Je découvre cet auteur espagnol avec cet album et, malgré mes préventions au départ, je dois dire que c’est plutôt une bonne pioche.
Le point de départ est assez classique et sentait le déjà-vu dans le genre porno : un homme, Guillermo, est embarqué par ses potes pour un enterrement de vie de garçon au Japon. Bien évidemment ça tourne rapidement à l’orgie. Mais, tout aussi rapidement, Ikna introduit un nouveau paramètre, lorsque Guillermo fait la connaissance de Mitsuko qui, dès qu’elle a un orgasme, permet au jeune homme de retourner dans son passé, pour draguer et plus si affinité, toutes les filles ou femmes qu’il n'avait pas osé aborder. C’est ainsi l’occasion pour lui de coucher avec toutes ces femmes, et « d’effacer » d’éventuels regrets.
Mais un nouveau rebondissement va transformer ce fantasme en catastrophe…
Le récit est dynamique, ne se prend jamais totalement au sérieux. Les scènes de sexe sont explicites mais finalement elles n’occupent pas une place si importante.
Surtout, le dessin d’Ikna est pour beaucoup dans le rythme et le plaisir de lecture. Son trait caricatural fait merveille, et donne une touche parodique, humoristique à cette histoire pour adultes (j’ai juste trouvé les couleurs informatiques trop tranchées).
Une petite lecture agréable, pas émoustillante, mais fraiche et quelque peu amusante.
Bluebells Wood est un récit très introspectif qui avance à un rythme volontairement lent. L’histoire explore surtout le deuil, la solitude et une forme d’amour mélancolique, plus suggéré que véritablement raconté. Le scénario se concentre sur les états d’âme et la sensibilité des personnages plutôt que sur l’action, ce qui donne à l’ensemble une tonalité contemplative.
Graphiquement, l’album est remarquable. Les planches sont très travaillées, parfois presque picturales, et la mise en scène s’approche davantage de la poésie visuelle que de la narration classique. Les couleurs et les compositions installent une atmosphère douce-amère qui accompagne parfaitement le propos. Cette identité graphique forte est clairement le point le plus marquant de l’œuvre.
L’intrigue, plus diffuse que véritablement construite, se vit davantage comme une mélodie lente que comme un récit à rebondissements. Cela pourra séduire ceux qui recherchent une lecture sensible et immersive, mais laisser plus distants ceux qui préfèrent un scénario structuré. L’ensemble fonctionne pourtant bien dans son registre : une BD intime, élégante et émotionnelle.
Sortie cette année, cette BD m'a intéressée parce qu'elle exploite une idée que j'avais eu après discussion avec une amie assistante sociale qui maintient qu'il faut un permis pour être parent. Cette idée étrange, donc, est ici au centre d'une BD dystopique/utopique qui parle d'un monde futuriste (mais proche) où le bonheur est obligatoire, la médiation et l'apaisement des sentiment encouragé.
Pour un avis simple, je trouve que la BD est globalement sympathique, mais pas assez aboutie dans le traitement de son idée. Lorsqu'on parle de monde où sourire est une obligation, la médiation et le contrôle des sentiments la norme, la naissance conditionné à un permis absurde dans un système kafkaïen, j’imagine un monde dystopique à l'extrême ou absurde au dernier degré. Mais la BD reste "sage", avec une finalité un peu trop facile et qui esquive les questions soulevées dans le récit.
Pour plus de détails, disons déjà que le dessin fait très typé, avec un trait qui m'évoque Pénélope Bagieu ou Margaux Motin dans le trait, avec des personnages très souples et des a-plats de couleurs qui renforcent l'aspect cartoon du trait. C'est ce qui renforce l'aspect grotesque des scènes -voir en galerie- pour accentuer l'absurde de ce monde, donnant un ton humoristique et décalé à l'ensemble. Ce qui est dommage, lorsqu'une partie du récit flirte plus avec le glauque et le malsain, notamment lors de la scène d'examen avec le faux bébé. Mais globalement ça fonctionne plutôt bien.
Ce que je regrette c'est que la BD, malgré de bonnes idées, résout tout par un "je pars chez des gens qui sont restés normaux" qui semble tout résoudre magiquement. Si ce monde étrange et dystopique s'est installé, c'est pour répondre à des problématiques (évoquées mais jamais traités) et qu'en est-il en dehors ? Ce monde étrange qu'on nous dépeint, à quoi fait-il écho ? Quel est l'avenir en dehors de cette colonie ? Tant que questions balayées sous le tapis par les auteurs qui ne s’embarrassent pas de développer le lore qu'ils installent et c'est vraiment dommage. C'est la grande faiblesse du récit qui reste dans la surface de toutes les questions traitées.
Maintenant c'est aussi parce que le scénario fait le choix, clair et évident, de critiquer une société "instagram". Chacun doit être un parent-citoyen modèle, on reste dans la retenue des émotions, dans l’apaisement des conflits et le dialogue constant. C'est une société du paraitre, où rien de personnel ne s'affiche, dans lequel tout doit être beau, merveilleux, pacifié. Une sorte de dictature du bonheur qui pourtant ne marche clairement pas. Je comprends la critique sous-jacente, celle d'un monde de réseau et d'application, de technologie et de surveillance de notre participation à améliorer la société. Tout pue le faux, mais on fait semblant, pour notre bien à tous. Effectivement, je n'aime pas cette société.
Comme mentionné, la BD est à la croisé de deux thématiques mais en rate l'une des deux, selon moi. J'aurais aimé voir le développement des questions sociétales autour des naissances, pourquoi le choix individuel bascule vers un choix d'Etat, un choix politique et administratif. Il y a beaucoup de développement possible, de l'horreur kafkaïenne pure à des questionnements politiques et sociaux majeurs, mais la BD les esquive. Et je regrette un peu le choix d'avoir fait une fin aussi "heureuse", qui ne permet pas de réellement s'emparer d'un sujet pourtant très intéressant.
Dommage, une BD qui n'est pas mauvaise mais me laisse un gout d'inachevé.
La série propose une fantasy épique pleinement assumée, portée par un dessin extrêmement expressif : corps sculptés, visages tendus, compositions puissantes. Cette exagération permanente — y compris une hypersexualisation marquée — s’inscrit dans l’esthétique choisie, presque opératique, et correspond bien à l’univers brutal, mystique et démesuré d’Arawn. L’ensemble vise clairement le spectaculaire et assume son identité jusqu’au bout.
Le scénario, construit comme une grande fresque mythologique, enchaîne destin tragique, luttes fratricides et montée en puissance du personnage-titre. La narration reste efficace : directe, rythmée, pensée pour divertir. La violence, omniprésente, et le souffle héroïque contribuent à donner une dimension épique continue, plus émotionnelle que subtile, mais parfaitement cohérente avec le parti pris général.
Arawn s’adresse surtout à ceux qui recherchent une BD de dark-fantasy intense : combats, sensualité, enjeux grandioses et un graphisme dense qui capte le regard.
Série qui surprend par son contraste : derrière une intrigue en apparence simple, presque ironique, se déploie un récit d’une dureté morale réelle. La progression d’Alim dans cet univers théocratique, rigide et souvent cruel, produit une tension continue, presque révoltante par moments. Le scénario joue habilement sur les ruptures, les ellipses et les changements d’environnement, ce qui confère à l’ensemble une profondeur inattendue. Cette structure donne du poids à chaque étape de la fuite, tout en maintenant une lecture fluide.
Le dessin, d’abord perçu comme caricatural, s’impose progressivement comme un élément central de l’équilibre du récit. Il donne une légèreté apparente qui sert justement à souligner la gravité de ce qui se joue en arrière-plan. L’expressivité, la dynamique des cases et la gestion des décors accompagnent efficacement la narration, rendant l’univers cohérent sans alourdir la lecture. Le contraste entre style graphique et thèmes abordés fonctionne pleinement.
La série pourra plaire à ceux qui apprécient les récits d’aventure construits sur une critique sociale forte, avec un rythme soutenu et un univers très structuré. Les lecteurs cherchant une fantasy « légère » pourraient être désarçonnés par la noirceur sous-jacente.
Les points forts résident dans la cohérence du monde, la tension psychologique et l’usage intelligent des ellipses. La limite principale est précisément ce décalage entre apparence et réalité, qui peut laisser une impression de trahison ou de malaise.
2.5
Une série qui s'adresse clairement aux ados.
On est donc encore une fois dans un univers de fantasy comme il y en a des centaines dans les œuvres de fictions japonaises. Un point positif est que la série ne se prends pas trop au sérieux et il y a des gags qui fonctionne...et d'autres moins. Comme le dit Ro, le ton de la série est tout de même un peu immature quoique je préfère le héros qui s'en fout de voir des filles nues ou lui montre de l'affection à tous les héros de mangas harem qui semblent traumatisé chaque fois qu'ils voient une fille un peu nue. Le coté fanservice ne me dérange pas si c'est bien fait et ici on tombe dans les travers où les scènes de nues et de petites culottes semblent souvent forcés. Ados j'aurais surement trouvé ça excitant, mais là en tant qu'adulte je trouve que c'est un peu lourd et je n'aime pas trop voir un personnage féminin qui est très jeune porté un costume sexy.
Le principal problème que j'ai eu avec la série est que c'est vraiment trop long et que j'ai abandonné en cours de route. C'est vraiment la série manga typique qui m'amuse un moment et passé les premiers tomes je commence à me lasser un peu parce que ça finit par tourner en rond et durer éternellement pour aucune raison que ça marche avec les lecteurs japonais alors le mangaka étire la sauce jusqu'au bout.
L’intrigue n’a sans doute rien d’extraordinaire, et le lecteur est prié d’avaler quelques couleuvres (et d’attendre en vain des explications concernant l’origine de la menace qui fait fortement monter la tension).
Mais, ceci étant dit, on ne peut que reconnaitre à Trondheim – encore une fois ! – qu’il est un bon manieur de mots et qu’il sait concocter de petites histoires très lisibles. Ici il s’amuse avec pas mal de clichés de l’Amérique des années 1950, l’ambiance guerre froide, une inspiration comics Us de l’époque (il y ajoute même l’intervention de Nazis revanchards !). Il s’est fait plaisir, et c’est globalement communicatif.
Surtout qu’il est bien accompagné dans son projet avec Biancarelli, qui reconstitue bien les décors d’époque, et se glisse tout aussi bien dans la peau d’un dessinateur de comics ou de strips des années 1950, le trait étant à peine modernisé. Je note juste quelques menus défauts de perspectives, mais bon, ne chipotons pas, le rendu est plutôt agréable.
Une lecture détente plaisante, on passe un moment agréable, malgré une histoire brinquebalante, usant de quelques facilités (que l’on accepte facilement en fait), et une fin un peu brusque et sans réponse rationnelle (mais cela était-il possible, ou souhaitable ?).
Note réelle 3,5/5.
Je viens à peine de découvrir les aventures d'Adèle Blanc-Sec avec la lecture des trois premiers tomes, honte à moi.
Le succès et la reconnaissance de cette série est un petit miracle car le style est très particulier, que ce soit dans le dessin (c'est Tardi donc on aime ou on déteste) ou dans la narration. Nestor Burma du même auteur est beaucoup plus accessible par exemple.
C'est très loufoque et troisième degré, avec un humour burlesque et un peu élitiste réservé aux adultes.
La bd qui s'en rapproche le plus pour moi est un autre ovni publié bien plus tard de l'autre côté de l'Atlantique, Madman de Allreed. Même légèreté, intrusion du fantastique, ton absurde ou cocasse, avec plein de références un peu intellos.
Le tome 1 est assez brouillon au niveau de l'intrigue et cela s'améliore ensuite. A chaque tome, il y a des références aux épisodes précédents, et à la fin, un teasing du prochain volume. C'est un peu pénible, on se sent obligé d'avoir lu tout ce qui précède et ce qui va paraître.
Pas un coup de foudre, même si on voit bien qu'on a affaire à l'œuvre atypique d'un auteur sans concession.
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La Liste - Mitsuko
Je découvre cet auteur espagnol avec cet album et, malgré mes préventions au départ, je dois dire que c’est plutôt une bonne pioche. Le point de départ est assez classique et sentait le déjà-vu dans le genre porno : un homme, Guillermo, est embarqué par ses potes pour un enterrement de vie de garçon au Japon. Bien évidemment ça tourne rapidement à l’orgie. Mais, tout aussi rapidement, Ikna introduit un nouveau paramètre, lorsque Guillermo fait la connaissance de Mitsuko qui, dès qu’elle a un orgasme, permet au jeune homme de retourner dans son passé, pour draguer et plus si affinité, toutes les filles ou femmes qu’il n'avait pas osé aborder. C’est ainsi l’occasion pour lui de coucher avec toutes ces femmes, et « d’effacer » d’éventuels regrets. Mais un nouveau rebondissement va transformer ce fantasme en catastrophe… Le récit est dynamique, ne se prend jamais totalement au sérieux. Les scènes de sexe sont explicites mais finalement elles n’occupent pas une place si importante. Surtout, le dessin d’Ikna est pour beaucoup dans le rythme et le plaisir de lecture. Son trait caricatural fait merveille, et donne une touche parodique, humoristique à cette histoire pour adultes (j’ai juste trouvé les couleurs informatiques trop tranchées). Une petite lecture agréable, pas émoustillante, mais fraiche et quelque peu amusante.
Bluebells wood
Bluebells Wood est un récit très introspectif qui avance à un rythme volontairement lent. L’histoire explore surtout le deuil, la solitude et une forme d’amour mélancolique, plus suggéré que véritablement raconté. Le scénario se concentre sur les états d’âme et la sensibilité des personnages plutôt que sur l’action, ce qui donne à l’ensemble une tonalité contemplative. Graphiquement, l’album est remarquable. Les planches sont très travaillées, parfois presque picturales, et la mise en scène s’approche davantage de la poésie visuelle que de la narration classique. Les couleurs et les compositions installent une atmosphère douce-amère qui accompagne parfaitement le propos. Cette identité graphique forte est clairement le point le plus marquant de l’œuvre. L’intrigue, plus diffuse que véritablement construite, se vit davantage comme une mélodie lente que comme un récit à rebondissements. Cela pourra séduire ceux qui recherchent une lecture sensible et immersive, mais laisser plus distants ceux qui préfèrent un scénario structuré. L’ensemble fonctionne pourtant bien dans son registre : une BD intime, élégante et émotionnelle.
Le Permis
Sortie cette année, cette BD m'a intéressée parce qu'elle exploite une idée que j'avais eu après discussion avec une amie assistante sociale qui maintient qu'il faut un permis pour être parent. Cette idée étrange, donc, est ici au centre d'une BD dystopique/utopique qui parle d'un monde futuriste (mais proche) où le bonheur est obligatoire, la médiation et l'apaisement des sentiment encouragé. Pour un avis simple, je trouve que la BD est globalement sympathique, mais pas assez aboutie dans le traitement de son idée. Lorsqu'on parle de monde où sourire est une obligation, la médiation et le contrôle des sentiments la norme, la naissance conditionné à un permis absurde dans un système kafkaïen, j’imagine un monde dystopique à l'extrême ou absurde au dernier degré. Mais la BD reste "sage", avec une finalité un peu trop facile et qui esquive les questions soulevées dans le récit. Pour plus de détails, disons déjà que le dessin fait très typé, avec un trait qui m'évoque Pénélope Bagieu ou Margaux Motin dans le trait, avec des personnages très souples et des a-plats de couleurs qui renforcent l'aspect cartoon du trait. C'est ce qui renforce l'aspect grotesque des scènes -voir en galerie- pour accentuer l'absurde de ce monde, donnant un ton humoristique et décalé à l'ensemble. Ce qui est dommage, lorsqu'une partie du récit flirte plus avec le glauque et le malsain, notamment lors de la scène d'examen avec le faux bébé. Mais globalement ça fonctionne plutôt bien. Ce que je regrette c'est que la BD, malgré de bonnes idées, résout tout par un "je pars chez des gens qui sont restés normaux" qui semble tout résoudre magiquement. Si ce monde étrange et dystopique s'est installé, c'est pour répondre à des problématiques (évoquées mais jamais traités) et qu'en est-il en dehors ? Ce monde étrange qu'on nous dépeint, à quoi fait-il écho ? Quel est l'avenir en dehors de cette colonie ? Tant que questions balayées sous le tapis par les auteurs qui ne s’embarrassent pas de développer le lore qu'ils installent et c'est vraiment dommage. C'est la grande faiblesse du récit qui reste dans la surface de toutes les questions traitées. Maintenant c'est aussi parce que le scénario fait le choix, clair et évident, de critiquer une société "instagram". Chacun doit être un parent-citoyen modèle, on reste dans la retenue des émotions, dans l’apaisement des conflits et le dialogue constant. C'est une société du paraitre, où rien de personnel ne s'affiche, dans lequel tout doit être beau, merveilleux, pacifié. Une sorte de dictature du bonheur qui pourtant ne marche clairement pas. Je comprends la critique sous-jacente, celle d'un monde de réseau et d'application, de technologie et de surveillance de notre participation à améliorer la société. Tout pue le faux, mais on fait semblant, pour notre bien à tous. Effectivement, je n'aime pas cette société. Comme mentionné, la BD est à la croisé de deux thématiques mais en rate l'une des deux, selon moi. J'aurais aimé voir le développement des questions sociétales autour des naissances, pourquoi le choix individuel bascule vers un choix d'Etat, un choix politique et administratif. Il y a beaucoup de développement possible, de l'horreur kafkaïenne pure à des questionnements politiques et sociaux majeurs, mais la BD les esquive. Et je regrette un peu le choix d'avoir fait une fin aussi "heureuse", qui ne permet pas de réellement s'emparer d'un sujet pourtant très intéressant. Dommage, une BD qui n'est pas mauvaise mais me laisse un gout d'inachevé.
Arawn
La série propose une fantasy épique pleinement assumée, portée par un dessin extrêmement expressif : corps sculptés, visages tendus, compositions puissantes. Cette exagération permanente — y compris une hypersexualisation marquée — s’inscrit dans l’esthétique choisie, presque opératique, et correspond bien à l’univers brutal, mystique et démesuré d’Arawn. L’ensemble vise clairement le spectaculaire et assume son identité jusqu’au bout. Le scénario, construit comme une grande fresque mythologique, enchaîne destin tragique, luttes fratricides et montée en puissance du personnage-titre. La narration reste efficace : directe, rythmée, pensée pour divertir. La violence, omniprésente, et le souffle héroïque contribuent à donner une dimension épique continue, plus émotionnelle que subtile, mais parfaitement cohérente avec le parti pris général. Arawn s’adresse surtout à ceux qui recherchent une BD de dark-fantasy intense : combats, sensualité, enjeux grandioses et un graphisme dense qui capte le regard.
Alim le tanneur
Série qui surprend par son contraste : derrière une intrigue en apparence simple, presque ironique, se déploie un récit d’une dureté morale réelle. La progression d’Alim dans cet univers théocratique, rigide et souvent cruel, produit une tension continue, presque révoltante par moments. Le scénario joue habilement sur les ruptures, les ellipses et les changements d’environnement, ce qui confère à l’ensemble une profondeur inattendue. Cette structure donne du poids à chaque étape de la fuite, tout en maintenant une lecture fluide. Le dessin, d’abord perçu comme caricatural, s’impose progressivement comme un élément central de l’équilibre du récit. Il donne une légèreté apparente qui sert justement à souligner la gravité de ce qui se joue en arrière-plan. L’expressivité, la dynamique des cases et la gestion des décors accompagnent efficacement la narration, rendant l’univers cohérent sans alourdir la lecture. Le contraste entre style graphique et thèmes abordés fonctionne pleinement. La série pourra plaire à ceux qui apprécient les récits d’aventure construits sur une critique sociale forte, avec un rythme soutenu et un univers très structuré. Les lecteurs cherchant une fantasy « légère » pourraient être désarçonnés par la noirceur sous-jacente. Les points forts résident dans la cohérence du monde, la tension psychologique et l’usage intelligent des ellipses. La limite principale est précisément ce décalage entre apparence et réalité, qui peut laisser une impression de trahison ou de malaise.
Classroom for heroes
2.5 Une série qui s'adresse clairement aux ados. On est donc encore une fois dans un univers de fantasy comme il y en a des centaines dans les œuvres de fictions japonaises. Un point positif est que la série ne se prends pas trop au sérieux et il y a des gags qui fonctionne...et d'autres moins. Comme le dit Ro, le ton de la série est tout de même un peu immature quoique je préfère le héros qui s'en fout de voir des filles nues ou lui montre de l'affection à tous les héros de mangas harem qui semblent traumatisé chaque fois qu'ils voient une fille un peu nue. Le coté fanservice ne me dérange pas si c'est bien fait et ici on tombe dans les travers où les scènes de nues et de petites culottes semblent souvent forcés. Ados j'aurais surement trouvé ça excitant, mais là en tant qu'adulte je trouve que c'est un peu lourd et je n'aime pas trop voir un personnage féminin qui est très jeune porté un costume sexy. Le principal problème que j'ai eu avec la série est que c'est vraiment trop long et que j'ai abandonné en cours de route. C'est vraiment la série manga typique qui m'amuse un moment et passé les premiers tomes je commence à me lasser un peu parce que ça finit par tourner en rond et durer éternellement pour aucune raison que ça marche avec les lecteurs japonais alors le mangaka étire la sauce jusqu'au bout.
Green Witch Village
L’intrigue n’a sans doute rien d’extraordinaire, et le lecteur est prié d’avaler quelques couleuvres (et d’attendre en vain des explications concernant l’origine de la menace qui fait fortement monter la tension). Mais, ceci étant dit, on ne peut que reconnaitre à Trondheim – encore une fois ! – qu’il est un bon manieur de mots et qu’il sait concocter de petites histoires très lisibles. Ici il s’amuse avec pas mal de clichés de l’Amérique des années 1950, l’ambiance guerre froide, une inspiration comics Us de l’époque (il y ajoute même l’intervention de Nazis revanchards !). Il s’est fait plaisir, et c’est globalement communicatif. Surtout qu’il est bien accompagné dans son projet avec Biancarelli, qui reconstitue bien les décors d’époque, et se glisse tout aussi bien dans la peau d’un dessinateur de comics ou de strips des années 1950, le trait étant à peine modernisé. Je note juste quelques menus défauts de perspectives, mais bon, ne chipotons pas, le rendu est plutôt agréable. Une lecture détente plaisante, on passe un moment agréable, malgré une histoire brinquebalante, usant de quelques facilités (que l’on accepte facilement en fait), et une fin un peu brusque et sans réponse rationnelle (mais cela était-il possible, ou souhaitable ?). Note réelle 3,5/5.
Adèle Blanc-Sec
Je viens à peine de découvrir les aventures d'Adèle Blanc-Sec avec la lecture des trois premiers tomes, honte à moi. Le succès et la reconnaissance de cette série est un petit miracle car le style est très particulier, que ce soit dans le dessin (c'est Tardi donc on aime ou on déteste) ou dans la narration. Nestor Burma du même auteur est beaucoup plus accessible par exemple. C'est très loufoque et troisième degré, avec un humour burlesque et un peu élitiste réservé aux adultes. La bd qui s'en rapproche le plus pour moi est un autre ovni publié bien plus tard de l'autre côté de l'Atlantique, Madman de Allreed. Même légèreté, intrusion du fantastique, ton absurde ou cocasse, avec plein de références un peu intellos. Le tome 1 est assez brouillon au niveau de l'intrigue et cela s'améliore ensuite. A chaque tome, il y a des références aux épisodes précédents, et à la fin, un teasing du prochain volume. C'est un peu pénible, on se sent obligé d'avoir lu tout ce qui précède et ce qui va paraître. Pas un coup de foudre, même si on voit bien qu'on a affaire à l'œuvre atypique d'un auteur sans concession.