Les derniers avis (31720 avis)

Par Cacal69
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Death Vigil
Death Vigil

De la Fantasy comme je l'adore. Je voulais découvrir le travail de Stjepan Sejic depuis quelques temps déjà, je profite donc de ce Death Vigil pour le faire. Et je ne suis pas déçu, loin de là. Il a su créer un univers fascinant. Pendant que nous, pauvres terriens, vaquons à nos occupations habituelles, des forces mystiques se livrent un combat dans d'autres dimensions, l'une (la Veillée Mortuaire) pour nous protéger de l'autre (la Ligue des Nécromanciens). Rien de bien très innovant je vous l'accorde, mais l'intrigue mêlent habillement suspense, fantastique, horreur et humour. Mais c'est surtout la galerie de personnages qui rend ce récit si particulier. Je ne vais pas tous les citer, trop nombreux, juste les principaux. D'abord la jeune Clara qui va se faire assassiner par son fiancé, ce qui lui permettra de rejoindre la Veillée Mortuaire (et oui, il faut être mort pour en faire partie). Une jeune femme qui va se découvrir une famille. Je ne peux passer sous silence Bernadette [ele est très chouette :-)] toujours accompagnée de sa faux, Bernie pour les intimes, surnommée la faucheuse, c'est elle qui est à la tête de la Veillée Mortuaire. Enfin Sam, au look viking, qui fonce tête baissée sans trop réfléchir. J'oubliais, les cheveux blanchissent lorsque tu appartiens à la Veillée Mortuaire. Vraiment le point fort de ce récit, même les méchants ont de la personnalité, ils sont diaboliques et loin d'être manichéens. Stjepan Sejic maîtrise son sujet, la lecture est passionnante et captivante mais elle se mérite, il faut rester concentrer pour ne pas perdre le fil de l'intrigue. Un récit qui laisse un voile d'ombre autour de Clara, peut-être sera-t-il levé dans un prochain épisode.... Je l'espère. La partie graphique est somptueuse, un style informatisé qui en met plein les yeux, tant au niveau du design des décors que des personnages. Très expressif aussi au niveau des visages, des mimiques qui me rappellent un peu Sylvain Guinebaud (c'est un compliment). La mise en page rend la lecture dynamique et le choix des couleurs nous plonge dans un univers inquiétant. J'en redemande. Si tu aimes la Fantasy avec un peu d'humour, alors ce comics est fait pour toi ! Coup de cœur.

24/10/2025 (modifier)
Couverture de la série Les Griffes du Gévaudan
Les Griffes du Gévaudan

Une très belle et très fidèle exploration du mythe de la Bête du Gévaudan par Runberg et Poupard. Basé sur les faits historiques, le premier tome s'attache à expliquer comment des faits divers sordides (l'attaque et la mutilation de plusieurs femmes et enfants dans la Région du Gévaudan) ont été progressivement montés en épingle pour déstabiliser le Royaume de France et ont été utilisés par le clergé afin de contrer le protestantisme et le mouvement intellectuel des Lumières qui se développaient à l'époque. Bien que personne ne détienne réellement la vérité sur cette affaire, les auteurs amènent avec habileté les différentes hypothèses à l'origine des meurtres : loup(s) anthropophage(s), lion ou hyène échappé d'une ménagerie, homme(s) tentant de déstabiliser le roi, etc. La vérité se situe probablement à l'interface de plusieurs de ces hypothèses. Un dossier historique de 8 pages avec les illustrations et récits de l'époque est intégré en fin de tome. Il permet de revenir sur les faits réels survenus en Lozère au XVIIIe siècle et permet d'apporter un éclairage supplémentaire sur le traitement de l'histoire par Runberg et Poupard. Au niveau du dessin, le trait de Jean-Charles possède un certain classicisme et un côté "BD franco-belge des années 80-90" qui n'a pas été pour me déplaire. Le découpage des scènes et la mise en page alternant décors de pleine page et cases plus petites sont également plutôt agréables à l’œil. Il y a également pas mal de phylactères assez fournis de sorte que c'est une BD qui se lit en prenant son temps. Un petit coup de cœur pour l'amateur de ce genre de faits historiques que je suis. En espérant que le tome 2, qui s'annonce résolument orienté sur une interprétation plus personnelle des faits, soit du même niveau. SCENARIO (Originalité, Histoire, personnages) : 9/10 GRAPHISME (Dessin, colorisation, mise en page) : 8/10 NOTE GLOBALE : 17/20

24/10/2025 (modifier)
Par PAco
Note: 4/5
Couverture de la série Les Sentiers d'Anahuac
Les Sentiers d'Anahuac

C'est avec Florida que j'avais découvert le travail de Jean Dytar et j'avais pris une bonne claque ! Si Les Illuminés n'avait pas réussi à m'embarquer, j'avais pourtant été impressionné par le remarquable travail graphique de cet album. Et c'est là que Jean Dytar est fort, avec cette capacité à adapter son style graphique à son sujet ! Avec "Les Sentiers d'Anahuac" il réussit le pari fou de mêler un style gravure à celui des aztèques,et ça fonctionne à merveille ! Car si ce récit basé sur des faits historiques laisse place à quelques supputations des auteurs, le parcours du prêtre franciscain Bernardino de Sahagun et du jeune natif Antonio Valeriano, est construit autour d'une recherche historique très étayée que vient appuyer une post-face très intéressante renvoyant à toutes leurs sources. Le prêtre va en effet consacrer sa vie à la rédaction d'un manuscrit retranscrivant à l'aide du jeune Antonio la culture et la mémoire aztèque. C'est l'histoire de ce manuscrit aujourd'hui conservé en Italie qui sert de fil rouge à cette histoire. C'est avant tout le graphisme unique de Jean Dytar qui saute aux yeux quand on ouvre cet album. Le mélange des deux styles (aztèque et gravure) est un savant mélange parfaitement équilibré qui nous livre des planches assez époustouflantes tout en restant d'une grande lisibilité : chapeau ! C'est ensuite toute cette histoire post Conquête et cette volonté de quelques uns de préserver les restes de cette culture ancestrale qui va disparaître en si peu de temps qui marque. Loin d'être consensuelle, cette idée va se heurter à tous les idéaux économiques, de pouvoir et d'évangélisation des colons espagnols qui ne voient pas l'intérêt de ce travail herculéen, aussi chronophage que couteux. Au final, un album remarquable qui nous prouve une nouvelle fois tout le savoir faire caméléonesque de Jean Dytar !

24/10/2025 (modifier)
Par gruizzli
Note: 4/5
Couverture de la série Slava
Slava

Il m'est assez difficile de parler de "Slava". Déjà parce que d'autres avis l'ont fait mieux que moi et que j'ai du mal à être au clair sur mon avis. J'ai un intérêt que je ne m'explique pas pour la Russie. Ce pays me fascine depuis des années, et j'ai eu l'occasion de visiter Moscou en hiver il y a quelques années avec une amie. Une visite qui m'a marqué sur la différence si grande qu'il y a entre européen de l'ouest et ce monde de l'est si différent. J'ai épluché son histoire, et comme Gomont, j'ai été surpris (le mot est faible) par les années Elstine. Le démembrement de l'URSS et la violence sordide de ceux qui deviendront les oligarques. Cette BD, c'est tout cela. Avec un faux air de Kusturika comme disait Tomdelapampa, avec son humour parfois étrangement cartoonesque mais aussi une mélancolie sourde qui pointe, une tristesse de tout les instants. "Slava", c'est l'histoire qu'on aimerait voir bien finir et qu'on sait dès le début qu'elle sera un drame. Et je dois dire que sa fin est d'une tristesse très grande, d'autant que l'on a eu le temps de s'attacher à eux. Une BD de Gomont c'est difficile à décrire pour moi. Déjà parce qu'il y a de la densité et que le bonhomme ne facilite pas la chose. Allez résumer "Slava" à trois paragraphes sans trop en dire ! Mais ce qui est simple, c'est que j'ai aimé. Adoré ? Non, clairement pas. La BD prend un peu trop de temps dans sa deuxième partie avant l'explosif final, et d'autre part j'ai trouvé la BD très (trop) bavarde dans son tome 3, surtout au début, lorsque je sentais le poids omniprésent du texte qui commençait à m'embêter dans ma lecture. D'autant que Gomont a ce tic d'intégrer du texte entre les bandes de dessins avec parfois des dialogues continus. Ce qui m'oblige à d'abord lire la voix off puis ensuite le dialogue sous peine de me perdre dans le texte, et parfois je trouve la voix-off trop présente, presque trop lyrique et parfois redondante. Maintenant que cette critique est faite (une critique que je fais à plusieurs autres BD de Gomont) je dois dire que l'auteur sait y faire niveau histoire. Slava, Nina et Lavrine sont attachants, par leurs forces et par leurs faiblesses. Le dessin de Gomont, alliant ses bulles aux dessins explicatifs avec des passages muets, tout en y allant de ses dialogues percutants et ses moments de tension. C'est maitrisé et clair, comme à son habitude. En fait je ressors de la BD frustré, un peu. Parce que j'ai l'impression que ça aurait pu être plus que ça, que l'histoire aurait été plus efficace et impactante plus condensé. En l'état, c'est bon, sans doute au-dessus de la moyenne, mais je continue de me dire que ça aurait pu être carrément génial. Mais pour autant, ne vous privez pas d'une lecture qui tente de rendre tangible ce que fut l'éclatement de l'URSS et ce que les russes vécurent. Une BD pour se rendre compte...

23/10/2025 (modifier)
Couverture de la série Hurlevent (Duval/Créty)
Hurlevent (Duval/Créty)

Voilà une série Fantasy plutôt sympathique. Et qui se démarque déjà du tout venant du genre, par un univers original. Et, là où souvent un groupe de héros se lance dans une quête ou à l’assaut d’un mal ou de bestioles monstrueuses, c’est au contraire à une longue retraite que nous avons affaire. L’inévitable tyran n’est pas omnipotent – il est même peu présent, sauf dans la conclusion – et les auteurs ne se sont pas embarrassés de bimbos peu vêtues ou d’histoire d’amour à deux balles. La narration est fluide, rythmée, la menace des « fils du magma » grandissant, éliminant les uns après les autres les fuyards, jusqu’au dénouement final. Ce final justement, qui est le seul petit bémol, tant je l’ai trouvé un chouia brutal, un peu trop vite expédié (je pense même que les auteurs auraient pu se permettre un tome supplémentaire pour mieux exploiter le vieux monarque et les vengeances ou trahison que ses décisions ou la situation dramatique du monde ravagé par les flammes pouvaient inspirer). Reste que j’ai lu d’une traite les trois tomes, avec plaisir. Les amateurs du genre y trouveront leur compte.

23/10/2025 (modifier)
Par Montane
Note: 4/5
Couverture de la série Martin Milan
Martin Milan

La série Martin Milan n’est pas passée inaperçue dans le journal tintin de la fin des années 60 et du début des années 70 tant le personnage était décalé parmi les héros de l’époque. On pourrait le ranger dans la catégorie des héros atypiques avec le Jonathan de Cosey. Martin Milan n’est pas vraiment un aventurier a proprement parler, juste le pilote d’un avion branlant, pour lequel chaque vol Qui se termine bien est un exploit. D’un humour redoutable et décalé, Martin Milan cherche juste à gagner quelques argent pour vivre avec son vieux coucou. Mais ce n’est pas vraiment l’argent qui le motive, mais plutôt faire de belles rencontres. Les histoires qui ont le plus touché ne sont pas des récits complet de 46 pages mais plutôt des histoires courtes comme « il s’appelait Jérôme » ou   églantine de ma jeunesse ». Les personnages d’enfant tiennent souvent un rôle prépondérant dans cette série; je pense ainsi à «  l’âge et le surdoué » ou aux «  clochards de la jungle ». Il faut reconnaître de Christian Godard à un véritable talent pour trouver des titres d’album marquant. Cette série qui compte finalement peu d’albums s’étale sur une trentaine d’année et j’avoue que je préfère le style graphique de Girard des années 70 à celui de la fin des années 80 et même des années 90, puisque la série a rebondi à ce moment là aux éditions Dargaud. Curieusement les éditions du Lombard n’ont pas vraiment respecté la chronologie pour la parution des albums et on voit bien. Que des histoires plus récentes ont été publiées en album avant des récits plus anciens. Cette série tendre et émouvante que je viens de relire m’a de nouveau procure bien du plaisir comme ce fut le cas lors de la pré publication des histoires dans le journal Tintin.

23/10/2025 (modifier)
Couverture de la série L'Arabe du futur
L'Arabe du futur

Bon je vais pas m’attarder, je fais partie des très satisfaits. Riad Sattouf a trouvé une chouette formule avec cette série. C’est admirablement bien raconté et son histoire est intéressante. Je ne possède pas mais je ne peux que vous encouragez à la lire un jour. Perso, j’ai suivi le début un peu mollement avant de trouver mon rythme de croisière et finalement finir très touché avec sa conclusion.

22/10/2025 (modifier)
Par Gralentin
Note: 4/5
Couverture de la série James Healer
James Healer

Une série franchement agréable à lire. Le dessin est parfaitement au service de la narration. L'histoire est sophistiquée, ce qui n'est pas simple à traduire en bande dessinée. Cette série sans prétention dépasse largement mes attentes. J'avoue que ce n'est pas mon style de prédilection (thriller/enquête), j'ai pourtant adoré la série !! Seul léger bémol, j'avoue que j'ai du mal à me souvenir de qui est qui (il y a beaucoup de protagonistes dans l'enquête). J'ai probablement mis des 3/5 à des BD que j'ai préférées à cette série mais je dois avouer que dans le genre, c'est super bien réussi.

22/10/2025 (modifier)
Par Présence
Note: 4/5
Couverture de la série Les Nageuses de minuit
Les Nageuses de minuit

L'espoir est notre résistance. - Ce tome contient une histoire indépendante de toute autre. Son édition originale date de 2025 pour la version française, traduite par Claudia Migliaccio. Il a été réalisé par Valentina Grande pour le scénario, et par Francesco Dibattista pour les dessins et les couleurs. Il comporte cent-soixante pages de bande dessinée. En apnée. Au petit matin à New York, un équipage d'éboueurs est en train de collecter les poubelles. À cette époque, Viktoria Maria Matos Amato est enseignante et elle va bientôt avoir quarante ans. Les seuls choix qui s'offrent à elle sont de rester seule chez elle à se morfondre, ou bien de rentrer chez sa mère pour s'entendre dire que c'est de sa faute si elle est seule. Elle vit dans un petit cocon, et ça aurait pu continuer ainsi indéfiniment… mais ce ne fut pas le cas. Un jour, quelqu'un lui demanda un service. Ce matin-là, Vik suit sa routine : boire son café, laver sa tasse, laver son assiette, changer son regard devant le miroir de la salle de bain, donner à manger à son chat, sortir, prendre le métro tout en écoutant un podcast intitulé : Be creative. Une équipe de chercheurs de l'université du Colorado a récemment démontré que certaines actions quotidiennes permettent de se sentir heureux. Lesquelles ? La première : caresser un animal domestique. En effet, donner de l'amour fait se sentir bien. La deuxième : se rendre au travail en marchant. Faire bouger son corps au lieu d'utiliser sa voiture ! La troisième relève plutôt de la réflexion : donner un sens à sa vie. Qu'est-ce qui vous fait vous lever chaque matin ? La quatrième : être parmi les autres. Toujours assise dans le métro, Vik rabat la capuche de son hoodie sur sa tête. Sous une pluie légère, Vik arrive à l'établissement scolaire où elle enseigne. La dame à l'accueil l'informe que la psychologue la cherchait, elle a demandé que Vik la rappelle, et elle lui donne le numéro. La psychologue a vraisemblablement besoin que Vik lui ramène quelque chose qu'elle a oublié ici. Vik l'appelle et la psychologue lui demande de lui ramener une sacoche rouge qu'elle a oubliée dans la salle des profs près de la machine à café, lui donnant rendez-vous à seize heures à la piscine du coin. À l'heure dite, la professeure se dépêche, la pluie ayant cessé. Elle arrive en retard à la piscine : elle l'a ratée. Elle regarde machinalement le panneau d'affichage : il y a une proposition pour des leçons de natation. Elle entend des notes de musique s'échapper et elle va voir le bassin par curiosité. Depuis la coursive en étage, elle découvre le bassin en contrebas, et un groupe d'une dizaine de femmes en plein exercice de natation synchronisée. Elle les regarde, fixant le visage serein de l'une d'elle, émergeant de la surface de l'eau les traits détendus, tenant la main de sa voisine. Puis elle regarde un groupe de quatre d'entre elles en train de sortir de l'eau, de papoter sur le rebord. Elle s'en va et retourne chez elle. le soir dans son appartement, elle se prépare un œuf tout en téléphonant à sa mère. Elle finit par mettre le téléphone en haut-parleur, et elle la laisse parler toute seule, de son frère Jack et de ses soucis. le chat interrompt la conversation en bondissant sur la table. Vik y met un terme et va regarder la verrière de l''immeuble en face où quelqu'un est en train de jardiner la nuit. Le texte de la quatrième de couverture évoque une histoire entre grand événement qui change la vie, ou peut-être simplement l'image que l'on a de soi-même. Dans les premières pages, le lecteur fait connaissance avec Viktoria Maria Matos Amato, une femme qui vit seule, qui sera bientôt quadragénaire, qui vit un quotidien tranquille, dans lequel la solitude semble lui peser. Atteignant cet âge symbolique, elle constate qu'elle ne vit pas en couple, que les conditions ne sont pas réunies pour qu'elle devienne mère, que la communication avec sa mère est à sens unique, que sa mère accorde plus d'attention à Jack, le frère de Vik. Au cours du récit, les auteurs montrent leur personnage dans des scènes du quotidien, dans sa démarche pour apprendre à nager, sans s'aventurer dans sa salle de classe. Dans la scène introductive, il n'est pas question d'un événement, mais d'un service demandé. de fait, ce roman reste dans le registre du quotidien, sans grande catastrophe, sans bouleversement extraordinaire. Vik prend le métro, se rend au boulot, s'inscrit à un cours de natation, rend visite à sa mère, effectue une promenade dans un parc avec son frère, accepte l'invitation à manger chez l'une des nageuses du groupe, fait plus ample connaissance avec certaines d'entre elles, un récit naturaliste. Il faut un peu de temps au lecteur pour comprendre que l'illustration de couverture correspond plus à un songe qu'à un élément réel du récit. En revanche, il retrouve dans les pages intérieures une approche personnelle de la mise en couleurs, différente d'un rendu réaliste. le premier chapitre baigne majoritairement dans une ambiance bleu-gris avec quelques teintes plus foncées, en particulier pour les cheveux de Vik, quelques fonds de case jaune pour un moment au cours duquel un frémissement d'émotion chez Vik semble possible, et quelques touches vertes pour le feuillage des arbres dans le parc. Tout du long, l'artiste utilise ainsi la palette de couleurs à des fins expressionnistes. Lorsque Vik va prendre sa première leçon de natation, les couleurs passent en négatif, avec des traits de contour blancs et des surfaces entre bordeaux et marron foncé. Los d'une séquence onirique les gouttières deviennent noires, en lieu et place du blanc dans le reste des planches. de temps à autre, la mise en couleurs se rapproche plus du naturalisme, essentiellement lors de séquences en extérieur, ou dans l'école. Pour la dernière séance de piscine, nocturne, c'est l'eau elle-même qui prend une teinte jaune très pâle pour un effet quasi féérique… qui se rapproche de la teinte de jaune utilisée pour l'éclairage de la serre au sommet de l'immeuble en face de celui de Vik. le lecteur prend alors conscience que la mise en couleurs rapproche ainsi différents éléments visuels, participant à des associations d'idées. Le récit commence avec une structure de page en gaufrier : trois bandes de deux cases avec une bordure tracée avec un trait fin. La page dix-sept est construite sur la base d'une illustration en pleine page, avec deux cases en incrustation dans la partie supérieure. le lecteur va ainsi découvrir quelques autres illustrations en pleine page, avec ou sans incrustation, et quelques dessins en double page. En pages quatre-vingt-huit et quatre-vingt-neuf, le dessinateur joue sur la disposition des cases pour le soir de Noël, comme de petites cases collées sur la page blanche, sans être alignées en bande. Dans les vestiaires de la piscine, les cases sont dépourvues de bordure. Enfin l'album compte quarante-trois pages muettes, dépourvues de tout mot. Cette diversité dans la forme des pages met en avant certains moments contemplatifs, certains lieux, certaines interactions, pointe du doigt vers quoi se tourne l'attention de Vik. Par exemple un ballon de baudruche coincé dans les branches d'un arbre : le lecteur comprend alors qu'elle y voit une forme de métaphore, comme sa progression dans la vie coincée par des circonstances immuables. Dans le même temps, les dessins s'inscrivent dans une veine descriptive et concrète, emmenant le lecteur aussi bien dans la piscine, dans son bassin, dans les vestiaires, que dans une rue encore trempée par la pluie, dans un grand parc, dans le passage sous le bassin d'un aquarium avec les poissons qui passent au-dessus des visiteurs, etc. Le lecteur se rend compte qu'il est très sensible à la symbiose entre récit et narration visuelle, comme si les deux étaient la création d'une seule et même personne. Il éprouve tout de suite de l'empathie pour cette femme à la vie régulière et bien tranquille, se sentant habitée par un sentiment de passer à côté de la vie. Arrivée à cet âge, elle doit se résoudre à constater qu'elle n'aura vraisemblablement pas d'enfant, pas de vie de couple. Elle se heurte également au fait que la relation avec sa mère est au mieux superficielle, au pire consacrée à Jack le frère de Vik. Par curiosité, elle découvre également le contenu de son évaluation par la psychologue de l'école, et ce n'est pas terrible. Il la prend en sympathie avec la même facilité, car elle ne se lamente pas, elle accepte le désagrément causé par le constat de la situation de sa vie. Elle aurait peut-être pu mieux faire, elle peut encore mieux faire. En réaction au podcast, il n'y a finalement qu'une action quotidienne qu'elle ne parvient pas à réaliser : Être parmi les autres. Petit à petit, le lecteur remarque que les principaux personnages sont tous féminins. Ce constat se fait progressivement car la tonalité de la narration n'embrasse pas ouvertement le féminisme, et est dépourvue de revendications. En revanche, plusieurs questionnements relèvent de la sphère féminine : être mère ou pas, la sécheresse du corps (évoqué dans un poème déclamé sur scène par l'une des amies nageuses), concilier la vie professionnelle avec élever ses enfants, etc. D'autres sujets sont universels : le temps qui passe, les possibilités qui diminuent, la relation avec sa mère, l'envie de sortir d'une routine découlant de sa personnalité propre, la difficulté à surmonter ses appréhensions, le poids du passé sur le présent, etc. Dans une scène très réussie, Vik parvient à exprimer ses conseils à l'enfant qu'elle fut, pour la réconforter. Une démarche et des émotions parlant aussi bien aux lectrices qu'aux lecteurs. Une couverture un peu cryptique, entre promesse d'une amitié entre deux femmes, et un environnement quasi onirique mélangeant serre et piscine. Un récit à la narration visuelle riche et variée, parfaitement en phase avec le récit, exprimant avec justesse les ressentis des personnages. le constat d'une trajectoire de vie en décalage avec l'image du bonheur et de la normalité sociale. Cette prise de conscience en douceur amène le personnage principal à trouver l''envie nécessaire pour entamer tranquillement un nouveau projet. Réaliste et chaleureux.

22/10/2025 (modifier)
Par Lodi
Note: 4/5
Couverture de la série Le Gourmet solitaire
Le Gourmet solitaire

Si le gourmet solitaire est égoïste c'est parce que c'est : - Réaliste, quand on mange seul on n'est pas dans la communion, à table - Et pour nous permettre de l'être, nous inciter à nous détendre comme le personnage principal, par la bouffe ou par la contemplation. Cependant, le titre n'est pas Le Gourmet insensible. Il lui arrive de défendre des gens, par exemple, quelqu'un qui ne veut pas boire - d'ailleurs notre héros n'est pas non plus porté sur la boisson. Et tant mieux, comme ça j'ai pu l'offrir à quelqu'un de formidable hélas avec un problème de santé lui interdisant de boire et connaissant le Japon si je ne sais à quel point. Cette personne l'a apprécié, donc j'aurais pu mettre un coup de reconnaissance sinon un coup de cœur, c'est dur de trouver des cadeaux pertinents. J'avoue pour ma part avoir bien plus apprécié Les Gouttes de Dieu !

21/10/2025 (modifier)