Voilà une chouette BD d'heroic-fantasy ! Ou plutôt de Sword & Sorcery tant le héros s'apparente au fameux Conan le Barbare, dans ce qu'il a de plus tragique. Mais c'est ici de la Sword & Sorcery dans un cadre animalier, une société animale où les créatures sont bien anthropomorphes mais où les carnivores jouent les rôles de carnivores, les herbivores leurs rôles de proie, les taupes creusent et les souris peuvent mourir à tout instant d'un infarctus car leur petit cœur bat trop vite.
Ce mélange de style permet la création d'un univers original, à la fois sombre et léger. Cette légèreté dans le récit provient en grande partie du jeune garçon qui se décide à coller aux basques du héros. Aussi mignon que débrouillard, il apporte la touche de fraicheur qui donne son charme à ce récit qui aurait pu paraitre autrement trop sérieux. Sur la fin du premier tome, une charmante voleuse renarde vient elle aussi ajouter une touche plus féminine et rusée. Et même le mystérieux démon caprin qui prend régulièrement possession du corps du roi lion a sa dose de profondeur et d'intérêt.
L'équilibre de ce récit m'a pleinement séduit. Le ton est juste, réaliste, avec des jeux de pouvoir bien menés, des combats épiques et une belle alchimie entre rudesse et légèreté. L'humour est présent, tant dans les dialogues que dans certaines situations, ponctué de clins d'œil anachroniques suffisamment discrets pour ne jamais déranger.
Le dessin est remarquable : les animaux anthropomorphes sont superbement rendus, avec une touche Disneyenne légère, les décors soignés, et la mise en scène, comme la narration graphique, parfaitement maîtrisées. Les couleurs, elles aussi, sont d'une grande qualité, renforçant l'ensemble.
L'intrigue, simple en apparence, s'enrichit de nombreux éléments, de personnages bien construits et d'une part de mystère qui retient l'attention. Le rythme est fluide, les péripéties s'enchaînent avec cohérence, et l'ensemble fonctionne grâce à un vrai sens de l'aventure. L'envie de découvrir la vérité sur le passé oublié du héros, le sort de ses enfants, et les intentions de son frère ajoute à l'attrait de l'histoire.
J'ai aussi beaucoup aimé la manière dont l'univers s'inspire des royaumes africains, en particulier celui de Koush, dont l'histoire affiche directement le nom. Ce monde est construit avec finesse et un réalisme d'une belle maturité.
Cette sobriété dans le récit se maintient jusqu'à la fin, avec un dénouement touchant et réussi, au terme d'un affrontement final simple mais intelligemment mis en scène. L'ensemble a la beauté d'un film d'action sobre, qui ne cherche pas à en mettre plein la vue, mais à raconter une histoire captivante, crédible, et profondément immersive.
En voilà une nouvelle série prometteuse ! Une belle brochette d'auteurs aguerris, un univers qui semble ouvrir sur une grande richesse et un dessin assez somptueux : il n'en faut pas plus pour le moment pour me laisser porter.
Alors oui, le parallèle avec la série "Game of Thrones" est plus qu'évident, mais les auteurs semblent l'assumer complètement au vu des clins d’œils plus ou moins subtils qui pointent au fil des pages. En attendant cet univers de fantasy que nous découvrons au moment d'une transition douloureuse repose sur un équilibre précaire où chacun commence à sortir les griffes et ses premiers atouts pour s'imposer comme dominant.
Ce premier tome s'il ne fait que poser un cadre général n'en est pas moins pour autant avare en rebondissements et pas des moindres ! Si certains points du scénario m'ont paru un peu superflus ou redondants (je parle des relations amoureuses "interdites" de certains protagonistes) la suite de la série apportera peut-être un regard plus éclairé et justifié sur ces relations.
En attendant, ne boudons pas notre plaisir, voici une série qui part de la plus belle des manières avec un scénario ambitieux et un dessin magnifique !
*** Tome 2 ***
Ce deuxième opus enfonce le clou en expédiant sur le trône le prétendant pressenti pour qui l'heure de la guerre "préventive" contre ceux qui ne semblent rêver que de vengeance a sonné !
Les intrigues satellites gagnent en profondeur et certains personnages secondaires en épaisseur. On sent que l'univers concocté par nos auteurs s'assoie tranquillement et que les rebondissements sont loin d'être finis.
Côté graphisme, rien à redire, on retrouve le trait maîtrisé de Jérôme Lereculey qui semble s'amuser des cadrages, plans travaillés et autres découpages audacieux.
Il ne nous reste plus qu'à attendre la suite, en la souhaitant de la même tenue !
*** Tomes 3 à 6 ***
C'est un premier cycle détonnant qui nous est proposé ! Après deux premiers tomes qui posaient déjà les jalons d'un univers que les amateurs de Game of Thones ne pouvaient qu'apprécier, le lecteur n'est pas au bout de ses surprises et les rebondissements vont bon train ! Si la pléthore de personnages fait un peu peur au début, la maitrise de la narration et la construction du récit permettent rapidement d'appréhender les liens et les appartenances de chacun. C'est beau, c'est bien écrit, on sent que les auteurs n'ont pas bâclé le travail et que le résultat semble à la hauteur de leur envie de bien faire. Car, que ce soit l'histoire ou le dessin, on nous sort le grand jeu ! Les rebondissements sont légions, tout en s'interrogeant sur cette légitimité du pouvoir et ses différentes formes. C'est plutôt bien vu et amené.
Un très bon cycle !
*** Tomes 7 et 8 ***
C'est par le biais du personnage de Keona, avec qui nous avons fait connaissance dans le premier cycle, que la transition s'opère. Elle rentre dans son royaume de Lys et est heureuse de retrouver sa famille. Mais entre temps les choses ont changé en ville, car la cheffe du clan du Sistre qui régnait sur une bonne partie de la ville est morte et c'est son frère qui assure l’intérim en attendant la libération d'Alissa. Cette dernière vient de passer cinq années derrière les barreaux après s'être fait balancer... Son retour ne passe pas inaperçu, et d'autres clans ont d'ailleurs bien senti cet affaiblissement du Sistre et vont tenter leur chance...
La transition vers ce nouveau cycle se fait donc en douceur grâce à Keona, et c'est l'occasion pour le lecteur de découvrir un nouvel univers. Après les félins, nous voici donc catapultés chez les singes. Et la première chose qui frappe c'est le système matrilinéaire de sa société. Et là où les auteurs sont forts c'est qu'ils poussent le vice jusqu'à donner la prédominance féminine jusque dans le langage, ce qui donne des dialogues assez surréalistes et savoureux au fil pages, les accords grammaticaux et d'orthographe se faisant au féminin !
Côté dessin, changement d'ambiance aussi, Lys est un monde très inspiré du Japon ou de la Chine médiévale. Les architectures sont sublimes et les costumes ne sont pas en reste.
L'histoire évolue autour de plusieurs groupes de personnages ; Keona bien sûr et son retour chez sa mère, la reine du royaume ; Alyssa, la cheffe du clan du Sistre ; un duo de deux jeunes étudiantes en archéologie en quête d'une ville légendaire disparue et enfin, Shin Taku, nouveau responsable de la police locale fraichement débarqué dans la cité. Tout cela est agréablement croisé dans la construction du récit, reste à savoir quand les interactions vont s'opérer.
Ce second cycle bien rythmé est donc très bien parti ! Vivement la suite !
*** Tome 9 ***
Dans ce 9e opus, les intrigues croisées de nos protagonistes se poursuivent et avancent !
Le clan du Sistre est en position de faiblesse après les attaques répétées et ciblées menées par le Coucal : entrepôts, salles de jeu, distilleries, jusqu'à Alissa la cheffe de clan. Cette dernière se lance dans une opération de grand ménage au sein du clan qui ajoute encore à la précarité du clan. Le Sistre si puissant est aux abois, et l'odeur du sang commence à attiser les convoitises des autres clans, toujours prompts à achever la bête à terre... Mais Alyssa a plus d'un tour dans son sac et est prête à tout pour renverser la situation...
De leur côté, nos deux étudiantes en archéologie vont avoir la chance d'être secourues et d'aller de surprises en surprises. Quant à Keona, elle commence à se réhabituer à sa vie de palais, même si son amour lointain lui occupe toujours l'esprit.
La série continue donc d'avancer tranquillement et efficacement, de façon toujours aussi soignée, que ce soit dans la construction des récits croisés que graphiquement. En effet, que ce soit la cité d'Alysandra ou la jungle, les décors et les détails sont toujours aussi riches offrant au lecteur un réel plaisir et un dépaysement.
*** Tomes 10 à 12 ***
Cette fin de cycle nous réserve encore bien des drames et des surprises pour notre plus grand bonheur !
Une belle apothéose à la Pyrus qui voit le dénouement sanglant de cette guerre de clans orchestrée par Alissa. La toute fin nous réserve une nouvelle surprise de taille qui clos parfaitement ce cycle pour mieux l'ouvrir sur le prochain à venir...
Voilà une série qui a su au fil de ses deux premiers cycles s'imposer comme un futur classique, et qui loin de s'essouffler, ne fait qu’attiser notre curiosité pour le prochain cycle à venir
*** Tome 13 ***
Et voici parti pour un 3e cycle !
Après un 1er cycle qui nous avait fait découvrir l'univers des 5 Terres en commençant par Angleon, capitale des félins, un second qui nous avait embarqué dans les rivalités et autres trahisons du Royaume de Lys et de ses singes, voici venir le temps des ours et leur soif de vengeance ! Fini les intrigues, et sous intrigues : les ours et leurs alliers chiens et loup sont des bourrins, et Angleon va le sentir passer !
Mais cela serait aller trop vite en besogne que de résumer ce début de cycle à cet assaut, car "Les 5 Terre" nous a baigné dans (le sang de) ses trahisons et autres fourberies, et ce 3e cycle ne devrait pas être en reste... Entre les alliances fragiles d'Arnor et ses tribus ours, loups et chiens, et la descendance du roi (Genkin) rentré au pays après ses années d'otage à Angleon, on sent bien que tout le monde évolue sur une glace des plus fragiles et qu'à tout moment cette souffreteuse harmonie peut voler en éclats.
Côté dessin, toujours rien à redire, c'est toujours aussi efficace et agréable, les personnages anthropomorphes toujours aussi expressifs, décors et costumes finement travaillés : du bel ouvrage !
Alors maintenant, nous revoilà parti pour une longue attente entre chaque tome ! Car cette série reste des plus addictive quand on est plongé dedans !
*** Tome 14 ***
Arf, bon, ba ce 2e tome de ce 3e cycle doit être le premier à me décevoir...
J'étais déjà un peu moins enthousiaste avec le début de ce 3e cycle après les deux très bons premiers, mais je m'étais dit que c'était la mise en jambe, mais après avoir refermé ce 2e tome, j'avoue ne pas être fan de la trame qui s'annonce et de ses rivalités internes chez nos amis les ours, chiens et loups.
Côté dessin, c'est aussi avec ces personnages que j'ai le plus de mal. Autant j'avais trouvé que les 2 premiers cycles géraient à merveille la distinction des personnages anthropomorphes, autant là j'ai trouvé parfois difficile de m'y retrouver, surtout chez les ours.
Alors espérons que le prochain tome redonnera du peps à ce cycle, car malgré tout cela reste une très bonne série et cela serait dommage de commencer brasser de l'air après deux cycles des plus réussis.
Tiens, une nouvelle série de Jean-Luc Istin... Ça faisait longtemps... Et encore une série concept de SF ? Mmmouais... Et ? Ba le sieur sait y faire et nous propose une nouvelle fois une série qui démarre sur les chapeaux de roue ! Installez-vous confortablement, sortez le pop-corn... C'est parti !!!
Cette nouvelle série nous propose de suivre une équipe de personnages cyborg que nous allons découvrir au fil des tomes. Ce premier opus nous met sur le pas de la jeune Yuko, née avec un sévère handicap : elle n'a pas de bras (nann j'vous fait pas la blague sur le chocolat :P ). C'est avec celui qui l'a élevé, Akira, un maître en art martiaux qui forme la garde rapprochée du dictateur Tudor, que Yuko va grandir et apprendre à se battre. La novelle loi imposant l'euthanasie des personnes "imparfaites" va chambouler leur petit train-train et faire d'eux des fuyards avec une forte prime sur leur tête : tous les gangs de la mégalopole sont maintenant à leurs trousses...
Franchement, je partais assez circonspect en attaquant ma lecture, redoutant une énième série du genre. Mais les auteurs sont bons... très bons ! Et on se retrouve vite happé par cette histoire, très rythmée, poussée par une narration survitaminée dans laquelle nos personnage charismatiques vont évoluer. Le dessin de Kael Ngu fait plus que le job, même si on est sur un trait relativement classique.
En tout cas, voilà une nouvelle série B qui démarre plus que bien et nous promet de bons moments de lecture et de l'action à tout va !
Vivement la suite !
*** Tome 2 ***
Lancé sur les chapeaux de roue, "Cyborgs" poursuit sur sa lancée et complète cette équipe de cyborgs féminins rebelles avec l'histoire de Sam.
Gravement blessée suite à l'attentat qui a tué sa mère, Sam va devoir subir de lourdes opérations pour pouvoir remplacer jambes et bras. Et ce n'est que le début d'une looonngue période de rémission et d’acclimatation à ses nouveaux membres cybernétiques pour pouvoir parvenir à son objectif : la vengeance ! Car sa mère n'était pas n'importe qui ; elle était l'adversaire principale aux élections de Tudor, celui qui règne maintenant en dictateur...
L'intrigue se poursuit donc en faisant toujours autant d'étincelles, tout en posant de nouveaux jalons et personnages intéressants. Entre les scènes d'action, les nouvelles révélations et des dialogues cinglants, on profite tranquillou du spectacle percutant qui nous est proposé, bien accrochés à notre pot de popcorn.
Le dessin de Kael Ngu reste toujours aussi efficace et nous immerge parfaitement dans cet univers futuriste en gérant parfaitement les scènes d'action.
Vivement la suite !
C'est le 2e album que je lis dans cette nouvelle collection "Wave" de chez Delcourt, et c'est encore une bonne surprise. Ciblée Young Adult, cette nouvelle collection joue à merveille sur des sujets très contemporains, tout en sachant aller piocher dans des registres beaucoup plus classiques, ici les loups-garous.
La couverture est assez équivoque en ce sens, sans spoiler pour autant, restait à savoir comment cette touche de fantastique allait être intégrée dans notre monde contemporain et si ça tenait la route. Pour le coup, c'est plutôt réussi.
Becca emménage à San Francisco et doit donc faire son entrée dans un nouveau lycée. Toujours dur de débarquer dans un nouvel établissement et de s'intégrer, surtout dans LA bande de copines les plus en vues du lycée. C'est pourtant ce qui va se passer suite à un concours de circonstance en apparence anodin... Mais bien évidemment, son intégration au groupe n'était pas fortuite et il va maintenant falloir en assumer le prix... Ajoutez à cela une très légère touche de romance très en phase avec notre temps et une utilisation de la lycanthropie ingénieuse dans notre monde moderne, et cet album se laisse avaler et digérer en une bouchée.
Si le dessin de Lisa Sterle m'a un peu surpris au début par un aspect minimaliste, je l'ai trouvé très juste dans les expression des personnages. Grace au récit fluide découpé en chapitres on est rapidement pris par l'histoire qui tient ses promesses jusqu'au bout.
Un bon album bien calibré qui colle parfaitement à cette nouvelle collection ; les amateurs du genre devraient se régaler !
Chacun de mes pas me rapproche de mon idéal !
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Ce tome constitue une biographie de Sarah Bernhardt (1844-1923). Son édition originale date de 2020. Il a été réalisé par Eddy Simon pour le scénario, et par Marie Avril pour les dessins et les couleurs. Il comprend cent-soixante-huit pages de bande dessinée. Il se termine avec une photographie de l’actrice, et un article de trois pages, intitulé Sarah Bernhardt chronologie, retraçant rapidement des moments emblématiques de la vie de l’actrice, agrémenté d’une petite photographie d’elle dans son rôle de Fedora. Ces auteurs ont également réalisé l’adaptation du roman de Saphia Azzedine : Confidences à Allah (2015).
Acte I L’insoumise. En 1847, à la campagne, de part et d’autre d’une étroite rivière, son cousin incite Sarah à sauter par-dessus, en la houspillant, lui disant qu’il parie qu’elle n’osera jamais, parce qu’elle est une trouillarde de fille. De son côté, l’enfant se convainc elle-même qu’elle va y arriver, et elle finit par prendre son élan pour sauter. Un peu plus tard, Camille et Sarah se trouvent devant la mère du premier. Celle-ci exige qu’ils lui expliquent ce qui s’est passé. Sarah dit que c’est de la faute de son cousin si elle a les genoux écorchés et si ses habits sont sales, c’est Camille qui l’a provoquée. Sa tante la sermonne : Une jeune citadine ne doit pas se comporter comme une vulgaire campagnarde, ce n’est pas convenable ! Sarah rétorque vivement qu’elle recommencera quand même, si on la défie encore. Et elle fera toute sa vie ce qu’elle a envie de faire ! Quand même !
Le cinq janvier 1871, pendant le siège de Paris, Sarah Bernhardt travaille comme infirmière auprès des blessés. Alors qu’elle panse un soldat alité, une autre infirmière vient la chercher pour lui indiquer qu’un certain comte de Kératry qui se dit être le nouveau préfet de police demande à la voir. Pour sortir, elle traverse les différentes pièces du théâtre transformé en hôpital, tout en maugréant : Maudite engeance que la guerre… Une fois dehors, elle retrouve le préfet : Émile de Kératry. Celui-ci commente la cargaison de la charrette qui est en train d’être déchargée : Comme promis, même si cela ne s’est pas fait sans mal, voilà la livraison de vivres, vins, biscuits, café œufs… Sarah lui répond que cela devrait permettre de nourrir ses blessés pendant quelque temps, et elle demande les dernières nouvelles du front des horreurs. Il lui répond d’abord des banalités, puis à la demande de la jeune femme, il rentre dans le détail : En vérité la situation n’est guère brillante. Depuis la reddition de l’empereur, c’est la déroute : chaque jour, les troupes françaises battent en retraite et perdent du terrain sous la férocité des assauts de l’armée prussienne. Léon Gambetta et son gouvernement de défense nationale tentent bien d’organiser la résistance au nord de la Loire, mais la cause…. Semble bel et bien perdue ! Il conclut : Paris sera sans doute très bientôt une forteresse assiégée par les bataillons de Von Bismarck. Il suggère à Sarah de rejoindre sa famille en Normandie, personne ne l’en blâmera. Elle répond avec fougue : Jamais de la vie !
Dans l’inconscient collectif, Sarah Bernhardt est restée comme une actrice de légende, et pour ceux qui en ont déjà entendu parler, également comme une actrice ayant connu le succès aux États-Unis, ayant su faire fructifier son image, et étant enterrée au cimetière du Père-Lachaise. Les autrices font des choix dans leur approche biographique. De débuter par une courte scène de sa jeune enfance pour montrer un caractère bien trempé et une détermination en réaction à son cousin qui lui dit qu’elle est incapable de faire quelque chose : c’est sûr elle ne se laissera plus jamais dicter sa conduite, ou imposer des limites. Puis le récit passe de 1847 à 1871, en omettant une phase de la vie de Sarah, celle où la police des mœurs la classe parmi les dames galantes, où elle mène une vie de demi-mondaine entretenue par des clients généreux. Autre parti pris : évoquer plutôt sa vie privée que la pratique de son art, que ce soit son apprentissage ou ses performances. Pour autant, cette biographie montre comment cette dame mène sa vie, majoritairement sur le plan professionnel. En fonction de ses attentes, le lecteur peut se trouver quelque peu décontenancé par cette approche, surtout s’il venait pour une facette particulière telle sa vie mondaine, ou ses qualités d’actrice. D’un autre côté, il constate que le récit est d’une grande richesse, abordant de nombreuses facettes d’une vie particulièrement remplie, que ce soit en rencontres, en voyages, ou en entreprises professionnelles. Il n’y avait pas la place de tout mettre.
Cette biographie est racontée du point de vue de l’intéressée, amenant ainsi le lecteur à prendre fait et cause pour elle, à pouvoir découvrir ses motivations, ses réactions émotionnelles, la conception et la réalisation de ses projets, ses convictions et comment elle les met en pratique. En effet, il s’agit d’une vie riche et dense. Bernhardt se dévoue comme infirmière pour les blessés du siège de Paris pendant la guerre franco-allemande de 1870. Elle ira jouer pour les poilus au parc de Commercy dans la Meuse le dix mai 1916. Elle se fera même emmener au plus près des tranchées alors que son nom figure sur la liste des otages que les Allemands veulent capturer. Elle fera plusieurs voyages, d’abord à Londres en 1878, puis à Louisville aux États-Unis, traversant les étendues sauvages en train. Là encore, le lecteur peut se trouver surpris que les autrices ne développent pas plus cette odyssée, tout en comprenant qu’il aurait fallu y consacrer un tome entier. Au cours de sa vie et de sa carrière, elle va rencontrer ou travailler avec de nombreuses personnalités : Léon Gambetta (1838-1882), Victor Hugo (1802-1885), Mounet -Sully (1841-1916, acteur de théâtre), Louise Abbema (1853-1927, peintre, graveuse, illustratrice, sculptrice), Oscar Wilde (1854-1900), Alfons Mucha (1861-1939), Edmond Rostand (1868-1918), sans même parler de ses amants ou d’autres auteurs de théâtre.
L’illustration de couverture attire l’œil, mettant en avant le monde intérieur qui emplit l’esprit de cette créatrice. Puis le lecteur découvre celle en pleine page servant d’annonce de l’acte I, avec le titre L’insoumise. Il va ainsi admirer une douzaine, pour les trois actes, l’entracte, et des tableaux intermédiaires : L’insoumise, L’étoile, Memento Mori, L’indomptable, Barnum, L’aventurière, Fantasque, La muse, Je me quitte, L’impératrice, One of us. La dessinatrice reprend le principe des affiches pour une composition simple mettant en valeur l’actrice dans une situation exotique ou métaphorique, ce qui constitue un écho à la fois à ses rôles, à la fois à la phase de sa vie. Vient ensuite la première scène de narration séquentielle proprement dite : le lecteur découvre les traits de contours fins et fragiles, esquissant rapidement les formes, la représentation étant réalisée ensuite en couleur directe. Cela donne un ressenti assez complexe, entre simplicité des formes, évidence des situations, et nuances émotionnelles apportées par les couleurs. Le lecteur passe ainsi de l’insouciance teintée de l’intense gravité de l’enfance, à l’horreur des cadavres sur le champ de bataille enneigé, à des dialogues de personnages sur fond uni comme sur une scène sans décor.
Les épisodes de la vie de Sarah Bernhardt se révèlent d’une grande richesse, au point que leur contenu en vient à éclipser le reste. Toutefois, s’il y prête attention, le lecteur voit que la dessinatrice met en œuvre de nombreuses techniques narratives variées, ce qui enrichit encore le récit. Quelques exemples : page neuf, une planche silencieuse, dans laquelle Sarah se regarde en passant dans un miroir, évoquant l’importance de son apparence pour son métier d’actrice. Page quatorze : le théâtre des opérations, la scène du théâtre se trouvant devant la scène de bataille. Les superbes paysages de montagne lors d’un voyage en train, une composition en double page de représentations théâtrales avec pour fond chaque livret faisant apparaître le titre et l’auteur, deux spectres semblant flotter autour de Sarah dans la rue par un temps brumeux pour évoquer l’incertitude de l’identité de son père, Sarah promenant son improbable ménagerie dans les rues de Londres, des coupures de presse retraçant les moments les plus improbables de sa première tournée aux États-Unis, un fac-similé d’affiche de Gismonda par Alfons Mucha, et quelques moments de représentations en particulier Bernhardt dans le costume de l’Aiglon pour la tirade de Flambeau.
En fonction de sa familiarité avec la vie de l’actrice, le lecteur en découvre de belles. Il voit se dessiner le portrait d’une artiste ambitieuse. Il constate par l’intermédiaire de son succès et des louanges dressées par des personnalités de référence, que ses qualités d’actrice sont remarquables, voire exceptionnelles. Les autrices montrent un être humain animé par la passion du théâtre, veillant à rester indépendante, et maître de ses choix. En creux, apparaît sa capacité à faire sa promotion, par des décisions innovantes : le recours à la photographie, l’image choc comme dormir dans son cercueil, la présence d’esprit de s’attacher les services d’Alfons Mucha, et même l’apparition de produits dérivés, parfois initiés par elle, parfois par des profiteurs avec le sens du commerce. Elle apparaît comme une artiste faisant ses preuves dans des pièces de moindre importance, dans des classiques, puis dans des œuvres contemporaines, certaines engagées, implication qui se retrouve dans son soutien de Louise Michel (1830-1905) militante anarchiste, et du capitaine Alfred Dreyfus (1859-1935) accusé à tort d’être un espion au service de l’Empire allemand. Le point de vue narratif est intentionnellement partie prenante pour la Divine, sans regard critique : tout en étant conscient de ce choix, le lecteur éprouve une admiration pour une artiste aussi formidable dans son art, dans ses convictions, dans son énergie pour entreprendre, dans sa démesure.
Quelle put bien être la vie de Sarah Bernhardt pour passer à la postérité ? Les autrices racontent une démarche artistique incroyable, une existence débordant de succès et de prises de risque, une vie personnelle tout aussi riche. La narration visuelle rend compte de cette diversité avec une élégance légère et pleine d’émotions. Les pages se tournent toutes seules, et le lecteur termine l’ouvrage surpris par la densité de ce qu’il a vécu. Tourbillonnant.
2.5
Un one-shot correct sans plus qui s'adresse surtout aux enfants.
Je ne sais pas si comme avec Disney il y avait un gros cahier des charges, mais l'imagination de Trondheim est vraiment asphyxiée dans cet album. Les personnages et les situations sont tous du déjà vu. On dirait une bd parue dans une publication jeunesse comme il en sortait à la chaine à une époque ou encore un épisode quelconque d'un dessin animé. Cette histoire souffre aussi du gros défaut des aventures mettant en vedette le marsupilami : les humains ont plus d'importance dans le scénario que le marsupilami lui-même qui est mis en retrait et qui agit surtout comme un deus ex machina. Il était mieux comme compagnon turbulent de Spirou et Fantasio.
Il reste le dessin de Nesme qui ressemble à un film d'animation qui est très bon quoique je ne suis pas un fan de son marsupilami.
J'avais déjà vu passer des extraits de cette série en ligne (les premiers épisodes, en fait) et avoue avoir été suffisamment intriguée par la prémisse pour que je n'hésite pas à acheter le premier tome lorsque j'ai découvert que l'histoire venait d'arriver dans nos vertes contrées.
La Belle & la Racaille, comme son nom français l'indique, est une histoire d'amour similaire au conte de La Belle et la Bête, remaniée ici façon éveil des sentiments amoureux en milieux scolaire (lycéen) entre deux personnes d'apparences très (trop) différentes. L'éponyme racaille s'appelle Atsuko, une loubarde à l'ancienne, une sécheuse de cours invétérée, une machine de guerre capable d'écraser n'importe quel crétin qui l'énerve au sol. La belle, quant à elle, s'appelle Kanzaki, une jeune fille tout ce qu'il y a de plus adorable, qui n'aurait aucun mal à être une fille très populaire si elle n'était pas constamment surexcitée et tête en l'air, nouvelle au bahut et qui va immédiatement s'enticher d'Atsuko à la consternation de cette dernière. Au début seulement, car progressivement, Atsuko elle aussi va énormément s'attacher à Kanzaki, les deux prenant grand plaisir à se retrouver, bien qu'aucune n'arrive vraiment à bien communiquer cet état de fait à l'autre.
C'est un récit simple, qui ne révolutionne pas sa formule et ne se montre pas aussi fou dans son exécution que ce à quoi j'aurais pu m'attendre, mais le résultat est bon, maîtrisé. L'histoire fonctionne, on parvient à s'attacher à ces deux jeunes filles, à leur relation qui se crée petit à petit et à leurs difficultés à bêtement exprimer ce qu'elles ressentent à l'autre.
L'œuvre brille aussi beaucoup par son dessin, très proche d'un style rétro (en tout cas similaire à celui d'artistes comme Naoko Takeuchi). Je trouve que le style graphique ajoute un joli cachet bienvenu dans cette série, c'est même lui qui avait attiré mon attention sur cette série il y a quelques années.
Une série de romance lycéenne très mignonne.
Dans un univers qui évoque celui des Dark Souls, peuplé de sinistres guerriers géants servant de champions à d'impitoyables seigneurs en guerre, les humains ne sont guère plus que de la piétaille sacrifiable. Bianca, jeune apprentie forgeronne, voit son destin basculer le jour où son maître et protecteur est tué. Elle découvre alors une part cachée de ses origines et décide de fuir l'empire sombre dans lequel elle a toujours vécu. Avec son maître, elle a forgé une épée magique capable de ranimer le Birdking, un ancien roi guerrier devenu son protecteur. Cette armure animée, que l'on pourrait croire vide, semble pourtant abriter une âme...
Birdking s'inscrit dans une dark fantasy efficace, au rythme prenant, proche d'un bon feuilleton dont on veut connaître la suite. Le style graphique, moderne et accessible, rappelle celui de certains webcomics. Le trait, simple, pourrait faire penser à une série jeunesse, mais le ton reste sombre et l'ambiance oppressante. Si la technique montre quelques limites, l'auteur les compense habilement par l'intégration de mots dans les cases pour traduire l'émotion ou l'action, ce qui s'avère souvent utile pour la lisibilité de certaines scènes.
On explore un monde implacable, où le manichéisme n'est qu'apparence tant le danger rôde à chaque coin de page et où les humains ne sont que des pièces d'un vaste jeu de pouvoir. Les références sont nombreuses, tirées à la fois du jeu vidéo et de l'animation, avec notamment un passage souterrain qui évoque clairement la Moria de Tolkien. L'intrigue débute de façon classique, mais la richesse de l'univers apporte la dose de mystère et d'originalité nécessaire pour captiver. Même si certains rebondissements sont prévisibles, l'histoire parvient à surprendre et à maintenir l'intérêt. Le rythme soutenu rend la lecture fluide et addictive.
Après trois tomes, et en attendant un quatrième encore en préparation, j'ai clairement envie de poursuivre cette aventure.
Je me retrouve assez dans l’avis de Ro, même si je pense avoir moins apprécié que lui ma lecture de ce diptyque.
Tout l’aspect graphique (dessin et colorisation), sans être hyper original, se révèle dynamique et agréable. Suffisamment plaisant en tout cas pour m’avoir poussé à aller jusqu’au bout, alors que certains détails m’avaient au départ plutôt rebuté.
L’histoire est assez originale, faisant intervenir quelques personnages réels (Andy Warhol, Johnny Cash) dans une intrigue qui nous fait traverser une bonne partie de l’Amérique du Nord (Québec et New-York au départ, puis Californie ensuite).
Les relations – amoureuses mais pas que – entretenues par le héros Thomas avec la femme qu’il aime sortent du commun, avec un « contrat » que Thomas aura du mal à accepter et respecter jusqu’au bout.
C’est aussi un autre « contrat » qui lui posera problème, lui qui se voit contraint de peindre « à la chaine » pour un commanditaire qu’il n’apprécie pas. Les réflexions – hélas pas trop poussées – au sujet du marché de l’art, de l’inspiration, du lien entre créateur et marchand auraient mérité d’être plus creusées. Mais elles densifient une intrigue qui, sans cela, aurait été un peu creuse.
Mais certaines choses m’ont un peu gêné. La rencontre avec Warhol, et surtout les valises de billets qui ont permis à Thomas de « vivre » sans aucune réelle contrainte durant presque deux ans, m’ont paru trop improbables, et ont faussé la vision que j’ai eue de l’histoire. De même, je n’ai pas vraiment compris le jeu du barman propriétaire de la grange du Juke Box Motel.
Bref, pas désagréable, cette lecture m’a laissé un peu sur ma faim.
Note réelle 2,5/5.
J’ai emprunté les trois albums au CDI de mon collège, même si la série ne m’attirait pas forcément (je n’ai pas trouvé les couvertures très folichonnes !).
Hélas, je n’ai pas accroché à cette histoire, qui je pense est clairement à réserver à un jeune lectorat (de collège donc), car ça ne passe pas la barrière de l’âge.
Je n’ai apprécié ni le dessin ni la colorisation, que j’ai trouvés hésitants, manquant de nuances et de détails, voire un peu bâclés par endroit. Tout l’aspect graphique fait d’ailleurs bien plus que son âge, et ressemble à des animes manga du siècle précédent.
L’histoire y ramène d’ailleurs aussi, au point que j’ai eu parfois l’impression de lire du nouveau Goldorak – même si ici les combats ont lieu quasi exclusivement au sol. Dialogues, scénario et personnages manquent vraiment de profondeur, de surprises. On baigne aussi trop dans les bons sentiments. Le coup du fils de la femme de ménage, forcément méprisé par la fille du général, qui devient par une suite de circonstances improbables son collègue dans la lutte contre de méchants envahisseurs – ressemblant à des crabes géants – est cousu de fils blancs. On se doute que ces personnages vont se rabibocher, et triompher collectivement au final.
Le casting mêle des gamins de toutes les origines, la femme de ménage et son rejeton apportent la touche sociale, à croire que ce casting a été réalisé après une étude marketing.
Enfin bref, le déroulé de l’intrigue ne m’a pas intéressé, et comme les autres aspects non plus, c’est sans enthousiasme, et en survolant le dernier tiers du troisième album, que j’ai fini la série, qui n’est clairement pas ma came.
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L'Ogre Lion
Voilà une chouette BD d'heroic-fantasy ! Ou plutôt de Sword & Sorcery tant le héros s'apparente au fameux Conan le Barbare, dans ce qu'il a de plus tragique. Mais c'est ici de la Sword & Sorcery dans un cadre animalier, une société animale où les créatures sont bien anthropomorphes mais où les carnivores jouent les rôles de carnivores, les herbivores leurs rôles de proie, les taupes creusent et les souris peuvent mourir à tout instant d'un infarctus car leur petit cœur bat trop vite. Ce mélange de style permet la création d'un univers original, à la fois sombre et léger. Cette légèreté dans le récit provient en grande partie du jeune garçon qui se décide à coller aux basques du héros. Aussi mignon que débrouillard, il apporte la touche de fraicheur qui donne son charme à ce récit qui aurait pu paraitre autrement trop sérieux. Sur la fin du premier tome, une charmante voleuse renarde vient elle aussi ajouter une touche plus féminine et rusée. Et même le mystérieux démon caprin qui prend régulièrement possession du corps du roi lion a sa dose de profondeur et d'intérêt. L'équilibre de ce récit m'a pleinement séduit. Le ton est juste, réaliste, avec des jeux de pouvoir bien menés, des combats épiques et une belle alchimie entre rudesse et légèreté. L'humour est présent, tant dans les dialogues que dans certaines situations, ponctué de clins d'œil anachroniques suffisamment discrets pour ne jamais déranger. Le dessin est remarquable : les animaux anthropomorphes sont superbement rendus, avec une touche Disneyenne légère, les décors soignés, et la mise en scène, comme la narration graphique, parfaitement maîtrisées. Les couleurs, elles aussi, sont d'une grande qualité, renforçant l'ensemble. L'intrigue, simple en apparence, s'enrichit de nombreux éléments, de personnages bien construits et d'une part de mystère qui retient l'attention. Le rythme est fluide, les péripéties s'enchaînent avec cohérence, et l'ensemble fonctionne grâce à un vrai sens de l'aventure. L'envie de découvrir la vérité sur le passé oublié du héros, le sort de ses enfants, et les intentions de son frère ajoute à l'attrait de l'histoire. J'ai aussi beaucoup aimé la manière dont l'univers s'inspire des royaumes africains, en particulier celui de Koush, dont l'histoire affiche directement le nom. Ce monde est construit avec finesse et un réalisme d'une belle maturité. Cette sobriété dans le récit se maintient jusqu'à la fin, avec un dénouement touchant et réussi, au terme d'un affrontement final simple mais intelligemment mis en scène. L'ensemble a la beauté d'un film d'action sobre, qui ne cherche pas à en mettre plein la vue, mais à raconter une histoire captivante, crédible, et profondément immersive.
Les 5 Terres
En voilà une nouvelle série prometteuse ! Une belle brochette d'auteurs aguerris, un univers qui semble ouvrir sur une grande richesse et un dessin assez somptueux : il n'en faut pas plus pour le moment pour me laisser porter. Alors oui, le parallèle avec la série "Game of Thrones" est plus qu'évident, mais les auteurs semblent l'assumer complètement au vu des clins d’œils plus ou moins subtils qui pointent au fil des pages. En attendant cet univers de fantasy que nous découvrons au moment d'une transition douloureuse repose sur un équilibre précaire où chacun commence à sortir les griffes et ses premiers atouts pour s'imposer comme dominant. Ce premier tome s'il ne fait que poser un cadre général n'en est pas moins pour autant avare en rebondissements et pas des moindres ! Si certains points du scénario m'ont paru un peu superflus ou redondants (je parle des relations amoureuses "interdites" de certains protagonistes) la suite de la série apportera peut-être un regard plus éclairé et justifié sur ces relations. En attendant, ne boudons pas notre plaisir, voici une série qui part de la plus belle des manières avec un scénario ambitieux et un dessin magnifique ! *** Tome 2 *** Ce deuxième opus enfonce le clou en expédiant sur le trône le prétendant pressenti pour qui l'heure de la guerre "préventive" contre ceux qui ne semblent rêver que de vengeance a sonné ! Les intrigues satellites gagnent en profondeur et certains personnages secondaires en épaisseur. On sent que l'univers concocté par nos auteurs s'assoie tranquillement et que les rebondissements sont loin d'être finis. Côté graphisme, rien à redire, on retrouve le trait maîtrisé de Jérôme Lereculey qui semble s'amuser des cadrages, plans travaillés et autres découpages audacieux. Il ne nous reste plus qu'à attendre la suite, en la souhaitant de la même tenue ! *** Tomes 3 à 6 *** C'est un premier cycle détonnant qui nous est proposé ! Après deux premiers tomes qui posaient déjà les jalons d'un univers que les amateurs de Game of Thones ne pouvaient qu'apprécier, le lecteur n'est pas au bout de ses surprises et les rebondissements vont bon train ! Si la pléthore de personnages fait un peu peur au début, la maitrise de la narration et la construction du récit permettent rapidement d'appréhender les liens et les appartenances de chacun. C'est beau, c'est bien écrit, on sent que les auteurs n'ont pas bâclé le travail et que le résultat semble à la hauteur de leur envie de bien faire. Car, que ce soit l'histoire ou le dessin, on nous sort le grand jeu ! Les rebondissements sont légions, tout en s'interrogeant sur cette légitimité du pouvoir et ses différentes formes. C'est plutôt bien vu et amené. Un très bon cycle ! *** Tomes 7 et 8 *** C'est par le biais du personnage de Keona, avec qui nous avons fait connaissance dans le premier cycle, que la transition s'opère. Elle rentre dans son royaume de Lys et est heureuse de retrouver sa famille. Mais entre temps les choses ont changé en ville, car la cheffe du clan du Sistre qui régnait sur une bonne partie de la ville est morte et c'est son frère qui assure l’intérim en attendant la libération d'Alissa. Cette dernière vient de passer cinq années derrière les barreaux après s'être fait balancer... Son retour ne passe pas inaperçu, et d'autres clans ont d'ailleurs bien senti cet affaiblissement du Sistre et vont tenter leur chance... La transition vers ce nouveau cycle se fait donc en douceur grâce à Keona, et c'est l'occasion pour le lecteur de découvrir un nouvel univers. Après les félins, nous voici donc catapultés chez les singes. Et la première chose qui frappe c'est le système matrilinéaire de sa société. Et là où les auteurs sont forts c'est qu'ils poussent le vice jusqu'à donner la prédominance féminine jusque dans le langage, ce qui donne des dialogues assez surréalistes et savoureux au fil pages, les accords grammaticaux et d'orthographe se faisant au féminin ! Côté dessin, changement d'ambiance aussi, Lys est un monde très inspiré du Japon ou de la Chine médiévale. Les architectures sont sublimes et les costumes ne sont pas en reste. L'histoire évolue autour de plusieurs groupes de personnages ; Keona bien sûr et son retour chez sa mère, la reine du royaume ; Alyssa, la cheffe du clan du Sistre ; un duo de deux jeunes étudiantes en archéologie en quête d'une ville légendaire disparue et enfin, Shin Taku, nouveau responsable de la police locale fraichement débarqué dans la cité. Tout cela est agréablement croisé dans la construction du récit, reste à savoir quand les interactions vont s'opérer. Ce second cycle bien rythmé est donc très bien parti ! Vivement la suite ! *** Tome 9 *** Dans ce 9e opus, les intrigues croisées de nos protagonistes se poursuivent et avancent ! Le clan du Sistre est en position de faiblesse après les attaques répétées et ciblées menées par le Coucal : entrepôts, salles de jeu, distilleries, jusqu'à Alissa la cheffe de clan. Cette dernière se lance dans une opération de grand ménage au sein du clan qui ajoute encore à la précarité du clan. Le Sistre si puissant est aux abois, et l'odeur du sang commence à attiser les convoitises des autres clans, toujours prompts à achever la bête à terre... Mais Alyssa a plus d'un tour dans son sac et est prête à tout pour renverser la situation... De leur côté, nos deux étudiantes en archéologie vont avoir la chance d'être secourues et d'aller de surprises en surprises. Quant à Keona, elle commence à se réhabituer à sa vie de palais, même si son amour lointain lui occupe toujours l'esprit. La série continue donc d'avancer tranquillement et efficacement, de façon toujours aussi soignée, que ce soit dans la construction des récits croisés que graphiquement. En effet, que ce soit la cité d'Alysandra ou la jungle, les décors et les détails sont toujours aussi riches offrant au lecteur un réel plaisir et un dépaysement. *** Tomes 10 à 12 *** Cette fin de cycle nous réserve encore bien des drames et des surprises pour notre plus grand bonheur ! Une belle apothéose à la Pyrus qui voit le dénouement sanglant de cette guerre de clans orchestrée par Alissa. La toute fin nous réserve une nouvelle surprise de taille qui clos parfaitement ce cycle pour mieux l'ouvrir sur le prochain à venir... Voilà une série qui a su au fil de ses deux premiers cycles s'imposer comme un futur classique, et qui loin de s'essouffler, ne fait qu’attiser notre curiosité pour le prochain cycle à venir *** Tome 13 *** Et voici parti pour un 3e cycle ! Après un 1er cycle qui nous avait fait découvrir l'univers des 5 Terres en commençant par Angleon, capitale des félins, un second qui nous avait embarqué dans les rivalités et autres trahisons du Royaume de Lys et de ses singes, voici venir le temps des ours et leur soif de vengeance ! Fini les intrigues, et sous intrigues : les ours et leurs alliers chiens et loup sont des bourrins, et Angleon va le sentir passer ! Mais cela serait aller trop vite en besogne que de résumer ce début de cycle à cet assaut, car "Les 5 Terre" nous a baigné dans (le sang de) ses trahisons et autres fourberies, et ce 3e cycle ne devrait pas être en reste... Entre les alliances fragiles d'Arnor et ses tribus ours, loups et chiens, et la descendance du roi (Genkin) rentré au pays après ses années d'otage à Angleon, on sent bien que tout le monde évolue sur une glace des plus fragiles et qu'à tout moment cette souffreteuse harmonie peut voler en éclats. Côté dessin, toujours rien à redire, c'est toujours aussi efficace et agréable, les personnages anthropomorphes toujours aussi expressifs, décors et costumes finement travaillés : du bel ouvrage ! Alors maintenant, nous revoilà parti pour une longue attente entre chaque tome ! Car cette série reste des plus addictive quand on est plongé dedans ! *** Tome 14 *** Arf, bon, ba ce 2e tome de ce 3e cycle doit être le premier à me décevoir... J'étais déjà un peu moins enthousiaste avec le début de ce 3e cycle après les deux très bons premiers, mais je m'étais dit que c'était la mise en jambe, mais après avoir refermé ce 2e tome, j'avoue ne pas être fan de la trame qui s'annonce et de ses rivalités internes chez nos amis les ours, chiens et loups. Côté dessin, c'est aussi avec ces personnages que j'ai le plus de mal. Autant j'avais trouvé que les 2 premiers cycles géraient à merveille la distinction des personnages anthropomorphes, autant là j'ai trouvé parfois difficile de m'y retrouver, surtout chez les ours. Alors espérons que le prochain tome redonnera du peps à ce cycle, car malgré tout cela reste une très bonne série et cela serait dommage de commencer brasser de l'air après deux cycles des plus réussis.
Cyborgs
Tiens, une nouvelle série de Jean-Luc Istin... Ça faisait longtemps... Et encore une série concept de SF ? Mmmouais... Et ? Ba le sieur sait y faire et nous propose une nouvelle fois une série qui démarre sur les chapeaux de roue ! Installez-vous confortablement, sortez le pop-corn... C'est parti !!! Cette nouvelle série nous propose de suivre une équipe de personnages cyborg que nous allons découvrir au fil des tomes. Ce premier opus nous met sur le pas de la jeune Yuko, née avec un sévère handicap : elle n'a pas de bras (nann j'vous fait pas la blague sur le chocolat :P ). C'est avec celui qui l'a élevé, Akira, un maître en art martiaux qui forme la garde rapprochée du dictateur Tudor, que Yuko va grandir et apprendre à se battre. La novelle loi imposant l'euthanasie des personnes "imparfaites" va chambouler leur petit train-train et faire d'eux des fuyards avec une forte prime sur leur tête : tous les gangs de la mégalopole sont maintenant à leurs trousses... Franchement, je partais assez circonspect en attaquant ma lecture, redoutant une énième série du genre. Mais les auteurs sont bons... très bons ! Et on se retrouve vite happé par cette histoire, très rythmée, poussée par une narration survitaminée dans laquelle nos personnage charismatiques vont évoluer. Le dessin de Kael Ngu fait plus que le job, même si on est sur un trait relativement classique. En tout cas, voilà une nouvelle série B qui démarre plus que bien et nous promet de bons moments de lecture et de l'action à tout va ! Vivement la suite ! *** Tome 2 *** Lancé sur les chapeaux de roue, "Cyborgs" poursuit sur sa lancée et complète cette équipe de cyborgs féminins rebelles avec l'histoire de Sam. Gravement blessée suite à l'attentat qui a tué sa mère, Sam va devoir subir de lourdes opérations pour pouvoir remplacer jambes et bras. Et ce n'est que le début d'une looonngue période de rémission et d’acclimatation à ses nouveaux membres cybernétiques pour pouvoir parvenir à son objectif : la vengeance ! Car sa mère n'était pas n'importe qui ; elle était l'adversaire principale aux élections de Tudor, celui qui règne maintenant en dictateur... L'intrigue se poursuit donc en faisant toujours autant d'étincelles, tout en posant de nouveaux jalons et personnages intéressants. Entre les scènes d'action, les nouvelles révélations et des dialogues cinglants, on profite tranquillou du spectacle percutant qui nous est proposé, bien accrochés à notre pot de popcorn. Le dessin de Kael Ngu reste toujours aussi efficace et nous immerge parfaitement dans cet univers futuriste en gérant parfaitement les scènes d'action. Vivement la suite !
Squad
C'est le 2e album que je lis dans cette nouvelle collection "Wave" de chez Delcourt, et c'est encore une bonne surprise. Ciblée Young Adult, cette nouvelle collection joue à merveille sur des sujets très contemporains, tout en sachant aller piocher dans des registres beaucoup plus classiques, ici les loups-garous. La couverture est assez équivoque en ce sens, sans spoiler pour autant, restait à savoir comment cette touche de fantastique allait être intégrée dans notre monde contemporain et si ça tenait la route. Pour le coup, c'est plutôt réussi. Becca emménage à San Francisco et doit donc faire son entrée dans un nouveau lycée. Toujours dur de débarquer dans un nouvel établissement et de s'intégrer, surtout dans LA bande de copines les plus en vues du lycée. C'est pourtant ce qui va se passer suite à un concours de circonstance en apparence anodin... Mais bien évidemment, son intégration au groupe n'était pas fortuite et il va maintenant falloir en assumer le prix... Ajoutez à cela une très légère touche de romance très en phase avec notre temps et une utilisation de la lycanthropie ingénieuse dans notre monde moderne, et cet album se laisse avaler et digérer en une bouchée. Si le dessin de Lisa Sterle m'a un peu surpris au début par un aspect minimaliste, je l'ai trouvé très juste dans les expression des personnages. Grace au récit fluide découpé en chapitres on est rapidement pris par l'histoire qui tient ses promesses jusqu'au bout. Un bon album bien calibré qui colle parfaitement à cette nouvelle collection ; les amateurs du genre devraient se régaler !
Divine - Vie(s) de Sarah Bernhardt
Chacun de mes pas me rapproche de mon idéal ! - Ce tome constitue une biographie de Sarah Bernhardt (1844-1923). Son édition originale date de 2020. Il a été réalisé par Eddy Simon pour le scénario, et par Marie Avril pour les dessins et les couleurs. Il comprend cent-soixante-huit pages de bande dessinée. Il se termine avec une photographie de l’actrice, et un article de trois pages, intitulé Sarah Bernhardt chronologie, retraçant rapidement des moments emblématiques de la vie de l’actrice, agrémenté d’une petite photographie d’elle dans son rôle de Fedora. Ces auteurs ont également réalisé l’adaptation du roman de Saphia Azzedine : Confidences à Allah (2015). Acte I L’insoumise. En 1847, à la campagne, de part et d’autre d’une étroite rivière, son cousin incite Sarah à sauter par-dessus, en la houspillant, lui disant qu’il parie qu’elle n’osera jamais, parce qu’elle est une trouillarde de fille. De son côté, l’enfant se convainc elle-même qu’elle va y arriver, et elle finit par prendre son élan pour sauter. Un peu plus tard, Camille et Sarah se trouvent devant la mère du premier. Celle-ci exige qu’ils lui expliquent ce qui s’est passé. Sarah dit que c’est de la faute de son cousin si elle a les genoux écorchés et si ses habits sont sales, c’est Camille qui l’a provoquée. Sa tante la sermonne : Une jeune citadine ne doit pas se comporter comme une vulgaire campagnarde, ce n’est pas convenable ! Sarah rétorque vivement qu’elle recommencera quand même, si on la défie encore. Et elle fera toute sa vie ce qu’elle a envie de faire ! Quand même ! Le cinq janvier 1871, pendant le siège de Paris, Sarah Bernhardt travaille comme infirmière auprès des blessés. Alors qu’elle panse un soldat alité, une autre infirmière vient la chercher pour lui indiquer qu’un certain comte de Kératry qui se dit être le nouveau préfet de police demande à la voir. Pour sortir, elle traverse les différentes pièces du théâtre transformé en hôpital, tout en maugréant : Maudite engeance que la guerre… Une fois dehors, elle retrouve le préfet : Émile de Kératry. Celui-ci commente la cargaison de la charrette qui est en train d’être déchargée : Comme promis, même si cela ne s’est pas fait sans mal, voilà la livraison de vivres, vins, biscuits, café œufs… Sarah lui répond que cela devrait permettre de nourrir ses blessés pendant quelque temps, et elle demande les dernières nouvelles du front des horreurs. Il lui répond d’abord des banalités, puis à la demande de la jeune femme, il rentre dans le détail : En vérité la situation n’est guère brillante. Depuis la reddition de l’empereur, c’est la déroute : chaque jour, les troupes françaises battent en retraite et perdent du terrain sous la férocité des assauts de l’armée prussienne. Léon Gambetta et son gouvernement de défense nationale tentent bien d’organiser la résistance au nord de la Loire, mais la cause…. Semble bel et bien perdue ! Il conclut : Paris sera sans doute très bientôt une forteresse assiégée par les bataillons de Von Bismarck. Il suggère à Sarah de rejoindre sa famille en Normandie, personne ne l’en blâmera. Elle répond avec fougue : Jamais de la vie ! Dans l’inconscient collectif, Sarah Bernhardt est restée comme une actrice de légende, et pour ceux qui en ont déjà entendu parler, également comme une actrice ayant connu le succès aux États-Unis, ayant su faire fructifier son image, et étant enterrée au cimetière du Père-Lachaise. Les autrices font des choix dans leur approche biographique. De débuter par une courte scène de sa jeune enfance pour montrer un caractère bien trempé et une détermination en réaction à son cousin qui lui dit qu’elle est incapable de faire quelque chose : c’est sûr elle ne se laissera plus jamais dicter sa conduite, ou imposer des limites. Puis le récit passe de 1847 à 1871, en omettant une phase de la vie de Sarah, celle où la police des mœurs la classe parmi les dames galantes, où elle mène une vie de demi-mondaine entretenue par des clients généreux. Autre parti pris : évoquer plutôt sa vie privée que la pratique de son art, que ce soit son apprentissage ou ses performances. Pour autant, cette biographie montre comment cette dame mène sa vie, majoritairement sur le plan professionnel. En fonction de ses attentes, le lecteur peut se trouver quelque peu décontenancé par cette approche, surtout s’il venait pour une facette particulière telle sa vie mondaine, ou ses qualités d’actrice. D’un autre côté, il constate que le récit est d’une grande richesse, abordant de nombreuses facettes d’une vie particulièrement remplie, que ce soit en rencontres, en voyages, ou en entreprises professionnelles. Il n’y avait pas la place de tout mettre. Cette biographie est racontée du point de vue de l’intéressée, amenant ainsi le lecteur à prendre fait et cause pour elle, à pouvoir découvrir ses motivations, ses réactions émotionnelles, la conception et la réalisation de ses projets, ses convictions et comment elle les met en pratique. En effet, il s’agit d’une vie riche et dense. Bernhardt se dévoue comme infirmière pour les blessés du siège de Paris pendant la guerre franco-allemande de 1870. Elle ira jouer pour les poilus au parc de Commercy dans la Meuse le dix mai 1916. Elle se fera même emmener au plus près des tranchées alors que son nom figure sur la liste des otages que les Allemands veulent capturer. Elle fera plusieurs voyages, d’abord à Londres en 1878, puis à Louisville aux États-Unis, traversant les étendues sauvages en train. Là encore, le lecteur peut se trouver surpris que les autrices ne développent pas plus cette odyssée, tout en comprenant qu’il aurait fallu y consacrer un tome entier. Au cours de sa vie et de sa carrière, elle va rencontrer ou travailler avec de nombreuses personnalités : Léon Gambetta (1838-1882), Victor Hugo (1802-1885), Mounet -Sully (1841-1916, acteur de théâtre), Louise Abbema (1853-1927, peintre, graveuse, illustratrice, sculptrice), Oscar Wilde (1854-1900), Alfons Mucha (1861-1939), Edmond Rostand (1868-1918), sans même parler de ses amants ou d’autres auteurs de théâtre. L’illustration de couverture attire l’œil, mettant en avant le monde intérieur qui emplit l’esprit de cette créatrice. Puis le lecteur découvre celle en pleine page servant d’annonce de l’acte I, avec le titre L’insoumise. Il va ainsi admirer une douzaine, pour les trois actes, l’entracte, et des tableaux intermédiaires : L’insoumise, L’étoile, Memento Mori, L’indomptable, Barnum, L’aventurière, Fantasque, La muse, Je me quitte, L’impératrice, One of us. La dessinatrice reprend le principe des affiches pour une composition simple mettant en valeur l’actrice dans une situation exotique ou métaphorique, ce qui constitue un écho à la fois à ses rôles, à la fois à la phase de sa vie. Vient ensuite la première scène de narration séquentielle proprement dite : le lecteur découvre les traits de contours fins et fragiles, esquissant rapidement les formes, la représentation étant réalisée ensuite en couleur directe. Cela donne un ressenti assez complexe, entre simplicité des formes, évidence des situations, et nuances émotionnelles apportées par les couleurs. Le lecteur passe ainsi de l’insouciance teintée de l’intense gravité de l’enfance, à l’horreur des cadavres sur le champ de bataille enneigé, à des dialogues de personnages sur fond uni comme sur une scène sans décor. Les épisodes de la vie de Sarah Bernhardt se révèlent d’une grande richesse, au point que leur contenu en vient à éclipser le reste. Toutefois, s’il y prête attention, le lecteur voit que la dessinatrice met en œuvre de nombreuses techniques narratives variées, ce qui enrichit encore le récit. Quelques exemples : page neuf, une planche silencieuse, dans laquelle Sarah se regarde en passant dans un miroir, évoquant l’importance de son apparence pour son métier d’actrice. Page quatorze : le théâtre des opérations, la scène du théâtre se trouvant devant la scène de bataille. Les superbes paysages de montagne lors d’un voyage en train, une composition en double page de représentations théâtrales avec pour fond chaque livret faisant apparaître le titre et l’auteur, deux spectres semblant flotter autour de Sarah dans la rue par un temps brumeux pour évoquer l’incertitude de l’identité de son père, Sarah promenant son improbable ménagerie dans les rues de Londres, des coupures de presse retraçant les moments les plus improbables de sa première tournée aux États-Unis, un fac-similé d’affiche de Gismonda par Alfons Mucha, et quelques moments de représentations en particulier Bernhardt dans le costume de l’Aiglon pour la tirade de Flambeau. En fonction de sa familiarité avec la vie de l’actrice, le lecteur en découvre de belles. Il voit se dessiner le portrait d’une artiste ambitieuse. Il constate par l’intermédiaire de son succès et des louanges dressées par des personnalités de référence, que ses qualités d’actrice sont remarquables, voire exceptionnelles. Les autrices montrent un être humain animé par la passion du théâtre, veillant à rester indépendante, et maître de ses choix. En creux, apparaît sa capacité à faire sa promotion, par des décisions innovantes : le recours à la photographie, l’image choc comme dormir dans son cercueil, la présence d’esprit de s’attacher les services d’Alfons Mucha, et même l’apparition de produits dérivés, parfois initiés par elle, parfois par des profiteurs avec le sens du commerce. Elle apparaît comme une artiste faisant ses preuves dans des pièces de moindre importance, dans des classiques, puis dans des œuvres contemporaines, certaines engagées, implication qui se retrouve dans son soutien de Louise Michel (1830-1905) militante anarchiste, et du capitaine Alfred Dreyfus (1859-1935) accusé à tort d’être un espion au service de l’Empire allemand. Le point de vue narratif est intentionnellement partie prenante pour la Divine, sans regard critique : tout en étant conscient de ce choix, le lecteur éprouve une admiration pour une artiste aussi formidable dans son art, dans ses convictions, dans son énergie pour entreprendre, dans sa démesure. Quelle put bien être la vie de Sarah Bernhardt pour passer à la postérité ? Les autrices racontent une démarche artistique incroyable, une existence débordant de succès et de prises de risque, une vie personnelle tout aussi riche. La narration visuelle rend compte de cette diversité avec une élégance légère et pleine d’émotions. Les pages se tournent toutes seules, et le lecteur termine l’ouvrage surpris par la densité de ce qu’il a vécu. Tourbillonnant.
El Diablo
2.5 Un one-shot correct sans plus qui s'adresse surtout aux enfants. Je ne sais pas si comme avec Disney il y avait un gros cahier des charges, mais l'imagination de Trondheim est vraiment asphyxiée dans cet album. Les personnages et les situations sont tous du déjà vu. On dirait une bd parue dans une publication jeunesse comme il en sortait à la chaine à une époque ou encore un épisode quelconque d'un dessin animé. Cette histoire souffre aussi du gros défaut des aventures mettant en vedette le marsupilami : les humains ont plus d'importance dans le scénario que le marsupilami lui-même qui est mis en retrait et qui agit surtout comme un deus ex machina. Il était mieux comme compagnon turbulent de Spirou et Fantasio. Il reste le dessin de Nesme qui ressemble à un film d'animation qui est très bon quoique je ne suis pas un fan de son marsupilami.
La Belle & la Racaille
J'avais déjà vu passer des extraits de cette série en ligne (les premiers épisodes, en fait) et avoue avoir été suffisamment intriguée par la prémisse pour que je n'hésite pas à acheter le premier tome lorsque j'ai découvert que l'histoire venait d'arriver dans nos vertes contrées. La Belle & la Racaille, comme son nom français l'indique, est une histoire d'amour similaire au conte de La Belle et la Bête, remaniée ici façon éveil des sentiments amoureux en milieux scolaire (lycéen) entre deux personnes d'apparences très (trop) différentes. L'éponyme racaille s'appelle Atsuko, une loubarde à l'ancienne, une sécheuse de cours invétérée, une machine de guerre capable d'écraser n'importe quel crétin qui l'énerve au sol. La belle, quant à elle, s'appelle Kanzaki, une jeune fille tout ce qu'il y a de plus adorable, qui n'aurait aucun mal à être une fille très populaire si elle n'était pas constamment surexcitée et tête en l'air, nouvelle au bahut et qui va immédiatement s'enticher d'Atsuko à la consternation de cette dernière. Au début seulement, car progressivement, Atsuko elle aussi va énormément s'attacher à Kanzaki, les deux prenant grand plaisir à se retrouver, bien qu'aucune n'arrive vraiment à bien communiquer cet état de fait à l'autre. C'est un récit simple, qui ne révolutionne pas sa formule et ne se montre pas aussi fou dans son exécution que ce à quoi j'aurais pu m'attendre, mais le résultat est bon, maîtrisé. L'histoire fonctionne, on parvient à s'attacher à ces deux jeunes filles, à leur relation qui se crée petit à petit et à leurs difficultés à bêtement exprimer ce qu'elles ressentent à l'autre. L'œuvre brille aussi beaucoup par son dessin, très proche d'un style rétro (en tout cas similaire à celui d'artistes comme Naoko Takeuchi). Je trouve que le style graphique ajoute un joli cachet bienvenu dans cette série, c'est même lui qui avait attiré mon attention sur cette série il y a quelques années. Une série de romance lycéenne très mignonne.
Birdking
Dans un univers qui évoque celui des Dark Souls, peuplé de sinistres guerriers géants servant de champions à d'impitoyables seigneurs en guerre, les humains ne sont guère plus que de la piétaille sacrifiable. Bianca, jeune apprentie forgeronne, voit son destin basculer le jour où son maître et protecteur est tué. Elle découvre alors une part cachée de ses origines et décide de fuir l'empire sombre dans lequel elle a toujours vécu. Avec son maître, elle a forgé une épée magique capable de ranimer le Birdking, un ancien roi guerrier devenu son protecteur. Cette armure animée, que l'on pourrait croire vide, semble pourtant abriter une âme... Birdking s'inscrit dans une dark fantasy efficace, au rythme prenant, proche d'un bon feuilleton dont on veut connaître la suite. Le style graphique, moderne et accessible, rappelle celui de certains webcomics. Le trait, simple, pourrait faire penser à une série jeunesse, mais le ton reste sombre et l'ambiance oppressante. Si la technique montre quelques limites, l'auteur les compense habilement par l'intégration de mots dans les cases pour traduire l'émotion ou l'action, ce qui s'avère souvent utile pour la lisibilité de certaines scènes. On explore un monde implacable, où le manichéisme n'est qu'apparence tant le danger rôde à chaque coin de page et où les humains ne sont que des pièces d'un vaste jeu de pouvoir. Les références sont nombreuses, tirées à la fois du jeu vidéo et de l'animation, avec notamment un passage souterrain qui évoque clairement la Moria de Tolkien. L'intrigue débute de façon classique, mais la richesse de l'univers apporte la dose de mystère et d'originalité nécessaire pour captiver. Même si certains rebondissements sont prévisibles, l'histoire parvient à surprendre et à maintenir l'intérêt. Le rythme soutenu rend la lecture fluide et addictive. Après trois tomes, et en attendant un quatrième encore en préparation, j'ai clairement envie de poursuivre cette aventure.
Jukebox motel
Je me retrouve assez dans l’avis de Ro, même si je pense avoir moins apprécié que lui ma lecture de ce diptyque. Tout l’aspect graphique (dessin et colorisation), sans être hyper original, se révèle dynamique et agréable. Suffisamment plaisant en tout cas pour m’avoir poussé à aller jusqu’au bout, alors que certains détails m’avaient au départ plutôt rebuté. L’histoire est assez originale, faisant intervenir quelques personnages réels (Andy Warhol, Johnny Cash) dans une intrigue qui nous fait traverser une bonne partie de l’Amérique du Nord (Québec et New-York au départ, puis Californie ensuite). Les relations – amoureuses mais pas que – entretenues par le héros Thomas avec la femme qu’il aime sortent du commun, avec un « contrat » que Thomas aura du mal à accepter et respecter jusqu’au bout. C’est aussi un autre « contrat » qui lui posera problème, lui qui se voit contraint de peindre « à la chaine » pour un commanditaire qu’il n’apprécie pas. Les réflexions – hélas pas trop poussées – au sujet du marché de l’art, de l’inspiration, du lien entre créateur et marchand auraient mérité d’être plus creusées. Mais elles densifient une intrigue qui, sans cela, aurait été un peu creuse. Mais certaines choses m’ont un peu gêné. La rencontre avec Warhol, et surtout les valises de billets qui ont permis à Thomas de « vivre » sans aucune réelle contrainte durant presque deux ans, m’ont paru trop improbables, et ont faussé la vision que j’ai eue de l’histoire. De même, je n’ai pas vraiment compris le jeu du barman propriétaire de la grange du Juke Box Motel. Bref, pas désagréable, cette lecture m’a laissé un peu sur ma faim. Note réelle 2,5/5.
Mech Academy
J’ai emprunté les trois albums au CDI de mon collège, même si la série ne m’attirait pas forcément (je n’ai pas trouvé les couvertures très folichonnes !). Hélas, je n’ai pas accroché à cette histoire, qui je pense est clairement à réserver à un jeune lectorat (de collège donc), car ça ne passe pas la barrière de l’âge. Je n’ai apprécié ni le dessin ni la colorisation, que j’ai trouvés hésitants, manquant de nuances et de détails, voire un peu bâclés par endroit. Tout l’aspect graphique fait d’ailleurs bien plus que son âge, et ressemble à des animes manga du siècle précédent. L’histoire y ramène d’ailleurs aussi, au point que j’ai eu parfois l’impression de lire du nouveau Goldorak – même si ici les combats ont lieu quasi exclusivement au sol. Dialogues, scénario et personnages manquent vraiment de profondeur, de surprises. On baigne aussi trop dans les bons sentiments. Le coup du fils de la femme de ménage, forcément méprisé par la fille du général, qui devient par une suite de circonstances improbables son collègue dans la lutte contre de méchants envahisseurs – ressemblant à des crabes géants – est cousu de fils blancs. On se doute que ces personnages vont se rabibocher, et triompher collectivement au final. Le casting mêle des gamins de toutes les origines, la femme de ménage et son rejeton apportent la touche sociale, à croire que ce casting a été réalisé après une étude marketing. Enfin bref, le déroulé de l’intrigue ne m’a pas intéressé, et comme les autres aspects non plus, c’est sans enthousiasme, et en survolant le dernier tiers du troisième album, que j’ai fini la série, qui n’est clairement pas ma came.