Le Scorpion coche exactement toutes les cases du grand récit d’aventure assumé. On y trouve des sociétés secrètes persuadées de gouverner le monde, des jeux de pouvoir permanents, de l’archéologie, une mythologie religieuse revisitée et un héros parfaitement héroïque, charismatique, et séduisant. Le scénario privilégie clairement le plaisir de lecture : complots, suspense, trahisons, voyages et révélations s’enchaînent avec un rythme très efficace, porté par un contexte romain foisonnant où l’Église, les intrigues politiques et les monuments deviennent de véritables moteurs narratifs.
L’exactitude historique n’est clairement pas l’objectif principal, et ce n’est jamais un problème. La série joue avec l’Histoire, la mythologie et les symboles religieux pour nourrir une aventure généreuse et spectaculaire. Rome est tour à tour magnifique et dangereuse, l’Orient est sec, sensuel et mystérieux, et les déplacements constants apportent un souffle bienvenu à une intrigue qui ne s’enlise jamais. Les personnages secondaires sont volontairement typés mais fonctionnent parfaitement : traîtres aux visages serpents, alliés bonhommes, figures d’autorité inquiétantes, femmes fatales ou envoûtantes… tout relève du cliché, mais du cliché maîtrisé et pleinement assumé.
Graphiquement, la série est un vrai plaisir. Le dessin, spectaculaire et lisible, sublime les décors, les costumes et les corps, avec une galerie de personnages immédiatement identifiables. Les habits, les architectures et les ambiances visuelles puisent sans complexe dans l’imaginaire collectif, renforçant encore l’efficacité du récit. Le Scorpion n’est pas une révolution du genre, mais une série d’aventure généreuse, addictive et réjouissante, qui se dévore tome après tome avec un plaisir constant.
Œuvre historique solide et maîtrisée, qui dépasse le simple récit de traque ou de duel. Le fil narratif autour de l’affrontement et de l’évolution des techniques martiales — du combat médiéval à la rapière renaissante — sert de métaphore claire à une rupture bien plus large : révolution intellectuelle, religieuse et politique portée par l’essor du protestantisme. Le conflit individuel reflète efficacement une Europe en mutation profonde.
Le choix du Jura comme décor est particulièrement pertinent. Région rarement exploitée en bande dessinée, elle renforce l’impression d’un entre-deux historique souvent délaissé : ni le Moyen Âge héroïsé, ni la Renaissance idéalisée, mais une période de transition brutale, confuse et violente. Cette localisation participe pleinement à l’identité du récit et à sa crédibilité.
Graphiquement, le dessin adopte un style volontairement rétro, lisible et rigoureux, parfaitement adapté au registre historique.
Série de science-fiction post-apocalyptique maîtrisée, au propos lisible et nuancé. Le cadre évoque des codes très film/série, mais le récit s’en démarque par une douceur de ton et une attention portée aux trajectoires humaines, sans édulcorer la dureté du contexte. L’équilibre entre dimension feel-good et réalisme cru fonctionne, donnant de l’épaisseur à l’univers.
Les thèmes de la croyance, de l’espoir collectif et de la connaissance comme socle civilisationnel sont traités avec cohérence et sans lourdeur démonstrative. Le scénario avance de manière fluide, avec une progression claire des enjeux et une vraie réflexion sur la transmission du savoir face à l’obscurantisme. Les personnages sont rapidement identifiables, bien caractérisés, et gagnent en attachement au fil des pages grâce à des intentions et des personnalités clairement posées.
Graphiquement, le trait rond et fluide soutient efficacement le récit. Il apporte une lisibilité constante et une forme de chaleur qui contraste intelligemment avec la gravité du monde décrit.
One-shot de très bonne tenue, fidèle aux récits introspectifs et aux relations humaines caractéristiques de David Foenkinos. Le propos est posé, réfléchi, sans chercher à bouleverser le lecteur : il invite plutôt à une observation attentive des trajectoires de vie et des micro-déséquilibres émotionnels. Le choix d’un narrateur omniscient à la troisième personne instaure une distance bienvenue, qui renforce la pudeur du récit.
La thématique centrale — perte, deuil et reconstruction — est objectivement lourde, mais traitée avec une légèreté maîtrisée et une réelle bienveillance. Le récit progresse comme une valse discrète, fluide, laissant le temps aux silences et aux non-dits. En filigrane, des thèmes très actuels émergent : relations professionnelles, work-life balance, et surtout la frontière parfois ténue entre relation hiérarchique saine et dynamique potentiellement toxique.
Graphiquement, le dessin se montre doux, lisible et cohérent avec l’intention narrative. S’il ne s’agit pas d’un style qui me plait particulièrement, il sert efficacement le récit par sa sobriété et son sens du rythme, en adéquation avec l’atmosphère feutrée de l’ensemble.
La série propose un récit sombre qui s’appuie efficacement sur l’imaginaire collectif du vampire et du roman noir, sans jamais basculer dans le fantastique démonstratif. Le scénario assume une approche volontairement énigmatique : les réponses sont distillées avec parcimonie, parfois jamais totalement livrées. Cette retenue nourrit l’atmosphère mais peut aussi laisser un sentiment d’inachevé, avec plusieurs zones d’ombre qui persistent jusqu’au bout.
La narration privilégie une forme d’errance plus qu’un fil linéaire classique. Le rythme est lent, parfois étiré, malgré la présence régulière d’action et de combats. L’ensemble reste contemplatif, marqué par un fort sentiment d’injustice et une vision très noire de l’humanité. Cette lenteur renforce l’ambiance, mais demande une réelle implication du lecteur et peut frustrer par moments.
Graphiquement, le dessin est globalement très réussi et parfaitement en phase avec le propos : réaliste, sombre, oppressant. Quelques passages apparaissent toutefois d’une qualité ou d’une intensité visuelle inégale. Malgré cela, l’identité graphique reste solide et soutient efficacement cette épopée crépusculaire, plus sensorielle que spectaculaire.
Très bonne série, construite comme un film transposé en planches. Le découpage et le rythme sont clairement cinématographiques, avec une narration fluide et tendue qui maintient l’intérêt sans temps mort.
Le scénario reste volontairement simple : une enquête teintée de vengeance dans un Far West brutal, peuplé de truands sanguinaires, de figures malsaines et d’Indiens marginalisés. Rien de fondamentalement original sur le fond, mais un univers dur, sans morale ni loi, parfaitement cohérent.
La vraie force du récit réside dans son protagoniste : un anti-héros faillible, éloigné du cow-boy invincible, dont le parcours donne de l’épaisseur au récit. Le dessin est remarquable : très graphique, précis, jamais décoratif, riche en détails. Il soutient pleinement la dynamique du récit et renforce cette impression de western sec et violent.
Œuvre déroutante et paradoxale. Le récit est prenant, parfois même très impliquant émotionnellement, tout en laissant une impression persistante de flou. Le contexte géopolitique, pourtant central, est volontairement évacué : la guerre est là, sans explication, sans cadre clair, avec des situations tantôt proches d’un conflit total, tantôt d’une guérilla diffuse. Cette indétermination crée des incohérences factuelles, notamment dans la gestion des adultes et de la survie des adolescents, qui peuvent désarçonner.
Les thématiques suivent la même logique éclatée : amour impossible, troubles alimentaires, résilience, cellule familiale, survie. Rien n’est réellement hiérarchisé ni approfondi de façon frontale. Ce manque de lisibilité peut frustrer, mais participe aussi à l’identité du récit : une expérience sensorielle et émotionnelle plus qu’un discours construit. Malgré plusieurs choix scénaristiques déstabilisants, l’ensemble fonctionne et laisse une impression globalement positive.
Graphiquement, le contraste est marqué : un dessin simple, coloré, presque naïf, proche de codes adolescents, qui tranche avec la dureté du fond. Ce décalage, loin d’affaiblir l’œuvre, renforce son étrangeté et son impact. Une oeuvre déroutante, peut-être imparfaite mais singulière, qui mérite d’être lue pour se forger un avis personnel.
Œuvre d’aventure nord-américaine maîtrisée, portée avant tout par une proposition graphique remarquable. Le dessin est d’une grande précision, les couleurs sont sublimes et l’atmosphère — nature hostile, immensité, solitude — est immédiatement saisissable. Chaque planche témoigne d’un travail graphique et documentaire approfondi, probablement nourri d’une solide recherche.
Le scénario reste volontairement linéaire et classique, mais assume pleinement cette simplicité. Il correspond exactement à ce que l’on attend d’un récit d’aventure de ce type : progression claire, immersion continue, efficacité narrative sans détours inutiles. Les thèmes de fond sont présents et correctement traités, sans jamais prendre le pas sur l’objectif principal : raconter une belle aventure.
Une bande dessinée de grande qualité, plus contemplative que démonstrative, qui privilégie l’expérience de lecture et l’immersion visuelle à la complexité narrative.
Série très aboutie, qui déploie son récit de manière progressive et maîtrisée. Le scénario fonctionne clairement en crescendo : il démarre comme une aventure jeunesse assez classique pour révéler, au fil des tomes, une densité narrative et thématique bien plus riche. La lecture offre plusieurs niveaux d’interprétation, ce qui en fait à la fois une excellente BD pour enfants et une œuvre particulièrement pertinente pour un lectorat adulte.
L’univers est solidement construit et cohérent, avec un monde qui se dévoile sans lourdeur explicative. Les personnages gagnent en épaisseur au fil de l’aventure et deviennent progressivement très attachants, grâce à une évolution naturelle et crédible. Le collectif prime sur l’individu, ce qui renforce l’identité du récit et son originalité.
Graphiquement, le dessin adopte un style volontairement naïf et enfantin, parfaitement en adéquation avec l’univers, tout en faisant preuve d’une vraie précision et d’une recherche visuelle soutenue. Les thèmes abordés sont traités avec une réelle subtilité, sans moralisme appuyé, laissant place à une sensibilité sincère et intelligente.
Voila une BD originale dans son histoire et dans son traitement. C'est une satire de la Chine de Mao, celle où les slogans ont pris le pas sur la réalité, tandis que l'asservissement se généralise et que le peuple subit. Mais aussi une BD sur l'adolescence, la jeunesse et l'amour.
Je ne savais pas vraiment à quoi m'attendre à l'ouverture de la BD, mais très vite j'ai été conquis. Le trait de Alex W. Inker marche très bien avec le ton de la BD, coloré et en même temps massif dans les corps. Les personnages sont très baraqué, avec des traits de visages très marqués, voir durs, qui laissent éclater les émotions lorsqu'elles arrivent. Un trait qui va de paire avec son propos dans toute la BD.
Et l'histoire est franchement amusante. Sous la caricature évidente, la BD est une histoire d'amour adolescente, de celle qui va marquer à vie. Et cet amour simple, léger, qui ne s’embarrasse plus du reste du monde, devient le contrepoint de cette société chinoise. Alors que l'entre-soi et le népotisme s'installe, que le clientélisme et l'endoctrinement prennent toute la place, il y a ce couple réuni pendant une petite période, qui finit par tout rejeter, comprenant que tout cela est vain pour le bonheur. Le récit prend du temps à se développer, mais a des scènes vraiment belle, notamment lorsqu'ils rivalisent pour tout détruire dans la maison. Une belle métaphore de cette fouge qui les anime alors.
Je dois dire que j'ai beaucoup aimé la BD. Elle n'est pas dénuée d'humour, sait se faire sérieuse, joue sur les sentiments et porte un message sympathique. Une histoire que je ne m'attendais pas à lire mais qui est recommandée !
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Le Scorpion
Le Scorpion coche exactement toutes les cases du grand récit d’aventure assumé. On y trouve des sociétés secrètes persuadées de gouverner le monde, des jeux de pouvoir permanents, de l’archéologie, une mythologie religieuse revisitée et un héros parfaitement héroïque, charismatique, et séduisant. Le scénario privilégie clairement le plaisir de lecture : complots, suspense, trahisons, voyages et révélations s’enchaînent avec un rythme très efficace, porté par un contexte romain foisonnant où l’Église, les intrigues politiques et les monuments deviennent de véritables moteurs narratifs. L’exactitude historique n’est clairement pas l’objectif principal, et ce n’est jamais un problème. La série joue avec l’Histoire, la mythologie et les symboles religieux pour nourrir une aventure généreuse et spectaculaire. Rome est tour à tour magnifique et dangereuse, l’Orient est sec, sensuel et mystérieux, et les déplacements constants apportent un souffle bienvenu à une intrigue qui ne s’enlise jamais. Les personnages secondaires sont volontairement typés mais fonctionnent parfaitement : traîtres aux visages serpents, alliés bonhommes, figures d’autorité inquiétantes, femmes fatales ou envoûtantes… tout relève du cliché, mais du cliché maîtrisé et pleinement assumé. Graphiquement, la série est un vrai plaisir. Le dessin, spectaculaire et lisible, sublime les décors, les costumes et les corps, avec une galerie de personnages immédiatement identifiables. Les habits, les architectures et les ambiances visuelles puisent sans complexe dans l’imaginaire collectif, renforçant encore l’efficacité du récit. Le Scorpion n’est pas une révolution du genre, mais une série d’aventure généreuse, addictive et réjouissante, qui se dévore tome après tome avec un plaisir constant.
Le Maître d'armes
Œuvre historique solide et maîtrisée, qui dépasse le simple récit de traque ou de duel. Le fil narratif autour de l’affrontement et de l’évolution des techniques martiales — du combat médiéval à la rapière renaissante — sert de métaphore claire à une rupture bien plus large : révolution intellectuelle, religieuse et politique portée par l’essor du protestantisme. Le conflit individuel reflète efficacement une Europe en mutation profonde. Le choix du Jura comme décor est particulièrement pertinent. Région rarement exploitée en bande dessinée, elle renforce l’impression d’un entre-deux historique souvent délaissé : ni le Moyen Âge héroïsé, ni la Renaissance idéalisée, mais une période de transition brutale, confuse et violente. Cette localisation participe pleinement à l’identité du récit et à sa crédibilité. Graphiquement, le dessin adopte un style volontairement rétro, lisible et rigoureux, parfaitement adapté au registre historique.
Le Culte de Mars
Série de science-fiction post-apocalyptique maîtrisée, au propos lisible et nuancé. Le cadre évoque des codes très film/série, mais le récit s’en démarque par une douceur de ton et une attention portée aux trajectoires humaines, sans édulcorer la dureté du contexte. L’équilibre entre dimension feel-good et réalisme cru fonctionne, donnant de l’épaisseur à l’univers. Les thèmes de la croyance, de l’espoir collectif et de la connaissance comme socle civilisationnel sont traités avec cohérence et sans lourdeur démonstrative. Le scénario avance de manière fluide, avec une progression claire des enjeux et une vraie réflexion sur la transmission du savoir face à l’obscurantisme. Les personnages sont rapidement identifiables, bien caractérisés, et gagnent en attachement au fil des pages grâce à des intentions et des personnalités clairement posées. Graphiquement, le trait rond et fluide soutient efficacement le récit. Il apporte une lisibilité constante et une forme de chaleur qui contraste intelligemment avec la gravité du monde décrit.
La Délicatesse
One-shot de très bonne tenue, fidèle aux récits introspectifs et aux relations humaines caractéristiques de David Foenkinos. Le propos est posé, réfléchi, sans chercher à bouleverser le lecteur : il invite plutôt à une observation attentive des trajectoires de vie et des micro-déséquilibres émotionnels. Le choix d’un narrateur omniscient à la troisième personne instaure une distance bienvenue, qui renforce la pudeur du récit. La thématique centrale — perte, deuil et reconstruction — est objectivement lourde, mais traitée avec une légèreté maîtrisée et une réelle bienveillance. Le récit progresse comme une valse discrète, fluide, laissant le temps aux silences et aux non-dits. En filigrane, des thèmes très actuels émergent : relations professionnelles, work-life balance, et surtout la frontière parfois ténue entre relation hiérarchique saine et dynamique potentiellement toxique. Graphiquement, le dessin se montre doux, lisible et cohérent avec l’intention narrative. S’il ne s’agit pas d’un style qui me plait particulièrement, il sert efficacement le récit par sa sobriété et son sens du rythme, en adéquation avec l’atmosphère feutrée de l’ensemble.
La Chronique des Immortels
La série propose un récit sombre qui s’appuie efficacement sur l’imaginaire collectif du vampire et du roman noir, sans jamais basculer dans le fantastique démonstratif. Le scénario assume une approche volontairement énigmatique : les réponses sont distillées avec parcimonie, parfois jamais totalement livrées. Cette retenue nourrit l’atmosphère mais peut aussi laisser un sentiment d’inachevé, avec plusieurs zones d’ombre qui persistent jusqu’au bout. La narration privilégie une forme d’errance plus qu’un fil linéaire classique. Le rythme est lent, parfois étiré, malgré la présence régulière d’action et de combats. L’ensemble reste contemplatif, marqué par un fort sentiment d’injustice et une vision très noire de l’humanité. Cette lenteur renforce l’ambiance, mais demande une réelle implication du lecteur et peut frustrer par moments. Graphiquement, le dessin est globalement très réussi et parfaitement en phase avec le propos : réaliste, sombre, oppressant. Quelques passages apparaissent toutefois d’une qualité ou d’une intensité visuelle inégale. Malgré cela, l’identité graphique reste solide et soutient efficacement cette épopée crépusculaire, plus sensorielle que spectaculaire.
L'Etoile du Désert
Très bonne série, construite comme un film transposé en planches. Le découpage et le rythme sont clairement cinématographiques, avec une narration fluide et tendue qui maintient l’intérêt sans temps mort. Le scénario reste volontairement simple : une enquête teintée de vengeance dans un Far West brutal, peuplé de truands sanguinaires, de figures malsaines et d’Indiens marginalisés. Rien de fondamentalement original sur le fond, mais un univers dur, sans morale ni loi, parfaitement cohérent. La vraie force du récit réside dans son protagoniste : un anti-héros faillible, éloigné du cow-boy invincible, dont le parcours donne de l’épaisseur au récit. Le dessin est remarquable : très graphique, précis, jamais décoratif, riche en détails. Il soutient pleinement la dynamique du récit et renforce cette impression de western sec et violent.
How I live Now
Œuvre déroutante et paradoxale. Le récit est prenant, parfois même très impliquant émotionnellement, tout en laissant une impression persistante de flou. Le contexte géopolitique, pourtant central, est volontairement évacué : la guerre est là, sans explication, sans cadre clair, avec des situations tantôt proches d’un conflit total, tantôt d’une guérilla diffuse. Cette indétermination crée des incohérences factuelles, notamment dans la gestion des adultes et de la survie des adolescents, qui peuvent désarçonner. Les thématiques suivent la même logique éclatée : amour impossible, troubles alimentaires, résilience, cellule familiale, survie. Rien n’est réellement hiérarchisé ni approfondi de façon frontale. Ce manque de lisibilité peut frustrer, mais participe aussi à l’identité du récit : une expérience sensorielle et émotionnelle plus qu’un discours construit. Malgré plusieurs choix scénaristiques déstabilisants, l’ensemble fonctionne et laisse une impression globalement positive. Graphiquement, le contraste est marqué : un dessin simple, coloré, presque naïf, proche de codes adolescents, qui tranche avec la dureté du fond. Ce décalage, loin d’affaiblir l’œuvre, renforce son étrangeté et son impact. Une oeuvre déroutante, peut-être imparfaite mais singulière, qui mérite d’être lue pour se forger un avis personnel.
Frenchman
Œuvre d’aventure nord-américaine maîtrisée, portée avant tout par une proposition graphique remarquable. Le dessin est d’une grande précision, les couleurs sont sublimes et l’atmosphère — nature hostile, immensité, solitude — est immédiatement saisissable. Chaque planche témoigne d’un travail graphique et documentaire approfondi, probablement nourri d’une solide recherche. Le scénario reste volontairement linéaire et classique, mais assume pleinement cette simplicité. Il correspond exactement à ce que l’on attend d’un récit d’aventure de ce type : progression claire, immersion continue, efficacité narrative sans détours inutiles. Les thèmes de fond sont présents et correctement traités, sans jamais prendre le pas sur l’objectif principal : raconter une belle aventure. Une bande dessinée de grande qualité, plus contemplative que démonstrative, qui privilégie l’expérience de lecture et l’immersion visuelle à la complexité narrative.
Bergères Guerrières
Série très aboutie, qui déploie son récit de manière progressive et maîtrisée. Le scénario fonctionne clairement en crescendo : il démarre comme une aventure jeunesse assez classique pour révéler, au fil des tomes, une densité narrative et thématique bien plus riche. La lecture offre plusieurs niveaux d’interprétation, ce qui en fait à la fois une excellente BD pour enfants et une œuvre particulièrement pertinente pour un lectorat adulte. L’univers est solidement construit et cohérent, avec un monde qui se dévoile sans lourdeur explicative. Les personnages gagnent en épaisseur au fil de l’aventure et deviennent progressivement très attachants, grâce à une évolution naturelle et crédible. Le collectif prime sur l’individu, ce qui renforce l’identité du récit et son originalité. Graphiquement, le dessin adopte un style volontairement naïf et enfantin, parfaitement en adéquation avec l’univers, tout en faisant preuve d’une vraie précision et d’une recherche visuelle soutenue. Les thèmes abordés sont traités avec une réelle subtilité, sans moralisme appuyé, laissant place à une sensibilité sincère et intelligente.
Servir le peuple
Voila une BD originale dans son histoire et dans son traitement. C'est une satire de la Chine de Mao, celle où les slogans ont pris le pas sur la réalité, tandis que l'asservissement se généralise et que le peuple subit. Mais aussi une BD sur l'adolescence, la jeunesse et l'amour. Je ne savais pas vraiment à quoi m'attendre à l'ouverture de la BD, mais très vite j'ai été conquis. Le trait de Alex W. Inker marche très bien avec le ton de la BD, coloré et en même temps massif dans les corps. Les personnages sont très baraqué, avec des traits de visages très marqués, voir durs, qui laissent éclater les émotions lorsqu'elles arrivent. Un trait qui va de paire avec son propos dans toute la BD. Et l'histoire est franchement amusante. Sous la caricature évidente, la BD est une histoire d'amour adolescente, de celle qui va marquer à vie. Et cet amour simple, léger, qui ne s’embarrasse plus du reste du monde, devient le contrepoint de cette société chinoise. Alors que l'entre-soi et le népotisme s'installe, que le clientélisme et l'endoctrinement prennent toute la place, il y a ce couple réuni pendant une petite période, qui finit par tout rejeter, comprenant que tout cela est vain pour le bonheur. Le récit prend du temps à se développer, mais a des scènes vraiment belle, notamment lorsqu'ils rivalisent pour tout détruire dans la maison. Une belle métaphore de cette fouge qui les anime alors. Je dois dire que j'ai beaucoup aimé la BD. Elle n'est pas dénuée d'humour, sait se faire sérieuse, joue sur les sentiments et porte un message sympathique. Une histoire que je ne m'attendais pas à lire mais qui est recommandée !