De l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace
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Il s'agit d'une histoire complète, indépendante de toute autre, initialement parue en 8 épisodes en 2011/2012, écrite par Joe Casey, illustrée et mise en couleurs par Mike Huddlestone.
Dick Cheney (un ex vice président américain) et Jay Leno (un présentateur d'émission télé très célèbre aux États-Unis) se rendent dans l'établissement préféré de Righteous Maker (un superhéros semi retraité dont le costume évoque le drapeau américain). Cheney actionne avec répugnance la poignée (en forme de sexe masculin) de la porte d'entrée. Ils trouvent le superhéros en pleine orgie avec 4 femmes à ses pieds en train de satisfaire ses besoins (qui impliquent l'utilisation de lubrifiant et de gants en latex). Cheney et Leno viennent proposer une mission clandestine à Maker : exécuter tous les supercriminels emprisonnés dans la prison Crazy Keep, pour faire économiser de l'argent au contribuable. Maker s'acquitte de sa mission en pulvérisant la prison. Mais à son insu, une poignée de détenus ont survécu, dont certains plus dangereux que d'autres. Ils veulent tous la peau de Maker. En se rendant à cette prison, Maker a envoyé la voiture d'Arnie B. Willard (un policier) dans le fossé. Celui-ci a juré de retrouver le chauffard et de lui faire payer très cher son écart de conduite. Il va recevoir l'aide de The Absolute, l'évadé le plus mystérieux de Crazy Keep.
C'est un massacre du début à la fin, un outrage aux bonnes mœurs les deux pieds dans le plat, une bordée ininterrompue de jurons, des jaillissements de stupre et de luxure, des grands coups de poing dans la tronche, des décharges d'énergie destructrice, des silhouettes improbables, des couleurs criardes, un transsexuel, un superhéros sur le retour qui ne fait pas dans la dentelle, un patrouilleur des autoroutes à la dignité bafouée, un énorme camion à l'américaine, des parties de jambes en l'air mémorables, et (dans l'édition en VO) une postface de 30 pages dans laquelle Joe Casey se lâche et se donne à fond. Dans ces 30 pages, il effectue une auto-interview d'une demi douzaine de questions parmi lesquelles celle de savoir si ce récit désinhibé, décomplexé et éhonté constitue un métacommentaire. Il se répond à lui-même par le biais d'un va-te faire bien senti. Si le lecteur n'avait pas compris à la lecture de ces 8 épisodes, c'est clair : il n'y a rien à comprendre, rien à chercher, tout est à apprécier au premier degré. C'est à la fois une grande déclaration d'amour au genre Superhéros, et un grand coup de pied dans les roustes, avec un second degré omniprésent renforcé par une provocation de mauvais goût assumé. Les illustrations de Mike Huddleston complètent et renforcent à merveille cette construction dégénérée, ce cri primal, ce défouloir hors norme.
En reprenant tout ça dans l'ordre, le lecteur peut constater que Joe Casey raconte une histoire primaire de superhéros, pas plus bête que toutes les autres. Le scénario est solidement construit, la logique interne est respectée, il y a des superpouvoirs, la ligne de démarcation entre superhéros et supercriminels est claire, le combat est manichéen à souhait. Les deux derniers supercriminels à abattre sont les plus retors, il y a même des assistants adolescents (sidekicks) qui sont évoqués, et des costumes moulants colorés aux motifs improbables. Le récit se termine sur une résolution claire et nette. C'est juste qu'il y a une forme franche de promiscuité sexuelle, que la violence est caricaturale et parodique, tout comme les personnages. Casey s'amuse à parodier et à rendre hommage à ses auteurs préférés, Frank Miller et Alan Moore en tête. Si vous restez concentré sans vous laisser déborder par cette déferlante d'énergie bouillonnante, vous pourrez même voir passer un hommage au feuilleton le Prisonnier (avec ce village pour superhéros retraités).
Mike Huddlestone compose des pages tout aussi démesurées que les rebondissements du scénario, tout est permis (ce qui ne veut pas dire qu'il fait n'importe quoi). Pour commencer il y a l'exagération des silhouettes des individus dont Huddlesotne s'amuse à augmenter les proportions musculaire (comme le font régulièrement les dessinateurs de comics de superhéros, mais ici avec un effet volontairement de parodie). Il y a aussi régulièrement cet appendice qui pendouille dans l'ombre, entre les jambes de ces messieurs dans le plus simple appareil, et de cet hermaphrodite si étrange. Huddlestone dessine ses personnages avec des contours fortement encrés, une impression de dessin rapidement exécutés (mais un examen plus détaillé montre de savantes compositions). Il a donné une apparence inoubliable à chaque personnage, Righteous Maker indestructible avec une largeur d'épaule impossible, Arnie B. Willard magnifique avec son gros ventre et sa capacité à conserver sa dignité, Jihad Jones très inquiétant dans sa normalité, The Absolutely exceptionnel dans sa silhouette où tourbillonnent des galaxies multicolores. Il joue avec les registres graphiques d'une page à l'autre : de la case juste crayonnée comme une esquisse, à la case dont chaque forme est rehaussée par les complexes schémas de couleurs appliquées à l'infographie. La démesure règne en maître, chaque mouvement est exagéré pour un impact plus grand, chaque expression est soulignée pour mieux transmettre l'émotion. À plusieurs reprises, Huddleston prend exemple sur le mode d'exagération de Bill Sienkiewicz (en particulier dans Elektra assassin) pour faire glisser certaines composantes de ses dessins vers l'abstraction et pour inclure des symboles ou des stéréotypes visuels pour encore décupler la force des représentations. Cette inspiration prend également la forme d'un hommage appuyé à l'une des couvertures de la série Elektra assassin, pour la couverture de l'épisode 7.
Dans les 30 pages de postface, Joe Casey utilise le même ton exubérant et bourré d'interjections grossières pour décrire son amour des comics, ses premières expériences de lecture de comics, le besoin vital de lire des comics viscéraux, la nécessité de proposer un comics provocateur qui sort des tripes. C'est une étrange lecture qui tient autant du billet d'humeur enflammé, que de la collection d'anecdotes d'un accro aux comics pour la vie.
"Butcher Baker, the righteous maker" constitue une expérience de lecture hors norme, libérant une énergie de tous les instants, rappelant qu'un comics de superhéros doit sortir des tripes, doit emmener le lecteur dans un maelstrom d'actions vives, rapides, inventives, décomplexées, pour une expérience intense et sans égale. Le résultat dégage une vitalité hallucinante à ressentir au premier degré, sans autre forme de métacommentaire. Ce comics est un hommage sincère de Casey et Huddleston à tous les créateurs de comics qui les ont rendus dépendants de leur dose d'aventures délirantes de superhéros costumés impossibles et ridicules, accomplissant des actions extraordinaires, tout en déclamant des dialogues kitch, mais toujours avec panache. Tout fan de comics ressentira cette déclaration d'amour au plus profond de son être, vibrera à ces actions d'éclat délirantes et décomplexées. Les autres risquent de n'y voir qu'un ramassis de ce qu'il y a de pire dans les comics, de plus superficiel, de plus débilitant. Dans la postface, il compare ce comics à une version non éditée des comics habituels, espérant que les lecteurs ressentiront ce qu'il à ressenti lorsqu'il a découvert la version non éditée du film Les Guerriers de la nuit (Warrior, 1979, réalisé par Walter Hill) par rapport à celle éditée (scènes violentes plus courte) pour diffusion sur les chaînes du câble. Joe Casey refuse la tiédeur consensuelle et a décidé d'intituler son prochain projet Sex. Une seule certitude : ça ne va pas plaire à tout le monde.
Un crossover pour les gouverner tous
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Ce tome comprend les 9 épisodes de la série, initialement parus en 2015/2016, écrits par Jonathan Hickman, dessinés et encrés par Esad Ribi?. La mise en couleurs a été réalisée par Ive Scorcina. Il comprend aussi le prologue de 10 pages parus dans Free comic book day 2015, également écrit par Jonathan Hickman et mis en image par Paul Renaud. Il comprend les 9 couvertures originales d'Alex Ross, ainsi que les 44 couvertures variantes. Toutes les couvertures ont été placées à la fin du récit, le chapitrage étant assuré par des pages blanches avec un titre spécifique, comme il est de coutume dans les comics écrits par Hickman (et qui a réussi à l'imposer même dans ses travaux pour Marvel).
Cette histoire se déroule après les 70 épisodes des séries Avengers et New Avengers écrits par Jonathan Hickman. Il constitue un événement majeur dans l'univers partagé Marvel, dans la mesure où toutes les séries mensuelles se sont arrêtées pour être remplacées par des titres se déroulant sur Battleworld. Il marque également 30 ans d'anniversaire des premières guerres secrètes parues en 1985 : Secret Wars de Jim Shooter et Mike Zeck.
Les Terre alternatives de l'univers Marvel ont disparu, détruite au cours de phénomènes appelés Incursion. Il ne subsiste plus que la Terre 616 (la Terre principale), et la Terre 1610 (la Terre des Ultimate). Suite à un plan complexe, Victor von Doom est devenu le Dieu de toute la réalité, et a réussi à sauver quelques morceaux de différentes Terre, pour constituer une terre composite appelée Battleworld. Cette planète artificielle est composée d'une quarantaine de territoires gouvernés par des Barons, tels que Mister Sinister, Ultron, Goblin Queen, Annihilus, Maestro, Apocalyspe, Hydra, Magneto, etc. Le territoire de Doom (Doomgard) est séparé des autres par un mur appelé SHIELD.
Le prologue montre Doom faisant face à ceux de l'au-delà (beyond). Puis la scène change pour passer aux derniers moments d'existence de la réalité sur Terre, alors que se produit l'ultime Incursion, la collision entre la Terre 616 et la Terre 1610. Par la suite le récit se déroule sur Battleworld dont Doom en est le dieu incarné. La police entre les baronnies est assurée par l'escadron des Thor (de nombreuses variantes de Thor). Doom reçoit les barons qui viennent se plaindre de leurs voisins, par exemple Captain Britain insulté par Mister Sinister. Stephen Strange est le bras droit de Victor von Doom. La Fondation du Futur vient de découvrir un vaisseau étranger à Battleworld, lors d'une expédition archéologique. Il semblerait qu'il y ait des individus à bord.
N'importe quoi ! Le crossover de crossovers : ils ne savent plus quoi inventer chez Marvel. Toutes les séries satellites de cet événement portent le nom d'un crossover ou d'un événement passé : Civil War, Age of Ultron, Planet Huk, Infinity Gauntlet, Age of Apocalyspe, Korvac Saga, Marvel 1602, etc. En plus le point de départ est un copié/collé de House of M (avec Doom à la place de Magneto) et des Secret Wars initiales. Le degré zéro de la créativité.
Effectivement quand DC et Marvel annoncent leur événement de l'année en 2015, le premier semble innover alors que le second semble recycler tout ce qui lui passe par la main, en allant chercher dans les fonds de tiroir pour faire bonne mesure. En prime, les communiqués de presse annonçaient la fin de l'univers Marvel (laissant sous-entendre son redémarrage à zéro par la suite), alors que quelques semaines plus tard les annonces des série ultérieures à l'événement indiquaient qu'il n'y aurait pas de remise à zéro. Mais alors que DC a publié des séries satellites de 2 épisodes chacune réalisées par des équipes créatives pas enthousiasmantes (juste pour occuper le planning de publication, pendant que leurs bureaux déménageaient de la côte Est à la côte Ouest), Marvel publie des miniséries satellites en 4 ou 5 épisodes, réalisées par les équipes créatives des séries mensuelles ou des créateurs reconnus. En outre, Secret Wars est la culmination des deux séries Avengers écrites par Hickman (qui avait déjà orchestré un excellent crossover avec Infinity en 2013), et même de ses épisodes de la série Fantastic Four, à commencer par Dark reign - Fantastic Four.
C'est toujours la même chose ! L'éditeur Marvel demande à un de ses scénaristes phares du moment de pondre un récit artificiel pour que tous les superhéros se tapent dessus, en promettant que plus rien ne sera jamais comme avant, et toute conséquence a disparu 3 mois après, pour un retour tiède au statu quo. Il s'agit d'affrontements déconnectés de toute réalité, sans apparition d'être humain normal, une sorte d'autocélébration incestueuse entre superhéros. En outre, il y a tellement de personnages qu'ils sont réduits à autant de coquilles vides sans personnalité, se distinguant uniquement les uns des autres par les motifs de couleurs chamarrées sur leur costume moulant, et par la couleur des énergies qu'ils émettent.
Certes, c'est un récit de superhéros, avec des gugusses en costume moulant, des superpouvoirs impossibles et baroques. Oui l'intrigue se déroule sur la base d'une enquête pour comprendre comment Victor von Doom en est arrivé là, jusqu'à une confrontation physique finale contre son plus grand ennemi. Oui, il y a beaucoup de personnages et la plupart ne peuvent exprimer leur personnalité que le temps d'une ou deux répliques maximum. Oui aussi, Jonathan Hickman pioche à loisir dans le riche univers partagé Marvel pour mettre en scène des personnages qui lui plaisent ou qui lui sont imposés pour des raisons éditoriales (oui, il y a Groot et Rocket Raccoon, Miles Morales, un inhumain issu de la famille royale).
En plus le dessinateur est cramé avant la fin, victime d'un burn-out engendré par la quantité de gugusses à dessiner et la longueur interminable de la série (9 épisodes quand même).
Esad Ribi? a dessiné toute la série et l'éditeur Marvel s'est fait conspuer parce que le dernier épisode est paru avec 3 mois de retard, soit après les premiers numéros des séries post-événement. Il est sûr que si le même éditeur avait tout fait pour tenir les délais (= remplacer Ribi? par le premier venu), il se serait tout autant fait critiquer. Au moins le lecteur qui découvre le récit sous format d'un recueil complet a le plaisir de voir une histoire racontée par les mêmes personnes du début jusqu'à la fin. Esad Ribi? est un artiste qui a travaillé avec JM Straczynski sur une histoire du Silver Surfer, avec Peter Milligan pour une histoire de Namor, avec Rick Remender sur Uncanny X-Force, avec Jason Aaron sur Thor god of thunder, et déjà avec Hickman pour 9 épisodes des Ultimates. Il dessine les personnages de manière réalistes, avec des contours en trait fin, donnant une apparence un peu éthérée à ce qu'il représente.
De prime abord, le choix de confier ce récit à Esad Ribi? apparaît étrange. Le côté léger de son trait peine à donner assez de consistance aux affrontements, ne confère pas une présence massive à ces superhéros ou aux supercriminels. Cet état de fait est accentué par le choix d'Ive Scorcina qui utilise des couleurs délavées, un peu pastel, donnant une apparence un peu fade à la page. Ce parti pris esthétique crée d'entrée de jeu un décalage avec les conventions visuelles des comics de superhéros, en insistant moins sur la force et le spectaculaire pyrotechnique, en créant une ambiance différente de l'ordinaire des comics de superhéros. Il est possible de comparer ce phénomène à celui produit par les dessins très altiers et élancés d'Olivier Coipel pour House of M : un esthétisme différent qui indique que l'histoire est placée en dehors de la continuité normale, avec sa propre cohérence
Dès le début, Esad Ribi? s'astreint à représenter les personnages en cohérence avec leur apparence dans leur série mensuelle du moment (la coupe de cheveux d'Hulk par exemple, ou le costume de Thanos conforme à celui du film Avengers). Puis il apporte des modifications plus ou moins importantes aux personnages à partir du moment où l'histoire se déroule sur Battleworld. Ce travail de réappropriation graphique aboutit à une version de Doom tout habillé de blanc, toujours majestueux et condescendant et paradoxalement plus inquiétant. L'artiste s'en sort également très bien avec Stephen Strange. Il lui conserve une morphologie sans musculature surdéveloppée, avec un visage montrant son âge (quadragénaire). Il reprend l'allure de Reed Richards tel que l'avait conçu Kev Walker dans la série Avengers (avec la barbe). De ce point de vue, chaque personnage se distingue immédiatement des autres, avec une forte identité graphique pour tous.
Dès le début, le lecteur constate également qu'Esad Ribi? s'économise sur les décors. Il le fait avec intelligence, c’est-à-dire qu'en début de chaque séquence, il prend du temps pour montrer l'environnement dans les détails. Par la suite, il n'est rappelé que par quelques traits, et pendant les scènes d'affrontements physiques, les arrière-plans se vident de toute information visuelle. Ive Scorcina ne possède pas le talent de Dean White ou de Dave Stewart pour utiliser les couleurs afin de transcrire l'intensité des affrontements, pour accompagner les mouvements par des dégradés progressifs de couleurs, ou pour transformer l'arrière-plan en un spectacle pyrotechnique qui en met plein les yeux. Il se contente de donner un peu de volume avec des camaïeux discrets à la poussière soulevée. Sur ce plan la narration visuelle manque un peu de consistance.
Par contre la mise en scène amalgame une dramaturgie théâtrale avec des mouvements de caméra pour mieux montrer les déplacements des personnages, leur langage corporel, leurs mouvements. Esad Ribi? sait faire apparaître les émotions des personnages sur leur visage, leur état d'esprit dans leur posture. Il a le sens du spectacle pour les moments révélateurs qu'il s'agisse d'une cérémonie protocolaire d'enterrement, de l'apparition d'un personnage, ou encore d'une harangue sur une pente herbue. Ive Scorcina fait preuve d'une sensibilité artistique pour choisir la teinte dominante de chaque séquence, et ainsi établir une impression durable. L'épilogue (toujours dessiné par Esad Ribi?) montre qu'il n'est pas cramé et qu'il a mis à profit le temps supplémentaire qui lui a été alloué pour faire en sorte que les visuels soient raccords avec l'intention de l'auteur qui est de boucler avec une situation montrée dans le premier épisode New Avengers.
Soit ! Les dessins ne sont pas trop mal, mais l'intrigue reste un prétexte ressortant tous les artifices de l'univers partagé Marvel, utilisés jusqu'à la nausée depuis des décennies. Non seulement il y a un recyclage de la situation de House of M dans un What if? qui ne dit pas son nom, mais en plus il y a même le Gant de l'Infini. En plus il y a tellement de personnages qu'il faut une encyclopédie pour s'y retrouver.
Jonathan Hickman joue le jeu du crossover ou de l'événement. Il est un employé qui travaille pour un éditeur, avec un cahier des charges très contraignant. Il effectue son travail en en respectant les spécifications. Le lecteur peut le regretter, mais il n'est pas pris par surprise. Il sait qu'il s'engage dans un récit fédérateur à l'échelle de tous les comics Marvel du moment, avec pléthore de personnages, et un enjeu à l'échelle de toute la réalité. Il utilise les jouets qu'on lui a imposés. Il le fait avec respect, ce qui veut dire qu'il a bien fait ses devoirs et qu'il respecte les caractéristiques principales de chaque objet de pouvoir et de chaque personnage. Dans cet ordre d'idée, il s'en tire mieux que beaucoup de ses collègues, comme il l'avait déjà prouvé dans Infinity. Certes Thanos n'a pas l'ampleur qu'il peut avoir dans les récits de Jim Starlin, mais il n'est pas relégué à l'état de simple supercriminel. Comme dans tous les autres crossovers, il est possible de comprendre l'intrigue sans connaître tous les personnages. On peut s'amuser de voir passer Toothgnasher ou Toothgrinder, sans savoir d'où ils sortent.
Quand même, ce Secret Wars donne l'impression d'être l'aboutissement de tout le travail de Jonathan Hickman depuis ses débuts sur Fantastic Four (on a échappé à ses Secret Warriors, c'est déjà ça), c’est-à-dire depuis 2009, soit six ans de continuité interne à son œuvre. C'est dire si c'est incompréhensible.
À un moment il faut choisir son camp : on ne peut pas accuser Jonathan Hickman de pondre un crossover industriel de plus, et dans le même temps d'écrire une histoire personnelle construite pendant 6 ans. Donc le scénariste fait ce qu'on demande de lui et intègre de temps à autre une image ou une page évoquant ce qui se passe dans une ou plusieurs baronnies pour donner un semblant de légitimité aux miniséries satellites. Il mène à bien son intrigue des séries Avengers, avec la dernière incursion qui aboutit à la création de Battleworld, et au nouveau statut de Victor von Doom. Il apporte une touche finale à ses histoires pour les Fantastic Four. Il rapatrie le Reed Richard de l'univers 1610 qu'il avait bien développé pendant la saison qu'il avait écrite des Ultimates. Il fait même un clin d'œil à sa série Secret Warriors (son premier travail pour Marvel), avec Nikola Tesla qui apparaît le temps d'une page (il s'agit d'ailleurs plus d'une référence à sa série sur le SHIELD).
Le lecteur plonge dans une situation que Jonathan Hickman prend le temps d'expliquer. Il y a une brève introduction de 3 pages montrant Doom et 2 autres face à un pouvoir incommensurable, puis tout un épisode consacré à la dernière Incursion, montrant la fin des Terre 616 et 1610. Puis le récit commence sur Battleworld. Au fil du récit, le lecteur apprend comment Doom a acquis le statut de dieu, pourquoi cela lui est arrivé à lui et pas à un des 2 autres à ses côtés. Parallèlement plusieurs personnages essayent de comprendre la situation et d'en prendre la mesure. Effectivement le récit ne rappelle pas comment Stephen Strange s'est retrouvé aux côtés de Doom. Effectivement Owen Reece semble reprendre le même rôle que durant les premières Secret Wars. Effectivement la participation d'un moloïd et de la Fondation du Futur parle plus à un lecteur des Fantastic Four d'Hickman. De même que le ralliement de Black Swan (Yabbat Tarru) aura plus de sens pour qui a lu les séries Avengers.
Effectivement le récit se termine par un affrontement entre Doom et son ennemi. Il n'en demeure pas moins que Jonathan Hickman raconte une vraie histoire, avec un suspense quant à la façon dont Doom sera défait, et aussi quant à la manière dont il a acquis son statut. Le scénariste utilise les personnages mis à sa disposition à bon escient. Il est par exemple savoureux de voir Thanos confronter Doom, en lui rappelant que lui aussi dispose d'une certaine expérience en matière d'exercice divin. Il est assez rigolo de voir Valeria Richards rappeler à Doom qu'omnipotence ne signifie pas omniscience. Hickman sait faire ressortir l'histoire personnelle de plusieurs personnages de manière naturelle, leur conférant un minimum de personnalité.
Jonathan Hickman manipule sa distribution pléthorique avec une grande adresse, réussissant à ne perdre aucun personnage en cours de route, à donner un petit moment à la plupart, et à développer ceux qui jouent un rôle plus important. Le lecteur apprécie la manière dont le scénariste étoffe le caractère de Doom, sans trahir le fond de sa personnalité. Ce personnage bénéficie d'une explication convaincante quant au fait qu'il ait endossé le rôle de dieu pour sauver ce qui pouvait encore l'être. Hickman expose la motivation première de Doom avec une réelle sensibilité psychanalytique et une grande pertinence (sans verser dans la psychologie de comptoir). Il lui restitue toute sa dimension tragique, dans le rôle du personnage central d'un roman noir. Pour le combat final, il reprend la grande tradition Marvel (des années 1960 et 1970) d'un combat physique qui se double d'un affrontement idéologique. Il intègre la notion de famille (inséparable des histoires des Fantastic Four), avec une approche un peu différente et complémentaire de ses épisodes des FF. Il a réservé un sort étonnant et logique à Johnny et Ben. Il conclut son récit en bouclant sur le début, à la fois par le retour sur la phrase "Tout meurt" prononcée par Reed Richards tout au début du premier épisode des New Avengers, à la fois par un passage au Wakanda.
Mouis, mais quand même, on a l'impression qu'Hickman a abandonné une partie de son intrigue pour les séries Avengers, car il n'y a plus ni Builders, ni Makers.
Le scénariste avait mené cette intrigue à son terme dans les séries Avengers. En prenant un peu de recul, le lecteur s'aperçoit qu'il continue de filer la métaphore de cet aéropage de créatures floues (makers, builders, mapmakers). Quand Doom se retrouve dieu de la réalité, le lecteur peut y voir la métaphore du scénariste tout puissant présidant à la destinée de tout l'univers partagé Marvel. Sous cet angle de vue, cette partie de Secret Wars devient une métaphore du caractère diminué, voir stérile de cet univers partagé s'il était confié à un seul et même créateur ou artiste. De même la posture de Doom implique une forme d'immobilisme de ce monde, chaque individu étant cantonné dans une forme e stase immuable. L'enquête menée par une poignée de personnages sous-entend qu'il y aura toujours des évolutions par rapport à ce statu quo, justifiant par là les libertés que certains auteurs prennent avec les personnages Marvel (au hasard, Peter Parker en chef d'entreprise à succès, ou Otto Otavius devenant un Spider-Man supérieur).
Contre toute attente, malgré toutes les contraintes du crossover, malgré les exigences éditoriales, contre vents et marées, Jonathan Hickman raconte une histoire de superhéros dans laquelle le lecteur peut déceler sa voix d'auteur, à la fois dans la structure du récit (une de ses marques de fabrique), mais aussi dans le discours tenu par les personnages, les convictions et les valeurs qu'ils affirment. Secret Wars version 2015 constitue une fin à la hauteur des séries Avengers et New Avengers, un crossover réussi, un hommage incroyable aux premières Secret Wars de Jim Shooter et Mike Zeck, un crossover pour les rassembler tous, les recycler tous (presque tous, il n'y avait pas Fear Itself ou Secret Invasion, et sûrement beaucoup d'autres) et trouver sa place légitime parmi eux (et savoir s'il y aura des conséquences durables ou non n'obère en rien ses qualités). Enfin, en partant, Jonathan Hickman laisse l'univers plus riche de personnages qu'il ne l'était quand il est arrivé. Il a mis à profit la nature même de ces héros récurrents dont les droits sont détenus par une entreprise commerciale, pour bâtir une œuvre personnelle, en appliquant le principe de l'économie circulaire (réutiliser ces personnages dont l'essence a été maintes fois extraite, en y trouvant encore de l'inspiration).
Alors qu’Elon Musk est devenu une personnalité publique de premier plan, non seulement par sa fortune qui en fait « the richest man on Earth ever » mais par ses prises de position politiques, cet ouvrage arrive à point nommé, alors même qu’il vient d’annoncer son intention de déplacer les sièges californiens de SpaceX et X vers le Texas, en raison d’une loi visant à protéger les élèves transgenres en Californie. De plus en plus enclin à soutenir les positions d’extrême-droite, l’homme d’affaires a annoncé également soutenir la campagne de Donald Trump à hauteur de 45 millions de dollars.
La lecture d’« Elon Musk – Enquête sur un nouveau maître du monde » semble donc essentielle pour mieux faire connaissance avec cet homme qui passe aux yeux de beaucoup pour un visionnaire audacieux et conquérant. En cela, l’ouvrage de Darryl Cunningham est à la hauteur de nos attentes. Extrêmement bien documenté, il décortique de façon factuelle l’enfance et le parcours de celui qui se situe à mi-chemin entre l’inventeur fou et l’homme d’affaires cynique, accusé de fraudes boursières à maintes reprises. Tout son succès semble s’être construit sur des coups d’éclat pour des projets extrêmement aventureux dont beaucoup ont échoué ou n’ont abouti que partiellement, en deçà des promesses faites. Mais les fanfaronnades de cet as de la com lui auront suffi pour bâtir sa fortune, selon un parcours où les déboires ont pourtant été nombreux. Si l’on excepte Tesla et SpaceX, qui ont atteint un certain niveau de pérennité, on pourra citer les exemples de l’Hyperloop (qui depuis a été remisé dans les cartons) ou de The Boring Company, un réseau de transport souterrain au sein des villes dont un seul a vu le jour à Las Vegas. On daignera volontiers oublier les crashs à répétition des fusées Falcon, mais pour ce qui est de Tesla en revanche, la voiture autonome promise il y a dix ans semble accuser quelque retard…
Bref, on l’a bien compris, Musk est à la base un entrepreneur hors normes, comme ont pu l’être Bill Gates ou Steve Jobs en leur temps. Et toute l’histoire pourrait s’arrêter là, s’il n’y avait les autres facettes moins réjouissantes de ce touche-à-tout milliardaire… Il n’est pas question de dévoiler ici en détail le contenu du livre, mais lorsqu’il est question de politique ou de vie privée, on peut sincèrement s’interroger sur l’équilibre mental d’un homme aux actions souvent dictées par l’impulsion et un autoritarisme congénital.
Si l’on sait que ses méthodes managériales peuvent s’avérer brutales (ce dont on a eu confirmation lors du rachat de Twitter où la moitié des effectifs ont été supprimés), le documentaire nous explique aussi comment l’acquisition du réseau social à « l’oiseau bleu » (devenu X depuis) a été principalement pour Musk un outil de communication politique, tandis qu’il se sentait de plus en plus proche de l’idéologie des extrémistes de droite aux États-Unis. Celui-ci ressentait le besoin de libérer la parole qu’il s’indignait de voir « réprimée » sur Twitter, alors que ses modérateurs ne faisaient qu’endiguer les discours les plus haineux. Il faut dire que l’homme, qui durant son enfance faisait pourtant figure de geek à l’esprit scientifique, est loin d’être hostile aux théories complotistes, s’étant même dressé vent debout contre la fermeture de son usine Tesla à l’époque du Covid.
Depuis, une enquête a montré que les infox et contenus insultants, racistes ou antisémites, généralement influencés par les thèses des nationalistes et suprémacistes blancs, ont augmenté de façon significative. On découvrira aussi que sa notion de la liberté d’expression est à géométrie variable, et s’établit en fonction de ses intérêts économiques et des dictateurs en place, qu’il s’agisse de la Chine ou de la Turquie, où les accès à des contenus protestataires ont été filtrés.
Sa vie privée n’est pas non forcément plus le modèle à suivre pour ce caractériel sous kétamine qui sait afficher une certaine bonhommie lorsqu’il est sous les feux de la rampe. Une de ses anciennes épouses, Justine Musk, a révélé le comportement toxique, autoritaire et machiste, de celui qui a enchaîné les divorces aussi sûrement que les crashs de ses fusées. Quant à ses enfants, certains ont de très mauvaises relations avec lui, notamment Vivian Jenna Wilson, sa fille transgenre qui a même opté pour un changement de patronyme. Ce qui, on est en droit de le supposer, pourrait avoir joué en faveur de ses récentes prises de position anti-woke.
Bien sûr, on peut concevoir que le personnage suscite le rêve avec son ambition d’emmener dans des délais courts l’humanité vers les étoiles, mais il possède une face sombre qui peut s’avérer inquiétante dans une même proportion. Même s’il serait risqué d’en tirer des conclusions hâtives, on peut toutefois mettre en perspective son côté dominateur avec son enfance dans l’Afrique du sud de l’Apartheid, aux côtés d’un père violent qui fit vivre l’enfer à sa mère Maye.
Quoi qu’on en pense, l’exhaustivité documentaire du livre est telle qu’elle permettra à chacun de faire sa propre analyse. Ses aficionados pourront objecter que le style de l’homme, brillant quoi qu’on en dise, dérange, lequel se résumerait en fait à « faire de grandes déclarations ambitieuses, définir des échéances irréalistes, puis pousser ses employés à accomplir des miracles ». Mais de là à voir un génie doué d’intelligence visionnaire, il ne faudrait tout de même pas pousser mémé dans les orties ! Car Cunningham nous avertit sur sa vision « long-termiste » discutable voire extrêmement dangereuse du monde, laquelle consiste à se détourner des crises mondiales actuelles pour privilégier l’avenir de l’humanité… Dans cette perspective, « les besoins d’à peine huit milliards d’humains ne pèsent rien face à ceux des trilliards appelés à vivre après eux ». De quoi nous rassurer quand on met un enfant au monde aujourd’hui…
Grâce à un dessin certes sommaire mais accompagnant ce documentaire avec une pertinence à la coloration légèrement ironique, l’auteur réussit à nous intéresser en braquant le projecteur sur cet hyper mégalo qui préfèrerait sûrement choisir le projectionniste. Cunningham nous livre un portrait à charge, certes — et comment aurait-il pu faire autrement ? —, mais surtout un travail journalistique indispensable afin d’avoir un meilleur aperçu de ce qui se cache derrière le masque de ce « nouveau maître du monde », qui pourrait bien briguer un jour, de façon peu surprenante, la présidence des Etats-Unis.
Une BD surprenante de part son esthétisme mais relativement classique dans son déroulé.
Si j’ai bien aimé ma lecture, je n’y ai pas non plus succombé totalement.
Le graphisme m’a fait un peu peur au début mais plus j’avançais, plus je lui trouvais des qualités. L’auteur maîtrise bien sa narration et ses ambiances. Des couleurs osées mais qui font tout le charme de l’album.
L’histoire n’est pas déplaisante mais j’en attendais plus, ça se lit relativement rapidement. J’ai bien aimé certaines planches mais pas non plus au point de trop m’y attarder.
Les séquences s’enchaînent bien mais je suis arrivé au bout avec un sentiment de petit oui.
En fait j’espérais être davantage surpris (ou alors j’ai peut être pas bien tout saisi), le trait donne un aspect étrange à cette aventure mais la frontière n’est jamais franchie dans le fond. Toujours sur le fil, je regrette qu’il n’ai pas un petit côté fantastique ou à la David Lynch plus prononcé.
En tout cas, je salue l’audace graphique, la couverture pète la classe. Une œuvre qui divisera, à la fois classique et original, mais à essayer. Ça m’a fait penser à Hiram Lowatt & Placido par bien des aspects (avec une préférence pour le présent tome).
6ème opus de la série concept "La grande évasion" dont chaque tome est élaboré par un duo ou un trio différent.
Après la lecture des 6 premiers tomes, force est de constater que la qualité de chaque ouvrage est très inégale, le premier tome La Grande évasion - Biribi restant pour l'instant mon préféré.
Ici, les auteurs traitent d'un événement qui a marqué l'histoire du mur de Berlin. En effet, le tunnel 57 est un tunnel creusé par des étudiants ouest-allemands sous le Mur de Berlin, et par lequel s'évaderont cinquante-sept Est-Allemands durant les nuits des 3 et 4 octobre 1964. L'événement a été décrit comme la fuite la plus spectaculaire de l’histoire du Mur de Berlin.
L'histoire est efficace, sans fioriture, et rentre rapidement dans le vif du sujet. J'ai pour ma part trouvé cette bande d'amis étudiants plutôt attachante et on se prend à rapidement stresser au fil des pages sur l'issue de leur entreprise. L'ensemble est réaliste et agréable à lire. Mais comme pour beaucoup de tomes de cette série, on regrette que cela ne tienne que dans un tome de 56 pages, ne permettant pas, selon moi, de traiter de manière idéale cet événement que je ne connaissais pas.
Au niveau du dessin, si j'ai apprécié la colorisation un peu "old schood" collant bien avec le thème, j'ai trouvé les personnages un peu figés et les décors trop dépouillés à mon goût. Le dessin permet toutefois de conférer cette ambiance angoissante qui monte crescendo au fil des pages.
Une lecture agréable.
SCENARIO (Originalité, Histoire, personnages) : 7/10
GRAPHISME (Dessin, colorisation) : 6/10
NOTE GLOBALE : 13/20
Le polar, c'est vraiment pas mon style de prédilection. Et "Automne en baie de Somme" reste dans les poncifs du genre que je n'apprécie que modérément. C'est dommage, la BD a une vraie patte visuelle inspiré en grande partie de l'art Nouveau, cité explicitement dans le récit d'ailleurs.
Mais ce qui m'a surtout marqué dans ma lecture, c'est la façon dont le récit tord les ficelles scénaristiques pour en faire un polar avec une surprise finale. A ce niveau, le chiffre marqué comme un indice (et la clé de compréhension) m'ont paru beaucoup (beaucoup) trop gros. D'autre part, le récit fait un volte-face de quelques personnages, notamment l'industriel, mais ne semble pas réellement répondre aux questions politiques qu'il pose. Je veux dire, une fois révélé les agissements de l'industriel, est-ce que ça rend alors légitime et normal le comportement de sa femme ? La BD ne l'évoque pas, mais c'est franchement étrange de poser ainsi un tel dilemme sans jamais l'évoquer ensuite.
C'est ce que je reprocherais le plus à la BD, en fin de compte. Outre qu'on reste dans les industriels et les artistes du XIXè, la population ouvrière est assez peu présente (je ne parle pas des anarchistes de Montmartre qui font de la figuration), c'est le propos qui tente de montrer les peurs du socialisme d'une époque, propos esquissé et jamais abouti. Au delà de l'intrigue de polar dont la fin m'a fait tiquer (une grosse coïncidence et une explication du chiffre franchement tiré par les cheveux), le fond et le corps du récit manque de développement.
Trop peu de pages, trop de sujets évoqués ? Je ne suis pas sur, mais en l'état je trouve que la BD reste surtout intéressante pour son dessin, travaillé et franchement très joli, mais je n'ai pas envie de la relire.
Un premier tome prometteur.
Un album tous publics qui ravira principalement les adolescents, mais pas seulement, j'en suis la preuve.
Daniel Freedman au scénario (Kali) et Crom au dessin, citent Miyazaki ou encore le jeux vidéo Dark Souls comme sources d’inspirations. Ce Birdking est leur deuxième collaboration après "Raiders".
Les auteurs nous entraînent dans de la dark fantasy sombre et légère à la fois.
Bianca, jeune apprentie forgeronne, est forcée de fuir son pays en guerre et de partir à la recherche d'Atlas, une terre légendaire, elle sera accompagnée par le silencieux et imposant Birdking, l'esprit d'un roi.
Un album qui ne révolutionne pas le genre, mais il prend le temps de s'attarder sur Bianca et ainsi de s'attacher à cette délicieuse jeune fille au tempérament bien trempé.
Un premier tome qui met en place un univers dense, complexe et mystique dont il reste encore beaucoup à découvrir.
Le début d'une saga rondement menée, c'est fluide, palpitant et très agréable à lire.
Le titre prend tout son sens.
Je découvre Crom et je suis sous le charme de son dessin au trait vif, précis et expressif. Un dessin singulier me rappelant celui de Mike Mignola mais avec une touche de manga, notamment dans l'expression excessive de certains visages. Un délicieux mélange.
J'ai aimé le choix des couleurs et la créativité dont Crom a fait preuve pour les personnages, ainsi que pour les rares décors.
Sobre, mais très efficace !
Une très belle découverte et vivement la suite.
Tome 2.
Un second opus qui confirme, beaucoup plus dans l'action, on entre de plein fouet dans cette saga, ce qui permet d'en connaître beaucoup plus sur ces mondes mystérieux. Du déjà vu, mais la réalisation est parfaite et les surprises seront au rendez-vous. Un dosage parfait entre scènes de batailles et moment plus calme pour développer les - nouveaux - personnages.
Visuellement, toujours autant de plaisir.
Vivement le tome 3.
Comme beaucoup (je pense), je garde un excellent souvenir de cette série TV. Le mot est même faible, tant elle m’a marqué dans son casting, esthétisme et idées véhiculées (je garde toujours l’image de leur repas et de leur peau).
Bref je suis tombé sur ce manga (une adaptation de l’époque il me semble) et si je ne partais avec des apriori, ça a été la douche froide à l’arrivée.
La comparaison entre les 2 supports pique, rien ne marche en version papier. C’est tout simplement d’une platitude folle, il n’y a pas de tension.
L’histoire diffère légèrement mais je me suis complètement désintéressé de la trajectoire des personnages. La faute aux dessins, les protagonistes sont sans charisme (dans les 2 clans). Je n’aime pas ce style qui m’apparaît trop vieillot.
Le résultat me semble loupé, bref une fausse bonne idée cette adaptation. Ça fait pâle figure face à l’original, je n’ai rien retrouvé de ce que j’aime dans l’univers.
Très agréable ce recueil.
Il compile des courts récits préalablement parus dans Phosphore (le magazine des 14 ans et +), où 14 auteurs vont narrer l’été de leurs 17 ans.
J’ai trouvé le casting hétéroclite et très sympa, en plus d’une belle parité.
Nous aurons ainsi tout un panel d’histoires et d’expériences différentes avec comme point commun l’âge de nos héros. Une période charnière qui commence à nous façonner.
J’ai aimé la pluralité de ses témoignages, nous voguerons ainsi principalement des années 90 aux 2000 et dans des lieux différents.
J’ai aimé la sincérité des auteurs qui se livre parfois sans fard. Selon les histoires, on oscille entre humour, tendresse et profondeur, entre jobs d’été, vacances, galères ou accomplissement.
Non vraiment bien chouette ce tome, l’effet nostalgique a parfaitement fonctionné sur moi. Je pense que vous passerez tous un bon moment et ça m’aurait bien plu de découvrir cet album avant ce fameux âge.
Pour pinailler, je reconnais quelques histoires un peu plus faibles mais le tout est homogène, en plus d’avoir un côté universel.
Un album qui m’a mis de bonne humeur et encore une fois, mention à Alix Garin, qui comme dans Journal Tintin - Spécial 77 ans continue de m’épater.
Comme beaucoup j'ai connu étant gamin.
BD qui s'adressait surtout à des gamins peut-être adultes dans les années 90.
Et lorsque l'on voit l'historique des commentaires cela se voit : les notes ont 20 ans...
Le Petit spirou vieillit mal.
Un peu comme Cédric, Boule & Bill ou Astérix, à un moment tout devient redondant et attendu...
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Butcher Baker - Le Redresseur de torts
De l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace - Il s'agit d'une histoire complète, indépendante de toute autre, initialement parue en 8 épisodes en 2011/2012, écrite par Joe Casey, illustrée et mise en couleurs par Mike Huddlestone. Dick Cheney (un ex vice président américain) et Jay Leno (un présentateur d'émission télé très célèbre aux États-Unis) se rendent dans l'établissement préféré de Righteous Maker (un superhéros semi retraité dont le costume évoque le drapeau américain). Cheney actionne avec répugnance la poignée (en forme de sexe masculin) de la porte d'entrée. Ils trouvent le superhéros en pleine orgie avec 4 femmes à ses pieds en train de satisfaire ses besoins (qui impliquent l'utilisation de lubrifiant et de gants en latex). Cheney et Leno viennent proposer une mission clandestine à Maker : exécuter tous les supercriminels emprisonnés dans la prison Crazy Keep, pour faire économiser de l'argent au contribuable. Maker s'acquitte de sa mission en pulvérisant la prison. Mais à son insu, une poignée de détenus ont survécu, dont certains plus dangereux que d'autres. Ils veulent tous la peau de Maker. En se rendant à cette prison, Maker a envoyé la voiture d'Arnie B. Willard (un policier) dans le fossé. Celui-ci a juré de retrouver le chauffard et de lui faire payer très cher son écart de conduite. Il va recevoir l'aide de The Absolute, l'évadé le plus mystérieux de Crazy Keep. C'est un massacre du début à la fin, un outrage aux bonnes mœurs les deux pieds dans le plat, une bordée ininterrompue de jurons, des jaillissements de stupre et de luxure, des grands coups de poing dans la tronche, des décharges d'énergie destructrice, des silhouettes improbables, des couleurs criardes, un transsexuel, un superhéros sur le retour qui ne fait pas dans la dentelle, un patrouilleur des autoroutes à la dignité bafouée, un énorme camion à l'américaine, des parties de jambes en l'air mémorables, et (dans l'édition en VO) une postface de 30 pages dans laquelle Joe Casey se lâche et se donne à fond. Dans ces 30 pages, il effectue une auto-interview d'une demi douzaine de questions parmi lesquelles celle de savoir si ce récit désinhibé, décomplexé et éhonté constitue un métacommentaire. Il se répond à lui-même par le biais d'un va-te faire bien senti. Si le lecteur n'avait pas compris à la lecture de ces 8 épisodes, c'est clair : il n'y a rien à comprendre, rien à chercher, tout est à apprécier au premier degré. C'est à la fois une grande déclaration d'amour au genre Superhéros, et un grand coup de pied dans les roustes, avec un second degré omniprésent renforcé par une provocation de mauvais goût assumé. Les illustrations de Mike Huddleston complètent et renforcent à merveille cette construction dégénérée, ce cri primal, ce défouloir hors norme. En reprenant tout ça dans l'ordre, le lecteur peut constater que Joe Casey raconte une histoire primaire de superhéros, pas plus bête que toutes les autres. Le scénario est solidement construit, la logique interne est respectée, il y a des superpouvoirs, la ligne de démarcation entre superhéros et supercriminels est claire, le combat est manichéen à souhait. Les deux derniers supercriminels à abattre sont les plus retors, il y a même des assistants adolescents (sidekicks) qui sont évoqués, et des costumes moulants colorés aux motifs improbables. Le récit se termine sur une résolution claire et nette. C'est juste qu'il y a une forme franche de promiscuité sexuelle, que la violence est caricaturale et parodique, tout comme les personnages. Casey s'amuse à parodier et à rendre hommage à ses auteurs préférés, Frank Miller et Alan Moore en tête. Si vous restez concentré sans vous laisser déborder par cette déferlante d'énergie bouillonnante, vous pourrez même voir passer un hommage au feuilleton le Prisonnier (avec ce village pour superhéros retraités). Mike Huddlestone compose des pages tout aussi démesurées que les rebondissements du scénario, tout est permis (ce qui ne veut pas dire qu'il fait n'importe quoi). Pour commencer il y a l'exagération des silhouettes des individus dont Huddlesotne s'amuse à augmenter les proportions musculaire (comme le font régulièrement les dessinateurs de comics de superhéros, mais ici avec un effet volontairement de parodie). Il y a aussi régulièrement cet appendice qui pendouille dans l'ombre, entre les jambes de ces messieurs dans le plus simple appareil, et de cet hermaphrodite si étrange. Huddlestone dessine ses personnages avec des contours fortement encrés, une impression de dessin rapidement exécutés (mais un examen plus détaillé montre de savantes compositions). Il a donné une apparence inoubliable à chaque personnage, Righteous Maker indestructible avec une largeur d'épaule impossible, Arnie B. Willard magnifique avec son gros ventre et sa capacité à conserver sa dignité, Jihad Jones très inquiétant dans sa normalité, The Absolutely exceptionnel dans sa silhouette où tourbillonnent des galaxies multicolores. Il joue avec les registres graphiques d'une page à l'autre : de la case juste crayonnée comme une esquisse, à la case dont chaque forme est rehaussée par les complexes schémas de couleurs appliquées à l'infographie. La démesure règne en maître, chaque mouvement est exagéré pour un impact plus grand, chaque expression est soulignée pour mieux transmettre l'émotion. À plusieurs reprises, Huddleston prend exemple sur le mode d'exagération de Bill Sienkiewicz (en particulier dans Elektra assassin) pour faire glisser certaines composantes de ses dessins vers l'abstraction et pour inclure des symboles ou des stéréotypes visuels pour encore décupler la force des représentations. Cette inspiration prend également la forme d'un hommage appuyé à l'une des couvertures de la série Elektra assassin, pour la couverture de l'épisode 7. Dans les 30 pages de postface, Joe Casey utilise le même ton exubérant et bourré d'interjections grossières pour décrire son amour des comics, ses premières expériences de lecture de comics, le besoin vital de lire des comics viscéraux, la nécessité de proposer un comics provocateur qui sort des tripes. C'est une étrange lecture qui tient autant du billet d'humeur enflammé, que de la collection d'anecdotes d'un accro aux comics pour la vie. "Butcher Baker, the righteous maker" constitue une expérience de lecture hors norme, libérant une énergie de tous les instants, rappelant qu'un comics de superhéros doit sortir des tripes, doit emmener le lecteur dans un maelstrom d'actions vives, rapides, inventives, décomplexées, pour une expérience intense et sans égale. Le résultat dégage une vitalité hallucinante à ressentir au premier degré, sans autre forme de métacommentaire. Ce comics est un hommage sincère de Casey et Huddleston à tous les créateurs de comics qui les ont rendus dépendants de leur dose d'aventures délirantes de superhéros costumés impossibles et ridicules, accomplissant des actions extraordinaires, tout en déclamant des dialogues kitch, mais toujours avec panache. Tout fan de comics ressentira cette déclaration d'amour au plus profond de son être, vibrera à ces actions d'éclat délirantes et décomplexées. Les autres risquent de n'y voir qu'un ramassis de ce qu'il y a de pire dans les comics, de plus superficiel, de plus débilitant. Dans la postface, il compare ce comics à une version non éditée des comics habituels, espérant que les lecteurs ressentiront ce qu'il à ressenti lorsqu'il a découvert la version non éditée du film Les Guerriers de la nuit (Warrior, 1979, réalisé par Walter Hill) par rapport à celle éditée (scènes violentes plus courte) pour diffusion sur les chaînes du câble. Joe Casey refuse la tiédeur consensuelle et a décidé d'intituler son prochain projet Sex. Une seule certitude : ça ne va pas plaire à tout le monde.
Secret wars (Hickman & Ribic)
Un crossover pour les gouverner tous - Ce tome comprend les 9 épisodes de la série, initialement parus en 2015/2016, écrits par Jonathan Hickman, dessinés et encrés par Esad Ribi?. La mise en couleurs a été réalisée par Ive Scorcina. Il comprend aussi le prologue de 10 pages parus dans Free comic book day 2015, également écrit par Jonathan Hickman et mis en image par Paul Renaud. Il comprend les 9 couvertures originales d'Alex Ross, ainsi que les 44 couvertures variantes. Toutes les couvertures ont été placées à la fin du récit, le chapitrage étant assuré par des pages blanches avec un titre spécifique, comme il est de coutume dans les comics écrits par Hickman (et qui a réussi à l'imposer même dans ses travaux pour Marvel). Cette histoire se déroule après les 70 épisodes des séries Avengers et New Avengers écrits par Jonathan Hickman. Il constitue un événement majeur dans l'univers partagé Marvel, dans la mesure où toutes les séries mensuelles se sont arrêtées pour être remplacées par des titres se déroulant sur Battleworld. Il marque également 30 ans d'anniversaire des premières guerres secrètes parues en 1985 : Secret Wars de Jim Shooter et Mike Zeck. Les Terre alternatives de l'univers Marvel ont disparu, détruite au cours de phénomènes appelés Incursion. Il ne subsiste plus que la Terre 616 (la Terre principale), et la Terre 1610 (la Terre des Ultimate). Suite à un plan complexe, Victor von Doom est devenu le Dieu de toute la réalité, et a réussi à sauver quelques morceaux de différentes Terre, pour constituer une terre composite appelée Battleworld. Cette planète artificielle est composée d'une quarantaine de territoires gouvernés par des Barons, tels que Mister Sinister, Ultron, Goblin Queen, Annihilus, Maestro, Apocalyspe, Hydra, Magneto, etc. Le territoire de Doom (Doomgard) est séparé des autres par un mur appelé SHIELD. Le prologue montre Doom faisant face à ceux de l'au-delà (beyond). Puis la scène change pour passer aux derniers moments d'existence de la réalité sur Terre, alors que se produit l'ultime Incursion, la collision entre la Terre 616 et la Terre 1610. Par la suite le récit se déroule sur Battleworld dont Doom en est le dieu incarné. La police entre les baronnies est assurée par l'escadron des Thor (de nombreuses variantes de Thor). Doom reçoit les barons qui viennent se plaindre de leurs voisins, par exemple Captain Britain insulté par Mister Sinister. Stephen Strange est le bras droit de Victor von Doom. La Fondation du Futur vient de découvrir un vaisseau étranger à Battleworld, lors d'une expédition archéologique. Il semblerait qu'il y ait des individus à bord. N'importe quoi ! Le crossover de crossovers : ils ne savent plus quoi inventer chez Marvel. Toutes les séries satellites de cet événement portent le nom d'un crossover ou d'un événement passé : Civil War, Age of Ultron, Planet Huk, Infinity Gauntlet, Age of Apocalyspe, Korvac Saga, Marvel 1602, etc. En plus le point de départ est un copié/collé de House of M (avec Doom à la place de Magneto) et des Secret Wars initiales. Le degré zéro de la créativité. Effectivement quand DC et Marvel annoncent leur événement de l'année en 2015, le premier semble innover alors que le second semble recycler tout ce qui lui passe par la main, en allant chercher dans les fonds de tiroir pour faire bonne mesure. En prime, les communiqués de presse annonçaient la fin de l'univers Marvel (laissant sous-entendre son redémarrage à zéro par la suite), alors que quelques semaines plus tard les annonces des série ultérieures à l'événement indiquaient qu'il n'y aurait pas de remise à zéro. Mais alors que DC a publié des séries satellites de 2 épisodes chacune réalisées par des équipes créatives pas enthousiasmantes (juste pour occuper le planning de publication, pendant que leurs bureaux déménageaient de la côte Est à la côte Ouest), Marvel publie des miniséries satellites en 4 ou 5 épisodes, réalisées par les équipes créatives des séries mensuelles ou des créateurs reconnus. En outre, Secret Wars est la culmination des deux séries Avengers écrites par Hickman (qui avait déjà orchestré un excellent crossover avec Infinity en 2013), et même de ses épisodes de la série Fantastic Four, à commencer par Dark reign - Fantastic Four. C'est toujours la même chose ! L'éditeur Marvel demande à un de ses scénaristes phares du moment de pondre un récit artificiel pour que tous les superhéros se tapent dessus, en promettant que plus rien ne sera jamais comme avant, et toute conséquence a disparu 3 mois après, pour un retour tiède au statu quo. Il s'agit d'affrontements déconnectés de toute réalité, sans apparition d'être humain normal, une sorte d'autocélébration incestueuse entre superhéros. En outre, il y a tellement de personnages qu'ils sont réduits à autant de coquilles vides sans personnalité, se distinguant uniquement les uns des autres par les motifs de couleurs chamarrées sur leur costume moulant, et par la couleur des énergies qu'ils émettent. Certes, c'est un récit de superhéros, avec des gugusses en costume moulant, des superpouvoirs impossibles et baroques. Oui l'intrigue se déroule sur la base d'une enquête pour comprendre comment Victor von Doom en est arrivé là, jusqu'à une confrontation physique finale contre son plus grand ennemi. Oui, il y a beaucoup de personnages et la plupart ne peuvent exprimer leur personnalité que le temps d'une ou deux répliques maximum. Oui aussi, Jonathan Hickman pioche à loisir dans le riche univers partagé Marvel pour mettre en scène des personnages qui lui plaisent ou qui lui sont imposés pour des raisons éditoriales (oui, il y a Groot et Rocket Raccoon, Miles Morales, un inhumain issu de la famille royale). En plus le dessinateur est cramé avant la fin, victime d'un burn-out engendré par la quantité de gugusses à dessiner et la longueur interminable de la série (9 épisodes quand même). Esad Ribi? a dessiné toute la série et l'éditeur Marvel s'est fait conspuer parce que le dernier épisode est paru avec 3 mois de retard, soit après les premiers numéros des séries post-événement. Il est sûr que si le même éditeur avait tout fait pour tenir les délais (= remplacer Ribi? par le premier venu), il se serait tout autant fait critiquer. Au moins le lecteur qui découvre le récit sous format d'un recueil complet a le plaisir de voir une histoire racontée par les mêmes personnes du début jusqu'à la fin. Esad Ribi? est un artiste qui a travaillé avec JM Straczynski sur une histoire du Silver Surfer, avec Peter Milligan pour une histoire de Namor, avec Rick Remender sur Uncanny X-Force, avec Jason Aaron sur Thor god of thunder, et déjà avec Hickman pour 9 épisodes des Ultimates. Il dessine les personnages de manière réalistes, avec des contours en trait fin, donnant une apparence un peu éthérée à ce qu'il représente. De prime abord, le choix de confier ce récit à Esad Ribi? apparaît étrange. Le côté léger de son trait peine à donner assez de consistance aux affrontements, ne confère pas une présence massive à ces superhéros ou aux supercriminels. Cet état de fait est accentué par le choix d'Ive Scorcina qui utilise des couleurs délavées, un peu pastel, donnant une apparence un peu fade à la page. Ce parti pris esthétique crée d'entrée de jeu un décalage avec les conventions visuelles des comics de superhéros, en insistant moins sur la force et le spectaculaire pyrotechnique, en créant une ambiance différente de l'ordinaire des comics de superhéros. Il est possible de comparer ce phénomène à celui produit par les dessins très altiers et élancés d'Olivier Coipel pour House of M : un esthétisme différent qui indique que l'histoire est placée en dehors de la continuité normale, avec sa propre cohérence Dès le début, Esad Ribi? s'astreint à représenter les personnages en cohérence avec leur apparence dans leur série mensuelle du moment (la coupe de cheveux d'Hulk par exemple, ou le costume de Thanos conforme à celui du film Avengers). Puis il apporte des modifications plus ou moins importantes aux personnages à partir du moment où l'histoire se déroule sur Battleworld. Ce travail de réappropriation graphique aboutit à une version de Doom tout habillé de blanc, toujours majestueux et condescendant et paradoxalement plus inquiétant. L'artiste s'en sort également très bien avec Stephen Strange. Il lui conserve une morphologie sans musculature surdéveloppée, avec un visage montrant son âge (quadragénaire). Il reprend l'allure de Reed Richards tel que l'avait conçu Kev Walker dans la série Avengers (avec la barbe). De ce point de vue, chaque personnage se distingue immédiatement des autres, avec une forte identité graphique pour tous. Dès le début, le lecteur constate également qu'Esad Ribi? s'économise sur les décors. Il le fait avec intelligence, c’est-à-dire qu'en début de chaque séquence, il prend du temps pour montrer l'environnement dans les détails. Par la suite, il n'est rappelé que par quelques traits, et pendant les scènes d'affrontements physiques, les arrière-plans se vident de toute information visuelle. Ive Scorcina ne possède pas le talent de Dean White ou de Dave Stewart pour utiliser les couleurs afin de transcrire l'intensité des affrontements, pour accompagner les mouvements par des dégradés progressifs de couleurs, ou pour transformer l'arrière-plan en un spectacle pyrotechnique qui en met plein les yeux. Il se contente de donner un peu de volume avec des camaïeux discrets à la poussière soulevée. Sur ce plan la narration visuelle manque un peu de consistance. Par contre la mise en scène amalgame une dramaturgie théâtrale avec des mouvements de caméra pour mieux montrer les déplacements des personnages, leur langage corporel, leurs mouvements. Esad Ribi? sait faire apparaître les émotions des personnages sur leur visage, leur état d'esprit dans leur posture. Il a le sens du spectacle pour les moments révélateurs qu'il s'agisse d'une cérémonie protocolaire d'enterrement, de l'apparition d'un personnage, ou encore d'une harangue sur une pente herbue. Ive Scorcina fait preuve d'une sensibilité artistique pour choisir la teinte dominante de chaque séquence, et ainsi établir une impression durable. L'épilogue (toujours dessiné par Esad Ribi?) montre qu'il n'est pas cramé et qu'il a mis à profit le temps supplémentaire qui lui a été alloué pour faire en sorte que les visuels soient raccords avec l'intention de l'auteur qui est de boucler avec une situation montrée dans le premier épisode New Avengers. Soit ! Les dessins ne sont pas trop mal, mais l'intrigue reste un prétexte ressortant tous les artifices de l'univers partagé Marvel, utilisés jusqu'à la nausée depuis des décennies. Non seulement il y a un recyclage de la situation de House of M dans un What if? qui ne dit pas son nom, mais en plus il y a même le Gant de l'Infini. En plus il y a tellement de personnages qu'il faut une encyclopédie pour s'y retrouver. Jonathan Hickman joue le jeu du crossover ou de l'événement. Il est un employé qui travaille pour un éditeur, avec un cahier des charges très contraignant. Il effectue son travail en en respectant les spécifications. Le lecteur peut le regretter, mais il n'est pas pris par surprise. Il sait qu'il s'engage dans un récit fédérateur à l'échelle de tous les comics Marvel du moment, avec pléthore de personnages, et un enjeu à l'échelle de toute la réalité. Il utilise les jouets qu'on lui a imposés. Il le fait avec respect, ce qui veut dire qu'il a bien fait ses devoirs et qu'il respecte les caractéristiques principales de chaque objet de pouvoir et de chaque personnage. Dans cet ordre d'idée, il s'en tire mieux que beaucoup de ses collègues, comme il l'avait déjà prouvé dans Infinity. Certes Thanos n'a pas l'ampleur qu'il peut avoir dans les récits de Jim Starlin, mais il n'est pas relégué à l'état de simple supercriminel. Comme dans tous les autres crossovers, il est possible de comprendre l'intrigue sans connaître tous les personnages. On peut s'amuser de voir passer Toothgnasher ou Toothgrinder, sans savoir d'où ils sortent. Quand même, ce Secret Wars donne l'impression d'être l'aboutissement de tout le travail de Jonathan Hickman depuis ses débuts sur Fantastic Four (on a échappé à ses Secret Warriors, c'est déjà ça), c’est-à-dire depuis 2009, soit six ans de continuité interne à son œuvre. C'est dire si c'est incompréhensible. À un moment il faut choisir son camp : on ne peut pas accuser Jonathan Hickman de pondre un crossover industriel de plus, et dans le même temps d'écrire une histoire personnelle construite pendant 6 ans. Donc le scénariste fait ce qu'on demande de lui et intègre de temps à autre une image ou une page évoquant ce qui se passe dans une ou plusieurs baronnies pour donner un semblant de légitimité aux miniséries satellites. Il mène à bien son intrigue des séries Avengers, avec la dernière incursion qui aboutit à la création de Battleworld, et au nouveau statut de Victor von Doom. Il apporte une touche finale à ses histoires pour les Fantastic Four. Il rapatrie le Reed Richard de l'univers 1610 qu'il avait bien développé pendant la saison qu'il avait écrite des Ultimates. Il fait même un clin d'œil à sa série Secret Warriors (son premier travail pour Marvel), avec Nikola Tesla qui apparaît le temps d'une page (il s'agit d'ailleurs plus d'une référence à sa série sur le SHIELD). Le lecteur plonge dans une situation que Jonathan Hickman prend le temps d'expliquer. Il y a une brève introduction de 3 pages montrant Doom et 2 autres face à un pouvoir incommensurable, puis tout un épisode consacré à la dernière Incursion, montrant la fin des Terre 616 et 1610. Puis le récit commence sur Battleworld. Au fil du récit, le lecteur apprend comment Doom a acquis le statut de dieu, pourquoi cela lui est arrivé à lui et pas à un des 2 autres à ses côtés. Parallèlement plusieurs personnages essayent de comprendre la situation et d'en prendre la mesure. Effectivement le récit ne rappelle pas comment Stephen Strange s'est retrouvé aux côtés de Doom. Effectivement Owen Reece semble reprendre le même rôle que durant les premières Secret Wars. Effectivement la participation d'un moloïd et de la Fondation du Futur parle plus à un lecteur des Fantastic Four d'Hickman. De même que le ralliement de Black Swan (Yabbat Tarru) aura plus de sens pour qui a lu les séries Avengers. Effectivement le récit se termine par un affrontement entre Doom et son ennemi. Il n'en demeure pas moins que Jonathan Hickman raconte une vraie histoire, avec un suspense quant à la façon dont Doom sera défait, et aussi quant à la manière dont il a acquis son statut. Le scénariste utilise les personnages mis à sa disposition à bon escient. Il est par exemple savoureux de voir Thanos confronter Doom, en lui rappelant que lui aussi dispose d'une certaine expérience en matière d'exercice divin. Il est assez rigolo de voir Valeria Richards rappeler à Doom qu'omnipotence ne signifie pas omniscience. Hickman sait faire ressortir l'histoire personnelle de plusieurs personnages de manière naturelle, leur conférant un minimum de personnalité. Jonathan Hickman manipule sa distribution pléthorique avec une grande adresse, réussissant à ne perdre aucun personnage en cours de route, à donner un petit moment à la plupart, et à développer ceux qui jouent un rôle plus important. Le lecteur apprécie la manière dont le scénariste étoffe le caractère de Doom, sans trahir le fond de sa personnalité. Ce personnage bénéficie d'une explication convaincante quant au fait qu'il ait endossé le rôle de dieu pour sauver ce qui pouvait encore l'être. Hickman expose la motivation première de Doom avec une réelle sensibilité psychanalytique et une grande pertinence (sans verser dans la psychologie de comptoir). Il lui restitue toute sa dimension tragique, dans le rôle du personnage central d'un roman noir. Pour le combat final, il reprend la grande tradition Marvel (des années 1960 et 1970) d'un combat physique qui se double d'un affrontement idéologique. Il intègre la notion de famille (inséparable des histoires des Fantastic Four), avec une approche un peu différente et complémentaire de ses épisodes des FF. Il a réservé un sort étonnant et logique à Johnny et Ben. Il conclut son récit en bouclant sur le début, à la fois par le retour sur la phrase "Tout meurt" prononcée par Reed Richards tout au début du premier épisode des New Avengers, à la fois par un passage au Wakanda. Mouis, mais quand même, on a l'impression qu'Hickman a abandonné une partie de son intrigue pour les séries Avengers, car il n'y a plus ni Builders, ni Makers. Le scénariste avait mené cette intrigue à son terme dans les séries Avengers. En prenant un peu de recul, le lecteur s'aperçoit qu'il continue de filer la métaphore de cet aéropage de créatures floues (makers, builders, mapmakers). Quand Doom se retrouve dieu de la réalité, le lecteur peut y voir la métaphore du scénariste tout puissant présidant à la destinée de tout l'univers partagé Marvel. Sous cet angle de vue, cette partie de Secret Wars devient une métaphore du caractère diminué, voir stérile de cet univers partagé s'il était confié à un seul et même créateur ou artiste. De même la posture de Doom implique une forme d'immobilisme de ce monde, chaque individu étant cantonné dans une forme e stase immuable. L'enquête menée par une poignée de personnages sous-entend qu'il y aura toujours des évolutions par rapport à ce statu quo, justifiant par là les libertés que certains auteurs prennent avec les personnages Marvel (au hasard, Peter Parker en chef d'entreprise à succès, ou Otto Otavius devenant un Spider-Man supérieur). Contre toute attente, malgré toutes les contraintes du crossover, malgré les exigences éditoriales, contre vents et marées, Jonathan Hickman raconte une histoire de superhéros dans laquelle le lecteur peut déceler sa voix d'auteur, à la fois dans la structure du récit (une de ses marques de fabrique), mais aussi dans le discours tenu par les personnages, les convictions et les valeurs qu'ils affirment. Secret Wars version 2015 constitue une fin à la hauteur des séries Avengers et New Avengers, un crossover réussi, un hommage incroyable aux premières Secret Wars de Jim Shooter et Mike Zeck, un crossover pour les rassembler tous, les recycler tous (presque tous, il n'y avait pas Fear Itself ou Secret Invasion, et sûrement beaucoup d'autres) et trouver sa place légitime parmi eux (et savoir s'il y aura des conséquences durables ou non n'obère en rien ses qualités). Enfin, en partant, Jonathan Hickman laisse l'univers plus riche de personnages qu'il ne l'était quand il est arrivé. Il a mis à profit la nature même de ces héros récurrents dont les droits sont détenus par une entreprise commerciale, pour bâtir une œuvre personnelle, en appliquant le principe de l'économie circulaire (réutiliser ces personnages dont l'essence a été maintes fois extraite, en y trouvant encore de l'inspiration).
Elon Musk - Enquête sur un nouveau maître du monde
Alors qu’Elon Musk est devenu une personnalité publique de premier plan, non seulement par sa fortune qui en fait « the richest man on Earth ever » mais par ses prises de position politiques, cet ouvrage arrive à point nommé, alors même qu’il vient d’annoncer son intention de déplacer les sièges californiens de SpaceX et X vers le Texas, en raison d’une loi visant à protéger les élèves transgenres en Californie. De plus en plus enclin à soutenir les positions d’extrême-droite, l’homme d’affaires a annoncé également soutenir la campagne de Donald Trump à hauteur de 45 millions de dollars. La lecture d’« Elon Musk – Enquête sur un nouveau maître du monde » semble donc essentielle pour mieux faire connaissance avec cet homme qui passe aux yeux de beaucoup pour un visionnaire audacieux et conquérant. En cela, l’ouvrage de Darryl Cunningham est à la hauteur de nos attentes. Extrêmement bien documenté, il décortique de façon factuelle l’enfance et le parcours de celui qui se situe à mi-chemin entre l’inventeur fou et l’homme d’affaires cynique, accusé de fraudes boursières à maintes reprises. Tout son succès semble s’être construit sur des coups d’éclat pour des projets extrêmement aventureux dont beaucoup ont échoué ou n’ont abouti que partiellement, en deçà des promesses faites. Mais les fanfaronnades de cet as de la com lui auront suffi pour bâtir sa fortune, selon un parcours où les déboires ont pourtant été nombreux. Si l’on excepte Tesla et SpaceX, qui ont atteint un certain niveau de pérennité, on pourra citer les exemples de l’Hyperloop (qui depuis a été remisé dans les cartons) ou de The Boring Company, un réseau de transport souterrain au sein des villes dont un seul a vu le jour à Las Vegas. On daignera volontiers oublier les crashs à répétition des fusées Falcon, mais pour ce qui est de Tesla en revanche, la voiture autonome promise il y a dix ans semble accuser quelque retard… Bref, on l’a bien compris, Musk est à la base un entrepreneur hors normes, comme ont pu l’être Bill Gates ou Steve Jobs en leur temps. Et toute l’histoire pourrait s’arrêter là, s’il n’y avait les autres facettes moins réjouissantes de ce touche-à-tout milliardaire… Il n’est pas question de dévoiler ici en détail le contenu du livre, mais lorsqu’il est question de politique ou de vie privée, on peut sincèrement s’interroger sur l’équilibre mental d’un homme aux actions souvent dictées par l’impulsion et un autoritarisme congénital. Si l’on sait que ses méthodes managériales peuvent s’avérer brutales (ce dont on a eu confirmation lors du rachat de Twitter où la moitié des effectifs ont été supprimés), le documentaire nous explique aussi comment l’acquisition du réseau social à « l’oiseau bleu » (devenu X depuis) a été principalement pour Musk un outil de communication politique, tandis qu’il se sentait de plus en plus proche de l’idéologie des extrémistes de droite aux États-Unis. Celui-ci ressentait le besoin de libérer la parole qu’il s’indignait de voir « réprimée » sur Twitter, alors que ses modérateurs ne faisaient qu’endiguer les discours les plus haineux. Il faut dire que l’homme, qui durant son enfance faisait pourtant figure de geek à l’esprit scientifique, est loin d’être hostile aux théories complotistes, s’étant même dressé vent debout contre la fermeture de son usine Tesla à l’époque du Covid. Depuis, une enquête a montré que les infox et contenus insultants, racistes ou antisémites, généralement influencés par les thèses des nationalistes et suprémacistes blancs, ont augmenté de façon significative. On découvrira aussi que sa notion de la liberté d’expression est à géométrie variable, et s’établit en fonction de ses intérêts économiques et des dictateurs en place, qu’il s’agisse de la Chine ou de la Turquie, où les accès à des contenus protestataires ont été filtrés. Sa vie privée n’est pas non forcément plus le modèle à suivre pour ce caractériel sous kétamine qui sait afficher une certaine bonhommie lorsqu’il est sous les feux de la rampe. Une de ses anciennes épouses, Justine Musk, a révélé le comportement toxique, autoritaire et machiste, de celui qui a enchaîné les divorces aussi sûrement que les crashs de ses fusées. Quant à ses enfants, certains ont de très mauvaises relations avec lui, notamment Vivian Jenna Wilson, sa fille transgenre qui a même opté pour un changement de patronyme. Ce qui, on est en droit de le supposer, pourrait avoir joué en faveur de ses récentes prises de position anti-woke. Bien sûr, on peut concevoir que le personnage suscite le rêve avec son ambition d’emmener dans des délais courts l’humanité vers les étoiles, mais il possède une face sombre qui peut s’avérer inquiétante dans une même proportion. Même s’il serait risqué d’en tirer des conclusions hâtives, on peut toutefois mettre en perspective son côté dominateur avec son enfance dans l’Afrique du sud de l’Apartheid, aux côtés d’un père violent qui fit vivre l’enfer à sa mère Maye. Quoi qu’on en pense, l’exhaustivité documentaire du livre est telle qu’elle permettra à chacun de faire sa propre analyse. Ses aficionados pourront objecter que le style de l’homme, brillant quoi qu’on en dise, dérange, lequel se résumerait en fait à « faire de grandes déclarations ambitieuses, définir des échéances irréalistes, puis pousser ses employés à accomplir des miracles ». Mais de là à voir un génie doué d’intelligence visionnaire, il ne faudrait tout de même pas pousser mémé dans les orties ! Car Cunningham nous avertit sur sa vision « long-termiste » discutable voire extrêmement dangereuse du monde, laquelle consiste à se détourner des crises mondiales actuelles pour privilégier l’avenir de l’humanité… Dans cette perspective, « les besoins d’à peine huit milliards d’humains ne pèsent rien face à ceux des trilliards appelés à vivre après eux ». De quoi nous rassurer quand on met un enfant au monde aujourd’hui… Grâce à un dessin certes sommaire mais accompagnant ce documentaire avec une pertinence à la coloration légèrement ironique, l’auteur réussit à nous intéresser en braquant le projecteur sur cet hyper mégalo qui préfèrerait sûrement choisir le projectionniste. Cunningham nous livre un portrait à charge, certes — et comment aurait-il pu faire autrement ? —, mais surtout un travail journalistique indispensable afin d’avoir un meilleur aperçu de ce qui se cache derrière le masque de ce « nouveau maître du monde », qui pourrait bien briguer un jour, de façon peu surprenante, la présidence des Etats-Unis.
Pastorius Grant
Une BD surprenante de part son esthétisme mais relativement classique dans son déroulé. Si j’ai bien aimé ma lecture, je n’y ai pas non plus succombé totalement. Le graphisme m’a fait un peu peur au début mais plus j’avançais, plus je lui trouvais des qualités. L’auteur maîtrise bien sa narration et ses ambiances. Des couleurs osées mais qui font tout le charme de l’album. L’histoire n’est pas déplaisante mais j’en attendais plus, ça se lit relativement rapidement. J’ai bien aimé certaines planches mais pas non plus au point de trop m’y attarder. Les séquences s’enchaînent bien mais je suis arrivé au bout avec un sentiment de petit oui. En fait j’espérais être davantage surpris (ou alors j’ai peut être pas bien tout saisi), le trait donne un aspect étrange à cette aventure mais la frontière n’est jamais franchie dans le fond. Toujours sur le fil, je regrette qu’il n’ai pas un petit côté fantastique ou à la David Lynch plus prononcé. En tout cas, je salue l’audace graphique, la couverture pète la classe. Une œuvre qui divisera, à la fois classique et original, mais à essayer. Ça m’a fait penser à Hiram Lowatt & Placido par bien des aspects (avec une préférence pour le présent tome).
La Grande évasion - Tunnel 57
6ème opus de la série concept "La grande évasion" dont chaque tome est élaboré par un duo ou un trio différent. Après la lecture des 6 premiers tomes, force est de constater que la qualité de chaque ouvrage est très inégale, le premier tome La Grande évasion - Biribi restant pour l'instant mon préféré. Ici, les auteurs traitent d'un événement qui a marqué l'histoire du mur de Berlin. En effet, le tunnel 57 est un tunnel creusé par des étudiants ouest-allemands sous le Mur de Berlin, et par lequel s'évaderont cinquante-sept Est-Allemands durant les nuits des 3 et 4 octobre 1964. L'événement a été décrit comme la fuite la plus spectaculaire de l’histoire du Mur de Berlin. L'histoire est efficace, sans fioriture, et rentre rapidement dans le vif du sujet. J'ai pour ma part trouvé cette bande d'amis étudiants plutôt attachante et on se prend à rapidement stresser au fil des pages sur l'issue de leur entreprise. L'ensemble est réaliste et agréable à lire. Mais comme pour beaucoup de tomes de cette série, on regrette que cela ne tienne que dans un tome de 56 pages, ne permettant pas, selon moi, de traiter de manière idéale cet événement que je ne connaissais pas. Au niveau du dessin, si j'ai apprécié la colorisation un peu "old schood" collant bien avec le thème, j'ai trouvé les personnages un peu figés et les décors trop dépouillés à mon goût. Le dessin permet toutefois de conférer cette ambiance angoissante qui monte crescendo au fil des pages. Une lecture agréable. SCENARIO (Originalité, Histoire, personnages) : 7/10 GRAPHISME (Dessin, colorisation) : 6/10 NOTE GLOBALE : 13/20
Automne en baie de Somme
Le polar, c'est vraiment pas mon style de prédilection. Et "Automne en baie de Somme" reste dans les poncifs du genre que je n'apprécie que modérément. C'est dommage, la BD a une vraie patte visuelle inspiré en grande partie de l'art Nouveau, cité explicitement dans le récit d'ailleurs. Mais ce qui m'a surtout marqué dans ma lecture, c'est la façon dont le récit tord les ficelles scénaristiques pour en faire un polar avec une surprise finale. A ce niveau, le chiffre marqué comme un indice (et la clé de compréhension) m'ont paru beaucoup (beaucoup) trop gros. D'autre part, le récit fait un volte-face de quelques personnages, notamment l'industriel, mais ne semble pas réellement répondre aux questions politiques qu'il pose. Je veux dire, une fois révélé les agissements de l'industriel, est-ce que ça rend alors légitime et normal le comportement de sa femme ? La BD ne l'évoque pas, mais c'est franchement étrange de poser ainsi un tel dilemme sans jamais l'évoquer ensuite. C'est ce que je reprocherais le plus à la BD, en fin de compte. Outre qu'on reste dans les industriels et les artistes du XIXè, la population ouvrière est assez peu présente (je ne parle pas des anarchistes de Montmartre qui font de la figuration), c'est le propos qui tente de montrer les peurs du socialisme d'une époque, propos esquissé et jamais abouti. Au delà de l'intrigue de polar dont la fin m'a fait tiquer (une grosse coïncidence et une explication du chiffre franchement tiré par les cheveux), le fond et le corps du récit manque de développement. Trop peu de pages, trop de sujets évoqués ? Je ne suis pas sur, mais en l'état je trouve que la BD reste surtout intéressante pour son dessin, travaillé et franchement très joli, mais je n'ai pas envie de la relire.
Birdking
Un premier tome prometteur. Un album tous publics qui ravira principalement les adolescents, mais pas seulement, j'en suis la preuve. Daniel Freedman au scénario (Kali) et Crom au dessin, citent Miyazaki ou encore le jeux vidéo Dark Souls comme sources d’inspirations. Ce Birdking est leur deuxième collaboration après "Raiders". Les auteurs nous entraînent dans de la dark fantasy sombre et légère à la fois. Bianca, jeune apprentie forgeronne, est forcée de fuir son pays en guerre et de partir à la recherche d'Atlas, une terre légendaire, elle sera accompagnée par le silencieux et imposant Birdking, l'esprit d'un roi. Un album qui ne révolutionne pas le genre, mais il prend le temps de s'attarder sur Bianca et ainsi de s'attacher à cette délicieuse jeune fille au tempérament bien trempé. Un premier tome qui met en place un univers dense, complexe et mystique dont il reste encore beaucoup à découvrir. Le début d'une saga rondement menée, c'est fluide, palpitant et très agréable à lire. Le titre prend tout son sens. Je découvre Crom et je suis sous le charme de son dessin au trait vif, précis et expressif. Un dessin singulier me rappelant celui de Mike Mignola mais avec une touche de manga, notamment dans l'expression excessive de certains visages. Un délicieux mélange. J'ai aimé le choix des couleurs et la créativité dont Crom a fait preuve pour les personnages, ainsi que pour les rares décors. Sobre, mais très efficace ! Une très belle découverte et vivement la suite. Tome 2. Un second opus qui confirme, beaucoup plus dans l'action, on entre de plein fouet dans cette saga, ce qui permet d'en connaître beaucoup plus sur ces mondes mystérieux. Du déjà vu, mais la réalisation est parfaite et les surprises seront au rendez-vous. Un dosage parfait entre scènes de batailles et moment plus calme pour développer les - nouveaux - personnages. Visuellement, toujours autant de plaisir. Vivement le tome 3.
V - Les Visiteurs
Comme beaucoup (je pense), je garde un excellent souvenir de cette série TV. Le mot est même faible, tant elle m’a marqué dans son casting, esthétisme et idées véhiculées (je garde toujours l’image de leur repas et de leur peau). Bref je suis tombé sur ce manga (une adaptation de l’époque il me semble) et si je ne partais avec des apriori, ça a été la douche froide à l’arrivée. La comparaison entre les 2 supports pique, rien ne marche en version papier. C’est tout simplement d’une platitude folle, il n’y a pas de tension. L’histoire diffère légèrement mais je me suis complètement désintéressé de la trajectoire des personnages. La faute aux dessins, les protagonistes sont sans charisme (dans les 2 clans). Je n’aime pas ce style qui m’apparaît trop vieillot. Le résultat me semble loupé, bref une fausse bonne idée cette adaptation. Ça fait pâle figure face à l’original, je n’ai rien retrouvé de ce que j’aime dans l’univers.
L'Été de mes 17 ans
Très agréable ce recueil. Il compile des courts récits préalablement parus dans Phosphore (le magazine des 14 ans et +), où 14 auteurs vont narrer l’été de leurs 17 ans. J’ai trouvé le casting hétéroclite et très sympa, en plus d’une belle parité. Nous aurons ainsi tout un panel d’histoires et d’expériences différentes avec comme point commun l’âge de nos héros. Une période charnière qui commence à nous façonner. J’ai aimé la pluralité de ses témoignages, nous voguerons ainsi principalement des années 90 aux 2000 et dans des lieux différents. J’ai aimé la sincérité des auteurs qui se livre parfois sans fard. Selon les histoires, on oscille entre humour, tendresse et profondeur, entre jobs d’été, vacances, galères ou accomplissement. Non vraiment bien chouette ce tome, l’effet nostalgique a parfaitement fonctionné sur moi. Je pense que vous passerez tous un bon moment et ça m’aurait bien plu de découvrir cet album avant ce fameux âge. Pour pinailler, je reconnais quelques histoires un peu plus faibles mais le tout est homogène, en plus d’avoir un côté universel. Un album qui m’a mis de bonne humeur et encore une fois, mention à Alix Garin, qui comme dans Journal Tintin - Spécial 77 ans continue de m’épater.
Le Petit Spirou
Comme beaucoup j'ai connu étant gamin. BD qui s'adressait surtout à des gamins peut-être adultes dans les années 90. Et lorsque l'on voit l'historique des commentaires cela se voit : les notes ont 20 ans... Le Petit spirou vieillit mal. Un peu comme Cédric, Boule & Bill ou Astérix, à un moment tout devient redondant et attendu... Il faut savoir arrêter une série.