Le grand pouvoir est étonnant, mais logique, et arrive à la fin, comme il se doit.
En attendant, on ne s'ennuie pas, on plaint les opprimés, et même… les oppresseurs, car comme ceux qui ne l'ont pas lu pourront le découvrir… Le héros et l'héroïne ressemblent aux Hobbits, mais en plus révoltés et plus méritants vu leurs conditions de vie rien moins que riantes. L'action ne nuit pas aux interrogations métaphysiques et réciproquement. Le sang ne coule pas plus que dans d'autres récits épiques, mais vu la fin, j'ai envie de dire âmes sensibles s'abstenir. Une œuvre qu'on oublie pas et qu'on voudrait inciter tous ceux qui ne l'ont pas encore eue entre les mains à lire.
Oui, je me souviens...
J'ai découvert Jonathan et Cosey il y a 50 ans a la revue Tintin portugaise. Je n'ai pas tout de suite aimé, c'était trop nouveau et étrange pour moi a cet âge.
Après, j'ai appris a aimer. Le dessin (surtout les paysages), la poésie, le(s) message(s). Nature, écologie, politique, résistance et pacifisme. Je recommande la lecture et l'achat.
En 2010, Emmanuel Lepage embarquait à bord du Marion Dufresne pour un magnifique voyage vers les Terres Australes. Douze ans plus tard, il remet ça mais cette fois pour un plus long séjour sur place, sur l'île de Kerguelen.
Emmanuel Lepage que l'on connait depuis son remarquable Tchernobyl, est une sorte de cousin-voyageur ou cousin-reporter de Etienne Davodeau.
Chacun signe scénario et dessins de ses albums, et tous deux excellent dans l'art de tracer le portrait des 'gens' qui nourrissent leurs rencontres.
En 2011, Lepage publiait le carnet de bord d'un premier voyage dans les Terres Australes (un album que l'on vient de relire pour l'occasion) et il vient tout juste de sortir un nouvel album à l'occasion d'un second voyage effectué en 2022, tout là-bas au bout du bout du monde.
Après son premier voyage de 2010 (qui n'était qu'un "bref" aller/retour), l'auteur a longtemps hésité avant de reprendre la mer : « Que pouvais-je vraiment dire de plus ou de différent. Revenir au même endroit une seconde fois n'aurait pas la puissance et la magie de la découverte ».
Heureusement pour nous, Lepage a fini par embarquer de nouveau sur le mythique Marion Dufresne, le bateau ravitailleur des TAAF, qui navigue désormais pour le compte de l'IFREMER.
Il accompagne une mission popéleph concernant la population des éléphants de mer avec une équipe chargée d'un reportage tv et compte rester peu de temps sur l'île : un mois seulement, et en été !
Sur le bateau, sur les îles, il retrouve des anciennes connaissances et rencontre de nouvelles personnes : de nombreux scientifiques de toutes sortes, des logisticiens, des ouvriers, des militaires, des marins, ... chacun avec son histoire, son chemin, sa quête.
C'est ce microcosme qui va nourrir son ouvrage et notre lecture : « J'ai envie de raconter les personnes que je rencontre, dans leur complexité ».
Des rencontres, des gens « qui donnent foi en l'humanité » : et en ces temps troublés, ce sont quelques images (et quelques mots) qui font du bien.
Certes la magie de la découverte n'est plus là mais elle a été remplacée par une sorte de familiarité : nous ne sommes jamais allé là-bas, du moins pas 'en vrai', mais le premier album nous avait y avait emmenés déjà, laissé une forte empreinte sur nous et cette fois on y retourne, toujours avec plaisir, on s'y retrouve presque en terrain familier et du coup, moins étonnés, plus attentifs.
Le côté humain, pourtant déjà bien présent dans le premier épisode, prend ici toute son importance, toute sa valeur.
Aujourd'hui l'homme essaye de réduire son empreinte sur ces réserves naturelles et les équipes luttent contre les espèces (végétales ou animales) introduites par le passé, qui sont nombreuses à avoir proliféré et mis en péril le fragile écosystème de l'archipel.
Et que dire des dessins ?! Le premier album était superbe mais celui-ci est encore plus beau et nous permet de "comparer" le trait du dessinateur qui a beaucoup mûri et ses aquarelles qui ont gagné en puissance évocatrice.
La mousse de l'écume de mer est rendue (à la brosse à dents !) avec un mélange de réalisme et de poésie.
Les verts des paysages, terres, landes, mousses, ... les bleus sombres de l'eau ou de la nuit, ...
Il y a encore un peu plus de magie dans le crayon et le pinceau de Lepage, et voilà deux albums dans lesquels se plonger, se perdre, encore et encore.
Quand ses compagnons lui demandent pourquoi il fait des livres, des albums, Emmanuel Lepage ne sait trop quoi répondre. C'est compliqué. On le harcèle, lui repose cette question.
« Je fais des livres pour être un peu moins con », finit-il par lâcher.
Voilà, on sait ce qui nous reste à faire ! Le lire !
En 2010, Emmanuel Lepage embarque à bord du Marion-Dufresne pour un magnifique voyage vers les Terres Australes et Kerguelen. Il en a tiré ce magnifique carnet de voyage où la chaleur et l'humanité des scientifiques isolés là-bas, luttent contre la violence des éléments naturels de ces terres inhospitalières.
Emmanuel Lepage que l'on connait depuis son remarquable Tchernobyl, est une sorte de cousin-voyageur ou cousin-reporter de Etienne Davodeau.
Chacun signe scénario et dessins de ses albums, et tous deux excellent dans l'art de tracer le portrait des 'gens' qui nourrissent leurs rencontres.
En 2011, cet auteur a publié le carnet de bord d'un premier voyage dans les Terres Australes et il vient tout juste de sortir un nouvel album à l'occasion d'un second voyage tout là-bas au bout du monde.
Avant de reprendre la mer avec lui, il nous fallait d'abord revivre ce premier épisode ...
Et on reparle du suivant très vite !
L'auteur embarque sur le ravitailleur Marion Dufresne pour une 'rotation' avec les chercheurs de l'IPEV, l'Institut Paul Emile Victor, l'institut polaire français, quelques cinéastes et photographes.
Et le lecteur prend la mer avec lui pour « les Terres Australes : Crozet, Amsterdam, Saint-Paul ... Kerguelen. Enfin jadis surnommées les Îles de la Désolation ».
« Ker-gue-len un mot qui racle la gorge, un nom breton égaré en Antarctique. C'était le monde du bout du monde. »
« La réserve naturelle des TAAF. Créée en 2006, elle est de loin la plus grande du territoire français
[...] C'est la plus forte concentration d'oiseaux marins de la planète ».
Plus d'un million de kilomètres carrés.
Lepage s'en donne à cœur joie une fois embarqué à bord du Marion Dufresne (le bateau ravitailleur des TAAF, les Terres Australes et Antarctiques Françaises).
Le 'journal de bord' d'Emmanuel Lepage est au choix : une aventure, un voyage, un poème, un livre d'images, une expérience, ...
« Ce qui est étrange avec le voyage, c'est qu'on ne comprend qu'après, et encore pas toujours, ce qu'on est allé chercher ».
C'est un reportage en très belles images dans ces mers et îles polaires, le mode de vie de ces marins, militaires et scientifiques, le travail titanesque du bateau ravitailleur qui fait périodiquement la liaison entre La Réunion et ces îles perdues (Kerguelen bien sûr, mais aussi Crozet, Saint-Paul ou Amsterdam).
Et le vent rugissant et omniprésent : sur ces îles, les mouches n'ont plus d'ailes, devenues inutiles.
« - Ah, la fameuse mouche de Kerguelen !
- Oui, la mouche sans ailes !
- Le vent est si violent qu'elles ne peuvent voler. Mais elles se déplacent néanmoins grâce à lui. »
Un bel album de voyage où l'on découvre l'histoire de ces TAAF et la vie sur ces îles.
Des dessins crayonnés de portraits comme de larges aquarelles de paysage : avec ses crayons comme avec ses pinceaux, Lepage n'est pas un manchot (ah, ah !) et ses dessins sont de toute beauté.
Ce carnet de voyage est une merveille graphique bien sûr, mais humaine également. Lepage a une haute conscience de son travail de dessinateur, de portraitiste, de photographe de papier et son texte est bien à la hauteur de ses images.
« - Vous allez nous dessiner ?
Le dessin inspire la bienveillance. C'est un sésame incroyable qui déverrouille les hiérarchies, les classes et les âges. Dessiner c'est mas façon d'être au monde.
[...] Personne n'a peur du dessin. On aime le voir en train de se faire. On s'en approche spontanément. Il renvoie à l'enfance. Et puis, c’est un moyen de rencontres et de complicités qui se passent de mots. »
« Je ne fais que passer. J'envie ces hivernants qui sillonnent cette île pas après pas, jour après jour. »
Au départ, l'auteur a subi une rupture. Il n'en veut pas à l'autre, il se dit que l'amour n'est pas pour lui et se tourne donc vers le sexe tarifié. Il ne faut pas oublier que c'est ce qui lui donne la conviction de s'adonner à ce point à aller voir des prostituées, voire même de les noter et de faire une œuvre à partir d'elles. Ce socle explique tout : il est en général entendu que l'amour est ce qu'il y a de suprême, mais quid des rejetés, doivent-ils espérer et mendier l'amour à l'infini ? L'auteur dit non, et paie le sexe.
Il ne s'interroge pas sur les éventuelles contraintes subies par les prostituées dont il semble qu'elles sont libres. Le dessin est pile ce qu'il faut pour exprimer ce détachement. On suit la démarche par curiosité, on n'a empathie ni pour le micheton et les amis à qui il raconte son aventure, ni pour les prostituées. Mais les réflexions du bonhomme et de ceux qu'il rencontre sont intéressantes. Si l'auteur a raison de cacher la tête des prostituées pour garantir leur anonymat, cela peut les réifier pour le lecteur. Je ne sais pas comment l'auteur aurait pu trouver un meilleur moyen visuel, mais j'y vois un manque. Cela et quelques autres petits problèmes m'empêchent d'attribuer la note maximum !
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Le Grand Pouvoir du Chninkel
Le grand pouvoir est étonnant, mais logique, et arrive à la fin, comme il se doit. En attendant, on ne s'ennuie pas, on plaint les opprimés, et même… les oppresseurs, car comme ceux qui ne l'ont pas lu pourront le découvrir… Le héros et l'héroïne ressemblent aux Hobbits, mais en plus révoltés et plus méritants vu leurs conditions de vie rien moins que riantes. L'action ne nuit pas aux interrogations métaphysiques et réciproquement. Le sang ne coule pas plus que dans d'autres récits épiques, mais vu la fin, j'ai envie de dire âmes sensibles s'abstenir. Une œuvre qu'on oublie pas et qu'on voudrait inciter tous ceux qui ne l'ont pas encore eue entre les mains à lire.
Jonathan
Oui, je me souviens... J'ai découvert Jonathan et Cosey il y a 50 ans a la revue Tintin portugaise. Je n'ai pas tout de suite aimé, c'était trop nouveau et étrange pour moi a cet âge. Après, j'ai appris a aimer. Le dessin (surtout les paysages), la poésie, le(s) message(s). Nature, écologie, politique, résistance et pacifisme. Je recommande la lecture et l'achat.
Danser avec le vent
En 2010, Emmanuel Lepage embarquait à bord du Marion Dufresne pour un magnifique voyage vers les Terres Australes. Douze ans plus tard, il remet ça mais cette fois pour un plus long séjour sur place, sur l'île de Kerguelen. Emmanuel Lepage que l'on connait depuis son remarquable Tchernobyl, est une sorte de cousin-voyageur ou cousin-reporter de Etienne Davodeau. Chacun signe scénario et dessins de ses albums, et tous deux excellent dans l'art de tracer le portrait des 'gens' qui nourrissent leurs rencontres. En 2011, Lepage publiait le carnet de bord d'un premier voyage dans les Terres Australes (un album que l'on vient de relire pour l'occasion) et il vient tout juste de sortir un nouvel album à l'occasion d'un second voyage effectué en 2022, tout là-bas au bout du bout du monde. Après son premier voyage de 2010 (qui n'était qu'un "bref" aller/retour), l'auteur a longtemps hésité avant de reprendre la mer : « Que pouvais-je vraiment dire de plus ou de différent. Revenir au même endroit une seconde fois n'aurait pas la puissance et la magie de la découverte ». Heureusement pour nous, Lepage a fini par embarquer de nouveau sur le mythique Marion Dufresne, le bateau ravitailleur des TAAF, qui navigue désormais pour le compte de l'IFREMER. Il accompagne une mission popéleph concernant la population des éléphants de mer avec une équipe chargée d'un reportage tv et compte rester peu de temps sur l'île : un mois seulement, et en été ! Sur le bateau, sur les îles, il retrouve des anciennes connaissances et rencontre de nouvelles personnes : de nombreux scientifiques de toutes sortes, des logisticiens, des ouvriers, des militaires, des marins, ... chacun avec son histoire, son chemin, sa quête. C'est ce microcosme qui va nourrir son ouvrage et notre lecture : « J'ai envie de raconter les personnes que je rencontre, dans leur complexité ». Des rencontres, des gens « qui donnent foi en l'humanité » : et en ces temps troublés, ce sont quelques images (et quelques mots) qui font du bien. Certes la magie de la découverte n'est plus là mais elle a été remplacée par une sorte de familiarité : nous ne sommes jamais allé là-bas, du moins pas 'en vrai', mais le premier album nous avait y avait emmenés déjà, laissé une forte empreinte sur nous et cette fois on y retourne, toujours avec plaisir, on s'y retrouve presque en terrain familier et du coup, moins étonnés, plus attentifs. Le côté humain, pourtant déjà bien présent dans le premier épisode, prend ici toute son importance, toute sa valeur. Aujourd'hui l'homme essaye de réduire son empreinte sur ces réserves naturelles et les équipes luttent contre les espèces (végétales ou animales) introduites par le passé, qui sont nombreuses à avoir proliféré et mis en péril le fragile écosystème de l'archipel. Et que dire des dessins ?! Le premier album était superbe mais celui-ci est encore plus beau et nous permet de "comparer" le trait du dessinateur qui a beaucoup mûri et ses aquarelles qui ont gagné en puissance évocatrice. La mousse de l'écume de mer est rendue (à la brosse à dents !) avec un mélange de réalisme et de poésie. Les verts des paysages, terres, landes, mousses, ... les bleus sombres de l'eau ou de la nuit, ... Il y a encore un peu plus de magie dans le crayon et le pinceau de Lepage, et voilà deux albums dans lesquels se plonger, se perdre, encore et encore. Quand ses compagnons lui demandent pourquoi il fait des livres, des albums, Emmanuel Lepage ne sait trop quoi répondre. C'est compliqué. On le harcèle, lui repose cette question. « Je fais des livres pour être un peu moins con », finit-il par lâcher. Voilà, on sait ce qui nous reste à faire ! Le lire !
Voyage aux îles de la Désolation
En 2010, Emmanuel Lepage embarque à bord du Marion-Dufresne pour un magnifique voyage vers les Terres Australes et Kerguelen. Il en a tiré ce magnifique carnet de voyage où la chaleur et l'humanité des scientifiques isolés là-bas, luttent contre la violence des éléments naturels de ces terres inhospitalières. Emmanuel Lepage que l'on connait depuis son remarquable Tchernobyl, est une sorte de cousin-voyageur ou cousin-reporter de Etienne Davodeau. Chacun signe scénario et dessins de ses albums, et tous deux excellent dans l'art de tracer le portrait des 'gens' qui nourrissent leurs rencontres. En 2011, cet auteur a publié le carnet de bord d'un premier voyage dans les Terres Australes et il vient tout juste de sortir un nouvel album à l'occasion d'un second voyage tout là-bas au bout du monde. Avant de reprendre la mer avec lui, il nous fallait d'abord revivre ce premier épisode ... Et on reparle du suivant très vite ! L'auteur embarque sur le ravitailleur Marion Dufresne pour une 'rotation' avec les chercheurs de l'IPEV, l'Institut Paul Emile Victor, l'institut polaire français, quelques cinéastes et photographes. Et le lecteur prend la mer avec lui pour « les Terres Australes : Crozet, Amsterdam, Saint-Paul ... Kerguelen. Enfin jadis surnommées les Îles de la Désolation ». « Ker-gue-len un mot qui racle la gorge, un nom breton égaré en Antarctique. C'était le monde du bout du monde. » « La réserve naturelle des TAAF. Créée en 2006, elle est de loin la plus grande du territoire français [...] C'est la plus forte concentration d'oiseaux marins de la planète ». Plus d'un million de kilomètres carrés. Lepage s'en donne à cœur joie une fois embarqué à bord du Marion Dufresne (le bateau ravitailleur des TAAF, les Terres Australes et Antarctiques Françaises). Le 'journal de bord' d'Emmanuel Lepage est au choix : une aventure, un voyage, un poème, un livre d'images, une expérience, ... « Ce qui est étrange avec le voyage, c'est qu'on ne comprend qu'après, et encore pas toujours, ce qu'on est allé chercher ». C'est un reportage en très belles images dans ces mers et îles polaires, le mode de vie de ces marins, militaires et scientifiques, le travail titanesque du bateau ravitailleur qui fait périodiquement la liaison entre La Réunion et ces îles perdues (Kerguelen bien sûr, mais aussi Crozet, Saint-Paul ou Amsterdam). Et le vent rugissant et omniprésent : sur ces îles, les mouches n'ont plus d'ailes, devenues inutiles. « - Ah, la fameuse mouche de Kerguelen ! - Oui, la mouche sans ailes ! - Le vent est si violent qu'elles ne peuvent voler. Mais elles se déplacent néanmoins grâce à lui. » Un bel album de voyage où l'on découvre l'histoire de ces TAAF et la vie sur ces îles. Des dessins crayonnés de portraits comme de larges aquarelles de paysage : avec ses crayons comme avec ses pinceaux, Lepage n'est pas un manchot (ah, ah !) et ses dessins sont de toute beauté. Ce carnet de voyage est une merveille graphique bien sûr, mais humaine également. Lepage a une haute conscience de son travail de dessinateur, de portraitiste, de photographe de papier et son texte est bien à la hauteur de ses images. « - Vous allez nous dessiner ? Le dessin inspire la bienveillance. C'est un sésame incroyable qui déverrouille les hiérarchies, les classes et les âges. Dessiner c'est mas façon d'être au monde. [...] Personne n'a peur du dessin. On aime le voir en train de se faire. On s'en approche spontanément. Il renvoie à l'enfance. Et puis, c’est un moyen de rencontres et de complicités qui se passent de mots. » « Je ne fais que passer. J'envie ces hivernants qui sillonnent cette île pas après pas, jour après jour. »
Vingt-trois prostituées
Au départ, l'auteur a subi une rupture. Il n'en veut pas à l'autre, il se dit que l'amour n'est pas pour lui et se tourne donc vers le sexe tarifié. Il ne faut pas oublier que c'est ce qui lui donne la conviction de s'adonner à ce point à aller voir des prostituées, voire même de les noter et de faire une œuvre à partir d'elles. Ce socle explique tout : il est en général entendu que l'amour est ce qu'il y a de suprême, mais quid des rejetés, doivent-ils espérer et mendier l'amour à l'infini ? L'auteur dit non, et paie le sexe. Il ne s'interroge pas sur les éventuelles contraintes subies par les prostituées dont il semble qu'elles sont libres. Le dessin est pile ce qu'il faut pour exprimer ce détachement. On suit la démarche par curiosité, on n'a empathie ni pour le micheton et les amis à qui il raconte son aventure, ni pour les prostituées. Mais les réflexions du bonhomme et de ceux qu'il rencontre sont intéressantes. Si l'auteur a raison de cacher la tête des prostituées pour garantir leur anonymat, cela peut les réifier pour le lecteur. Je ne sais pas comment l'auteur aurait pu trouver un meilleur moyen visuel, mais j'y vois un manque. Cela et quelques autres petits problèmes m'empêchent d'attribuer la note maximum !