Cette série allie idéalement deux manières de s'attacher à son intégrité. Pour la tueuse, par la vengeance soit le moyen le plus universel de se réapproprier sa dignité… Pour le Japon, c'est plus compliqué : doit-il copier l'Occident ? Et on voit que cela va très loin dans le manga. Ou lui opposer la violence ? Même remarque. Extrême dans une société extrême, la tueuse tue, mais pas les innocents, ses sentiments et ses sens. Il est donc on ne peut plus logique qu'on la voit beaucoup faire l'amour. Et d'autant plus que croiser la mort amène un besoin accru d'aller vers la vie.
Le dessin sait retranscrire tout cela, et même donner de la classe à notre lady, ce qui n'est pas rien. La classe est une sorte de grâce bien difficile à saisir. Que ce manga pulvérise de loin Kill Bill !
Que chacun tente de saisir sa chance est bien naturel. Ici, une dame au teint clair veut éviter de passer pour noire afin d'exercer un rôle digne de ses capacités. Quoi de mal ? De même, un homosexuel peut se faire passer pour hétérosexuel pour réussir. Problème : dans le cas de la dame, elle risque d'attirer des ennuis à sa famille, mais est-ce sa faute ? C'est le pouvoir qui veut dissuader les gens de couleur de gravir les échelons, alors qu'il est opportun de passer pour Blanc. Doit-on être l'otage de sa famille ? En admettant que la question soit légitime, pourquoi le dénier pour les luttes collectives et non pour la promotion individuelle ?
On signale que pour couvrir son secret, ses sœurs ne doivent pas avoir d'enfant, mais quelle aurait été leur vie ? D'humiliés par les Blancs.. Il faut des générations pour que les préjugés diminuent. Cela n'aurait pas été agréable pour eux, et par contre-coup, pour leur mère. Si on dit que l'ambitieuse embarque sa famille dans son destin, c'est aussi ce que font les parents en encore plus décisif. Si le destin de miss Green est plus rare que d'être mère, il ne me semble pas plus discutable moralement. Plus inhabituel, c'est tout.
La BD aurait-elle tort de ne pas montrer la lutte collective des Noirs ? Non, pas plus qu'une histoire de lutte collective de faire l'impasse sur les gens réussissant par le masque. Par le Ciel ! Dans un blog où chacun peut prendre un pseudo pour défendre sa liberté et sa sécurité, comment critiquer une dame faisant de même dans un contexte mille fois plus critique !
Refusant de se laisser enfermer dans un destin trop petit pour elle, elle ne juge pas à son goût la lutte collective. Comme sa peau peut la faire passer pour une personne d'ascendance européenne méditerranéenne, elle en profite. Je la plaint d'avoir dû vivre dans un total contrôle de soi. J'en arrive au dessin ! Il rend très bien la vie prudente, on peut dire en apnée, de l'héroïne. Sa famille sait qui elle est mais n'approuve pas son rôle, les Blancs approuvent son rôle mais n'approuverait pas qui elle est, elle est d'une certaine façon, toujours rejetée. Mais elle s'accroche et nous permet d'avoir un point de vue exceptionnel, tant sur les Blancs que sur les Noirs.
Bravo !
L’histoire se laisse lire, mais elle manque singulièrement de fond – et pas mal d’intérêt en fait.
C’est un peu creux. L’intrigue et la personnalité des protagoniste auraient mérité d’être creusées davantage. Au lieu de quoi nous n’avons qu’une succession de « rencontres », d’anecdotes, autour d’un Japonais qui a rejoint sa cousine à Paris. Paris où il fréquente les milieux bourgeois et branchés, multiplie les rencontres féminines, tombe amoureux, tombe de plus ou moins haut, ayant toujours la chance d’être entouré de très jolies dames.
Car, même si j’ai trouvé que le dessin manquait lui aussi de consistance et parfois de précision, Varenne sait y faire pour dessiner les femmes, et il glisse des passages érotiques pour accompagner les déambulations de notre héros.
Mais bon, cela ne suffit pas. L’histoire était semble-t-il initialement destinée à un lectorat japonais (publié au Japon par Kodansha je crois) . Ce qui expliquerait le côté « visite touristique » de certains passages, et l’image « glamour bling bling branchouille » véhiculée par le récit (et l’insistance du héros et de sa cousine à parler du charme des « femmes parisiennes »).
Un travail de commande qui peine à convaincre le lecteur que je suis.
Cette œuvre construit un récit initiatique d’une grande justesse, jouant en permanence sur une apparente simplicité pour mieux atteindre une profondeur émotionnelle rare. La naïveté volontaire du ton n’affaiblit jamais le propos : elle sert de filtre pour aborder la violence, la loyauté et la construction de soi sans cynisme. Le scénario, linéaire mais solidement charpenté, maintient une tension douce qui rend la progression d’Aldobrando à la fois crédible et touchante. La fin est vraiment satisfaisante et me laisse un joli sourire aux lèvres.
Graphiquement, le style caricatural – qui pourrait sembler déroutant hors contexte – fonctionne ici comme un amplificateur narratif. Les proportions exagérées, les visages expressifs et le traitement chromatique épuré renforcent l’innocence du protagoniste et la dureté du monde qui l’entoure. Le dessin accompagne la montée en maturité du personnage et soutient la dynamique émotionnelle du livre de manière précise, sans surcharge.
L’ensemble forme un conte moderne, dur et doux à la fois, capable de toucher un large public. Les lecteurs sensibles aux récits initiatiques, aux univers médiévaux sobres et aux fables morales y trouveront un équilibre rare entre simplicité et profondeur.
La série impressionne par la précision de son récit et par la manière dont elle détourne l’attente d’une simple aventure maritime pour explorer une véritable dérive sociétale. Le scénario, extrêmement documenté, maîtrise parfaitement la montée en tension : la catastrophe initiale sert de déclencheur à une dynamique de pouvoir, de manipulation et d’effondrement moral. Les parallèles implicites avec d’autres tragédies historiques – notamment le radeau de La Méduse, où les plus vulnérables subissent la brutalité des puissants – donnent au récit une profondeur supplémentaire sans jamais quitter le cadre strictement narratif. L’ensemble attise constamment la curiosité grâce à la solidité des faits historiques mobilisés.
Le dessin, d’une grande précision, renforce l’immersion. Les ambiances, les visages et les corps sont rendus avec un réalisme qui incarne parfaitement chaque personnage. Cette exactitude graphique rend les scènes plus crédibles et accentue la dureté psychologique du récit. On “y est”, tant dans la tension des situations que dans la représentation sans fioritures de la marine de l'époque. Cette adéquation entre style graphique et matière narrative constitue un des points forts majeurs de l’ouvrage.
L’ensemble s’adresse clairement à un lectorat appréciant les récits historiques exigeants, les chroniques humaines extrêmes et les constructions scénaristiques très rigoureuses. La force documentaire, la densité thématique et la cohérence entre fond et forme en font une lecture marquante, même si son intensité peut dérouter les lecteurs cherchant un divertissement plus léger.
Cette adaptation propose un récit solide porté par l’atmosphère maritime, qui constitue son principal atout. Le huis clos à bord du navire fonctionne bien : l’univers rude, parfois volontairement caricatural, est renforcé par un dessin expressif qui accentue les tensions sociales et le climat brutal de la traversée. L’ensemble crée une immersion immédiate, même sans connaissance préalable de l’œuvre littéraire.
Le scénario avance de manière très linéaire, parfois trop, avec quelques développements attendus. Malgré cette simplicité, le rythme reste efficace et la lecture fluide. Le capitaine, personnage central du récit, apporte une vraie complexité psychologique : difficile à lire, oscillant entre fascination et incompréhension, il élève le niveau narratif mais génère aussi quelques zones d’opacité. La conclusion, cohérente, manque toutefois d’impact et laisse une légère impression d’inachevé.
Graphiquement, l’album s’accorde parfaitement au ton dur et rugueux du récit. Le trait, anguleux et expressif, accentue la violence sociale et morale du navire, donnant une cohérence forte entre fond et forme. Cela contribuera à séduire les lecteurs appréciant les ambiances maritimes âpres, les huis clos psychologiques et les adaptations littéraires accessibles.
La série propose un récit rythmé et immersif, porté par une représentation très vivante des États-Unis d’époque, proche d'une série télévisée. Le rythme général reste soutenu, mêlant enquête, thriller et portrait de vie, ce qui donne à l’ensemble une tonalité hybride assez efficace. Les personnages sont traités avec suffisamment d’attention pour susciter de l’attachement, même si certains arcs secondaires apparaissent moins approfondis, générant quelques zones d’ombre ou questions laissées en suspens.
Graphiquement, la série s’appuie sur un dessin réaliste, clair et proche des codes du comic ou du roman graphique. La mise en scène est lisible, expressive, avec des planches qui soutiennent bien la tension du récit. L’ancrage historique apporte de la texture et enrichit l’atmosphère, même si son rôle oscille entre toile de fond utile et élément parfois moins indispensable à l’essentiel de l’intrigue.
L’ensemble forme un thriller solide, visuellement attrayant et globalement bien rythmé, malgré quelques longueurs et certains traitements superficiels. Une série recommandable pour les lecteurs appréciant les récits policiers dynamiques et les ambiances américaines bien restituées.
Cette relecture du mythe du Marsupilami s’impose comme une proposition mature, sombre et cohérente, bien distincte des approches classiques de la franchise. Le scénario, construit avec un sens affirmé du rythme, installe une tension constante sans basculer dans la démonstration. L’univers plus noir, presque naturaliste, donne au récit une densité émotionnelle réelle. Les évolutions des personnages sont traitées avec finesse : chacun progresse par petites touches, sans surenchère, ce qui rend leurs réactions crédibles et leur peine perceptible sans que le récit ne force l’émotion.
Graphiquement, l’album atteint une intensité rare. Le trait expressif de Frank Pé, ample et détaillé, parvient à véhiculer immédiatement les émotions des protagonistes comme celles de l’animal. Les ambiances sombres, la gestion des lumières et la mise en scène très physique des corps renforcent le ton dramatique du récit. L’ensemble crée une immersion forte où la beauté du dessin soutient le propos plutôt que de le surcharger.
La série peut séduire un public adulte appréciant les réinterprétations ambitieuses, les atmosphères denses et les récits émotionnels sans pathos. Les amateurs de travaux graphiques expressifs y trouveront également un grand intérêt. Ses principaux atouts résident dans la cohérence du ton, la qualité du dessin et la délicatesse apportée à la caractérisation. Les rares limites tiennent à la noirceur générale, qui pourra moins parler à ceux qui attendent un esprit plus aventureux ou léger.
Je viens de relire les 7 tomes de cette série, 18 ans après l’avoir découverte… 18 ans durant lesquels j’ai lu bon nombre de polars, sans jamais trouver mieux dans le genre.
Le duo Brubaker / Phillips nous propose une série dans la pure tradition des polars noirs américains. Des flics pourris, des trafiquants de drogue tarés, des fusillades… et au milieu de tout ça, des personnages attachants à la personnalité bien développée, comme on en voit rarement dans la BD franco-belge. Les intrigues sont prenantes, bien construites et parfaitement narrées, et varient suffisamment d’un tome à l’autre pour éviter la monotonie.
Après, c’est sûr, il faut se faire au dessin typé comics, ce n’est pas du Blacksad… je note d’ailleurs que les 2 seuls posteurs ayant mis 3/5 à ce jour ont eu un blocage à ce niveau-là, ce que je comprends tout à fait. Moi, je trouve le dessin super efficace, et parfait pour représenter la noirceur de l’univers de Crminal.
Une superbe série, sans doute la meilleure dans le genre « polar noir ». Je vous conseille aussi tous les spin-off – voir notre thème. Vivement la série télévisée !
J’ai eu l’occasion de lire le tome 2. On a là une série d’humour gentiment érotique, qui se situe dans une petite moyenne du genre, dans une veine pas mal exploitée par Dany. Suffisamment de gags m’ont fait sourire pour que ma lecture soit plaisante, mais ça n’est pas non plus hyper original.
Les deux héroïnes ont une belle plastique (et Di Sano ne fait pas grand-chose pour nous la cacher), sont parfois naïves, ingénues, et se retrouvent souvent à montrer leur corps – sans l’avoir voulu – à un public de voyeurs. Elles ne se rendent pas toujours compte de l’effet qu’elles provoquent chez les hommes qu’elles croisent.
Di Sano est un vieux routier du genre. Il se situe dans la lignée de Walthery – en moins précis et soigné quand même (au vu de la galerie j’ai l’impression que dans le premier tome le trait était plus net). Mais bon, c’est globalement agréable.
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Lady SnowBlood
Cette série allie idéalement deux manières de s'attacher à son intégrité. Pour la tueuse, par la vengeance soit le moyen le plus universel de se réapproprier sa dignité… Pour le Japon, c'est plus compliqué : doit-il copier l'Occident ? Et on voit que cela va très loin dans le manga. Ou lui opposer la violence ? Même remarque. Extrême dans une société extrême, la tueuse tue, mais pas les innocents, ses sentiments et ses sens. Il est donc on ne peut plus logique qu'on la voit beaucoup faire l'amour. Et d'autant plus que croiser la mort amène un besoin accru d'aller vers la vie. Le dessin sait retranscrire tout cela, et même donner de la classe à notre lady, ce qui n'est pas rien. La classe est une sorte de grâce bien difficile à saisir. Que ce manga pulvérise de loin Kill Bill !
Le Secret de Miss Greene
Que chacun tente de saisir sa chance est bien naturel. Ici, une dame au teint clair veut éviter de passer pour noire afin d'exercer un rôle digne de ses capacités. Quoi de mal ? De même, un homosexuel peut se faire passer pour hétérosexuel pour réussir. Problème : dans le cas de la dame, elle risque d'attirer des ennuis à sa famille, mais est-ce sa faute ? C'est le pouvoir qui veut dissuader les gens de couleur de gravir les échelons, alors qu'il est opportun de passer pour Blanc. Doit-on être l'otage de sa famille ? En admettant que la question soit légitime, pourquoi le dénier pour les luttes collectives et non pour la promotion individuelle ? On signale que pour couvrir son secret, ses sœurs ne doivent pas avoir d'enfant, mais quelle aurait été leur vie ? D'humiliés par les Blancs.. Il faut des générations pour que les préjugés diminuent. Cela n'aurait pas été agréable pour eux, et par contre-coup, pour leur mère. Si on dit que l'ambitieuse embarque sa famille dans son destin, c'est aussi ce que font les parents en encore plus décisif. Si le destin de miss Green est plus rare que d'être mère, il ne me semble pas plus discutable moralement. Plus inhabituel, c'est tout. La BD aurait-elle tort de ne pas montrer la lutte collective des Noirs ? Non, pas plus qu'une histoire de lutte collective de faire l'impasse sur les gens réussissant par le masque. Par le Ciel ! Dans un blog où chacun peut prendre un pseudo pour défendre sa liberté et sa sécurité, comment critiquer une dame faisant de même dans un contexte mille fois plus critique ! Refusant de se laisser enfermer dans un destin trop petit pour elle, elle ne juge pas à son goût la lutte collective. Comme sa peau peut la faire passer pour une personne d'ascendance européenne méditerranéenne, elle en profite. Je la plaint d'avoir dû vivre dans un total contrôle de soi. J'en arrive au dessin ! Il rend très bien la vie prudente, on peut dire en apnée, de l'héroïne. Sa famille sait qui elle est mais n'approuve pas son rôle, les Blancs approuvent son rôle mais n'approuverait pas qui elle est, elle est d'une certaine façon, toujours rejetée. Mais elle s'accroche et nous permet d'avoir un point de vue exceptionnel, tant sur les Blancs que sur les Noirs. Bravo !
Kiro
L’histoire se laisse lire, mais elle manque singulièrement de fond – et pas mal d’intérêt en fait. C’est un peu creux. L’intrigue et la personnalité des protagoniste auraient mérité d’être creusées davantage. Au lieu de quoi nous n’avons qu’une succession de « rencontres », d’anecdotes, autour d’un Japonais qui a rejoint sa cousine à Paris. Paris où il fréquente les milieux bourgeois et branchés, multiplie les rencontres féminines, tombe amoureux, tombe de plus ou moins haut, ayant toujours la chance d’être entouré de très jolies dames. Car, même si j’ai trouvé que le dessin manquait lui aussi de consistance et parfois de précision, Varenne sait y faire pour dessiner les femmes, et il glisse des passages érotiques pour accompagner les déambulations de notre héros. Mais bon, cela ne suffit pas. L’histoire était semble-t-il initialement destinée à un lectorat japonais (publié au Japon par Kodansha je crois) . Ce qui expliquerait le côté « visite touristique » de certains passages, et l’image « glamour bling bling branchouille » véhiculée par le récit (et l’insistance du héros et de sa cousine à parler du charme des « femmes parisiennes »). Un travail de commande qui peine à convaincre le lecteur que je suis.
Aldobrando
Cette œuvre construit un récit initiatique d’une grande justesse, jouant en permanence sur une apparente simplicité pour mieux atteindre une profondeur émotionnelle rare. La naïveté volontaire du ton n’affaiblit jamais le propos : elle sert de filtre pour aborder la violence, la loyauté et la construction de soi sans cynisme. Le scénario, linéaire mais solidement charpenté, maintient une tension douce qui rend la progression d’Aldobrando à la fois crédible et touchante. La fin est vraiment satisfaisante et me laisse un joli sourire aux lèvres. Graphiquement, le style caricatural – qui pourrait sembler déroutant hors contexte – fonctionne ici comme un amplificateur narratif. Les proportions exagérées, les visages expressifs et le traitement chromatique épuré renforcent l’innocence du protagoniste et la dureté du monde qui l’entoure. Le dessin accompagne la montée en maturité du personnage et soutient la dynamique émotionnelle du livre de manière précise, sans surcharge. L’ensemble forme un conte moderne, dur et doux à la fois, capable de toucher un large public. Les lecteurs sensibles aux récits initiatiques, aux univers médiévaux sobres et aux fables morales y trouveront un équilibre rare entre simplicité et profondeur.
1629 ou l'effrayante histoire des naufragés du Jakarta
La série impressionne par la précision de son récit et par la manière dont elle détourne l’attente d’une simple aventure maritime pour explorer une véritable dérive sociétale. Le scénario, extrêmement documenté, maîtrise parfaitement la montée en tension : la catastrophe initiale sert de déclencheur à une dynamique de pouvoir, de manipulation et d’effondrement moral. Les parallèles implicites avec d’autres tragédies historiques – notamment le radeau de La Méduse, où les plus vulnérables subissent la brutalité des puissants – donnent au récit une profondeur supplémentaire sans jamais quitter le cadre strictement narratif. L’ensemble attise constamment la curiosité grâce à la solidité des faits historiques mobilisés. Le dessin, d’une grande précision, renforce l’immersion. Les ambiances, les visages et les corps sont rendus avec un réalisme qui incarne parfaitement chaque personnage. Cette exactitude graphique rend les scènes plus crédibles et accentue la dureté psychologique du récit. On “y est”, tant dans la tension des situations que dans la représentation sans fioritures de la marine de l'époque. Cette adéquation entre style graphique et matière narrative constitue un des points forts majeurs de l’ouvrage. L’ensemble s’adresse clairement à un lectorat appréciant les récits historiques exigeants, les chroniques humaines extrêmes et les constructions scénaristiques très rigoureuses. La force documentaire, la densité thématique et la cohérence entre fond et forme en font une lecture marquante, même si son intensité peut dérouter les lecteurs cherchant un divertissement plus léger.
Le Loup des Mers
Cette adaptation propose un récit solide porté par l’atmosphère maritime, qui constitue son principal atout. Le huis clos à bord du navire fonctionne bien : l’univers rude, parfois volontairement caricatural, est renforcé par un dessin expressif qui accentue les tensions sociales et le climat brutal de la traversée. L’ensemble crée une immersion immédiate, même sans connaissance préalable de l’œuvre littéraire. Le scénario avance de manière très linéaire, parfois trop, avec quelques développements attendus. Malgré cette simplicité, le rythme reste efficace et la lecture fluide. Le capitaine, personnage central du récit, apporte une vraie complexité psychologique : difficile à lire, oscillant entre fascination et incompréhension, il élève le niveau narratif mais génère aussi quelques zones d’opacité. La conclusion, cohérente, manque toutefois d’impact et laisse une légère impression d’inachevé. Graphiquement, l’album s’accorde parfaitement au ton dur et rugueux du récit. Le trait, anguleux et expressif, accentue la violence sociale et morale du navire, donnant une cohérence forte entre fond et forme. Cela contribuera à séduire les lecteurs appréciant les ambiances maritimes âpres, les huis clos psychologiques et les adaptations littéraires accessibles.
Sara Lone
La série propose un récit rythmé et immersif, porté par une représentation très vivante des États-Unis d’époque, proche d'une série télévisée. Le rythme général reste soutenu, mêlant enquête, thriller et portrait de vie, ce qui donne à l’ensemble une tonalité hybride assez efficace. Les personnages sont traités avec suffisamment d’attention pour susciter de l’attachement, même si certains arcs secondaires apparaissent moins approfondis, générant quelques zones d’ombre ou questions laissées en suspens. Graphiquement, la série s’appuie sur un dessin réaliste, clair et proche des codes du comic ou du roman graphique. La mise en scène est lisible, expressive, avec des planches qui soutiennent bien la tension du récit. L’ancrage historique apporte de la texture et enrichit l’atmosphère, même si son rôle oscille entre toile de fond utile et élément parfois moins indispensable à l’essentiel de l’intrigue. L’ensemble forme un thriller solide, visuellement attrayant et globalement bien rythmé, malgré quelques longueurs et certains traitements superficiels. Une série recommandable pour les lecteurs appréciant les récits policiers dynamiques et les ambiances américaines bien restituées.
Le Marsupilami de Frank Pé et Zidrou - La Bête
Cette relecture du mythe du Marsupilami s’impose comme une proposition mature, sombre et cohérente, bien distincte des approches classiques de la franchise. Le scénario, construit avec un sens affirmé du rythme, installe une tension constante sans basculer dans la démonstration. L’univers plus noir, presque naturaliste, donne au récit une densité émotionnelle réelle. Les évolutions des personnages sont traitées avec finesse : chacun progresse par petites touches, sans surenchère, ce qui rend leurs réactions crédibles et leur peine perceptible sans que le récit ne force l’émotion. Graphiquement, l’album atteint une intensité rare. Le trait expressif de Frank Pé, ample et détaillé, parvient à véhiculer immédiatement les émotions des protagonistes comme celles de l’animal. Les ambiances sombres, la gestion des lumières et la mise en scène très physique des corps renforcent le ton dramatique du récit. L’ensemble crée une immersion forte où la beauté du dessin soutient le propos plutôt que de le surcharger. La série peut séduire un public adulte appréciant les réinterprétations ambitieuses, les atmosphères denses et les récits émotionnels sans pathos. Les amateurs de travaux graphiques expressifs y trouveront également un grand intérêt. Ses principaux atouts résident dans la cohérence du ton, la qualité du dessin et la délicatesse apportée à la caractérisation. Les rares limites tiennent à la noirceur générale, qui pourra moins parler à ceux qui attendent un esprit plus aventureux ou léger.
Criminal
Je viens de relire les 7 tomes de cette série, 18 ans après l’avoir découverte… 18 ans durant lesquels j’ai lu bon nombre de polars, sans jamais trouver mieux dans le genre. Le duo Brubaker / Phillips nous propose une série dans la pure tradition des polars noirs américains. Des flics pourris, des trafiquants de drogue tarés, des fusillades… et au milieu de tout ça, des personnages attachants à la personnalité bien développée, comme on en voit rarement dans la BD franco-belge. Les intrigues sont prenantes, bien construites et parfaitement narrées, et varient suffisamment d’un tome à l’autre pour éviter la monotonie. Après, c’est sûr, il faut se faire au dessin typé comics, ce n’est pas du Blacksad… je note d’ailleurs que les 2 seuls posteurs ayant mis 3/5 à ce jour ont eu un blocage à ce niveau-là, ce que je comprends tout à fait. Moi, je trouve le dessin super efficace, et parfait pour représenter la noirceur de l’univers de Crminal. Une superbe série, sans doute la meilleure dans le genre « polar noir ». Je vous conseille aussi tous les spin-off – voir notre thème. Vivement la série télévisée !
Alys et Vicky
J’ai eu l’occasion de lire le tome 2. On a là une série d’humour gentiment érotique, qui se situe dans une petite moyenne du genre, dans une veine pas mal exploitée par Dany. Suffisamment de gags m’ont fait sourire pour que ma lecture soit plaisante, mais ça n’est pas non plus hyper original. Les deux héroïnes ont une belle plastique (et Di Sano ne fait pas grand-chose pour nous la cacher), sont parfois naïves, ingénues, et se retrouvent souvent à montrer leur corps – sans l’avoir voulu – à un public de voyeurs. Elles ne se rendent pas toujours compte de l’effet qu’elles provoquent chez les hommes qu’elles croisent. Di Sano est un vieux routier du genre. Il se situe dans la lignée de Walthery – en moins précis et soigné quand même (au vu de la galerie j’ai l’impression que dans le premier tome le trait était plus net). Mais bon, c’est globalement agréable. Une petite curiosité. Note réelle 2,5/5.