Les derniers avis (31538 avis)

Couverture de la série Revenants
Revenants

Cette série pacifiste est à lire en complément du documentaire vidéo " L'Âme en sang. Retour d'Irak". Contrairement au film où Olivier Morel n'intervient jamais et reste invisible et inaudible. La série le met en scène de façon importante. Cela montre très bien comment son action n'est pas neutre sur le réveil des traumatismes que connaissent beaucoup de vétérans depuis le conflit irakien. L'auteur n'insiste pas spécialement sur les exactions conduites en Irak à Ramadi, Abou Ghraib ou ailleurs. Seules quelques situations signifiantes rappellent l'horreur. Ce qui est plus marquant est la démonstration qu'une même scène peut être vécue de façon très différente d'un soldat à l'autre. Morel s'attache ,lui, aux traumatisés qui ont été acteurs ou témoins de scènes indicibles. Ce sont de jeunes hommes ou femmes , tout juste sorti-e-s de l'adolescence et confronté-e-s à une réalité qui les dépasse. Le livre n'est pas un pamphlet de plus contre une guerre atroce car toutes les guerres sont atroces. Morel s'attache plus à montrer comment des êtres, éduqués et sincères peuvent revenir vivre avec ce trauma de bourreau tabou pour la société qui l'entoure. Le dessin de Maël restitue bien cette ambiance oppressante et dramatique. Les images de la guerre sont rares (inexistantes dans la vidéo). Pour éviter une suite d'entretiens possiblement lassante, les auteurs intègrent les témoignages des vétérans ou de leur famille dans le contexte d'une Amérique à plusieurs vitesse ou dans le parcours de Morel à son accession à la nationalité américaine. Une lecture émouvante qui reste d'une malheureuse actualité.

06/09/2025 (modifier)
Couverture de la série Barnstormers
Barnstormers

Ambiance années 20 pour cette aventure aérienne de Bix et Tillie, les Bonnie and Clyde des airs. Le dessin glamour de Tula Lotay, très original, vaut à lui seul le baptême de l'air. Le barnstorming c'était le cirque volant que pratiquaient dans les années 20, les pilotes US démobilisés de la première guerre mondiale, les fous volants : cascades et prouesses étaient exécutées en plein ciel pour épater les fermiers du monde rampant (et récolter quelques subsides grâce aux baptêmes de l'air qui étaient proposés). L'américain Scott Snyder (venu des comics US) signe un scénario qui nous emmène survoler les champs de sorgho et de soja US que viennent rehausser les superbes dessins de Tula Lotay alias Lisa Wood (une dame, c'est peu fréquent et il faut le souligner). Leur collaboration date des années 2010 avec la série American Vampire et en 2023, ils ont produit "Barnstormers", une série en ligne [Comixology désormais Amazon] dont est tiré l'album papier d'aujourd'hui, adapté des premiers épisodes. La superbe colorisation est signée par l'irlandais Dee Cunniffe. Lui, c'est l'as des pilotes, Hawk E. Baron (ou Bix Huckett c'est selon). Glorieux héros, beau gosse et bon pilote de sa Jenny (le surnom du Curtiss JN4), du moins jusqu'à que son avion s'écrase au beau milieu d'une réception de noces. Elle, c'est la mariée, Tillie (ou Petra Zolatskyi, c'est selon), une brune fatale qui, du haut des talons de ses santiags, renvoie toutes les blondes au vestiaire. « [lui] - Je ne suis pas ... un mec bien. [elle] - Tu me le jures ? » Et hop, c'est parti pour un « périple qui va terroriser certaines des plus riches familles du pays, et qui laissera cent onze cadavres », excusez du peu. Mais les années 20 c'est aussi le temps de l'agence Pinkerton et un de leurs agents se retrouve bientôt aux trousses de Bix et Tillie, les Bonnie and Clyde des airs. Alors on espère très fort que ça finira peut-être pas si mal que ça, et on voudrait bien croire « qu'ils sont trop hauts pour être atteints, trop rapides pour être pris. » On est vraiment emballé par le dessin de Tula Lotay aux influences multiples : comics, roman photo, affiches de spectacles ou de cinéma, ... Et le côté glamour qui sied à cette histoire tragique mais terriblement romantique, est rehaussé par une colorisation qui rappelle les effets obtenus à l'aérographe. À tel point que le scénario, plutôt classique, de Scott Snyder ne semble là que pour permettre à la dessinatrice de déployer tout son talent. Mais sur fond de lutte des classes, un vent de liberté souffle suffisamment fort pour bousculer les conventions et l'intrigue se révèle d'une finesse inattendue, dépassant largement le simple hommage nostalgique à l'ambiance désuète des films d'antan.

06/09/2025 (modifier)
Par gruizzli
Note: 4/5
Couverture de la série La Force de vivre
La Force de vivre

Faut pas se mentir, en finissant la BD j'avais une petite larme à l’œil. Il faut dire que Laurent Astier se livre totalement dans cette BD, présentant une amitié profonde et sincère, terminée hélas. Une amitié qu'il va décortiquer petit à petit, refaisant au fil des souvenirs les évènements clés de celle-ci. Et honnêtement, c'est arrivé vers la moitié d'album que je me suis rendu compte que le récit était autobiographique, tant le début me faisait penser à une histoire "banale" d'amitié qui se finit par la mort et dont on doit gérer le deuil. Mais progressivement, l'émotion s'installe et je dois dire que sa sincérité se comprend mieux. Pas de pathos, ni de moment larmoyant, juste la brutale vérité d'une saloperie de maladie qui emporte quelqu'un après un long combat acharné. Rien de plus, mais en a-t-on besoin ? Je dois avouer que Laurent Astier réussit très bien son coup, la BD étant épaisse et longue, sans être pour autant trop bavarde et installant petit à petit les éléments importants de cette relation. Le début est plus long, les premières rencontres, les premiers échanges, la découverte de l'autre... Puis le temps passe, l'amitié reste et les liens se tissent plus profond. C'est émouvant, notamment dans les détails qui sonnent vrai et parfois si bête en même temps (comme pour la moto jamais réparée). On sent réellement l'amour de Astier pour son ami, et c'est un travail d'autant plus réussi qu'il ne donne pas l'impression d'être une simple histoire personnelle, un deuil qu'il règle dans cette BD (enfin, si, mais le lecteur y trouve aussi son compte). L'auteur n'est pas novice de la BD, et ça se sent dans plusieurs détails comme l'utilisation de la couleur lorsqu'il y a des changements de réalité, mais aussi dans les représentations avec l'utilisation de super-héros comme avatar. La narration est subtile dans les graphismes et je trouve ça parfaitement adapté de parler autant visuellement lorsque c'est l'émotion qui gagne. Une BD qu'on pourrait dire déjà vue, mille fois même, du drame intime et personnel, de la lutte contre un vilain crabe et du deuil, mais très bien faite, chargée en émotion et très bien rendue. Non, vraiment, une belle réussite !

05/09/2025 (modifier)
Couverture de la série Deux Filles nues
Deux Filles nues

Très bel album ! Luz parvient à traiter « par la bande » la montée du nazisme, de l’intolérance, du racisme quasiment sans en parler directement. Ou plutôt en le faisant du point de vue de l’art, des créateurs, des collectionneurs, des galeristes, des amateurs. Et d’un tableau donc, intitulé « Deux filles nues », qui va passer devant pas mal d’yeux, de mains en mains, comme une balise ou un témoin de son triste temps. J’ai bien aimé la construction narrative et graphique, qui montre souvent les Nazis au travers de fenêtres, ou seulement au travers de quelques passages express de Goebbels, voire Hitler pour un discours haineux. Leurs sous-fifres censés faire appliquer leurs lois sont vraiment grotesques. L’hypocrisie de certains dignitaires nazis au moment des saisies d’œuvres d’art – art prétendument dégénéré (au passage, voulant vilipender l’art moderne, les Nazis ont sans doute involontairement présenté une des plus belles expositions d’art moderne avec leur « tournée « Entartete Kunst ») est incroyable. Comme l’est le cynisme et/ou l’hypocrisie de ceux qui ont acheté à vil prix certains de ces tableaux vendus en Suisse par les Nazis. La narration est fluide, presque légère. Aérée (comme la mise en page d’ailleurs). Et intelligente. Si on n’est pas ici dans le rentre-dedans jouissif de certains albums de l’époque Charlie (je pense à l’excellent et très drôle Les Mégret Gèrent la Ville), le travail plus « posé » de Luz n’est pas ici moins efficace. Ainsi, avec une économie de moyens, Luz parvient à traiter d’un sujet douloureux, mais aussi de questions artistiques en nous proposant un album qui donne à voir et à réfléchir. Une grande réussite en tout cas.

05/09/2025 (modifier)
Par gruizzli
Note: 4/5
Couverture de la série Mediator - Un crime chimiquement pur
Mediator - Un crime chimiquement pur

Vous aimez vous énerver ? Non ? Alors passez votre chemin, puisque c'est le genre de BD qui énerve tout du long. Emmené par Hippocrate dans les arcanes du scandale du Médiator, la BD remonte assez loin en nous présentant le monsieur Servier à l'origine de cette saloperie, le premier scandale de médicament autour de la même molécule (l'Isoméride), puis l'apparition de Irène Fanchon et son combat. Le tout avec des détails bien étayés (et vu les procès que Servier fait à tout va c'est nécessaire) et sourcés en permanence. Une présentation glaçante d'effroi ... En fin de compte, l'histoire nous apprend l'impunité des cols blancs, les liens entre politique et entreprises, notamment sur la question de la justice (à deux visages malheureusement), mais aussi le silence dans les contrôles, le lobbying ... Bref, rien de neuf sous le soleil, mais encore une fois mis en forme de façon à comprendre comment une entreprise à permis de faire tuer des centaines de personnes en toute impunité, alors qu'elle savait. Et qu'elle a cachée, niée, etc .... Une entreprise gérée par un gars nommée à la plus haute distinction française par Sarkozy. En dehors de l'histoire affolante (et passionnante) du Médiator et le portait de Irène Franchon qui a eu un courage immense et une opiniâtreté qui fait plaisir, je dois bien dire que j'ai assez peu aimé le dessin. C'est du classique, j'avais déjà vu le trait de l'autrice dans une autre BD et je suis assez peu fan. Les visages notamment font très durs et fermés, souvent dans les mêmes postures. Ça manque un peu de vie, mais le découpage est très bien pour suivre avec tout les détails techniques tout en restant clair. Une saine lecture, contrairement aux médicaments qu'ils vendaient ...

04/09/2025 (modifier)
Couverture de la série Speak
Speak

Cette lecture m'a beaucoup remué même si je ne suis pas une femme. Emily Carroll adapte d'une façon magistrale le roman de Laurie Halse Anderson où cette dernière livre son expérience dramatique d'un événement criminel subi dans son adolescence. En s'appuyant sur le texte de la romancière , l'autrice livre un visuel très poignant qui nous enferme dans le huis clos de la tête de Melinda. La prouesse du récit est de faire de nous, lecteurs et lectrices , des témoins intérieurs mais aussi extérieurs à Melinda. L'axe principal est représenté par la découverte de l'intériorité de Melinda qui se réfugie dans le mutisme quasi total et le sommeil. Le mal-être de Melinda grandit en nous au fur et à mesure de l'année scolaire de seconde vécue par l'élève comme un long chemin de croix parsemé d'injustices, de déceptions mais aussi d'une nouvelle perception plus cynique et lucide sur la vanité de son entourage. Mais nous sommes aussi impliqués dans le cas Melinda. Les autrices montrent comment il peut être difficile de comprendre ce comportement. En effet le changement d'attitude de la JF est décrit avec la perception de son entourage: parents, amies ou professeurs. Les réponses sont maladroites (parents) ou bienveillantes (binôme, prof d'art) mais Melinda n'est pas abandonnée même si aucun ne peut parvenir à la réponse exacte dans cet environnement social huppé où la criminalité doit rester en dehors de ce cercle et réservé au domaine des infos TV. J'ai beaucoup apprécié la construction du récit qui lentement nous dévoile l'horreur d'une situation vécue par de nombreuses victimes à savoir vivre sous le regard goguenard et impuni de son bourreau. Le final est libérateur . Il est renforcé par cette liste de centres d'aide et d'écoute pour ce type de situation. Car comme le souligne le titre concis mais puissant, l'enjeu principal est de libérer la parole. Une parole qui a souvent été étouffée par un environnement peu réceptif voire hostile à traiter cette situation. La thématique est très lourde mais elle est traité de façon si intelligente qu'elle s'adresse à un très large public: les JF dès l'entrée au collège, les parents , les profs et les garçons possibles prédateurs. Une très belle lecture.

04/09/2025 (modifier)
Couverture de la série Voyage au centre du microbiote
Voyage au centre du microbiote

Quelle belle surprise! Cette vulgarisation sur l'étude du microbiote est d'une rare intelligence. Pourtant la lecture n'est pas forcément très engageante au premier abord. Le texte est rempli de termes scientifiques liés à l'intestin, les apartés philosophiques ou littéraires sont nombreux et l'argumentation qui défend l'importance de la diversité environnementale ou le risque d'une uniformisation mortifère est d'un très bon niveau. Cette enquête sur l'infiniment petit de nos intestins m'a captivé de bout en bout. La thématique que je découvre, pourrait être aride. Toutefois les auteurs y intègrent une fiction aux "senteurs" de blockbuster sur une île du Pacifique où tout dérape d'une façon très convaincante. Cela permet d'introduire une belle dose d'humour et de dérision dans cette urgence à prendre conscience de notre fragilité et de notre dépendance à l'invisible qui nous construit. J'ai beaucoup aimé cette présentation non agressive avec un champs d'étude encore vierge. Un champs d'étude qui pourrait à la fois nous mener vers un meilleur bien être mais aussi une meilleure connaissance de nous même et de la relation organique qui nous lie à l'extérieur. Pascal, Descartes illustrent par leurs pensées différents passages de la démonstration des auteurs. Entre biologie et philosophie cette série peut servir à mieux comprendre la complexité de la vie. C'est érudit sans être pédant. Le graphisme de Héloïse Chochois procure une narration visuelle très fluide et très agréable parfaitement en accord avec le texte. L'autrice a su créer des personnages très attachants.

04/09/2025 (modifier)
Par gruizzli
Note: 4/5
Couverture de la série Extinctions - Le Crépuscule des espèces
Extinctions - Le Crépuscule des espèces

Une très sympathique BD pour comprendre l'enjeu autour des extinctions d'espèces. Je comprend l'avis de Ro mais c'est mieux passé pour ma part, avec une lecture qui semble très axée pour enfant et donc didactique, que je trouve réussie. La BD a une histoire mais qui est carrément anecdotique, servant presque uniquement de prétexte à chaque chapitre pour développer un discours autour de l'extinction d'espèces : qu'est-ce que c'est, comment ça marche, qu'est-ce qu'on vit, d'où ça vient ? L'ensemble est découpé en chapitres clairs et simple, chacun permettant de lier ce que font les personnages aux questions de comment l'humain a découvert et crée les extinctions d'espèces. De nombreux exemples sont cités, des cartes apportent la compréhension de l'enjeu territorial ... C'est vraiment clair et didactique, avec une vraie volonté de créer une approche ludique et facile, notamment dans le dessin. L'humour est aussi présent, avec un brisage de quatrième mur à propos de la BD parfois. En somme, une bonne BD pour jeune mais qui peut être lu par des plus vieux sur la question de ce qu'est l'extinction. Il manque un peu de consistance dans l'histoire principale, mais je ne pense pas que ce soit l'idée de ce genre de BD. Et je note que bien que ce sujet me soit un peu connu, c'est une lecture qui m'a tout de même apporté des informations. Je rajouterais juste que si la fin est amère et manque de positif, il faut bien dire que la réalité donne malheureusement raison au désespoir ... Une BD pas mal du tout, un bon 3.5 qui vaudra le coup pour les plus jeunes mais ne décevra pas les plus vieux non plus.

03/09/2025 (modifier)
Couverture de la série Les Gorilles du Général
Les Gorilles du Général

Bah franchement rien à redire, on sent le truc calibré blockbuster mais quand les auteurs sont au diapason … que du bonheur ! Je ne suis pas un inconditionnel de Dorison (ça passe souvent mais ça peut méchamment dériver aussi), ici ça se lit super bien. Ce n’est encore que le 1er tome mais l'auteur sait tenir son lecteur. Personnages, ambiances et époque, tout est justement placé, en plus l’album bénéficie d’une belle pagination. L’histoire m’a paru généreuse et le dossier final « jeux des 7 erreurs » est très sympa, on apprécie d’autant plus le savoir faire du scénariste. Cette fluidité dans les péripéties doit également beaucoup à la partie graphique. C’est de très très haute tenue sur la longueur, parfaitement agencé et détaillé. Tout est bien campé pour nous immerger dans ce 1959 français, du bon et gros boulot. Ça fait plaisir. Bref une réalisation difficilement critiquable, pro de a à z. Après ça ne fait pas tout mais j’ai senti le soin et le petit plus dans le cas présent. Je ne suis absolument pas féru de cette période de notre histoire, mais décidément, après Un général, des généraux, j’aime la redécouvrir de si belle façon.

03/09/2025 (modifier)
Par Cacal69
Note: 4/5
Couverture de la série Vertige - 10 ans d'enquêtes sur la crise écologique et climatique
Vertige - 10 ans d'enquêtes sur la crise écologique et climatique

J'ai lu l'édition augmentée de 2024. Une lecture (comme beaucoup d'autres) qui ne donne plus envie de croire en nos hommes/femmes politiques. Une BD où onze récits vont se succéder sur la crise écologique et climatique. Une crise aux conséquences funestes. Il est triste de constater que la responsabilité de l'homme est toujours engagée. Une lecture instructive sur des sujets très différents. Certains de ces thèmes ne m'étaient pas inconnu, en particulier la roche qui se fragilise en montagne, le problème des pesticides aux Antilles, les algues vertes où le fait de payer pour polluer. Elle dresse un constat accablant. Des enquêtes très bien documentées, certaines plus développées que d'autres, elles expliquent, argumentent et proposent car il est toujours possible de freiner ce dérèglement climatique et écologique. J'ai été particulièrement choqué de l'existence de Bio-banques --> ok pour détruire un espace protégé si vous restaurez ailleurs moyennant de grosses compensations financières. Une restauration qui ne pourra jamais remplacer celle détruite. Le fric a toujours le dernier mot avec l'appui des différents lobbyings et de la complaisance de nos politiques. Pour la partie graphique, les dix artistes aux pinceaux nous proposent des rendus classiques pour du documentaire. C'est lisible, fluide et agréable à regarder. Une lecture qui donne le vertige. Je recommande.

03/09/2025 (modifier)