Alors là, si je m'attendais à aimer cette série...
Bonne surprise ! Je ne viens pas pour aviser une mauvaise série que j'aurais malgré tout appréciée, c'est du très bon ! C'est juste que la recette avait tous les ingrédients de la série ambitieuse ratée, voire même du gros délire sans réelle profondeur, alors je suis (agréablement) surprise de constater la qualité du résultat.
Dans un monde presque en tout point similaire au notre existent des démon-e-s. Ces démon-e-s sont créé-e-s à partir des peurs humaines, plus une chose est crainte plus lae démon-e lié-e à elle est puissant-e. Les démon-e-s étant ce qu'iels sont, des incarnations de peurs exacerbées à l'extrême, iels ont la fâcheuse tendance à amener partout où iels passent mort et désolation. Pour protéger l'humanité, des groupes de chasseurs de démon-e-s, publiques comme privés, voient le jour.
Bon, avec un résumé pareil, on s'attend à une classique histoire de bastonnade entre humain-e-s et démon-e-s, avec des discours sur le fait de vaincre ses peurs et une réflexion sous-jacente sur ce qui distingue les humain-e-s des démon-e-s, le tout façon shonen avec un vrai sentiment de camaraderie et quelques retournements de situation.
Et, oui, il y a de ça (en tout cas il y a bien un propos sur les humain-e-s et les démon-e-s et des retournements de situation à tout-va).
Sauf qu'en fait, ici, pas de chevalier blanc, pas de sentiment d'espoir non plus puisque l'histoire parvient à maintenir un sentiment d'angoisse et de désespoir quant au sort de ses personnages tout du long, pour tout dire les personnages n'ont rien d’héroïques. Les personnages de cette histoire sont bas, lâches, égoïstes, cruels, immoraux aussi. Notre protagoniste, Denji, l'éponyme "Chainsaw Man" en est la plus belle illustration : son seul désir est de sortir avec une fille, d'embrasser une fille, de coucher avec une fille et d'être adulé, il se sent presque détaché du sort de l'humanité et ne cache jamais ses désirs tout sauf nobles, et pourtant ses interactions avec son entourage, les liens sincères qu'il forge avec les autres, les amitiés inattendues qu'il crée avec les autres et sa sincère envie de vivre, de simplement trouver un sens à sa vie, le rendent profondément humain et attachant.
C'est ça, la force la plus surprenante de cette série : ce mélange réussi de représentation très noire de ce qui fait un-e humain-e, dans ses pires aspects, et ce sincère amour des petits riens qui forment les liens affectifs avec les autres, qui donnent un goût, un sens à tout ça. C'est déprimant et étrangement joli.
Et c'est de là, justement, qu'est née ma crainte concernant cette série, parce que des histoires visant ce genre de complexité dans le fond tout en maintenant une forme simple et fluide (et surtout tout gardant jusqu'au bout une narration fluide et entrainante), j'en ai vu passer quelques fois et ça se casse malheureusement souvent la gueule, la faute à de trop grandes ambitions ou bien un mélange mal dosé.
Ici, malgré quelques défauts, ça marche.
Les défauts, justement.
Il y en a deux/trois mais je les trouve minimes, j'ai surtout peur que cette série s'éternise. Le premier arc a été un véritable coup de cœur mais le second m'a semblé déjà plus convenu.
Le premier arc était un tel feu d'artifice, avait une esthétique si particulière dans le paysage manga avec ses personnages tout en costumes et ses morts graphiques pleines d'hémoglobine n'épargnant personnes (et surtout pas les personnages auxquels on se serait attachés) que revenir à un arc dans un lycée avec une prophétie et un grand danger dont on nous annonce la venue me parait revenir sur des chemins un peu trop convenus, un peu trop sages. L'arc reste bien (même si je ne l'ai pas fini, je ne suis allée que jusqu'au tome 18) et j'aime bien la plupart des nouveaux personnages, mais j'avoue que la série me semble avoir légèrement perdu de son originalité et de son éclat. J'espère donc qu'elle saura s'arrêter de manière fluide et satisfaisante, sans chercher à s'éterniser pour le simple plaisir de rester.
Bon, crainte pour l'avenir de la série mis à part, elle reste très bonne, la narration est prenante, les personnages sont attachants dans leurs défauts (et même leur monstruosité), la mise en scène est léchée (avec parfois des cases magnifiques et même joliment angoissantes), ...
Une très bonne série (et une très bonne surprise), donc, qui mérite un coup de cœur de ma part pour son premier arc qui m'a joliment surprise.
Un 4 étoiles généreux pour faire plaisir à Gaston ;) et parce que j’ai passé un bon moment il faut l’avouer. J’ai du lire la moitié de la série parue à ce jour et j’aurais poursuivi ma lecture si j’avais eu les autres tomes sous le coude.
L’histoire possède un début assez hallucinant, un enfant humain vendu par ses parents et adopté par un démon, Bonjour le malaise d’entrée de jeu ?! mais on dépasse vite ce stade.
Ce n’est qu’une mise en situation pour développer une série déjantée, loufoque au ton assez crétin, l’humain devenant élève dans une école de démons. Il y a des impondérables au genre mais dans l’ensemble j’ai bien rigolé, une belle galerie de personnages (certain étant plus tête à claques que d’autres mais de bonnes réussites).
Je ne suis pas expert mais un manga plutôt bien fait, et bien plus fun que les My Hero Academia et consort.
3,5
MàJ (passage du tome 7 à 28) :
Une série qui m’a carrément conquis sur la longueur (et j’en redemande), je m’y surprend vraiment à rire à pleines dents. Je rejoins maintenant de bon cœur l’engouement de Gaston. Iruma a été ma petite dose de joie ces dernières semaines.
Pas bien profond, ça met le paquet sur les bons sentiments mais c’est tellement loufoque et attachant que ça m’est devenu du fun en barre.
Une version originale et touchante de Spider-Man. On suit Yu, un lycéen timide et mal dans sa peau, qui se retrouve propulsé dans le rôle du célèbre héros après avoir trouvé son costume. Ce n’est pas un simple copier-coller de Peter Parker : le manga propose une vraie réflexion sur la peur de ne pas être à la hauteur, l’envie de bien faire, et le poids d’un symbole.
Le dessin est propre, expressif, et l’histoire bien rythmée. C’est un bon mélange entre introspection et action. Pas besoin de tout connaître sur l’univers Marvel pour apprécier : c’est une belle porte d’entrée pour les novices comme pour les fans de longue date.
Je découvre l'univers de Jonathan Munoz avec cette inconnue autrice de BD trash sur l'enfance. J'ai eu quelques frissons en débutant ma lecture car je ne suis pas vraiment un adepte de cet humour noir que je trouve destructeur sans faire de réelles propositions en contrepartie. Toutefois la suite de la lecture m'a beaucoup plu. J'ai trouvé très intelligent cette juxtaposition des deux univers ( la BD et le bar) qui s'influencent l'un l'autre. Plus la thématique de l'amour occupe l'espace et moins la violence trash et la vulgarité qui l'accompagne subsistent. C'est comme un effet de vases communicants. L'excellent gag sur les cowboys porte à lui seul la profondeur et la pertinence du message de Munoz.
J'ai été d'autant plus sensible à la construction du récit qui prend comme thématique centrale le rapport de l'adulte à l'enfance. Ainsi c'est cette dynamique du récit qui part du violent vers le paisible autour de la vision de l'enfant que j'ai beaucoup apprécié.
Personnellement une vraie découverte qui dépasse l'humour cynique vers d'autres propositions. Une belle lecture.
Je me rends compte que je n'ai pas noté cette BD que j'avais emprunté à la bibliothèque quand mes enfants étaient encore au collège.
J'avais beaucoup aimé cette lecture/ parenthèse, je m'étais bien identifiée à cette expérience de pensée : et si je me retrouvais sur un banc en ville sans plus me rappeler qui je suis ni où j'habite.
Le dessin de Penelope Bagieux est ici réellement au service du scénario et aide à se représenter une vie citadine, impersonnelle, ni trop ceci, ni trop cela.
Mais il m'a semblé que l'exploration de ce fantasme commun avait plus de chance de toucher à 35 ans qu'à 50... il faudrait que je le relise...
Ce coup de cœur est plutôt un agréable souvenir, vieux de 15 ans, avant ma première participation à BDthèque...
Je n'ai jamais pris le temps de lire les romans d'Olivier Norek (trop de BD à lire :P ), mais en tant que bibliothécaire, je suis son succès de près. Cette adaptation en BD par lui même au scénario et Frédéric Pontarolo au dessin m'aura pour le coup clairement donné envie de lire ses romans !
Car Norek nous propose de mettre un grand coup de botte dans la fourmilière de l'hypocrisie et de l'inaction politique face au dérèglement climatique et à notre destruction consciencieuse de notre environnement. L'auteur a le sens du récit et du suspens. Son thriller est très bien construit, et sans manichéisme, déroulant un récit dur et éclairant. Si la mise en place est un peu surprenante au début, une fois lancée l'histoire déroule tambour battant jusqu'à un final peut-être nu brin utopiste, mais qui laisse quand même une lueur d'espoir.
Côté dessin, je ne connaissais pas le travail de Frédéric Pontarolo. S'il surprend au début par son côté "brouillon" et coloré, je m'y suis rapidement habitué et j'ai même beaucoup apprécié son travail.
Une BD coup de poing à découvrir !
Premier épisode d'une reconstitution minutieuse (et nostalgique) du travail des gardes du corps qui se vouèrent corps et âmes au Général de Gaulle pendant de longues années : un point de vue inédit sur la politique des années 50-60 et les débuts de la Ve République.
Xavier Dorison est un scénariste qui a connu le succès très jeune, dès ses 25 ans, avec Le troisième testament. Il a mis la main à la pâte pour de célèbres séries comme XIII ou Thorgal. Il écrit également pour la télé et le cinéma.
Il est né en 1972 et n'a donc pas connu De Gaulle mais il avoue sa fascination pour les "mentors" et cette tranche d'Histoire, cette France un peu désuète, est un peu son passé fantasmé.
L'idée de ces Gorilles du général lui est venue d'un reportage réalisé en 2010 par le journaliste Tony Comiti, le fils de l'un des fameux gorilles du général.
Julien Telo est tombé très jeune dans la marmite du graphisme et s'est fait un nom du côté de l'heroic-fantasy. Il a réalisé ici un gros travail de documentation pour cet album immersif, en visionnant notamment de vieux films en noir et blanc pour s'approprier l'époque, ses costumes, sa gestuelle, ...
La fin de l'album est augmentée d'un cahier qui justifie les "libertés historiques" que les auteurs ont prises pour bâtir leur fiction (et que je vous conseille de lire avant la BD car on y apprend plein de choses sur le contexte de l'histoire et sur leur travail).
À noter que cet album ne couvre que septembre 1959 et n'est que le premier épisode d'une longue série prévue par Dorison et qu'il sort en deux formats, classique en couleurs et prestige en noir et blanc (c'est plus d'époque !).
On a déjà hâte que le tome 2 nous emmène jusqu'en décembre 1959, à Colombey.
Les quatre mousquetaires, les quatre gorilles, ce sont les gardes du corps du Général De Gaulle recrutés après guerre pour l'accompagner dans ses déplacements et le protéger quoi qu'il arrive (en 1959, les attentats se multiplient et le Général est menacé de toutes parts).
Le vrai Roger Tessier devient dans la BD Georges Bertier, mais toujours avec une vraie tronche de gorille. Il pratiquait la boxe.
Le corse Paul Comiti, le patron des quatre gorilles est également président du sulfureux SAC. Il est incarné ici par Ange Santoni.
Henri Hachmi, d'origine kabyle, sera Alain Zerf.
Raymond Sasia, l'ancien du SDECE, diplômé de l'Académie du FBI, devient Max Milan. Son recrutement imprévu au sein des quatre mousquetaires fait des étincelles et lance cette histoire sur les chapeaux de roues.
Jacques Foccart, l'éminence grise de De Gaulle à la réputation sulfureuse, se cache derrière Le Chanoine.
Et puis bien sûr, il y a « Pépère », c'est avec ce (vrai) nom de code affectueux que ses gorilles appellent le Général De Gaulle.
On croisera beaucoup de monde, du beau monde, du moins joli, des gens connus comme Malraux, d'autres moins et même quelques personnages fictifs pour le scénario.
Allez hop, tout le monde est en place, c'est parti pour « une histoire de trahisons et d'espoirs, de grandeurs et de déceptions, de victoires et d'échecs ».
Une histoire qui comme celle de la Ve République commence dans le guêpier de l'Algérie ...
Bien sûr, on ne peut éviter la référence à cette autre BD : Cher pays de notre enfance du bédéaste Etienne Davodeau et du journaliste Benoît Collombat. Un album qui allait fouiller dans les poubelles du SAC, sulfureuse organisation que l'on retrouve encore ici bien sûr.
Mais le scénario de Dorison adopte un point de vue beaucoup moins journalistique.
Bien sûr les questions politiques seront au cœur du récit mais ce qui intéresse les auteurs ici ce sont ces fameux gorilles dévoués corps et âmes (et ce n'est pas une formule) à leur Général au point d'y sacrifier famille et amis, leur vie donc.
C'est ce qui rend ce récit humain, captivant, passionnant : parce qu'on ne nous demande pas de prendre fait et cause pour une personnalité publique légendaire, forcément un peu distante, mais plutôt de nous intéresser aux quatre bonshommes qui se déplaçaient partout avec lui.
Et puis il y a la reconstitution nostalgique de ces années passées, au charme sans doute un peu fantasmé, et teintées ici de cet humour sec et froid, façon Audiard, ambiance Lino Ventura.
Comme dans :
« [...] C'est un peu tôt pour déjeuner ... mets-nous trois bières, Marlène ... et un rillettes-cornichons pour moi, pour accompagner quoi ... »
Côté dessin, c'est un méticuleux travail de reconstitution que Julien Telo a entrepris, photos à l'appui. Le cahier explicatif en fin d'ouvrage montre même le parallèle entre des images d'époque et les planches que le dessinateur en a tirées.
Un dessinateur qui laisse toute la place à ses nombreux personnages, cadrages en gros plans, vêtements et trognes caractéristiques, facilement reconnaissables. On passe de l'intime (un déjeuner champêtre en famille) au défilé officiel (motards et Simca) puis au thriller tendu (une rue noire sous la pluie).
De temps à autre, une scène beaucoup plus dure fait taire la nostalgie, la politique et l'humour, comme celle où les gorilles doivent s'occuper du journaliste pro-FLN et « nettoyer la merde pour que le Général ait pas à patauger dedans ».
« Paul », sucrerie pop aux couleurs psychédéliques concoctée par Hervé Bourhis, nous replonge avec bonheur dans ces « late sixties » où le champ des possibles était incroyablement vaste, où les utopies fleurissaient en harmonie avec l’effervescence artistique et musicale de l’époque, propulsées par un vent de liberté inédit.
Si la narration débute au moment de la séparation des Beatles, en 1969, pour s’achever dans les années 75-76, au moment où les Wings étaient alors au sommet de leur gloire, il faut bien l’avouer, ces derniers, avec le recul, ont bien moins marqué l’histoire de la musique que les mythiques Fab Four de Liverpool. Et d’ailleurs, qui se souvient que Mc Cartney avait connu une période de flottement, avec alcoolisme et grosse déprime à la clé, dès lors que le groupe avait splitté. A cette même époque, une rumeur circulait même à propos de sa mort trois ans avant, suite à quoi il aurait été remplacé par un sosie au sein des Beatles ! Tout cela, Hervé Bourhis l’évoque et le dessine de façon rythmée dans cet album aux couleurs très « seventies ».
Et c’est un bel hommage que rend ici Bourhis au songwriter le plus talentueux et le plus influent de sa génération (avec son compère John Lennon), et qui réhabilite aussi les Wings, passés quelque peu dans l’oubli malgré la pépite qu’est, selon l’auteur, « Band on the run ». Ce groupe fut pour McCartney une véritable « résurrection », selon les termes mêmes de John Lennon qui était revenu le voir une fois la période de brouille terminée, même si pour la renaissance des Beatles, le point de non retour avait été franchi depuis longtemps. La narration est à la première personne, celle de l’ami Paul, révélant à quel point Hervé Bourhis s’est identifié, sans en être forcément conscient, à cette personnalité dont le nom est toujours resté associé aux Beatles. Lui aussi, après avoir failli être emporté par la maladie (A ce titre, on peut lire son autobiographie Mon infractus), a connu une sorte de renaissance.
Parmi d’autres anecdotes, en plus de celles énoncées plus haut et tombées dans l’oubli pour une grande partie du public, on découvre comment l’ex-Beatles s’est reconstruit, on suit son redémarrage à zéro assez hallucinant avec ses Wings, soulignant par la même occasion une certaine modestie qui prouve que l’homme était davantage passionné par la musique que préoccupé par sa propre notoriété. Ce qui par la suite s’est révélé porteur, puisque son talent de compositeur était resté intact a l’a ainsi mené au succès. Etonnante aussi cette rencontre improbable avec une super star de la scène africaine, Fela. McCartney était venu au Nigéria pour y enregistrer « Band on the run », espérant y puiser une énergie différente. Là encore, le séjour fut marqué par quelques déboires, qui virent l’ex-Fab Four hospitalisé aux urgences suite à un malaise lié à sa consommation excessive de cigarettes.
Le dessin d’Hervé Bourhis est extrêmement vivant et graphiquement très riche avec ses couleurs fluo-psyché. Comme il le dit lui-même dans l’interview à la fin de l’ouvrage, ce grand fan des Beatles (qui avait déjà publié en 2010 Le Petit Livre des Beatles) s’est réellement surpassé par rapport à ses productions précédentes plus minimalistes, ayant mis un an et demi à le réaliser.
S’il fallait une preuve qu’un auteur peut exceller autant dans la narration que dans le dessin, « Paul » en est une. Richement documenté, l’ouvrage révèle des facettes méconnues de « Macca » mais aussi des autres membres des Beatles, ainsi qu’un aperçu de la réalité du show-biz dans ces années-là. Au final, tous les ingrédients semblent avoir été réunis pour faire de cet album une bulle de nostalgie totalement immersive et jouissive, donnant envie de se plonger dans la discographie de cet artiste.
Quelle belle surprise!! Je suis sur la même ligne que les élogieux avis précédents. Matthew Dooley nous propose un récit atypique et original autour d'une guerre fratricide de vendeurs de glaces très très drôle. Le personnage d'Howard en anti héros mal rasé, soumis aux événements mais touchant et attendrissant ne m'a pas quitté au cours de cette délicieuse lecture feel good. La thématique de cette compétition entre deux frères pour s'approprier le territoire du père est assez classique. Mais ici il s'agit d'une parcelle pour vendre des glaces… Cela donne des dialogues vifs et incisifs bourrés d'humour. En plus Dooley y ajoute le sujet de la détermination d'une montagne proche de la ville ,défendue par l'impayable Jasper, ce qui a le don de faire sourire les continentaux fiers de leurs sommets. Howard, Jasper, Tony et Alex forment une galerie bien sympathique où même le "vilain" Tony se révèle bien plus complexe avec une relation au père qui donne du relief aux deux personnages.
Le graphisme est minimaliste mais il donne une narration très fluide et dynamique. Les visages ronds ou en poires accentuent le côté humoristique du récit. Les cases sont petites et donne un aspect cinéma à l'ancienne dans le mouvement.
Une lecture très agréable et divertissante qui redonne le morale après une journée grise.
S’il y a bien une chose que j’aime par-dessus tout, c’est de me laisser embarquer dans une histoire que mes a priori, parfois pour d’obscures raisons, m’empêchaient d’empoigner. C’est le cas avec ce premier tome signé Joe Daly dont j’appréciais pourtant le travail jusqu’ici.
Quand mon fournisseur de BD m’a fait l’article de Rust River City, il y avait une petite partie de mon cerveau qui se méfiait, sans réel motif. Il se trouve que l’occasion m’a été donnée de la lire dans le cadre de mon boulot, et je suis emballé, au point que j’envisage d’en faire l’acquisition.
D’abord, il y a le dessin, ici indissociable des couleurs, audacieuses, crépusculaires. Il se dégage une ambiance forte qui confère à cette histoire finalement très terre à terre un petit quelque chose d’irréel, voire carrément hypnotique. Cette impression se confirme lorsque l’on referme ce premier volume. En effet, la fin laisse entendre que la suite ouvrira sur quelque chose d’autre, quelque chose de tout à fait différent. En tout cas, cela augure d’une suite truculente, et ma curiosité a été on-ne-peut-plus aiguisée.
Pourtant, ce n’était pas gagné. Après quelques pages un peu plan-plan, je me suis laissé cuire à petit feu. Sans doute fallait-il ce temps d’adaptation car le ton est particulier. Et l’histoire l'est tout autant. Tout est baigné d’un esprit typiquement « indé ». Des références filmographiques n’ont cessé de me chatouiller, et non des moindres. On songe en effet au cinéma de Sean Baker (le film Tangerine notamment pour son atmosphère et ses dialogues), à des films tels que War Pony de Gina Gammell et Riley Keough, 90’ de Jonah Hill, ou bien encore au cultissime Big Lebowski qu’on ne présente plus.
Les dialogues, dont les pavés de textes peuvent rebuter (ce qui a sans doute joué dans mon cas), sont bons, néanmoins très crus, voire vulgaires, mais souvent drôles. Le scénar prend son temps pour se déployer, mais c’est aussi ce qui permet de se sentir en intimité avec les personnages qui, pour certains, en deviennent même sympathiques. C’est le cas notamment du héros, Dean, un ouvrier vétéran du Viêt-Nam, que sa détestation pour les asiatiques rend pourtant très antipathique. Mais on finit par entrevoir son côté humain, touchant, mal assuré et même sensible… Même les ados, dont les aventures occupent de nombreuses scènes parallèles à celle de Dean, deviennent proches du lecteur alors que certains d’entre eux sont franchement cons. Le plus étonnant dans cette BD, c’est que l’histoire se déroule dans un contexte d’une affligeante banalité : ville sordide, contexte très actualisé (même si se déroulant à l’époque de la cassette vidéo) sur fond de marasme économique et de chômage, de racisme, de masculinisme en fin de règne, mais également de ce sentiment de perdition de la jeune génération…
Bref ! C’est une lecture tout à fait singulière qui me fait patauger dans l’impatience. Vivement le tome 2 qui sera aussi la conclusion et promet de basculer vers un truc qui pourrait bien prendre un détour complètement fantastique. Un coup de cœur tout à fait inattendu !
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Chainsaw Man
Alors là, si je m'attendais à aimer cette série... Bonne surprise ! Je ne viens pas pour aviser une mauvaise série que j'aurais malgré tout appréciée, c'est du très bon ! C'est juste que la recette avait tous les ingrédients de la série ambitieuse ratée, voire même du gros délire sans réelle profondeur, alors je suis (agréablement) surprise de constater la qualité du résultat. Dans un monde presque en tout point similaire au notre existent des démon-e-s. Ces démon-e-s sont créé-e-s à partir des peurs humaines, plus une chose est crainte plus lae démon-e lié-e à elle est puissant-e. Les démon-e-s étant ce qu'iels sont, des incarnations de peurs exacerbées à l'extrême, iels ont la fâcheuse tendance à amener partout où iels passent mort et désolation. Pour protéger l'humanité, des groupes de chasseurs de démon-e-s, publiques comme privés, voient le jour. Bon, avec un résumé pareil, on s'attend à une classique histoire de bastonnade entre humain-e-s et démon-e-s, avec des discours sur le fait de vaincre ses peurs et une réflexion sous-jacente sur ce qui distingue les humain-e-s des démon-e-s, le tout façon shonen avec un vrai sentiment de camaraderie et quelques retournements de situation. Et, oui, il y a de ça (en tout cas il y a bien un propos sur les humain-e-s et les démon-e-s et des retournements de situation à tout-va). Sauf qu'en fait, ici, pas de chevalier blanc, pas de sentiment d'espoir non plus puisque l'histoire parvient à maintenir un sentiment d'angoisse et de désespoir quant au sort de ses personnages tout du long, pour tout dire les personnages n'ont rien d’héroïques. Les personnages de cette histoire sont bas, lâches, égoïstes, cruels, immoraux aussi. Notre protagoniste, Denji, l'éponyme "Chainsaw Man" en est la plus belle illustration : son seul désir est de sortir avec une fille, d'embrasser une fille, de coucher avec une fille et d'être adulé, il se sent presque détaché du sort de l'humanité et ne cache jamais ses désirs tout sauf nobles, et pourtant ses interactions avec son entourage, les liens sincères qu'il forge avec les autres, les amitiés inattendues qu'il crée avec les autres et sa sincère envie de vivre, de simplement trouver un sens à sa vie, le rendent profondément humain et attachant. C'est ça, la force la plus surprenante de cette série : ce mélange réussi de représentation très noire de ce qui fait un-e humain-e, dans ses pires aspects, et ce sincère amour des petits riens qui forment les liens affectifs avec les autres, qui donnent un goût, un sens à tout ça. C'est déprimant et étrangement joli. Et c'est de là, justement, qu'est née ma crainte concernant cette série, parce que des histoires visant ce genre de complexité dans le fond tout en maintenant une forme simple et fluide (et surtout tout gardant jusqu'au bout une narration fluide et entrainante), j'en ai vu passer quelques fois et ça se casse malheureusement souvent la gueule, la faute à de trop grandes ambitions ou bien un mélange mal dosé. Ici, malgré quelques défauts, ça marche. Les défauts, justement. Il y en a deux/trois mais je les trouve minimes, j'ai surtout peur que cette série s'éternise. Le premier arc a été un véritable coup de cœur mais le second m'a semblé déjà plus convenu. Le premier arc était un tel feu d'artifice, avait une esthétique si particulière dans le paysage manga avec ses personnages tout en costumes et ses morts graphiques pleines d'hémoglobine n'épargnant personnes (et surtout pas les personnages auxquels on se serait attachés) que revenir à un arc dans un lycée avec une prophétie et un grand danger dont on nous annonce la venue me parait revenir sur des chemins un peu trop convenus, un peu trop sages. L'arc reste bien (même si je ne l'ai pas fini, je ne suis allée que jusqu'au tome 18) et j'aime bien la plupart des nouveaux personnages, mais j'avoue que la série me semble avoir légèrement perdu de son originalité et de son éclat. J'espère donc qu'elle saura s'arrêter de manière fluide et satisfaisante, sans chercher à s'éterniser pour le simple plaisir de rester. Bon, crainte pour l'avenir de la série mis à part, elle reste très bonne, la narration est prenante, les personnages sont attachants dans leurs défauts (et même leur monstruosité), la mise en scène est léchée (avec parfois des cases magnifiques et même joliment angoissantes), ... Une très bonne série (et une très bonne surprise), donc, qui mérite un coup de cœur de ma part pour son premier arc qui m'a joliment surprise.
Iruma à l'école des démons
Un 4 étoiles généreux pour faire plaisir à Gaston ;) et parce que j’ai passé un bon moment il faut l’avouer. J’ai du lire la moitié de la série parue à ce jour et j’aurais poursuivi ma lecture si j’avais eu les autres tomes sous le coude. L’histoire possède un début assez hallucinant, un enfant humain vendu par ses parents et adopté par un démon, Bonjour le malaise d’entrée de jeu ?! mais on dépasse vite ce stade. Ce n’est qu’une mise en situation pour développer une série déjantée, loufoque au ton assez crétin, l’humain devenant élève dans une école de démons. Il y a des impondérables au genre mais dans l’ensemble j’ai bien rigolé, une belle galerie de personnages (certain étant plus tête à claques que d’autres mais de bonnes réussites). Je ne suis pas expert mais un manga plutôt bien fait, et bien plus fun que les My Hero Academia et consort. 3,5 MàJ (passage du tome 7 à 28) : Une série qui m’a carrément conquis sur la longueur (et j’en redemande), je m’y surprend vraiment à rire à pleines dents. Je rejoins maintenant de bon cœur l’engouement de Gaston. Iruma a été ma petite dose de joie ces dernières semaines. Pas bien profond, ça met le paquet sur les bons sentiments mais c’est tellement loufoque et attachant que ça m’est devenu du fun en barre.
Spider-Man - Fake Red
Une version originale et touchante de Spider-Man. On suit Yu, un lycéen timide et mal dans sa peau, qui se retrouve propulsé dans le rôle du célèbre héros après avoir trouvé son costume. Ce n’est pas un simple copier-coller de Peter Parker : le manga propose une vraie réflexion sur la peur de ne pas être à la hauteur, l’envie de bien faire, et le poids d’un symbole. Le dessin est propre, expressif, et l’histoire bien rythmée. C’est un bon mélange entre introspection et action. Pas besoin de tout connaître sur l’univers Marvel pour apprécier : c’est une belle porte d’entrée pour les novices comme pour les fans de longue date.
L'Inconnue du bar (Dans la tête de...)
Je découvre l'univers de Jonathan Munoz avec cette inconnue autrice de BD trash sur l'enfance. J'ai eu quelques frissons en débutant ma lecture car je ne suis pas vraiment un adepte de cet humour noir que je trouve destructeur sans faire de réelles propositions en contrepartie. Toutefois la suite de la lecture m'a beaucoup plu. J'ai trouvé très intelligent cette juxtaposition des deux univers ( la BD et le bar) qui s'influencent l'un l'autre. Plus la thématique de l'amour occupe l'espace et moins la violence trash et la vulgarité qui l'accompagne subsistent. C'est comme un effet de vases communicants. L'excellent gag sur les cowboys porte à lui seul la profondeur et la pertinence du message de Munoz. J'ai été d'autant plus sensible à la construction du récit qui prend comme thématique centrale le rapport de l'adulte à l'enfance. Ainsi c'est cette dynamique du récit qui part du violent vers le paisible autour de la vision de l'enfant que j'ai beaucoup apprécié. Personnellement une vraie découverte qui dépasse l'humour cynique vers d'autres propositions. Une belle lecture.
La Page blanche
Je me rends compte que je n'ai pas noté cette BD que j'avais emprunté à la bibliothèque quand mes enfants étaient encore au collège. J'avais beaucoup aimé cette lecture/ parenthèse, je m'étais bien identifiée à cette expérience de pensée : et si je me retrouvais sur un banc en ville sans plus me rappeler qui je suis ni où j'habite. Le dessin de Penelope Bagieux est ici réellement au service du scénario et aide à se représenter une vie citadine, impersonnelle, ni trop ceci, ni trop cela. Mais il m'a semblé que l'exploration de ce fantasme commun avait plus de chance de toucher à 35 ans qu'à 50... il faudrait que je le relise... Ce coup de cœur est plutôt un agréable souvenir, vieux de 15 ans, avant ma première participation à BDthèque...
Impact - Green War
Je n'ai jamais pris le temps de lire les romans d'Olivier Norek (trop de BD à lire :P ), mais en tant que bibliothécaire, je suis son succès de près. Cette adaptation en BD par lui même au scénario et Frédéric Pontarolo au dessin m'aura pour le coup clairement donné envie de lire ses romans ! Car Norek nous propose de mettre un grand coup de botte dans la fourmilière de l'hypocrisie et de l'inaction politique face au dérèglement climatique et à notre destruction consciencieuse de notre environnement. L'auteur a le sens du récit et du suspens. Son thriller est très bien construit, et sans manichéisme, déroulant un récit dur et éclairant. Si la mise en place est un peu surprenante au début, une fois lancée l'histoire déroule tambour battant jusqu'à un final peut-être nu brin utopiste, mais qui laisse quand même une lueur d'espoir. Côté dessin, je ne connaissais pas le travail de Frédéric Pontarolo. S'il surprend au début par son côté "brouillon" et coloré, je m'y suis rapidement habitué et j'ai même beaucoup apprécié son travail. Une BD coup de poing à découvrir !
Les Gorilles du Général
Premier épisode d'une reconstitution minutieuse (et nostalgique) du travail des gardes du corps qui se vouèrent corps et âmes au Général de Gaulle pendant de longues années : un point de vue inédit sur la politique des années 50-60 et les débuts de la Ve République. Xavier Dorison est un scénariste qui a connu le succès très jeune, dès ses 25 ans, avec Le troisième testament. Il a mis la main à la pâte pour de célèbres séries comme XIII ou Thorgal. Il écrit également pour la télé et le cinéma. Il est né en 1972 et n'a donc pas connu De Gaulle mais il avoue sa fascination pour les "mentors" et cette tranche d'Histoire, cette France un peu désuète, est un peu son passé fantasmé. L'idée de ces Gorilles du général lui est venue d'un reportage réalisé en 2010 par le journaliste Tony Comiti, le fils de l'un des fameux gorilles du général. Julien Telo est tombé très jeune dans la marmite du graphisme et s'est fait un nom du côté de l'heroic-fantasy. Il a réalisé ici un gros travail de documentation pour cet album immersif, en visionnant notamment de vieux films en noir et blanc pour s'approprier l'époque, ses costumes, sa gestuelle, ... La fin de l'album est augmentée d'un cahier qui justifie les "libertés historiques" que les auteurs ont prises pour bâtir leur fiction (et que je vous conseille de lire avant la BD car on y apprend plein de choses sur le contexte de l'histoire et sur leur travail). À noter que cet album ne couvre que septembre 1959 et n'est que le premier épisode d'une longue série prévue par Dorison et qu'il sort en deux formats, classique en couleurs et prestige en noir et blanc (c'est plus d'époque !). On a déjà hâte que le tome 2 nous emmène jusqu'en décembre 1959, à Colombey. Les quatre mousquetaires, les quatre gorilles, ce sont les gardes du corps du Général De Gaulle recrutés après guerre pour l'accompagner dans ses déplacements et le protéger quoi qu'il arrive (en 1959, les attentats se multiplient et le Général est menacé de toutes parts). Le vrai Roger Tessier devient dans la BD Georges Bertier, mais toujours avec une vraie tronche de gorille. Il pratiquait la boxe. Le corse Paul Comiti, le patron des quatre gorilles est également président du sulfureux SAC. Il est incarné ici par Ange Santoni. Henri Hachmi, d'origine kabyle, sera Alain Zerf. Raymond Sasia, l'ancien du SDECE, diplômé de l'Académie du FBI, devient Max Milan. Son recrutement imprévu au sein des quatre mousquetaires fait des étincelles et lance cette histoire sur les chapeaux de roues. Jacques Foccart, l'éminence grise de De Gaulle à la réputation sulfureuse, se cache derrière Le Chanoine. Et puis bien sûr, il y a « Pépère », c'est avec ce (vrai) nom de code affectueux que ses gorilles appellent le Général De Gaulle. On croisera beaucoup de monde, du beau monde, du moins joli, des gens connus comme Malraux, d'autres moins et même quelques personnages fictifs pour le scénario. Allez hop, tout le monde est en place, c'est parti pour « une histoire de trahisons et d'espoirs, de grandeurs et de déceptions, de victoires et d'échecs ». Une histoire qui comme celle de la Ve République commence dans le guêpier de l'Algérie ... Bien sûr, on ne peut éviter la référence à cette autre BD : Cher pays de notre enfance du bédéaste Etienne Davodeau et du journaliste Benoît Collombat. Un album qui allait fouiller dans les poubelles du SAC, sulfureuse organisation que l'on retrouve encore ici bien sûr. Mais le scénario de Dorison adopte un point de vue beaucoup moins journalistique. Bien sûr les questions politiques seront au cœur du récit mais ce qui intéresse les auteurs ici ce sont ces fameux gorilles dévoués corps et âmes (et ce n'est pas une formule) à leur Général au point d'y sacrifier famille et amis, leur vie donc. C'est ce qui rend ce récit humain, captivant, passionnant : parce qu'on ne nous demande pas de prendre fait et cause pour une personnalité publique légendaire, forcément un peu distante, mais plutôt de nous intéresser aux quatre bonshommes qui se déplaçaient partout avec lui. Et puis il y a la reconstitution nostalgique de ces années passées, au charme sans doute un peu fantasmé, et teintées ici de cet humour sec et froid, façon Audiard, ambiance Lino Ventura. Comme dans : « [...] C'est un peu tôt pour déjeuner ... mets-nous trois bières, Marlène ... et un rillettes-cornichons pour moi, pour accompagner quoi ... » Côté dessin, c'est un méticuleux travail de reconstitution que Julien Telo a entrepris, photos à l'appui. Le cahier explicatif en fin d'ouvrage montre même le parallèle entre des images d'époque et les planches que le dessinateur en a tirées. Un dessinateur qui laisse toute la place à ses nombreux personnages, cadrages en gros plans, vêtements et trognes caractéristiques, facilement reconnaissables. On passe de l'intime (un déjeuner champêtre en famille) au défilé officiel (motards et Simca) puis au thriller tendu (une rue noire sous la pluie). De temps à autre, une scène beaucoup plus dure fait taire la nostalgie, la politique et l'humour, comme celle où les gorilles doivent s'occuper du journaliste pro-FLN et « nettoyer la merde pour que le Général ait pas à patauger dedans ».
Paul
« Paul », sucrerie pop aux couleurs psychédéliques concoctée par Hervé Bourhis, nous replonge avec bonheur dans ces « late sixties » où le champ des possibles était incroyablement vaste, où les utopies fleurissaient en harmonie avec l’effervescence artistique et musicale de l’époque, propulsées par un vent de liberté inédit. Si la narration débute au moment de la séparation des Beatles, en 1969, pour s’achever dans les années 75-76, au moment où les Wings étaient alors au sommet de leur gloire, il faut bien l’avouer, ces derniers, avec le recul, ont bien moins marqué l’histoire de la musique que les mythiques Fab Four de Liverpool. Et d’ailleurs, qui se souvient que Mc Cartney avait connu une période de flottement, avec alcoolisme et grosse déprime à la clé, dès lors que le groupe avait splitté. A cette même époque, une rumeur circulait même à propos de sa mort trois ans avant, suite à quoi il aurait été remplacé par un sosie au sein des Beatles ! Tout cela, Hervé Bourhis l’évoque et le dessine de façon rythmée dans cet album aux couleurs très « seventies ». Et c’est un bel hommage que rend ici Bourhis au songwriter le plus talentueux et le plus influent de sa génération (avec son compère John Lennon), et qui réhabilite aussi les Wings, passés quelque peu dans l’oubli malgré la pépite qu’est, selon l’auteur, « Band on the run ». Ce groupe fut pour McCartney une véritable « résurrection », selon les termes mêmes de John Lennon qui était revenu le voir une fois la période de brouille terminée, même si pour la renaissance des Beatles, le point de non retour avait été franchi depuis longtemps. La narration est à la première personne, celle de l’ami Paul, révélant à quel point Hervé Bourhis s’est identifié, sans en être forcément conscient, à cette personnalité dont le nom est toujours resté associé aux Beatles. Lui aussi, après avoir failli être emporté par la maladie (A ce titre, on peut lire son autobiographie Mon infractus), a connu une sorte de renaissance. Parmi d’autres anecdotes, en plus de celles énoncées plus haut et tombées dans l’oubli pour une grande partie du public, on découvre comment l’ex-Beatles s’est reconstruit, on suit son redémarrage à zéro assez hallucinant avec ses Wings, soulignant par la même occasion une certaine modestie qui prouve que l’homme était davantage passionné par la musique que préoccupé par sa propre notoriété. Ce qui par la suite s’est révélé porteur, puisque son talent de compositeur était resté intact a l’a ainsi mené au succès. Etonnante aussi cette rencontre improbable avec une super star de la scène africaine, Fela. McCartney était venu au Nigéria pour y enregistrer « Band on the run », espérant y puiser une énergie différente. Là encore, le séjour fut marqué par quelques déboires, qui virent l’ex-Fab Four hospitalisé aux urgences suite à un malaise lié à sa consommation excessive de cigarettes. Le dessin d’Hervé Bourhis est extrêmement vivant et graphiquement très riche avec ses couleurs fluo-psyché. Comme il le dit lui-même dans l’interview à la fin de l’ouvrage, ce grand fan des Beatles (qui avait déjà publié en 2010 Le Petit Livre des Beatles) s’est réellement surpassé par rapport à ses productions précédentes plus minimalistes, ayant mis un an et demi à le réaliser. S’il fallait une preuve qu’un auteur peut exceller autant dans la narration que dans le dessin, « Paul » en est une. Richement documenté, l’ouvrage révèle des facettes méconnues de « Macca » mais aussi des autres membres des Beatles, ainsi qu’un aperçu de la réalité du show-biz dans ces années-là. Au final, tous les ingrédients semblent avoir été réunis pour faire de cet album une bulle de nostalgie totalement immersive et jouissive, donnant envie de se plonger dans la discographie de cet artiste.
Glace
Quelle belle surprise!! Je suis sur la même ligne que les élogieux avis précédents. Matthew Dooley nous propose un récit atypique et original autour d'une guerre fratricide de vendeurs de glaces très très drôle. Le personnage d'Howard en anti héros mal rasé, soumis aux événements mais touchant et attendrissant ne m'a pas quitté au cours de cette délicieuse lecture feel good. La thématique de cette compétition entre deux frères pour s'approprier le territoire du père est assez classique. Mais ici il s'agit d'une parcelle pour vendre des glaces… Cela donne des dialogues vifs et incisifs bourrés d'humour. En plus Dooley y ajoute le sujet de la détermination d'une montagne proche de la ville ,défendue par l'impayable Jasper, ce qui a le don de faire sourire les continentaux fiers de leurs sommets. Howard, Jasper, Tony et Alex forment une galerie bien sympathique où même le "vilain" Tony se révèle bien plus complexe avec une relation au père qui donne du relief aux deux personnages. Le graphisme est minimaliste mais il donne une narration très fluide et dynamique. Les visages ronds ou en poires accentuent le côté humoristique du récit. Les cases sont petites et donne un aspect cinéma à l'ancienne dans le mouvement. Une lecture très agréable et divertissante qui redonne le morale après une journée grise.
Rust River City
S’il y a bien une chose que j’aime par-dessus tout, c’est de me laisser embarquer dans une histoire que mes a priori, parfois pour d’obscures raisons, m’empêchaient d’empoigner. C’est le cas avec ce premier tome signé Joe Daly dont j’appréciais pourtant le travail jusqu’ici. Quand mon fournisseur de BD m’a fait l’article de Rust River City, il y avait une petite partie de mon cerveau qui se méfiait, sans réel motif. Il se trouve que l’occasion m’a été donnée de la lire dans le cadre de mon boulot, et je suis emballé, au point que j’envisage d’en faire l’acquisition. D’abord, il y a le dessin, ici indissociable des couleurs, audacieuses, crépusculaires. Il se dégage une ambiance forte qui confère à cette histoire finalement très terre à terre un petit quelque chose d’irréel, voire carrément hypnotique. Cette impression se confirme lorsque l’on referme ce premier volume. En effet, la fin laisse entendre que la suite ouvrira sur quelque chose d’autre, quelque chose de tout à fait différent. En tout cas, cela augure d’une suite truculente, et ma curiosité a été on-ne-peut-plus aiguisée. Pourtant, ce n’était pas gagné. Après quelques pages un peu plan-plan, je me suis laissé cuire à petit feu. Sans doute fallait-il ce temps d’adaptation car le ton est particulier. Et l’histoire l'est tout autant. Tout est baigné d’un esprit typiquement « indé ». Des références filmographiques n’ont cessé de me chatouiller, et non des moindres. On songe en effet au cinéma de Sean Baker (le film Tangerine notamment pour son atmosphère et ses dialogues), à des films tels que War Pony de Gina Gammell et Riley Keough, 90’ de Jonah Hill, ou bien encore au cultissime Big Lebowski qu’on ne présente plus. Les dialogues, dont les pavés de textes peuvent rebuter (ce qui a sans doute joué dans mon cas), sont bons, néanmoins très crus, voire vulgaires, mais souvent drôles. Le scénar prend son temps pour se déployer, mais c’est aussi ce qui permet de se sentir en intimité avec les personnages qui, pour certains, en deviennent même sympathiques. C’est le cas notamment du héros, Dean, un ouvrier vétéran du Viêt-Nam, que sa détestation pour les asiatiques rend pourtant très antipathique. Mais on finit par entrevoir son côté humain, touchant, mal assuré et même sensible… Même les ados, dont les aventures occupent de nombreuses scènes parallèles à celle de Dean, deviennent proches du lecteur alors que certains d’entre eux sont franchement cons. Le plus étonnant dans cette BD, c’est que l’histoire se déroule dans un contexte d’une affligeante banalité : ville sordide, contexte très actualisé (même si se déroulant à l’époque de la cassette vidéo) sur fond de marasme économique et de chômage, de racisme, de masculinisme en fin de règne, mais également de ce sentiment de perdition de la jeune génération… Bref ! C’est une lecture tout à fait singulière qui me fait patauger dans l’impatience. Vivement le tome 2 qui sera aussi la conclusion et promet de basculer vers un truc qui pourrait bien prendre un détour complètement fantastique. Un coup de cœur tout à fait inattendu !