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Par Présence
Note: 4/5
Couverture de la série Ragemoor
Ragemoor

Le mariage de E.A. Poe & H.P. Lovecraft - Il s'agit d'une histoire complète indépendante de toute autre, initialement publiée en 4 épisodes parus en 2012. le scénario est de Jan Strnad, et les illustrations en noir & blanc (et niveaux de gris) de Richard Corben. Ils avaient déjà collaboré sur d'autres histoires dans les années 1970 et 1980, comme par exemple Jeremy Brood et Les mille et une nuits. L'histoire se passe quelque part aux États-Unis, au dix-huitième ou dix neuvième siècle, dans une demeure en pierre imposante baptisée Ragemoor, bâtie sur un éperon rocheux, en bordure d'océan. Herbert, le maître de céans, accueille son oncle et sa fille Anoria. Au cours du repas, il les incite à partir séance tenante et de nuit, car la demeure est peu hospitalière. Il leur raconte les circonstances dans lesquelles elle a été érigée. Il insiste sur le fait que la nuit elle a tendance à se modifier d'elle-même en ajoutant une pièce supplémentaire, ou en allongeant un couloir. Les 2 hôtes ne sont guère impressionnés et ils décident de rester malgré l'avertissement. L'oncle demande des nouvelles de son frère Machlan, qui est aussi le père d'Herbert. Ce dernier explique qu'il a perdu la raison et qu'il erre dans les couloirs, qu'il disparaît des fois des jours durant. Anoria demande à Bodrick, le domestique ayant servi à table et les guidant vers leurs chambres, où se trouvent les autres serviteurs. Il répond qu'ils vaquent à leurs occupations et qu'ils n'auront pas l'occasion de les voir. Avec une entrée en la matière aussi convenue et classique, le lecteur n'attend pas grand-chose du récit. L'attrait principal réside dans l'identité de l'illustrateur : Richard Corben, dessinateur au style affirmé et très personnel, s'étant fait connaître en 1973 avec Den première époque et des histoires courtes pour Eerie et Creepy (rassemblées dans Eerie et Creepy présentent Richard Corben Volume 1 et volume 2). Dès la première page, tout le style de Corben saute aux yeux. Dans ce récit en noir & blanc, il utilise des aplats de noir pour donner du poids aux cases, et pour conserver l'inconnu qui se tapit dans ces zones inscrutables. Il utilise les niveaux de gris pour ajouter du volume aux surfaces, en particulier pour les visages, et la peau en général, avec une technique qui permet un dégradé très lissé, très progressive, parfaitement adapté à cet usage. Dès la première page, le lecteur peut également constater qu'il n'a pas perdu la main pour croquer des visages mémorables, aux expressions très parlantes. le visage fermé d'Herbert indique toute sa contrariété à devoir accueillir l'oncle et Anoria. Dans les pages suivantes le visage de l'oncle en dit long sur sa condition, son mode de vie et sa capacité à embellir la vérité. le visage parcheminé de Bodrick permet de ne jamais oublier son âge et sa condition sociale. Comme à son habitude, Corben mélange 2 registres représentatifs différents d'un personnage à l'autre et parfois dans la même case. Il en va ainsi par exemple pour Machlan (le père d'Herbert) et Anoria, la fille de l'oncle. le premier apparaît comme une silhouette vite esquissée avec laquelle Corben joue dans le registre de l'humour, alors que la seconde est détaillée et sublimée, comme elle apparaît aux yeux d'Herbert. En jouant sur ces 2 registres, l'artiste introduit une forme d'humour décalé et second degré qui indique au lecteur qu'il ne se prend pas au sérieux. Mais ce même humour en coin sert aussi de comparaison avec les éléments sérieux et premier degré pour mieux les faire ressortir. Tout l'art du dessinateur est de savoir doser ses effets afin de ne pas créer de dissonance visuelle, et Corben s'y entend à merveille. Il devient virtuose en mélangeant ces 2 techniques pour les monstres en forme de ver anthropomorphe, à la fois immondes et parodiques. du début à la fin, le lecteur peut se régaler d'illustrations mitonnées avec amour des pages savoureuses au premier et au deuxième degré. Il faut dire que le scénario joue sur ses forces graphiques. La scène d'ouverture laisse supposer que Jan Strnad va se contenter de piocher dans les atmosphères gothiques chères à Edgar Allan Poe (Histoires extraordinaires), en les mâtinant d'une couche d'horreur fantastique à la Howard Philips Lovecraft. Lui aussi maîtrise bien ses techniques et l'atmosphère est au rendez-vous, pour une situation très classique et peu originale. Mais les dessins transforment ces poncifs en des ambiances irrésistibles et ces séquences passent toutes seules, jusqu'à ce que… En fait Strnad pose les bases de son récit jusqu'à ce qu'il dispose de fondations assez solides pour l'emmener dans des territoires plus originaux, avec un récit bien ficelé, logique et qui tient la route. Il ne se contente pas d'évoquer le sentiment d'effroi de loin, il plonge les mains dans le cambouis pour concevoir toute la structure mythologique justifiant les particularités de Ragemoor (en seulement 4 épisodes). du coup le récit dépasse le simple exercice de style pour devenir une histoire consistante et très prenante. Jan Strnad et Richard Corben invoquent les mânes d'Edgar Allan Poe et Howard Philips Lovecraft pour un récit d'horreur à l'ancienne convainquant et non dénué d'un humour malicieux.

16/04/2024 (modifier)
Par Présence
Note: 2/5
Couverture de la série Vic & Blood
Vic & Blood

Banal - Ce tome regroupe les 3 histoires d'Harlan Hellison mettant en scène Vic et son chien Blood ("Eggsucker", "A boy and his dog", Run, Spot, run", à l'origine des nouvelles parues respectivement en 1977, 1969 et 1980), adaptées en bandes dessinées par Richard Corben, parues pour la première fois en 1987. Eggsucker (12 pages) - Dans cette courte histoire, le lecteur fait connaissance avec Vic (un adolescent) et Blood (un chien télépathe doué de conscience) et leur monde post apocalyptique, un peu après 2021. Vic a déniché quelques bouteilles de vin intactes dans des ruines et il se rend sur un bateau où un groupe de jeunes hommes effectue du troc, en l'occurrence de l'alcool contre des munitions. En chemin, Blood en profite pour faire réciter la liste des présidents américains à Vic, par ordre chronologique. A boy and his dog (36 pages) - Vic et Blood se sont mis d'accord pour se rendre dans une ville proche pour aller au cinéma. Il s'agit d'une ville en ruine où subsiste une petite communauté. Dans la salle, Blood flaire une femme humaine, une denrée rare dans cet environnement presqu'uniquement masculin. Vic se remémore pourquoi Blood dispose d'un odorat plus développé que celui des autres chiens. Ils attendent qu'elle quitte la salle pour la suivre, bien décidé à ce que Vic bénéficie de relations charnelles (consenties ou non). Run, Spot, run (13 pages) - Vic et Blood se retrouvent à nouveau en pleine zone sauvage avec des poches de radiation. Ils sont bientôt poursuivis par Fellini et son gang qui sont décidés à les tuer pour une raison peu claire. - Ces 3 histoires jouissent d'une réputation flatteuse du fait de leurs auteurs et du fait que la partie médiane a été adaptée en film A boy and his dog avec Don Johnson dans le rôle principal. Harlan Hellison est un écrivant de science-fiction à succès aux États-Unis, ayant également travaillé pour plusieurs séries télévisées telles que Star Trek, Au-delà du réel, La cinquième dimension, et Babylon 5. Richard Corben est surtout connu pour sa bande dessinée Den et sa participation aux magazines Creepy & Eerie. Dans un premier temps, l'admirateur de Richard Corben sera un peu déçu puisque pour commencer il n'a pas réalisé la mise en couleurs à l'aérographe comme il pouvait le faire pour ses propres histoires. Ensuite, son adaptation est assez platounette. Corben semble avoir adopté le parti d'être avant tout descriptif dans ses images. Il se met donc au service du récit pour dessiner avec application les paysages désolés, et les ruines, les cratères où subsistent des poches de radiations, le sol en terre informe, les amoncellements de débris de matériaux de constructions, les immeubles désertés avec des débris sur les sols des pièces, et la ville très proprette et années 1950 de la colonie souterraine. D'un coté il s'agit d'un travail soigné et appliqué ; de l'autre le lecteur ne retrouve pas la démesure et l'exagération propre à cet illustrateur. Il en va de même pour les personnages. Toujours au service des 3 nouvelles, Corben proscrit les morphologies qui l'ont rendu célèbre : homme bodybuildé au-delà du possible, femme à la poitrine énorme. Il dessine de jeunes adolescents filiformes pour être cohérent avec la rareté de la nourriture. La seule femme ayant un rôle important (Quilla June Holmes) dispose quand même d'une poitrine plantureuse qu'elle montre à Vic (et au lecteur en même temps) juste le temps d'une case. Il s'avère plus à l'aise pour définir des tenues vestimentaires variées et adaptées aux conditions de vie. Blood ressemble à un chien, sans disposer de postures ou de mouvements particulièrement élaborés. Les mises en pages reposent sagement sur des cases rectangulaires, ce qui n'empêche pas le découpage de chaque scène d'être très vivant. Difficile pour un lecteur des années 2000 de déterminer ce qui a pu rendre ces histoires inoubliables auprès des lecteurs de 1969 (date de parution de la première nouvelle "A boy and his dog"). Il est certain que la menace de la guerre atomique était plus présente dans l'inconscient collectif, d'où une plus grande résonnance de ce monde dévasté. Lorsque le jeune Vic détruit une paisible communauté figée dans années 1950 et refusant d'évoluer, il est vraisemblable que ce thème parlait plus à des lecteurs vivant l'éclosion de la contre-culture, de l'été de l'amour, etc. Aujourd'hui, ces péripéties ne constituent plus une attaque virulente contre l'ordre établi ; elles sont devenues des stéréotypes de ce genre de récit, largement dépassées en termes d'acidité, de refus de l'establishment, de violence, de crudité, de noirceur, et même de nihilisme. Aussi, avec le passage du temps, ces 3 histoires semblent un peu trop sages et convenues, avec un niveau de provocation et de rébellion trop basique. Or la psychologie n'est pas fortement développée : Vic est juste une incarnation d'une jeunesse débarrassée d'une tutelle adulte, obligé de subvenir par lui-même à ses besoins. Blood fait figure de compagnon plutôt générique, de gentil "ami imaginaire". La narration est linéaire (sauf pour l'explication des capacités télépathiques de Blood). La violence n'est pas graphique. Les coups de théâtre sont rares et amenés en douceur. Alors que le lecteur pouvait croire qu'il découvrirait une pépite rare et intense, il lit une histoire qui a perdu de son mordant et de sa virulence avec les années, sans que ce ne soit contrebalancé par des personnages forts ou une narration virtuose. Richard Corben évite de s'adonner à ses excès graphiques habituels pour ne pas phagocyter les histoires, et les illustrations deviennent trop sages. Il ne s'agit pas d'un ratage complet, mais ces histoires relèvent plus d'un témoignage d'une époque, que d'un récit classique ayant résisté à l'épreuve du temps.

16/04/2024 (modifier)
Par Présence
Note: 5/5 Coups de coeur du moment
Couverture de la série Starr le tueur
Starr le tueur

De retour dans les comics underground des années 1970, ou presque - Ce tome regroupe les 4 épisodes de la minisérie du même nom parue en 2009. Dans un pays moyenâgeux, un ménestrel d'une race indéterminée (mais pas de notre terre) raconte l'édifiante histoire de Starr en vers (en tout cas en phrases qui riment). Bizarrement son récit commence avec l'ascension vers la gloire d'un romancier de série Z bien de chez nous (enfin américain). Len Carson a créé Starr, un personnage d'heroic fantasy, barbare de base aux cheveux blonds et à l'épée tranchante. Grâce à sa création, il vend des palettes de livres et il fait la fortune de son éditeur. Il décide de changer de registre pour se lancer dans le roman sérieux et écrire un vrai roman américain qui fera date dans l'histoire de la littérature. La pauvreté est vite au rendez-vous. En parallèle le ménestrel raconte comment Starr a quitté sa cambrousse natale avec son père, son frère et sa sœur, comment il est arrivé à la civilisation (une petite ville avec un système féodal rudimentaire), comment il s'est rapidement retrouvé gladiateur dans l'arène et victime d'un sorcier dont il a malencontreusement tué le frère. Pour des raisons inconnues, Marvel avait décidé en 2009 de ressusciter 2 titres oubliés de tout le monde : Dominic Fortune et Starr the Slayer. Pour mon plus grand plaisir "Dominic Fortune" a bénéficié des talents d'Howard Chaykin, et "Starr" a le droit à un dessinateur encore plus culte : Richard Corben. C'est son nom qui m'a convaincu de me lancer dans la lecture de ce tome. Il faut dire que le personnage de Starr est encore plus obscur que celui de Dominic Fortune. Il s'agit à la base d'un comics écrit par Roy Thomas et dessiné par Barry Windsor Smith, paru pour la première fois en 1970. L'objectif pour Marvel était de voir comment répondrait le public à un comics à base de barbares et d'épées. le résultat ayant été concluant, Roy Thomas et Barry Windsor Smith furent ensuite associés pour lancer l'adaptation en comics de Conan avec le succès que l'on connaît. Pour avoir une idée de la prestation de Corben, il faut commencer par quelques mots sur le scénario. Il a été écrit par Daniel Way qui n'est pas réputé pour sa finesse. Pour autant, dans cette histoire, il fait preuve d'un second degré suffisant pour accompagner les illustrations parfois pince sans rire de Corben. le ménestrel donne le ton du récit : il ne raconte que pour pouvoir payer son loyer, il émaille sa chanson de quelques mots grossiers bien placés et en nombre restreint pour qu'ils gardent tout leur pouvoir. Il présente les événements avec une vision narquoise et légèrement cynique. Daniel Way prend le soin d'inclure tous les éléments propres à ce genre de récit : barbare musclé, épée tranchante, belle demoiselle pulpeuse, méchant sorcier, créatures horribles. Et il prend également soin de prendre le contrepied de certains de ces clichés : demoiselle physiquement plus forte et plus intelligente que le héros, barbare respectueux des lois de la civilisation, femmes entreprenantes au lieu d'être soumises et victimes, etc. Ce scénario est du pain béni pour Corben dont le style marie des éléments hyper réalistes avec des déformations cartoons. le vieux fan retrouve même par moment le Corben des années 1970 quand Starr écrase son poing dans la figure d'un citadin avec la chair qui cède, le sang qui gicle et le lettrage du bruitage limite artisanal. Corben renoue également avec les formes généreuses du corps humain. Son héros présente une musculature qu'aucun culturiste ne pourra jamais égaler, avec des veines saillantes sous l'effort. Les représentantes de la gente féminine disposent de courbes bien en chair (elles sont vraiment girondes) avec une musculature très efficace. Les 2 ou 3 monstres qui apparaissent constituent des croisements entre le règne animal et des déformations répugnantes. de la même manière les races humanoïdes doivent autant aux humains qu'à une imagination parfaitement maîtrisée qui les rend aussi bizarres qu'étranges grâce à un ou deux détails bien choisis. Comme toujours la connaissance anatomique de Corben décuple la force visuelle de chaque mouvement, de chaque blessure, de chaque exagération. Chaque coup porté avec force fait des ravages sur l'anatomie que les illustrations rendent parfaitement et le lecteur voit les dégâts, perçoit la douleur du corps abimé comme rarement dans les comics. Il manque quand même 2 éléments pour que le niveau de provocation des années 1970 soit atteint. le premier est évident : même sous la bannière Max de Marvel, il n'est pas question de montrer des corps nus de front. le deuxième élément que seuls les lecteurs de Den ou Jeremy Brood ou autre décèleront : Richard Corben n'a pas réalisé la mise en couleurs. José Villarrubia réalise un travail de bon niveau, mais qui n'a ni la saveur, ni l'intensité, ni la subtilité des couleurs du maître. "Starr the slayer" constitue un bon défouloir avec quelques touches de second degré et de dérision servi par les illustrations toujours aussi délicieuses de Richard Corben.

16/04/2024 (modifier)
Par Pierig
Note: 2/5
Couverture de la série Diamants vengeurs
Diamants vengeurs

Cet album de la collection Atomium vaut surtout le détour pour le trait semi-réaliste de Luc Cornillon. Si il est encore perfectible, j'ai été séduit par ses créatures marines, sortes de stranger thing tout droit sorti d'un comics. Côté récit, le format de la collection impose la brièveté. Mais ici, c'est clairement trop juste. Le manque de développement donne l'impression de survoler une histoire qui sent le déjà-vu. La recherche du butin du troisième Reich n'est pas franchement novateur et le traitement qui en est fait est décevant. Reste un final qui rattrape la sauce d'un rôti un peu trop cuit.

16/04/2024 (modifier)
Par Pierig
Note: 3/5
Couverture de la série Pinocchio (Foerster)
Pinocchio (Foerster)

J'ai lu cette bd dans la collection Atomium publiée par Atomic Strip en 1983. Pour le coup, l'histoire de Pinocchio est complètement revisitée. Comme souligné ci-avant, ce conte s'apparente plus à celui de Frankenstein. Il n'est point ici question de petit garçon désobéissant mais plutôt d'un monstre sans états d'âme. La noirceur du récit est renforcée par l'issue inéluctable qui se profile. Foerster propose un récit sombre et violent mais où rien est gratuit. En effet, le montre Pinocchio est enfanté par le rejet et la méchanceté des villageois envers la lilliputienne. La violence appelle la violence ... et cela ne peut que se finir tragiquement. Finalement, on récolte ce que l'on sème. Récit court, comme tous ceux de la collection Atomium, mais rehaussé du trait de Foerster. A lire si l'occasion se présente ...

16/04/2024 (modifier)
Par Bruno :)
Note: 3/5
Couverture de la série Neon Genesis Evangelion
Neon Genesis Evangelion

Je n'en ai lu que huit épisodes, n'ayant pas été convaincu par la pertinence de la version papier de cet ovni dramatico-Goldoresque qui, sous sa forme originelle d'Animé, m'a pourtant obsédé et fasciné pendant assez longtemps pour se détacher plutôt nettement sur l'ensemble de mes coups de cœurs d'adulte pour une histoire de S.F. Obsédé par la mise en scène du sujet, si originalement exposé via des ellipses narratives privilégiant l'intime plutôt que l'action : épisodes riches d'intérêts et extrêmement bien présentés, sinon complètement inédits dans le genre ; et imposés autant par les choix artistiques des auteurs que par les circonstances plus prosaïques de la production de la série télévisée. Les nombreux plans fixes, si économiques (!), demeurent l'une des exploitations les plus réussies -et les plus culottés !- d'une contrainte budgétaire dans le genre du dessin animé ; et jouent énormément dans la spécificité du rythme et son unicité si puissante. Fasciné par l'esthétique de l'ensemble, aussi surprenante et déroutante qu'elle semble pour les visages des personnages (pour un spectateur occasionnel du médium Nippon) que séduisante et franchement nouvelle (à l'époque) pour tout ce qui concerne le design, Mécha & Plug-Suit en tête ; et, bien sûr, nos gros Anges, autant belliqueux qu'improbables, bien souvent... La bonne nouvelle, c'est que le Chara-designer de la série Télé assume la partie graphique du Manga imprimé, et le résultat est très réussi : l'élégance de son encrage (ces incroyables courbes "en creux" ?!) si délicat nous permet d'admirer ses réalisations en prenant tout notre temps et, même si cela change un peu radicalement le ton du récit en comparaison de l'Animé, les personnages bénéficient tous d'une palette bien plus étendue quant au rendu de leurs expressions. Du très beau travail qui ne peut que ravir le fan original. Les couvertures, magnifiques, font vraiment regretter le format : heureusement, il y a les Art-Books ! Là où l'approche est un peu plus délicate, c'est que ce médium-ci offre d'avantage de "temporalité" au récit et, fatalement, l'auteur s'en sert pour essayer d'enrichir ses scènes ; notamment au travers de nombreux dialogues qui, non seulement exposent bien trop "l'action" en cours (classique pour un Manga, dont la traduction est souvent très littérale...) mais, surtout, tendent à transformer un peu-beaucoup la perception que l'on a des héros ; quitte à les éloigner assez radicalement de leur incarnation originelle. Le procédé est, de mon point de vue, dommageable aux relations entretenues par ces derniers (alors qu'elles sont si subtilement exposées dans l'Animé) et, à mon grand regret, définitivement fatal pour Shinji et Rei. Incroyablement bavards (un comble pour cette dernière !), deux des principaux personnages s'en trouvent carrément transformés et, dans le cas de Shinji, la métamorphose est plutôt rédhibitoire : l'adolescent inhibé/dépressif, mais pourtant concerné et hyper-sensible, devient ainsi une sorte de provocateur passif/agressif moyennement sympathique dont les réactions sont beaucoup moins faciles à suivre. L'histoire en elle-même s'éloigne de l'atmosphère expérimentale/psychologique originelle en essayant d’approfondir l'intrigue S.F. constituée par l'existence des Anges ; mais le fourre-tout (flou !) du sujet semble trop vaste pour fédérer d'avantage qu'une simple curiosité passagère -et ça demeure quand même très racoleur côté dramaturgie (la face de gâteau d'anniversaire de Kaworu et le régime si spécial de Gendo...!) sans amener plus d'éclaircissements que la série Télé qui, au demeurant et étant donnée sa fin abrégée complètement surréaliste mais particulièrement raccord avec la volonté très anticonformiste de ses auteurs, se suffisait finalement à elle-même. Un travail de qualité, néanmoins : pour les aficionados collectionneurs.

16/04/2024 (modifier)
Couverture de la série Bowie
Bowie

Une biographie de plus, serais-je tenté de dire. Celle-ci se focalise sur les débuts de David Bowie, les années de galères puis le succès rencontré avec Ziggy Stardust and the Spiders from Mars. A titre personnel, j'en sors peu emballé. En cause principalement, les nombreuses planches qui s'enchainent avec pour seuls textes l'évocation d'une anecdote des plus secondaires (David Bowie a un accident de voiture, tout le monde s'en sort indemne), les dates et lieux de concert (10 juillet, Rainbow Theatre) ou les différents costumes de scène du groupe. En fait, hormis l'aspect graphique qui permet d'illustrer brillamment l'esthétique glam dans toute son exubérance, j'ai trouvé cette biographie extrêmement pauvre. Elle ne parvient en tous les cas pas à me faire comprendre les raisons du succès de Bowie, l'originalité de l'artiste, son talent, son génie musical. Là, si je n'était pas amateur du musicien par ailleurs, j'aurais le sentiment que son seul talent, c'est son look extravagant. Donc voilà, lue d'un œil de plus en plus distrait au fur et à mesure que les planches défilaient, cette biographie n'aura pas réussi à m'apporter ce que j'en attendais. Reste l'aspect visuel avec cette mise en avant de l'exubérance glam, de ses paillettes, ses coupes de cheveux improbables et ses excès en tous genres. Bof pour ma part.

16/04/2024 (modifier)
Couverture de la série Motörhead - La Naissance du groupe le plus bruyant du monde
Motörhead - La Naissance du groupe le plus bruyant du monde

Qui n'a jamais entendu parler de Lemmy Kilmister et de son groupe emblématique, Motörhead ? Que l'on en soit fan ou pas, il s'agit là d'un groupe incontournable qui, par son approche et sa sincérité, a influencé un nombre impressionnant de musiciens de la scène rock. Cet album se consacre à la première partie de la carrière de Lemmy Kilmister et se clôture alors que Motörhead commence seulement à connaitre le succès. Plus qu'une biographie analytique, il s'applique surtout à nous dévoiler la caractère hautement sex, drugs & rock'n'roll de Lemmy et de ses compagnons. C'est d'ailleurs Lemmy Kilmister (du moins son personnages dans le comics) qui se charge de la narration, revenant sur les principales étapes de sa jeunesse et de ses débuts comme roadie puis musicien. Si sa sincérité, le respect qu'il affichait tant pour son public que pour ses roadies, et sa rage de réussir sont admirables, on ne peut cependant pas dire que le personnage ressorte grandi de cet album. Ses excès, la manière dont il considérait les femmes (juste du sexe, pas d'attaches), son comportement au quotidien en font un symbole de la face sombre des rockeurs. La mise en image privilégie les grandes illustrations. Le dessin (réalisé par une équipe de dessinateurs et de coloristes) est très homogène et de bonne qualité. On reconnait assez aisément les différents protagonistes et les décors nous replongent bien dans une époque et les lieux visités. Pas mal, en résumé. un peu léger pour que je monte ma note un cran plus haut mais il s'agit d'une évocation assez réussie de l'état d'esprit général de Lemmy Kilmister et de ses galères des premières années. Si vous ne connaissez pas le personnage, c'est une bonne première approche (à compléter avec une écoute de quelques uns de ses titres emblématiques).

16/04/2024 (modifier)
Couverture de la série Bukowski - De liqueur et d’encre
Bukowski - De liqueur et d’encre

Alcoolique, violent, provocateur, machiste, Charles Bukowski a tout du poète maudit et détestable. La gageure pour les auteurs de cette biographie était de nous le rendre intéressant sans cacher ses excès. Et ils y parviennent parfaitement ! A un point tel qu'ils m'ont donné l'envie de lire l'une ou l'autre œuvre de Bukowski (et ça, pour moi, c'est la preuve que le but est atteint). Nous avons pourtant droit à une biographie on ne peut plus conventionnelle. Elle revient dans un ordre chronologique sur le parcours de l'artiste et sa seule originalité est d'être écrite à la première personne. Mais c'est justement en procédant de la sorte que les auteurs parviennent à humaniser ce personnage. Bukowski, battu par son père, addict à l'alcool au plus haut point, obsédé par le sexe et multipliant les conquêtes, enchainant les petits boulots dans l'unique but de récolter suffisamment d'argent pour se saouler un jour de plus. Mais aussi Bukowski galérant dans son ambition d'écrivain, travaillant d'arrache-pied, constamment insatisfait de ses écrits, Bukowski convaincu qu'il fallait souffrir pour bien écrire, et qu'il fallait avoir souffert pour avoir quelque chose à dire. Les réflexions amères succèdent aux punch-lines violentes, cette narration en voix off porte le récit, bien soutenue par un dessin soigné dans un style réaliste tout à fait adéquat. Les auteurs (italiens) livrent une partition sans fausse note au travers de laquelle l'arrogance désespérée, l'irrévérence et les provocations de l'homme finissent par dévoiler la fragilité de l'écrivain. Le portrait de l'écrivain devient fascinant alors même que l'homme est détestable par plus d'un aspect... mais touchant par d'autres. C'est le portrait d'un être brisé et amer pour qui l'alcool est le seul refuge face à son dégoût du monde et de lui-même. La narration, le dessin, le découpage, les petits documentaires insérés : tout est vraiment d'une belle qualité. J'ai dévoré et j'ai adoré. Franchement bien !!

16/04/2024 (modifier)
Par gruizzli
Note: 3/5
Couverture de la série Ogres
Ogres

Sympathique histoire, très blockbuster dans son style, qui joue dans un cadre très classique de fantasy. Disons que ça ne vole pas plus haut que ça mais que ça ne descend jamais dans les abysses non plus. L'histoire est intéressante, pourvue de quelques rebondissements sympathiques et d'une trame qui se déroule jusqu'à un final attendu mais efficace. Il y a de l'action, de l'humour, des jeux de mots sympathiques, quelques passages qui m'ont bien amusés, un zeste d'érotisme parce qu'on reste chez Soleil, et puis l'ensemble se tient. Je ne dirais pas que c'est formidable mais ce n'est clairement pas honteux. On passe un bon moment dans l'histoire, on en sort amusé et divertit, mais sans aucun réel plus. Je pense que ce n'est pas le genre d'histoire qui attends autre chose que ce pur moment de divertissement. Le dessin est sympathique et je reconnais une certaine patte au dessinateur. Il s'est fait efficace dans la narration, mais j'ai parfois eu l'impression qu'il s'est limité à un gaufrier traditionnel qui ne permets pas de réellement laisser libre cours à son inventivité. En somme, une bonne série de divertissement, pas recommandée mais qui saura divertir son public.

16/04/2024 (modifier)