Je possède les 4 albums existants, et comme je ne suis pas masochiste (aux dernières nouvelles), vous pouvez en conclure que ce n'est pas trop mal, du moins à mes yeux d'amateur de BD depuis quelques décennies. Je reconnais que c'est inférieur au célèbre Joe Bar Team, mais ça reste néanmoins dans une très honnête moyenne haute.
Plusieurs dessinateurs se partagent le crayon, et parfois, ça se voit trop, ça nuit un peu à l'équilibre. Les engins sont bien dessinés, c'est flagrant. Pas moyen de confondre le modèle XYZ avec le ZYX ;)
Les gags se laissent lire, certains étant très bons, mais d'autres étant nuls, on ne peut pas être toujours au top. Comme beaucoup d'albums dans le même cas, ne pas tout lire d'un seul coup, mais à petites doses.
On sent que les auteurs sont de la partie (moto), mais ils n'étalent pas leur science, ça reste parfaitement lisible pour le néophyte qui n'y connait pas grand-chose. En clair, ça reste tout public. Néanmoins, certaines demoiselles (une en particulier) ne sont pas à mettre sous le nez des trop jeunes enfants. Les "éveillés" diront que c'est outrageusement sexiste et dégradant et qu'il faut impérativement bruler certaines planches (et même peut-être les auteurs) :)
Moi, je dis que c'est à lire, sachant que cette série est au dessus de la mêlée. Je songe à certaines autres séries dont on se demande si l'éditeur n'est pas hélas affublé de la même infirmité que Gilbert Montagné ou Andrea Bocelli.
Studio Danse est une série de gags humoristiques en une page de qualité relativement bonne mais sans être non plus transcendante.
Au début on pourrait s'attendre à une série de BD classique à la Bamboo sur un métier ou une passion qu'on croirait avoir été piochée au hasard par les scénaristes qui auraient dû ensuite se dépatouiller avec le peu d'inspiration que le sujet leur fournissait, mais en fait non. Les gags sont simples, souvent assez convenus, mais quelques uns arrivent un peu à faire mouche (ou a en tout cas faire sourire). Et, surtout, ce qui me fait dire que cette série arrive au moins à tenir la moyenne, c'est qu'elle réussit ce qui est pour moi essentiel dans les séries de ce genre : arriver à nous rendre les personnages un minimum attachants et le sujet un tant soi peu intéressants. Sans les avoir adorées j'avoue avoir pris plaisir à lire les petites histoires de ces personnages.
Julie, Luce et Alia sont notre trio principal ; elles ne se démarquent les unes des autres que par leurs relations familiales externes et quelques petits détails de ci de là, leurs vraies différences narratives ne tiennent en réalité qu'à leurs différences d'apparence.
Autour d'elles gravitent plusieurs personnages récurrents : Capucine (la petite sœur de Julie), Bruno (le seul garçon du cours de danse), Carla (sorte de Veronica Di Angelo locale), Mme Anne (la professeure de danse), ...
Bref, un roster classique pour ce genre de série.
Les dessins, eux aussi, sont simples mais remplissent leur office.
Vraiment, c'est ce que je retiens de ma lecture : ça ne casse pas trois pattes à un canard mais ça se laisse sincèrement lire sans déplaisir.
Voici une bd où le dragon est central et omniprésent. Finalement c'est assez rare quand on y pense, par exemple dans la Geste des chevaliers dragons l'on voit des beaux animaux mais pas à chaque page.
Bref, le thème centré sur le dragon/les dragons est (selon ma propre perception) original et finalement assez rare avec une telle intensité. C'est vraiment ce qui démarque cette bd du reste des autres histoires courantes où il y a souvent un dragon à la fin en tant que boss final.
L'univers de cette BD est également un grand point positif que je ne vais pas commenter pour vous laisser découvrir.
Question dessin c'est très beau, rien à redire c'est également un joli + pour cette bd.
Concernant l'histoire, ça se suit bien sans décrocher. Après ça reste un scénario classique à hyper classique, mais de mon point de vue pas si gênant.
Question personnage, c'est peut-être un peu insuffisant, où les protagonistes ne sont pas vraiment approfondis, voir légèrement caricaturés (je suis méchant car je suis méchant....bref).
Pour les dialogues ça va, rien à voir avec la richesse de certaines bd comme les 5 terres, ça se lit bien, sans plus.
Je regrette peut-être le nom que les auteurs ont choisi de donner à leurs montures car à mon avis ça manque cruellement d'imagination, faisant allusion à une référence archi connue.
Mon bilan : Presque que du +, j'ai vraiment aimé cette bd (un peu trop courte à regret) et je suis très content de l'avoir dans ma bibliothèque.
Bref une bd qui demande à être plus connue, je recommande la découverte sans hésiter pour tous ceux qui n'ont pas peur de se brûler les yeux à la chaleur du dragon.
Si le thème ne vous parle pas trop, peut-être faut-il mieux passer votre chemin.
Sache qu’il y a des choses qui se règlent en dehors des dossiers.
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Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre. La première édition date de 2024. Il a été réalisé par Marzena Sowa pour le scénario, et par Benoît Blary pour les dessins et la mise en couleurs. Il comprend quatre-vingt-six pages de bande dessinée.
Dans une zone désertique du Wyoming, une maison très isolée au bout du chemin, avec quelques bêtes en pâturage. Tom Brodowski regarde par la fenêtre, réchauffé par le soleil, avec un mug dans la main. Dans cette petite maison sans étage, un matelas au sol, des cartons non déballés, une valise encore fermée. Le téléphone diffuse une chanson, alors que le jeune homme prend sa douche. Puis la sonnerie retentit et Tom se précipite pour décrocher, et il éprouve un moment de déception. C’est Edith, la cheffe du commissariat qui l’appelle. Elle lui demande poliment comment s’est passée cette première nuit chez lui et elle lui explique sa première mission. Ils vont l’envoyer direct sur le terrain, il ne faut pas qu’il s’attende à débarquer dans un western. Il s’agit d’une femme un peu spéciale, elle habite pas trop loin de chez lui. Il y a une plainte au commissariat : une association qui défend les animaux, des tarés mais dans un autre genre. Apparemment, elle garde des chèvres dans sa caravane. Edith continue : il faudrait que Tom lui dise qu’il y a une plainte, mais qu’on ne veut pas l’accabler avec ça, mais que ce serait bien si elle relâchait les pauvres bêtes dans le pâturage. Il faut qu’il dise que c’est illégal et barbare, et tout le tralala, on ne fait pas ça aux animaux. Pour finir, Edith lui envoie les coordonnées GPS.
Dans le commissariat, Reynold, le mari d’Edith, également policier, rassure un père et son fils, sur le fait qu’avec les photos qu’ils ont collées partout, il est sûr qu’on retrouvera leur chien. William, un autre policier, ironise sur la manière dont Edith a présenté la mission : une femme un peu spéciale, une tarée de première plutôt. Quand il est arrivé, on ne l’a pas envoyé chez elle au premier feu, mais lui est d’ici, aussi c’est différent. Il la connait depuis gamin, elle avait un corbeau apprivoisé sur l’épaule, il avait peur de lui aussi. Il se rappelle qu’un jour elle est venue chercher Jean à l’école, elle était seins nus, elle venait chercher sa fille à poil, même si elle n’est pas sortie de sa voiture. Edith reprend la parole : le jeune arrive de Chicago, s’il ne se débrouille pas ici, il est fait pour nulle part. Bob fait observer qu’ici, ils sont au far-west, pas le même monde, pas les mêmes règles. Edith conclut qu’il faut le laisser faire, ce n’est qu’une femme après tout, cette dernière phrase lui attirant des regards chargés de sous-entendus. Tom Brodowski se présente devant la clôture et il hèle pour attirer l’attention. À l’intérieur de sa caravane, Rose Shaw fume tranquillement sa cigarette et son chien Boo aboie sans discontinuer. Elle finit par le laisser sortir, toujours sans se montrer. Le chien se précipite à la clôture, empli de curiosité, sans plus aboyer. Tom finit par renoncer. Dans une maison distante de trois cents mètres, un couple âgé observe, mécontent qu’Edith ait envoyé le nouveau.
Une vague promesse contenue dans le titre, d’une femme jugée peu recommandable par les autres, vivant visiblement avec un chien dans une caravane ou un mobil-home, laissant les déchets s’accumuler autour. Une histoire qui commence avec un jeune policier, récemment arrivé (arrivé de la veille même) dans un vrai patelin au fin fond du Wyoming, où tout le monde se connaît, et connaît Rose Shaw. Une simple enquête de voisinage ? Un secret honteux, ou peut-être criminel ? Une histoire d’amour improbable entre un jeune homme et une femme âgée ? Des rancœurs accumulées pendant des dizaines d’années ne demandant qu’à alimenter des actes de violence ? Le lecteur ne sait pas trop sur quel pied danser, qu’attendre du récit, ce qui le rend plus attentif à ce qu’il voit. Tout commence par une belle aquarelle mettant en valeur la profondeur de champ de cette plaine s’étendant jusqu’au pied de lointaines montagnes, sous un ciel d’un beau bleu rehaussé par quelques nuages. L’artiste a-t-il séjourné dans le Wyoming ? Quoi qu’il en soit, il donne à voir ce coin d’Amérique rurale. La maison de Tom apparaît toute simple et peu onéreuse, en préfabriquée, de plain-pied, avec une rangée de poteaux électriques pour le long de l’allée qui y mène, pour rejoindre la route. De près, la parcelle de Rose Shaw semble jonchée de carcasses de voitures, de mobilier abandonné, avec assez d’espace entre chaque pour que ce ne soit pas encore un dépotoir ou une décharge.
Un peu plus loin, la parcelle des époux Connie & Boyle apparaît comme un modèle de propreté et de terrain entretenu avec soin. Vues d’un peu plus loin encore, les deux parcelles ne diffèrent quasiment plus. Plus tard, lorsque Tom revient chez lui en marchant le long de la route, l’obscurité semble comme écraser les espaces, à l’exception du ruban de la route qui donne l’impression d’être sans fin. À la lumière du soleil le lendemain au petit matin, le paysage a retrouvé toute son ampleur, son horizon sans fin. Cette sensation de grand espace ouvert se retrouve en page cinquante-sept avec une case de la largeur de la page consacrée à la plaine ondoyante. De manière surprenante, ce même paysage donne l’impression d’avoir repris une dimension un peu plus petite plus en relation avec les deux chevaux qui portent chacun leur cavalier. Enfin la fin du récit emmène le lecteur dans une forêt à proximité d’une mesa de grande hauteur, avec une très belle case de la largeur de la page (en page 78), une vue de dessus, avec des rapaces dans le ciel au premier plan.
Si les grands espaces de ce coin du Wyoming sont bien présents, les personnages évoluent également dans d’autres environnements. Le lecteur commence par avoir droit à une vue globale de l’intérieur de la petite maison de Tom. Puis vient la salle principale du commissariat : un espace de travail accueillant trois ou quatre bureaux avec leurs tiroirs, le poste informatique avec sa souris sans fil, les casiers pour les dossiers, la lampe de bureau, le petit matériel de type stylos, bloc-notes et papillons adhésifs, sans oublier les mugs, et bien sûr un gros photocopieur, un réfrigérateur, une machine à café. Par la suite, le lecteur accompagne Tom chez ses voisins, dans le meilleur bar-restaurant du coin, dans un bar plus lointain où se tient un concert de musique Country, à l’intérieur de la caravane de Rose, dans un supermarché impersonnel, dans une pizzeria à emporter, dans un ranch avec sa douche à l’extérieur, et même dans une cellule du commissariat. L’artiste dépeint une petite ville de l’Amérique profonde, dans la banalité de son quotidien, un environnement où il fait bon vivre, pensé pour faciliter la vie de consommateur tout en présentant des endroits accueillant où il fait bon se retrouver et papoter.
Le lecteur constate rapidement que la distribution de personnages s’articule autour de Tom Brodowski et Rose Shaw, avec une poignée de seconds rôles : quatre policiers dont le couple d’Edith & Reynold, Connie & Boyle le couple voisin de Rose, Jena la fille de Rose, Boo son chien, Chumani une jeune femme et bien sûr Helen la fiancée de Tom. Les dessins montrent des personnages adultes, avec des gestes d’adulte, des comportements en conséquence, et des physiques normaux et banals, tout en étant individualisés. Tom est un beau jeune homme blond, avec une implantation de cheveux qui lui est propre, une forme de visage un peu allongée. Edith, Reynold et Bob portent les marques de l’âge. Le lecteur peut noter que William est plus jeune, que les autres, avec une coiffure plus soignée. Il apprécie l’expressivité plus marquée de Jean, que ce soit quand elle fait des mimiques parce qu’elle trouve que Tom a déjà des goûts de vieux, ou sa colère face à sa mère.
Il apparaît que Rose Shaw s’est vue affublée de cet adjectif péjoratif du fait de son style de vie, qu’une autre femme résume ainsi : Elle n’avait peur de rien ni de personne, elle faisait tout comme elle le sentait, elle aimait l’alcool et les hommes et la fête et les armes, la totale. Il apparaît vite que Rose Shaw ne se conforme pas aux valeurs implicites de la société dans laquelle elle se trouve. Son anticonformisme atteste du fait qu’il est possible de vivre autrement, qu’un individu peut prendre la liberté d’agir différemment. Par voie de conséquence, les règles de vie tacites des uns et des autres se trouvent remises en cause : la fidélité entre époux, l’élimination des objets et des véhicules usagés, l’acceptation des règles de vie en société à commencer par la soumission à l’autorité de la police, le respect de la pudeur, l’acceptation des responsabilités de la parentalité, le respect de l’intimité des autres, etc. Bien évidemment, ce comportement ne peut qu’entrer en conflit avec les valeurs d’un jeune policier, même intelligent. Hé bien non, pas tout à fait. La curiosité de Tom Brodowski s’accompagne d’une empathie, ou d’une absence de préjugé, et aussi d’un sens de la justice. Dans une scène étrange, deux dessins en pleine page, la première avec une case, et le monologue d’un personnage, le lecteur découvre quelqu’un pour qui Rose a représenté bien autre chose, des valeurs différentes et des plaisirs honnêtes. Puis, dans la deuxième page, un événement traumatisant qui permet d’entrevoir ce qui conduit Rose Shaw à arrêter de jouer en respectant des règles dépourvues de sens. La conclusion en deux temps met en scène deux facettes de la liberté, et laisse augurer de l’avenir de Tom Brodowski à moyen ou long terme.
Au vu de la couverture, une histoire courue d’avance, d’une femme vivant une vie de marginale dans sa caravane. À la lecture plutôt l’histoire d’un jeune policier qui effectue son travail, sans pour autant accepter les choses comme elles sont, en particulier le consensus général contre Rose Shaw, une femme qui s’est mise à l’écart de la société, qui n’y a plus sa place, qui en paye le prix. Mais aussi Rose et son mauvais caractère. La narration visuelle qui transporte le lecteur dans un petit patelin tranquille du Wyoming, avec de beaux paysages, des endroits accueillants en ville, des habitants normaux et plutôt sympathiques. Des incidents pas si graves que ça, le temps de vivre, une femme complexe dont l’excentricité empêche la normalité des autres, contraints d’accepter l’existence de choix différents, suscitant des interrogations irrépressibles.
Je rejoins l'avis de Ro.
J'aime la politique et lorsqu'un jour par hasard on a parlé de cet album sur un autre forum de BD, je me suis dit que c'était pour moi. J'avais déjà bien aimé la BD 'Quai d'Orsay' et aussi l'excellent film L'Exercice de l'État avec le regretté Michel Blanc et je pensais que ça serait encore le cas-ci. Surtout qu'en plus on parle d'un sujet sensible qui m'intéresse.
Bon ben voilà au vu de ma note vous avez compris que je n'ai pas du tout accroché. Il y a peut-être deux-trois passages qui ont vaguement retenus mon attention et puis c'est tout. Un point positif est qu'au moins on peut avoir une idée de combien c'est difficile de travail dans l'administration: on dirait que malgré tous les efforts on tourne en rond, il y a des égos à gérer, on dirait qu'il y a toujours quelque chose qui bloque tout...
Je pense que si je n'ai pas accroché est que l'auteur voulait montrer le monde politique tel qui l'est à travers un témoignage sans chercher à nécessairement divertir comme c'était le cas avec Quai d'Orsay qui mettait bien en avant la personnalité hauts-en-couleurs du ministre. Ici, on est 100% dans la vraie vie et la vie est souvent chiante comme le quotidien de ce conseiller. Il faut dire aussi que le dessin est pas mauvais, mais un peu froid. Je n'ai pas ressenti grande émotions en lisant cet album bavard que j'ai fini par feuilleter.
Un documentaire sur le monde des riches.
Le résultat est pas mal même si je n'ai pas eu l'impression d'en avoir apprit plus durant ma lecture en dehors de quelques anecdotes. Il faut dire que c'est une synthèse facile à suivre pour monsieur et madame tout le monde servit par un dessin humoristique sympathique et un humour qui fonctionne parfois.
J'aurais tout de même un album qui approfondit un peu plus certains éléments parce qu'au final cela donne un one-shot sympathique à lire, mais qui n'est pas marquant. De plus, je trouve que le questionnaire sur si on est bourgeois ou non pas marrant du tout et cela prends plusieurs pages qui aurait pu être consacré à quelque chose de plus pertinent.
Pour le 10ème anniversaire des attentats de Charlie Hebdo, le rédacteur en chef du Monde, Michel Guerrin écrivait : « Les attentats à “Charlie Hebdo”, c’est aussi une censure radicale, aux conséquences lourdes pour la culture ».
Dans cette œuvre de Tetsuya Tsutsui traitant du système de censure des mangas au Japon, point d'armes à feu pour faire taire les mangakas mais une commission d'experts chargée de désigner les "ouvrages nocifs" pour les jeunes générations sur la base de critères empiriques. Autant l'annoncer directement, la désignation d'un manga en tant qu'ouvrage nocif signe quasiment l'arrêt de mort de la série.
Basée sur une histoire vraie qui est arrivée à l'auteur pour sa série Manhole déclarée nocive dans une région du Japon sans qui l'en soit averti, cet ouvrage très détaillé et documenté, s'est avéré particulièrement instructif pour moi, qui ne connaissait pas cette problématique et ce système de classification des mangas dans certaines parties du Japon ni l'histoire de la censure des comics aux Etats-Unis relancée en 1954 par Frederic Wertham.
Pour expliquer sa mésaventure, l'auteur détaille le parcours d'un jeune mangaka, créateur d'une série horrifique "Dark Walker". Le lecteur suit ainsi le parcours du héros depuis la sélection de son œuvre par une maison d'édition jusqu'à sa déconvenue une fois la série ciblée par la commission de détection des ouvrages nocifs. Tetsuya Tsutsui en profite pour décrire la vie des mangakas et le long chemin semé d'embûches pour qu'une œuvre soit éditée puis obtienne la reconnaissance des lecteurs.
Si le thème de la censure reste central tout au long des 2 tomes, comme certains avis précédents, j'ai toutefois eu l'impression que l'histoire commençait à ronronner et tournait un peu en rond à compter du second tome. Ainsi, j'ai été un peu frustré que l'auteur n'aille pas plus loin dans son plaidoyer pour la liberté d'expression et n'analyse pas davantage l'impact que pourrait avoir la violence présente dans certaines catégories de mangas sur les jeunes lecteurs. J'aurais aimé que l'auteur, au travers de cet ouvrage, amène le lecteur à réfléchir jusqu'où peut aller la liberté d'expression plutôt que simplement tenter de démontrer que les mangas, quand bien même ils traitent de sujets subversifs (inceste, cannibalisme, etc.), font partie d'une œuvre imaginée par un mangaka et ont par conséquent le droit d'être publiés en vertu de la liberté d'expression.
La fin, que je ne divulguerai pas ici afin de laisser aux prochains lecteurs la surprise de la découvrir, est plutôt habile et relève un peu mon analyse du second tome, bien que le sort infligé à notre héros semble peu crédible à l'époque actuelle.
Concernant le dessin, j'ai particulièrement apprécié le trait de Tetsuya, très fin et précis avec des ombrages faisant parfois oublier qu'on lit un manga en noir et blanc. Un petit bémol concernant certaines expressions de visage que je trouve exagérées (notamment les réactions de surprise) mais qui restent, il est vrai, cohérentes avec l'univers du manga.
En résumé un manga au thème original et instructif mais qui ne me donnera pas forcément envie de m'y replonger.
SCENARIO (Originalité, Histoire, personnages) : 6,5/10
GRAPHISME (Dessin, colorisation) : 7/10
NOTE GLOBALE : 13,5/20
Oh là là, mais quelle catastrophe ! Qu'a cherché à faire Ariane Astier à travers cette... chose ? Pendant une bonne partie de la lecture, j'étais prêt à sortir les armes et partir en guerre contre les "filles de" qui croient avoir le même talent que leur géniaux géniteurs, mais je vais laisser cette partie de côté. Car, en effet, on ne peut dénier à la fille d'Alexandre Astier une certaine vision. A mon sens, elle passe à côté de son sujet, mais elle démontre dans cette tentative de manga à la française qu'elle a un réel talent graphique, et qu'elle est dotée d'une vraie sensibilité artistique. Même dans les pires moments de ce que j'appellerai par défaut une œuvre, on sent que l'autrice veut mettre un souffle dont elle nous donne à voir les prémisses ici ou là.
Le problème, c'est que le reste ne suit pas. Pour le pitch de base, c'est une chose. On aime ou on n'aime pas, mais il n'est pas plus idiot qu'un autre, et s'inscrit dans la plus pure tradition du manga, onirique et horrifique. A ce titre, Astier nous réserve quelques séquences bien gorasses qui auraient pu être sympathiques, dans un autre écrin.
Pour le pitch, donc, passons. Mais alors pour le scénario et la narration, qu'est-ce que c'est que ce truc ??? Rien ne va dans la narration visuelle : les cases s'enchaînent au petit bonheur la chance, les personnages ont des visages plus ou moins interchangeables, on passe d'une séquence à l'autre sans jamais comprendre comment on est arrivé à ce point du récit... Vraiment, c'est une catastrophe intersidérale. Peut-être étais-je particulièrement mal luné en lisant ce machin, mais là, j'avoue que je n'ai pas compris le pourquoi du comment.
Je n'ai pas compris grand-chose, d'ailleurs. Oui, on parvient à cerner les grandes lignes du récit, et les motivations du héros, mais ne me demandez pas de résumer les péripéties qui semblent jalonner le récit, je n'ai jamais vraiment réussi à comprendre le déroulé précis des événements qu'on essayait de nous raconter.
Comme je crois profondément à la sincérité d'Ariane Astier (je le dois sans doute à l'estime que je porte aux branches précédentes de la famille), je me refuse à croire qu'elle ait sombré dans le délire de cette sorte d'art boboïsant destiné à une sorte de pseudo-élite intellectuelle et autosatisfaite. Je veux donc croire que notre jeune autrice en herbe s'est simplement laissé dépasser par un projet trop grand pour elle. Le projet n'était sans doute pas mauvais, et il aura au moins eu le mérite de dévoiler des qualités graphiques indéniables. Mais pour une première incursion dans le monde très codifié de la bande dessinée (et qui plus est, du manga), c'était trop. Trop d'infos à gérer, dans le scénario, dans le découpage, dans l'écriture des personnages... Et je pense qu'Ariane Astier, à vouloir tout faire toute seule comme son père (?), est passée complètement à côté de sa cible.
Bref, je n'aurais rien contre la voir refaire surface sur une autre œuvre. Mais par pitié, qu'elle s'allie avec un scénariste aguerri, qui saura mettre de l'ordre dans les innombrables idées qui sont les siennes ! Cela ne pourra lui être que bénéfique.
Je n’ai pas grande inspiration pour vous donner envie de vous jeter sur ce diptyque, si ce n’est de dire que c’est franchement bien.
Heureusement les auteurs n’ont pas la même tare. Johnny Jungle est une lecture inventive, drôle et qui n’oublie pas l’émotion. Ce n’est pas indispensable mais tout me plaît dans cette Bd.
Dessins et couleurs des Jouvray sont toujours aux petits oignons, la narration est impeccable, le coup des affiches de film permet de bien faire respirer l’ensemble en plus de lui donner une cohérence. Classique mais efficace, j’aime bien la fausse simplicité qui s’en dégage.
Quant au scénario, il est super bien vu et profite d’un développement très soigné.
En fait, le tout fait preuve d’une telle maîtrise que vous passerez assurément un bon moment.
A découvrir (que l’on aime Tarzan ou non), on est face à un truc plutôt classe.
Deuxième publication après Sur le front de Corée du projet éditorial de Dupuis dédié à l'adaptation en bande dessinée de reportages de grands journalistes ayant gagné le célèbre Prix Albert Londres, cet album adapte un reportage effectué par Annick Cojean au milieu des années 1990 sur le thème de la Shoah. A cette époque, la diffusion des témoignages de victimes de la Shoah était relativement peu répandue mais Annick Cojean ne s'était pas contentée d'interroger des victimes et enfants de victimes des camps de concentration, elle avait pris également l'initiative d'aller interroger en Allemagne les enfants des nazis et des gardiens des camps pour avoir leur vision des faits, pour réaliser que beaucoup de ces enfants étaient eux aussi traumatisés par ce terrible passé. Et non contente de s'arrêter là, elle ira également jusqu'à relater le résultat de rencontres organisées entre enfants de victimes et enfants de tortionnaires.
L'album se compose plus ou moins de quatre parties, chacune mettant en scène la journaliste qui se rend vers ses différentes rencontres.
La première partie relate des témoignages des victimes et enfants de victimes. Si ceux-ci n'apprendront pas grand chose à ceux qui ont déjà beaucoup lu sur la Shoah, ils toucheront de manière quasi certaine les parents comme moi face à la cruauté de certaines scènes. La seconde partie aborde son séjour en Allemagne et ses entretiens avec les enfants de nazis. La troisième porte sur la rencontre entre enfants de deux bords. Et la dernière sa présentation de certains organismes dédiés à la communication sur la Shoah et à l'éducation des jeunes générations.
C'est Tamia Baudouin qui réalise le dessin de cette adaptation. Elle s'éloigne du trait légèrement naïf et esthétique de ses précédents albums pour adopter un style plus réaliste... et je crains que ça ne fonctionne pas. Je trouve certaines planches et certains détails vraiment laids, à tel point qu'il m'a fallu me forcer pour démarrer pour de bon ma lecture. D'autant plus que la mise en scène est régulièrement basique, avec parfois juste la journaliste qui parle à une personne, ou d'autre fois le dessin qui se contente d'accompagner le texte des témoignages sans vraie narration graphique.
Pour ce qui est du contenu, nous sommes dans le domaine du devoir de mémoire. Comme indiqué plus haut, certains témoignages sont poignants, et il est intéressant d'avoir leur contre-point avec le témoignage des enfants de nazis, de découvrir que certains d'entre eux avaient l'audace de soutenir la mémoire des crimes de leur père tandis que d'autres étaient ravagés par eux et cherchaient la repentance pour quelque chose qu'eux-mêmes n'avaient pas commis. J'attendais ensuite beaucoup de la découverte des rencontres entre enfants de chaque camp mais celles-ci se sont révélées un peu plus plates que ce que j'espérais : forcément, ceux qui avaient accepté de se rencontrer étaient déjà ouverts au dialogue et à la réconciliation donc la conclusion de celui-ci ne pouvait être que logique. Quant à l'exposé des différents travaux d'experts et d'organismes de soutien aux victimes et d'éducation des jeunes, il est rendu assez ennuyeux par l'énoncé de textes un peu barbants et là encore sans guère de surprise pour qui a déjà beaucoup lu sur le sujet.
En définitive, cet album remplit son rôle de devoir de mémoire et instruit sur le ressenti des enfants des représentants des deux camps de la Shoah, mais il le fait avec une narration peu palpitante et un graphisme assez rebutant à mon goût. Ce n'est donc pas forcément un album que je conseillerais en priorité sur le sujet.
Note : 2,5/5
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Sam Speed
Je possède les 4 albums existants, et comme je ne suis pas masochiste (aux dernières nouvelles), vous pouvez en conclure que ce n'est pas trop mal, du moins à mes yeux d'amateur de BD depuis quelques décennies. Je reconnais que c'est inférieur au célèbre Joe Bar Team, mais ça reste néanmoins dans une très honnête moyenne haute. Plusieurs dessinateurs se partagent le crayon, et parfois, ça se voit trop, ça nuit un peu à l'équilibre. Les engins sont bien dessinés, c'est flagrant. Pas moyen de confondre le modèle XYZ avec le ZYX ;) Les gags se laissent lire, certains étant très bons, mais d'autres étant nuls, on ne peut pas être toujours au top. Comme beaucoup d'albums dans le même cas, ne pas tout lire d'un seul coup, mais à petites doses. On sent que les auteurs sont de la partie (moto), mais ils n'étalent pas leur science, ça reste parfaitement lisible pour le néophyte qui n'y connait pas grand-chose. En clair, ça reste tout public. Néanmoins, certaines demoiselles (une en particulier) ne sont pas à mettre sous le nez des trop jeunes enfants. Les "éveillés" diront que c'est outrageusement sexiste et dégradant et qu'il faut impérativement bruler certaines planches (et même peut-être les auteurs) :) Moi, je dis que c'est à lire, sachant que cette série est au dessus de la mêlée. Je songe à certaines autres séries dont on se demande si l'éditeur n'est pas hélas affublé de la même infirmité que Gilbert Montagné ou Andrea Bocelli.
Studio Danse
Studio Danse est une série de gags humoristiques en une page de qualité relativement bonne mais sans être non plus transcendante. Au début on pourrait s'attendre à une série de BD classique à la Bamboo sur un métier ou une passion qu'on croirait avoir été piochée au hasard par les scénaristes qui auraient dû ensuite se dépatouiller avec le peu d'inspiration que le sujet leur fournissait, mais en fait non. Les gags sont simples, souvent assez convenus, mais quelques uns arrivent un peu à faire mouche (ou a en tout cas faire sourire). Et, surtout, ce qui me fait dire que cette série arrive au moins à tenir la moyenne, c'est qu'elle réussit ce qui est pour moi essentiel dans les séries de ce genre : arriver à nous rendre les personnages un minimum attachants et le sujet un tant soi peu intéressants. Sans les avoir adorées j'avoue avoir pris plaisir à lire les petites histoires de ces personnages. Julie, Luce et Alia sont notre trio principal ; elles ne se démarquent les unes des autres que par leurs relations familiales externes et quelques petits détails de ci de là, leurs vraies différences narratives ne tiennent en réalité qu'à leurs différences d'apparence. Autour d'elles gravitent plusieurs personnages récurrents : Capucine (la petite sœur de Julie), Bruno (le seul garçon du cours de danse), Carla (sorte de Veronica Di Angelo locale), Mme Anne (la professeure de danse), ... Bref, un roster classique pour ce genre de série. Les dessins, eux aussi, sont simples mais remplissent leur office. Vraiment, c'est ce que je retiens de ma lecture : ça ne casse pas trois pattes à un canard mais ça se laisse sincèrement lire sans déplaisir.
Drakko
Voici une bd où le dragon est central et omniprésent. Finalement c'est assez rare quand on y pense, par exemple dans la Geste des chevaliers dragons l'on voit des beaux animaux mais pas à chaque page. Bref, le thème centré sur le dragon/les dragons est (selon ma propre perception) original et finalement assez rare avec une telle intensité. C'est vraiment ce qui démarque cette bd du reste des autres histoires courantes où il y a souvent un dragon à la fin en tant que boss final. L'univers de cette BD est également un grand point positif que je ne vais pas commenter pour vous laisser découvrir. Question dessin c'est très beau, rien à redire c'est également un joli + pour cette bd. Concernant l'histoire, ça se suit bien sans décrocher. Après ça reste un scénario classique à hyper classique, mais de mon point de vue pas si gênant. Question personnage, c'est peut-être un peu insuffisant, où les protagonistes ne sont pas vraiment approfondis, voir légèrement caricaturés (je suis méchant car je suis méchant....bref). Pour les dialogues ça va, rien à voir avec la richesse de certaines bd comme les 5 terres, ça se lit bien, sans plus. Je regrette peut-être le nom que les auteurs ont choisi de donner à leurs montures car à mon avis ça manque cruellement d'imagination, faisant allusion à une référence archi connue. Mon bilan : Presque que du +, j'ai vraiment aimé cette bd (un peu trop courte à regret) et je suis très content de l'avoir dans ma bibliothèque. Bref une bd qui demande à être plus connue, je recommande la découverte sans hésiter pour tous ceux qui n'ont pas peur de se brûler les yeux à la chaleur du dragon. Si le thème ne vous parle pas trop, peut-être faut-il mieux passer votre chemin.
Dirty Rose
Sache qu’il y a des choses qui se règlent en dehors des dossiers. - Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre. La première édition date de 2024. Il a été réalisé par Marzena Sowa pour le scénario, et par Benoît Blary pour les dessins et la mise en couleurs. Il comprend quatre-vingt-six pages de bande dessinée. Dans une zone désertique du Wyoming, une maison très isolée au bout du chemin, avec quelques bêtes en pâturage. Tom Brodowski regarde par la fenêtre, réchauffé par le soleil, avec un mug dans la main. Dans cette petite maison sans étage, un matelas au sol, des cartons non déballés, une valise encore fermée. Le téléphone diffuse une chanson, alors que le jeune homme prend sa douche. Puis la sonnerie retentit et Tom se précipite pour décrocher, et il éprouve un moment de déception. C’est Edith, la cheffe du commissariat qui l’appelle. Elle lui demande poliment comment s’est passée cette première nuit chez lui et elle lui explique sa première mission. Ils vont l’envoyer direct sur le terrain, il ne faut pas qu’il s’attende à débarquer dans un western. Il s’agit d’une femme un peu spéciale, elle habite pas trop loin de chez lui. Il y a une plainte au commissariat : une association qui défend les animaux, des tarés mais dans un autre genre. Apparemment, elle garde des chèvres dans sa caravane. Edith continue : il faudrait que Tom lui dise qu’il y a une plainte, mais qu’on ne veut pas l’accabler avec ça, mais que ce serait bien si elle relâchait les pauvres bêtes dans le pâturage. Il faut qu’il dise que c’est illégal et barbare, et tout le tralala, on ne fait pas ça aux animaux. Pour finir, Edith lui envoie les coordonnées GPS. Dans le commissariat, Reynold, le mari d’Edith, également policier, rassure un père et son fils, sur le fait qu’avec les photos qu’ils ont collées partout, il est sûr qu’on retrouvera leur chien. William, un autre policier, ironise sur la manière dont Edith a présenté la mission : une femme un peu spéciale, une tarée de première plutôt. Quand il est arrivé, on ne l’a pas envoyé chez elle au premier feu, mais lui est d’ici, aussi c’est différent. Il la connait depuis gamin, elle avait un corbeau apprivoisé sur l’épaule, il avait peur de lui aussi. Il se rappelle qu’un jour elle est venue chercher Jean à l’école, elle était seins nus, elle venait chercher sa fille à poil, même si elle n’est pas sortie de sa voiture. Edith reprend la parole : le jeune arrive de Chicago, s’il ne se débrouille pas ici, il est fait pour nulle part. Bob fait observer qu’ici, ils sont au far-west, pas le même monde, pas les mêmes règles. Edith conclut qu’il faut le laisser faire, ce n’est qu’une femme après tout, cette dernière phrase lui attirant des regards chargés de sous-entendus. Tom Brodowski se présente devant la clôture et il hèle pour attirer l’attention. À l’intérieur de sa caravane, Rose Shaw fume tranquillement sa cigarette et son chien Boo aboie sans discontinuer. Elle finit par le laisser sortir, toujours sans se montrer. Le chien se précipite à la clôture, empli de curiosité, sans plus aboyer. Tom finit par renoncer. Dans une maison distante de trois cents mètres, un couple âgé observe, mécontent qu’Edith ait envoyé le nouveau. Une vague promesse contenue dans le titre, d’une femme jugée peu recommandable par les autres, vivant visiblement avec un chien dans une caravane ou un mobil-home, laissant les déchets s’accumuler autour. Une histoire qui commence avec un jeune policier, récemment arrivé (arrivé de la veille même) dans un vrai patelin au fin fond du Wyoming, où tout le monde se connaît, et connaît Rose Shaw. Une simple enquête de voisinage ? Un secret honteux, ou peut-être criminel ? Une histoire d’amour improbable entre un jeune homme et une femme âgée ? Des rancœurs accumulées pendant des dizaines d’années ne demandant qu’à alimenter des actes de violence ? Le lecteur ne sait pas trop sur quel pied danser, qu’attendre du récit, ce qui le rend plus attentif à ce qu’il voit. Tout commence par une belle aquarelle mettant en valeur la profondeur de champ de cette plaine s’étendant jusqu’au pied de lointaines montagnes, sous un ciel d’un beau bleu rehaussé par quelques nuages. L’artiste a-t-il séjourné dans le Wyoming ? Quoi qu’il en soit, il donne à voir ce coin d’Amérique rurale. La maison de Tom apparaît toute simple et peu onéreuse, en préfabriquée, de plain-pied, avec une rangée de poteaux électriques pour le long de l’allée qui y mène, pour rejoindre la route. De près, la parcelle de Rose Shaw semble jonchée de carcasses de voitures, de mobilier abandonné, avec assez d’espace entre chaque pour que ce ne soit pas encore un dépotoir ou une décharge. Un peu plus loin, la parcelle des époux Connie & Boyle apparaît comme un modèle de propreté et de terrain entretenu avec soin. Vues d’un peu plus loin encore, les deux parcelles ne diffèrent quasiment plus. Plus tard, lorsque Tom revient chez lui en marchant le long de la route, l’obscurité semble comme écraser les espaces, à l’exception du ruban de la route qui donne l’impression d’être sans fin. À la lumière du soleil le lendemain au petit matin, le paysage a retrouvé toute son ampleur, son horizon sans fin. Cette sensation de grand espace ouvert se retrouve en page cinquante-sept avec une case de la largeur de la page consacrée à la plaine ondoyante. De manière surprenante, ce même paysage donne l’impression d’avoir repris une dimension un peu plus petite plus en relation avec les deux chevaux qui portent chacun leur cavalier. Enfin la fin du récit emmène le lecteur dans une forêt à proximité d’une mesa de grande hauteur, avec une très belle case de la largeur de la page (en page 78), une vue de dessus, avec des rapaces dans le ciel au premier plan. Si les grands espaces de ce coin du Wyoming sont bien présents, les personnages évoluent également dans d’autres environnements. Le lecteur commence par avoir droit à une vue globale de l’intérieur de la petite maison de Tom. Puis vient la salle principale du commissariat : un espace de travail accueillant trois ou quatre bureaux avec leurs tiroirs, le poste informatique avec sa souris sans fil, les casiers pour les dossiers, la lampe de bureau, le petit matériel de type stylos, bloc-notes et papillons adhésifs, sans oublier les mugs, et bien sûr un gros photocopieur, un réfrigérateur, une machine à café. Par la suite, le lecteur accompagne Tom chez ses voisins, dans le meilleur bar-restaurant du coin, dans un bar plus lointain où se tient un concert de musique Country, à l’intérieur de la caravane de Rose, dans un supermarché impersonnel, dans une pizzeria à emporter, dans un ranch avec sa douche à l’extérieur, et même dans une cellule du commissariat. L’artiste dépeint une petite ville de l’Amérique profonde, dans la banalité de son quotidien, un environnement où il fait bon vivre, pensé pour faciliter la vie de consommateur tout en présentant des endroits accueillant où il fait bon se retrouver et papoter. Le lecteur constate rapidement que la distribution de personnages s’articule autour de Tom Brodowski et Rose Shaw, avec une poignée de seconds rôles : quatre policiers dont le couple d’Edith & Reynold, Connie & Boyle le couple voisin de Rose, Jena la fille de Rose, Boo son chien, Chumani une jeune femme et bien sûr Helen la fiancée de Tom. Les dessins montrent des personnages adultes, avec des gestes d’adulte, des comportements en conséquence, et des physiques normaux et banals, tout en étant individualisés. Tom est un beau jeune homme blond, avec une implantation de cheveux qui lui est propre, une forme de visage un peu allongée. Edith, Reynold et Bob portent les marques de l’âge. Le lecteur peut noter que William est plus jeune, que les autres, avec une coiffure plus soignée. Il apprécie l’expressivité plus marquée de Jean, que ce soit quand elle fait des mimiques parce qu’elle trouve que Tom a déjà des goûts de vieux, ou sa colère face à sa mère. Il apparaît que Rose Shaw s’est vue affublée de cet adjectif péjoratif du fait de son style de vie, qu’une autre femme résume ainsi : Elle n’avait peur de rien ni de personne, elle faisait tout comme elle le sentait, elle aimait l’alcool et les hommes et la fête et les armes, la totale. Il apparaît vite que Rose Shaw ne se conforme pas aux valeurs implicites de la société dans laquelle elle se trouve. Son anticonformisme atteste du fait qu’il est possible de vivre autrement, qu’un individu peut prendre la liberté d’agir différemment. Par voie de conséquence, les règles de vie tacites des uns et des autres se trouvent remises en cause : la fidélité entre époux, l’élimination des objets et des véhicules usagés, l’acceptation des règles de vie en société à commencer par la soumission à l’autorité de la police, le respect de la pudeur, l’acceptation des responsabilités de la parentalité, le respect de l’intimité des autres, etc. Bien évidemment, ce comportement ne peut qu’entrer en conflit avec les valeurs d’un jeune policier, même intelligent. Hé bien non, pas tout à fait. La curiosité de Tom Brodowski s’accompagne d’une empathie, ou d’une absence de préjugé, et aussi d’un sens de la justice. Dans une scène étrange, deux dessins en pleine page, la première avec une case, et le monologue d’un personnage, le lecteur découvre quelqu’un pour qui Rose a représenté bien autre chose, des valeurs différentes et des plaisirs honnêtes. Puis, dans la deuxième page, un événement traumatisant qui permet d’entrevoir ce qui conduit Rose Shaw à arrêter de jouer en respectant des règles dépourvues de sens. La conclusion en deux temps met en scène deux facettes de la liberté, et laisse augurer de l’avenir de Tom Brodowski à moyen ou long terme. Au vu de la couverture, une histoire courue d’avance, d’une femme vivant une vie de marginale dans sa caravane. À la lecture plutôt l’histoire d’un jeune policier qui effectue son travail, sans pour autant accepter les choses comme elles sont, en particulier le consensus général contre Rose Shaw, une femme qui s’est mise à l’écart de la société, qui n’y a plus sa place, qui en paye le prix. Mais aussi Rose et son mauvais caractère. La narration visuelle qui transporte le lecteur dans un petit patelin tranquille du Wyoming, avec de beaux paysages, des endroits accueillants en ville, des habitants normaux et plutôt sympathiques. Des incidents pas si graves que ça, le temps de vivre, une femme complexe dont l’excentricité empêche la normalité des autres, contraints d’accepter l’existence de choix différents, suscitant des interrogations irrépressibles.
Désintégration - Journal d'un conseiller à Matignon
Je rejoins l'avis de Ro. J'aime la politique et lorsqu'un jour par hasard on a parlé de cet album sur un autre forum de BD, je me suis dit que c'était pour moi. J'avais déjà bien aimé la BD 'Quai d'Orsay' et aussi l'excellent film L'Exercice de l'État avec le regretté Michel Blanc et je pensais que ça serait encore le cas-ci. Surtout qu'en plus on parle d'un sujet sensible qui m'intéresse. Bon ben voilà au vu de ma note vous avez compris que je n'ai pas du tout accroché. Il y a peut-être deux-trois passages qui ont vaguement retenus mon attention et puis c'est tout. Un point positif est qu'au moins on peut avoir une idée de combien c'est difficile de travail dans l'administration: on dirait que malgré tous les efforts on tourne en rond, il y a des égos à gérer, on dirait qu'il y a toujours quelque chose qui bloque tout... Je pense que si je n'ai pas accroché est que l'auteur voulait montrer le monde politique tel qui l'est à travers un témoignage sans chercher à nécessairement divertir comme c'était le cas avec Quai d'Orsay qui mettait bien en avant la personnalité hauts-en-couleurs du ministre. Ici, on est 100% dans la vraie vie et la vie est souvent chiante comme le quotidien de ce conseiller. Il faut dire aussi que le dessin est pas mauvais, mais un peu froid. Je n'ai pas ressenti grande émotions en lisant cet album bavard que j'ai fini par feuilleter.
Riche, pourquoi pas toi ?
Un documentaire sur le monde des riches. Le résultat est pas mal même si je n'ai pas eu l'impression d'en avoir apprit plus durant ma lecture en dehors de quelques anecdotes. Il faut dire que c'est une synthèse facile à suivre pour monsieur et madame tout le monde servit par un dessin humoristique sympathique et un humour qui fonctionne parfois. J'aurais tout de même un album qui approfondit un peu plus certains éléments parce qu'au final cela donne un one-shot sympathique à lire, mais qui n'est pas marquant. De plus, je trouve que le questionnaire sur si on est bourgeois ou non pas marrant du tout et cela prends plusieurs pages qui aurait pu être consacré à quelque chose de plus pertinent.
Poison City
Pour le 10ème anniversaire des attentats de Charlie Hebdo, le rédacteur en chef du Monde, Michel Guerrin écrivait : « Les attentats à “Charlie Hebdo”, c’est aussi une censure radicale, aux conséquences lourdes pour la culture ». Dans cette œuvre de Tetsuya Tsutsui traitant du système de censure des mangas au Japon, point d'armes à feu pour faire taire les mangakas mais une commission d'experts chargée de désigner les "ouvrages nocifs" pour les jeunes générations sur la base de critères empiriques. Autant l'annoncer directement, la désignation d'un manga en tant qu'ouvrage nocif signe quasiment l'arrêt de mort de la série. Basée sur une histoire vraie qui est arrivée à l'auteur pour sa série Manhole déclarée nocive dans une région du Japon sans qui l'en soit averti, cet ouvrage très détaillé et documenté, s'est avéré particulièrement instructif pour moi, qui ne connaissait pas cette problématique et ce système de classification des mangas dans certaines parties du Japon ni l'histoire de la censure des comics aux Etats-Unis relancée en 1954 par Frederic Wertham. Pour expliquer sa mésaventure, l'auteur détaille le parcours d'un jeune mangaka, créateur d'une série horrifique "Dark Walker". Le lecteur suit ainsi le parcours du héros depuis la sélection de son œuvre par une maison d'édition jusqu'à sa déconvenue une fois la série ciblée par la commission de détection des ouvrages nocifs. Tetsuya Tsutsui en profite pour décrire la vie des mangakas et le long chemin semé d'embûches pour qu'une œuvre soit éditée puis obtienne la reconnaissance des lecteurs. Si le thème de la censure reste central tout au long des 2 tomes, comme certains avis précédents, j'ai toutefois eu l'impression que l'histoire commençait à ronronner et tournait un peu en rond à compter du second tome. Ainsi, j'ai été un peu frustré que l'auteur n'aille pas plus loin dans son plaidoyer pour la liberté d'expression et n'analyse pas davantage l'impact que pourrait avoir la violence présente dans certaines catégories de mangas sur les jeunes lecteurs. J'aurais aimé que l'auteur, au travers de cet ouvrage, amène le lecteur à réfléchir jusqu'où peut aller la liberté d'expression plutôt que simplement tenter de démontrer que les mangas, quand bien même ils traitent de sujets subversifs (inceste, cannibalisme, etc.), font partie d'une œuvre imaginée par un mangaka et ont par conséquent le droit d'être publiés en vertu de la liberté d'expression. La fin, que je ne divulguerai pas ici afin de laisser aux prochains lecteurs la surprise de la découvrir, est plutôt habile et relève un peu mon analyse du second tome, bien que le sort infligé à notre héros semble peu crédible à l'époque actuelle. Concernant le dessin, j'ai particulièrement apprécié le trait de Tetsuya, très fin et précis avec des ombrages faisant parfois oublier qu'on lit un manga en noir et blanc. Un petit bémol concernant certaines expressions de visage que je trouve exagérées (notamment les réactions de surprise) mais qui restent, il est vrai, cohérentes avec l'univers du manga. En résumé un manga au thème original et instructif mais qui ne me donnera pas forcément envie de m'y replonger. SCENARIO (Originalité, Histoire, personnages) : 6,5/10 GRAPHISME (Dessin, colorisation) : 7/10 NOTE GLOBALE : 13,5/20
Moody Rouge
Oh là là, mais quelle catastrophe ! Qu'a cherché à faire Ariane Astier à travers cette... chose ? Pendant une bonne partie de la lecture, j'étais prêt à sortir les armes et partir en guerre contre les "filles de" qui croient avoir le même talent que leur géniaux géniteurs, mais je vais laisser cette partie de côté. Car, en effet, on ne peut dénier à la fille d'Alexandre Astier une certaine vision. A mon sens, elle passe à côté de son sujet, mais elle démontre dans cette tentative de manga à la française qu'elle a un réel talent graphique, et qu'elle est dotée d'une vraie sensibilité artistique. Même dans les pires moments de ce que j'appellerai par défaut une œuvre, on sent que l'autrice veut mettre un souffle dont elle nous donne à voir les prémisses ici ou là. Le problème, c'est que le reste ne suit pas. Pour le pitch de base, c'est une chose. On aime ou on n'aime pas, mais il n'est pas plus idiot qu'un autre, et s'inscrit dans la plus pure tradition du manga, onirique et horrifique. A ce titre, Astier nous réserve quelques séquences bien gorasses qui auraient pu être sympathiques, dans un autre écrin. Pour le pitch, donc, passons. Mais alors pour le scénario et la narration, qu'est-ce que c'est que ce truc ??? Rien ne va dans la narration visuelle : les cases s'enchaînent au petit bonheur la chance, les personnages ont des visages plus ou moins interchangeables, on passe d'une séquence à l'autre sans jamais comprendre comment on est arrivé à ce point du récit... Vraiment, c'est une catastrophe intersidérale. Peut-être étais-je particulièrement mal luné en lisant ce machin, mais là, j'avoue que je n'ai pas compris le pourquoi du comment. Je n'ai pas compris grand-chose, d'ailleurs. Oui, on parvient à cerner les grandes lignes du récit, et les motivations du héros, mais ne me demandez pas de résumer les péripéties qui semblent jalonner le récit, je n'ai jamais vraiment réussi à comprendre le déroulé précis des événements qu'on essayait de nous raconter. Comme je crois profondément à la sincérité d'Ariane Astier (je le dois sans doute à l'estime que je porte aux branches précédentes de la famille), je me refuse à croire qu'elle ait sombré dans le délire de cette sorte d'art boboïsant destiné à une sorte de pseudo-élite intellectuelle et autosatisfaite. Je veux donc croire que notre jeune autrice en herbe s'est simplement laissé dépasser par un projet trop grand pour elle. Le projet n'était sans doute pas mauvais, et il aura au moins eu le mérite de dévoiler des qualités graphiques indéniables. Mais pour une première incursion dans le monde très codifié de la bande dessinée (et qui plus est, du manga), c'était trop. Trop d'infos à gérer, dans le scénario, dans le découpage, dans l'écriture des personnages... Et je pense qu'Ariane Astier, à vouloir tout faire toute seule comme son père (?), est passée complètement à côté de sa cible. Bref, je n'aurais rien contre la voir refaire surface sur une autre œuvre. Mais par pitié, qu'elle s'allie avec un scénariste aguerri, qui saura mettre de l'ordre dans les innombrables idées qui sont les siennes ! Cela ne pourra lui être que bénéfique.
Johnny Jungle
Je n’ai pas grande inspiration pour vous donner envie de vous jeter sur ce diptyque, si ce n’est de dire que c’est franchement bien. Heureusement les auteurs n’ont pas la même tare. Johnny Jungle est une lecture inventive, drôle et qui n’oublie pas l’émotion. Ce n’est pas indispensable mais tout me plaît dans cette Bd. Dessins et couleurs des Jouvray sont toujours aux petits oignons, la narration est impeccable, le coup des affiches de film permet de bien faire respirer l’ensemble en plus de lui donner une cohérence. Classique mais efficace, j’aime bien la fausse simplicité qui s’en dégage. Quant au scénario, il est super bien vu et profite d’un développement très soigné. En fait, le tout fait preuve d’une telle maîtrise que vous passerez assurément un bon moment. A découvrir (que l’on aime Tarzan ou non), on est face à un truc plutôt classe.
Les Mémoires de la Shoah
Deuxième publication après Sur le front de Corée du projet éditorial de Dupuis dédié à l'adaptation en bande dessinée de reportages de grands journalistes ayant gagné le célèbre Prix Albert Londres, cet album adapte un reportage effectué par Annick Cojean au milieu des années 1990 sur le thème de la Shoah. A cette époque, la diffusion des témoignages de victimes de la Shoah était relativement peu répandue mais Annick Cojean ne s'était pas contentée d'interroger des victimes et enfants de victimes des camps de concentration, elle avait pris également l'initiative d'aller interroger en Allemagne les enfants des nazis et des gardiens des camps pour avoir leur vision des faits, pour réaliser que beaucoup de ces enfants étaient eux aussi traumatisés par ce terrible passé. Et non contente de s'arrêter là, elle ira également jusqu'à relater le résultat de rencontres organisées entre enfants de victimes et enfants de tortionnaires. L'album se compose plus ou moins de quatre parties, chacune mettant en scène la journaliste qui se rend vers ses différentes rencontres. La première partie relate des témoignages des victimes et enfants de victimes. Si ceux-ci n'apprendront pas grand chose à ceux qui ont déjà beaucoup lu sur la Shoah, ils toucheront de manière quasi certaine les parents comme moi face à la cruauté de certaines scènes. La seconde partie aborde son séjour en Allemagne et ses entretiens avec les enfants de nazis. La troisième porte sur la rencontre entre enfants de deux bords. Et la dernière sa présentation de certains organismes dédiés à la communication sur la Shoah et à l'éducation des jeunes générations. C'est Tamia Baudouin qui réalise le dessin de cette adaptation. Elle s'éloigne du trait légèrement naïf et esthétique de ses précédents albums pour adopter un style plus réaliste... et je crains que ça ne fonctionne pas. Je trouve certaines planches et certains détails vraiment laids, à tel point qu'il m'a fallu me forcer pour démarrer pour de bon ma lecture. D'autant plus que la mise en scène est régulièrement basique, avec parfois juste la journaliste qui parle à une personne, ou d'autre fois le dessin qui se contente d'accompagner le texte des témoignages sans vraie narration graphique. Pour ce qui est du contenu, nous sommes dans le domaine du devoir de mémoire. Comme indiqué plus haut, certains témoignages sont poignants, et il est intéressant d'avoir leur contre-point avec le témoignage des enfants de nazis, de découvrir que certains d'entre eux avaient l'audace de soutenir la mémoire des crimes de leur père tandis que d'autres étaient ravagés par eux et cherchaient la repentance pour quelque chose qu'eux-mêmes n'avaient pas commis. J'attendais ensuite beaucoup de la découverte des rencontres entre enfants de chaque camp mais celles-ci se sont révélées un peu plus plates que ce que j'espérais : forcément, ceux qui avaient accepté de se rencontrer étaient déjà ouverts au dialogue et à la réconciliation donc la conclusion de celui-ci ne pouvait être que logique. Quant à l'exposé des différents travaux d'experts et d'organismes de soutien aux victimes et d'éducation des jeunes, il est rendu assez ennuyeux par l'énoncé de textes un peu barbants et là encore sans guère de surprise pour qui a déjà beaucoup lu sur le sujet. En définitive, cet album remplit son rôle de devoir de mémoire et instruit sur le ressenti des enfants des représentants des deux camps de la Shoah, mais il le fait avec une narration peu palpitante et un graphisme assez rebutant à mon goût. Ce n'est donc pas forcément un album que je conseillerais en priorité sur le sujet. Note : 2,5/5