Cette série allie idéalement deux manières de s'attacher à son intégrité. Pour la tueuse, par la vengeance soit le moyen le plus universel de se réapproprier sa dignité… Pour le Japon, c'est plus compliqué : doit-il copier l'Occident ? Et on voit que cela va très loin dans le manga. Ou lui opposer la violence ? Même remarque. Extrême dans une société extrême, la tueuse tue, mais pas les innocents, ses sentiments et ses sens. Il est donc on ne peut plus logique qu'on la voit beaucoup faire l'amour. Et d'autant plus que croiser la mort amène un besoin accru d'aller vers la vie.
Le dessin sait retranscrire tout cela, et même donner de la classe à notre lady, ce qui n'est pas rien. La classe est une sorte de grâce bien difficile à saisir. Que ce manga pulvérise de loin Kill Bill !
Que chacun tente de saisir sa chance est bien naturel. Ici, une dame au teint clair veut éviter de passer pour noire afin d'exercer un rôle digne de ses capacités. Quoi de mal ? De même, un homosexuel peut se faire passer pour hétérosexuel pour réussir. Problème : dans le cas de la dame, elle risque d'attirer des ennuis à sa famille, mais est-ce sa faute ? C'est le pouvoir qui veut dissuader les gens de couleur de gravir les échelons, alors qu'il est opportun de passer pour Blanc. Doit-on être l'otage de sa famille ? En admettant que la question soit légitime, pourquoi le dénier pour les luttes collectives et non pour la promotion individuelle ?
On signale que pour couvrir son secret, ses sœurs ne doivent pas avoir d'enfant, mais quelle aurait été leur vie ? D'humiliés par les Blancs.. Il faut des générations pour que les préjugés diminuent. Cela n'aurait pas été agréable pour eux, et par contre-coup, pour leur mère. Si on dit que l'ambitieuse embarque sa famille dans son destin, c'est aussi ce que font les parents en encore plus décisif. Si le destin de miss Green est plus rare que d'être mère, il ne me semble pas plus discutable moralement. Plus inhabituel, c'est tout.
La BD aurait-elle tort de ne pas montrer la lutte collective des Noirs ? Non, pas plus qu'une histoire de lutte collective de faire l'impasse sur les gens réussissant par le masque. Par le Ciel ! Dans un blog où chacun peut prendre un pseudo pour défendre sa liberté et sa sécurité, comment critiquer une dame faisant de même dans un contexte mille fois plus critique !
Refusant de se laisser enfermer dans un destin trop petit pour elle, elle ne juge pas à son goût la lutte collective. Comme sa peau peut la faire passer pour une personne d'ascendance européenne méditerranéenne, elle en profite. Je la plaint d'avoir dû vivre dans un total contrôle de soi. J'en arrive au dessin ! Il rend très bien la vie prudente, on peut dire en apnée, de l'héroïne. Sa famille sait qui elle est mais n'approuve pas son rôle, les Blancs approuvent son rôle mais n'approuverait pas qui elle est, elle est d'une certaine façon, toujours rejetée. Mais elle s'accroche et nous permet d'avoir un point de vue exceptionnel, tant sur les Blancs que sur les Noirs.
Bravo !
Cette œuvre construit un récit initiatique d’une grande justesse, jouant en permanence sur une apparente simplicité pour mieux atteindre une profondeur émotionnelle rare. La naïveté volontaire du ton n’affaiblit jamais le propos : elle sert de filtre pour aborder la violence, la loyauté et la construction de soi sans cynisme. Le scénario, linéaire mais solidement charpenté, maintient une tension douce qui rend la progression d’Aldobrando à la fois crédible et touchante. La fin est vraiment satisfaisante et me laisse un joli sourire aux lèvres.
Graphiquement, le style caricatural – qui pourrait sembler déroutant hors contexte – fonctionne ici comme un amplificateur narratif. Les proportions exagérées, les visages expressifs et le traitement chromatique épuré renforcent l’innocence du protagoniste et la dureté du monde qui l’entoure. Le dessin accompagne la montée en maturité du personnage et soutient la dynamique émotionnelle du livre de manière précise, sans surcharge.
L’ensemble forme un conte moderne, dur et doux à la fois, capable de toucher un large public. Les lecteurs sensibles aux récits initiatiques, aux univers médiévaux sobres et aux fables morales y trouveront un équilibre rare entre simplicité et profondeur.
La série impressionne par la précision de son récit et par la manière dont elle détourne l’attente d’une simple aventure maritime pour explorer une véritable dérive sociétale. Le scénario, extrêmement documenté, maîtrise parfaitement la montée en tension : la catastrophe initiale sert de déclencheur à une dynamique de pouvoir, de manipulation et d’effondrement moral. Les parallèles implicites avec d’autres tragédies historiques – notamment le radeau de La Méduse, où les plus vulnérables subissent la brutalité des puissants – donnent au récit une profondeur supplémentaire sans jamais quitter le cadre strictement narratif. L’ensemble attise constamment la curiosité grâce à la solidité des faits historiques mobilisés.
Le dessin, d’une grande précision, renforce l’immersion. Les ambiances, les visages et les corps sont rendus avec un réalisme qui incarne parfaitement chaque personnage. Cette exactitude graphique rend les scènes plus crédibles et accentue la dureté psychologique du récit. On “y est”, tant dans la tension des situations que dans la représentation sans fioritures de la marine de l'époque. Cette adéquation entre style graphique et matière narrative constitue un des points forts majeurs de l’ouvrage.
L’ensemble s’adresse clairement à un lectorat appréciant les récits historiques exigeants, les chroniques humaines extrêmes et les constructions scénaristiques très rigoureuses. La force documentaire, la densité thématique et la cohérence entre fond et forme en font une lecture marquante, même si son intensité peut dérouter les lecteurs cherchant un divertissement plus léger.
Cette relecture du mythe du Marsupilami s’impose comme une proposition mature, sombre et cohérente, bien distincte des approches classiques de la franchise. Le scénario, construit avec un sens affirmé du rythme, installe une tension constante sans basculer dans la démonstration. L’univers plus noir, presque naturaliste, donne au récit une densité émotionnelle réelle. Les évolutions des personnages sont traitées avec finesse : chacun progresse par petites touches, sans surenchère, ce qui rend leurs réactions crédibles et leur peine perceptible sans que le récit ne force l’émotion.
Graphiquement, l’album atteint une intensité rare. Le trait expressif de Frank Pé, ample et détaillé, parvient à véhiculer immédiatement les émotions des protagonistes comme celles de l’animal. Les ambiances sombres, la gestion des lumières et la mise en scène très physique des corps renforcent le ton dramatique du récit. L’ensemble crée une immersion forte où la beauté du dessin soutient le propos plutôt que de le surcharger.
La série peut séduire un public adulte appréciant les réinterprétations ambitieuses, les atmosphères denses et les récits émotionnels sans pathos. Les amateurs de travaux graphiques expressifs y trouveront également un grand intérêt. Ses principaux atouts résident dans la cohérence du ton, la qualité du dessin et la délicatesse apportée à la caractérisation. Les rares limites tiennent à la noirceur générale, qui pourra moins parler à ceux qui attendent un esprit plus aventureux ou léger.
Je viens de relire les 7 tomes de cette série, 18 ans après l’avoir découverte… 18 ans durant lesquels j’ai lu bon nombre de polars, sans jamais trouver mieux dans le genre.
Le duo Brubaker / Phillips nous propose une série dans la pure tradition des polars noirs américains. Des flics pourris, des trafiquants de drogue tarés, des fusillades… et au milieu de tout ça, des personnages attachants à la personnalité bien développée, comme on en voit rarement dans la BD franco-belge. Les intrigues sont prenantes, bien construites et parfaitement narrées, et varient suffisamment d’un tome à l’autre pour éviter la monotonie.
Après, c’est sûr, il faut se faire au dessin typé comics, ce n’est pas du Blacksad… je note d’ailleurs que les 2 seuls posteurs ayant mis 3/5 à ce jour ont eu un blocage à ce niveau-là, ce que je comprends tout à fait. Moi, je trouve le dessin super efficace, et parfait pour représenter la noirceur de l’univers de Crminal.
Une superbe série, sans doute la meilleure dans le genre « polar noir ». Je vous conseille aussi tous les spin-off – voir notre thème. Vivement la série télévisée !
Incroyable, cette série !
Je voulais la lire depuis longtemps et j'ai franchi le pas en la trouvant à la bibliothèque. Et je suis sidéré de sa qualité, parce qu'elle accuse l'âge de 30 ans aujourd'hui ! Luc Brunschwig n'est pas un manche en terme de scénario, je le savais déjà, mais là j'ai été soufflé par la qualité de sa production.
Si la BD accuse un certain âge au niveau du dessin qui est perfectible, notamment dans certains gros plans et dans une organisation de page pas toujours très claire dans le premier tome, qui va progressivement s'améliorer au fur et à mesure du temps, si la BD accuse un certain âge niveau dessin donc, le scénario est curieusement très actuel à mon gout. Bien qu'installé dans les politiques des années 90 et de l'insécurité de New-York dans ces années-là, le commentaire de la BD est tout à fait pertinent aujourd'hui encore, et peut-être même plus depuis quelques années.
J'avoue que le premier tome m'avait laissé craindre une direction spécifique de la BD : la constatation des échecs politiques dans l'idée de lutter contre la criminalité et l'apparition -et la glorification- du héros vengeur, le justicier individuel qui vient faire régner l'ordre et la loi dans la ville. A l'image d'un Bronson dans "Un justicier dans la ville", quoi.
Mais très vite le scénario bifurque et installe des propos politiques que j'ai beaucoup apprécié. Parce que c'est toujours les mêmes aujourd'hui : la sécurité mise en avant au détriment du reste, le détournement d'argent pour financer des campagnes avec magouille derrière, les liens entre politiques et mafias (et riches, mais les riches et les mafieux se confondent vite), l'oubli de tout les pauvres ... Et j'ai beaucoup aimé ce qui est dit dans la BD.
Si la plupart des personnages sont gris et que le final flamboyant remet en place les différentes pièces du puzzle, il reste dedans quelques personnages très typés. A commencer par Jessica Rupert. J'ai lu dans plusieurs avis et je comprends que certains n'ont pas aimé ce personnage trop gentil, trop parfait et trop altruiste. Je dois dire que je n'ai pas eu de problème avec ça, puisque je le vois comme un idéal. Pur, certes, irréaliste pour certains, mais personnellement ça m'a fait du bien de la voir et de voir ses discours. Parce que je pense sincèrement qu'elle a raison : oui, l'entraide et la solidarité sont nécessaire, oui, aller vers l'autre nous fera tous mieux vivre, oui, il est plus sympa d'être gentil. C'est le message du film "Everything, everywhere, all at once" : "si rien ne compte, autant être gentil".
En fait, je trouve que la BD est furieusement dans l'air du temps. C'est même dingue de voir que ce sont les mêmes sujets, les mêmes débats, les mêmes problématiques, et la finalité est la même : entraide, solidarité, gentillesse, liens sociaux. Je sais que c'est parfois naïf à entendre, mais le monde capitaliste que nous avons développé se base sur l'exact inverse. D'ailleurs la BD est pour moi l'expression politique d'une lutte capitaliste, et si on peut y voir une candeur, c'est peut-être parce que nous sommes devenus si blasés et désespérés dans notre lutte politique qu'imaginer la gentillesse gagner nous parait désormais absurde. Et ça me parait terrible.
Une série que je recommande, elle a quelques défauts, notamment l'abondance de retours en arrière à partir du tome 3 pour expliquer ce qu'il s'est passé et qui n'est pas toujours indispensable (j'aurais aimé que la femme de Joshua soit développée avant son flashback). Mais en global, la série est portée par un message intelligent sur les dérives d'un monde autoritaire, sécuritaire, glorifiant l'individu au détriment du groupe. Et sa réponse me convient, alors évidemment j'apprécie !
Je ne vais pas trop m’éterniser, tout a été dit sur cette série. Je crois bien que c’est grâce à elle que je me suis (vraiment) intéressé aux comics.
Je trouve l’idée de base toute simple et géniale, à savoir faire côtoyer les personnages de contes dans notre quotidien. Bon depuis ça a été vu maintes fois mais à l’époque total respect, le truc tout bête où l’on se dit pourquoi n’y a t’on pas pensé avant ?
En plus, je trouve que Fables reste bien au dessus de tous ses ersatz. Je ne l’avais jamais possédé jusqu’à sa dernière réédition à prix modiques, ça reste un budget et le format est assez petit mais c’est une série que je relirais avec plaisir systématiquement.
Le dessin est homogène est sans chichi, fluide et lisible avec des détails sympas (enluminures…), et j’adore les couvertures, elles sont vraiment toutes splendides.
Pour les récits ou arcs, on aura ses préférences mais ils y a de nombreux passages cultes. Le scénariste ne se privant pas de toucher à tout, il mêlera intrigues, sous intrigues dans des styles parfois divers avec à chaque fois des personnages attachants (et que l’on connaît tous). En tout cas, il a toujours su relancer mon intérêt malgré des petits passages à vides.
Nota : Ne surtout pas s’arrêter au début de l’aventure, les 2/3 de la première intégrale sont mauvais de chez mauvais, lourd, rébarbatif, ça se cherche niveau équilibre, pas loin de l’inintéressant. La suite aura une toute autre saveur, j’ai été franchement emporté et bluffé avec le cycle des royaumes autour de l’adversaire, puis malgré qq longueurs le reste de l’aventure.
Bon finalement, je me suis un peu éternisé mais à lire pour tout amateur de contes. Perso j’adore j’adhère, un univers d’une richesse sans fin.
Deuxième série de ce mangaka que je lis et deuxième fois que je tombe sur un truc bien délirant !
J'ai quand même pris un certain temps à lire cette série parce que le résumé me faisait un peu lever les sourcils et j'avais peur d'un truc à base de gags sur 'le viol s'est marrant lorsque ça arrive à un mec transformé en femme'. Il y a certes des passages un peu crus que je n'ai pas trop aimés, mais globalement c'est moins pire que ce que j'ai déjà vu ailleurs. Une bonne partie de l'humour repose surtout sur le coté con et débile des personnages. Alors certes c'est une lecture pour public averti et je ne la conseille pas à tout le monde, mais moi j'ai bien aimé et il y a quelque chose de jouissif de voir des violeurs montrés comme des types pathétiques et minables qui finissent par subir le sort qu'ils méritent !
Le scénario est bien construit. L'auteur utilise bien son idée délirante jusqu'au bout. C'est rempli de rebondissements et on n'a pas le temps de s'ennuyer à la lecture des 5 tomes. Le scénario est vraiment prenant parce que je ne savais jamais ce qui allait se passer ensuite. Il y a même des passages étonnamment émouvants. Le dessin est dynamique et expressif comme je l'aime.
Sans lire le nom de l'auteur sur la couverture, on peut penser à un manga venu du Japon en voyant ce livre, lecture de droite à gauche, environ 200 pages et un dessin noir et blanc reprenant tous les codes du genre. Mais c'est bien Camille Broutin qui y est écrit et c'est une jeune autrice française. Son histoire est prenante et bien menée. Les personnages en majorité féminins sont bien campés. Les premières pages peuvent faire penser à une nouvelle histoire sur les aventures au lycée, le harcèlement etc. mais un événement fait basculer dans le fantastique avec de mystérieuses petites sphères survenues d'on ne sait où et surtout mortelles. Les habitants semblent en avoir l'habitude et se cachent le temps que le phénomène se dissipe. Je ne sais pas combien de tomes sont prévus mais il y a un bon potentiel.
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Lady SnowBlood
Cette série allie idéalement deux manières de s'attacher à son intégrité. Pour la tueuse, par la vengeance soit le moyen le plus universel de se réapproprier sa dignité… Pour le Japon, c'est plus compliqué : doit-il copier l'Occident ? Et on voit que cela va très loin dans le manga. Ou lui opposer la violence ? Même remarque. Extrême dans une société extrême, la tueuse tue, mais pas les innocents, ses sentiments et ses sens. Il est donc on ne peut plus logique qu'on la voit beaucoup faire l'amour. Et d'autant plus que croiser la mort amène un besoin accru d'aller vers la vie. Le dessin sait retranscrire tout cela, et même donner de la classe à notre lady, ce qui n'est pas rien. La classe est une sorte de grâce bien difficile à saisir. Que ce manga pulvérise de loin Kill Bill !
Le Secret de Miss Greene
Que chacun tente de saisir sa chance est bien naturel. Ici, une dame au teint clair veut éviter de passer pour noire afin d'exercer un rôle digne de ses capacités. Quoi de mal ? De même, un homosexuel peut se faire passer pour hétérosexuel pour réussir. Problème : dans le cas de la dame, elle risque d'attirer des ennuis à sa famille, mais est-ce sa faute ? C'est le pouvoir qui veut dissuader les gens de couleur de gravir les échelons, alors qu'il est opportun de passer pour Blanc. Doit-on être l'otage de sa famille ? En admettant que la question soit légitime, pourquoi le dénier pour les luttes collectives et non pour la promotion individuelle ? On signale que pour couvrir son secret, ses sœurs ne doivent pas avoir d'enfant, mais quelle aurait été leur vie ? D'humiliés par les Blancs.. Il faut des générations pour que les préjugés diminuent. Cela n'aurait pas été agréable pour eux, et par contre-coup, pour leur mère. Si on dit que l'ambitieuse embarque sa famille dans son destin, c'est aussi ce que font les parents en encore plus décisif. Si le destin de miss Green est plus rare que d'être mère, il ne me semble pas plus discutable moralement. Plus inhabituel, c'est tout. La BD aurait-elle tort de ne pas montrer la lutte collective des Noirs ? Non, pas plus qu'une histoire de lutte collective de faire l'impasse sur les gens réussissant par le masque. Par le Ciel ! Dans un blog où chacun peut prendre un pseudo pour défendre sa liberté et sa sécurité, comment critiquer une dame faisant de même dans un contexte mille fois plus critique ! Refusant de se laisser enfermer dans un destin trop petit pour elle, elle ne juge pas à son goût la lutte collective. Comme sa peau peut la faire passer pour une personne d'ascendance européenne méditerranéenne, elle en profite. Je la plaint d'avoir dû vivre dans un total contrôle de soi. J'en arrive au dessin ! Il rend très bien la vie prudente, on peut dire en apnée, de l'héroïne. Sa famille sait qui elle est mais n'approuve pas son rôle, les Blancs approuvent son rôle mais n'approuverait pas qui elle est, elle est d'une certaine façon, toujours rejetée. Mais elle s'accroche et nous permet d'avoir un point de vue exceptionnel, tant sur les Blancs que sur les Noirs. Bravo !
Aldobrando
Cette œuvre construit un récit initiatique d’une grande justesse, jouant en permanence sur une apparente simplicité pour mieux atteindre une profondeur émotionnelle rare. La naïveté volontaire du ton n’affaiblit jamais le propos : elle sert de filtre pour aborder la violence, la loyauté et la construction de soi sans cynisme. Le scénario, linéaire mais solidement charpenté, maintient une tension douce qui rend la progression d’Aldobrando à la fois crédible et touchante. La fin est vraiment satisfaisante et me laisse un joli sourire aux lèvres. Graphiquement, le style caricatural – qui pourrait sembler déroutant hors contexte – fonctionne ici comme un amplificateur narratif. Les proportions exagérées, les visages expressifs et le traitement chromatique épuré renforcent l’innocence du protagoniste et la dureté du monde qui l’entoure. Le dessin accompagne la montée en maturité du personnage et soutient la dynamique émotionnelle du livre de manière précise, sans surcharge. L’ensemble forme un conte moderne, dur et doux à la fois, capable de toucher un large public. Les lecteurs sensibles aux récits initiatiques, aux univers médiévaux sobres et aux fables morales y trouveront un équilibre rare entre simplicité et profondeur.
1629 ou l'effrayante histoire des naufragés du Jakarta
La série impressionne par la précision de son récit et par la manière dont elle détourne l’attente d’une simple aventure maritime pour explorer une véritable dérive sociétale. Le scénario, extrêmement documenté, maîtrise parfaitement la montée en tension : la catastrophe initiale sert de déclencheur à une dynamique de pouvoir, de manipulation et d’effondrement moral. Les parallèles implicites avec d’autres tragédies historiques – notamment le radeau de La Méduse, où les plus vulnérables subissent la brutalité des puissants – donnent au récit une profondeur supplémentaire sans jamais quitter le cadre strictement narratif. L’ensemble attise constamment la curiosité grâce à la solidité des faits historiques mobilisés. Le dessin, d’une grande précision, renforce l’immersion. Les ambiances, les visages et les corps sont rendus avec un réalisme qui incarne parfaitement chaque personnage. Cette exactitude graphique rend les scènes plus crédibles et accentue la dureté psychologique du récit. On “y est”, tant dans la tension des situations que dans la représentation sans fioritures de la marine de l'époque. Cette adéquation entre style graphique et matière narrative constitue un des points forts majeurs de l’ouvrage. L’ensemble s’adresse clairement à un lectorat appréciant les récits historiques exigeants, les chroniques humaines extrêmes et les constructions scénaristiques très rigoureuses. La force documentaire, la densité thématique et la cohérence entre fond et forme en font une lecture marquante, même si son intensité peut dérouter les lecteurs cherchant un divertissement plus léger.
Le Marsupilami de Frank Pé et Zidrou - La Bête
Cette relecture du mythe du Marsupilami s’impose comme une proposition mature, sombre et cohérente, bien distincte des approches classiques de la franchise. Le scénario, construit avec un sens affirmé du rythme, installe une tension constante sans basculer dans la démonstration. L’univers plus noir, presque naturaliste, donne au récit une densité émotionnelle réelle. Les évolutions des personnages sont traitées avec finesse : chacun progresse par petites touches, sans surenchère, ce qui rend leurs réactions crédibles et leur peine perceptible sans que le récit ne force l’émotion. Graphiquement, l’album atteint une intensité rare. Le trait expressif de Frank Pé, ample et détaillé, parvient à véhiculer immédiatement les émotions des protagonistes comme celles de l’animal. Les ambiances sombres, la gestion des lumières et la mise en scène très physique des corps renforcent le ton dramatique du récit. L’ensemble crée une immersion forte où la beauté du dessin soutient le propos plutôt que de le surcharger. La série peut séduire un public adulte appréciant les réinterprétations ambitieuses, les atmosphères denses et les récits émotionnels sans pathos. Les amateurs de travaux graphiques expressifs y trouveront également un grand intérêt. Ses principaux atouts résident dans la cohérence du ton, la qualité du dessin et la délicatesse apportée à la caractérisation. Les rares limites tiennent à la noirceur générale, qui pourra moins parler à ceux qui attendent un esprit plus aventureux ou léger.
Criminal
Je viens de relire les 7 tomes de cette série, 18 ans après l’avoir découverte… 18 ans durant lesquels j’ai lu bon nombre de polars, sans jamais trouver mieux dans le genre. Le duo Brubaker / Phillips nous propose une série dans la pure tradition des polars noirs américains. Des flics pourris, des trafiquants de drogue tarés, des fusillades… et au milieu de tout ça, des personnages attachants à la personnalité bien développée, comme on en voit rarement dans la BD franco-belge. Les intrigues sont prenantes, bien construites et parfaitement narrées, et varient suffisamment d’un tome à l’autre pour éviter la monotonie. Après, c’est sûr, il faut se faire au dessin typé comics, ce n’est pas du Blacksad… je note d’ailleurs que les 2 seuls posteurs ayant mis 3/5 à ce jour ont eu un blocage à ce niveau-là, ce que je comprends tout à fait. Moi, je trouve le dessin super efficace, et parfait pour représenter la noirceur de l’univers de Crminal. Une superbe série, sans doute la meilleure dans le genre « polar noir ». Je vous conseille aussi tous les spin-off – voir notre thème. Vivement la série télévisée !
Le Pouvoir des innocents
Incroyable, cette série ! Je voulais la lire depuis longtemps et j'ai franchi le pas en la trouvant à la bibliothèque. Et je suis sidéré de sa qualité, parce qu'elle accuse l'âge de 30 ans aujourd'hui ! Luc Brunschwig n'est pas un manche en terme de scénario, je le savais déjà, mais là j'ai été soufflé par la qualité de sa production. Si la BD accuse un certain âge au niveau du dessin qui est perfectible, notamment dans certains gros plans et dans une organisation de page pas toujours très claire dans le premier tome, qui va progressivement s'améliorer au fur et à mesure du temps, si la BD accuse un certain âge niveau dessin donc, le scénario est curieusement très actuel à mon gout. Bien qu'installé dans les politiques des années 90 et de l'insécurité de New-York dans ces années-là, le commentaire de la BD est tout à fait pertinent aujourd'hui encore, et peut-être même plus depuis quelques années. J'avoue que le premier tome m'avait laissé craindre une direction spécifique de la BD : la constatation des échecs politiques dans l'idée de lutter contre la criminalité et l'apparition -et la glorification- du héros vengeur, le justicier individuel qui vient faire régner l'ordre et la loi dans la ville. A l'image d'un Bronson dans "Un justicier dans la ville", quoi. Mais très vite le scénario bifurque et installe des propos politiques que j'ai beaucoup apprécié. Parce que c'est toujours les mêmes aujourd'hui : la sécurité mise en avant au détriment du reste, le détournement d'argent pour financer des campagnes avec magouille derrière, les liens entre politiques et mafias (et riches, mais les riches et les mafieux se confondent vite), l'oubli de tout les pauvres ... Et j'ai beaucoup aimé ce qui est dit dans la BD. Si la plupart des personnages sont gris et que le final flamboyant remet en place les différentes pièces du puzzle, il reste dedans quelques personnages très typés. A commencer par Jessica Rupert. J'ai lu dans plusieurs avis et je comprends que certains n'ont pas aimé ce personnage trop gentil, trop parfait et trop altruiste. Je dois dire que je n'ai pas eu de problème avec ça, puisque je le vois comme un idéal. Pur, certes, irréaliste pour certains, mais personnellement ça m'a fait du bien de la voir et de voir ses discours. Parce que je pense sincèrement qu'elle a raison : oui, l'entraide et la solidarité sont nécessaire, oui, aller vers l'autre nous fera tous mieux vivre, oui, il est plus sympa d'être gentil. C'est le message du film "Everything, everywhere, all at once" : "si rien ne compte, autant être gentil". En fait, je trouve que la BD est furieusement dans l'air du temps. C'est même dingue de voir que ce sont les mêmes sujets, les mêmes débats, les mêmes problématiques, et la finalité est la même : entraide, solidarité, gentillesse, liens sociaux. Je sais que c'est parfois naïf à entendre, mais le monde capitaliste que nous avons développé se base sur l'exact inverse. D'ailleurs la BD est pour moi l'expression politique d'une lutte capitaliste, et si on peut y voir une candeur, c'est peut-être parce que nous sommes devenus si blasés et désespérés dans notre lutte politique qu'imaginer la gentillesse gagner nous parait désormais absurde. Et ça me parait terrible. Une série que je recommande, elle a quelques défauts, notamment l'abondance de retours en arrière à partir du tome 3 pour expliquer ce qu'il s'est passé et qui n'est pas toujours indispensable (j'aurais aimé que la femme de Joshua soit développée avant son flashback). Mais en global, la série est portée par un message intelligent sur les dérives d'un monde autoritaire, sécuritaire, glorifiant l'individu au détriment du groupe. Et sa réponse me convient, alors évidemment j'apprécie !
Fables
Je ne vais pas trop m’éterniser, tout a été dit sur cette série. Je crois bien que c’est grâce à elle que je me suis (vraiment) intéressé aux comics. Je trouve l’idée de base toute simple et géniale, à savoir faire côtoyer les personnages de contes dans notre quotidien. Bon depuis ça a été vu maintes fois mais à l’époque total respect, le truc tout bête où l’on se dit pourquoi n’y a t’on pas pensé avant ? En plus, je trouve que Fables reste bien au dessus de tous ses ersatz. Je ne l’avais jamais possédé jusqu’à sa dernière réédition à prix modiques, ça reste un budget et le format est assez petit mais c’est une série que je relirais avec plaisir systématiquement. Le dessin est homogène est sans chichi, fluide et lisible avec des détails sympas (enluminures…), et j’adore les couvertures, elles sont vraiment toutes splendides. Pour les récits ou arcs, on aura ses préférences mais ils y a de nombreux passages cultes. Le scénariste ne se privant pas de toucher à tout, il mêlera intrigues, sous intrigues dans des styles parfois divers avec à chaque fois des personnages attachants (et que l’on connaît tous). En tout cas, il a toujours su relancer mon intérêt malgré des petits passages à vides. Nota : Ne surtout pas s’arrêter au début de l’aventure, les 2/3 de la première intégrale sont mauvais de chez mauvais, lourd, rébarbatif, ça se cherche niveau équilibre, pas loin de l’inintéressant. La suite aura une toute autre saveur, j’ai été franchement emporté et bluffé avec le cycle des royaumes autour de l’adversaire, puis malgré qq longueurs le reste de l’aventure. Bon finalement, je me suis un peu éternisé mais à lire pour tout amateur de contes. Perso j’adore j’adhère, un univers d’une richesse sans fin.
Ladyboy vs Yakuzas - L'ïle du désespoir
Deuxième série de ce mangaka que je lis et deuxième fois que je tombe sur un truc bien délirant ! J'ai quand même pris un certain temps à lire cette série parce que le résumé me faisait un peu lever les sourcils et j'avais peur d'un truc à base de gags sur 'le viol s'est marrant lorsque ça arrive à un mec transformé en femme'. Il y a certes des passages un peu crus que je n'ai pas trop aimés, mais globalement c'est moins pire que ce que j'ai déjà vu ailleurs. Une bonne partie de l'humour repose surtout sur le coté con et débile des personnages. Alors certes c'est une lecture pour public averti et je ne la conseille pas à tout le monde, mais moi j'ai bien aimé et il y a quelque chose de jouissif de voir des violeurs montrés comme des types pathétiques et minables qui finissent par subir le sort qu'ils méritent ! Le scénario est bien construit. L'auteur utilise bien son idée délirante jusqu'au bout. C'est rempli de rebondissements et on n'a pas le temps de s'ennuyer à la lecture des 5 tomes. Le scénario est vraiment prenant parce que je ne savais jamais ce qui allait se passer ensuite. Il y a même des passages étonnamment émouvants. Le dessin est dynamique et expressif comme je l'aime.
Yon
Sans lire le nom de l'auteur sur la couverture, on peut penser à un manga venu du Japon en voyant ce livre, lecture de droite à gauche, environ 200 pages et un dessin noir et blanc reprenant tous les codes du genre. Mais c'est bien Camille Broutin qui y est écrit et c'est une jeune autrice française. Son histoire est prenante et bien menée. Les personnages en majorité féminins sont bien campés. Les premières pages peuvent faire penser à une nouvelle histoire sur les aventures au lycée, le harcèlement etc. mais un événement fait basculer dans le fantastique avec de mystérieuses petites sphères survenues d'on ne sait où et surtout mortelles. Les habitants semblent en avoir l'habitude et se cachent le temps que le phénomène se dissipe. Je ne sais pas combien de tomes sont prévus mais il y a un bon potentiel.