Saint-Germain est un aventurier trousseur de jupons, gouailleur et monte-en-l’air occasionnel, qui est aussi à l’aise parmi les puissants, à la cour du roi Louis XV. Ses virées et sa faconde sont bien mises en avant par Gloris, dont les dialogues ciselés accompagnent bien le héros, avec des textes assez travaillés, presque littéraires parfois.
Idem pour le dessin de Bergeron (qui signe aussi une colorisation réussie) : un rendu agréable, que ce soit pour les passages « terrestres » ou pour ceux se déroulant sur la lune. Je remarque juste certains visages (celui de Saint-Germain parfois) inégaux et changeants, plus ou moins « lissés » par la colorisation aussi.
Ces personnages Sélénites, justement, qui semblent jouer avec les « terriens » comme on le ferait de soldats de plombs, déroulant des intrigues parallèles, sont un peu troublants pour l’intrigue. Je ne sais pas si ces actions parallèles étaient nécessaires. Elles parasitent un peu le récit (on s’émerveille à peine de voir Saint-Germain se moquer des puissants qu’on le retrouve simple marionnette de personnages quasi divin : comme si l’Olympe lunaire observait les humains en les manipulant).
En tout cas, ajoutés au texte un peu littéraire de certains dialogues (mais aussi certains clins d’œil à Molière, ou à certains films, comme le « mèche courte » citant « Il était une fois la révolution » ou l’italien de cuisine utilisé par Saint-Germain pour séduire une vénitienne qui singe une célèbre tirade du film « Un poisson nommé Wanda »), ces passages font penser à l’excellente série De Cape et de Crocs, tout en étant quand même moins ambitieux et réussi je trouve.
Reste l’histoire principale donc, menée sur un ton et un rythme assez vif, autour de Saint-Germain, alchimiste à ses heures, spécialistes des pierres précieuses et de leurs effets (il travaille aussi pour un mystérieux commanditaire). Il doit faire face à un tout aussi mystérieux adversaire, qui cherche à l’éliminer (avec un borgne pour diriger ces basses œuvres). Pour les besoins de l’intrigue, Gloris a doté Saint-Germain de pas mal de qualités (il faut donc accepter certaines facilités) : guérisseur, enquêteur hors pair, manipulateur de diverses machines (qui donnent d’ailleurs, remarques surtout valables pour les automates sélénites, une esthétique pas désagréable).
Je ne suis pas fan du fantastique qui commençait à poindre vers la fin du second tome par contre. Une fin d’album qui semblait aussi annoncer une suite, qui ne viendra pas – même si ce diptyque peut se suffire à lui-même.
Une lecture sympathique.
Sans être révolutionnaire, le récit bâti par Lupano se laisse lire très agréablement. On s’attache réellement – et rapidement – aux personnages. A commencer par cette bande copains à la vie cabossée, gentils voyous qui se retrouvent dans une sorte de lycée agricole à la fin des années 1920. Pleins d'énergie, tous différents mais aux personnalités complémentaires, ils explorent la vie, mais aussi la région (en tout cas la maison du comte !).
Le personnage de Jeanne est a priori classique dans ce type de récit : la fille du comte/bourgeois du coin, qui s’amourache d’un des « voyous ». Mais Lupano sait habilement lui donner aussi quelques fêlures, et sa personnalité se révèle complexe et intéressante – et franchement moderne pour l’époque !
Pour dynamiter l’intrigue, Lupano amène quelques personnages secondaires intéressants. Le surveillant de l’école agricole, une gueule cassée qui cache visiblement un secret. Et un personnage tout ce qu’il y a de réel et d’historique lui, Violette Morris (à propos de laquelle Futuropolis publie actuellement une série).
Si l’intrigue est plaisante et bien menée, sa conclusion m’a laissé sur ma faim. En effet, en ayant lu la dernière page du second tome, je pensais apprendre en mettant mon avis que la série avait été abandonnée et qu’il manquait un tome au moins. Ce qui ne semble pas être le cas. Du coup ces dernières pages nous laissent en plan. Tous les protagonistes se dispersent, comme les acteurs d’une pièce abandonnent leurs personnages : que sont-ils devenus après ? Cette légère frustration gâche un petit peu le ressenti d’ensemble. Mais ça reste néanmoins un diptyque agréable à lire.
Note réelle 3,5/5.
Second documentaire en BD que je lis sur la vie à bord d'un bateau qui essaye de sauver les immigrants dans la Méditerranée, la première étant À bord de l'Aquarius.
Je n'ai donc pas appris grand chose de nouveau et malheureusement je n'ai pas été surpris par les trucs choquants qu'on montre dans ce documentaire. Il y a plusieurs moments très émouvants et aussi choquants alors c'est vraiment à lire pour un public averti qui n'a pas peur de voir la réalité en face (je ne conseille pas la lecture à un dépressif). Les seuls moments que je n'ai pas aimés sont ceux qui parlent de la mer en général. J'imagine que c'était censé être poétique, mais cela ne m'a pas touché et j'ai trouvé ces passages un peu prétentieux, notamment le début. J'aurais aimé qu'on ne voie que la vie dans ce bateau humanitaire.
Le dessin est sympa et j'ai bien aimé qu'il y avait des photos par moments pour montrer les migrants sauvés par le bateau, cela permet de mieux les humaniser et de se rappeler que c'est vrai, ce ne sont pas des personnages fictifs.
Constance, neuf ans, vit recluse dans une grande maison victorienne, sous la surveillance étouffante de parents surprotecteurs depuis la disparition de son grand frère. Ils lui interdisent presque tout, notamment de sortir, de peur qu'elle tombe malade. Mais derrière cette attitude se cache moins de l'amour que le reflet d'une obsession égocentrée, teintée de mépris... exactement comme ils traitaient déjà son frère ? À cette ambiance pesante s'ajoute une menace plus mystérieuse : des ombres inquiétantes rôdent autour de Constance, prêtes à lui nuire. Heureusement, un monstre bienveillant veille sur elle, caché aux yeux des autres, chargé de protéger les humains comme elle capables de percevoir l'invisible.
Cette série s'adresse à tous les publics mais avec une tonalité jeunesse marquée. J'y ai retrouvé une forte influence des mangas shojo et des récits à la Princesse Sara, mais ici, ce sont les parents eux-mêmes qui tiennent le rôle des antagonistes. Le fantastique occupe aussi une place importante et apporte de l'originalité, en superposant à ce drame familial la présence de créatures étranges, parfois menaçantes, parfois protectrices. Les deux intrigues se mêlent, laissant la forte impression que l'influence des ombres est responsable du comportement abusif des parents, à moins que ce ne soit l'inverse.
Le dessin a un côté charmant, quelque part entre style européen (italien surtout) et influence manga. J'ai quand même ressenti un manque de maîtrise technique, notamment dans les décors, les couleurs ou certaines maladresses numériques. Autre détail un peu perturbant : un personnage secondaire, un petit garçon si efféminé dans son dessin que j'ai mis deux pages à comprendre qu'il s'agissait bien d'un garçon.
En dehors des éléments fantastiques qui apportent un vent de fraîcheur, l'histoire peut parfois sembler trop convenue, avec une impression de déjà-vu. La curiosité du lecteur reste toutefois tenue en haleine à l'idée de comprendre les vraies motivations des parents (sont-ils purement égocentriques et stupidement méchants ?) ainsi que celles des ombres, et le rapport entre les uns et les autres. Cela entretient un suspense suffisant pour donner envie de tourner les pages.
C’est une bonne série d’aventure, bien ancrée dans l’Histoire. Avec un petit goût vieillot rappelant certains films hollywoodiens de la grande époque pas désagréable.
Un premier tome introductif nous présente les personnages et les tenants et aboutissants de l’expédition souhaitée par André Citroën (ni plus ni moins que la traversée de l’Asie, plus ou moins sur les traces de l’antique route de la soie, le tout avec des véhicules motorisés), mais aussi les personnages principaux.
Au milieu de l’expédition elle-même et ses multiples péripéties, Hautière place la relation entretenue par celui qui va diriger une partie de voyage (celle qui part de Chine – l’autre partant du Liban), Victor Point (le « marin ») et une jeune et séduisante actrice délaissée par son mari, Alice, qui ne se satisfait pas de la longue séparation prévue d’avec son amant.
Au cours des tomes suivants, les échanges épistolaires entre les deux rythment le récit, et permettent à Hautière de varier la narration. C’est plutôt bien fait, même si le personnage d’Alice, pourtant mis en avant sur chaque couverture, reste quand même très annexe, certains passages de sa vie parisienne ralentissant un peu le rythme du récit, tourné vers l’aventure.
Les tomes deux et trois – à part les apparitions d’Alice donc – permettent de suivre surtout la partie de l’expédition partie de Chine sous la direction de Victor (l’autre partie venant du Proche Orient n’apparaissant qu’épisodiquement). En plus des obstacles naturels (montagnes himalayennes, désert de Gobi et autres vallées à franchir sur des ponts peu engageants), les membres de l’expédition font face aux aléas d’une guerre civile en Chine, aux pillards et aux manigances d’agents étrangers (allemands semble-t-il) pour faire échouer l’expédition. Autant dire que les ressorts dramatiques ne manquent pas, et que le rythme ne baisse pas (sauf donc lorsque Alice intervient).
C’est une histoire intéressante, mais hélas la série a été abandonnée, alors qu’il manquait au moins un tome pour relater la jonction entre les deux branches de l’expédition. C’est dommage, car cette série avait bien utilisé son matériau historique, avec une narration globalement plaisante et rythmée.
Note réelle 3,5/5.
Un récit sympathique, qui se déroule dans l’immédiat après première guerre mondiale, alors que les rescapés cherchent à se reconstruire, ou à retrouver une vie « normale », ce qui est difficile pour une « gueule cassée » comme le héros.
Un récit presque intimiste, dans lequel un peu de polar s’invite – un mystérieux tireur abat les animaux de la région, ce qui attire un flic venu enquêter. Ça n’est pas la partie la plus intéressante du récit.
La narration est fluide, et la lecture, plaisante, est relativement rapide (il n’y a pas beaucoup de texte). Par bien des aspects, cette histoire fait penser à l’affaire Martin Guerre – seule l’époque a changé en fait. Même si cela se laisse deviner en amont, c’est bien fichu (et une dernière surprise est ménagée sur la fin).
Le dessin, sans esbroufe, usant d’un trait gras évacuant souvent certains détails (visages ou paysages), accompagne bien l’histoire. Là aussi ça fait le travail.
Un diptyque qui mérite un petit détour.
« Tuer l’Indien pour sauver l’homme », tel était l’objectif de ces « pensionnats » comme celui de Carlisle, qui ont tenté de mettre la dernière main sur l’ethnocide dont ont été victimes les Amérindiens aux États-Unis (mais au Canada, en Australie, les « autochtones » ont subi le même type de traitement, et ce n’est que très récemment que les pays concernés – en partie seulement aux États-Unis, et l’administration actuelle va sans doute mettre fin à toute « repentance » – ont fait leur mea culpa).
Le premier tome s’ouvre d’ailleurs – judicieusement – sur le siège mené par CIA, l'armée et autres groupes racistes contre des militants de l’American Indian Movement à Pine Ridge en 1973, sur le lieu du massacre de Wounded Knee, qui montrait qu’à cette époque la violence était encore de mise contre les Amérindiens (ici surtout Lakotas) qui souhaitaient préserver leurs racines. Je pense par contre qu’il aurait fallu contextualiser cet événement, que la plupart des lecteurs ne connaissent pas je pense.
Le sujet est intéressant, et donne à voir une facette un peu méconnue de l’ethnocide – voire du génocide – subi par les peuples amérindiens. Les méthodes violentes, l’humiliation permanente, et l’énorme hypocrisie (puisque si l’on cherchait bien à « tuer l’Indien », rien n’était réellement fait pour en faire des citoyens ordinaires, mépris, pauvreté, racisme les maintenant ensuite dans la misère pour la plupart). En cela ce diptyque est assez réaliste. De plus, en fin du premier tome, un petit dossier historique (auquel manque une bibliographie je trouve) rappelle les grandes lignes de ce projet de pensionnats indiens, dont celui de Carlisle est le plus célèbre – c’est le seul que je connaissais de nom).
A noter que l’on croise un « pensionnaire » célèbre, qui a fait l’objet d’un album chez un autre éditeur (Jim Thorpe).
Si le sujet est intéressant et méritait vraiment d’être mis en lumière, je suis moins convaincu par l’intrigue elle-même. Elle se laisse lire, certes. Mais je l’ai trouvée un peu mollassonne, et peu originale. On ne s’attache pas vraiment aux protagonistes.
Le dessin lui aussi m’a un peu laissé sur ma faim. Certes lisibles et pas désagréable, il n’est pas exempt de défauts, et manque lui aussi de personnalité.
Je le dis tout de go, si cette bande dessinée n’avait pas obtenu un prix à Angoulême, je ne me serais jamais donné la peine de la lire (et j’aurais pu m’en mordre les doigts !), rebuté par un dessin que je trouvais vraiment moche : trait simpliste et enfantin, personnages difformes, proportions qui piquent les yeux et composition boiteuse… Et comme l’autrice évoque dans cet ouvrage autobiographique sa passion pour le dessin, ses années aux Beaux-arts de Nantes et son embauche en tant que graphiste dans une petite boîte de jeux vidéo, j’ai voulu chercher trace de ses travaux sur Internet, en espérant y trouver son blog ou sa page Instagram… Sans succès… Du coup, je suis resté avec cette interrogation : pouvait-il s’agir d’un parti-pris ? Si l’on accepte la démarche, alors oui, on pourra se dire que c’est tout à fait raccord avec l’esprit du livre.
Et de ce point de vue, la narration est exemplaire. Carole Lobel nous captive tout au long de ces quelques 200 pages qui se lisent d’une traite. L’autrice a réussi faire d’une histoire assez ordinaire, la sienne, quelque chose qui s’apparente à un véritable thriller psychologique. Un mélange d’empathie pour sa narratrice et d’effroi saisit le lecteur devant cette avalanche de galères liées à cette relation toxique, alors qu’on assiste au fil des pages à l’évolution inquiétante de son compagnon Stéphane vers le « côté obscur ».
Carole Lobel nous livre ici un témoignage fort et précieux sur un épisode de sa vie dont elle n’est pas ressortie totalement indemne, mais qui révèle néanmoins la résilience dont elle a fait preuve. Même si elle apparaît fragile dans la façon dont elle se met en scène, on réalise que le plus fragile dans l’histoire, c’est en réalité Stéphane, malgré ses gesticulations virilistes et son attitude arrogante. Ce dernier impute constamment ses propres échecs à autrui, sans chercher à se remettre en cause, tout en camouflant son déni dans les vapeurs de weed.
Ce qui ressort de cette lecture, ce sont d’abord, bien sûr, les conséquences néfastes d’une relation toxique, où l’un des conjoints cherche à établir sa domination sur l’autre, mais aussi le mécanisme à l’œuvre aujourd’hui qui transparaît à travers les réseaux sociaux. A ce titre, Stéphane en est une parfaite illustration, avec un caractère qui le prédisposait à glisser vers ces gouffres obscurs du cyberespace où, tapie dans l’ombre, une idéologie fétide attend ses adeptes crédules, qui à leur tour iront répandre la « bonne parole » complotiste…
Et pour en revenir au dessin, ses imperfections finissent par s’effacer devant un contenu aussi saisissant, qui fait réellement froid dans le dos. On pourra même lui reconnaître des qualités, d’abord une bonne lisibilité, mais aussi une certaine habileté poétique à illustrer les états d’âme de sa narratrice, telle cette façon qu’elle a de symboliser la sexualité par une végétation luxuriante ou les manifestations de l’emprise « viriliste » de Stéphane. De même, Lobel sait diffuser l’humour nécessaire à la prise de distance et de fait, à sa survie morale. En somme, son trait bancal restitue bien la fragilité morale dans laquelle elle se trouvait à cette époque de sa vie, et respire même une urgence qui entravait tout fignolage, le but n’était assurément pas de faire « joli »…
On relèvera enfin également la qualité littéraire des textes, qualité étayée par l’impérieuse nécessité de livrer un tel témoignage.
Au final, « En territoire ennemi » s’avère un roman graphique aussi terrifiant qu’enrichissant, justifiant son fauve attribué par le jury angoumoisin. Il nous permet de comprendre, du moins en partie, le phénomène qui a fait des réseaux sociaux, au départ conçus comme un espace d’échanges et de liberté, une sorte de marécage nauséabond où ont prospéré les théories les plus fallacieuses et toute la propagande réactionnaire, désormais véritable menace pour nos fragiles démocraties. L’explication se trouverait-elle quelque part dans les propos de l’autrice elle-même, à propos de son compagnon ? « Que cherchait-il vraiment ? Sans doute, aussi dévoyée soit-elle, une forme de dignité. »
Je ne peux vraiment pas mettre 4 étoiles à cause du dessin, alors je compense avec un coup de coeur...
Un récit classique pour les jeunes qui parle de thèmes comme la discrimination et l'horreur de la guerre.
Évidemment, un lecteur expérimenté va souvent voir du déjà vu dans le caractère des personnages ou encore les péripéties que vivent l'héroïne et son entourage. Cela ne m'a pas dérangé plus que ça parce que c'est bien fait, mais c'est vrai que j'aurais aimé un scénario un peu plus original vu l'univers créé par les autrices. En effet, pour une fois on a de la fantasy médiévale qui se passe dans un environnement inspiré par les pays arabes et pas par l'Europe et le Japon. J'aurais bien aimé en apprendre plus sur ce monde. Il y a aussi le fait que le scénario accélère dans le dernier tiers et l'héroïne et ses amis finissent par se tirer d'une situation dangereuse de manière un peu trop facile selon moi.
Pour ce qui est du dessin, c'est encore une fois inspiré de l'animation, tellement que par moment on dirait que les cases sont des images tirées d'un film d'animation et qu'on a ajouté des bulles par-dessus. Le résultat est bon, quoique je ne sois pas spécialement fan de ce style. Un album a emprunter si on a des jeunes de 10-14 ans qui adorent la BD.
Mon avis porte sur l'intégrale des trois premiers tomes.
Tout d'abord, le trait de Juillard est magnifique dans cette série. Les planches fourmillent de détails. Venise et ses canaux, les châteaux italiens, les pyramides d'Égypte, tous ces lieux sont superbement reproduits.
La coloration n'est pas en reste. C'est un plaisir pour les yeux à chaque page.
Malheureusement cette histoire est desservie par le classicisme éculé de Martin qui use trop de voix off en plus d'être très verbeux au niveau des dialogues.
Le traitement des scènes d'action semble destiné à un public jeunesse, on a souvent l'impression de voir l'ombre d'Alix. Arno est un bellâtre comme le héros phare de Martin du reste.
Aussi, Bonaparte sert uniquement de fil rouge à l'intrigue, il n'est pas du tout développé et disparaît vite du récit. Un autre mauvais choix.
5 pour le dessin de Juillard et un 2 généreux pour l'histoire.
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Saint-Germain
Saint-Germain est un aventurier trousseur de jupons, gouailleur et monte-en-l’air occasionnel, qui est aussi à l’aise parmi les puissants, à la cour du roi Louis XV. Ses virées et sa faconde sont bien mises en avant par Gloris, dont les dialogues ciselés accompagnent bien le héros, avec des textes assez travaillés, presque littéraires parfois. Idem pour le dessin de Bergeron (qui signe aussi une colorisation réussie) : un rendu agréable, que ce soit pour les passages « terrestres » ou pour ceux se déroulant sur la lune. Je remarque juste certains visages (celui de Saint-Germain parfois) inégaux et changeants, plus ou moins « lissés » par la colorisation aussi. Ces personnages Sélénites, justement, qui semblent jouer avec les « terriens » comme on le ferait de soldats de plombs, déroulant des intrigues parallèles, sont un peu troublants pour l’intrigue. Je ne sais pas si ces actions parallèles étaient nécessaires. Elles parasitent un peu le récit (on s’émerveille à peine de voir Saint-Germain se moquer des puissants qu’on le retrouve simple marionnette de personnages quasi divin : comme si l’Olympe lunaire observait les humains en les manipulant). En tout cas, ajoutés au texte un peu littéraire de certains dialogues (mais aussi certains clins d’œil à Molière, ou à certains films, comme le « mèche courte » citant « Il était une fois la révolution » ou l’italien de cuisine utilisé par Saint-Germain pour séduire une vénitienne qui singe une célèbre tirade du film « Un poisson nommé Wanda »), ces passages font penser à l’excellente série De Cape et de Crocs, tout en étant quand même moins ambitieux et réussi je trouve. Reste l’histoire principale donc, menée sur un ton et un rythme assez vif, autour de Saint-Germain, alchimiste à ses heures, spécialistes des pierres précieuses et de leurs effets (il travaille aussi pour un mystérieux commanditaire). Il doit faire face à un tout aussi mystérieux adversaire, qui cherche à l’éliminer (avec un borgne pour diriger ces basses œuvres). Pour les besoins de l’intrigue, Gloris a doté Saint-Germain de pas mal de qualités (il faut donc accepter certaines facilités) : guérisseur, enquêteur hors pair, manipulateur de diverses machines (qui donnent d’ailleurs, remarques surtout valables pour les automates sélénites, une esthétique pas désagréable). Je ne suis pas fan du fantastique qui commençait à poindre vers la fin du second tome par contre. Une fin d’album qui semblait aussi annoncer une suite, qui ne viendra pas – même si ce diptyque peut se suffire à lui-même. Une lecture sympathique.
Le Droit Chemin
Sans être révolutionnaire, le récit bâti par Lupano se laisse lire très agréablement. On s’attache réellement – et rapidement – aux personnages. A commencer par cette bande copains à la vie cabossée, gentils voyous qui se retrouvent dans une sorte de lycée agricole à la fin des années 1920. Pleins d'énergie, tous différents mais aux personnalités complémentaires, ils explorent la vie, mais aussi la région (en tout cas la maison du comte !). Le personnage de Jeanne est a priori classique dans ce type de récit : la fille du comte/bourgeois du coin, qui s’amourache d’un des « voyous ». Mais Lupano sait habilement lui donner aussi quelques fêlures, et sa personnalité se révèle complexe et intéressante – et franchement moderne pour l’époque ! Pour dynamiter l’intrigue, Lupano amène quelques personnages secondaires intéressants. Le surveillant de l’école agricole, une gueule cassée qui cache visiblement un secret. Et un personnage tout ce qu’il y a de réel et d’historique lui, Violette Morris (à propos de laquelle Futuropolis publie actuellement une série). Si l’intrigue est plaisante et bien menée, sa conclusion m’a laissé sur ma faim. En effet, en ayant lu la dernière page du second tome, je pensais apprendre en mettant mon avis que la série avait été abandonnée et qu’il manquait un tome au moins. Ce qui ne semble pas être le cas. Du coup ces dernières pages nous laissent en plan. Tous les protagonistes se dispersent, comme les acteurs d’une pièce abandonnent leurs personnages : que sont-ils devenus après ? Cette légère frustration gâche un petit peu le ressenti d’ensemble. Mais ça reste néanmoins un diptyque agréable à lire. Note réelle 3,5/5.
Le Murmure de la mer
Second documentaire en BD que je lis sur la vie à bord d'un bateau qui essaye de sauver les immigrants dans la Méditerranée, la première étant À bord de l'Aquarius. Je n'ai donc pas appris grand chose de nouveau et malheureusement je n'ai pas été surpris par les trucs choquants qu'on montre dans ce documentaire. Il y a plusieurs moments très émouvants et aussi choquants alors c'est vraiment à lire pour un public averti qui n'a pas peur de voir la réalité en face (je ne conseille pas la lecture à un dépressif). Les seuls moments que je n'ai pas aimés sont ceux qui parlent de la mer en général. J'imagine que c'était censé être poétique, mais cela ne m'a pas touché et j'ai trouvé ces passages un peu prétentieux, notamment le début. J'aurais aimé qu'on ne voie que la vie dans ce bateau humanitaire. Le dessin est sympa et j'ai bien aimé qu'il y avait des photos par moments pour montrer les migrants sauvés par le bateau, cela permet de mieux les humaniser et de se rappeler que c'est vrai, ce ne sont pas des personnages fictifs.
Constance et les ombres
Constance, neuf ans, vit recluse dans une grande maison victorienne, sous la surveillance étouffante de parents surprotecteurs depuis la disparition de son grand frère. Ils lui interdisent presque tout, notamment de sortir, de peur qu'elle tombe malade. Mais derrière cette attitude se cache moins de l'amour que le reflet d'une obsession égocentrée, teintée de mépris... exactement comme ils traitaient déjà son frère ? À cette ambiance pesante s'ajoute une menace plus mystérieuse : des ombres inquiétantes rôdent autour de Constance, prêtes à lui nuire. Heureusement, un monstre bienveillant veille sur elle, caché aux yeux des autres, chargé de protéger les humains comme elle capables de percevoir l'invisible. Cette série s'adresse à tous les publics mais avec une tonalité jeunesse marquée. J'y ai retrouvé une forte influence des mangas shojo et des récits à la Princesse Sara, mais ici, ce sont les parents eux-mêmes qui tiennent le rôle des antagonistes. Le fantastique occupe aussi une place importante et apporte de l'originalité, en superposant à ce drame familial la présence de créatures étranges, parfois menaçantes, parfois protectrices. Les deux intrigues se mêlent, laissant la forte impression que l'influence des ombres est responsable du comportement abusif des parents, à moins que ce ne soit l'inverse. Le dessin a un côté charmant, quelque part entre style européen (italien surtout) et influence manga. J'ai quand même ressenti un manque de maîtrise technique, notamment dans les décors, les couleurs ou certaines maladresses numériques. Autre détail un peu perturbant : un personnage secondaire, un petit garçon si efféminé dans son dessin que j'ai mis deux pages à comprendre qu'il s'agissait bien d'un garçon. En dehors des éléments fantastiques qui apportent un vent de fraîcheur, l'histoire peut parfois sembler trop convenue, avec une impression de déjà-vu. La curiosité du lecteur reste toutefois tenue en haleine à l'idée de comprendre les vraies motivations des parents (sont-ils purement égocentriques et stupidement méchants ?) ainsi que celles des ombres, et le rapport entre les uns et les autres. Cela entretient un suspense suffisant pour donner envie de tourner les pages.
Le Marin, l'Actrice et la Croisière Jaune
C’est une bonne série d’aventure, bien ancrée dans l’Histoire. Avec un petit goût vieillot rappelant certains films hollywoodiens de la grande époque pas désagréable. Un premier tome introductif nous présente les personnages et les tenants et aboutissants de l’expédition souhaitée par André Citroën (ni plus ni moins que la traversée de l’Asie, plus ou moins sur les traces de l’antique route de la soie, le tout avec des véhicules motorisés), mais aussi les personnages principaux. Au milieu de l’expédition elle-même et ses multiples péripéties, Hautière place la relation entretenue par celui qui va diriger une partie de voyage (celle qui part de Chine – l’autre partant du Liban), Victor Point (le « marin ») et une jeune et séduisante actrice délaissée par son mari, Alice, qui ne se satisfait pas de la longue séparation prévue d’avec son amant. Au cours des tomes suivants, les échanges épistolaires entre les deux rythment le récit, et permettent à Hautière de varier la narration. C’est plutôt bien fait, même si le personnage d’Alice, pourtant mis en avant sur chaque couverture, reste quand même très annexe, certains passages de sa vie parisienne ralentissant un peu le rythme du récit, tourné vers l’aventure. Les tomes deux et trois – à part les apparitions d’Alice donc – permettent de suivre surtout la partie de l’expédition partie de Chine sous la direction de Victor (l’autre partie venant du Proche Orient n’apparaissant qu’épisodiquement). En plus des obstacles naturels (montagnes himalayennes, désert de Gobi et autres vallées à franchir sur des ponts peu engageants), les membres de l’expédition font face aux aléas d’une guerre civile en Chine, aux pillards et aux manigances d’agents étrangers (allemands semble-t-il) pour faire échouer l’expédition. Autant dire que les ressorts dramatiques ne manquent pas, et que le rythme ne baisse pas (sauf donc lorsque Alice intervient). C’est une histoire intéressante, mais hélas la série a été abandonnée, alors qu’il manquait au moins un tome pour relater la jonction entre les deux branches de l’expédition. C’est dommage, car cette série avait bien utilisé son matériau historique, avec une narration globalement plaisante et rythmée. Note réelle 3,5/5.
Pour un peu de bonheur
Un récit sympathique, qui se déroule dans l’immédiat après première guerre mondiale, alors que les rescapés cherchent à se reconstruire, ou à retrouver une vie « normale », ce qui est difficile pour une « gueule cassée » comme le héros. Un récit presque intimiste, dans lequel un peu de polar s’invite – un mystérieux tireur abat les animaux de la région, ce qui attire un flic venu enquêter. Ça n’est pas la partie la plus intéressante du récit. La narration est fluide, et la lecture, plaisante, est relativement rapide (il n’y a pas beaucoup de texte). Par bien des aspects, cette histoire fait penser à l’affaire Martin Guerre – seule l’époque a changé en fait. Même si cela se laisse deviner en amont, c’est bien fichu (et une dernière surprise est ménagée sur la fin). Le dessin, sans esbroufe, usant d’un trait gras évacuant souvent certains détails (visages ou paysages), accompagne bien l’histoire. Là aussi ça fait le travail. Un diptyque qui mérite un petit détour.
Carlisle
« Tuer l’Indien pour sauver l’homme », tel était l’objectif de ces « pensionnats » comme celui de Carlisle, qui ont tenté de mettre la dernière main sur l’ethnocide dont ont été victimes les Amérindiens aux États-Unis (mais au Canada, en Australie, les « autochtones » ont subi le même type de traitement, et ce n’est que très récemment que les pays concernés – en partie seulement aux États-Unis, et l’administration actuelle va sans doute mettre fin à toute « repentance » – ont fait leur mea culpa). Le premier tome s’ouvre d’ailleurs – judicieusement – sur le siège mené par CIA, l'armée et autres groupes racistes contre des militants de l’American Indian Movement à Pine Ridge en 1973, sur le lieu du massacre de Wounded Knee, qui montrait qu’à cette époque la violence était encore de mise contre les Amérindiens (ici surtout Lakotas) qui souhaitaient préserver leurs racines. Je pense par contre qu’il aurait fallu contextualiser cet événement, que la plupart des lecteurs ne connaissent pas je pense. Le sujet est intéressant, et donne à voir une facette un peu méconnue de l’ethnocide – voire du génocide – subi par les peuples amérindiens. Les méthodes violentes, l’humiliation permanente, et l’énorme hypocrisie (puisque si l’on cherchait bien à « tuer l’Indien », rien n’était réellement fait pour en faire des citoyens ordinaires, mépris, pauvreté, racisme les maintenant ensuite dans la misère pour la plupart). En cela ce diptyque est assez réaliste. De plus, en fin du premier tome, un petit dossier historique (auquel manque une bibliographie je trouve) rappelle les grandes lignes de ce projet de pensionnats indiens, dont celui de Carlisle est le plus célèbre – c’est le seul que je connaissais de nom). A noter que l’on croise un « pensionnaire » célèbre, qui a fait l’objet d’un album chez un autre éditeur (Jim Thorpe). Si le sujet est intéressant et méritait vraiment d’être mis en lumière, je suis moins convaincu par l’intrigue elle-même. Elle se laisse lire, certes. Mais je l’ai trouvée un peu mollassonne, et peu originale. On ne s’attache pas vraiment aux protagonistes. Le dessin lui aussi m’a un peu laissé sur ma faim. Certes lisibles et pas désagréable, il n’est pas exempt de défauts, et manque lui aussi de personnalité.
En territoire ennemi
Je le dis tout de go, si cette bande dessinée n’avait pas obtenu un prix à Angoulême, je ne me serais jamais donné la peine de la lire (et j’aurais pu m’en mordre les doigts !), rebuté par un dessin que je trouvais vraiment moche : trait simpliste et enfantin, personnages difformes, proportions qui piquent les yeux et composition boiteuse… Et comme l’autrice évoque dans cet ouvrage autobiographique sa passion pour le dessin, ses années aux Beaux-arts de Nantes et son embauche en tant que graphiste dans une petite boîte de jeux vidéo, j’ai voulu chercher trace de ses travaux sur Internet, en espérant y trouver son blog ou sa page Instagram… Sans succès… Du coup, je suis resté avec cette interrogation : pouvait-il s’agir d’un parti-pris ? Si l’on accepte la démarche, alors oui, on pourra se dire que c’est tout à fait raccord avec l’esprit du livre. Et de ce point de vue, la narration est exemplaire. Carole Lobel nous captive tout au long de ces quelques 200 pages qui se lisent d’une traite. L’autrice a réussi faire d’une histoire assez ordinaire, la sienne, quelque chose qui s’apparente à un véritable thriller psychologique. Un mélange d’empathie pour sa narratrice et d’effroi saisit le lecteur devant cette avalanche de galères liées à cette relation toxique, alors qu’on assiste au fil des pages à l’évolution inquiétante de son compagnon Stéphane vers le « côté obscur ». Carole Lobel nous livre ici un témoignage fort et précieux sur un épisode de sa vie dont elle n’est pas ressortie totalement indemne, mais qui révèle néanmoins la résilience dont elle a fait preuve. Même si elle apparaît fragile dans la façon dont elle se met en scène, on réalise que le plus fragile dans l’histoire, c’est en réalité Stéphane, malgré ses gesticulations virilistes et son attitude arrogante. Ce dernier impute constamment ses propres échecs à autrui, sans chercher à se remettre en cause, tout en camouflant son déni dans les vapeurs de weed. Ce qui ressort de cette lecture, ce sont d’abord, bien sûr, les conséquences néfastes d’une relation toxique, où l’un des conjoints cherche à établir sa domination sur l’autre, mais aussi le mécanisme à l’œuvre aujourd’hui qui transparaît à travers les réseaux sociaux. A ce titre, Stéphane en est une parfaite illustration, avec un caractère qui le prédisposait à glisser vers ces gouffres obscurs du cyberespace où, tapie dans l’ombre, une idéologie fétide attend ses adeptes crédules, qui à leur tour iront répandre la « bonne parole » complotiste… Et pour en revenir au dessin, ses imperfections finissent par s’effacer devant un contenu aussi saisissant, qui fait réellement froid dans le dos. On pourra même lui reconnaître des qualités, d’abord une bonne lisibilité, mais aussi une certaine habileté poétique à illustrer les états d’âme de sa narratrice, telle cette façon qu’elle a de symboliser la sexualité par une végétation luxuriante ou les manifestations de l’emprise « viriliste » de Stéphane. De même, Lobel sait diffuser l’humour nécessaire à la prise de distance et de fait, à sa survie morale. En somme, son trait bancal restitue bien la fragilité morale dans laquelle elle se trouvait à cette époque de sa vie, et respire même une urgence qui entravait tout fignolage, le but n’était assurément pas de faire « joli »… On relèvera enfin également la qualité littéraire des textes, qualité étayée par l’impérieuse nécessité de livrer un tel témoignage. Au final, « En territoire ennemi » s’avère un roman graphique aussi terrifiant qu’enrichissant, justifiant son fauve attribué par le jury angoumoisin. Il nous permet de comprendre, du moins en partie, le phénomène qui a fait des réseaux sociaux, au départ conçus comme un espace d’échanges et de liberté, une sorte de marécage nauséabond où ont prospéré les théories les plus fallacieuses et toute la propagande réactionnaire, désormais véritable menace pour nos fragiles démocraties. L’explication se trouverait-elle quelque part dans les propos de l’autrice elle-même, à propos de son compagnon ? « Que cherchait-il vraiment ? Sans doute, aussi dévoyée soit-elle, une forme de dignité. » Je ne peux vraiment pas mettre 4 étoiles à cause du dessin, alors je compense avec un coup de coeur...
Écuyère
Un récit classique pour les jeunes qui parle de thèmes comme la discrimination et l'horreur de la guerre. Évidemment, un lecteur expérimenté va souvent voir du déjà vu dans le caractère des personnages ou encore les péripéties que vivent l'héroïne et son entourage. Cela ne m'a pas dérangé plus que ça parce que c'est bien fait, mais c'est vrai que j'aurais aimé un scénario un peu plus original vu l'univers créé par les autrices. En effet, pour une fois on a de la fantasy médiévale qui se passe dans un environnement inspiré par les pays arabes et pas par l'Europe et le Japon. J'aurais bien aimé en apprendre plus sur ce monde. Il y a aussi le fait que le scénario accélère dans le dernier tiers et l'héroïne et ses amis finissent par se tirer d'une situation dangereuse de manière un peu trop facile selon moi. Pour ce qui est du dessin, c'est encore une fois inspiré de l'animation, tellement que par moment on dirait que les cases sont des images tirées d'un film d'animation et qu'on a ajouté des bulles par-dessus. Le résultat est bon, quoique je ne sois pas spécialement fan de ce style. Un album a emprunter si on a des jeunes de 10-14 ans qui adorent la BD.
Arno
Mon avis porte sur l'intégrale des trois premiers tomes. Tout d'abord, le trait de Juillard est magnifique dans cette série. Les planches fourmillent de détails. Venise et ses canaux, les châteaux italiens, les pyramides d'Égypte, tous ces lieux sont superbement reproduits. La coloration n'est pas en reste. C'est un plaisir pour les yeux à chaque page. Malheureusement cette histoire est desservie par le classicisme éculé de Martin qui use trop de voix off en plus d'être très verbeux au niveau des dialogues. Le traitement des scènes d'action semble destiné à un public jeunesse, on a souvent l'impression de voir l'ombre d'Alix. Arno est un bellâtre comme le héros phare de Martin du reste. Aussi, Bonaparte sert uniquement de fil rouge à l'intrigue, il n'est pas du tout développé et disparaît vite du récit. Un autre mauvais choix. 5 pour le dessin de Juillard et un 2 généreux pour l'histoire.