Bilal pas tout à fait Bilal, entre Bilal et Moebius fait des dessins qui me plaisent véritablement, même si j'apprécie l'émancipation de Moebius ! Et l'histoire, mon dieu, l'histoire n'est pas si mal. En tout cas, je l'ai lue avec plaisir, et même en réveillant mon cerveau, à la fin.
Eh oui, j'aime bien le dialogue entre le héros et le chef des manichéens de l'espace. Qu'est-ce que le pur et l'impur, qu'est-ce que le juste et l'injuste ? de façon revisitée… En fait, l'œuvre aurait pu être bien meilleure en creusant ce sillon. Mais bon, peut-être que Bilal, pas encore connu, n'a pas osé prendre la tête des lecteurs ? Peut-être que Dionnet a eu peur que les gens fuient à la moindre complexité ? A la fin, il ne vont pas refermer l'album, et on peut sortir de l'action vue cent fois des batailles et des fuites, et on a le dialogue avec le manichéen, et le dialogue presque silencieux et nostalgique avec un personnage donnant une part de mystère à l'œuvre.
Prophétique Bilal annonçant la fin de l'URSS, avec ces hauts dignitaires soviétiques dont nous voyons les réalisations, crimes et échecs ! La pétrification des hommes de pouvoir par leur visage semblables à de la pierre effritée est sublimement rendue. Le sang envahissant les cases quand il le faut pour l'intérêt de l'histoire comme pour ajouter à la splendeur du graphisme et à son expressivité est éblouissant. La chasse fait partie des traditions humaines les plus ancrées, et surtout chez les dirigeants. Ainsi, il y a du réalisme dans partie de chasse, aussi bien que du symbolisme : en fait, une telle chasse sacrificielle* aurait ma foi bien été possible
La femme hantant le dignitaire soviétique maître du jeu, elle qu'il a sacrifié à l'ogre Staline pour survivre est aussi un leitmotiv fort bien trouvé. On a le rigide dignitaire de la RDA et le fantaisiste retraité accueillant tout le monde et sa fable avec des oiseaux de proie. Quelle comédie humaine. Aucune case qui ne soit parfaite en soit et insérée dans le flux de la narration… J'ai lu et relu cette œuvre à user l'ouvrage et mon goût pour lui comme lors de ma phase jus de tomate enfant, je n'en pouvais plus… Et puis, ne s'ouvre-t-on pas forcément à d'autres œuvres ? Mais je pense que j'y reviendrais, comme l'augure mon cycle de critique sur Bilal.
* Qui est intrigué par cette expression n'a qu'à lire l'œuvre !
La ville qui n'existait pas fait exister et la ville réelle, du nord, de l'industrie et de ses conflits entre les patrons et les ouvriers, et une ville nouvelle utopique. Les deux ont leurs limites, les deux se lisent l'une dans l'autre, comme on ne le voit jamais mieux que dans les deux enfants toujours en manque de quelque chose dans l'une et dans l'autre. Vaut-il mieux une ville de misère mais de conflit ou une ville de loisirs et de beauté où l'héritière règne bienveillamment sur ses gens ? La majorité préfère fuir le travail aliénant, le chômage, les luttes qui ne mènent souvent pas à grand-chose, mais les syndicalistes rivaux préfèrent s'exiler pour lutter ailleurs, et le conseiller de l'héritière - et du village de La croisière des Oubliés - partent loin de l'utopie pour retourner dans le monde de boue, crasse et injustice, parce que c'est de lui qu'ils tirent leur identité et leur vitalité.
Et pourquoi pas ? Des héros aimés par des femmes de rêve offrant l'éternelle jeunesse retournent bien dans le monde de la souffrance, que ce soit Ulysse fuyant Calypso et tant d'autres. Mais la majorité préfère tout de même la vie meilleure proposée par l'héritière. Laquelle est un peu triste de ce que son conseiller parte vers d'autres aventures, handicapée sur son fauteuil roulant délivrée de sa culpabilité pour le fait que ses ancêtres aient exploité les ouvriers, mais sans la compassion et la souffle de l'aventure de celui dont les discussions avaient fait naître le désir d'utopie en elle . Souvent, on a des utopies parfaites, souvent, on a des dystopies, ici, on a l'utopie nostalgique entre parenthèse du monde.
Il me plait que les méchants fascistes - les vrais, pas des phantasmés par des excités ! - et les "gentils" opposants à ces affreux terroristes soient tous des vieux. Voilà qui change ! Et met en miroir le passé et le présent, savoir de l'époque de la création de l'œuvre.
Les fascistes ne se sont pas améliorés, témoins, les attentats qu'ils commettent… Lesquels sont dessinés de façon aussi dramatique que belle par Bilal, des images qu'on n'oublie pas. Les antifascistes eux, sont toujours aussi courageux et plus tolérants qu'autrefois, mais se pose à la fin la question de savoir s'ils ne ressemblent pas un peu trop aux fascistes. Enfin, ce genre d'interrogation du narrateur montre qu'ils sont tout de même nettement plus lucides ! Le rythme de l'histoire, lent et rapide selon les nécessités de l'intrigue ? Parfait. Il y a même un soupçon d'humour plutôt inhabituel chez Bilal. Mais comme on n'est pas dans La croisière des oubliés, pas dans une fable fantastique mais dans un monde violent, il n'y a pas de happy end.
Ah, comme je regrette que la production de légendes d'aujourd'hui ait cessé !
Dragonseed propose un récit de fantasy classique, construit autour d’une quête sous contrainte temporelle et d’un conflit latent entre deux mondes. Le scénario est fluide, lisible et efficace, sans temps mort notable. Les thèmes abordés — identité, héritage, équilibre entre peuples — sont familiers et traités sans surprise, mais avec suffisamment de maîtrise pour rendre la lecture agréable.
L’ensemble se laisse lire facilement et avec plaisir, sans toutefois dégager une forte singularité. Les personnages remplissent correctement leur rôle narratif mais restent assez archétypaux, ce qui limite l’impact émotionnel et la mémorisation de l’œuvre une fois refermée.
Graphiquement, le dessin est réaliste, propre et maîtrisé. Il soutient efficacement la narration et l’univers proposé, même s’il peut parfois sembler un peu convenu dans ses choix visuels. Les couleurs accompagnent bien l’ambiance sans chercher à la transcender.
Une bande dessinée solide et plaisante, idéale pour une lecture détente, mais qui ne marque pas durablement.
De pierre et d’os est un véritable coup de cœur. Le scénario adopte un rythme lent, assumé, mais construit avec une progression constante qui rend la lecture de plus en plus prenante. Le travail sur les relations humaines est particulièrement fort, notamment dans la manière dont sont abordées la violence masculine, la condition des femmes et, surtout, la fragilité comme état fondamental de l’existence. La résilience est au cœur du récit, sans jamais être idéalisée ni simplifiée.
L’univers proposé est à la fois dur et profondément doux. Il agit comme une confrontation directe avec nos repères occidentaux, que ce soit dans le rapport à la famille, à la sexualité, à la nature ou à la spiritualité. L’intégration de chants, de récits et de fables enrichit considérablement le monde décrit et renforce cette sensation d’immersion culturelle, sans lourdeur explicative.
Graphiquement, le dessin ne correspond pas forcément aux canons qui me séduisent d'habitude le plus, au premier abord, mais sa justesse est indéniable. Il est parfaitement en phase avec le contexte, sert le récit avec intelligence et possède une esthétique forte en tant que telle. Cette cohérence entre fond et forme contribue largement à faire de De pierre et d’os une œuvre sensible, profondément humaine et que je recommande.
Série manifestement très travaillée, séduisante dans son ambition comme dans son exécution, mais avec laquelle je suis resté à distance. L’écriture est dense, l’humour omniprésent et extrêmement référencé ; il fonctionne objectivement bien, sans pour autant m’être toujours accessible. Un certain décalage générationnel se fait sentir : on perçoit clairement la richesse du propos et des clins d’œil, mais sans forcément parvenir à tout saisir ou à en profiter pleinement à la première lecture.
Le scénario se lit pourtant facilement, porté par des personnages solides et attachants, même s’ils assument pleinement leur dimension très archétypale. Cette galerie de figures fonctionne bien dans l’univers proposé, mais renforce aussi une impression de classicisme parfois un peu distant. L’ensemble donne le sentiment d’une œuvre à plusieurs niveaux, probablement conçue pour être relue afin d’en révéler toute la subtilité.
Graphiquement, le dessin est précis, expressif et souvent très amusant. Le trait caricatural est parfaitement maîtrisé et totalement cohérent avec le ton de la série, même s’il ne correspond pas entièrement à mes goûts personnels. L’univers est riche, foisonnant, et le dessin joue un rôle central pour stimuler l’imaginaire du lecteur.
Il ne faut pas chercher ici le réalisme et/ou la critique sociale et politique autour des conflits sociaux ayant donné lieu à la constitution de ZAD, avec une violence policière pour les démanteler – comme a pu le traiter Pignocchi dans La Recomposition des mondes par exemple.
Non, s’il y a bien en arrière-plan un conflit et une sorte de mini « ZAD », ça reste du début à la fin trop caricatural, voire loufoque (voir les jets de ruches sur les CRS par exemple) pour être pris au sérieux.
Je craignais d’ailleurs que la caricature ne soit trop poussée au départ, avec ce vieux noble péteux et snob, exprimant ses préjugés à coup d’imparfait du subjonctif.
Mais finalement Pelaez trouve un certain équilibre, et ne force plus trop le trait par la suite.
Reste qu’on est ici dans du feel good où le divertissement prend le pas sur l’aspect politique et social. L’humour gentillet et le casting caricatural se laissant apprivoiser, malgré quelques facilités (autour des enfants du couple de la Haute, mais aussi avec ce happy-end téléphoné), pour une lecture d’emprunt qui passe finalement.
Note réelle 2,5/5.
Excellente série de science-fiction d’anticipation, construite sur des récits indépendants par tome, chacun explorant une planète, un contexte et une problématique spécifique. Malgré une structure habituellement peu propice à l’attachement, la série parvient ici à créer une vraie implication grâce à un bon équilibre entre univers, enjeux et caractérisation des personnages. Chaque récit fonctionne de manière autonome tout en donnant envie de poursuivre la découverte de l’univers global.
Le scénario privilégie des thématiques classiques mais solides de la SF (colonisation, rapport à l’altérité, manipulation politique, responsabilité humaine), traitées avec suffisamment de nuance pour éviter la simple mécanique. Le lien entre l’environnement planétaire et la trajectoire des personnages est particulièrement bien exploité, ce qui donne une cohérence interne forte à chaque album.
Graphiquement, le dessin réaliste est très maîtrisé et constant, avec une mise en scène lisible et efficace.
En France, les livres sont au même prix partout. C'est la loi !
Avec BDfugue, vous payez donc le même prix qu'avec les géants de la vente en ligne mais pour un meilleur service :
des promotions et des goodies en permanence
des réceptions en super état grâce à des cartons super robustes
une équipe joignable en cas de besoin
2. C'est plus avantageux pour nous
Si BDthèque est gratuit, il a un coût.
Pour financer le service et le faire évoluer, nous dépendons notamment des achats que vous effectuez depuis le site. En effet, à chaque fois que vous commencez vos achats depuis BDthèque, nous touchons une commission. Or, BDfugue est plus généreux que les géants de la vente en ligne !
3. C'est plus avantageux pour votre communauté
En choisissant BDfugue plutôt que de grandes plateformes de vente en ligne, vous faites la promotion du commerce local, spécialisé, éthique et indépendant.
Meilleur pour les emplois, meilleur pour les impôts, la librairie indépendante promeut l'émergence des nouvelles séries et donc nos futurs coups de cœur.
Chaque commande effectuée génère aussi un don à l'association Enfance & Partage qui défend et protège les enfants maltraités. Plus d'informations sur bdfugue.com
Pourquoi Cultura ?
Indépendante depuis sa création en 1998, Cultura se donne pour mission de faire vivre et aimer la culture.
La création de Cultura repose sur une vision de la culture, accessible et contributive. Nous avons ainsi considéré depuis toujours notre responsabilité sociétale, et par conviction, développé les pratiques durables et sociales. C’est maintenant au sein de notre stratégie de création de valeur et en accord avec les Objectifs de Développement Durable que nous déployons nos actions. Nous traitons avec lucidité l’impact de nos activités, avec une vision de long terme. Mais agir en responsabilité implique d’aller bien plus loin, en contribuant positivement à trois grands enjeux de développement durable.
Nos enjeux environnementaux
Nous sommes résolument engagés dans la réduction de notre empreinte carbone, pour prendre notre part dans la lutte contre le réchauffement climatique et la préservation de la planète.
Nos enjeux culturels et sociétaux
La mission de Cultura est de faire vivre et aimer la culture. Pour cela, nous souhaitons stimuler la diversité des pratiques culturelles, sources d’éveil et d’émancipation.
Nos enjeux sociaux
Nous accordons une attention particulière au bien-être de nos collaborateurs à la diversité, l’inclusion et l’égalité des chances, mais aussi à leur épanouissement, en encourageant l’expression des talents artistiques.
Votre vote
Exterminateur 17
Bilal pas tout à fait Bilal, entre Bilal et Moebius fait des dessins qui me plaisent véritablement, même si j'apprécie l'émancipation de Moebius ! Et l'histoire, mon dieu, l'histoire n'est pas si mal. En tout cas, je l'ai lue avec plaisir, et même en réveillant mon cerveau, à la fin. Eh oui, j'aime bien le dialogue entre le héros et le chef des manichéens de l'espace. Qu'est-ce que le pur et l'impur, qu'est-ce que le juste et l'injuste ? de façon revisitée… En fait, l'œuvre aurait pu être bien meilleure en creusant ce sillon. Mais bon, peut-être que Bilal, pas encore connu, n'a pas osé prendre la tête des lecteurs ? Peut-être que Dionnet a eu peur que les gens fuient à la moindre complexité ? A la fin, il ne vont pas refermer l'album, et on peut sortir de l'action vue cent fois des batailles et des fuites, et on a le dialogue avec le manichéen, et le dialogue presque silencieux et nostalgique avec un personnage donnant une part de mystère à l'œuvre.
Partie de chasse
Prophétique Bilal annonçant la fin de l'URSS, avec ces hauts dignitaires soviétiques dont nous voyons les réalisations, crimes et échecs ! La pétrification des hommes de pouvoir par leur visage semblables à de la pierre effritée est sublimement rendue. Le sang envahissant les cases quand il le faut pour l'intérêt de l'histoire comme pour ajouter à la splendeur du graphisme et à son expressivité est éblouissant. La chasse fait partie des traditions humaines les plus ancrées, et surtout chez les dirigeants. Ainsi, il y a du réalisme dans partie de chasse, aussi bien que du symbolisme : en fait, une telle chasse sacrificielle* aurait ma foi bien été possible La femme hantant le dignitaire soviétique maître du jeu, elle qu'il a sacrifié à l'ogre Staline pour survivre est aussi un leitmotiv fort bien trouvé. On a le rigide dignitaire de la RDA et le fantaisiste retraité accueillant tout le monde et sa fable avec des oiseaux de proie. Quelle comédie humaine. Aucune case qui ne soit parfaite en soit et insérée dans le flux de la narration… J'ai lu et relu cette œuvre à user l'ouvrage et mon goût pour lui comme lors de ma phase jus de tomate enfant, je n'en pouvais plus… Et puis, ne s'ouvre-t-on pas forcément à d'autres œuvres ? Mais je pense que j'y reviendrais, comme l'augure mon cycle de critique sur Bilal. * Qui est intrigué par cette expression n'a qu'à lire l'œuvre !
La Ville qui n'existait pas
La ville qui n'existait pas fait exister et la ville réelle, du nord, de l'industrie et de ses conflits entre les patrons et les ouvriers, et une ville nouvelle utopique. Les deux ont leurs limites, les deux se lisent l'une dans l'autre, comme on ne le voit jamais mieux que dans les deux enfants toujours en manque de quelque chose dans l'une et dans l'autre. Vaut-il mieux une ville de misère mais de conflit ou une ville de loisirs et de beauté où l'héritière règne bienveillamment sur ses gens ? La majorité préfère fuir le travail aliénant, le chômage, les luttes qui ne mènent souvent pas à grand-chose, mais les syndicalistes rivaux préfèrent s'exiler pour lutter ailleurs, et le conseiller de l'héritière - et du village de La croisière des Oubliés - partent loin de l'utopie pour retourner dans le monde de boue, crasse et injustice, parce que c'est de lui qu'ils tirent leur identité et leur vitalité. Et pourquoi pas ? Des héros aimés par des femmes de rêve offrant l'éternelle jeunesse retournent bien dans le monde de la souffrance, que ce soit Ulysse fuyant Calypso et tant d'autres. Mais la majorité préfère tout de même la vie meilleure proposée par l'héritière. Laquelle est un peu triste de ce que son conseiller parte vers d'autres aventures, handicapée sur son fauteuil roulant délivrée de sa culpabilité pour le fait que ses ancêtres aient exploité les ouvriers, mais sans la compassion et la souffle de l'aventure de celui dont les discussions avaient fait naître le désir d'utopie en elle . Souvent, on a des utopies parfaites, souvent, on a des dystopies, ici, on a l'utopie nostalgique entre parenthèse du monde.
Les Phalanges de l'ordre noir
Il me plait que les méchants fascistes - les vrais, pas des phantasmés par des excités ! - et les "gentils" opposants à ces affreux terroristes soient tous des vieux. Voilà qui change ! Et met en miroir le passé et le présent, savoir de l'époque de la création de l'œuvre. Les fascistes ne se sont pas améliorés, témoins, les attentats qu'ils commettent… Lesquels sont dessinés de façon aussi dramatique que belle par Bilal, des images qu'on n'oublie pas. Les antifascistes eux, sont toujours aussi courageux et plus tolérants qu'autrefois, mais se pose à la fin la question de savoir s'ils ne ressemblent pas un peu trop aux fascistes. Enfin, ce genre d'interrogation du narrateur montre qu'ils sont tout de même nettement plus lucides ! Le rythme de l'histoire, lent et rapide selon les nécessités de l'intrigue ? Parfait. Il y a même un soupçon d'humour plutôt inhabituel chez Bilal. Mais comme on n'est pas dans La croisière des oubliés, pas dans une fable fantastique mais dans un monde violent, il n'y a pas de happy end. Ah, comme je regrette que la production de légendes d'aujourd'hui ait cessé !
Les Chroniques de Saint-Roustan
J’ai acheté cette BD en toute confiance mais franchement c’est pas terrible et très décevant. C’est vraiment glauque et très beauf.. cordialement
Dragonseed
Dragonseed propose un récit de fantasy classique, construit autour d’une quête sous contrainte temporelle et d’un conflit latent entre deux mondes. Le scénario est fluide, lisible et efficace, sans temps mort notable. Les thèmes abordés — identité, héritage, équilibre entre peuples — sont familiers et traités sans surprise, mais avec suffisamment de maîtrise pour rendre la lecture agréable. L’ensemble se laisse lire facilement et avec plaisir, sans toutefois dégager une forte singularité. Les personnages remplissent correctement leur rôle narratif mais restent assez archétypaux, ce qui limite l’impact émotionnel et la mémorisation de l’œuvre une fois refermée. Graphiquement, le dessin est réaliste, propre et maîtrisé. Il soutient efficacement la narration et l’univers proposé, même s’il peut parfois sembler un peu convenu dans ses choix visuels. Les couleurs accompagnent bien l’ambiance sans chercher à la transcender. Une bande dessinée solide et plaisante, idéale pour une lecture détente, mais qui ne marque pas durablement.
De pierre et d'os
De pierre et d’os est un véritable coup de cœur. Le scénario adopte un rythme lent, assumé, mais construit avec une progression constante qui rend la lecture de plus en plus prenante. Le travail sur les relations humaines est particulièrement fort, notamment dans la manière dont sont abordées la violence masculine, la condition des femmes et, surtout, la fragilité comme état fondamental de l’existence. La résilience est au cœur du récit, sans jamais être idéalisée ni simplifiée. L’univers proposé est à la fois dur et profondément doux. Il agit comme une confrontation directe avec nos repères occidentaux, que ce soit dans le rapport à la famille, à la sexualité, à la nature ou à la spiritualité. L’intégration de chants, de récits et de fables enrichit considérablement le monde décrit et renforce cette sensation d’immersion culturelle, sans lourdeur explicative. Graphiquement, le dessin ne correspond pas forcément aux canons qui me séduisent d'habitude le plus, au premier abord, mais sa justesse est indéniable. Il est parfaitement en phase avec le contexte, sert le récit avec intelligence et possède une esthétique forte en tant que telle. Cette cohérence entre fond et forme contribue largement à faire de De pierre et d’os une œuvre sensible, profondément humaine et que je recommande.
De Cape et de Crocs
Série manifestement très travaillée, séduisante dans son ambition comme dans son exécution, mais avec laquelle je suis resté à distance. L’écriture est dense, l’humour omniprésent et extrêmement référencé ; il fonctionne objectivement bien, sans pour autant m’être toujours accessible. Un certain décalage générationnel se fait sentir : on perçoit clairement la richesse du propos et des clins d’œil, mais sans forcément parvenir à tout saisir ou à en profiter pleinement à la première lecture. Le scénario se lit pourtant facilement, porté par des personnages solides et attachants, même s’ils assument pleinement leur dimension très archétypale. Cette galerie de figures fonctionne bien dans l’univers proposé, mais renforce aussi une impression de classicisme parfois un peu distant. L’ensemble donne le sentiment d’une œuvre à plusieurs niveaux, probablement conçue pour être relue afin d’en révéler toute la subtilité. Graphiquement, le dessin est précis, expressif et souvent très amusant. Le trait caricatural est parfaitement maîtrisé et totalement cohérent avec le ton de la série, même s’il ne correspond pas entièrement à mes goûts personnels. L’univers est riche, foisonnant, et le dessin joue un rôle central pour stimuler l’imaginaire du lecteur.
La Dernière CroiZAD
Il ne faut pas chercher ici le réalisme et/ou la critique sociale et politique autour des conflits sociaux ayant donné lieu à la constitution de ZAD, avec une violence policière pour les démanteler – comme a pu le traiter Pignocchi dans La Recomposition des mondes par exemple. Non, s’il y a bien en arrière-plan un conflit et une sorte de mini « ZAD », ça reste du début à la fin trop caricatural, voire loufoque (voir les jets de ruches sur les CRS par exemple) pour être pris au sérieux. Je craignais d’ailleurs que la caricature ne soit trop poussée au départ, avec ce vieux noble péteux et snob, exprimant ses préjugés à coup d’imparfait du subjonctif. Mais finalement Pelaez trouve un certain équilibre, et ne force plus trop le trait par la suite. Reste qu’on est ici dans du feel good où le divertissement prend le pas sur l’aspect politique et social. L’humour gentillet et le casting caricatural se laissant apprivoiser, malgré quelques facilités (autour des enfants du couple de la Haute, mais aussi avec ce happy-end téléphoné), pour une lecture d’emprunt qui passe finalement. Note réelle 2,5/5.
Conquêtes
Excellente série de science-fiction d’anticipation, construite sur des récits indépendants par tome, chacun explorant une planète, un contexte et une problématique spécifique. Malgré une structure habituellement peu propice à l’attachement, la série parvient ici à créer une vraie implication grâce à un bon équilibre entre univers, enjeux et caractérisation des personnages. Chaque récit fonctionne de manière autonome tout en donnant envie de poursuivre la découverte de l’univers global. Le scénario privilégie des thématiques classiques mais solides de la SF (colonisation, rapport à l’altérité, manipulation politique, responsabilité humaine), traitées avec suffisamment de nuance pour éviter la simple mécanique. Le lien entre l’environnement planétaire et la trajectoire des personnages est particulièrement bien exploité, ce qui donne une cohérence interne forte à chaque album. Graphiquement, le dessin réaliste est très maîtrisé et constant, avec une mise en scène lisible et efficace.