En voilà une nouvelle série prometteuse ! Une belle brochette d'auteurs aguerris, un univers qui semble ouvrir sur une grande richesse et un dessin assez somptueux : il n'en faut pas plus pour le moment pour me laisser porter.
Alors oui, le parallèle avec la série "Game of Thrones" est plus qu'évident, mais les auteurs semblent l'assumer complètement au vu des clins d’œils plus ou moins subtils qui pointent au fil des pages. En attendant cet univers de fantasy que nous découvrons au moment d'une transition douloureuse repose sur un équilibre précaire où chacun commence à sortir les griffes et ses premiers atouts pour s'imposer comme dominant.
Ce premier tome s'il ne fait que poser un cadre général n'en est pas moins pour autant avare en rebondissements et pas des moindres ! Si certains points du scénario m'ont paru un peu superflus ou redondants (je parle des relations amoureuses "interdites" de certains protagonistes) la suite de la série apportera peut-être un regard plus éclairé et justifié sur ces relations.
En attendant, ne boudons pas notre plaisir, voici une série qui part de la plus belle des manières avec un scénario ambitieux et un dessin magnifique !
*** Tome 2 ***
Ce deuxième opus enfonce le clou en expédiant sur le trône le prétendant pressenti pour qui l'heure de la guerre "préventive" contre ceux qui ne semblent rêver que de vengeance a sonné !
Les intrigues satellites gagnent en profondeur et certains personnages secondaires en épaisseur. On sent que l'univers concocté par nos auteurs s'assoie tranquillement et que les rebondissements sont loin d'être finis.
Côté graphisme, rien à redire, on retrouve le trait maîtrisé de Jérôme Lereculey qui semble s'amuser des cadrages, plans travaillés et autres découpages audacieux.
Il ne nous reste plus qu'à attendre la suite, en la souhaitant de la même tenue !
*** Tomes 3 à 6 ***
C'est un premier cycle détonnant qui nous est proposé ! Après deux premiers tomes qui posaient déjà les jalons d'un univers que les amateurs de Game of Thones ne pouvaient qu'apprécier, le lecteur n'est pas au bout de ses surprises et les rebondissements vont bon train ! Si la pléthore de personnages fait un peu peur au début, la maitrise de la narration et la construction du récit permettent rapidement d'appréhender les liens et les appartenances de chacun. C'est beau, c'est bien écrit, on sent que les auteurs n'ont pas bâclé le travail et que le résultat semble à la hauteur de leur envie de bien faire. Car, que ce soit l'histoire ou le dessin, on nous sort le grand jeu ! Les rebondissements sont légions, tout en s'interrogeant sur cette légitimité du pouvoir et ses différentes formes. C'est plutôt bien vu et amené.
Un très bon cycle !
*** Tomes 7 et 8 ***
C'est par le biais du personnage de Keona, avec qui nous avons fait connaissance dans le premier cycle, que la transition s'opère. Elle rentre dans son royaume de Lys et est heureuse de retrouver sa famille. Mais entre temps les choses ont changé en ville, car la cheffe du clan du Sistre qui régnait sur une bonne partie de la ville est morte et c'est son frère qui assure l’intérim en attendant la libération d'Alissa. Cette dernière vient de passer cinq années derrière les barreaux après s'être fait balancer... Son retour ne passe pas inaperçu, et d'autres clans ont d'ailleurs bien senti cet affaiblissement du Sistre et vont tenter leur chance...
La transition vers ce nouveau cycle se fait donc en douceur grâce à Keona, et c'est l'occasion pour le lecteur de découvrir un nouvel univers. Après les félins, nous voici donc catapultés chez les singes. Et la première chose qui frappe c'est le système matrilinéaire de sa société. Et là où les auteurs sont forts c'est qu'ils poussent le vice jusqu'à donner la prédominance féminine jusque dans le langage, ce qui donne des dialogues assez surréalistes et savoureux au fil pages, les accords grammaticaux et d'orthographe se faisant au féminin !
Côté dessin, changement d'ambiance aussi, Lys est un monde très inspiré du Japon ou de la Chine médiévale. Les architectures sont sublimes et les costumes ne sont pas en reste.
L'histoire évolue autour de plusieurs groupes de personnages ; Keona bien sûr et son retour chez sa mère, la reine du royaume ; Alyssa, la cheffe du clan du Sistre ; un duo de deux jeunes étudiantes en archéologie en quête d'une ville légendaire disparue et enfin, Shin Taku, nouveau responsable de la police locale fraichement débarqué dans la cité. Tout cela est agréablement croisé dans la construction du récit, reste à savoir quand les interactions vont s'opérer.
Ce second cycle bien rythmé est donc très bien parti ! Vivement la suite !
*** Tome 9 ***
Dans ce 9e opus, les intrigues croisées de nos protagonistes se poursuivent et avancent !
Le clan du Sistre est en position de faiblesse après les attaques répétées et ciblées menées par le Coucal : entrepôts, salles de jeu, distilleries, jusqu'à Alissa la cheffe de clan. Cette dernière se lance dans une opération de grand ménage au sein du clan qui ajoute encore à la précarité du clan. Le Sistre si puissant est aux abois, et l'odeur du sang commence à attiser les convoitises des autres clans, toujours prompts à achever la bête à terre... Mais Alyssa a plus d'un tour dans son sac et est prête à tout pour renverser la situation...
De leur côté, nos deux étudiantes en archéologie vont avoir la chance d'être secourues et d'aller de surprises en surprises. Quant à Keona, elle commence à se réhabituer à sa vie de palais, même si son amour lointain lui occupe toujours l'esprit.
La série continue donc d'avancer tranquillement et efficacement, de façon toujours aussi soignée, que ce soit dans la construction des récits croisés que graphiquement. En effet, que ce soit la cité d'Alysandra ou la jungle, les décors et les détails sont toujours aussi riches offrant au lecteur un réel plaisir et un dépaysement.
*** Tomes 10 à 12 ***
Cette fin de cycle nous réserve encore bien des drames et des surprises pour notre plus grand bonheur !
Une belle apothéose à la Pyrus qui voit le dénouement sanglant de cette guerre de clans orchestrée par Alissa. La toute fin nous réserve une nouvelle surprise de taille qui clos parfaitement ce cycle pour mieux l'ouvrir sur le prochain à venir...
Voilà une série qui a su au fil de ses deux premiers cycles s'imposer comme un futur classique, et qui loin de s'essouffler, ne fait qu’attiser notre curiosité pour le prochain cycle à venir
*** Tome 13 ***
Et voici parti pour un 3e cycle !
Après un 1er cycle qui nous avait fait découvrir l'univers des 5 Terres en commençant par Angleon, capitale des félins, un second qui nous avait embarqué dans les rivalités et autres trahisons du Royaume de Lys et de ses singes, voici venir le temps des ours et leur soif de vengeance ! Fini les intrigues, et sous intrigues : les ours et leurs alliers chiens et loup sont des bourrins, et Angleon va le sentir passer !
Mais cela serait aller trop vite en besogne que de résumer ce début de cycle à cet assaut, car "Les 5 Terre" nous a baigné dans (le sang de) ses trahisons et autres fourberies, et ce 3e cycle ne devrait pas être en reste... Entre les alliances fragiles d'Arnor et ses tribus ours, loups et chiens, et la descendance du roi (Genkin) rentré au pays après ses années d'otage à Angleon, on sent bien que tout le monde évolue sur une glace des plus fragiles et qu'à tout moment cette souffreteuse harmonie peut voler en éclats.
Côté dessin, toujours rien à redire, c'est toujours aussi efficace et agréable, les personnages anthropomorphes toujours aussi expressifs, décors et costumes finement travaillés : du bel ouvrage !
Alors maintenant, nous revoilà parti pour une longue attente entre chaque tome ! Car cette série reste des plus addictive quand on est plongé dedans !
*** Tome 14 ***
Arf, bon, ba ce 2e tome de ce 3e cycle doit être le premier à me décevoir...
J'étais déjà un peu moins enthousiaste avec le début de ce 3e cycle après les deux très bons premiers, mais je m'étais dit que c'était la mise en jambe, mais après avoir refermé ce 2e tome, j'avoue ne pas être fan de la trame qui s'annonce et de ses rivalités internes chez nos amis les ours, chiens et loups.
Côté dessin, c'est aussi avec ces personnages que j'ai le plus de mal. Autant j'avais trouvé que les 2 premiers cycles géraient à merveille la distinction des personnages anthropomorphes, autant là j'ai trouvé parfois difficile de m'y retrouver, surtout chez les ours.
Alors espérons que le prochain tome redonnera du peps à ce cycle, car malgré tout cela reste une très bonne série et cela serait dommage de commencer brasser de l'air après deux cycles des plus réussis.
Tiens, une nouvelle série de Jean-Luc Istin... Ça faisait longtemps... Et encore une série concept de SF ? Mmmouais... Et ? Ba le sieur sait y faire et nous propose une nouvelle fois une série qui démarre sur les chapeaux de roue ! Installez-vous confortablement, sortez le pop-corn... C'est parti !!!
Cette nouvelle série nous propose de suivre une équipe de personnages cyborg que nous allons découvrir au fil des tomes. Ce premier opus nous met sur le pas de la jeune Yuko, née avec un sévère handicap : elle n'a pas de bras (nann j'vous fait pas la blague sur le chocolat :P ). C'est avec celui qui l'a élevé, Akira, un maître en art martiaux qui forme la garde rapprochée du dictateur Tudor, que Yuko va grandir et apprendre à se battre. La novelle loi imposant l'euthanasie des personnes "imparfaites" va chambouler leur petit train-train et faire d'eux des fuyards avec une forte prime sur leur tête : tous les gangs de la mégalopole sont maintenant à leurs trousses...
Franchement, je partais assez circonspect en attaquant ma lecture, redoutant une énième série du genre. Mais les auteurs sont bons... très bons ! Et on se retrouve vite happé par cette histoire, très rythmée, poussée par une narration survitaminée dans laquelle nos personnage charismatiques vont évoluer. Le dessin de Kael Ngu fait plus que le job, même si on est sur un trait relativement classique.
En tout cas, voilà une nouvelle série B qui démarre plus que bien et nous promet de bons moments de lecture et de l'action à tout va !
Vivement la suite !
*** Tome 2 ***
Lancé sur les chapeaux de roue, "Cyborgs" poursuit sur sa lancée et complète cette équipe de cyborgs féminins rebelles avec l'histoire de Sam.
Gravement blessée suite à l'attentat qui a tué sa mère, Sam va devoir subir de lourdes opérations pour pouvoir remplacer jambes et bras. Et ce n'est que le début d'une looonngue période de rémission et d’acclimatation à ses nouveaux membres cybernétiques pour pouvoir parvenir à son objectif : la vengeance ! Car sa mère n'était pas n'importe qui ; elle était l'adversaire principale aux élections de Tudor, celui qui règne maintenant en dictateur...
L'intrigue se poursuit donc en faisant toujours autant d'étincelles, tout en posant de nouveaux jalons et personnages intéressants. Entre les scènes d'action, les nouvelles révélations et des dialogues cinglants, on profite tranquillou du spectacle percutant qui nous est proposé, bien accrochés à notre pot de popcorn.
Le dessin de Kael Ngu reste toujours aussi efficace et nous immerge parfaitement dans cet univers futuriste en gérant parfaitement les scènes d'action.
Vivement la suite !
C'est le 2e album que je lis dans cette nouvelle collection "Wave" de chez Delcourt, et c'est encore une bonne surprise. Ciblée Young Adult, cette nouvelle collection joue à merveille sur des sujets très contemporains, tout en sachant aller piocher dans des registres beaucoup plus classiques, ici les loups-garous.
La couverture est assez équivoque en ce sens, sans spoiler pour autant, restait à savoir comment cette touche de fantastique allait être intégrée dans notre monde contemporain et si ça tenait la route. Pour le coup, c'est plutôt réussi.
Becca emménage à San Francisco et doit donc faire son entrée dans un nouveau lycée. Toujours dur de débarquer dans un nouvel établissement et de s'intégrer, surtout dans LA bande de copines les plus en vues du lycée. C'est pourtant ce qui va se passer suite à un concours de circonstance en apparence anodin... Mais bien évidemment, son intégration au groupe n'était pas fortuite et il va maintenant falloir en assumer le prix... Ajoutez à cela une très légère touche de romance très en phase avec notre temps et une utilisation de la lycanthropie ingénieuse dans notre monde moderne, et cet album se laisse avaler et digérer en une bouchée.
Si le dessin de Lisa Sterle m'a un peu surpris au début par un aspect minimaliste, je l'ai trouvé très juste dans les expression des personnages. Grace au récit fluide découpé en chapitres on est rapidement pris par l'histoire qui tient ses promesses jusqu'au bout.
Un bon album bien calibré qui colle parfaitement à cette nouvelle collection ; les amateurs du genre devraient se régaler !
Chacun de mes pas me rapproche de mon idéal !
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Ce tome constitue une biographie de Sarah Bernhardt (1844-1923). Son édition originale date de 2020. Il a été réalisé par Eddy Simon pour le scénario, et par Marie Avril pour les dessins et les couleurs. Il comprend cent-soixante-huit pages de bande dessinée. Il se termine avec une photographie de l’actrice, et un article de trois pages, intitulé Sarah Bernhardt chronologie, retraçant rapidement des moments emblématiques de la vie de l’actrice, agrémenté d’une petite photographie d’elle dans son rôle de Fedora. Ces auteurs ont également réalisé l’adaptation du roman de Saphia Azzedine : Confidences à Allah (2015).
Acte I L’insoumise. En 1847, à la campagne, de part et d’autre d’une étroite rivière, son cousin incite Sarah à sauter par-dessus, en la houspillant, lui disant qu’il parie qu’elle n’osera jamais, parce qu’elle est une trouillarde de fille. De son côté, l’enfant se convainc elle-même qu’elle va y arriver, et elle finit par prendre son élan pour sauter. Un peu plus tard, Camille et Sarah se trouvent devant la mère du premier. Celle-ci exige qu’ils lui expliquent ce qui s’est passé. Sarah dit que c’est de la faute de son cousin si elle a les genoux écorchés et si ses habits sont sales, c’est Camille qui l’a provoquée. Sa tante la sermonne : Une jeune citadine ne doit pas se comporter comme une vulgaire campagnarde, ce n’est pas convenable ! Sarah rétorque vivement qu’elle recommencera quand même, si on la défie encore. Et elle fera toute sa vie ce qu’elle a envie de faire ! Quand même !
Le cinq janvier 1871, pendant le siège de Paris, Sarah Bernhardt travaille comme infirmière auprès des blessés. Alors qu’elle panse un soldat alité, une autre infirmière vient la chercher pour lui indiquer qu’un certain comte de Kératry qui se dit être le nouveau préfet de police demande à la voir. Pour sortir, elle traverse les différentes pièces du théâtre transformé en hôpital, tout en maugréant : Maudite engeance que la guerre… Une fois dehors, elle retrouve le préfet : Émile de Kératry. Celui-ci commente la cargaison de la charrette qui est en train d’être déchargée : Comme promis, même si cela ne s’est pas fait sans mal, voilà la livraison de vivres, vins, biscuits, café œufs… Sarah lui répond que cela devrait permettre de nourrir ses blessés pendant quelque temps, et elle demande les dernières nouvelles du front des horreurs. Il lui répond d’abord des banalités, puis à la demande de la jeune femme, il rentre dans le détail : En vérité la situation n’est guère brillante. Depuis la reddition de l’empereur, c’est la déroute : chaque jour, les troupes françaises battent en retraite et perdent du terrain sous la férocité des assauts de l’armée prussienne. Léon Gambetta et son gouvernement de défense nationale tentent bien d’organiser la résistance au nord de la Loire, mais la cause…. Semble bel et bien perdue ! Il conclut : Paris sera sans doute très bientôt une forteresse assiégée par les bataillons de Von Bismarck. Il suggère à Sarah de rejoindre sa famille en Normandie, personne ne l’en blâmera. Elle répond avec fougue : Jamais de la vie !
Dans l’inconscient collectif, Sarah Bernhardt est restée comme une actrice de légende, et pour ceux qui en ont déjà entendu parler, également comme une actrice ayant connu le succès aux États-Unis, ayant su faire fructifier son image, et étant enterrée au cimetière du Père-Lachaise. Les autrices font des choix dans leur approche biographique. De débuter par une courte scène de sa jeune enfance pour montrer un caractère bien trempé et une détermination en réaction à son cousin qui lui dit qu’elle est incapable de faire quelque chose : c’est sûr elle ne se laissera plus jamais dicter sa conduite, ou imposer des limites. Puis le récit passe de 1847 à 1871, en omettant une phase de la vie de Sarah, celle où la police des mœurs la classe parmi les dames galantes, où elle mène une vie de demi-mondaine entretenue par des clients généreux. Autre parti pris : évoquer plutôt sa vie privée que la pratique de son art, que ce soit son apprentissage ou ses performances. Pour autant, cette biographie montre comment cette dame mène sa vie, majoritairement sur le plan professionnel. En fonction de ses attentes, le lecteur peut se trouver quelque peu décontenancé par cette approche, surtout s’il venait pour une facette particulière telle sa vie mondaine, ou ses qualités d’actrice. D’un autre côté, il constate que le récit est d’une grande richesse, abordant de nombreuses facettes d’une vie particulièrement remplie, que ce soit en rencontres, en voyages, ou en entreprises professionnelles. Il n’y avait pas la place de tout mettre.
Cette biographie est racontée du point de vue de l’intéressée, amenant ainsi le lecteur à prendre fait et cause pour elle, à pouvoir découvrir ses motivations, ses réactions émotionnelles, la conception et la réalisation de ses projets, ses convictions et comment elle les met en pratique. En effet, il s’agit d’une vie riche et dense. Bernhardt se dévoue comme infirmière pour les blessés du siège de Paris pendant la guerre franco-allemande de 1870. Elle ira jouer pour les poilus au parc de Commercy dans la Meuse le dix mai 1916. Elle se fera même emmener au plus près des tranchées alors que son nom figure sur la liste des otages que les Allemands veulent capturer. Elle fera plusieurs voyages, d’abord à Londres en 1878, puis à Louisville aux États-Unis, traversant les étendues sauvages en train. Là encore, le lecteur peut se trouver surpris que les autrices ne développent pas plus cette odyssée, tout en comprenant qu’il aurait fallu y consacrer un tome entier. Au cours de sa vie et de sa carrière, elle va rencontrer ou travailler avec de nombreuses personnalités : Léon Gambetta (1838-1882), Victor Hugo (1802-1885), Mounet -Sully (1841-1916, acteur de théâtre), Louise Abbema (1853-1927, peintre, graveuse, illustratrice, sculptrice), Oscar Wilde (1854-1900), Alfons Mucha (1861-1939), Edmond Rostand (1868-1918), sans même parler de ses amants ou d’autres auteurs de théâtre.
L’illustration de couverture attire l’œil, mettant en avant le monde intérieur qui emplit l’esprit de cette créatrice. Puis le lecteur découvre celle en pleine page servant d’annonce de l’acte I, avec le titre L’insoumise. Il va ainsi admirer une douzaine, pour les trois actes, l’entracte, et des tableaux intermédiaires : L’insoumise, L’étoile, Memento Mori, L’indomptable, Barnum, L’aventurière, Fantasque, La muse, Je me quitte, L’impératrice, One of us. La dessinatrice reprend le principe des affiches pour une composition simple mettant en valeur l’actrice dans une situation exotique ou métaphorique, ce qui constitue un écho à la fois à ses rôles, à la fois à la phase de sa vie. Vient ensuite la première scène de narration séquentielle proprement dite : le lecteur découvre les traits de contours fins et fragiles, esquissant rapidement les formes, la représentation étant réalisée ensuite en couleur directe. Cela donne un ressenti assez complexe, entre simplicité des formes, évidence des situations, et nuances émotionnelles apportées par les couleurs. Le lecteur passe ainsi de l’insouciance teintée de l’intense gravité de l’enfance, à l’horreur des cadavres sur le champ de bataille enneigé, à des dialogues de personnages sur fond uni comme sur une scène sans décor.
Les épisodes de la vie de Sarah Bernhardt se révèlent d’une grande richesse, au point que leur contenu en vient à éclipser le reste. Toutefois, s’il y prête attention, le lecteur voit que la dessinatrice met en œuvre de nombreuses techniques narratives variées, ce qui enrichit encore le récit. Quelques exemples : page neuf, une planche silencieuse, dans laquelle Sarah se regarde en passant dans un miroir, évoquant l’importance de son apparence pour son métier d’actrice. Page quatorze : le théâtre des opérations, la scène du théâtre se trouvant devant la scène de bataille. Les superbes paysages de montagne lors d’un voyage en train, une composition en double page de représentations théâtrales avec pour fond chaque livret faisant apparaître le titre et l’auteur, deux spectres semblant flotter autour de Sarah dans la rue par un temps brumeux pour évoquer l’incertitude de l’identité de son père, Sarah promenant son improbable ménagerie dans les rues de Londres, des coupures de presse retraçant les moments les plus improbables de sa première tournée aux États-Unis, un fac-similé d’affiche de Gismonda par Alfons Mucha, et quelques moments de représentations en particulier Bernhardt dans le costume de l’Aiglon pour la tirade de Flambeau.
En fonction de sa familiarité avec la vie de l’actrice, le lecteur en découvre de belles. Il voit se dessiner le portrait d’une artiste ambitieuse. Il constate par l’intermédiaire de son succès et des louanges dressées par des personnalités de référence, que ses qualités d’actrice sont remarquables, voire exceptionnelles. Les autrices montrent un être humain animé par la passion du théâtre, veillant à rester indépendante, et maître de ses choix. En creux, apparaît sa capacité à faire sa promotion, par des décisions innovantes : le recours à la photographie, l’image choc comme dormir dans son cercueil, la présence d’esprit de s’attacher les services d’Alfons Mucha, et même l’apparition de produits dérivés, parfois initiés par elle, parfois par des profiteurs avec le sens du commerce. Elle apparaît comme une artiste faisant ses preuves dans des pièces de moindre importance, dans des classiques, puis dans des œuvres contemporaines, certaines engagées, implication qui se retrouve dans son soutien de Louise Michel (1830-1905) militante anarchiste, et du capitaine Alfred Dreyfus (1859-1935) accusé à tort d’être un espion au service de l’Empire allemand. Le point de vue narratif est intentionnellement partie prenante pour la Divine, sans regard critique : tout en étant conscient de ce choix, le lecteur éprouve une admiration pour une artiste aussi formidable dans son art, dans ses convictions, dans son énergie pour entreprendre, dans sa démesure.
Quelle put bien être la vie de Sarah Bernhardt pour passer à la postérité ? Les autrices racontent une démarche artistique incroyable, une existence débordant de succès et de prises de risque, une vie personnelle tout aussi riche. La narration visuelle rend compte de cette diversité avec une élégance légère et pleine d’émotions. Les pages se tournent toutes seules, et le lecteur termine l’ouvrage surpris par la densité de ce qu’il a vécu. Tourbillonnant.
Dans un univers qui évoque celui des Dark Souls, peuplé de sinistres guerriers géants servant de champions à d'impitoyables seigneurs en guerre, les humains ne sont guère plus que de la piétaille sacrifiable. Bianca, jeune apprentie forgeronne, voit son destin basculer le jour où son maître et protecteur est tué. Elle découvre alors une part cachée de ses origines et décide de fuir l'empire sombre dans lequel elle a toujours vécu. Avec son maître, elle a forgé une épée magique capable de ranimer le Birdking, un ancien roi guerrier devenu son protecteur. Cette armure animée, que l'on pourrait croire vide, semble pourtant abriter une âme...
Birdking s'inscrit dans une dark fantasy efficace, au rythme prenant, proche d'un bon feuilleton dont on veut connaître la suite. Le style graphique, moderne et accessible, rappelle celui de certains webcomics. Le trait, simple, pourrait faire penser à une série jeunesse, mais le ton reste sombre et l'ambiance oppressante. Si la technique montre quelques limites, l'auteur les compense habilement par l'intégration de mots dans les cases pour traduire l'émotion ou l'action, ce qui s'avère souvent utile pour la lisibilité de certaines scènes.
On explore un monde implacable, où le manichéisme n'est qu'apparence tant le danger rôde à chaque coin de page et où les humains ne sont que des pièces d'un vaste jeu de pouvoir. Les références sont nombreuses, tirées à la fois du jeu vidéo et de l'animation, avec notamment un passage souterrain qui évoque clairement la Moria de Tolkien. L'intrigue débute de façon classique, mais la richesse de l'univers apporte la dose de mystère et d'originalité nécessaire pour captiver. Même si certains rebondissements sont prévisibles, l'histoire parvient à surprendre et à maintenir l'intérêt. Le rythme soutenu rend la lecture fluide et addictive.
Après trois tomes, et en attendant un quatrième encore en préparation, j'ai clairement envie de poursuivre cette aventure.
Même si je n'ai pas lu les enquêtes précédentes des auteurs comme celui sur les algues vertes par exemple, j'ai emprunté cet album dès que je l'ai vu pour 2 raisons. D'abord le souvenir de bons avis émis ici et aussi parce que j'ai depuis l'enfance entendu parler du remembrement dans nos campagnes sans en connaitre l'histoire enfouie.
En effet ce n'est pas seulement quelques talus et haies qui ont été arrachées afin de rationaliser des terrains, ce sont des actes administratifs faits de manière abrupte, sans véritable conduite de changement, sans tenir compte des doléances des uns et des autres, des fermiers souvent peu éduqués et aptes à se défendre, qui se retrouvent balayées d'un trait de plume.
Cela a donné lieu à des échanges de parcelles, certains étant gagnants et d'autres, la plupart, perdants notamment en terme de pommiers et autres arbres fruitiers qui assuraient une partie de leur subsistance. Cela a conduit à des actes de résistance, des drames, des suicides et des familles voisines qui ne se parlent plus encore des décennies après convaincus par l'injustice d'une part et le favoritisme dont d'autres auraient profité, revendant par la suite certaines terres pour en faire des parcelles constructibles. C'est d'autant plus marquant que je connais certains des lieux bretons évoqués.
On pourrait sans doute reprocher un éventuel manque de contrepoint. On a certainement poussé trop loin l'industrialisation et la technologie autour de l'agriculture et même si on commence à se rendre compte des dégâts écologiques que cela a pu provoquer, je pense que le temps des petites fermes familiales avec 5 vaches et un hectare de terrain est définitivement révolu.
Peut-on exister après avoir réalisé un chef d’œuvre du niveau de Bone?
Jeff Smith a démontré il y a plus de 10 ans désormais que c’était tout à fait possible.
RASL est un ovni incroyablement dense qui réussit à faire peur, à émouvoir, à faire rire, etc.
Mais pourquoi, pourquoi Jeff ne produit il plus rien ou presque depuis tout ce temps… Quelle tristesse. Ce type est un génie du 9eme art.
Sunstone est une série pour le moins atypique.
Pas tant pour son sujet, le BDSM, que pour son traitement de ce dernier. Là où l'on pourrait s'attendre à une simple histoire érotique avec une intrigue d'amour en prime on retrouve en fait une histoire d'amour avant tout, avec ses joies sincères, ses problèmes, sa complexité, une histoire d'amour bien réelle quoi. C'est ça qui frappe dans cette histoire : l'envie de se rapprocher le plus possible d'un sentiment de réel, y compris dans son approche érotique. Ici, on parle de ce qu'il y a derrière les relations sexuelles, ce qu'il y a aussi derrière l'image du BDSM, on s'éloigne de la représentation enjolivée, on se rapproche des gens qu'il y a derrière, avec leurs vies, leurs attentes et leurs angoisses. On nous parle de tous ces gens passionnés de jeux de rôles, de restrictions, de contrôle, sans diaboliser où enjoliver la chose. On nous parle avant tout des gens, voilà.
Bon, bon, "l'histoire de fesses nous parle tout autant des fesses que des corps attachés au bout", certes, mais quid de l'histoire d'amour ? Elle est bonne, très bonne. En tout cas suffisamment bonne pour me faire lâcher la larmichette sur la fin (étant très émotive, cette information a une valeur toute relative, je vous mets en garde). Comme dit plus haut les personnages sont humains, semblent réels, on ne nous cache jamais leurs problèmes terre-à-terre, on nous parle toujours de leurs vies, leurs émotions, leurs ressentis, on apprécie les voir rire, se charrier, on souffre lorsqu'ils souffrent, … Bref, je ne vais pas vous faire la totale, vous voyez le topo : tous les personnages sont attachants (rire).
Un défaut cependant.
Bon, il est unique mais j'aurais sans doute un peu de mal à l'expliquer, alors accrochez vous.
J'ai un grand respect pour le travail graphique de Stjepan Sejic, je trouve ses dessins magnifiques et son travail des expressions saisissant. Pourtant, il y a toujours un petit truc qui me chiffonne dans chacune de ses histoires, c'est cet étrange ressenti qu'il fétichise les relations saphiques. Entendons-nous bien, il traite chacun des personnages de ses histoires avec le même sérieux que dans cette série, ils semblent toujours humains et restent attachants, donc ses personnages saphiques restent bons. Cependant je ne peux pas m'empêcher d'être toujours un peu… disons gênée… lors de mes lectures. Je ne sais pas, sans doute est-ce le fait qu'il dessine toujours ses personnages féminins avec des plastiques parfaites (en tout cas "parfaites" dans les canons de beautés d'hommes hétéros actuels), ou bien alors c'est le fait qu'il semble beaucoup s'intéresser à la question de la sexualité des couples saphiques (je vous jure, cela revient souvent dans ses récits), en tout cas je ne peux m'empêcher d'avoir une guerre interne à chacune de mes lectures en me demandant si les relations saphiques qu'il dépeint entrent dans la case "bonne représentation" ou bien "fétichisme".
Bref, défaut mis à part, Sunstone est une série spéciale, dans le sens où l'on ne s'attend pas à un traitement si sérieux et humain du sujet de la sexualité (surtout en ce qui concerne les kinks) dans une œuvre qui reste tout de même dans sa forme un récit érotique. C'est aussi une série spéciale pour moi, car je l'avais découverte en ligne par hasard durant la fin de mon adolescence, à peu près au même moment où je me posais de nombreuses questions sur ma sexualité (et où, peut-être, je lorgnais légèrement sur l'univers du BDSM, mais ce serait là une autre histoire que je vous épargnerai). Aujourd'hui je serais sans doute plus critique sur cette œuvre que lors de ma découverte, encore une fois mon incapacité à savoir si la série fétichise ou non sa relation centrale façon "catégorie lesbienne sur pornhub - mais avec des sentiments autour" me parasite un peu mes relectures, mais malgré tout la série reste bonne et sincèrement surprenante.
Je dédicace bien évidemment cet avis à Gruizzli, je m'étais engagée à aviser la série et c'est maintenant chose faite.
PS : Papa, si tu passes par là, ignore le passage où je parle d'avoir lu pour la première fois cette BD étant ado. Ta fille était chaste, tu m'entends ? Chaste !
C'est une œuvre majeure avec en préface la définition du "fantastique".
Les temps se superposent dans cette guerre de 14. Absurdité de la guerre. Le monde du malheureux Hans von Berlichingen bascule dans une autre monde où différents personnages incarnent une manière de mourir.
Je n'ai jamais montré d'appétence particulière pour le genre "strictement pour adulte". Je fuis même tout ce qui est hentai.
Néanmoins il faut s'intéresser à tout, pour pouvoir juger de la chose...
Je me suis donc lancé dans l'intégrale de cette Chambre 121 et je dois reconnaitre avoir été agréablement surpris.
Le réceptionniste d'un hôtel est en charge de satisfaire les demandes "particulières" des client(e)s de la chambre 121. Voilà pour le pitch, et si ce n'est pas folichon je n'ai pu m'empêcher de penser que cela aurait fait un bon porno (à condition de mettre un peu de moyen dans la production).
Les aventures de notre bonhomme sont assez variées, au gré des fantasmes de l'auteur, et il donne volontairement et allégrement de sa personne. Par contre elles ne sont forcément toutes de la même qualité et de fait ne suscitent pas chez le lecteur le même émoi.
J'ai trouvé les dessins agréables et bien faits avec quand même une préférence pour les premiers chapitres. Inutile de dire qu'ils sont très explicites.
J'ai beaucoup moins aimé les 6 petits récits supplémentaires (avant la chambre 121) qui relevaient plus à mon goût du porno amateur. Du genre "Oh excusez moi Madame, je me suis pris les pieds dans le tapis et suis tombé la b... en avant sur votre c.." Voyez le genre ...
Au final Chambre 121 constitue donc une vraie œuvre pornographique, assez agréable à lire si on découpe par petit bout la lecture.
En France, les livres sont au même prix partout. C'est la loi !
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Les 5 Terres
En voilà une nouvelle série prometteuse ! Une belle brochette d'auteurs aguerris, un univers qui semble ouvrir sur une grande richesse et un dessin assez somptueux : il n'en faut pas plus pour le moment pour me laisser porter. Alors oui, le parallèle avec la série "Game of Thrones" est plus qu'évident, mais les auteurs semblent l'assumer complètement au vu des clins d’œils plus ou moins subtils qui pointent au fil des pages. En attendant cet univers de fantasy que nous découvrons au moment d'une transition douloureuse repose sur un équilibre précaire où chacun commence à sortir les griffes et ses premiers atouts pour s'imposer comme dominant. Ce premier tome s'il ne fait que poser un cadre général n'en est pas moins pour autant avare en rebondissements et pas des moindres ! Si certains points du scénario m'ont paru un peu superflus ou redondants (je parle des relations amoureuses "interdites" de certains protagonistes) la suite de la série apportera peut-être un regard plus éclairé et justifié sur ces relations. En attendant, ne boudons pas notre plaisir, voici une série qui part de la plus belle des manières avec un scénario ambitieux et un dessin magnifique ! *** Tome 2 *** Ce deuxième opus enfonce le clou en expédiant sur le trône le prétendant pressenti pour qui l'heure de la guerre "préventive" contre ceux qui ne semblent rêver que de vengeance a sonné ! Les intrigues satellites gagnent en profondeur et certains personnages secondaires en épaisseur. On sent que l'univers concocté par nos auteurs s'assoie tranquillement et que les rebondissements sont loin d'être finis. Côté graphisme, rien à redire, on retrouve le trait maîtrisé de Jérôme Lereculey qui semble s'amuser des cadrages, plans travaillés et autres découpages audacieux. Il ne nous reste plus qu'à attendre la suite, en la souhaitant de la même tenue ! *** Tomes 3 à 6 *** C'est un premier cycle détonnant qui nous est proposé ! Après deux premiers tomes qui posaient déjà les jalons d'un univers que les amateurs de Game of Thones ne pouvaient qu'apprécier, le lecteur n'est pas au bout de ses surprises et les rebondissements vont bon train ! Si la pléthore de personnages fait un peu peur au début, la maitrise de la narration et la construction du récit permettent rapidement d'appréhender les liens et les appartenances de chacun. C'est beau, c'est bien écrit, on sent que les auteurs n'ont pas bâclé le travail et que le résultat semble à la hauteur de leur envie de bien faire. Car, que ce soit l'histoire ou le dessin, on nous sort le grand jeu ! Les rebondissements sont légions, tout en s'interrogeant sur cette légitimité du pouvoir et ses différentes formes. C'est plutôt bien vu et amené. Un très bon cycle ! *** Tomes 7 et 8 *** C'est par le biais du personnage de Keona, avec qui nous avons fait connaissance dans le premier cycle, que la transition s'opère. Elle rentre dans son royaume de Lys et est heureuse de retrouver sa famille. Mais entre temps les choses ont changé en ville, car la cheffe du clan du Sistre qui régnait sur une bonne partie de la ville est morte et c'est son frère qui assure l’intérim en attendant la libération d'Alissa. Cette dernière vient de passer cinq années derrière les barreaux après s'être fait balancer... Son retour ne passe pas inaperçu, et d'autres clans ont d'ailleurs bien senti cet affaiblissement du Sistre et vont tenter leur chance... La transition vers ce nouveau cycle se fait donc en douceur grâce à Keona, et c'est l'occasion pour le lecteur de découvrir un nouvel univers. Après les félins, nous voici donc catapultés chez les singes. Et la première chose qui frappe c'est le système matrilinéaire de sa société. Et là où les auteurs sont forts c'est qu'ils poussent le vice jusqu'à donner la prédominance féminine jusque dans le langage, ce qui donne des dialogues assez surréalistes et savoureux au fil pages, les accords grammaticaux et d'orthographe se faisant au féminin ! Côté dessin, changement d'ambiance aussi, Lys est un monde très inspiré du Japon ou de la Chine médiévale. Les architectures sont sublimes et les costumes ne sont pas en reste. L'histoire évolue autour de plusieurs groupes de personnages ; Keona bien sûr et son retour chez sa mère, la reine du royaume ; Alyssa, la cheffe du clan du Sistre ; un duo de deux jeunes étudiantes en archéologie en quête d'une ville légendaire disparue et enfin, Shin Taku, nouveau responsable de la police locale fraichement débarqué dans la cité. Tout cela est agréablement croisé dans la construction du récit, reste à savoir quand les interactions vont s'opérer. Ce second cycle bien rythmé est donc très bien parti ! Vivement la suite ! *** Tome 9 *** Dans ce 9e opus, les intrigues croisées de nos protagonistes se poursuivent et avancent ! Le clan du Sistre est en position de faiblesse après les attaques répétées et ciblées menées par le Coucal : entrepôts, salles de jeu, distilleries, jusqu'à Alissa la cheffe de clan. Cette dernière se lance dans une opération de grand ménage au sein du clan qui ajoute encore à la précarité du clan. Le Sistre si puissant est aux abois, et l'odeur du sang commence à attiser les convoitises des autres clans, toujours prompts à achever la bête à terre... Mais Alyssa a plus d'un tour dans son sac et est prête à tout pour renverser la situation... De leur côté, nos deux étudiantes en archéologie vont avoir la chance d'être secourues et d'aller de surprises en surprises. Quant à Keona, elle commence à se réhabituer à sa vie de palais, même si son amour lointain lui occupe toujours l'esprit. La série continue donc d'avancer tranquillement et efficacement, de façon toujours aussi soignée, que ce soit dans la construction des récits croisés que graphiquement. En effet, que ce soit la cité d'Alysandra ou la jungle, les décors et les détails sont toujours aussi riches offrant au lecteur un réel plaisir et un dépaysement. *** Tomes 10 à 12 *** Cette fin de cycle nous réserve encore bien des drames et des surprises pour notre plus grand bonheur ! Une belle apothéose à la Pyrus qui voit le dénouement sanglant de cette guerre de clans orchestrée par Alissa. La toute fin nous réserve une nouvelle surprise de taille qui clos parfaitement ce cycle pour mieux l'ouvrir sur le prochain à venir... Voilà une série qui a su au fil de ses deux premiers cycles s'imposer comme un futur classique, et qui loin de s'essouffler, ne fait qu’attiser notre curiosité pour le prochain cycle à venir *** Tome 13 *** Et voici parti pour un 3e cycle ! Après un 1er cycle qui nous avait fait découvrir l'univers des 5 Terres en commençant par Angleon, capitale des félins, un second qui nous avait embarqué dans les rivalités et autres trahisons du Royaume de Lys et de ses singes, voici venir le temps des ours et leur soif de vengeance ! Fini les intrigues, et sous intrigues : les ours et leurs alliers chiens et loup sont des bourrins, et Angleon va le sentir passer ! Mais cela serait aller trop vite en besogne que de résumer ce début de cycle à cet assaut, car "Les 5 Terre" nous a baigné dans (le sang de) ses trahisons et autres fourberies, et ce 3e cycle ne devrait pas être en reste... Entre les alliances fragiles d'Arnor et ses tribus ours, loups et chiens, et la descendance du roi (Genkin) rentré au pays après ses années d'otage à Angleon, on sent bien que tout le monde évolue sur une glace des plus fragiles et qu'à tout moment cette souffreteuse harmonie peut voler en éclats. Côté dessin, toujours rien à redire, c'est toujours aussi efficace et agréable, les personnages anthropomorphes toujours aussi expressifs, décors et costumes finement travaillés : du bel ouvrage ! Alors maintenant, nous revoilà parti pour une longue attente entre chaque tome ! Car cette série reste des plus addictive quand on est plongé dedans ! *** Tome 14 *** Arf, bon, ba ce 2e tome de ce 3e cycle doit être le premier à me décevoir... J'étais déjà un peu moins enthousiaste avec le début de ce 3e cycle après les deux très bons premiers, mais je m'étais dit que c'était la mise en jambe, mais après avoir refermé ce 2e tome, j'avoue ne pas être fan de la trame qui s'annonce et de ses rivalités internes chez nos amis les ours, chiens et loups. Côté dessin, c'est aussi avec ces personnages que j'ai le plus de mal. Autant j'avais trouvé que les 2 premiers cycles géraient à merveille la distinction des personnages anthropomorphes, autant là j'ai trouvé parfois difficile de m'y retrouver, surtout chez les ours. Alors espérons que le prochain tome redonnera du peps à ce cycle, car malgré tout cela reste une très bonne série et cela serait dommage de commencer brasser de l'air après deux cycles des plus réussis.
Cyborgs
Tiens, une nouvelle série de Jean-Luc Istin... Ça faisait longtemps... Et encore une série concept de SF ? Mmmouais... Et ? Ba le sieur sait y faire et nous propose une nouvelle fois une série qui démarre sur les chapeaux de roue ! Installez-vous confortablement, sortez le pop-corn... C'est parti !!! Cette nouvelle série nous propose de suivre une équipe de personnages cyborg que nous allons découvrir au fil des tomes. Ce premier opus nous met sur le pas de la jeune Yuko, née avec un sévère handicap : elle n'a pas de bras (nann j'vous fait pas la blague sur le chocolat :P ). C'est avec celui qui l'a élevé, Akira, un maître en art martiaux qui forme la garde rapprochée du dictateur Tudor, que Yuko va grandir et apprendre à se battre. La novelle loi imposant l'euthanasie des personnes "imparfaites" va chambouler leur petit train-train et faire d'eux des fuyards avec une forte prime sur leur tête : tous les gangs de la mégalopole sont maintenant à leurs trousses... Franchement, je partais assez circonspect en attaquant ma lecture, redoutant une énième série du genre. Mais les auteurs sont bons... très bons ! Et on se retrouve vite happé par cette histoire, très rythmée, poussée par une narration survitaminée dans laquelle nos personnage charismatiques vont évoluer. Le dessin de Kael Ngu fait plus que le job, même si on est sur un trait relativement classique. En tout cas, voilà une nouvelle série B qui démarre plus que bien et nous promet de bons moments de lecture et de l'action à tout va ! Vivement la suite ! *** Tome 2 *** Lancé sur les chapeaux de roue, "Cyborgs" poursuit sur sa lancée et complète cette équipe de cyborgs féminins rebelles avec l'histoire de Sam. Gravement blessée suite à l'attentat qui a tué sa mère, Sam va devoir subir de lourdes opérations pour pouvoir remplacer jambes et bras. Et ce n'est que le début d'une looonngue période de rémission et d’acclimatation à ses nouveaux membres cybernétiques pour pouvoir parvenir à son objectif : la vengeance ! Car sa mère n'était pas n'importe qui ; elle était l'adversaire principale aux élections de Tudor, celui qui règne maintenant en dictateur... L'intrigue se poursuit donc en faisant toujours autant d'étincelles, tout en posant de nouveaux jalons et personnages intéressants. Entre les scènes d'action, les nouvelles révélations et des dialogues cinglants, on profite tranquillou du spectacle percutant qui nous est proposé, bien accrochés à notre pot de popcorn. Le dessin de Kael Ngu reste toujours aussi efficace et nous immerge parfaitement dans cet univers futuriste en gérant parfaitement les scènes d'action. Vivement la suite !
Squad
C'est le 2e album que je lis dans cette nouvelle collection "Wave" de chez Delcourt, et c'est encore une bonne surprise. Ciblée Young Adult, cette nouvelle collection joue à merveille sur des sujets très contemporains, tout en sachant aller piocher dans des registres beaucoup plus classiques, ici les loups-garous. La couverture est assez équivoque en ce sens, sans spoiler pour autant, restait à savoir comment cette touche de fantastique allait être intégrée dans notre monde contemporain et si ça tenait la route. Pour le coup, c'est plutôt réussi. Becca emménage à San Francisco et doit donc faire son entrée dans un nouveau lycée. Toujours dur de débarquer dans un nouvel établissement et de s'intégrer, surtout dans LA bande de copines les plus en vues du lycée. C'est pourtant ce qui va se passer suite à un concours de circonstance en apparence anodin... Mais bien évidemment, son intégration au groupe n'était pas fortuite et il va maintenant falloir en assumer le prix... Ajoutez à cela une très légère touche de romance très en phase avec notre temps et une utilisation de la lycanthropie ingénieuse dans notre monde moderne, et cet album se laisse avaler et digérer en une bouchée. Si le dessin de Lisa Sterle m'a un peu surpris au début par un aspect minimaliste, je l'ai trouvé très juste dans les expression des personnages. Grace au récit fluide découpé en chapitres on est rapidement pris par l'histoire qui tient ses promesses jusqu'au bout. Un bon album bien calibré qui colle parfaitement à cette nouvelle collection ; les amateurs du genre devraient se régaler !
Divine - Vie(s) de Sarah Bernhardt
Chacun de mes pas me rapproche de mon idéal ! - Ce tome constitue une biographie de Sarah Bernhardt (1844-1923). Son édition originale date de 2020. Il a été réalisé par Eddy Simon pour le scénario, et par Marie Avril pour les dessins et les couleurs. Il comprend cent-soixante-huit pages de bande dessinée. Il se termine avec une photographie de l’actrice, et un article de trois pages, intitulé Sarah Bernhardt chronologie, retraçant rapidement des moments emblématiques de la vie de l’actrice, agrémenté d’une petite photographie d’elle dans son rôle de Fedora. Ces auteurs ont également réalisé l’adaptation du roman de Saphia Azzedine : Confidences à Allah (2015). Acte I L’insoumise. En 1847, à la campagne, de part et d’autre d’une étroite rivière, son cousin incite Sarah à sauter par-dessus, en la houspillant, lui disant qu’il parie qu’elle n’osera jamais, parce qu’elle est une trouillarde de fille. De son côté, l’enfant se convainc elle-même qu’elle va y arriver, et elle finit par prendre son élan pour sauter. Un peu plus tard, Camille et Sarah se trouvent devant la mère du premier. Celle-ci exige qu’ils lui expliquent ce qui s’est passé. Sarah dit que c’est de la faute de son cousin si elle a les genoux écorchés et si ses habits sont sales, c’est Camille qui l’a provoquée. Sa tante la sermonne : Une jeune citadine ne doit pas se comporter comme une vulgaire campagnarde, ce n’est pas convenable ! Sarah rétorque vivement qu’elle recommencera quand même, si on la défie encore. Et elle fera toute sa vie ce qu’elle a envie de faire ! Quand même ! Le cinq janvier 1871, pendant le siège de Paris, Sarah Bernhardt travaille comme infirmière auprès des blessés. Alors qu’elle panse un soldat alité, une autre infirmière vient la chercher pour lui indiquer qu’un certain comte de Kératry qui se dit être le nouveau préfet de police demande à la voir. Pour sortir, elle traverse les différentes pièces du théâtre transformé en hôpital, tout en maugréant : Maudite engeance que la guerre… Une fois dehors, elle retrouve le préfet : Émile de Kératry. Celui-ci commente la cargaison de la charrette qui est en train d’être déchargée : Comme promis, même si cela ne s’est pas fait sans mal, voilà la livraison de vivres, vins, biscuits, café œufs… Sarah lui répond que cela devrait permettre de nourrir ses blessés pendant quelque temps, et elle demande les dernières nouvelles du front des horreurs. Il lui répond d’abord des banalités, puis à la demande de la jeune femme, il rentre dans le détail : En vérité la situation n’est guère brillante. Depuis la reddition de l’empereur, c’est la déroute : chaque jour, les troupes françaises battent en retraite et perdent du terrain sous la férocité des assauts de l’armée prussienne. Léon Gambetta et son gouvernement de défense nationale tentent bien d’organiser la résistance au nord de la Loire, mais la cause…. Semble bel et bien perdue ! Il conclut : Paris sera sans doute très bientôt une forteresse assiégée par les bataillons de Von Bismarck. Il suggère à Sarah de rejoindre sa famille en Normandie, personne ne l’en blâmera. Elle répond avec fougue : Jamais de la vie ! Dans l’inconscient collectif, Sarah Bernhardt est restée comme une actrice de légende, et pour ceux qui en ont déjà entendu parler, également comme une actrice ayant connu le succès aux États-Unis, ayant su faire fructifier son image, et étant enterrée au cimetière du Père-Lachaise. Les autrices font des choix dans leur approche biographique. De débuter par une courte scène de sa jeune enfance pour montrer un caractère bien trempé et une détermination en réaction à son cousin qui lui dit qu’elle est incapable de faire quelque chose : c’est sûr elle ne se laissera plus jamais dicter sa conduite, ou imposer des limites. Puis le récit passe de 1847 à 1871, en omettant une phase de la vie de Sarah, celle où la police des mœurs la classe parmi les dames galantes, où elle mène une vie de demi-mondaine entretenue par des clients généreux. Autre parti pris : évoquer plutôt sa vie privée que la pratique de son art, que ce soit son apprentissage ou ses performances. Pour autant, cette biographie montre comment cette dame mène sa vie, majoritairement sur le plan professionnel. En fonction de ses attentes, le lecteur peut se trouver quelque peu décontenancé par cette approche, surtout s’il venait pour une facette particulière telle sa vie mondaine, ou ses qualités d’actrice. D’un autre côté, il constate que le récit est d’une grande richesse, abordant de nombreuses facettes d’une vie particulièrement remplie, que ce soit en rencontres, en voyages, ou en entreprises professionnelles. Il n’y avait pas la place de tout mettre. Cette biographie est racontée du point de vue de l’intéressée, amenant ainsi le lecteur à prendre fait et cause pour elle, à pouvoir découvrir ses motivations, ses réactions émotionnelles, la conception et la réalisation de ses projets, ses convictions et comment elle les met en pratique. En effet, il s’agit d’une vie riche et dense. Bernhardt se dévoue comme infirmière pour les blessés du siège de Paris pendant la guerre franco-allemande de 1870. Elle ira jouer pour les poilus au parc de Commercy dans la Meuse le dix mai 1916. Elle se fera même emmener au plus près des tranchées alors que son nom figure sur la liste des otages que les Allemands veulent capturer. Elle fera plusieurs voyages, d’abord à Londres en 1878, puis à Louisville aux États-Unis, traversant les étendues sauvages en train. Là encore, le lecteur peut se trouver surpris que les autrices ne développent pas plus cette odyssée, tout en comprenant qu’il aurait fallu y consacrer un tome entier. Au cours de sa vie et de sa carrière, elle va rencontrer ou travailler avec de nombreuses personnalités : Léon Gambetta (1838-1882), Victor Hugo (1802-1885), Mounet -Sully (1841-1916, acteur de théâtre), Louise Abbema (1853-1927, peintre, graveuse, illustratrice, sculptrice), Oscar Wilde (1854-1900), Alfons Mucha (1861-1939), Edmond Rostand (1868-1918), sans même parler de ses amants ou d’autres auteurs de théâtre. L’illustration de couverture attire l’œil, mettant en avant le monde intérieur qui emplit l’esprit de cette créatrice. Puis le lecteur découvre celle en pleine page servant d’annonce de l’acte I, avec le titre L’insoumise. Il va ainsi admirer une douzaine, pour les trois actes, l’entracte, et des tableaux intermédiaires : L’insoumise, L’étoile, Memento Mori, L’indomptable, Barnum, L’aventurière, Fantasque, La muse, Je me quitte, L’impératrice, One of us. La dessinatrice reprend le principe des affiches pour une composition simple mettant en valeur l’actrice dans une situation exotique ou métaphorique, ce qui constitue un écho à la fois à ses rôles, à la fois à la phase de sa vie. Vient ensuite la première scène de narration séquentielle proprement dite : le lecteur découvre les traits de contours fins et fragiles, esquissant rapidement les formes, la représentation étant réalisée ensuite en couleur directe. Cela donne un ressenti assez complexe, entre simplicité des formes, évidence des situations, et nuances émotionnelles apportées par les couleurs. Le lecteur passe ainsi de l’insouciance teintée de l’intense gravité de l’enfance, à l’horreur des cadavres sur le champ de bataille enneigé, à des dialogues de personnages sur fond uni comme sur une scène sans décor. Les épisodes de la vie de Sarah Bernhardt se révèlent d’une grande richesse, au point que leur contenu en vient à éclipser le reste. Toutefois, s’il y prête attention, le lecteur voit que la dessinatrice met en œuvre de nombreuses techniques narratives variées, ce qui enrichit encore le récit. Quelques exemples : page neuf, une planche silencieuse, dans laquelle Sarah se regarde en passant dans un miroir, évoquant l’importance de son apparence pour son métier d’actrice. Page quatorze : le théâtre des opérations, la scène du théâtre se trouvant devant la scène de bataille. Les superbes paysages de montagne lors d’un voyage en train, une composition en double page de représentations théâtrales avec pour fond chaque livret faisant apparaître le titre et l’auteur, deux spectres semblant flotter autour de Sarah dans la rue par un temps brumeux pour évoquer l’incertitude de l’identité de son père, Sarah promenant son improbable ménagerie dans les rues de Londres, des coupures de presse retraçant les moments les plus improbables de sa première tournée aux États-Unis, un fac-similé d’affiche de Gismonda par Alfons Mucha, et quelques moments de représentations en particulier Bernhardt dans le costume de l’Aiglon pour la tirade de Flambeau. En fonction de sa familiarité avec la vie de l’actrice, le lecteur en découvre de belles. Il voit se dessiner le portrait d’une artiste ambitieuse. Il constate par l’intermédiaire de son succès et des louanges dressées par des personnalités de référence, que ses qualités d’actrice sont remarquables, voire exceptionnelles. Les autrices montrent un être humain animé par la passion du théâtre, veillant à rester indépendante, et maître de ses choix. En creux, apparaît sa capacité à faire sa promotion, par des décisions innovantes : le recours à la photographie, l’image choc comme dormir dans son cercueil, la présence d’esprit de s’attacher les services d’Alfons Mucha, et même l’apparition de produits dérivés, parfois initiés par elle, parfois par des profiteurs avec le sens du commerce. Elle apparaît comme une artiste faisant ses preuves dans des pièces de moindre importance, dans des classiques, puis dans des œuvres contemporaines, certaines engagées, implication qui se retrouve dans son soutien de Louise Michel (1830-1905) militante anarchiste, et du capitaine Alfred Dreyfus (1859-1935) accusé à tort d’être un espion au service de l’Empire allemand. Le point de vue narratif est intentionnellement partie prenante pour la Divine, sans regard critique : tout en étant conscient de ce choix, le lecteur éprouve une admiration pour une artiste aussi formidable dans son art, dans ses convictions, dans son énergie pour entreprendre, dans sa démesure. Quelle put bien être la vie de Sarah Bernhardt pour passer à la postérité ? Les autrices racontent une démarche artistique incroyable, une existence débordant de succès et de prises de risque, une vie personnelle tout aussi riche. La narration visuelle rend compte de cette diversité avec une élégance légère et pleine d’émotions. Les pages se tournent toutes seules, et le lecteur termine l’ouvrage surpris par la densité de ce qu’il a vécu. Tourbillonnant.
Birdking
Dans un univers qui évoque celui des Dark Souls, peuplé de sinistres guerriers géants servant de champions à d'impitoyables seigneurs en guerre, les humains ne sont guère plus que de la piétaille sacrifiable. Bianca, jeune apprentie forgeronne, voit son destin basculer le jour où son maître et protecteur est tué. Elle découvre alors une part cachée de ses origines et décide de fuir l'empire sombre dans lequel elle a toujours vécu. Avec son maître, elle a forgé une épée magique capable de ranimer le Birdking, un ancien roi guerrier devenu son protecteur. Cette armure animée, que l'on pourrait croire vide, semble pourtant abriter une âme... Birdking s'inscrit dans une dark fantasy efficace, au rythme prenant, proche d'un bon feuilleton dont on veut connaître la suite. Le style graphique, moderne et accessible, rappelle celui de certains webcomics. Le trait, simple, pourrait faire penser à une série jeunesse, mais le ton reste sombre et l'ambiance oppressante. Si la technique montre quelques limites, l'auteur les compense habilement par l'intégration de mots dans les cases pour traduire l'émotion ou l'action, ce qui s'avère souvent utile pour la lisibilité de certaines scènes. On explore un monde implacable, où le manichéisme n'est qu'apparence tant le danger rôde à chaque coin de page et où les humains ne sont que des pièces d'un vaste jeu de pouvoir. Les références sont nombreuses, tirées à la fois du jeu vidéo et de l'animation, avec notamment un passage souterrain qui évoque clairement la Moria de Tolkien. L'intrigue débute de façon classique, mais la richesse de l'univers apporte la dose de mystère et d'originalité nécessaire pour captiver. Même si certains rebondissements sont prévisibles, l'histoire parvient à surprendre et à maintenir l'intérêt. Le rythme soutenu rend la lecture fluide et addictive. Après trois tomes, et en attendant un quatrième encore en préparation, j'ai clairement envie de poursuivre cette aventure.
Champs de Bataille - L'histoire enfouie du remembrement
Même si je n'ai pas lu les enquêtes précédentes des auteurs comme celui sur les algues vertes par exemple, j'ai emprunté cet album dès que je l'ai vu pour 2 raisons. D'abord le souvenir de bons avis émis ici et aussi parce que j'ai depuis l'enfance entendu parler du remembrement dans nos campagnes sans en connaitre l'histoire enfouie. En effet ce n'est pas seulement quelques talus et haies qui ont été arrachées afin de rationaliser des terrains, ce sont des actes administratifs faits de manière abrupte, sans véritable conduite de changement, sans tenir compte des doléances des uns et des autres, des fermiers souvent peu éduqués et aptes à se défendre, qui se retrouvent balayées d'un trait de plume. Cela a donné lieu à des échanges de parcelles, certains étant gagnants et d'autres, la plupart, perdants notamment en terme de pommiers et autres arbres fruitiers qui assuraient une partie de leur subsistance. Cela a conduit à des actes de résistance, des drames, des suicides et des familles voisines qui ne se parlent plus encore des décennies après convaincus par l'injustice d'une part et le favoritisme dont d'autres auraient profité, revendant par la suite certaines terres pour en faire des parcelles constructibles. C'est d'autant plus marquant que je connais certains des lieux bretons évoqués. On pourrait sans doute reprocher un éventuel manque de contrepoint. On a certainement poussé trop loin l'industrialisation et la technologie autour de l'agriculture et même si on commence à se rendre compte des dégâts écologiques que cela a pu provoquer, je pense que le temps des petites fermes familiales avec 5 vaches et un hectare de terrain est définitivement révolu.
RASL
Peut-on exister après avoir réalisé un chef d’œuvre du niveau de Bone? Jeff Smith a démontré il y a plus de 10 ans désormais que c’était tout à fait possible. RASL est un ovni incroyablement dense qui réussit à faire peur, à émouvoir, à faire rire, etc. Mais pourquoi, pourquoi Jeff ne produit il plus rien ou presque depuis tout ce temps… Quelle tristesse. Ce type est un génie du 9eme art.
Sunstone
Sunstone est une série pour le moins atypique. Pas tant pour son sujet, le BDSM, que pour son traitement de ce dernier. Là où l'on pourrait s'attendre à une simple histoire érotique avec une intrigue d'amour en prime on retrouve en fait une histoire d'amour avant tout, avec ses joies sincères, ses problèmes, sa complexité, une histoire d'amour bien réelle quoi. C'est ça qui frappe dans cette histoire : l'envie de se rapprocher le plus possible d'un sentiment de réel, y compris dans son approche érotique. Ici, on parle de ce qu'il y a derrière les relations sexuelles, ce qu'il y a aussi derrière l'image du BDSM, on s'éloigne de la représentation enjolivée, on se rapproche des gens qu'il y a derrière, avec leurs vies, leurs attentes et leurs angoisses. On nous parle de tous ces gens passionnés de jeux de rôles, de restrictions, de contrôle, sans diaboliser où enjoliver la chose. On nous parle avant tout des gens, voilà. Bon, bon, "l'histoire de fesses nous parle tout autant des fesses que des corps attachés au bout", certes, mais quid de l'histoire d'amour ? Elle est bonne, très bonne. En tout cas suffisamment bonne pour me faire lâcher la larmichette sur la fin (étant très émotive, cette information a une valeur toute relative, je vous mets en garde). Comme dit plus haut les personnages sont humains, semblent réels, on ne nous cache jamais leurs problèmes terre-à-terre, on nous parle toujours de leurs vies, leurs émotions, leurs ressentis, on apprécie les voir rire, se charrier, on souffre lorsqu'ils souffrent, … Bref, je ne vais pas vous faire la totale, vous voyez le topo : tous les personnages sont attachants (rire). Un défaut cependant. Bon, il est unique mais j'aurais sans doute un peu de mal à l'expliquer, alors accrochez vous. J'ai un grand respect pour le travail graphique de Stjepan Sejic, je trouve ses dessins magnifiques et son travail des expressions saisissant. Pourtant, il y a toujours un petit truc qui me chiffonne dans chacune de ses histoires, c'est cet étrange ressenti qu'il fétichise les relations saphiques. Entendons-nous bien, il traite chacun des personnages de ses histoires avec le même sérieux que dans cette série, ils semblent toujours humains et restent attachants, donc ses personnages saphiques restent bons. Cependant je ne peux pas m'empêcher d'être toujours un peu… disons gênée… lors de mes lectures. Je ne sais pas, sans doute est-ce le fait qu'il dessine toujours ses personnages féminins avec des plastiques parfaites (en tout cas "parfaites" dans les canons de beautés d'hommes hétéros actuels), ou bien alors c'est le fait qu'il semble beaucoup s'intéresser à la question de la sexualité des couples saphiques (je vous jure, cela revient souvent dans ses récits), en tout cas je ne peux m'empêcher d'avoir une guerre interne à chacune de mes lectures en me demandant si les relations saphiques qu'il dépeint entrent dans la case "bonne représentation" ou bien "fétichisme". Bref, défaut mis à part, Sunstone est une série spéciale, dans le sens où l'on ne s'attend pas à un traitement si sérieux et humain du sujet de la sexualité (surtout en ce qui concerne les kinks) dans une œuvre qui reste tout de même dans sa forme un récit érotique. C'est aussi une série spéciale pour moi, car je l'avais découverte en ligne par hasard durant la fin de mon adolescence, à peu près au même moment où je me posais de nombreuses questions sur ma sexualité (et où, peut-être, je lorgnais légèrement sur l'univers du BDSM, mais ce serait là une autre histoire que je vous épargnerai). Aujourd'hui je serais sans doute plus critique sur cette œuvre que lors de ma découverte, encore une fois mon incapacité à savoir si la série fétichise ou non sa relation centrale façon "catégorie lesbienne sur pornhub - mais avec des sentiments autour" me parasite un peu mes relectures, mais malgré tout la série reste bonne et sincèrement surprenante. Je dédicace bien évidemment cet avis à Gruizzli, je m'étais engagée à aviser la série et c'est maintenant chose faite. PS : Papa, si tu passes par là, ignore le passage où je parle d'avoir lu pour la première fois cette BD étant ado. Ta fille était chaste, tu m'entends ? Chaste !
L'Ombre du Corbeau
C'est une œuvre majeure avec en préface la définition du "fantastique". Les temps se superposent dans cette guerre de 14. Absurdité de la guerre. Le monde du malheureux Hans von Berlichingen bascule dans une autre monde où différents personnages incarnent une manière de mourir.
Chambre 121
Je n'ai jamais montré d'appétence particulière pour le genre "strictement pour adulte". Je fuis même tout ce qui est hentai. Néanmoins il faut s'intéresser à tout, pour pouvoir juger de la chose... Je me suis donc lancé dans l'intégrale de cette Chambre 121 et je dois reconnaitre avoir été agréablement surpris. Le réceptionniste d'un hôtel est en charge de satisfaire les demandes "particulières" des client(e)s de la chambre 121. Voilà pour le pitch, et si ce n'est pas folichon je n'ai pu m'empêcher de penser que cela aurait fait un bon porno (à condition de mettre un peu de moyen dans la production). Les aventures de notre bonhomme sont assez variées, au gré des fantasmes de l'auteur, et il donne volontairement et allégrement de sa personne. Par contre elles ne sont forcément toutes de la même qualité et de fait ne suscitent pas chez le lecteur le même émoi. J'ai trouvé les dessins agréables et bien faits avec quand même une préférence pour les premiers chapitres. Inutile de dire qu'ils sont très explicites. J'ai beaucoup moins aimé les 6 petits récits supplémentaires (avant la chambre 121) qui relevaient plus à mon goût du porno amateur. Du genre "Oh excusez moi Madame, je me suis pris les pieds dans le tapis et suis tombé la b... en avant sur votre c.." Voyez le genre ... Au final Chambre 121 constitue donc une vraie œuvre pornographique, assez agréable à lire si on découpe par petit bout la lecture.