Emprunté par hasard dans le rayon bd d’une des bibliothèques universitaires de ma ville, ce livre a su me toucher positivement et fortement. « Le Chœur des femmes » raconte l’intégration d’une stagiaire nommée Jean Atwood au sein d’un service de gynécologie.
Cette bande dessinée pourrait être scindée en deux principaux thématiques : la découverte des principes de la gynécologie et la vie de Jean Atwood.
Je n’étais pas particulièrement enthousiaste à découvrir les dessous de cette spécialité médico-chirurgicale… Après lecture, j’en ressors complétement transfiguré car ce récit m’a carrément intéressé et passionné. En effet, je ne pensais pas que la physiologie de l’organe féminin soit à ce point complexe et sensible. Ce livre regorge tellement d’informations à ce sujet que cela ne m’étonne guère qu’il ait été mis à la disposition des étudiants en médecine.
Et surtout, ce que je retiens le plus dans cette bande dessinée, c’est la détermination des auteurs à lutter contre la violence faite aux femmes au nom de la médecine parce qu’elles ont la réputation d’être trop « chochottes » face aux opérations dont certains docteurs ne se soucient guère du ressentiment de leurs patientes. Ce volet est particulièrement développé à travers la personnalité de Karma (drôle de nom, n’est-ce pas ?), un médecin dont ses méthodes et ses réflexions s’avèrent déroutantes au premier abord mais qui, au final, sont d’une redoutable efficacité.
Quand on sait que cette bande dessinée est une adaptation d’un roman de Martin Winckler, on se dit que tout cela n’est qu’une fiction et que c’est trop beau pour qu’on y croie : ce n’est pas faux au vu des nombreux évènements un peu trop téléphonés à mon goût qui concluent ce one-shot, au vu également de la personnalité de Jean Atwood dont on peut deviner que son fort caractère est un (bon) moyen pour le scénariste d’incorporer des scènes humoristiques et dramatiques dans son récit. Mais tout cela marche très bien, c’est plaisant et je ressors de cette lecture marquée par ces deux principaux protagonistes dont leurs échanges sont empreints de bons sens et d’humanisme. J’ai apprécié l’évolution de Jean Atwood dont son tempérament forgé initialement par la virilité des médecins, va se montrer de plus en plus attentive aux aspirations des patientes.
La mise en page et le coup de crayon semblent simplistes, c’est de la ligne claire et les couleurs pastelles sont plaisantes à l’œil : le tout forme une bande dessinée très agréable à contempler et d’une lisibilité redoutable. C’est du bel ouvrage pour un récit qui ne demandait rien de plus.
Vu le thème abordé, la gynécologie, « Le Chœur des femmes » semble être une bande dessinée qui est uniquement destiné au lectorat féminin… Que nenni ! Messieurs, ayez au moins la curiosité de lire cet album d’une sensibilité et d’une grande richesse d’informations qui a su me captiver jusqu’à son dénouement ! En tout cas, c’est avec un œil différent, un regard beaucoup plus tendre et compréhensif qu’avant sur la gente féminine que je ressors de cette lecture.
Mêlant la grande Histoire et la petite avec humour et subtilité, Philippe Charlot et Eric Hubsch nous ramène à Versailles au temps de Louis XIV, alors que celui-ci, d'un âge déjà avancé, souffre d'une fistule anale si fameuse qu'elle possède sa propre page Wikipedia. Notre héros, lui, n'est que l'humble fils d'un boucher, désirant devenir barbier et légèrement instruit dans l'art de la médecine qui accompagne à l'époque celui de savoir simplement tailler la barbe. Par un coup du sort, il attirera l'attention favorable du roi qui va le placer en tant que disciple de son chirurgien en chef, ce qui offre dès lors au jeune homme des espoirs à la hauteur de ses nouvelles ambitions sociales.
L'intrigue mêle réalité historique, scènes cocasses, un peu de romance et un zeste d'espionnage et de complot.
Le dessin d'Eric Hubsch y est soigné, souple et bien adapté à l'aventure humoristique. Il a un côté me rappelant celui de Bruno Duhamel que j'aime beaucoup.
Le scénario tient en un unique tome sans se révéler ni trop léger, ni trop dense. Et pourtant il s'y passe pas mal de choses. J'y ai apprécié la vivacité d'esprit du héros, quoiqu'il m'ait un peu déçu à un moment donné quand il commence à prendre trop confiance en lui, avant heureusement de se raviser sagement plus tard. Les dialogues sont plutôt fins et souvent amusants, voire intelligents.
Le réalisme historique est appréciable également, notamment dans la justesse avec laquelle les évènements qui sont racontés ici, aussi étonnants soient-ils, restent finalement conformes à la vérité telle qu'elle est connue. Tout n'y est pas parfait toutefois sur le plan historique, le manque d'hygiène à Versailles y étant par exemple exagéré sur certains plans, les pots de chambre jetés par les fenêtres et les déjections n'importe où dans le palais étant certes véridiques au Louvre mais plus vraiment à l'heure du jour à Versailles où des fosses d'aisance et quelques toilettes publiques existaient pour préserver l'hygiène.
J'ai pris plaisir à lire cette BD bien dessinée et intelligemment racontée, avec une histoire qui manque certes un petit peu d'envergure mais se révèle intéressante, amusante et bien menée.
Quelques années après Saison brune, Squarzoni remet le couvert. Non pas forcément pour une « mise à jour » (quoi que), mais pour s’attaquer à un autre aspect délétère de nos sociétés, à savoir l’univers numérique.
Pour qui s’intéresse à ce sujet et/ou qui comme moi lit régulièrement le Monde diplomatique, il n’y a pas forcément de révélation essentielle. Mais la force de cet ouvrage (comme du précédent évoqué plus haut d’ailleurs), c’est qu’il relie un grand nombre d’informations, de faits, et donne ainsi sens à une réflexion plus globale.
Cet univers dématérialisé, présenté comme une alternative aux énergies fossiles, comme la panacée lors des confinements ou comme un moyen de pallier aux suppressions des services publics (et j’oublie bien d’autres choses positives qui lui sont accolées), se révèle en fait mortifère. Car il ne s’agit pas de dématérialiser, mais de rendre invisible une certaine réalité : pollutions, aliénation, tant de choses qui hypothèquent l’avenir en silence, dans l’ombre (il n’est pas de pire aveugle que celui qui ne veut voir il est vrai).
Squarzoni ne tombe pas dans le prêchi prêcha, et ne cherche d’ailleurs pas à donner des leçons, à se présenter comme un modèle. La force de son livre tient à ce qu’il « donne à voir », il livre des informations, il les contextualise, et amène donc ceux qui le souhaitent à réfléchir (toutes les données sont sourcées et vérifiables). Cela devrait être le travail des dirigeants politiques, pour informer les citoyens, qui pourraient alors, en tant qu’électeurs, mais aussi en tant que « consommateurs » agir de façon bien plus éclairée. Il est triste que ce ne soit pas le cas (mais est-ce étonnant, lorsque l’on connait le travail de lobbying des gafam, et la complaisance, si ce n’est la connivence entretenue avec elles par nos dirigeants, Macron en tête ?).
J’ajoute que la lecture, malgré une pagination importante, est très agréable, très fluide, et relativement rapide. Il n’y a pas beaucoup de texte. Et les images mises en appui de ce texte, souvent tirées de l’actualité (pour appuyer le propos ou au contraire pour amener un écart absurde, loufoque ou scandaleux), sont le plus souvent judicieusement choisies.
Un album qui donne à réfléchir, intéressant et intelligent, donc hautement recommandable. A chacun de voir ensuite ce qu’il en fait.
J’adore cette série pleine d’humour dans laquelle on retrouve des situations que l’on a tous plus ou moins vécues quand on était enfant.
Cette BD semble destinée aux jeunes enfants mais je n’en suis pas si sûr car les dialogues sont souvent trop subtils pour eux. Je pense néanmoins qu’elle peut être bien appréciée par eux si on leur fournit ça et là quelques explications supplémentaires.
Par contre, un adulte y retrouvera sa jeunesse et apprendra à mieux comprendre les enfants d’aujourd’hui. En effet, si les thèmes traités sont assez universels et intemporels, la société et le système éducatif ont tellement changé ces dernières décennies qu’une remise à niveau grâce à Ariol peut s’avérer très instructive pour les vieux croûtons que nous sommes devenus.
Lorsque j’ai ouvert cet album, je ne m’attendais à rien de particulier. Je venais de lire d’autres tires de cette série (Panique en Atlantique, La Grosse tête, Spirou se marie, Fondation Z) qui ne m’avaient pas particulièrement séduit et je m’attendais à lire un récit du même acabit.
Quelle ne fut pas ma surprise !
Pour moi ce récit est sans doute ce qu’il y a eut de mieux depuis Le Journal d’un ingénu d’Émile Bravo. Et d’ailleurs les ressemblances entre les deux albums sont notables.
La encore Spirou est confronté à la grande histoire. Pas celle de la seconde guerre mondiale mais plutôt celle des Républiques Soviétiques du bloc de l’Est ( Le Karadjan ressemble singulièrement à l’ex Yougoslavie, à la Hongrie ou à l’Albanie des années 60). La encore Spirou est obligé de sortir de la naïveté qui est la sienne et dans laquelle semble l’entretenir un Fantasio toujours plus « hors sol ». La encore Spirou tombe sous le charme d’une jolie fille de l’Est dans une pseudo idylle qui durera le temps d’un séjour à l’hôtel. L’intrigue fort bien menée ressemble à un roman de John Le Carré et se développe sur près de 80 pages soit un format bien plus long que les autres histoires de la série. Je découvre ici le dessin de Durieux, proche de celui de la ligne claire, avec de très belles planches notamment celle de la scène dans la piscine de l’hôtel, ou de la fuite de Spirou en fin d’histoire.
Je vous invite fortement à lire cette histoire qui revient la encore aux origines du personnage de Spirou, bien loin de l’univers de Franquin, mais certainement pas dénuées d’intérêt. Une vraie belle réussite.
Un merveilleux conte pour enfant mais aussi pour les plus grands.
Ma deuxième incursion dans le monde fabuleux de Séverine Gauthier après Coeur de pierre.
Un récit touchant et intemporel. Elle y apporte toujours cette poésie associée à un onirisme fantastique où la métaphore est reine.
Un conte qui fait réfléchir sur nos racines, sur ce lien fort qui lie deux êtres vivants et qu'on appelle l'amour, sur ce besoin de se créer des souvenirs communs pour ne pas oublier et surtout sur le passage dans l'autre monde, ce moment où il faut se dire 'au revoir'.
Un petit bijou sur des valeurs essentielles à mes yeux et une jolie piqûre de rappel.
Le dessin de Amélie Fléchais est magnifique et contribue grandement à ressentir cette atmosphère fantasmagorique qui transpire sur toutes les planches. Le choix limité des couleurs et la mise en page mettent en valeur la partie graphique.
Vraiment très beau.
Une lecture rapide mais hautement recommandable.
Il y a tellement de belles choses dans cet album.
Romain, protagoniste de cette histoire, est attachant au possible. La façon dont il se préoccupe de son institutrice est touchante, son point de vue d’enfant, rempli d’incompréhension et de désir de vouloir décrypter le monde des grands, apporte une tendresse incroyable au récit. J’ai aussi beaucoup aimé la complicité avec sa grande sœur. Au final, l’auteur aborde le sujet des troubles alimentaires avec une humanité qui fait chaud au cœur.
La mise en image d’Hippolyte contribue d’ailleurs beaucoup à cette tendresse, grâce à un trait tout en rondeur et des couleurs aquarelles chaudes… les planches sont un délice pour les yeux.
Un album qui m’a beaucoup ému, et un coup de cœur. Magnifique.
Je connaissais le principe de l’arnaque dite « pyramide de Ponzi », mais ne connaissais rien de celui qui lui a donné son nom. Voilà qui est réparé avec cette lecture.
Car l’album se concentre essentiellement sur la personnalité de Ponzi, et ne s’embarrasse pas de détails techniques à propos de l’arnaque elle-même – dont le principe, de toute façon, est des plus simples.
Du coup, la lecture est fluide, agréable – au moins autant que le personnage m’est apparu désagréable, tant il est éloigné des valeurs que je place haut. En effet, il ne pense qu’à la réussite sociale, à l’accumulation d’argent (et de ce qui signale cette réussite et cette accumulation, à savoir belle voiture, grande maison, etc.). Corollaire de cette recherche d’enrichissement sans fin, une non moins forte soif de reconnaissance sociale. Il affiche sa réussite – il est vrai qu’un des ressorts de son arnaque repose sur sa notoriété, la confiance qu’il inspire, son bagout, qui fait oublier aux milliers de personnes bernées le moindre sens de la mesure et de la réalité.
Car ce que révèle cette histoire, c’est que les traits de caractères évoqués plus haut sont assez répandus, et c’est justement sur cela que Ponzi se base pour agir. Et d’ailleurs les auteurs rappellent bien en fin d’album que ce genre de système n’a pas disparu avec la chute de Ponzi – voir la dernière grande affaire du genre autour du financier Madoff (mais d’autres plus petites arnaques du genre font régulièrement la une des journaux). Ça en dit long sur la crédulité de certains !
Toujours est-il que cet album est instructif (un peu) et agréable à lire. Voir Ponzi passer d’une arnaque à l’autre jusqu’à ce qu’il trouve « la bonne » donne du rythme à l’histoire, tout en nous donnant une image certes réaliste, mais au combien désespérante de « l’humanité », et de nos sociétés modernes.
J’ajoute que si Ponzi me laisse froid lorsqu’il recherche enrichissement personnel et reconnaissance sociale, il est aussi des plus désagréables lorsque son égoïsme, son attitude autocentrée lui font mépriser les désirs de sa femme – qu’il croit combler en lui offrant certains des fruits de sa réussite.
Pas besoin d’être féru d’économie pour apprécier cet album.
Note réelle 3,5/5.
Patrick Prugne nous livre une nouvelle « histoire d’indiens », inspirée cette fois-ci du personnage réel de Pocahontas.
La précision historique est pointue, l’auteur a fait beaucoup de recherches sur les événements, les personnages, mais aussi les navires, les armes, la forme du fort bâti par les colons… le tout au service d’une histoire certes classique mais prenante et remarquablement narrée. Un énième rappel des horreurs de la colonisation de l’Amérique du Nord.
Le dessin est dans la lignée de ses œuvres précédentes : un trait précis, des couleurs aquarelles magnifiques, et des grands espaces sauvages. Que c’est beau.
Voilà, Prugne fait du Prugne, mais moi, j’en redemande.
Blue in Green est mon quatrième Ram V après These Savage Shores, Toutes les morts de Laila Starr et Swamp Thing Infinite. Et toujours pas déçu.
Ram V est un formidable conteur d'histoires, il a ce talent pour embarquer le lecteur, le captiver et ne plus le lâcher.
Un récit où vient se croiser la musique (le jazz), un secret de famille et l'envie de réussir sur fond de fantastique.
L'histoire d'un homme, Erik, qui revient dans la maison familiale pour l'enterrement de sa mère et à partir de là, les événements vont s'enchaîner avec l'apparition d'un ectoplasme.
Un récit qui prend son temps, les personnages sont complexes et attachants et l'introspection d'Erik sur le sens à donner à sa vie, à son art, est vraiment bien rendu et d'une forte épaisseur émotionnelle.
Sommes-nous prêts à tout pour réussir ? Quitte à vendre son âme au diable ?
Une délicieuse lecture avec une fin particulièrement poignante.
Je découvre Anand RK et son style graphique est bien singulier, il se rapproche de Dave McKean, mais surtout de Martin Simmonds dans The Department of Truth. Bref, j'adore ! Il sied à merveille pour dépeindre l'ambiance tourmentée qui flotte autour d'Erik.
La mise en page et les couleurs sont au diapason.
Superbe !
Comme l'explique Ram V en fin d'album, le scénario s'est construit au fil de l'eau comme un bon vieux morceau de jazz improvisé, parfaitement orchestré et sans fausses notes.
Album plus que recommandable.
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Le Choeur des femmes
Emprunté par hasard dans le rayon bd d’une des bibliothèques universitaires de ma ville, ce livre a su me toucher positivement et fortement. « Le Chœur des femmes » raconte l’intégration d’une stagiaire nommée Jean Atwood au sein d’un service de gynécologie. Cette bande dessinée pourrait être scindée en deux principaux thématiques : la découverte des principes de la gynécologie et la vie de Jean Atwood. Je n’étais pas particulièrement enthousiaste à découvrir les dessous de cette spécialité médico-chirurgicale… Après lecture, j’en ressors complétement transfiguré car ce récit m’a carrément intéressé et passionné. En effet, je ne pensais pas que la physiologie de l’organe féminin soit à ce point complexe et sensible. Ce livre regorge tellement d’informations à ce sujet que cela ne m’étonne guère qu’il ait été mis à la disposition des étudiants en médecine. Et surtout, ce que je retiens le plus dans cette bande dessinée, c’est la détermination des auteurs à lutter contre la violence faite aux femmes au nom de la médecine parce qu’elles ont la réputation d’être trop « chochottes » face aux opérations dont certains docteurs ne se soucient guère du ressentiment de leurs patientes. Ce volet est particulièrement développé à travers la personnalité de Karma (drôle de nom, n’est-ce pas ?), un médecin dont ses méthodes et ses réflexions s’avèrent déroutantes au premier abord mais qui, au final, sont d’une redoutable efficacité. Quand on sait que cette bande dessinée est une adaptation d’un roman de Martin Winckler, on se dit que tout cela n’est qu’une fiction et que c’est trop beau pour qu’on y croie : ce n’est pas faux au vu des nombreux évènements un peu trop téléphonés à mon goût qui concluent ce one-shot, au vu également de la personnalité de Jean Atwood dont on peut deviner que son fort caractère est un (bon) moyen pour le scénariste d’incorporer des scènes humoristiques et dramatiques dans son récit. Mais tout cela marche très bien, c’est plaisant et je ressors de cette lecture marquée par ces deux principaux protagonistes dont leurs échanges sont empreints de bons sens et d’humanisme. J’ai apprécié l’évolution de Jean Atwood dont son tempérament forgé initialement par la virilité des médecins, va se montrer de plus en plus attentive aux aspirations des patientes. La mise en page et le coup de crayon semblent simplistes, c’est de la ligne claire et les couleurs pastelles sont plaisantes à l’œil : le tout forme une bande dessinée très agréable à contempler et d’une lisibilité redoutable. C’est du bel ouvrage pour un récit qui ne demandait rien de plus. Vu le thème abordé, la gynécologie, « Le Chœur des femmes » semble être une bande dessinée qui est uniquement destiné au lectorat féminin… Que nenni ! Messieurs, ayez au moins la curiosité de lire cet album d’une sensibilité et d’une grande richesse d’informations qui a su me captiver jusqu’à son dénouement ! En tout cas, c’est avec un œil différent, un regard beaucoup plus tendre et compréhensif qu’avant sur la gente féminine que je ressors de cette lecture.
Le Royal Fondement - L'Histoire vraie de la face cachée du Roi Soleil
Mêlant la grande Histoire et la petite avec humour et subtilité, Philippe Charlot et Eric Hubsch nous ramène à Versailles au temps de Louis XIV, alors que celui-ci, d'un âge déjà avancé, souffre d'une fistule anale si fameuse qu'elle possède sa propre page Wikipedia. Notre héros, lui, n'est que l'humble fils d'un boucher, désirant devenir barbier et légèrement instruit dans l'art de la médecine qui accompagne à l'époque celui de savoir simplement tailler la barbe. Par un coup du sort, il attirera l'attention favorable du roi qui va le placer en tant que disciple de son chirurgien en chef, ce qui offre dès lors au jeune homme des espoirs à la hauteur de ses nouvelles ambitions sociales. L'intrigue mêle réalité historique, scènes cocasses, un peu de romance et un zeste d'espionnage et de complot. Le dessin d'Eric Hubsch y est soigné, souple et bien adapté à l'aventure humoristique. Il a un côté me rappelant celui de Bruno Duhamel que j'aime beaucoup. Le scénario tient en un unique tome sans se révéler ni trop léger, ni trop dense. Et pourtant il s'y passe pas mal de choses. J'y ai apprécié la vivacité d'esprit du héros, quoiqu'il m'ait un peu déçu à un moment donné quand il commence à prendre trop confiance en lui, avant heureusement de se raviser sagement plus tard. Les dialogues sont plutôt fins et souvent amusants, voire intelligents. Le réalisme historique est appréciable également, notamment dans la justesse avec laquelle les évènements qui sont racontés ici, aussi étonnants soient-ils, restent finalement conformes à la vérité telle qu'elle est connue. Tout n'y est pas parfait toutefois sur le plan historique, le manque d'hygiène à Versailles y étant par exemple exagéré sur certains plans, les pots de chambre jetés par les fenêtres et les déjections n'importe où dans le palais étant certes véridiques au Louvre mais plus vraiment à l'heure du jour à Versailles où des fosses d'aisance et quelques toilettes publiques existaient pour préserver l'hygiène. J'ai pris plaisir à lire cette BD bien dessinée et intelligemment racontée, avec une histoire qui manque certes un petit peu d'envergure mais se révèle intéressante, amusante et bien menée.
Saison brune 2.0 (Nos empreintes digitales)
Quelques années après Saison brune, Squarzoni remet le couvert. Non pas forcément pour une « mise à jour » (quoi que), mais pour s’attaquer à un autre aspect délétère de nos sociétés, à savoir l’univers numérique. Pour qui s’intéresse à ce sujet et/ou qui comme moi lit régulièrement le Monde diplomatique, il n’y a pas forcément de révélation essentielle. Mais la force de cet ouvrage (comme du précédent évoqué plus haut d’ailleurs), c’est qu’il relie un grand nombre d’informations, de faits, et donne ainsi sens à une réflexion plus globale. Cet univers dématérialisé, présenté comme une alternative aux énergies fossiles, comme la panacée lors des confinements ou comme un moyen de pallier aux suppressions des services publics (et j’oublie bien d’autres choses positives qui lui sont accolées), se révèle en fait mortifère. Car il ne s’agit pas de dématérialiser, mais de rendre invisible une certaine réalité : pollutions, aliénation, tant de choses qui hypothèquent l’avenir en silence, dans l’ombre (il n’est pas de pire aveugle que celui qui ne veut voir il est vrai). Squarzoni ne tombe pas dans le prêchi prêcha, et ne cherche d’ailleurs pas à donner des leçons, à se présenter comme un modèle. La force de son livre tient à ce qu’il « donne à voir », il livre des informations, il les contextualise, et amène donc ceux qui le souhaitent à réfléchir (toutes les données sont sourcées et vérifiables). Cela devrait être le travail des dirigeants politiques, pour informer les citoyens, qui pourraient alors, en tant qu’électeurs, mais aussi en tant que « consommateurs » agir de façon bien plus éclairée. Il est triste que ce ne soit pas le cas (mais est-ce étonnant, lorsque l’on connait le travail de lobbying des gafam, et la complaisance, si ce n’est la connivence entretenue avec elles par nos dirigeants, Macron en tête ?). J’ajoute que la lecture, malgré une pagination importante, est très agréable, très fluide, et relativement rapide. Il n’y a pas beaucoup de texte. Et les images mises en appui de ce texte, souvent tirées de l’actualité (pour appuyer le propos ou au contraire pour amener un écart absurde, loufoque ou scandaleux), sont le plus souvent judicieusement choisies. Un album qui donne à réfléchir, intéressant et intelligent, donc hautement recommandable. A chacun de voir ensuite ce qu’il en fait.
Ariol
J’adore cette série pleine d’humour dans laquelle on retrouve des situations que l’on a tous plus ou moins vécues quand on était enfant. Cette BD semble destinée aux jeunes enfants mais je n’en suis pas si sûr car les dialogues sont souvent trop subtils pour eux. Je pense néanmoins qu’elle peut être bien appréciée par eux si on leur fournit ça et là quelques explications supplémentaires. Par contre, un adulte y retrouvera sa jeunesse et apprendra à mieux comprendre les enfants d’aujourd’hui. En effet, si les thèmes traités sont assez universels et intemporels, la société et le système éducatif ont tellement changé ces dernières décennies qu’une remise à niveau grâce à Ariol peut s’avérer très instructive pour les vieux croûtons que nous sommes devenus.
Le Spirou de Christian Durieux - Pacific Palace
Lorsque j’ai ouvert cet album, je ne m’attendais à rien de particulier. Je venais de lire d’autres tires de cette série (Panique en Atlantique, La Grosse tête, Spirou se marie, Fondation Z) qui ne m’avaient pas particulièrement séduit et je m’attendais à lire un récit du même acabit. Quelle ne fut pas ma surprise ! Pour moi ce récit est sans doute ce qu’il y a eut de mieux depuis Le Journal d’un ingénu d’Émile Bravo. Et d’ailleurs les ressemblances entre les deux albums sont notables. La encore Spirou est confronté à la grande histoire. Pas celle de la seconde guerre mondiale mais plutôt celle des Républiques Soviétiques du bloc de l’Est ( Le Karadjan ressemble singulièrement à l’ex Yougoslavie, à la Hongrie ou à l’Albanie des années 60). La encore Spirou est obligé de sortir de la naïveté qui est la sienne et dans laquelle semble l’entretenir un Fantasio toujours plus « hors sol ». La encore Spirou tombe sous le charme d’une jolie fille de l’Est dans une pseudo idylle qui durera le temps d’un séjour à l’hôtel. L’intrigue fort bien menée ressemble à un roman de John Le Carré et se développe sur près de 80 pages soit un format bien plus long que les autres histoires de la série. Je découvre ici le dessin de Durieux, proche de celui de la ligne claire, avec de très belles planches notamment celle de la scène dans la piscine de l’hôtel, ou de la fuite de Spirou en fin d’histoire. Je vous invite fortement à lire cette histoire qui revient la encore aux origines du personnage de Spirou, bien loin de l’univers de Franquin, mais certainement pas dénuées d’intérêt. Une vraie belle réussite.
L'Homme Montagne
Un merveilleux conte pour enfant mais aussi pour les plus grands. Ma deuxième incursion dans le monde fabuleux de Séverine Gauthier après Coeur de pierre. Un récit touchant et intemporel. Elle y apporte toujours cette poésie associée à un onirisme fantastique où la métaphore est reine. Un conte qui fait réfléchir sur nos racines, sur ce lien fort qui lie deux êtres vivants et qu'on appelle l'amour, sur ce besoin de se créer des souvenirs communs pour ne pas oublier et surtout sur le passage dans l'autre monde, ce moment où il faut se dire 'au revoir'. Un petit bijou sur des valeurs essentielles à mes yeux et une jolie piqûre de rappel. Le dessin de Amélie Fléchais est magnifique et contribue grandement à ressentir cette atmosphère fantasmagorique qui transpire sur toutes les planches. Le choix limité des couleurs et la mise en page mettent en valeur la partie graphique. Vraiment très beau. Une lecture rapide mais hautement recommandable.
Mademoiselle Sophie ou la fable du lion et de l'hippopotame
Il y a tellement de belles choses dans cet album. Romain, protagoniste de cette histoire, est attachant au possible. La façon dont il se préoccupe de son institutrice est touchante, son point de vue d’enfant, rempli d’incompréhension et de désir de vouloir décrypter le monde des grands, apporte une tendresse incroyable au récit. J’ai aussi beaucoup aimé la complicité avec sa grande sœur. Au final, l’auteur aborde le sujet des troubles alimentaires avec une humanité qui fait chaud au cœur. La mise en image d’Hippolyte contribue d’ailleurs beaucoup à cette tendresse, grâce à un trait tout en rondeur et des couleurs aquarelles chaudes… les planches sont un délice pour les yeux. Un album qui m’a beaucoup ému, et un coup de cœur. Magnifique.
La Pyramide de Ponzi
Je connaissais le principe de l’arnaque dite « pyramide de Ponzi », mais ne connaissais rien de celui qui lui a donné son nom. Voilà qui est réparé avec cette lecture. Car l’album se concentre essentiellement sur la personnalité de Ponzi, et ne s’embarrasse pas de détails techniques à propos de l’arnaque elle-même – dont le principe, de toute façon, est des plus simples. Du coup, la lecture est fluide, agréable – au moins autant que le personnage m’est apparu désagréable, tant il est éloigné des valeurs que je place haut. En effet, il ne pense qu’à la réussite sociale, à l’accumulation d’argent (et de ce qui signale cette réussite et cette accumulation, à savoir belle voiture, grande maison, etc.). Corollaire de cette recherche d’enrichissement sans fin, une non moins forte soif de reconnaissance sociale. Il affiche sa réussite – il est vrai qu’un des ressorts de son arnaque repose sur sa notoriété, la confiance qu’il inspire, son bagout, qui fait oublier aux milliers de personnes bernées le moindre sens de la mesure et de la réalité. Car ce que révèle cette histoire, c’est que les traits de caractères évoqués plus haut sont assez répandus, et c’est justement sur cela que Ponzi se base pour agir. Et d’ailleurs les auteurs rappellent bien en fin d’album que ce genre de système n’a pas disparu avec la chute de Ponzi – voir la dernière grande affaire du genre autour du financier Madoff (mais d’autres plus petites arnaques du genre font régulièrement la une des journaux). Ça en dit long sur la crédulité de certains ! Toujours est-il que cet album est instructif (un peu) et agréable à lire. Voir Ponzi passer d’une arnaque à l’autre jusqu’à ce qu’il trouve « la bonne » donne du rythme à l’histoire, tout en nous donnant une image certes réaliste, mais au combien désespérante de « l’humanité », et de nos sociétés modernes. J’ajoute que si Ponzi me laisse froid lorsqu’il recherche enrichissement personnel et reconnaissance sociale, il est aussi des plus désagréables lorsque son égoïsme, son attitude autocentrée lui font mépriser les désirs de sa femme – qu’il croit combler en lui offrant certains des fruits de sa réussite. Pas besoin d’être féru d’économie pour apprécier cet album. Note réelle 3,5/5.
Pocahontas (Patrick Prugne)
Patrick Prugne nous livre une nouvelle « histoire d’indiens », inspirée cette fois-ci du personnage réel de Pocahontas. La précision historique est pointue, l’auteur a fait beaucoup de recherches sur les événements, les personnages, mais aussi les navires, les armes, la forme du fort bâti par les colons… le tout au service d’une histoire certes classique mais prenante et remarquablement narrée. Un énième rappel des horreurs de la colonisation de l’Amérique du Nord. Le dessin est dans la lignée de ses œuvres précédentes : un trait précis, des couleurs aquarelles magnifiques, et des grands espaces sauvages. Que c’est beau. Voilà, Prugne fait du Prugne, mais moi, j’en redemande.
Blue in green
Blue in Green est mon quatrième Ram V après These Savage Shores, Toutes les morts de Laila Starr et Swamp Thing Infinite. Et toujours pas déçu. Ram V est un formidable conteur d'histoires, il a ce talent pour embarquer le lecteur, le captiver et ne plus le lâcher. Un récit où vient se croiser la musique (le jazz), un secret de famille et l'envie de réussir sur fond de fantastique. L'histoire d'un homme, Erik, qui revient dans la maison familiale pour l'enterrement de sa mère et à partir de là, les événements vont s'enchaîner avec l'apparition d'un ectoplasme. Un récit qui prend son temps, les personnages sont complexes et attachants et l'introspection d'Erik sur le sens à donner à sa vie, à son art, est vraiment bien rendu et d'une forte épaisseur émotionnelle. Sommes-nous prêts à tout pour réussir ? Quitte à vendre son âme au diable ? Une délicieuse lecture avec une fin particulièrement poignante. Je découvre Anand RK et son style graphique est bien singulier, il se rapproche de Dave McKean, mais surtout de Martin Simmonds dans The Department of Truth. Bref, j'adore ! Il sied à merveille pour dépeindre l'ambiance tourmentée qui flotte autour d'Erik. La mise en page et les couleurs sont au diapason. Superbe ! Comme l'explique Ram V en fin d'album, le scénario s'est construit au fil de l'eau comme un bon vieux morceau de jazz improvisé, parfaitement orchestré et sans fausses notes. Album plus que recommandable.