Les derniers avis (8282 avis)

Par Hervé
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Thorgal Saga
Thorgal Saga

Adieu Aaricia La série Thorgal est celle qui m'a fait découvrir un nouvel aspect de la bande dessinée. Habitué aux Tintin, Astérix et Gil Jourdan, je crois avoir dévoré les 15 premiers volumes de la série chez ma sœur au début des années 90. Depuis, j'ai acheté régulièrement les albums jusqu'à "Aniel" qui , après beaucoup d'albums faibles voire très faibles, m'avait déçu. Finalement, on m'a offert les suivants et j'ai donc continué cette série (le dernier "Tupilaks" étant particulièrement indigeste). Alors quand j'ai vu que Robin Recht nous proposait son propre Thorgal, je n'ai pas hésité. J'avais adoré son style dans "le troisième testament-Julius". Évidemment je me suis précipité sur l'édition augmentée qui présente au lecteur un double avantage: un grand format et un papier de qualité supérieur (je passe sous silence les "bonus" assez décevants hormis la reprise de la superbe couverture de l'édition courante). Le dessin de Recht est tout simplement magnifique. Quant au scénario, un voyage dans le temps grâce à l'anneau d'Ouroboros, il nous permet de voir la confrontation entre un Thorgal vieillissant et un Thorgal jeune et fougueux, En empruntant des éléments à "l'enfant des étoiles" et "Alinoë", Robin Recht nous a concocté le meilleur des albums de la série depuis des années (bien que cette aventure doit être considérée comme un album à part de la série). Pourtant, j'ai quelques regrets sur cet album. Avec 108 pages, je pense que le récit aurait gagné en intensité en réduisant la longue marche à la recherche d'Aarica (un peu trop longue à mon goût), qui a comme principal intérêt de nous faire découvrir un Thorgal diminué physiquement, et j'ai un peu tiqué sur la violence des combats, qui n'entre pas dans l'univers de Thorgal (Dorison s'y était frotté avec "le feu écarlate", mais ça n'avait pas pris à mon goût). Et puis pourquoi ne pas avoir conservé la superbe couverture de l'édition courante qui nous rappelait celle de "l'enfant des étoiles". Sinon, c'est un sans faute pour Robin Recht, avec un album qui mêle à la fois de l'action, de la réflexion et une forte dose de nostalgie et d'émotion, une fois le livre fini. Le final est en effet surprenant, mais quelle conclusion! Wendigo Avant tout, je me dois de préciser que j'ai lu cet album dans la version limitée et grand format avec une couverture que je trouve très en deçà de la couverture de l'édition classique, une des plus belles couvertures qui m'ait été donné de voir sur cette série, sublime couverture heureusement reprise dans le cahier graphique de l'édition limitée. Je connaissais Fred Duval notamment avec sa série "Mac Callum" mais aussi sa série assez méconnue et sous estimée Nico. Quant à Corentin Rouge, je l'avais découvert très récemment avec "Sangoma" que j'avais lu aussi en grand format et noir et blanc, ce qui mettait en lumière son formidable dessin. Avec cette nouvelle aventure,qui se situe tout de même , au niveau scénaristique, bien au delà de la série mère telle qu'elle est reprise actuellement, les auteurs signent un très bon album .Mais avec "Adieu Aaricia", Robin Recht avait placé la barre très haute avec cet album d'une qualité graphique et scénaristique incroyable. Je dois dire que Wendigo se situe tout de même un peu en deçà de "Adieu Aaricia", qui avec le temps va s'affirmer comme un summum de la série Thorgal. Le dessin de Corentin Rouge ne souffre presque d'aucun reproche, sauf peut-être d'un manque de détails dans les arrières plans des cases (souvent vides) et le scénario repose sur les canons thorgaliens que nous connaissons depuis des années (une épreuve que Thorgal doit subir pour sauver un de ses proches, avec l'intervention de dieux ou déesse ), bref sur une intrigue un peu plus classique que celle développée par Robin Recht. Au final, un album très réussi, qui se démarque de la reprise de la série mère, mais que j'ai trouvé plus faible que la version présentée par Robin Recht.

07/02/2023 (MAJ le 20/02/2024) (modifier)
Couverture de la série À mourir entre les bras de ma nourrice
À mourir entre les bras de ma nourrice

Ça commence par un très joli titre. Une couverture intrigante (De loin, ça fait penser à de la SF tant elle s’apparente à une couverture de la collection dédié aux futurs de Liu Cixin)... On ouvre ensuite l'album et on est surpris par un graphisme original servi par des couleurs directes très réussies. Au fil de la lecture, le dessin se montre très lisible et envoutant. Pour un premier album, je trouve la proposition graphique (cadrage inclus) d'une grande audace et maturité. Le scénario n'est pas en reste, c'est du solide. Il se veut réaliste et ose à dépeindre une cité (française) qu’on croirait tout droit sorti de « the Wire ». Fatoumata n’aurait jamais du accepter le deal initial. Mais en avait-elle réellement le choix? Dès lors elle sera prise dans un engrenage dont il est difficile de se sortir indemne. L'histoire se révèle très prenante, le suspense est total, on ne lâchera pas la BD avant de connaitre le fin mot de l’histoire. Sur un environnement et des thématiques pas si fréquemment exploités dans la Bande Dessinée Française, précipitez vous sur une des très bonnes histoires sortie en ce début d'année 2024 qui mérite amplement toute votre attention.

20/02/2024 (modifier)
Par Alain
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Dieu qui pue, Dieu qui pète
Dieu qui pue, Dieu qui pète

Magnifique ! Soit c'est la mise en bd de vrais contes africains, pleins de bon sens et de malice, soit c'est de la fiction pure, et dans ce cas on ne peut qu'être admiratif de la capacité de l'auteur à se glisser dans la peau d'un griot (conteur) africain. Que du plaisir en tous cas.

20/02/2024 (modifier)
Par Spooky
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Bobigny 1972
Bobigny 1972

En 1972 a eu lieu un procès dont le sujet, les débats et la conclusion ont eu un impact énorme sur la société française depuis cinq décennies. Ce procès n'était pas seulement celui de Marie-Claire Chevalier, qui a avorté à la suite d'un viol, et de sa mère, pénalement responsable pour elle, mais aussi celui d'une loi inique, celle de 1920 condamnant toute femme ayant recours à l'avortement à une peine de prison. En 1971, lorsque Marie-Claire et sa mère sont arrêtées, 343 femmes, célèbres et anonymes, sont sortie du bois, pour affirmer qu'elles aussi ont dû avorter (plusieurs fois pour certaines), comme des milliers, des centaines de milliers de femmes (on parlait alors de 500 000 à UN MILLION d'avortements par an dans le pays). Sous l'impulsion de l'association Choisir (qui existe toujours) ces femmes et des milliers d'autres qui manifestent dans la rue refusent que cette situation perdure, que les hommes dictent leur volonté, prennent le contrôle de leur corps. Le procès de Marie-Claire et sa mère Michèle n'est pas le premier du genre, mais l'avocate Gisèle Halimi, co-fondatrice de Choisir, est déterminée à faire de ce procès, tellement exemplaire, celui qui fera basculer l'opinion publique et le législateur dans une nouvelle phase de leur histoire. Marie Bardiaux-Vaïente, historienne et scénariste passionnée par toutes les questions liées à la liberté individuelle et elle-même personnellement concernée par le sujet, a donc décidé, cinquante ans après les faits, de raconter ce moment crucial de notre Histoire. Elle a consulté pour cela de nombreux documents et témoignages, et tenté de retranscrire au mieux les différentes phases de cette affaire. Ainsi, même si Marie-Claire, sa mère et Me Halimi sont au centre de l'histoire, de nombreuses autres personnalités, comme Delphine Seyrig, à l'aura incroyable, Simone Veil, qui a porté au Parlement la loi légalisant l'IVG en tant que Ministre de la Santé, ou encore Françoise Giroud, journaliste qui fait fi des demandes de confidentialité du président du tribunal, sont-elles présentes. On pourra citer également Michel Rocard, qui a porté le projet de loi, ou le prix Nobel de médecine, parmi les personnages masculins. Le récit fait bien sûr la part belle aux interrogatoires et plaidoiries qui ont émaillé le procès, mais n'est pas avare de scènes intimistes, de scènes de mobilisations dans la rue, afin de retranscrire non seulement l'ambiance de l'époque, mais aussi de saisir à quel point les femmes -pauvres, de surcroît, une injustice supplémentaire soulevée par Gisèle Halimi durant le procès- ont pu souffrir physiquement, moralement, socialement, économiquement de tout ça. Le résultat est tétanisant. Certains passages, parmi les intimistes, m'ont serré le cœur. Parce qu'ils synthétisent parfaitement tout ça. Cette souffrance, cette injustice. Pendant le procès, ce sont quatre femmes (en plus de la mère et de la fille, sur le banc des accusées se trouvent également celle qui a pratiqué l'avortement et l'amie qui les a mises en relation) face à quatre hommes. Si le procureur fait preuve de veulerie, d'obscurantisme et de machisme, le juge principal a quant à lui, comme il se doit bien sûr, pris ses responsabilités et fait preuve de discernement et laissé l'avocate dérouler ses arguments, interrogé les accusées et les témoins, les experts. Bien sûr nous n'avons pas l'intégralité des débats, qui peuvent facilement se retrouver si on souhaite approfondir. Le travail graphique de Carole Maurel est remarquable. Chaque case est ciselée, travaillée pour avoir un impact maximal sur le lectorat. Il y a des moments de silence, qui se passent de paroles, tant l'intensité des regards, des attitudes, est forte. Lors de scènes traumatisantes, les ambiances se font plus glaçantes, souvent en noir et blanc, avec quelques effets graphiques mais sans en faire trop. Indispensable.

19/02/2024 (modifier)
Par Cacal69
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Tremblez enfance Z46
Tremblez enfance Z46

Une très étrange BD. Je découvre l'auteur, EMG, avec cet album. Après un diplôme en architecture, il se tourne vers la bande dessinée et particulièrement la création numérique. D'abord, étrange par son graphisme, c'est lui qui m'a poussé à me procurer cet album. Une image par planche, un dessin aux formes géométriques où le cubisme est roi. Même les phylactères sont dans ce style. Une grande inventivité pour les personnages et les décors avec des petites surprises. Les couleurs, sans nuances, sont lumineuses et légèrement criardes. Le rendu aseptisé m'a totalement conquis. Ensuite, étrange dans sa narration/construction. J'ai commencé ma lecture par la page une qui suit le parcours d'Hicham jusqu'à la page 46, puis j'ai continué ma lecture avec l'apparition de Wassila sans remarquer que la numérotation des pages était alors décroissante (de 46 à1). Ensuite j'ai relu cette deuxième partie dans le sens de la numérotation des pages pour se terminer à la page 46 en milieu d'album (le titre prend du sens). En conclusion, l'album propose plusieurs possibilités aux lecteurs suivant ses envies (lecture complète ou partielle de l'album en suivant ou non la pagination). Pour des conclusions évidemment différentes. L'amour et l'immigration sont les thèmes principaux dans ce monde imaginaire très robotisé où une frontière sous haute surveillance sépare deux pays, elle pourra rappeler par certains aspects celle des deux Corée actuelles. Peu de texte, un zeste d'humour pour un album déroutant. Si vous aimez sortir de votre zone de confort, foncez sur ce titre.

18/02/2024 (modifier)
Par Alix
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Je suis un bienerrant
Je suis un bienerrant

Cette année à Angoulême je m’étais promis de faire preuve de retenu, de n’acheter que des BDs dont j’avais entendu parler. Je n’ai enfreint cette règle qu’une fois, et craqué pour cet album aux éditions Des bulles dans l'océan, grâce à sa couverture magnifique… et je ressors satisfait de ma lecture. L’histoire est certes classique, et nous raconte un combat entre le Bien et le Mal, mettant en scène un Petit Peuple que seuls certains humains peuvent voir. L’intrigue est enjouée et bien racontée, les personnages sont attachants, à commencer par son protagoniste qui se retrouve emporté dans cette galère bien malgré lui. Le dessin et les couleurs aquarelles de Adriano Fruch sont absolument magnifiques, ma lecture fut une véritable promenade champêtre, et un délice pour les yeux. En tant qu’adulte, je trouvé ça vraiment pas mal, mais j’ai poussé la note à « franchement bien » pour un public ado, et je lirai très certainement le second tome, qui devrait conclure l’histoire.

17/02/2024 (modifier)
Par Blue boy
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série The autobiography of me too
The autobiography of me too

Champion de l’autodérision magnifiant la banalité et l’ennui du quotidien, Bouzard est une sorte de génie qui parvient même à contrarier la mort, laquelle, visiblement, ne veut pas de lui. Provocation ultime adressée à la faucheuse, la couverture laisse apparaître en vernis sélectif doré une petite croix funéraire quelque peu difforme ! Si ce n’est encore pas le glas qui sonne pour le gars Bouzard, il semblerait que pour lui, ce soit plutôt l’heure de la consécration avec cet « Ultimate » ! Et les Requins Marteaux ont vu grand, en intégrant, s’il vous plaît, un ruban marque-page à l’ouvrage ! Vingt ans après, l’humour est resté intact, indifférent à l’usure des ans et au wokisme en vogue. Humilié par sa compagne dès qu’il se risque à fanfaronner, Bouzard, allergique aux tâches ménagères, ne subira jamais les scuds de #metoo. Quand bien même il cherche à faire faire la peau de son « chien stupide », qui prend un malin plaisir à le ridiculiser, les associations de défense des animaux ne pourront rien contre lui. Ni la ligue contre l’alcoolisme, malgré sa consommation de pinard bien au-delà du raisonnable, ni les ligues catholiques à la vue de son chibre raide (quoique modeste). Bref, le ton va si loin dans l’absurde et l’autodérision qu’il rend inattaquable son auteur… et ne ferait que ridiculiser l’attaquant… A l’avenant, le dessin volontairement mal fichu est un sommet de drôlerie. On l’oublie souvent, mais il faut un certain talent pour réussir à faire passer des émotions (ici en l’occurrence le rire) en deux coups de crayon, et Bouzard n’en manque pas. Dans la même catégorie, on pense d’abord à Reiser, dont le trait « moche et vulgaire », associé à une irrévérence féroce, a fait les beaux jours d’Hara-Kiri et du Charlie Hebdo des débuts. A la différence que Bouzard utilise pleinement les codes du neuvième art pour décupler les fous rires auprès de son lectorat. La mise en page en gaufrier, loin d’être une contrainte pour l’auteur, ne fait que renforcer le dynamisme narratif, en contrepoint d’anecdotes qui sans cet humour hypra décalé seraient désolantes de banalité. A cela vient s’ajouter un sens du mouvement très cartoonesque qui n’aurait pas tout à fait la même puissance comique sans ledit gaufrier. Il suffit pour s’en rendre compte de se reporter à la page 164, avec cette scène où notre (anti-)héros poursuit son clébard dans les arbres (volume 3 – « The Autobiography of me too free »), l’air de rien c’est du grand art. On n’oubliera pas de parler des expressions des visages hilarantes, dont certaines carrément « what the fuck », la plupart du temps empreintes de lassitude, de goguenardise ou de colère, c’est tout bonnement irrésistible ! En résumé, Bouzard, c’est la nonchalance désabusée alliée à du Tex Avery, la grosse fatigue alliée à du punch sur ressort. Pour des gags qui font mouche à tous les coups, sans forcer… parce que produire des gags sur commande, c’est assez fatigant au fond, et c’est pas non plus le genre de la maison… Bouzard, c’est du gag en hamac, un peu la même école que Boulet ou Fabcaro. A la lecture de cette intégrale qui donne très envie d’avaler toute sa bibliographie, on serait disposé à faire confiance à son pote préfacier Winshluss, en espérant que la piquouze « reanimator » atteindra les neurones de notre homme fait zombie. Même si l’on sait, que de toute façon, Bouzard est éternel.

16/02/2024 (modifier)
Couverture de la série Zaï Zaï Zaï Zaï
Zaï Zaï Zaï Zaï

J'ai emprunté ce petit ouvrage qui ne paye pas de mine sans savoir où je mettais les pieds. C'est un des plaisirs de mes lacunes immenses dans le domaine de la BD : s'émerveiller ou râler sur des "vieilles" séries que tout le monde connait. Dès les premières pages (la 2 ou 3) j'ai été intrigué puis déboussolé et enfin enchanté par l'exploitation à l'extrême de l'absurde des situations ou des dialogues que propose Fabcaro. C'est un humour d'une grande intelligence qui ne fait jamais appel à la vulgarité ni à la méchanceté pour sonner au plus juste. Derrière des situations qui renvoient à Alfred Jarry ou à Kafka cela reste une satire virulente de la société consumériste à outrance qui utilise un prêt-à-penser et des phrases toutes faites. A travers la pertinence et l'insolence de ses gags, l'auteur demande de réfléchir à la banalisation de l'indicible (pédophilie, suicide des jeunes, ouverture de façade...) Dans cet exercice Fabcaro approche en quelques pages la maîtrise des maîtres de l'absurde d'il y a 60 ans. Ces quelques pages sont bourrées d'un talent rare de grand alchimiste qui sait transformer la rouille qui nous entoure en or de l'esprit. Le graphisme est en harmonie avec la petite musique du récit. Le trait va à l'essentiel de l'expression verbale ou gestuelle. C'est simple et dépouillé de tout artifice superflu mais c'est fluide et cristallin. Une formidable découverte qui m'a fait passer un excellent moment de rire et de réflexion.

15/02/2024 (modifier)
Couverture de la série Journal inquiet d'Istanbul
Journal inquiet d'Istanbul

Coup de cœur pour cette bd que j’ai mis longtemps à lire après être allée la chercher à la bibliothèque quand on me l'a recommandée suite à la lecture de Dissident Club. La raison : le dessin me rebutait, j’avais l’impression de voir un dessin animé satyrique pour adultes . Mais en fait on s’habitue à ce dessin plein de caractère dont j’ai aussi apprécié le côté « volumineux » des formes . L’histoire est très intéressante, à travers l’autobiographie de l’auteur qui parle de pourquoi il a voulu faire du dessin depuis petit, on voit les intimidations des religieux sur sa famille, les angoisses de son père. L’artiste est vraiment sympathique et courageux mais montre aussi ses mauvais côtés quand il fait le filou avec sa copine …lol Je vais m’arrêter à ce tome 1 je crois car j’adore la fin.

14/02/2024 (modifier)
Couverture de la série Moby Dick (Chabouté)
Moby Dick (Chabouté)

J'ai beaucoup aimé l'adaptation du roman de Melville par Chabouté. Ce dernier n'a probablement pas voulu suivre une adaptation exhaustive du roman. Il y a tellement de voies et de styles différents utilisés par Melville que le risque de produire un récit sans âme qui copie l'original était grand. L'auteur avait le choix entre les thématiques de l'aventure, du social, du documentaire. Chabouté semble avoir concentré sa vision de l'oeuvre sur le côté spéculatif et mystique des personnages. Les passages choisis renvoient presque tous à des interrogations métaphysiques (par exemple le sextant) et à une lutte entre le Bien et le Mal. Les références à l'autorité divine ou du capitaine sont nombreuses. Chabouté choisit ainsi de favoriser le personnage de Starbuck au détriment de celui d'Ismaël dont le nom apparait très peu au cours du récit. Le découpage du récit à partir d'une phrase issue du livre donne des points de repères comme des îlots qui nous accompagnent avec le Pequot à la sortie de Nantucket. Les dialogues sont assez rares comme souvent chez Chabouté jusqu'à l'apparition d'Achab qui va envahir l'espace d'où seul Starbuck saura se démarquer. La tension dramatique est présente dès la première apparition du capitaine et augmente jusqu'au paroxysme d'un final mis en scène de façon éblouissante par l'auteur. Le graphisme en N&B de Chabouté se prête magnifiquement à cette adaptation. Son dessin renvoie à l'intériorité des personnages qui évoluent au fil du charisme fou du capitaine. Dans un univers où la parole est rare (et sûrement pas pour contredire celle du capitaine), ce sont les postures gestuelles qu'insuffle le dessinateur qui font une grande part de la narration. Chabouté réussit à mes yeux la prouesse de fondre l'image de ses personnages dans son choix des textes souvent ardus qu'il emprunte à l'oeuvre originale. Même si je connais l'oeuvre originale, Chabouté m'a charmé avec l'ambiance spirituelle qu'il donne à son récit. Probablement la lecture que je préfère pour le moment de cet auteur.

14/02/2024 (modifier)