Ça faisait bien longtemps que je n'avais pas lu l'une de ces BD de Jim et Fredman qu'on voyait partout dans les supermarchés il y a une vingtaine d'années. On les retrouve ici dans une formule qu'ils maîtrisaient bien, même si elle tournait un peu en rond et n'a jamais fait l'unanimité chez les lecteurs les plus exigeants.
En le redécouvrant après tout ce temps, j'ai pu apprécier le dessin de Fredman : un trait généreux, pas avare en détails et en mises en scène, des couleurs vives, une gestuelle élastique, et des personnages expressifs. C'est propre, dynamique, et ça fonctionne bien.
Côté scénario, Jim reprend le principe éprouvé de ses albums consacrés aux défauts des mecs, mais appliqué cette fois aux travers féminins, volontairement caricaturés. L'introduction est amusante : il explique avoir eu besoin d'une femme pour éviter la misogynie et, surtout, de lui faire décrire les défauts de ses copines plutôt que les siens. Par la suite, certaines idées fonctionnent, quelques portraits sont bien vus, mais l'ensemble repose largement sur des clichés déjà lus ailleurs. Rien de honteux, rien d'hilarant non plus, juste de quoi esquisser un sourire. A noter d'ailleurs que plusieurs personnalités et défauts évoqués pourraient tout aussi bien s'appliquer à des hommes.
On retrouve la patte habituelle du duo : une qualité régulière, agréable, mais sans grande audace. Sur un album entier, la répétition se fait sentir et les gags reposent souvent sur des comportements volontairement exagérés. C'est un album qui se lit sans déplaisir, mais qui laisse une impression de déjà-vu.
J'ai découvert Mathieu Bablet avec Adrastée et depuis je ne loupe aucune de ses nouvelles productions.
Ce "Silent Jenny" termine sa trilogie post-apocalyptique après Shangri-La et Carbone & Silicium.
Bablet nous donne à voir un monde qui n'est plus le notre, une catastrophe inconnue l'a profondément changé, la vie animale et végétale a disparu. L'humanité survie tant bien que mal dans des conditions difficiles (températures très élevées, recherche d'eau et terre impropre à la culture). Pour faire revenir la vie, des expéditions sont rigoureusement programmées par une bureaucratie très pointilleuse sur le règlement. Point après point sur la carte, les recherches D’ADN d'abeille, le pollinisateur suprême, sont le Graal tant espéré. Des recherches qui amènent nos prospecteurs sous la surface de la terre, dans l'inframonde. Il est nécessaire pour cela de rapetisser à une taille d'insecte, et ce n'est pas sans danger. C'est le quotidien de Jenny, une femme introvertie, elle n'est pas très bavarde et ne respire pas la joie de vivre. Et ses visions récurrentes de la mort ne l'aident pas à aller mieux. Elle vit sur une monade, le Cherche-midi, un genre de bateau, bardé de technologie vieillissante, sur roue qui se traîne à la vitesse d'une limace. On y découvre un monde clos qui veut résister à Pyrrhocorp, une multinationale qui veut faire main mise sur ce monde désertique (thème récurrent chez l'auteur).
Comme à son habitude Bablet nous offre un récit dense qui lorgne sur le philosophique, il pousse à la réflexion sur des sujets d'actualité.
Une lecture qui n'a pas été un long fleuve tranquille, des choses m'ont échappé. Page 185, pourquoi la monade le Cherche-midi ne stoppe-t-elle pas les machines lorsqu'elle traverse un petit coin de paradis ? Malgré une relecture des dernières planches, je ne suis pas certain d'avoir tout bien compris. Je termine donc cet album sur une impression mitigée.
J'adore le style graphique Bablet. Il m'en a encore mis plein les yeux, des décors fabuleux, la désolation transpire sur chaque planche et les design des monades et des costumes sont une totale réussite. Il s'améliore même dans la représentation des visages, ils sont toujours disgracieux mais beaucoup plus facilement reconnaissables. De superbes couleurs. De rares magnifiques doubles pages à rester bouche bée.
Difficile de trouver une juste note... j'opte pour un 3,5 et un gros coup de cœur graphique.
De l'humour absurde assez proche de ce que peux faire Fabcaro, Karibou ou encore Tienstiens avec son excellent "Koko n'aime pas le capitalisme". Le principe est encore une fois de s'amuser de codes narratifs et de situations assez prévisibles et claires, en les détournant ou jouant sur l'absurdité de celles-ci en les poussant trop loin.
Cependant, je dois avouer que si j'ai beaucoup ri sur certains situations, il en reste de nombreuses qui sont juste sympathiques. Et surtout, je trouve que contrairement à certaines idées des auteurs cités au-dessus, il manque un peu de fond. Il n'y a pas ce petit supplément de critique politique ou social, ce petit pas de côté qui rajoute à l'humour absurde une considération sur le monde et la façon dont notre société est profondément absurde, ce qui rejaillit dans les imaginaires que l'on se crée.
Pas mauvaise BD du tout, bien au contraire, juste inférieure à mon goût à d'autre du genre. Elle est servie par un dessin très réussi par contre, avec un côté crayonné qui m'a évoqué Tienstiens. C'est joli, très compréhensible et ça se marrie à merveille au ton décalé et illogique de l'ensemble.
Lecture recommandée tout de même.
Jolie tranche de vie intimiste en 2 tomes volumineux autour d'un premier amour.
La trame principale de la romance est en soi peu originale, mais l'autrice rend l'exercice plaisant par sa gestion du rythme, de l'ambiance et des péripéties : pour notre jeune héroïne introvertie, toute ouverture à l'autre se vit dans un tiraillement continu, entre désir de vie, courage souhaité et appréhension du regard ou de la réaction de l'autre ; ainsi les questionnements intérieurs interrogent chaque élan du cœur, étirent le rythme général. La tournure mélancolique de l'intrigue séduit, ajoute une approche plus inattendue, parfaitement en écho avec les sentiments de l'héroïne.
Surtout, ce manga assoit son originalité dans sa manière de convier abondamment la culture japonaise et taiwanaise : Murakami, Edward Yang, la musique pop et notamment Hosono sont très régulièrement invités et d'une certaine manière à l'origine de la relation amoureuse, participent à son enrichissement.
Même maladroite, la manière de rendre compte du tourbillonnement intérieur de personnes chamboulées par un concert ou une œuvre culturelle touche la personne que je suis, jusqu'à atténuer le regret de n'être nullement attaché à cette héroïne un peu gauche et fort peu charismatique.
Je ne suis pas aussi généreux que mes prédécesseur-e-s sur cette série car je me laisse une petite marge de progression si le T2 garde le rythme de la fin du T1. En effet j'ai trouvé les premières pages un peu quelconque: un héros transparent doté d'un super pouvoir qui affronte les forces du mal avec la réussite du premier coup, une ambiance antique modernisée façon ado contemporain avec des références mythologiques trop facilement détournées. Je dois avouer que mon début de lecture fut poussive. J'ai beaucoup plus accroché en deuxième partie quand le personnage de Kalio prend la main et que l'intrigue accélère.
J'ai trouvé le graphisme de Karascoët sympa et bien adapté sans plus. L'univers méditerranéen est crédible et j'ai beaucoup aimé la mise en couleur. Mais graphiquement aussi j'ai trouvé le personnage d'Icare moins réussi dans sa fluidité et ses gestuelles que celui d'une Kalio très empathique.
Finalement un avis partagé qui attend la suite.
Nouvelle série d'aventures et de Fantasy qui trouve parfaitement sa place dans le catalogue Soleil. Le monde dans lequel l'action prend place est bien développé, on découvre progressivement le background et c'est plutôt bien amené. Au nord 2 royaumes séparés par une rivière, la Cicatrice. Entre les 2 la paix est fragile. Au sud une immense forêt, c'est le domaine des Druides. Un évènement macabre va directement menacer la paix, et Obrigan, un druide de l'ordre des loups va mener l'enquête pour éviter la guerre qui se profile.
Cet évènement en question c'est le massacre d'une garnison entière de soldats dans une citadelle réputée inattaquable. C'est sur ces meurtres que notre druide, aidé de ses apprentis, va devoir enquêter. Trouver les coupables doit permettre d'éviter que le royaume attaqué ne déclenche la guerre avec le voisin en représailles. Ce début d'intrigue est bien efficace notamment parce que cette enquête qui se profile lui donne un côté original et agréable. Il y a un petit côté Le nom de la rose qui distingue cette série d'une banale aventure d'héroic fantasy.
Ces investigations se poursuivent en même temps que le scénario prend le temps de développer le background. Les descriptions sont parfois un peu bavardes. L'univers décrit est bien imaginé mais paradoxalement tout le côté fantastique, les dons des druides et les scènes de transes sont moins percutants et plus classiques. La fin de ce premier tome a le bon goût d'offrir déjà des débuts de réponses, tout en conservant le suspens intact.
Un petit mot sur le dessin qui illustre joliment le tout, certain décors, châteaux et paysages sont très réussis.
L'autrice fait un témoignage de son expérience avec la secte de l'église de l'Unification du controversé révérend Moon.
Si on connait le sujet des sectes, ce qui arrive à la pauvre Boucher n'est pas du tout surprenant : rencontre avec des gens de son âge qui semblent gentils et deviennent proches d'elle, ils lui parlent de l'état du monde et de sa vie en général et comment elle pourrait tout améliorer et vivre une meilleur vie, elle va dans une réunion et finit par embarquer dans le délire de la secte après s'être fait laver le cerveau après des séances qui exposent les pensées de la secte.
Les parties les plus intéressantes est que j'ai appris un peu plus sur un mouvement que je connaissais surtout de nom et tout ce qui tourne autour de la désintoxication de l'autrice. En effet, ses parents et surtout sa mère vont se rendre compte que quelque chose cloche et que leur fille a été embarquée dans une secte. Ils vont tout faire pour la ravoir, allant jusqu'à être obligé de la kidnapper et l'enfermer dans un appartement pour qu'elle subisse une thérapie avec un ancien membre de la secte qui va tout faire pour lui ouvrir les yeux. Oui, c'est vraiment radical comme solution et c'est bien triste de voir une jeune fille embarquer aussi rapidement dans une secte et subir des séquelles pendant plusieurs années. C'est un beau témoignage qui j'espère va aider d'autres personnages.
Le seul vrai défaut est que je ne suis pas particulièrement fan du dessin. Je n'aime pas trop la manière dont elle dessine les visages et cela manque un peu de dynamisme. Je suis capable de passer au-dessus de ces défauts vu que c'est un témoignage-documentaire, mais si c'était une œuvre de fiction j'aurais sûrement trouvé que le dessin rend l'histoire chiante à lire.
Dessins aussi rebutants que ceux des superhéros, mollesse baveuse dans le cas de notre auteur, brutalité criarde dans celui des comics. Terrible ! Et terriblement dommage, parce qu'il y a bien des drames et idées dans les deux cas, comme ici de faire un vin qui respecte la terre et exprime le terroir, vaste problème… La narration est vraiment bien menée. Surtout, j'aime l'idée que chacun soit l'étudiant et l'enseignant de l'autre. Hélas, combien d'œuvres sans idée, et combien d'idées gâchées, c'est effrayant ! Dans ces conditions, je ne peux que mettre la moyenne, désolé.
Bande dessinée, il faut quand même que le dessin vaille quelque chose. Bande : progression, narration, histoire. Les deux comptent, et m'agacent ceux qui trouvent qu'on doit se farcir une histoire stupide pour de beaux dessins, ou des dessins qui piquent les yeux pour une belle histoire… Eh non, c'est comme au cinéma, certes avec moins d'intervenants, une histoire imagée, si un des aspects est là, la note ne peut pas être zéro, mais pas stratosphérique non plus si l'autre flanche. Cette bd bien surévaluée me fait penser aux bulles spéculatives.
Debeurme est un auteur à réserver aux lecteurs curieux amateurs de créations indépendantes, qui sortent souvent des sentiers battus. C’est clairement le cas ici, avec un récit qui s’éloigne furieusement du franco-belge classique, que ce soit au niveau graphique ou narratif.
C’est un récit à réserver à des lecteurs adultes, eu égard aux quelques scènes de sexe explicites, mais aussi à plusieurs scènes de tortures. Mais ici Debeurme, malgré la dureté de certaines scènes, développe quelque chose de poétique (une poésie très noire), avec des personnages qui sont tous plus ou moins fêlés, en tout cas qui montre tous une déviance – corporelle ou comportementale. Avec de nombreux personnages aux airs de freaks, un Pinocchio extrêmement surprenant (et lubrique !). C’est en tout cas un album moins facile d’accès que Ludologie que je viens d’aviser, mais j’y ai trouvé mon compte. "Céfalus" commence d'ailleurs là où la couverture de Ludologie nous accueillait, au bord d'une falaise, comme si l'auteur nous rappelait qu'il se situait toujours sur un fil, se mettait en danger.
En effet, les aspects sordides et noirs sont contrebalancés par une poésie, un certain surréalisme (quelques points communs avec le travail de Benoît Preteseille sur ces aspects) qui ont su me toucher.
Le dessin, comme souvent – du moins lorsqu’il travaille en Noir et Blanc (ce que je préfère en fait) – est simple, faussement naïf et hésitant, avec quelques traits nerveux. C’est épuré et lisible, j’aime bien le rendu, brut de décoffrage.
Debeurme est un auteur hautement original, assez clivant, qui ne peut généralement que décontenancer les amateurs de franco-belge classique, que ce soit au niveau de son dessin, ou de ses histoires.
Je dirais qu’avec cet album, on est dans ce que l’auteur peut proposer de plus aisé à appréhender. Ce sont de courts chapitres autobiographiques, dans lesquels Debeurme livre quelques anecdotes sur sa jeunesse, jusqu’à sa fin d’adolescence. A par au début avec les épisodes violents avec des Playmobils, le reste est plutôt classique, plus sage qu’à son habitude, y compris lorsqu’il évoque ses premiers émois sexuels.
Un album pas désagréable, même si Debeurme reste un peu sur la réserve en matière de récit.
Son dessin, comme toujours faussement maladroit et hésitant, simple, me plait bien.
En France, les livres sont au même prix partout. C'est la loi !
Avec BDfugue, vous payez donc le même prix qu'avec les géants de la vente en ligne mais pour un meilleur service :
des promotions et des goodies en permanence
des réceptions en super état grâce à des cartons super robustes
une équipe joignable en cas de besoin
2. C'est plus avantageux pour nous
Si BDthèque est gratuit, il a un coût.
Pour financer le service et le faire évoluer, nous dépendons notamment des achats que vous effectuez depuis le site. En effet, à chaque fois que vous commencez vos achats depuis BDthèque, nous touchons une commission. Or, BDfugue est plus généreux que les géants de la vente en ligne !
3. C'est plus avantageux pour votre communauté
En choisissant BDfugue plutôt que de grandes plateformes de vente en ligne, vous faites la promotion du commerce local, spécialisé, éthique et indépendant.
Meilleur pour les emplois, meilleur pour les impôts, la librairie indépendante promeut l'émergence des nouvelles séries et donc nos futurs coups de cœur.
Chaque commande effectuée génère aussi un don à l'association Enfance & Partage qui défend et protège les enfants maltraités. Plus d'informations sur bdfugue.com
Pourquoi Cultura ?
Indépendante depuis sa création en 1998, Cultura se donne pour mission de faire vivre et aimer la culture.
La création de Cultura repose sur une vision de la culture, accessible et contributive. Nous avons ainsi considéré depuis toujours notre responsabilité sociétale, et par conviction, développé les pratiques durables et sociales. C’est maintenant au sein de notre stratégie de création de valeur et en accord avec les Objectifs de Développement Durable que nous déployons nos actions. Nous traitons avec lucidité l’impact de nos activités, avec une vision de long terme. Mais agir en responsabilité implique d’aller bien plus loin, en contribuant positivement à trois grands enjeux de développement durable.
Nos enjeux environnementaux
Nous sommes résolument engagés dans la réduction de notre empreinte carbone, pour prendre notre part dans la lutte contre le réchauffement climatique et la préservation de la planète.
Nos enjeux culturels et sociétaux
La mission de Cultura est de faire vivre et aimer la culture. Pour cela, nous souhaitons stimuler la diversité des pratiques culturelles, sources d’éveil et d’émancipation.
Nos enjeux sociaux
Nous accordons une attention particulière au bien-être de nos collaborateurs à la diversité, l’inclusion et l’égalité des chances, mais aussi à leur épanouissement, en encourageant l’expression des talents artistiques.
Votre vote
Tous les défauts microscopiques des filles
Ça faisait bien longtemps que je n'avais pas lu l'une de ces BD de Jim et Fredman qu'on voyait partout dans les supermarchés il y a une vingtaine d'années. On les retrouve ici dans une formule qu'ils maîtrisaient bien, même si elle tournait un peu en rond et n'a jamais fait l'unanimité chez les lecteurs les plus exigeants. En le redécouvrant après tout ce temps, j'ai pu apprécier le dessin de Fredman : un trait généreux, pas avare en détails et en mises en scène, des couleurs vives, une gestuelle élastique, et des personnages expressifs. C'est propre, dynamique, et ça fonctionne bien. Côté scénario, Jim reprend le principe éprouvé de ses albums consacrés aux défauts des mecs, mais appliqué cette fois aux travers féminins, volontairement caricaturés. L'introduction est amusante : il explique avoir eu besoin d'une femme pour éviter la misogynie et, surtout, de lui faire décrire les défauts de ses copines plutôt que les siens. Par la suite, certaines idées fonctionnent, quelques portraits sont bien vus, mais l'ensemble repose largement sur des clichés déjà lus ailleurs. Rien de honteux, rien d'hilarant non plus, juste de quoi esquisser un sourire. A noter d'ailleurs que plusieurs personnalités et défauts évoqués pourraient tout aussi bien s'appliquer à des hommes. On retrouve la patte habituelle du duo : une qualité régulière, agréable, mais sans grande audace. Sur un album entier, la répétition se fait sentir et les gags reposent souvent sur des comportements volontairement exagérés. C'est un album qui se lit sans déplaisir, mais qui laisse une impression de déjà-vu.
Silent Jenny
J'ai découvert Mathieu Bablet avec Adrastée et depuis je ne loupe aucune de ses nouvelles productions. Ce "Silent Jenny" termine sa trilogie post-apocalyptique après Shangri-La et Carbone & Silicium. Bablet nous donne à voir un monde qui n'est plus le notre, une catastrophe inconnue l'a profondément changé, la vie animale et végétale a disparu. L'humanité survie tant bien que mal dans des conditions difficiles (températures très élevées, recherche d'eau et terre impropre à la culture). Pour faire revenir la vie, des expéditions sont rigoureusement programmées par une bureaucratie très pointilleuse sur le règlement. Point après point sur la carte, les recherches D’ADN d'abeille, le pollinisateur suprême, sont le Graal tant espéré. Des recherches qui amènent nos prospecteurs sous la surface de la terre, dans l'inframonde. Il est nécessaire pour cela de rapetisser à une taille d'insecte, et ce n'est pas sans danger. C'est le quotidien de Jenny, une femme introvertie, elle n'est pas très bavarde et ne respire pas la joie de vivre. Et ses visions récurrentes de la mort ne l'aident pas à aller mieux. Elle vit sur une monade, le Cherche-midi, un genre de bateau, bardé de technologie vieillissante, sur roue qui se traîne à la vitesse d'une limace. On y découvre un monde clos qui veut résister à Pyrrhocorp, une multinationale qui veut faire main mise sur ce monde désertique (thème récurrent chez l'auteur). Comme à son habitude Bablet nous offre un récit dense qui lorgne sur le philosophique, il pousse à la réflexion sur des sujets d'actualité. Une lecture qui n'a pas été un long fleuve tranquille, des choses m'ont échappé. Page 185, pourquoi la monade le Cherche-midi ne stoppe-t-elle pas les machines lorsqu'elle traverse un petit coin de paradis ? Malgré une relecture des dernières planches, je ne suis pas certain d'avoir tout bien compris. Je termine donc cet album sur une impression mitigée. J'adore le style graphique Bablet. Il m'en a encore mis plein les yeux, des décors fabuleux, la désolation transpire sur chaque planche et les design des monades et des costumes sont une totale réussite. Il s'améliore même dans la représentation des visages, ils sont toujours disgracieux mais beaucoup plus facilement reconnaissables. De superbes couleurs. De rares magnifiques doubles pages à rester bouche bée. Difficile de trouver une juste note... j'opte pour un 3,5 et un gros coup de cœur graphique.
De rien
De l'humour absurde assez proche de ce que peux faire Fabcaro, Karibou ou encore Tienstiens avec son excellent "Koko n'aime pas le capitalisme". Le principe est encore une fois de s'amuser de codes narratifs et de situations assez prévisibles et claires, en les détournant ou jouant sur l'absurdité de celles-ci en les poussant trop loin. Cependant, je dois avouer que si j'ai beaucoup ri sur certains situations, il en reste de nombreuses qui sont juste sympathiques. Et surtout, je trouve que contrairement à certaines idées des auteurs cités au-dessus, il manque un peu de fond. Il n'y a pas ce petit supplément de critique politique ou social, ce petit pas de côté qui rajoute à l'humour absurde une considération sur le monde et la façon dont notre société est profondément absurde, ce qui rejaillit dans les imaginaires que l'on se crée. Pas mauvaise BD du tout, bien au contraire, juste inférieure à mon goût à d'autre du genre. Elle est servie par un dessin très réussi par contre, avec un côté crayonné qui m'a évoqué Tienstiens. C'est joli, très compréhensible et ça se marrie à merveille au ton décalé et illogique de l'ensemble. Lecture recommandée tout de même.
The Song about Green
Jolie tranche de vie intimiste en 2 tomes volumineux autour d'un premier amour. La trame principale de la romance est en soi peu originale, mais l'autrice rend l'exercice plaisant par sa gestion du rythme, de l'ambiance et des péripéties : pour notre jeune héroïne introvertie, toute ouverture à l'autre se vit dans un tiraillement continu, entre désir de vie, courage souhaité et appréhension du regard ou de la réaction de l'autre ; ainsi les questionnements intérieurs interrogent chaque élan du cœur, étirent le rythme général. La tournure mélancolique de l'intrigue séduit, ajoute une approche plus inattendue, parfaitement en écho avec les sentiments de l'héroïne. Surtout, ce manga assoit son originalité dans sa manière de convier abondamment la culture japonaise et taiwanaise : Murakami, Edward Yang, la musique pop et notamment Hosono sont très régulièrement invités et d'une certaine manière à l'origine de la relation amoureuse, participent à son enrichissement. Même maladroite, la manière de rendre compte du tourbillonnement intérieur de personnes chamboulées par un concert ou une œuvre culturelle touche la personne que je suis, jusqu'à atténuer le regret de n'être nullement attaché à cette héroïne un peu gauche et fort peu charismatique.
Foudroyants
Je ne suis pas aussi généreux que mes prédécesseur-e-s sur cette série car je me laisse une petite marge de progression si le T2 garde le rythme de la fin du T1. En effet j'ai trouvé les premières pages un peu quelconque: un héros transparent doté d'un super pouvoir qui affronte les forces du mal avec la réussite du premier coup, une ambiance antique modernisée façon ado contemporain avec des références mythologiques trop facilement détournées. Je dois avouer que mon début de lecture fut poussive. J'ai beaucoup plus accroché en deuxième partie quand le personnage de Kalio prend la main et que l'intrigue accélère. J'ai trouvé le graphisme de Karascoët sympa et bien adapté sans plus. L'univers méditerranéen est crédible et j'ai beaucoup aimé la mise en couleur. Mais graphiquement aussi j'ai trouvé le personnage d'Icare moins réussi dans sa fluidité et ses gestuelles que celui d'une Kalio très empathique. Finalement un avis partagé qui attend la suite.
Obrigan - Le Serment des Druides
Nouvelle série d'aventures et de Fantasy qui trouve parfaitement sa place dans le catalogue Soleil. Le monde dans lequel l'action prend place est bien développé, on découvre progressivement le background et c'est plutôt bien amené. Au nord 2 royaumes séparés par une rivière, la Cicatrice. Entre les 2 la paix est fragile. Au sud une immense forêt, c'est le domaine des Druides. Un évènement macabre va directement menacer la paix, et Obrigan, un druide de l'ordre des loups va mener l'enquête pour éviter la guerre qui se profile. Cet évènement en question c'est le massacre d'une garnison entière de soldats dans une citadelle réputée inattaquable. C'est sur ces meurtres que notre druide, aidé de ses apprentis, va devoir enquêter. Trouver les coupables doit permettre d'éviter que le royaume attaqué ne déclenche la guerre avec le voisin en représailles. Ce début d'intrigue est bien efficace notamment parce que cette enquête qui se profile lui donne un côté original et agréable. Il y a un petit côté Le nom de la rose qui distingue cette série d'une banale aventure d'héroic fantasy. Ces investigations se poursuivent en même temps que le scénario prend le temps de développer le background. Les descriptions sont parfois un peu bavardes. L'univers décrit est bien imaginé mais paradoxalement tout le côté fantastique, les dons des druides et les scènes de transes sont moins percutants et plus classiques. La fin de ce premier tome a le bon goût d'offrir déjà des débuts de réponses, tout en conservant le suspens intact. Un petit mot sur le dessin qui illustre joliment le tout, certain décors, châteaux et paysages sont très réussis.
Parler à des inconnus - Comment je me suis échappée d'une secte
L'autrice fait un témoignage de son expérience avec la secte de l'église de l'Unification du controversé révérend Moon. Si on connait le sujet des sectes, ce qui arrive à la pauvre Boucher n'est pas du tout surprenant : rencontre avec des gens de son âge qui semblent gentils et deviennent proches d'elle, ils lui parlent de l'état du monde et de sa vie en général et comment elle pourrait tout améliorer et vivre une meilleur vie, elle va dans une réunion et finit par embarquer dans le délire de la secte après s'être fait laver le cerveau après des séances qui exposent les pensées de la secte. Les parties les plus intéressantes est que j'ai appris un peu plus sur un mouvement que je connaissais surtout de nom et tout ce qui tourne autour de la désintoxication de l'autrice. En effet, ses parents et surtout sa mère vont se rendre compte que quelque chose cloche et que leur fille a été embarquée dans une secte. Ils vont tout faire pour la ravoir, allant jusqu'à être obligé de la kidnapper et l'enfermer dans un appartement pour qu'elle subisse une thérapie avec un ancien membre de la secte qui va tout faire pour lui ouvrir les yeux. Oui, c'est vraiment radical comme solution et c'est bien triste de voir une jeune fille embarquer aussi rapidement dans une secte et subir des séquelles pendant plusieurs années. C'est un beau témoignage qui j'espère va aider d'autres personnages. Le seul vrai défaut est que je ne suis pas particulièrement fan du dessin. Je n'aime pas trop la manière dont elle dessine les visages et cela manque un peu de dynamisme. Je suis capable de passer au-dessus de ces défauts vu que c'est un témoignage-documentaire, mais si c'était une œuvre de fiction j'aurais sûrement trouvé que le dessin rend l'histoire chiante à lire.
Les Ignorants
Dessins aussi rebutants que ceux des superhéros, mollesse baveuse dans le cas de notre auteur, brutalité criarde dans celui des comics. Terrible ! Et terriblement dommage, parce qu'il y a bien des drames et idées dans les deux cas, comme ici de faire un vin qui respecte la terre et exprime le terroir, vaste problème… La narration est vraiment bien menée. Surtout, j'aime l'idée que chacun soit l'étudiant et l'enseignant de l'autre. Hélas, combien d'œuvres sans idée, et combien d'idées gâchées, c'est effrayant ! Dans ces conditions, je ne peux que mettre la moyenne, désolé. Bande dessinée, il faut quand même que le dessin vaille quelque chose. Bande : progression, narration, histoire. Les deux comptent, et m'agacent ceux qui trouvent qu'on doit se farcir une histoire stupide pour de beaux dessins, ou des dessins qui piquent les yeux pour une belle histoire… Eh non, c'est comme au cinéma, certes avec moins d'intervenants, une histoire imagée, si un des aspects est là, la note ne peut pas être zéro, mais pas stratosphérique non plus si l'autre flanche. Cette bd bien surévaluée me fait penser aux bulles spéculatives.
Céfalus
Debeurme est un auteur à réserver aux lecteurs curieux amateurs de créations indépendantes, qui sortent souvent des sentiers battus. C’est clairement le cas ici, avec un récit qui s’éloigne furieusement du franco-belge classique, que ce soit au niveau graphique ou narratif. C’est un récit à réserver à des lecteurs adultes, eu égard aux quelques scènes de sexe explicites, mais aussi à plusieurs scènes de tortures. Mais ici Debeurme, malgré la dureté de certaines scènes, développe quelque chose de poétique (une poésie très noire), avec des personnages qui sont tous plus ou moins fêlés, en tout cas qui montre tous une déviance – corporelle ou comportementale. Avec de nombreux personnages aux airs de freaks, un Pinocchio extrêmement surprenant (et lubrique !). C’est en tout cas un album moins facile d’accès que Ludologie que je viens d’aviser, mais j’y ai trouvé mon compte. "Céfalus" commence d'ailleurs là où la couverture de Ludologie nous accueillait, au bord d'une falaise, comme si l'auteur nous rappelait qu'il se situait toujours sur un fil, se mettait en danger. En effet, les aspects sordides et noirs sont contrebalancés par une poésie, un certain surréalisme (quelques points communs avec le travail de Benoît Preteseille sur ces aspects) qui ont su me toucher. Le dessin, comme souvent – du moins lorsqu’il travaille en Noir et Blanc (ce que je préfère en fait) – est simple, faussement naïf et hésitant, avec quelques traits nerveux. C’est épuré et lisible, j’aime bien le rendu, brut de décoffrage.
Ludologie
Debeurme est un auteur hautement original, assez clivant, qui ne peut généralement que décontenancer les amateurs de franco-belge classique, que ce soit au niveau de son dessin, ou de ses histoires. Je dirais qu’avec cet album, on est dans ce que l’auteur peut proposer de plus aisé à appréhender. Ce sont de courts chapitres autobiographiques, dans lesquels Debeurme livre quelques anecdotes sur sa jeunesse, jusqu’à sa fin d’adolescence. A par au début avec les épisodes violents avec des Playmobils, le reste est plutôt classique, plus sage qu’à son habitude, y compris lorsqu’il évoque ses premiers émois sexuels. Un album pas désagréable, même si Debeurme reste un peu sur la réserve en matière de récit. Son dessin, comme toujours faussement maladroit et hésitant, simple, me plait bien.