée préfère s'isoler des autres ; une jeune fille isolée des autres car incapable de pleinement comprendre ce que signifie aimer quelqu'un romantiquement, à un âge où les histoires d'amour et les sentiments romantiques sont pourtant au cœur de la vie sociale, et souhaitant elle aussi secrètement pouvoir être aimer telle qu'elle est vraiment ; une autre jeune fille (oui, je n'ai pas encore eu le temps de présenter Sayaka, mais elle est importante aussi) ayant découvert son homosexualité récemment, meilleure amie de Tôko, l'aimant en secret mais souhaitant toujours privilégier le bonheur de son amie plutôt que ses sentiments égoïstes. Bref, il s'agit ici d'une histoire on ne peut plus adolescente, avec des personnages perdus, en plein questionnement sur eux-mêmes, sur leurs liens avec les autres, qui évoluent et surtout vont de l'avant. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise ? J'aime les histoires d'amour, le sentiment de perdition adolescente est traitée avec beaucoup de justesse, les questionnements et réflexions soulevées dans cette histoires sont intéressantes, j'ai de l'affection pour les personnages, ... Je ne suis peut-être pas pleinement objective mais l'oeuvre est bonne, très bonne. J'aurais même pu lui ajouter un coup de cœur lors de ma première lecture. Aujourd'hui, même si j'aime toujours autant ce récit, je me montrerais plus mesurée. Un petit mot rapide quand à la dimension "aromantique" de cette romance (attention, spoiler). Oui, Yû et Tôko finissent bien officiellement en couple, et Yû finira bel et bien par tomber amoureuse de Tôko. Cela n'empêche pas techniquement Yû de toujours pouvoir se trouver dans le spectre de l'aromantisme puisque ces sentiments n'ont commencés à se manifester qu'une fois un lien très fort avec Tôko a été établi (ce qui pourrait parfaitement correspondre à quelqu'un de demi-romantique), mais je comprend parfaitement si cette histoire n'est pas interprétée de la sorte (on pourrait après tout interpréter ce récit comme celui d'un éveil à l'amour très classique et de ne voir l'évolution de leur relation que comme deux personnes envieuses des relations sincères des autres et se sentant pourtant incapable d'y prendre part). Pourtant, quoi qu'il arrive, l'aromantisme reste un questionnement central de ce récit, puisque Yû se questionne tout du long sur son incapacité à ressentir d'attraction romantique et qu'un personnage secondaire important (Maki) est quant-à lui bel et bien aromantique (et un aromantique pur et dur de surcroît). Si j'ai pris le besoin de spécifier cet état de fait c'est parce que j'ai déjà vu beaucoup de gens se questionner pour savoir si oui ou non cette série était une bonne représentation du sujet de l'aromantisme et que je tenais à apporter mon grain de sel. Non, si vous cherchez un récit qui traite pleinement d'une relation de couple entre deux individu-e-s lorsqu'au moins l'un-e d'entre elleux est aromantique cette série ne sera pas optimale. Mais en tant qu'histoire d'amour ouvrant sincèrement la question sur le sujet elle reste parfaitement acceptable à mes yeux. (J'adore quand mes petits mots rapides finissent par devenir des paragraphes entiers).