Mon ami Dahmer (My friend Dahmer)

Angoulême 2014 : Prix Révélation ex-aequo. L'auteur nous raconte son "amitié" étrange avec Jeffrey Dahmer qu'il a fréquenté au collège puis perdu de vue jusque 1991, année où fût arrêté le cannibale de Milwaukee, l'un des pires serial killer de l'histoire des USA.
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Derf Backderf a passé son enfance à Richfield, petite ville de l’Ohio située non loin de Cleveland. En 1972, il entre au collège, où il fait la connaissance de Jeffrey Dahmer, un enfant solitaire au comportement un peu étrange. Les deux ados se lient d’amitié et font leur scolarité ensemble jusqu’à la fin du lycée. Jeffrey Dahmer deviendra par la suite l’un des pires serial killers de l’histoire des États-Unis. Son premier crime a lieu à l’été 1978, tout juste deux mois après la fin de leur année de terminale. Il sera suivi d’une série de seize meurtres commis entre 1987 et 1991. Arrêté en 1991, puis condamné à 957 ans de prison, Dahmer finira assassiné dans sa cellule en 1994. Mon Ami Dahmer est donc l’histoire de la jeunesse de ce tueur, à travers les yeux de l’un de ses camarades de classe. Précis et très documenté, le récit de Derf Backderf (journaliste de formation) décrit la personnalité décalée de Dahmer qui amuse les autres ados de cette banlieue déshumanisée typique de l’Amérique des années 1970. Dahmer enfant vit dans un monde à part, ses parent le délaissent, il est submergé par des pulsions morbides, fasciné par les animaux morts et mortifié par son attirance pour les hommes. Personnage fascinant, voire attachant car presque victime de son environnement, Dahmer vit une implacable descente aux enfers vers une folie irréversible. Derf Backderf John « Derf » Backderf est né en 1959 à Richfield, une petite ville de l’Ohio où il passera toute son enfance. Après un bref passage dans une école d’art, il retourne chez lui et travaille comme éboueur, avant de recevoir une bourse pour L’université de l’Ohio, où il suivra un cursus en journalisme tout en réalisant des illustrations pour le journal local. Une fois diplômé, il devient journaliste pour un quotidien de Floride, puis abandonne cette carrière pour se lancer dans la réalisation d’un strip, The City, qui durera vingt-deux ans et sera publiés dans plus de 50 hebdomadaires américains. Son précédent roman graphique, Punk Rock & Trailer Parks, a été consacré comme l’un des meilleurs romans graphiques de 2010 par Booklist. Il a commencé à travailler sur la réalisation de Mon ami Dahmer en 1994 ; le livre sera finalement terminé en 2011 et publié en 2012 aux États-Unis. Derf Backderf a été nominés pour deux Eisner Awards et a reçu de très nombreuses récompenses pour son travail de dessinateur de presse, dont le prestigieux Robert F. Kennedy Journalism Award du dessin politique en 2006. Il vit à Cleveland (Ohio) avec sa femme Sheryl Harris (journaliste lauréate du Prix Pulitzer) et leurs deux enfants. « Journaliste de formation, Backderf a épluché les dossiers du FBI et est revenu sur place pour interroger d’anciens profs et camarades de classe. Empathique, mais jamais complaisant, dérangeant, mais nécessaire, son récit - porté par un dessin évoquant subtilement le graphisme underground des années 1970 - plonge dans les limbes de la folie humaine. » Le Monde « Entre recherche documentée et souvenirs personnels, la BD »Mon ami Dahmer« est intrigante, déroutante, et dérangeante aussi, car si l’auteur ne pardonne pas au tueur, ces 200 et quelques pages remarquables exhalent la tristesse, un remord latent, un intense sentiment de gâchis et cette irréductible incompréhension face à la noirceur d’un esprit familier, dans laquelle, pâlotte, miroite une lueur d’humanité accordée à rebours. » Radio Nova « L’un des livres les plus effrayants et les plus dérangeants de l’année. » Time « Un très bon livre qui revient sur les origines du tueur en série putride que fut Jeffrey Dahmer. Plongez-vous dedans - il vous laissera sur le carreau. » James Ellroy « A small, dark classic » Publishers Weekly « Mon ami Dahmer est un authentique chef d’œuvre » extrait de la préface de Stéphane Bourgoin (auteur du Livre noir des serial killers )
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Date de parution | 22 Février 2013 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis


Après avoir énormément apprécié la série sur Jeff Dahmer (Netflix), je me suis penché sur ce comics et je les trouve complémentaires pour tenter d'explorer la psyché de ce serial killer. Je note des différences d'interprétations sur certains faits (le joggeur, le contrôle de police ....). Un album sur la jeunesse de Dahmer basé sur les souvenirs de l'auteur avec qui il a partagé ses années lycée. On ne peut pas dire que Backderf soit un intime de Dahmer, ils ont partagé des cours et quelques loisirs ensembles. Un récit qui fait froid dans le dos, un gamin qui inexorablement va basculer dans la démence. Un enfant sans amis, des parents qui vont divorcer, mais cela est-il suffisant pour en faire un tueur en série ? Les crimes qu'il commettra plus tard sont d'une incroyable cruauté. Mais cette bd s'arrête après son premier meurtre en 1978. Une narration qui nous fait partager son mal-être, l'impossibilité de s'intégrer. Un Jeffrey qui dès le début interpelle. Alors même si j'ai passé un excellent moment de lecture, la comparaison avec la série joue contre elle. Elle manque d'une véritable dimension dramatique. Graphiquement, un noir et blanc nerveux et esthétique. Des visages rectangulaires expressifs qui donnent un ton décalé. Un homme qui fera parler de lui en 1991. Note réelle : 3,5.


Jeffrey Dahmer est surnommé « le cannibale de Milwaukee » ! C’est un tueur en série américain qui a avoué avoir assassiné 17 jeunes hommes entre 1978 et 1991. Ces meurtres comportaient des viols, des démembrements, de la nécrophilie et du cannibalisme ! Voilà pour le CV du personnage. Le bilan comptable est impressionnant. L’auteur de cet album, Derf Backderf raconte la jeunesse de ce tueur sanguinaire hors du commun. Ben oui, Jeffrey a été son camarade d’école. Il se souvient que ce dernier était un adolescent timide, solitaire et alcoolique, un brin bizarre … Pour réaliser ce récit, Derf s’est remémoré bien évidement ses souvenirs mais il s’est appuyé également sur de nombreux témoignages afin de restituer l’entourage familiale et scolaire particulièrement anxiogène de Dahmer, tout en restant factuel, sans travestir cette période partagée. Pas de jugement. Pas de critique. Pas de censure. Juste des faits, des anecdotes, pour peut-être expliquer le pire. La frontière entre l’aliénation et la normalité est très mince. Cela fait froid dans le dos. Au-delà du récit, quelques remarques. Tout d’abord le titre est incongru. Derf n’a jamais été pote avec Dahmer. Ils fréquentaient les mêmes classes. Point barre. Derf côtoyait Dahmer. Dahmer n’avait pas d’amis. Il était seul, invisible aux yeux des autres. Il était une sorte d’attraction quand il feintait des crises d’épilepsie. Côté graphisme, c’est bof. C’est trop figé. Visuellement rien de bien fou fou mais cela reste efficace. Mais là n’est pas le problème. Le témoignage de Derf sur la naissance d’un tueur en série est remarquable. C’est bien écrit et bien documenté. A découvrir même si les frissons vont parcourir votre corps. Jeffrey Dahmer a été condamné à 957 ans de prison. Il est mort assassiné en 1994, battu à mort par un autre prisonnier.


Damer la mort. « Le cannibale de Milwaukee » Jeffrey Dahmer (1960-1994), avant de s’imposer comme un des pires tueurs en série américains eut aussi un passé trouble qu’un ancien camarade de lycée, John Backderf, relate avec tact à travers une bande dessinée documentée. « J’avais des amis normaux au lycée » dira Dahmer après son arrestation. Derf Backderf va se focaliser sur les trois années de lycée engluées dans l’âge ingrat de l’adolescence. Si Jeff Dahmer est accepté dans le petit cercle d’amis lycéens, il n’en est pas pour autant totalement intégré. Sa solitude et son mutisme inquiètent. Ses imitations de paralysé cérébral médusent. Son alcoolisme rebute. Conçue en cinq parties équilibrées, la dernière, « Fondu au noir » étant particulièrement frappante avec son parti-pris graphique percutant, l’histoire de Dahmer, véritable roman graphique, déroule une narration fluide, cohérente et implacable. En présentant et commentant ses sources, l’auteur crédibilise une entreprise à haut risque, celle de cautionner, d’excuser ou d’amoindrir un comportement monstrueux et létal. Avec son dessin à la limite de la caricature, l’auteur crée une distanciation et les personnages, rigides et monolithiques n’en prennent que plus de relief et se chargent encore davantage d’une inquiétante étrangeté.


J'avais déjà lu cette Bd il y a des années, lors de sa sortie, mais rapidement dans les rayons d'un magasin. C'est avec la rencontre de Derf Backderf à Angoulême cette année que je l'ai enfin achetée, avec la possibilité de la lire tranquillement et d'apprécier pleinement ce roman graphique glaçant d'effroi. Derf Backderf a réussi là un coup de génie, faisant de son roman graphique une petite merveille, le public l'ayant d'ailleurs largement plébiscité pour celle-ci. Naviguant adroitement entre le récit d'adolescence, le roman graphique, la description de la jeunesse d'un tueur et les considérations sociétales, Derf Backderf livre un tableau de sa jeunesse assez complet. Ce n'est ni parfait ni imparfait, c'est. Le récit construit petit à petit les soucis de la vie de Jeffrey Dahmer, tout en parlant de la jeunesse de l'auteur. Le mélange évite de faire un unique portrait de l'assassin ou un récit qui en serait trop détaché. Et par la mise en relation des deux vies, on se rend compte de tout ce qui se passa mal pour Jeffrey Dahmer. Aurait-on pu éviter cela ? Ou plutôt : comment cela fut-il possible, avec tout ce qui eut lieu déjà dans l'adolescence ? L'auteur évite cependant l'écueil du récit compatissant, expliquant d'ailleurs que l'on peut prendre Jeffrey Dahmer en pitié, mais pas en compassion. Qu'il aurait pu faire le choix de ne pas tuer, de ne pas le faire, mais qu'il céda. Et les explications à la fin du livre renforcent l'avis de l'auteur qui tient à bien marquer la distance qu'il garde avec le criminel, s'attardant uniquement sur un jeune homme étrange qu'il aura côtoyé dans sa vie. Le dessin de Derf Backderf est très carré, avec ses traits toujours droits et ses angles en tout sens, mais il a un côté à la fois cartoonesque proche de la caricature de journal et une précision qui se marie avec le ton du récit. Et surtout, cela renforce d'autant plus les passages glaçants d'effroi, avec cette représentation qui semble parfois figée mais qui représente la façon étrange de se tenir du jeune homme. On ressent dans l'attitude et la représentation tous les soucis qui hantèrent la vie de ce jeune homme. D'autre part, le dessin ajoute le comique de situation dans cette vie de jeunes ados qui s'amusent innocemment, inconscients de ce qui peut se jouer autour d'eux. Mine de rien, ce récit est aussi une belle représentation de l'innocence de la jeunesse, de l'insouciance de la vie dans ces années là pour ceux qui sont bien nés. Le récit porte le ton rafraîchissant d'une jeunesse libre, jusqu'à se rendre compte que tout ceci peut être plus grave. Que de drames peuvent se jouer à l'adolescence, et que les conséquences peuvent en être fatales. C'est un récit intelligent et bien narré, qui pose un propos pluriel et accrocheur. Je l'ai déjà relu plusieurs fois, et j'ai encore une fois l'impression de découvrir de nouvelles choses à chaque lecture. Un véritable succès amplement mérité.


Ne connaissant pas encore l'oeuvre à l'excellente réputation de Derf Backderf - l'aborder sous l'angle de son plus célèbre ouvrage, "Mon Ami Dahmer" (qui m'a été offert par un ami qui a très bon goût...), avait tout d'une évidence, pour moi, qui suis fan d'une certaine école "classique" du comics façon Crumb. Le graphisme de Backderf désoriente tout d'abord, avec cette "rectangularité" des visages et des corps, dont on craint qu'elle ne prive le livre de ces émotions qu'on associe plutôt à une certaine liberté des formes... Et puis on s'habitue, et on est surpris au contraire devant la subtilité des sentiments qui naissent, au détour de scènes remarquables par leur construction (... très cinématographiques, il est vrai, mais c'est désormais presque incontournable dans la BD, tant le cinéma est devenu la manière "normale" de raconter des histoires. On pourrait d'ailleurs réfléchir à la façon dont les "livres en images" originels sont devenus des "films dessinés" !). La simplicité apparente des cases et de leur enchaînement crée ainsi, plus on avance dans le livre, une impression de trouble, puis de vertige existentiel, qui contribuent beaucoup à la force de l'histoire racontée. Et cette histoire, ce n'est évidemment pas rien, puisqu'il s'agit de narrer ici l'enfance d'un serial killer célèbre et monstrueux, vue par ceux qui l'ont côtoyé durant ses années de collèges. Logiquement, le récit est extrêmement précis et bien documenté, puisque Backderf n'a pas seulement fait confiance à sa propre mémoire, mais il a conduit une enquête approfondie avant de nous livrer ce qui a tout de "l'oeuvre d'une vie". "Mon ami Dahmer" se présente comme l'analyse des éléments qui ont pu amener à un tel Dérapage d'un adolescent - dont les circonstances étaient certes difficiles (parents en crise, puis plongés dans un divorce haineux, désirs homosexuels inexprimables dans la société de l'époque...), mais pas forcément si différentes de millions d'autres. Néanmoins, l'aspect le plus intéressant du livre réside dans la cécité manifeste de tous par rapport aux comportements de plus en plus alarmants d'une personne qu'ils côtoyaient quotidiennement. Ce "Comment est-il possible qu'ILS n'aient rien vus ?" devient, inévitablement sans doute, un fascinant "Comment est-il possible que JE n'ai rien vu ?", voire un "... que je n'ai rien FAIT ?", forcément angoissant. Bien sûr, Dahmer n'a jamais été vraiment un "AMI" de Backderf, juste un sujet de plaisanterie, abandonné sans un seul regard dès qu'il est devenu trop encombrant, trop dérangeant, trop incompréhensible. Et il est clair en lisant le livre que ce qui en constitue le "point aveugle" et en même temps la "pierre de touche", c'est la question de la responsabilité, voire la culpabilité à la fois générale (de l'école, des enseignants, des voisins, etc. ) et individuelle. La coupable indifférence de Backderf lui-même, vis à vis d'un être en perdition, qu'il "ose" qualifier en titre de son livre de son "ami Dahmer"... C'est bien pour se libérer de tout cela que Backderf a dû écrire ce livre, qui lui a pris une bonne partie de sa vie adulte. Pas sûr pourtant qu'il ait réussi à chasser ses démons. Ni qu'il ait réussi à s'avouer à lui-même la nature de son trouble.

Une découverte géniale ce Derf Backderf ! J'ai adoré son style de dessin d'ado de lycée qui se révèle en fait super précis. Les histoires des 3 volumes sont excellentes, l'Amérique profonde, des types ordinaires dans des vies ordinaires, mais racontées et dessinées de façon extraordinaire ! Une des meilleures séries BD indépendante que j'ai lue depuis longtemps. J'attends avec impatience le prochain opus.

Alors, nous y voilà, que dire, ai-je assez d'adjectifs dans mon vocabulaire pour décrire et donner mon avis sur cet ouvrage de mon ami Backderf ? Dieu soit loué, le journaliste s'est mué en dessinateur et scénariste de grand grand talent. Est-ce vraiment une BD ? Moi j'ai plutôt eu l'impression de lire un dessin animé. Dès les premières images, dès les premières vignettes, on est conquis. Le scénario est accrocheur surtout que l'auteur a fréquenté ce futur monstre, qu'il rend humain et limite attachant. Cet opus m'a bien entendu donné envie de lire ses 2 autres ouvrages qui sont tout aussi cultes. Bref vous aurez compris, j'adore. Je vous conseille de claquer votre argent dans ce bouquin, plutôt que de faire plaisir à votre gosse, votre douce ou de le dépenser dans des clopes, mais ça c'est juste mon avis de "backderphile".


Mon ami Dahmer est un mélange assez novateur entre autobiographie et documentaire/enquête journalistique. Il faut dire que ça doit faire quelque chose d'apprendre qu'un adolescent qu'on a côtoyé pendant toute sa jeunesse est devenu ensuite un tueur en série. Et quand on a les moyens de raconter cela par la bande dessinée, comme c'est le cas de Derf Backderf, on a là un intéressant sujet de récit tout trouvé. C'est donc ainsi que l'auteur a effectué une enquête approfondie en interrogeant des proches, lisant et regardant des reportages, rapports d'enquêtes et interviews sur le sujet, recoupant les informations avec ses propres souvenirs. Cela donne un récit qui ressemble à la fois à une autobiographie de l'auteur quand il était collégien puis lycéen, et à la biographie de ce fameux Jeff Dahmer même s'il reste des points d'ombre rappelés par l'auteur qui se fait narrateur. Là où les choses sont intéressantes, c'est que non seulement on observe une partie des conditions qui ont amené un jeune perturbé psychologiquement à devenir un tueur en série, mais on est aussi témoin du comportement d'un tel jeune au milieu d'autres jeunes, et comment les gens réagissaient autour de lui avant qu'il devienne ce qu'il est devenu. Qu'est-ce que cela fait de côtoyer un futur monstre ? Est-ce qu'il était vraiment différent ? Pouvait-on se douter de ce qu'il deviendrait ? Y avait-il quelque chose qu'on pouvait faire ou ne pas faire pour ne pas qu'il devienne ainsi ? Et si ç'avait été nous, aurions-nous vu quelque chose ou agi différemment ? Intéressante lecture donc, mais quand même pas passionnante à mes yeux. Je n'aime pas trop le dessin de Backderf. Ses personnages sont raides, comme s'ils avaient un balai dans le... dos, et pas seulement Dahmer. Et dans l'ensemble, je ne suis pas fan de son style proche des comics underground américain. Et je n'ai pas réussi à être complètement plongé dans le récit, à m'attacher ou m'intéresser pour de bon aux personnages, ni à ressentir d'émotion particulière si ce n'est un peu de curiosité et une touche de dégoût mêlée de pitié. C'est une lecture intéressante pour son aspect documentaire et l'originalité de son point de vue semi-autobiographique, mais ce n'est pas un album qui me marquera vraiment.


Dire que j'attendais cette lecture avec impatience est peu de le dire. Mes petits camarades du site m'ont à plusieurs reprises vanté les qualités de cette histoire. Premier point, le dessin, ce n'est vraiment pas mon truc ce style là, cela n'a pas empêché ma lecture mais pour moi on est plus proche de la caricature que d'autre chose. Bien évidemment là n'est pas le propos et ici c'est le fond qui compte plus que la forme. Donc. Les premiers mots qui me viennent à l'esprit: glauque, froid, désespéré, vacuité. Si l'on y réfléchit bien, combien de personnes de notre entourage, disons lorsque nous étions dans nos années lycée, vivaient le même type de vie ou tout du moins de situation. Certes me direz vous bien peu de nos connaissances de l'époque sont devenues des sérial killer et c'est tant mieux. A l'issue de ma lecture ce qui me frappe c'est véritablement le manque d'empathie absolue dont ont fait preuve les gens qui côtoyaient Dahmer. Comme le dit l'auteur ces événements se sont produits dans une époque particulière et avec des gens, des ados, plus préoccupés par les choses de cet âge que par l'attention à l'autre. Aurait-il été possible d'empêcher cette série de massacres, peut être pas, mais peut être que oui, on ne peut refaire l'histoire. Mon sentiment n'est pas comme certains l'ont dit du dégoût ou un malaise mais plutôt, et peut être vais je choquer, l'impression d'un immense gâchis. Quoiqu'il en soit voilà une lecture assez indispensable pour tenter d'approcher la compréhension de la psyché humaine, celle de gens comme Dahmer mais aussi celle de son entourage de l'époque.


Un jeune homme, vu de dos, marche au bord d’une route de campagne, environnée ça et là de rares maisons. La route semble monter vers un paradis serein aux cieux rayonnants. Zoom aérien sur le personnage, un peu raide, bras serrés le long du corps à la manière d’un automate désœuvré, puis sur ses baskets. Crissements des semelles sur le sol, crunch… crunch… crunch… tel le tic-tac d’une horloge maléfique, compte-à-rebours inéluctable vers une destination aléatoire mais que l’on devine tragique. Pause. Le jeune homme tombe en arrêt devant le cadavre d’un chat sous une nuée de mouches noires. Il le prend dans ses bras, imperturbable. Regard fixe. Fascination de la putréfaction, des chairs mortes… Puis il reprend sa marche funèbre en emportant son trophée, avec visiblement un plan bien précis en tête. Tout compte fait, on dirait que ce n’est pas la route du paradis, mais bien plutôt celle de l’enfer. L’enfer de celui pour qui la vie pris très vite la forme d’une cellule aux cloisons infranchissables… Ainsi débute ce récit peu commun. D’emblée, ce prologue mystérieux soutenu par un graphisme unique très attrayant nous plonge immédiatement dans l’histoire. Chez Derf Backderf, tout est dans la verticalité. Lui-même fait ses dédicaces debout (comme j’ai pu le voir à Angoulême cette année), en posant le support sur un carton vide. Une verticalité amplifiée par la rectangularité des formes, des objets et des personnages, comme une tentative de relier le ciel et la terre, et dans le cas de Dahmer, un paradis inaccessible et un enfer omniprésent. Backderf est un rejeton de la BD US alternative, une sorte de Charles Burns au trait géométrique révélant des personnages désincarnés, comme engoncés dans leur carcasse, ectoplasmes d’une Amérique sans gloire. Ce style aux contours précis se dispense parfaitement de la couleur au regard de la profondeur de l’histoire, et son aspect juvénile permet de distancier la noirceur sous-jacente. De bout en bout le lecteur reste happé par l’histoire dérangeante (et authentique) de cet étrange garçon dont chaque fait et geste entre en résonance avec son terrible destin de tueur en série qu’aucun de ses proches, professeurs et camarades, n’avaient su deviner en le côtoyant. A l’époque, Jeff Dahmer avait juste l’air d’un enfant un peu spécial et secret, et pourtant quiconque s’y serait intéressé de plus près aurait pu constater que tous les éléments étaient réunis pour un massacre annoncé : son attirance pour les animaux morts, ses errances de zombie solitaire, son alcoolisme chronique, sa mère dépressive, les relations très conflictuelles entre ses parents avant leur divorce, ses cris d’épileptiques soudains, ses pantomimes déments qui firent de lui une mascotte dans son lycée ! Mais bien sûr, personne n’imagine jamais qu’une connaissance ou un proche puisse renfermer un tueur potentiel. D’ailleurs, la scène des retrouvailles de l’auteur avec deux de ses anciens camarades plusieurs années après est très révélatrice. Lorsque celui-ci évoque Dahmer en suggérant sa probable conversion en tueur en série, leur seule réaction est d’éclater de rire comme un seul homme (confession très courageuse il faut bien le dire). Derf Backderf porte un regard juste, ne cherche à accuser personne ni à tomber dans l’auto-culpabilisation. Sans dédouaner son « ami » Dahmer de ses actes ignobles, il s’efforce simplement de comprendre comment ce camarade de classe atypique a pu devenir « le monstre du Milwaukee ». Se basant sur ses propres souvenirs, mais également sur des témoignages, des articles de presse et documents du FBI, il brosse un portrait éloquent du futur tueur depuis ses années au collège jusqu’à son premier crime. Aucun voyeurisme ici, la démarche de Backderf se veut à la fois factuelle et introspective. Mais elle est aussi remarquable dans le sens où ce dernier aide le lecteur, davantage en suggérant qu’en pointant du doigt les causes, à vérifier qu’on ne devient pas un tel monstre tout à fait par hasard. Tout cela fait de « Mon ami Dahmer » un one-shot passionnant et incontournable selon moi. Pour cette raison, je ne manquerai pas de remercier mon webmaster préféré de me l’avoir conseillé lors de notre virée à Angoulême !
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