Ayant toujours eu un faible pour le Japon médiéval, j'avais bien entendu parler de l'histoire d'un samouraï noir sans pour autant avoir pris le temps ni eu l'occasion d'aller creuser pour combler cette lacune. Cet album de Thierry Gloris dessiné par Emiliano Zarcone est donc tombé à point pour satisfaire ma curiosité.
On sent d'emblée le côté très documenté et passionné de Thierry Gloris pour le Japon médiéval et que le travail réalisé par nos deux auteurs semble avoir porté toute l'attention nécessaire aux moindres détails pour nous restituer une histoire au plus près de la vérité.
Fin du XVIe siècle, le jésuite Alessandro Valignano accompagné de son esclave noir Yussuf (rebaptisé Joseph) font le tour de leur établissement religieux en Asie. Ils débarquent au Japon en 1570. Nobunaga, le daimyo par qui ils sont accueillis est d'emblée fasciné par Joseph et force "amicalement" la main au jésuite pour lui racheter son esclave qu'il va renommer Yasuke. Petit à petit ce dernier va s'initier aux traditions et à la langue japonaise. D'abord bête de foire et curiosité locale, Yasuke va petit à petit affirmer sa place auprès du Daimyo et gagner sa confiance en lui sauvant la vie. La légende du samouraï noir est en marche...
Thierry Gloris nous propose une immersion profonde dans ce Japon médiéval. Son soucis du détail pourra peut-être en perturber certains, car l'histoire du Japon de l'époque nous est peu familière ; les guerres inter-claniques et les intérêts des différents seigneurs pourront échapperont à certains lecteur, surtout si comme moi vous avez un peu de mal à mémoriser les noms des personnages asiatiques. Mais même en faisant abstraction de cela, l'essentiel réside dans le parcours hors norme de cet esclave noir qui réussira à s'élever au rang de samouraï dans cette société si normative et figée du Japon médiéval.
Et pour ça, le dessin très réaliste et précis d'Emiliano Zarcone lui donne tout l'apuis nécessaire. On sent que l'auteur à du passer quelques heures à faire des recherches sur les costumes, les coiffures, les armes, les armures, l'architecture, et j'en passe ! Tout cela transpire de réalisme et crédibilise rapidement le récit qu'on nous propose. Surtout que la colorisation de Bruno Tatti, dans des tons plutôt doux met tout ce travail en valeur.
Je lirais donc avec intérêt la suite de ces aventures historique sur une période fascinante.
(3.5/5)
J'ai toujours appris à me méfier des avis dithyrambiques sur des Bd qui rallient un enthousiasme collectif ; certaines Bd le valent comme Blacksad ou Murena, d'autres comme Lanfeust de Troy ne le valent pas. C'est pas parce qu'un scénariste vedette et un virtuose du crayon s'associent que ça doit obligatoirement être sensationnel, même si bien sûr c'est un atout considérable. Ils peuvent se planter. Alors, "les Indes fourbes", est-ce encore une Bd surcotée ou est-ce justifié ? je répondrais oui et non, disons qu'elle n'atteint pas pour moi le statut de chef-d'oeuvre que le battage médiatique laissait espérer. D'ailleurs, ça m'énerve tous ces engouements autour d'une Bd (et c'est pareil au cinéma, quand c'est autour d'un gros blockbuster), parfois on en fait des tonnes, ça crée une attente énorme, et souvent on est déçu.
Dans le cas présent, je ne me suis pas ennuyé, c'est une fresque sur fond historique qui occasionne un plaisir de lecture, j'ai juste envie de nuancer un peu tout ça. Les imbrications d'épisodes narratifs m'ont paru un peu de trop, la forme narrative peut dérouter un peu par son côté ambivalent entre le conteur en voix off et le récit en lui-même, ce qui fait que les différentes périodes de la vie de Pablos vont parfois trop vite. Et d'autre part, si par moments, on a envie de prendre Pablos en affection, on ne s'attache pas à lui, ni a aucun autre personnage d'ailleurs, car il côtoie tellement de gens qui ne font que passer et croiser sa route, qu'on n'a pas le temps de s'intéresser à eux. On ne s'intéresse qu'à l'aventure contée, à son aspect rocambolesque et souvent savoureux, de même que l'époque choisie est intéressante, mais c'est elle qui porte le lecteur, les péripéties, les rebondissements séduisent en premier lieu, enfin moi c'est comme ça que je l'ai ressentie.
De ce fait, il faut bien suivre le déroulement du récit, tout ce que raconte Pablos est un déroulé de son parcours bien rempli, mais pas d'un seul tenant, il y a plusieurs tranches de vie qui s'additionnent les unes aux autres et qui forment un tout jusqu'à la chute surprenante. Il faut donc lire ce récit d'une seule traite et ne pas le lire en 2 ou 3 fois, au risque de perdre un peu le fil de l'histoire. Cet aspect m'a un peu gêné, car c'est quand même 160 pages.
Sinon, je reste positif, le portrait de ce vaurien au parcours chaotique qui le mène vers un destin exceptionnel reste une aventure ébouriffante et picaresque dans ce XVIIème siècle bien restitué, c'est une Bd très plaisante à lire, mais qui encore une fois, ne valait sans doute pas tout ce battage, c'est une très bonne Bd, point final.
Quant au dessin, il est d'une beauté renversante, un vrai travail d'artiste, ces pleines pages et ces pages sans dialogues sont une vraie splendeur, souvent remplies de petits détails qui sont intéressants à scruter. D'autant plus qu'on n'est guère habitué à voir Guarnido dessiner des visages humains, je suis ravi de voir qu'il n'est pas voué qu'à dessiner des personnages animaliers, tout comme je suis ravi de le voir changer d'univers en quittant l'univers sombre du roman noir pour la fresque historique.
Le concept de la double page muette (oui, je sais, encore une histoire sans parole...) sur deux perceptions du même moment est intéressante, artistique, originale par son formalisme minimaliste. Le graphisme moderne et sobre rappelle justement ces illustrations des consignes de sécurité en vol. La trajectoire de vie du héros par mini-séquences de doubles pages est plutôt juste, dans le ton, mais au final assez banale dans le fond.
Mais je pense que cette BD par son originalité graphique et sa lecture atypique mérite un coup d'oeil. Dommage que le récit reste froid et distant...
Chouette BD ! Dès que je l'ai feuilletée, j'ai trouvé les dessins très bons, et enchanteurs. L'histoire est simple, parfaite pour des enfants, mais comme je suis encore un grand enfant, je me suis laissé facilement transporter dans ce monde féerique un peu court, 30 pages, on en redemanderait.
Depuis des mois, un tueur en série met la police parisienne en échec et défie les plus fins limiers du 36 Quai des Orfèvres. Il faut dire, qu’à chaque nouveau meurtre, les enquêteurs découvrent une mise en scène particulièrement macabre et désopilante. Le divisionnaire, au langage fleuri à la Audiard, et sa brigade de bras cassés - il faut bien le reconnaître - deviennent la risée de la presse. Et pour couronner le tout, on lui envoie un bleu qui n’est autre que le fils du ministre de la justice, le jeune Pierre Caillaux. La situation est déjà assez compliquée comme ça pour ne pas, en plus, s’encombrer du rejeton du ministre. A peine arrivé, le jeune diplômé est aussitôt redirigé vers L'Ecluse, un policier relégué au sous-sol dans ce qui lui sert de bureau. Mis à l’écart de l’affaire qui occupe tout le commissariat, les deux compères vont enquêter tranquillement sur un autre meurtre, commis du côté de la cour Saint Émilion, haut lieu du négoce de vin pour la ville de Paris. L’Ecluse qui porte bien son nom a le physique et le caractère de Gérard Depardieu, ce qui en fait un personnage fort sympathique.
On dirait du Maigret avec des angles intéressants sur les débuts de la police scientifique et sur les éternelles querelles entre anciens et modernes. L’histoire est bonne mais le scénario trop haché. L’action a du mal à se développer graphiquement du fait d’un manque de liant entre les cases. Un peu longues aussi les planches qui se déroulent entièrement dans les bureaux du 36. Heureusement, que les dialogues sont argotiques et drôles à souhait ! Le dessin aux lignes fuyantes est vraiment beau avec des perspectives superbes sur les rues de Paname. On s’immerge avec plaisir dans ce Paris du début du siècle aux couleurs fanées. Ce n’est pas l’enquête du siècle mais on passe un super bon moment de lecture.
Cette chronique moderne, tendre et ironique qui nous embarque dans le quotidien d'une famille monoparentale est un family strip très contemporain ; on parle souvent des mères célibataires, mais des pères jamais, c'est donc une belle illustration avec ce père et ses 4 filles d'âges différents, qui ont des mères différentes et donc des caractères très différents. Il faut croire que Dad a eu une vie sentimentale bien chargée, et il faut croire aussi que c'est un bon père puisqu'il a eu la garde de ses enfants et la charge de leur éducation.
Les gags sont inégaux, mais parmi les Bd humoristiques modernes, je trouve qu'elle tient bien la corde si je puis dire, elle est de qualité aussi bien dans son concept, ses gags et graphiquement, souvent ce que je reproche aux Bd modernes de ce genre, c'est leur dessin ni fait ni à faire, et là, c'est joli, c'est un plus indéniable.
Certains gags fonctionnent très bien, ils sont en général bien trouvés, d'autres sont plus plats et moins percutants, mais les idées sont souvent amusantes, basées sans aucun doute sur du vécu ; je gage que l'auteur a dû puiser son inspiration dans son propre parcours de parent. C'est basé sur des situations de tous les jours, il y a les petits tracas, les galères mais aussi les joies de l'existence dans lesquelles on se retrouve forcément si on a été confronté à des devoirs de parent, toute cette retranscription est celle d'un père moderne des années 2000-2010. Les portraits des 4 filles sont bien sentis, elles sont souvent pestes mais aussi tellement choupinettes, et Dad est très amusant par son caractère d'éternel ado.
Voila donc une Bd au ton frais, charmant, amusant, spontané, tout en tendresse, avec des situations souvent loufoques et surtout très contemporaines ; le tableau de la famille traditionnelle est un peu égratigné, il y a une certaine ironie, mais c'est fait avec toujours beaucoup d'humour et de justesse, c'est chaleureux et plein de bons sentiments. Ce qui prouve que les Bd humoristiques s'adaptent à chacune de leurs époques ; dans celles que je lisais dans les années 60 et 70, genre Modeste et Pompon, prototype d'un bon family strip, l'esprit collait parfaitement à ceux de ces 2 décennies, donc ici c'est pareil, l'humour est très réaliste et très ancré dans son époque.
L'appréciation de cette Bd s'obtient aussi beaucoup par le dessin qui comme je le disais plus haut, est de bonne qualité, j'adore ce dessin tout en rondeur et souple, avec sa colorisation douce qui verse dans un aspect acidulé, c'est très agréable à l'oeil.
L'ennui avec ce genre de bande, c'est qu'elle risque de devenir répétitive, je vois qu'il y a déjà 7 albums, ça peut faire beaucoup, plusieurs idées reviennent avec quelques variantes, et les personnages évoluent certes, les filles grandissent, on y voit leurs mères, sans rien perdre de la trame de fond qui est avant tout un papa poule qui s'occupe de ses enfants, mais attention qu'il n'y ait pas l'album de trop...
Les auteurs marchent indéniablement sur les traces de Hugo Pratt avec cette Bd qui lorgne vers Corto Maltese ou Capitaine Cormorant, on y trouve de l'aventure exotique, des contrebandiers, des embrouilles, du suspense et de l'action à travers une galerie de personnages attachants qui constituent l'équipage du capitaine Erik, une équipe hétéroclite aux caractères bien trempés qui bourlingue sur les mers du Sud, bref c'est de l'aventure comme j'aime.
On retrouve tous les stéréotypes qui animaient les Bd populaires des années 70, car la bande est datée de 1972, c'est l'une des premières de Micheluzzi, et elle parut en France dans le pocket Pirates, petit format des éditions Aventures & Voyages (qui éditaient aussi Akim). J'ai essayé de voir si je retrouvais des épisodes dans les numéros que je possède, mais ma recherche fut infructueuse. Ce qui m'a étonné avec cet album, c'est que Mosquito ressuscite ce genre de bande issue des petits formats, surtout aussi tardivement, mais j'imagine que quand un auteur devient célèbre, ça peut se comprendre : c'est le cas de Micheluzzi, et n'oublions pas que la plupart des dessinateurs italiens sont passés par cette filière des petits formats, même Pratt, Manara ou Stelio Fenzi...
Le dessin est déjà pas si mal, même si on sent que ça s'améliorera, mais ça prouve que dans certains petits formats, des auteurs ne dessinaient pas tous à la va-vite, combien j'en ai vu qui livraient un dessin très potable. Au final, c'est très sympathique, très classique, la bande est rythmée, bien ficelée, rondement menée, c'est sans prétention et très agréable à lire.
J'ai déjà lu les autres productions éditées en France de Mana Neyestani. Cette histoire porte sur le pays d'origine de l'auteur, l'Iran où on découvre un tueur en série qui ne paie pas de mine. C'est un maçon tout chétif mais accusé d'avoir tué plusieurs prostituées au nom de Dieu pour "nettoyer" les rues de sa ville. Le récit est basé sur des entretiens menés par le documentariste Maziar Bahari et la journaliste Roya Karimi Majd. On sent la froideur et l'absence de remords de l'homme tellement il est convaincu d'avoir accompli son devoir. Il est d'ailleurs soutenu par une partie de la population. Même s'il revendique avoir agi au nom de la religion dans une république islamique, il sera malgré tout jugé et exécuté pour ses crimes. Cela est relaté de manière neutre, sans prendre parti pour ou contre les actions de l'homme, à la manière d'un documentariste.
Après avoir lu les 4 premiers tomes, c'est une série intéressante. Les deux premiers m'avaient pas mal accroché avec ce concept de descendance d'Hitler élevée dans le secret pour perpétuer son sang. Neun est le neuvième de cette fratrie de 13 enfants et le protagoniste. Celui qui a un certain potentiel caché, on le sent. Les enfants, du moins ceux qu'on a vu jusque-là, ont l'air d'avoir tous une dizaine d'années. L'histoire débute quand il est décidé de tous les éliminer sauf un qui répond à l'objectif de départ de ce projet. Chaque enfant est chapeauté par un gardien, qui bizarrement ne répond qu'aux ordres d'Hitler et pas au reste des SS. On suit deux gardiens qui assurent leur rôle et ne veulent absolument pas rendre les armes.
Pour autant ça commence à tourner un peu en rond, ça n'avance pas très vite. A ce rythme Neun n'est pas près de rencontrer tous ses frères et sœurs. C'est parfois dur et violent, contexte de guerre oblige, et contexte psychologique aussi que veut instaurer l'auteur. Et puis ça vire au fantastique en laissant à penser que le pouvoir de persuasion des foules d'Hitler et donc celui recherché dans sa descendance serait quelque peu surnaturel. Le contexte historique est finalement assez peu présent.
Le dessin est juste passable, sans plus, ça manque parfois de précision dans les contours.
J'ai le cul entre deux chaises en rédigeant cet avis, sur un album qui possède des qualités, mais auquel je n'ai pas plus que ça accroché.
D'abord il faut dire que la lecture est fluide. Le dessin, moderne, dynamique, une colorisation très marquée l'expliquent. Mais aussi les textes, finalement peu présents (beaucoup de pages muettes, peu de dialogues). Ça se lit vite en tout cas.
Le sujet ensuite, hélas d'actualité. Le harcèlement sur les réseaux sociaux, aboutissant à des lynchages médiatiques, et au suicide de certaines victimes. Mais aussi des lynchages "physiques" de prétendus délinquants (ce qui semble être un phénomène récurrent au Brésil, où se déroule l'intrigue ?).
Mais voilà, sur un sujet sensible et assez fédérateur, et avec une narration plutôt fluide, j'ai trouvé l'album trop creux, manquant d'aspérités (puisque ce n'est pas une étude sociologique, mais bien une "histoire"). Bref, je reste sur ma faim, même si la lecture se révèle instructive. Le sujet n'a été qu'effleuré, et l'histoire un peu trop oubliée.
Note réelle 2,5/5.
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Kurusan - Le Samouraï noir
Ayant toujours eu un faible pour le Japon médiéval, j'avais bien entendu parler de l'histoire d'un samouraï noir sans pour autant avoir pris le temps ni eu l'occasion d'aller creuser pour combler cette lacune. Cet album de Thierry Gloris dessiné par Emiliano Zarcone est donc tombé à point pour satisfaire ma curiosité. On sent d'emblée le côté très documenté et passionné de Thierry Gloris pour le Japon médiéval et que le travail réalisé par nos deux auteurs semble avoir porté toute l'attention nécessaire aux moindres détails pour nous restituer une histoire au plus près de la vérité. Fin du XVIe siècle, le jésuite Alessandro Valignano accompagné de son esclave noir Yussuf (rebaptisé Joseph) font le tour de leur établissement religieux en Asie. Ils débarquent au Japon en 1570. Nobunaga, le daimyo par qui ils sont accueillis est d'emblée fasciné par Joseph et force "amicalement" la main au jésuite pour lui racheter son esclave qu'il va renommer Yasuke. Petit à petit ce dernier va s'initier aux traditions et à la langue japonaise. D'abord bête de foire et curiosité locale, Yasuke va petit à petit affirmer sa place auprès du Daimyo et gagner sa confiance en lui sauvant la vie. La légende du samouraï noir est en marche... Thierry Gloris nous propose une immersion profonde dans ce Japon médiéval. Son soucis du détail pourra peut-être en perturber certains, car l'histoire du Japon de l'époque nous est peu familière ; les guerres inter-claniques et les intérêts des différents seigneurs pourront échapperont à certains lecteur, surtout si comme moi vous avez un peu de mal à mémoriser les noms des personnages asiatiques. Mais même en faisant abstraction de cela, l'essentiel réside dans le parcours hors norme de cet esclave noir qui réussira à s'élever au rang de samouraï dans cette société si normative et figée du Japon médiéval. Et pour ça, le dessin très réaliste et précis d'Emiliano Zarcone lui donne tout l'apuis nécessaire. On sent que l'auteur à du passer quelques heures à faire des recherches sur les costumes, les coiffures, les armes, les armures, l'architecture, et j'en passe ! Tout cela transpire de réalisme et crédibilise rapidement le récit qu'on nous propose. Surtout que la colorisation de Bruno Tatti, dans des tons plutôt doux met tout ce travail en valeur. Je lirais donc avec intérêt la suite de ces aventures historique sur une période fascinante. (3.5/5)
Les Indes fourbes
J'ai toujours appris à me méfier des avis dithyrambiques sur des Bd qui rallient un enthousiasme collectif ; certaines Bd le valent comme Blacksad ou Murena, d'autres comme Lanfeust de Troy ne le valent pas. C'est pas parce qu'un scénariste vedette et un virtuose du crayon s'associent que ça doit obligatoirement être sensationnel, même si bien sûr c'est un atout considérable. Ils peuvent se planter. Alors, "les Indes fourbes", est-ce encore une Bd surcotée ou est-ce justifié ? je répondrais oui et non, disons qu'elle n'atteint pas pour moi le statut de chef-d'oeuvre que le battage médiatique laissait espérer. D'ailleurs, ça m'énerve tous ces engouements autour d'une Bd (et c'est pareil au cinéma, quand c'est autour d'un gros blockbuster), parfois on en fait des tonnes, ça crée une attente énorme, et souvent on est déçu. Dans le cas présent, je ne me suis pas ennuyé, c'est une fresque sur fond historique qui occasionne un plaisir de lecture, j'ai juste envie de nuancer un peu tout ça. Les imbrications d'épisodes narratifs m'ont paru un peu de trop, la forme narrative peut dérouter un peu par son côté ambivalent entre le conteur en voix off et le récit en lui-même, ce qui fait que les différentes périodes de la vie de Pablos vont parfois trop vite. Et d'autre part, si par moments, on a envie de prendre Pablos en affection, on ne s'attache pas à lui, ni a aucun autre personnage d'ailleurs, car il côtoie tellement de gens qui ne font que passer et croiser sa route, qu'on n'a pas le temps de s'intéresser à eux. On ne s'intéresse qu'à l'aventure contée, à son aspect rocambolesque et souvent savoureux, de même que l'époque choisie est intéressante, mais c'est elle qui porte le lecteur, les péripéties, les rebondissements séduisent en premier lieu, enfin moi c'est comme ça que je l'ai ressentie. De ce fait, il faut bien suivre le déroulement du récit, tout ce que raconte Pablos est un déroulé de son parcours bien rempli, mais pas d'un seul tenant, il y a plusieurs tranches de vie qui s'additionnent les unes aux autres et qui forment un tout jusqu'à la chute surprenante. Il faut donc lire ce récit d'une seule traite et ne pas le lire en 2 ou 3 fois, au risque de perdre un peu le fil de l'histoire. Cet aspect m'a un peu gêné, car c'est quand même 160 pages. Sinon, je reste positif, le portrait de ce vaurien au parcours chaotique qui le mène vers un destin exceptionnel reste une aventure ébouriffante et picaresque dans ce XVIIème siècle bien restitué, c'est une Bd très plaisante à lire, mais qui encore une fois, ne valait sans doute pas tout ce battage, c'est une très bonne Bd, point final. Quant au dessin, il est d'une beauté renversante, un vrai travail d'artiste, ces pleines pages et ces pages sans dialogues sont une vraie splendeur, souvent remplies de petits détails qui sont intéressants à scruter. D'autant plus qu'on n'est guère habitué à voir Guarnido dessiner des visages humains, je suis ravi de voir qu'il n'est pas voué qu'à dessiner des personnages animaliers, tout comme je suis ravi de le voir changer d'univers en quittant l'univers sombre du roman noir pour la fresque historique.
A travers
Le concept de la double page muette (oui, je sais, encore une histoire sans parole...) sur deux perceptions du même moment est intéressante, artistique, originale par son formalisme minimaliste. Le graphisme moderne et sobre rappelle justement ces illustrations des consignes de sécurité en vol. La trajectoire de vie du héros par mini-séquences de doubles pages est plutôt juste, dans le ton, mais au final assez banale dans le fond. Mais je pense que cette BD par son originalité graphique et sa lecture atypique mérite un coup d'oeil. Dommage que le récit reste froid et distant...
Kilt le Picte
Chouette BD ! Dès que je l'ai feuilletée, j'ai trouvé les dessins très bons, et enchanteurs. L'histoire est simple, parfaite pour des enfants, mais comme je suis encore un grand enfant, je me suis laissé facilement transporter dans ce monde féerique un peu court, 30 pages, on en redemanderait.
Le Vendangeur de Paname
Depuis des mois, un tueur en série met la police parisienne en échec et défie les plus fins limiers du 36 Quai des Orfèvres. Il faut dire, qu’à chaque nouveau meurtre, les enquêteurs découvrent une mise en scène particulièrement macabre et désopilante. Le divisionnaire, au langage fleuri à la Audiard, et sa brigade de bras cassés - il faut bien le reconnaître - deviennent la risée de la presse. Et pour couronner le tout, on lui envoie un bleu qui n’est autre que le fils du ministre de la justice, le jeune Pierre Caillaux. La situation est déjà assez compliquée comme ça pour ne pas, en plus, s’encombrer du rejeton du ministre. A peine arrivé, le jeune diplômé est aussitôt redirigé vers L'Ecluse, un policier relégué au sous-sol dans ce qui lui sert de bureau. Mis à l’écart de l’affaire qui occupe tout le commissariat, les deux compères vont enquêter tranquillement sur un autre meurtre, commis du côté de la cour Saint Émilion, haut lieu du négoce de vin pour la ville de Paris. L’Ecluse qui porte bien son nom a le physique et le caractère de Gérard Depardieu, ce qui en fait un personnage fort sympathique. On dirait du Maigret avec des angles intéressants sur les débuts de la police scientifique et sur les éternelles querelles entre anciens et modernes. L’histoire est bonne mais le scénario trop haché. L’action a du mal à se développer graphiquement du fait d’un manque de liant entre les cases. Un peu longues aussi les planches qui se déroulent entièrement dans les bureaux du 36. Heureusement, que les dialogues sont argotiques et drôles à souhait ! Le dessin aux lignes fuyantes est vraiment beau avec des perspectives superbes sur les rues de Paname. On s’immerge avec plaisir dans ce Paris du début du siècle aux couleurs fanées. Ce n’est pas l’enquête du siècle mais on passe un super bon moment de lecture.
Dad
Cette chronique moderne, tendre et ironique qui nous embarque dans le quotidien d'une famille monoparentale est un family strip très contemporain ; on parle souvent des mères célibataires, mais des pères jamais, c'est donc une belle illustration avec ce père et ses 4 filles d'âges différents, qui ont des mères différentes et donc des caractères très différents. Il faut croire que Dad a eu une vie sentimentale bien chargée, et il faut croire aussi que c'est un bon père puisqu'il a eu la garde de ses enfants et la charge de leur éducation. Les gags sont inégaux, mais parmi les Bd humoristiques modernes, je trouve qu'elle tient bien la corde si je puis dire, elle est de qualité aussi bien dans son concept, ses gags et graphiquement, souvent ce que je reproche aux Bd modernes de ce genre, c'est leur dessin ni fait ni à faire, et là, c'est joli, c'est un plus indéniable. Certains gags fonctionnent très bien, ils sont en général bien trouvés, d'autres sont plus plats et moins percutants, mais les idées sont souvent amusantes, basées sans aucun doute sur du vécu ; je gage que l'auteur a dû puiser son inspiration dans son propre parcours de parent. C'est basé sur des situations de tous les jours, il y a les petits tracas, les galères mais aussi les joies de l'existence dans lesquelles on se retrouve forcément si on a été confronté à des devoirs de parent, toute cette retranscription est celle d'un père moderne des années 2000-2010. Les portraits des 4 filles sont bien sentis, elles sont souvent pestes mais aussi tellement choupinettes, et Dad est très amusant par son caractère d'éternel ado. Voila donc une Bd au ton frais, charmant, amusant, spontané, tout en tendresse, avec des situations souvent loufoques et surtout très contemporaines ; le tableau de la famille traditionnelle est un peu égratigné, il y a une certaine ironie, mais c'est fait avec toujours beaucoup d'humour et de justesse, c'est chaleureux et plein de bons sentiments. Ce qui prouve que les Bd humoristiques s'adaptent à chacune de leurs époques ; dans celles que je lisais dans les années 60 et 70, genre Modeste et Pompon, prototype d'un bon family strip, l'esprit collait parfaitement à ceux de ces 2 décennies, donc ici c'est pareil, l'humour est très réaliste et très ancré dans son époque. L'appréciation de cette Bd s'obtient aussi beaucoup par le dessin qui comme je le disais plus haut, est de bonne qualité, j'adore ce dessin tout en rondeur et souple, avec sa colorisation douce qui verse dans un aspect acidulé, c'est très agréable à l'oeil. L'ennui avec ce genre de bande, c'est qu'elle risque de devenir répétitive, je vois qu'il y a déjà 7 albums, ça peut faire beaucoup, plusieurs idées reviennent avec quelques variantes, et les personnages évoluent certes, les filles grandissent, on y voit leurs mères, sans rien perdre de la trame de fond qui est avant tout un papa poule qui s'occupe de ses enfants, mais attention qu'il n'y ait pas l'album de trop...
Capitan Erik
Les auteurs marchent indéniablement sur les traces de Hugo Pratt avec cette Bd qui lorgne vers Corto Maltese ou Capitaine Cormorant, on y trouve de l'aventure exotique, des contrebandiers, des embrouilles, du suspense et de l'action à travers une galerie de personnages attachants qui constituent l'équipage du capitaine Erik, une équipe hétéroclite aux caractères bien trempés qui bourlingue sur les mers du Sud, bref c'est de l'aventure comme j'aime. On retrouve tous les stéréotypes qui animaient les Bd populaires des années 70, car la bande est datée de 1972, c'est l'une des premières de Micheluzzi, et elle parut en France dans le pocket Pirates, petit format des éditions Aventures & Voyages (qui éditaient aussi Akim). J'ai essayé de voir si je retrouvais des épisodes dans les numéros que je possède, mais ma recherche fut infructueuse. Ce qui m'a étonné avec cet album, c'est que Mosquito ressuscite ce genre de bande issue des petits formats, surtout aussi tardivement, mais j'imagine que quand un auteur devient célèbre, ça peut se comprendre : c'est le cas de Micheluzzi, et n'oublions pas que la plupart des dessinateurs italiens sont passés par cette filière des petits formats, même Pratt, Manara ou Stelio Fenzi... Le dessin est déjà pas si mal, même si on sent que ça s'améliorera, mais ça prouve que dans certains petits formats, des auteurs ne dessinaient pas tous à la va-vite, combien j'en ai vu qui livraient un dessin très potable. Au final, c'est très sympathique, très classique, la bande est rythmée, bien ficelée, rondement menée, c'est sans prétention et très agréable à lire.
L'Araignée de Mashhad
J'ai déjà lu les autres productions éditées en France de Mana Neyestani. Cette histoire porte sur le pays d'origine de l'auteur, l'Iran où on découvre un tueur en série qui ne paie pas de mine. C'est un maçon tout chétif mais accusé d'avoir tué plusieurs prostituées au nom de Dieu pour "nettoyer" les rues de sa ville. Le récit est basé sur des entretiens menés par le documentariste Maziar Bahari et la journaliste Roya Karimi Majd. On sent la froideur et l'absence de remords de l'homme tellement il est convaincu d'avoir accompli son devoir. Il est d'ailleurs soutenu par une partie de la population. Même s'il revendique avoir agi au nom de la religion dans une république islamique, il sera malgré tout jugé et exécuté pour ses crimes. Cela est relaté de manière neutre, sans prendre parti pour ou contre les actions de l'homme, à la manière d'un documentariste.
NeuN
Après avoir lu les 4 premiers tomes, c'est une série intéressante. Les deux premiers m'avaient pas mal accroché avec ce concept de descendance d'Hitler élevée dans le secret pour perpétuer son sang. Neun est le neuvième de cette fratrie de 13 enfants et le protagoniste. Celui qui a un certain potentiel caché, on le sent. Les enfants, du moins ceux qu'on a vu jusque-là, ont l'air d'avoir tous une dizaine d'années. L'histoire débute quand il est décidé de tous les éliminer sauf un qui répond à l'objectif de départ de ce projet. Chaque enfant est chapeauté par un gardien, qui bizarrement ne répond qu'aux ordres d'Hitler et pas au reste des SS. On suit deux gardiens qui assurent leur rôle et ne veulent absolument pas rendre les armes. Pour autant ça commence à tourner un peu en rond, ça n'avance pas très vite. A ce rythme Neun n'est pas près de rencontrer tous ses frères et sœurs. C'est parfois dur et violent, contexte de guerre oblige, et contexte psychologique aussi que veut instaurer l'auteur. Et puis ça vire au fantastique en laissant à penser que le pouvoir de persuasion des foules d'Hitler et donc celui recherché dans sa descendance serait quelque peu surnaturel. Le contexte historique est finalement assez peu présent. Le dessin est juste passable, sans plus, ça manque parfois de précision dans les contours.
Lynchages ordinaires
J'ai le cul entre deux chaises en rédigeant cet avis, sur un album qui possède des qualités, mais auquel je n'ai pas plus que ça accroché. D'abord il faut dire que la lecture est fluide. Le dessin, moderne, dynamique, une colorisation très marquée l'expliquent. Mais aussi les textes, finalement peu présents (beaucoup de pages muettes, peu de dialogues). Ça se lit vite en tout cas. Le sujet ensuite, hélas d'actualité. Le harcèlement sur les réseaux sociaux, aboutissant à des lynchages médiatiques, et au suicide de certaines victimes. Mais aussi des lynchages "physiques" de prétendus délinquants (ce qui semble être un phénomène récurrent au Brésil, où se déroule l'intrigue ?). Mais voilà, sur un sujet sensible et assez fédérateur, et avec une narration plutôt fluide, j'ai trouvé l'album trop creux, manquant d'aspérités (puisque ce n'est pas une étude sociologique, mais bien une "histoire"). Bref, je reste sur ma faim, même si la lecture se révèle instructive. Le sujet n'a été qu'effleuré, et l'histoire un peu trop oubliée. Note réelle 2,5/5.