Les derniers avis (2 avis)

Couverture de la série Medieval Girlfriends
Medieval Girlfriends

Voilà un album que j'avais dans le collimateur depuis son annonce. Un album de la talentueuse Juliette Cousin, dont j'apprécie grandement le travail graphique, mettant en scène deux personnages qu'elle utilisait déjà dans ses illustrations depuis quelques années, une romance saphique médiévale avec un monstre dans l'équation de surcroît, moi je dis oui. L'album était exactement ce à quoi je pouvais m'attendre : une romance simple, une rencontre entre un monstre et la chasseuse venue l'exterminer, la découverte progressive de l'autre, la naissance des sentiments, l'amour, l'arrivée de la haine du monde extérieur et le rappel que cet amour hors norme est mal vu, une fuite et un espoir de monde meilleur. Une histoire tellement classique que l'on n'aurait même pas besoin de dialogues pour la comprendre, et c'est d'ailleurs sans doute l'une des raisons qui a poussé l'autrice à faire de cet album un récit muet. Mis à part deux mots sur une affiche et deux/trois onomatopées, pas un dialogue ni un son ne viendra appuyer la narration, tout se fera par les images et les expressions des personnages. Le découpage des cases est fluide, l'action toujours lisible, le dessin joli, on se permet même quelques petits passages emprunts de mystère où l'absence de dialogue permet d'ajouter davantage de magie au récit (notamment les interventions de la créature chimérique semblant être liée à la forêt), … Bref, même si le fond de l'histoire est classique, la forme que lui donne Juliette Cousin la rend tout de même on ne peut plus agréable à lire. Un album très doux, beau et même un peu sensuel par moment. Mention spéciale à la bête du duo romantique principal, sorte de sirène semblable à un serpent aquatique, dont je trouve le design et l'expressivité corporelle très bien trouvés. (Note réelle 3,5)

18/11/2025 (modifier)
Par gruizzli
Note: 4/5 Coups de coeur du moment
Couverture de la série En quête de liberté
En quête de liberté

Oh mon dieu ... Et pourtant je ne suis pas croyant, c'est dire. Je ne pensais pas que cette BD serait aussi rude, mais le sous-titre promettait d'être abominable. Et il l'a été, en effet ... Disons le tout net, cette BD n'est pas pour tout le monde ! Elle est même franchement pas recommandée si vous êtes sensibles à certains sujets notamment les violences familiales et celles faites aux femmes. Parce que Sana va en prendre plein la gueule dès les premières pages. Enfant battue par sa mère qui va se radicaliser progressivement, elle sera emmenée de force en Syrie où son père sera contraint de les rejoindre pour les revoir. Mariée de force, devenue mère à 16 ans, elle va ensuite vivre l'enfer de la guerre contre l'EI et tentera par plusieurs moyens de rentrer en France. Ce qui lui prendra dix ans ... Je ne vais pas faire le détail, la BD étant très complète même si elle ne s'attarde jamais sur un seul des évènements. Tout s'enchaine à un rythme dingue, tant tout ce qu'il se passe parait hors de contrôle. C'est tant mieux, on évite ainsi la misère et le pathos des situations qui s'enchainent à chaque fois vers le pire. Et alors que je ne le pensais pas en l'ouvrant, la BD m'a mis un taquet dans les dents. En même temps, comment rester insensible devant cette gamine condamnée par sa famille à devenir fille-mère, subir les bombardements, l'exil et la faim tout en voyant mourir autour d'elles ceux qu'elle aime ? Cette BD est une bonne démonstration des dangers de la radicalisation. Ici c'est tout une famille (tante et cousines avec) qui vont se retrouver emporté dans Daesh et qui vont mourir progressivement, dépossédé de toute humanité, bombardé, chassé et parqué dans des camps. Mais cette BD a l'intelligence de ne pas se limiter à ce parcours et de finir sur une dernière critique bien sentie : comment a-t-on pu laisser une jeune fille de 13 ans disparaitre de l'école, ne jamais être signalée pour maltraitance infantile alors qu'elle était couverte de bleue lorsqu'elle allait chez le médecin ? Comment a-t-on pu laisser toute cette famille partir ainsi sans s'alarmer, sans rien faire ? Je proposerais bien une théorie à base de racisme ordinaire et de je-m’en-foutisme envers les plus pauvres, mais je ne prétendrais pas avoir la solution. Le fait est là, nos sociétés permettent à ces gens de partir, de briser des vies et d'aller enrichir en vie humaine des guerres atroces à l'autre bout de la Méditerranée. Mais on s'en fout, ce ne sont que des musulmans ... La BD souffre de quelques défauts techniques, notamment sur le dessin. Il s'agit de la première BD de l'autrice qui a officiait déjà dans le milieu, et globalement l'ensemble se tient très bien. Il s'agit plus de détail sur les proportions anatomiques, les visages parfois étranges notamment lors de grosses réactions de surprises et divers moments où les postures font raides et pas très naturelles. Ces défauts techniques sont là, mais n'entachent clairement pas la lecture que j'ai fait d'une traite et dans laquelle j'étais complètement immergé. La technique, c'est bien, mais ça ne fait pas tout, et là le reste est tellement bon que c'est facile de passer outre. Cette BD est une lecture importante, un témoignage de dysfonctionnement dans nos sociétés qui vont conduire à des drames humains. La fin est éclairante dessus, lorsqu'on se rend compte de la chance de Sana qui a pu rentrer au pays tandis que d'autres, considérées comme "trop radicalisées" et donc potentiellement dangereuses continuent de croupir dans des camps de prisonniers où elles et leurs enfants masculins vont sans doute mourir. Parce que les prendre en charge couterait trop cher, ma bonne dame, et qu'on a plus d'argent (sauf pour l'armée et les politiciens). Bref, une autre BD sur l'enfer que certains vivent. Et une plongée dans l'intérieur de Daesh, une organisation qui fait réellement froid dans le dos.

18/11/2025 (modifier)