Les derniers avis (31737 avis)

Par Gaston
Note: 4/5
Couverture de la série Fantasy - Yourcenar / Alma
Fantasy - Yourcenar / Alma

3.5 Un album de fantasy intéressant vu qu'on suit l'histoire de deux personnages qui finissent par se rencontrer et chaque face de l'album met en vedette une des deux héroïnes. J'ai bien aimé comment était fait le récit parce qu'on découvre deux sociétés très différentes, Alma étant une humaine et Yourcenar une géante apparemment immortelle ou au moins qui peut vivre plusieurs siècles. Chaque récit montre une différente version des relations entre les humains et ce qu'ils prennent comme des dieux, le fait d'avoir deux histoires sert donc à quelque chose contrairement à d'autres bandes dessinées avec un gimmick qui ne sert pas à grand chose. J'ai commencé avec le coté d'Alma et je me demande si c'était une bonne idée. Le coté de Yourcenar a un scénario plus original et aussi qui prend plus de temps à lire parce que c'est plus verbeux avec plusieurs moments philosophiques alors que lorsqu'on est avec Alma il peut avoir plusieurs pages de suite avec peu ou pas de textes. Or, la fin est la même dans les deux récits. Je pense que c'est le seul problème de l'album: la fin est la même dans les deux récits alors on sait déjà le destin final des deux héroïnes après avoir fini de lire une des deux faces. Je conseille donc de commencer avec Yourcenar comme ça on ne trouve pas le temps un peu long parce qu'on sait déjà ce que signifie la prophétie qui la concerne. Sinon, le dessin et la mise en page sont très bons.

29/10/2025 (modifier)
Par Cleck
Note: 4/5
Couverture de la série Watership Down
Watership Down

Voilà un projet bien original : une ample histoire de survie sur une garenne de lapins sauvages, d'une précision, maturité et violence le destinant à un public adulte. La lecture s'accompagne d'une fascination perpétuelle, l'impression constante d'un décalage entre le sujet et son traitement. Bien des films d'animation, des romans et albums pour la jeunesse proposent des histoires comparables, mais tout ici est développé et revisité à l'aune de ce choix de s'adresser aux adultes, poussant le curseur au-delà de l'horizon d'attente : l'ingéniosité devient stratégie militaire, la gentille peur se transforme en terreur vis-à-vis d'une violence possiblement mortelle, la différenciation des rôles au sein de la garenne devient un assujettissement à une autocratie inégalitaire, etc. Les illustrations assument ce vertige en griffant régulièrement le pelage de nos doux lapins, faisant jaillir l'horrible sang de ces mignons doudous. Certes, j'eus aimé davantage d'audace : des jeux expressionnistes avec les ombres, des mises en pages moins esclaves du gaufrier, une couverture plus gothique, mais la précision du trait est appréciable et permet d'aisément suivre l'intrigue malgré des personnages évidemment fort semblables. Cela manque parfois un peu de rythme, d'audace donc, mais l'on ressort de cette lecture avec le sentiment d'une grande originalité, quand la raison pourrait objectivement nous certifier que cette fable animalière est relativement convenue et déjà vu. Étonnant !

29/10/2025 (modifier)
Par PAco
Note: 4/5
Couverture de la série Balade mentale - Voyage dans l'infiniment grand
Balade mentale - Voyage dans l'infiniment grand

J'ai toujours été fasciné par les étoiles et la conquête spatiale, même si j'avoue avoir un piètre niveau scientifique. Et bien cet album trouve le parfait juste milieu entre vulgarisation et un niveau tout de même soutenu. C'est à l'initiative du youtuber scientifique Théo Drieu que cet album voit le jour, mis en image par l'illustratrice italienne Giulia Mammone. Son trait minimaliste mais évocateur dans les comparaison d'échelles, se drape d'une certaine poésie visuelle quand on aborde les galaxies et les confins de l'univers. C'est tellement efficace que la prise de conscience des distances qui séparent planètes, étoiles, galaxies et nébuleuses donne le tournis. On est pas prêts de sortir de notre système solaire ! Voilà en tout cas un très bon album pour tous les amoureux d'astronomie ou les curieux de l'univers qui nous englobe.

29/10/2025 (modifier)
Par Présence
Note: 4/5
Couverture de la série Cézanne - Sur la route Cézanne
Cézanne - Sur la route Cézanne

Cette montagne était apaisante, rassurante… Sainte-Victoire ! - Ce tome contient une histoire complète, ne nécessitant aucune connaissance préalable sur le peintre pour l’apprécier. Son édition originale date de 2025. Il a été réalisé par Bernard Fauconnier pour le scénario, et par Alexandre Aré pour le scénario, les dessins et les couleurs. Il comprend cinquante pages de bande dessinée. Il se termine par un dossier de quatre pages intitulé Petite histoire de la route Cézanne, comprenant plusieurs parties : Une route ancienne, Un pays pour les peintres, Des peintres des écrivains, Le baptême de la route. Novembre 1987, place des Quatre Dauphins, Aix-en-Provence. Ce n’est pas simple d’arriver dans une nouvelle ville, en abandonnant et laissant tout derrière soi, pour construire une nouvelle vie ! On se sent un peu perdu dans ce grand labyrinthe de l’inconnu quand on a que onze ans. Maman avait réussi à trouver une petite maison à louer pas très cher, à la sortie d’Aix, vers le Tholonet. Manon, sa fille la trouvait vieillotte, sans âme et sans intérêt. Son appartement parisien lui manquait, avec ses grandes rues, ses grandes avenues et tout ce monde qui grouille ! Mais soudain son regard se posa au loin… Là, devant elle, quelque chose de grand, de fort et de majestueux se dressait ! Cette montagne était apaisante, rassurante… Sainte-Victoire ! Quelques jours plus tard, sa mère a réussi à l’inscrire en cours d’année au collège Mignet. Manon se sent un peu perdue, et pas trop à sa place. Certaines élèves le lui font bien comprendre : en la traitant de tête de veau, en l’enjoignant de retourner voir les rats à Paris. Il faut qu’elle prenne sur elle, qu’elle encaisse. Évitant les railleries, elle s’isole dans la cour de récréation et elle se dit que tout cela finira par s’arranger avec le temps. L’hiver s’installe doucement, la mère de Manon trouve du travail dans un hôpital, mais les horaires sont compliqués et souvent décalés. La jeune fille se retrouve souvent seule à la maison. Alors, pour s’occuper, elle s’installe dans le jardin, elle dessine, elle peint la nature et les paysages qui changent de couleur autour d’elle. Elle ne se sent pas vraiment seule : elle sait que leurs voisins veillent sur elle. Les jours passent : elle et ses voisins apprennent à se connaître. La dame s’appelle Thérèse, elle est calme, douce, très gentille avec Manon qui lui montre ses dessins. Mais la demoiselle sent quelque chose de triste, de cassé, de brisé dans la vieille dame. Et il y a son mari… Un vieux monsieur assez étrange. Une sorte d’ours qui sort de temps à autre de sa tanière. Il a le visage fermé et ne parle jamais. Chaque jour, Manon le voit partir, marcher vers la montagne, avec tout son matériel de peinture. Il disparaît toute la journée, puis quand la lumière du jour s’éteint, il rentre chez lui, toujours sans un mot. Les semaines et les mois passent, les beaux jours réapparaissent et se dessinent avec la nature. Le ciel et les arbres ont retrouvé leur éclat lumineux. Thérèse propose à Manon de l’aider à cueillir des cerises. La jeune fille monte à l’échelle et elle mange autant de cerises qu’elle n’en cueille, se faisant gentiment sermonner par la vieille dame qui lui dit qu’il n’en restera plus assez pour faire un clafoutis. Pas tout à fait une bande dessinée de plus sur Cézanne : dans un premier temps, le lecteur se rend compte que cet ouvrage se lit très facilement, écrit dans un registre tout public. Le personnage principal que suit le lecteur est âgé de onze ans, et rentre au collège dans une ville qu’elle ne connaît pas, avec une intégration difficile car les enfants du coin voient d’abord en elle une parisienne. Ensuite les dessins présentent une apparence très douce, identique au mode de réalisation de l’illustration de couverture : des traits de contour de couleur plutôt que du noir sec et tranchant, une impression de rendu de crayons de couleur, voire de pastels, des visages arrondis avec des émotions faciles à lire, de jolies couleurs vertes et lumineuses pour les paysages naturels, également très lumineux pour quelques rares scènes en intérieur. Le récit est majoritairement raconté par des dialogues, avec des phrases courtes, faciles à lire. François a l’âge d’être un grand-père et il joue le rôle de passeur bienveillant, racontant la vie de Cézanne, avec une sensibilité particulière, à la fois pour le métier de peintre, à la fois pour la région d’Aix-en-Provence, et plus particulièrement pour ce site appelée Route Cézanne. La lecture s’avère d’une grande facilité, accessible et didactique, ancrée sur le point de vue de la jeune fille. La narration visuelle est tout aussi agréable, fortement influencée par les œuvres du maître, majoritairement celles réalisées sous le soleil de Provence. Enfin… Les couleurs claires évoquent également les œuvres de Vincent van Gogh, celles d’Alfred Sisley, tout en étant foncièrement différentes. D’une certaine manière l’artiste combine les techniques picturales traditionnelles de la bande dessinée (détourage des formes avec un trait) et quelques touches impressionnistes (en particulier dans le rendu de la verdure et bien sûr dans la silhouette de la montagne Sainte-Victoire). Il combine une approche représentative et descriptive adaptée à une bande dessinée tout public, et une évocation de l’esprit de l’impressionnisme, de la démarche de rendre compte de la sensibilité de Cézanne, de la beauté de luminosité et du paysage dans cette région. Très régulièrement, le lecteur se retrouve ainsi sous le charme d’une impression, de l’évocation d’une perception en appelant aux sensations : le feuillage de l’arbre devant lequel se dresse la colonne de la fontaine de la place des Quatre Dauphins en planche un, le premier aperçu de Sainte Victoire en planche deux, la silhouette des autres enfants en arrière-plan dans la planche trois, la ribambelle de paysages accrochés au mur de la maison de Thérèse et François, la végétation verdoyante de la région en particulier le long de la route Cézanne, les tuiles de la demeure du toit des Cézanne, les toits des maisons de l’Estaque, les mouvements d’air dans un ciel bleu (du pur Van Gogh) en planche trente-huit, et bien sûr les différentes vues de Sainte Victoire, y compris après l’incendie du vingt-huit août 1989. Dans le même temps, les cases constituent une narration visuelle, proprement dite, tout aussi parlante. Le lecteur s’interroge parfois sur l’âge réel de Manon qui peut sembler plus enfantine dans certaines cases. Toutefois, la différence d’âge est bien marquée avec les retraités Thérèse et François. Les pages semblent dégager une sorte d’uniformité : le lecteur constate qu’il convient plutôt de parler d’unité, ou de cohérence. Le dessinateur découpe sagement ses planches en bande avec des cases rectangulaires… tout en faisant régulièrement usage de variations parfaitement intégrées. Par exemple : une case sans bordure de ci de là, des cases de la largeur de la page, deux cases comme fondues en une seule (planche cinq avec à gauche Manon devant la maison et à droite François déjà loin sur le chemin), une discrète case en trapèze en planche quatorze pour accentuer la violence d’un mouvement, la tête de François en insert en planche dix-neuf, des dessins enfantins en planche vingt-trois pour rendre compte de la terreur d’un cauchemar de Manon, un dessin en double page de Sainte Victoire avec des cases en insert, un paysage en format panoramique découpé en trois cases contigües avec la progression des personnages (Manon & Thomas) qui s’éloignent d’une case à l’autre, etc. Le lecteur remarque également que tout aussi discrètement l’artiste intègre les éléments de ses recherches dans l’évocation de l’époque de la vie de Cézanne, qu’il s’agisse des tenues vestimentaires ou des bâtiments, de leur décoration intérieure. Totalement sous le charme de la narration visuelle, le lecteur se laisse emmener dans cette délicieuse promenade. L’adulte chemine aisément dans cette narration à la portée de tous et… Il prend conscience que le propos des auteurs s’avère solide et qu’ils s’adressent à tout le public potentiel. François raconte la vie de Paul Cézanne (1839-1906) de manière simple et parfois elliptique à la jeune Manon, tout en intégrant de nombreux faits qui parlent aux lecteurs plus âgés. Ils mettent en scène l’amitié entre le peintre et Émile Zola (1840-1902), la rencontre avec Éléonore Alexandrine Meley (1839-1925, future Alexandrine Zola), et celle avec Hortense Fiquet (1850-1922). Il est question de l’amitié entre les deux hommes et de son terme lors de la parution de L’Œuvre (1886), quatorzième volume de la série Les Rougon-Macquart. L’adulte compatit à la situation du jeune peintre se heurtant à la volonté paternelle quant au métier à exercer par son fils, assortie de cette terrible maxime du banquier : On meurt avec du génie, et l’on mange avec de l’argent. Chaque lecteur relève les différents séjours à Paris et les rencontres avec Claude Monet (1840-1926), Berthe Morisot (1841-1895), Camille Pissarro (1830-1903), Auguste Renoir (1841-1919), Alfred Sisley (1839-1899), Gustave Caillebotte (1848-1894), Frédéric Bazille (1841-1870). Il identifie la création du salon des Refusés, sous décision de Napoléon III. Il apprécie l’anecdote relative au nom du mouvement, donné par Louis Leroy (1812-1885). Il se rend compte que dans le même temps il s’est attaché aux personnages, que ce soit la curiosité et la confiance en elle de Manon, ou la forme de résignation sous-jacente de François. Il sent son empathie prendre le dessus quand François exprime avec émotion sa déception vis-à-vis de ses propres limitations d’artiste : une horrible frustration, née de son ressenti d’être incapable de voir la lumière, les couleurs, la matière, de ne pas ressentir. Il sent aussi son cœur se serrer à l’évocation de l’incendie se déclarant au pied de Sainte-Victoire, et de la promenade faite quelques jours après dans un paysage calciné. Il en vient à planifier des vacances pour découvrir cette route Cézanne, et voir par lui-même le barrage de Bimont, le barrage Zole, le moulin de Tholonet, le château noir, et bien sûr la montagne. Une histoire tout public, dans laquelle Manon, onze ans, découvre l’art de Cézanne grâce à un voisin, lui-même peintre, et marchant dans les pas de Cézanne sur la route portant son nom. Une balade gentille et prévenante, avec de magnifiques couleurs, dans l’esprit des impressionnistes. Et aussi beaucoup plus que cela avec une biographie partielle du peintre, son amitié avec Émile Zola, la naissance du mouvement impressionniste et son importance dans l’histoire de la peinture. Sans oublier une narration visuelle sensible, belle et engageante. Une grande réussite.

29/10/2025 (modifier)
Par Lodi
Note: 4/5
Couverture de la série Les Passagers du vent
Les Passagers du vent

C'est le titre, Les passagers du vent, qui m'a attiré, sans parler des trois mâts. J'ai aimé entre autre l'histoire, les personnages, surtout féminins, et les navires bordés de vent, les gens du peuple et les dominants qui tout en entrant en résonnance avec des thématiques modernes ne tombaient pas dans le crime capital de l'anachronisme ! J'avoue que j'ai moins apprécié la suite américaine et française, sans doute parce que je me trouvais en manque d'horizon maritime. Malgré la fille petite-fille d'Isa, qui a eu le bon goût de me surprendre en n'étant pas aussi libérale que sa grand-mère, et ce n'est rien de le dire pour une esclavagiste. A ce propos, les Noirs, libres ou esclaves, ne versent pas dans la caricature, et en fait, personne, dans cette série, ce qui donne un peu d'air frais en plus de celui porté par l'aventure. A noter des couleurs véritablement belles. Je ne dirais j'espère jamais qu'il faut avoir lu une œuvre vu qu'heureusement il y en a tant d'excellentes que chacun peut trouver son bonheur dans certaines dont on peut présumer qu'elles traverseront le temps. Mais si on veut sentir le vent, enfin, au début, l'air salin et le reste, on ne sera pas déçu. Alors…

29/10/2025 (modifier)
Couverture de la série Mujina into the deep
Mujina into the deep

Avec Mujina into the Deep, Inio Asano revient en force avec un manga aussi fascinant que dérangeant. On retrouve tout ce qui fait sa patte : un dessin hyper réaliste, des personnages torturés et un univers qui met mal à l’aise autant qu’il captive. L’histoire se déroule dans un Japon dystopique où certaines personnes renoncent à leurs droits pour devenir des « mujina », des exclus vivant en marge de la société. Rien que cette idée suffit à intriguer, et Asano la développe avec son regard à la fois cru et profondément humain. Ce premier tome pose les bases d’un monde dur et désenchanté, avec des personnages déjà très marquants : Ubume, la tueuse froide, Juno, la jeune fugueuse, et Terumi, un homme brisé par la vie. On sent qu’Asano veut parler d’isolement, de contrôle social, mais aussi de ce qu’il reste d’humain quand on a tout perdu. C’est parfois confus, mais c’est aussi ce qui fait son charme : on avance sans tout comprendre, happé par l’atmosphère. Je préfère prévenir : Mujina into the Deep n’est clairement pas pour tout le monde. Le manga contient plusieurs scènes érotiques explicites et de la violence, parfois assez crue. Ça rend la lecture inconfortable, mais on a l’habitude avec cet auteur. On est loin du divertissement classique : Asano explore les recoins les plus sombres de la société et de la psychologie humaine. En refermant ce premier tome, j’étais un peu sonné. C’est beau, dur, parfois dérangeant, mais surtout incroyablement sincère. Mujina into the Deep promet une œuvre aussi troublante que passionnante à condition d’être prêt à plonger dans ses profondeurs. Difficile de juger une oeuvre avec un seul tome d’une série en cours de parution, mais j’ai bien aimé ce début et j’ai hâte de lire la suite donc 4/5 pour l’instant en tout cas.

29/10/2025 (modifier)
Couverture de la série Le Chant de nos pas
Le Chant de nos pas

Bon, eh bien me voilà confortée dans mon appréciation de l'auteur-ice ! Pas que ses créations soient parfaites, pas que je sois complètement chamboulée à la fermeture de ses albums, mais j'avoue être touchée, sincèrement touchée, à chaque fin de lecture. Ce sont des récits simples mais touchants, au message doux et optimiste quant à l'avenir de la jeunesse. Ici, comme souvent avec K. O'Neill j'ai l'impression, il est question du rapport que l'on a avec les autres. Non seulement il est question de vie en communauté et de la peur de la place que l'on y prend/que l'on aimerait y prendre, mais il est également question d'amour propre et d'épanouissement, un rappel qu'il faut savoir s'aimer soi-même pour pouvoir s'épanouir en société. Le message de fin de Léone le résume bien : "Certaines personnes ne te verront jamais comme tu veux être vu, t'sais ? J'crois qu'il vaut mieux te plaire à toi-même d'abord, et ceux qui t'aiment le verront." Rowan et Léone, nos deux protagonistes, se cherchent, cherchent une place dans leur société. Rowan veut devenir ranger, un-e gardien-ne de la région chargé-e de protéger les population, mais cherche surtout à savoir qui iel est, à l'exprimer aux autres ; Léone est rêveur, timide, souhaite secrètement partager son monde par la musique mais craint le regard des autres. Par un coup du sort iels se rencontrent, se comprennent sans même le réaliser au début et vont se pousser l'un-e et l'autre à s'ouvrir au monde et s'affirmer un peu plus. Rowan, même lorsqu'iel critique l'apparente fainéantise de Léone, ne se moque jamais de lui, et Léone, même lorsqu'il semble désinvolte et tête en l'air, observe et supporte émotionnellement Rowan, l'aidant à enfin à s'affirmer quant à son identité. Le dessin de Kay O'Neill est, comme toujours, très beau. En tout cas il me plait. Qu'il s'agisse de son trait ou de ses couleurs, de ses récits positifs ou de ses personnages aux bouilles expressives, tout me parait si doux. J'ai envie de me blottir sous la couette avec un chocolat chaud. Nul doute que le travail graphique joue beaucoup dans mon appréciation de ses récits, sans doute serais-je moins dithyrambique sans cela. Mais bon, la bande-dessinée est également un art graphique et la forme joue aussi un rôle important dans la qualité d'une œuvre ! Ça me fait presque bizarre de donner un coup de cœur à cet album, après tout La Gardienne des Papillons lu hier soir à peine avait déjà su m'attendrir suffisament pour le valoir et je n'ai pas envie de diminuer la valeur de cette unité de mesure en l'utilisant à tout va, mais je me dois d'être honnête avec mon ressenti : les deux albums, bien que différents, ont su tous deux me toucher par leur message simple sur l'acceptation de soi et l'épanouissement personnel et sur le travail graphique mignon comme tout de l'auteur-ice. Je suis peut être trop dithyrambique, trop positive lorsqu'il est question de ce genre de petits récits rêveurs et positifs comparée à d'autres aviseur-euse-s du site, mais voilà : je suis un cœur d'artichaut. Et puis les coup de cœur n'ont jamais eu à être objectifs ! Coup de cœur. (Note réelle 3,5)

28/10/2025 (modifier)
Couverture de la série La Gardienne des Papillons
La Gardienne des Papillons

Voilà ! C'est ce genre de petits récits pleins de poésie et au dessin si doux auquel je m'attendais lorsque je me suis essayée aux créations de cet-te auteur-ice ! Il s'agit ici d'un parcours initiatique, de la maturation d'une jeune protagoniste devant apprendre de ses erreurs, devant apprendre à voir au-delà de ses craintes et à parler avec les autres. C'est un joli petit récit, simple dans sa forme et touchant dans son fond. Il est question d'isolement (symbolisé par le désert et le métier solitaire de gardien-ne, mais aussi par la séparation des villages diurne et nocturne), de contact humain (que l'on désire mais que l'on a parfois du mal à obtenir), de peur (symbolisée par la nuit noire), d'espoir (symbolisé par ces papillons que l'on doit guider dans l'obscurité), d'envie d'expérimenter et de découvrir ce qui nous est d'apparence inaccessible (symbolisé par les rêves et peurs de notre protagoniste mais également par la légende de Lioka) et du poids des responsabilités. Les thèmes abordés me parlent et sont suffisamment bien traités ici pour que l'album fasse mouche chez moi. J'aime particulièrement le fait que cette petite communauté semble si idyllique : la population est hétéroclite (divers âges et espèces cohabitent et travaillent ensemble pour le bien être de tous-tes), l'amour et l'affection n'ont aucune barrière sociétale liée au genre des individus, dès lors qu'une personne semble se refermer sur elle-même ou souffrir en silence on essaye de l'aider comme on peut... Bref, il se dégage de ce joli petit village un optimisme et une positivité qui ont su redonner le sourire à l'aigrie semi-misanthrope que je suis. Ce qui a surtout su me toucher dans cet album, au delà du caractère épanouissant du récit, c'est la patte graphique de l'auteur-ice. J'aime son trait crayonné, ses couleurs douces et apaisantes, je trouve son style vraiment beau. Et au delà de ses simples capacités techniques, j'apprécie ses choix esthétiques. Cette culture du désert, ces personnages aux formes animalières, ces jolies légendes et traditions qui donnent du corps à ce monde, cette magnifique idée esthétique d'avoir choisi de représenter en personnage principale une apprentie gardienne/bergère de papillon de nuit, guidant les lumières animées dans la nuit pour assurer la prospérité de son village, tout ça forme un tout si joli, si doux, si poétique, si... mignon ! Oui, c'est mignon comme tout. C'est le genre de récit d'apparence simple mais au dessin si beau qui fait vibrer et fondre mon petit cœur émotif. Le dessin est beau, travaillé même, la symbolique de la lumière et de l'obscurité me parle beaucoup, la culture créée ici est magique (dans tous les sens du terme), que dire de plus si ce n'est que j'ai eu un p'tit coup de cœur (émotive que je suis). (Note réelle 3,5)

28/10/2025 (modifier)
Couverture de la série The Private Eye
The Private Eye

J’ai découvert The Private Eye grâce à la nouvelle édition sortie le 17 octobre 2025, accompagnée d’un fourreau. C’est une superbe occasion de plonger dans ce classique de Brian K. Vaughan et Marcos Martín. L’univers est fascinant : un futur où Internet a disparu, et où la vie privée est devenue une obsession. Dans ce monde post-numérique, tout le monde porte un masque pour cacher son identité, ce qui donne un ton à la fois ironique et inquiétant au récit. Le format à l’italienne est un vrai plus : il met en valeur la mise en page audacieuse et les couleurs éclatantes de Marcos Martín, tout en donnant une sensation de fluidité et de cinéma. C’est rare dans les comics, et ça rend la lecture encore plus immersive. En résumé : un polar de science-fiction brillant, au propos visionnaire et à la direction artistique exceptionnelle

28/10/2025 (modifier)
Couverture de la série Macbeth (Brizzi)
Macbeth (Brizzi)

Bon, je ne connaissais pas ce duo d'artistes, je n'ai jamais lu aucune de leurs œuvres, et pourtant les astres se sont alignés, très récemment, pour que je m'y penche. Quai des Bulles 2025, mon père me mentionne en passant entre deux marées humaines qu'il aurait aperçu Brizzi en train de faire des dédicaces quelques stands plus loin. Le nom ne me dit rien, j'ai déjà fait la queue pour quelques dédicaces m'intéressant et mon porte-monnaie me fait la gueule suite à tous mes achats, je n'y prête donc pas vraiment attention. Pourtant, miracle, coup du sort, je tombe sur cette couverture. Une Lady Macbeth au visage fantômatique, dans un dessin crayonné des plus magnifiques, se tient devant moi. Le dessin est saisissant, l'expression de son visage est magnifique et terrifiant en même temps, je me revois immédiatement relire Macbeth lors de ma fin d'adolescence et me rappelle avec plaisir toute la puissance de cette histoire. Ni une, ni deux, j'ai acheté l'album (au diable mes économies). Si j'ai craqué, c'est avant tout pour l’œuvre d'origine. Macbeth est une pièce mythique, non seulement parce que réputée immontable (de par sa complexité) mais également car son récit est à la fois simple et finement construit. Comme souvent chez Shakespeare, il est question de pouvoir, de mort, de mort pour le pouvoir et surtout d'une bonne couche d'ironie tragique. Les époux Macbeth, dans leur soif de pouvoir, font couler le sang à ne plus savoir s'arrêter, à ne plus pouvoir cesser de voir ce maudit liquide écarlate partout où iels passent. C'est une histoire sur l'ambition dévorante, les consciences maudites suite à des actes ignobles et surtout sur une lente descente en enfer. Mais surtout, c'est une histoire de sorcières. Si la pièce m'avait tant marquée depuis ma lecture, au delà de sa dimension tragique, c'est le rôle on ne peut plus marquant de ce groupe de sorcières qui, par leurs mots toujours si minutieusement choisis, manipulent les fils du destin et poussent chacun des personnages vers un destin funeste qu'elles leur ont choisi. À chacune de leurs rencontres (oui, dans l'album il n'y en a que deux mais je crois vaguement me souvenir d'une troisième) elles prononcent le moindre de leurs mots avec une maîtrise glaçante de la situation. Dépendant de qui est présent ou non, de ce qu'ont déjà fait les personnages ou non, elles ne révèleront pas les mêmes choses. Elles poussent par leurs prophéties macabres les époux Macbeth à commettre l'irréparable. Et pourtant rien ne les forçaient vraiment à tuer le roi ou à déclarer la guerre, rien ne les empêchait d'ignorer cette prophétie. Si les sorcières sont les metteuses en scène de ce récit macabre, les Macbeth sont les acteur-ice-s, celleux qui font l'action, celleux qui choisissent, et malheureusement iels ne parviennent pas à sortir de la trame dans laquelle iels se sont engouffrés. Mais trêve de louanges pour l’œuvre d'origine, il est question ici d'adaptation. Le théâtre étant un art corporel, vivant, la plus grande prouesse à mes yeux de cet album c'est à quel point les deux auteurs sont parvenus à retransmettre cette vie par le dessin. Qu'il s'agisse des visages, de ces expressions saisissantes qui m'ont frappée dès la couverture, qu'il s'agisse de ces décors pleins de détails, de ce travail magnifique des ombrages et cette retranscription très jolie des paysages écossais, chacune des illustrations m'a paru valoir que je m'arrête quelques minutes pour l'étudier. Vraiment, le travail graphique des deux auteurs est une pépite. Je ne les connaissais pas avant mais je vais dès à présent garder leur nom en tête. J'ai particulièrement aimé les moments de visions. Qu'il s'agisse des hallucinations des époux lorsque ceux-ci sombrent dans la folie ou bien des invocations fantomatiques des sorcières, ces brèves apparitions de variations de rouge et d'orange, rappelant le sang, rappelant la colère des morts, créent à chaque fois des moments saisissants. Un défaut cependant (oui, toute dithyrambique que je suis je n'en reste pas moins une conne aigrie) : le tour m'a semblé un tantinet trop rapide. Oui, avec une telle qualité graphique je sonne sans doute comme une enfant pourrie gâtée si je dit qu'ils "auraient quand-même pu en faire un peu plus", mais je n'aurais pas dit non à ce que l'on s'arrête davantage sur certains passages, que l'on n'iconise pas plus que ça certains moments pourtant légendaires (le monologue final de Lady Macbeth pour ne citer que le plus connu). Certains événements s'enchaînent un peu vite et je ne sais pas si des lecteur-ice-s ne connaissant pas antérieurement la pièce comprendront certaines subtilités du texte (comme le fait que la descendance de Banquo deviendra la nouvelle lignée royale alors que son fils ne termine pas couronné). Un petit défaut, une infime complainte aux yeux de certain-e-s, mais j'avoue qu'avec une forme si magnifique cette petite craquelure sur le fond me parait bien dommage. Mais ce défaut mis à part, l’œuvre reste finement travaillée. Pas loin de valoir la note maximale dans mon cœur, même. Non, vraiment, je ne regrette pas mon achat.

27/10/2025 (modifier)