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Par LuluZifer
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Albin et Zélie
Albin et Zélie

[ LECTURE MERVEILLEUSEMENT DINGUE ] Albin et Zélie de Yannick Marchat – La Boîte à bulles 2012 Albin est un homme effacé, solitaire approchant de la trentaine. Il n’a pas une vie folle folle et son confident n’est autre que Jacques-Yves, son poisson rouge. Mais c’est sans compter qu’un jour il croise la route de Zélie, une nana un peu brute de décoffrage et assez canon disons-le. Avec Zélie, et via l’égide de son infernal poisson rouge, Albin va convier cette jeune femme à vivre une aventure démente et pas des moindre car ils vont faire un voyage qui va les souder à jamais. Je n’en dirais pas plus parce que je n’en ai pas envie ! Ce roman graphique doit être découvert de manière ébouriffante. Car c’est une fresque poétique, romanesque et d’une profondeur unique. Mais également marrante, attachante et enchanteresse. C’est le premier roman graphique de Yannick Marchat, dont j’ai découvert il y a peu l’univers, et qui doit être lu absolument. Le ton graphique est de plus fabuleux, bien que l’on devine que l’auteur se cherche encore. Mais il a déjà un style bien à lui et fait véhiculer des sensations intergalactiques et métaphoriques intenses quand il s’emploie à dessiner un monde complètement décalé où ses deux personnages sont totalement plongés dans leur quête romantique. Une quête à l’allure de lâcher prise et immersive. Yannick Marchat joue avec le lecteur (et se met même en scène dans son roman graphique), il nous perd, nous retrouve, nous fait nous évader, et tels les personnages de l’histoire on voyage dans un continuum espace-temps des plus dingue. L’auteur place quand même des petits indices par-ci par-là pour nous aider à capturer son intrigue relationnelle. Albin et Zélie s’est également, comme dit plus haut, une fresque amoureuse qui est toute de noire et blanc vêtue, où parfois le noir est mis en avant et inversement pour le blanc également. Il y a notamment une planche qui m’a scotchée, durant plusieurs minutes, et celle-ci représente la Lune ! Une énorme Lune noire qui brille et monumentale. C’est la page 81 ! SUBLIME avec un petit dialogue qui va bien. Monstrueux ! D’ailleurs, parlons-en des dialogues. Ils sont géniaux, vivants, inventifs, doux. Ceux de Zélie sont tellement drôles parfois et reflètent tellement bien le caractère ‘entier’ de ce personnage. Et ceux d’Albin, à contrario, sont souples, sages et merveilleux. Comme lui ! Un personnage imposant de par son allure avec une cœur débordant. Un homme nounours prêt à vous envelopper de son aura fabuleuse. Mais il ne faut pas oublier le poisson rouge, ce cher Jacques-Yves. Un être mystérieux et doué de raison. Il y a également la sœur de Zélie, Elise qui attends un heureux évènement. Bien que l’on ne la voit pas beaucoup au travers de l’histoire elle a de l’importance. Vous l’aurez compris ma lecture fut d’une grande éloquence. C’est inspirant ce genre de lecture. Et ça fait rudement du bien. Ce petit bijou est au prix de 15 euros, version souple et format un peu plus grand qu’un format poche et il se trimballe partout. Il ne vous reste que plus qu’à vous le procurez et vous ne serez pas déçue. Si si ! je vous le jure.

30/09/2019 (modifier)
Par PAco
Note: 4/5
Couverture de la série Entrez dans la danse
Entrez dans la danse

C'est toujours un plaisir que de retrouver ce duo d'auteurs qui aborde l'histoire d'une manière assez rafraichissante. Pas spécialement adepte des récits historiques un peu trop pointus et arides à mon goût, j'aime l'équilibre trouvé par Jean Teulé et Richard Guérineau pour nous narrer des moments de l'histoire ou nous conter la vie de personnages toujours un peu décalés. Dialogues et dessins sont ciselés dans ce but avec finesse, et du coup l'Histoire m’apparaît beaucoup plus digne d'intérêt. Après Charly 9 et Henriquet, l'homme-reine, c'est ce fait historique des plus hallucinant se déroulant à Strasbourg au début du XVIe que nous propose notre duo d'auteur : imaginez que la population de cette ville importante se mette à danser, danser, danser, sans pouvoir s'arrêter pendant des jours et des jours... Bon il faut dire que la population est depuis quelques temps soumise à rude épreuve : famine, récoltes réduites à rien à cause des aléas climatiques, maladies et guerre... C'est vrai qu'ils cumulent... Mais de là à rendre à moitié folle une population de grande ville pour se mettre à danser sans pouvoir s'arrêter, l'anecdote historique laisse pantois, oscillant entre le rire et les larmes. Car si les autorités prennent tout ça un peu à la légère au début, la contagion du phénomène va vite devenir une priorité ! Qui du clergé, des médecins et autres astrologues pourra sortir le malheureux maire de Strasbourg de cette folie ? L'Eglise va d'ailleurs en prendre pour son grade (à juste titre dirais-je...), Jean Teulé n'usurpe pas sur ce coup son titre de bouffe-curé ! Voilà en tout cas un album qui se lit d'une traite et met le doigt sur un moment de l'histoire que je ne connaissais pas. Les deux auteurs ont su trouver un angle tragi-comique parfait pour ce "fait divers" des plus troublant. Encore un très bon album !

30/09/2019 (modifier)
Couverture de la série Les Coeurs solitaires
Les Coeurs solitaires

J’ai bien aimé cette comédie sentimentale légère et espiègle. Oui, légèreté et espièglerie sont les deux termes qui me viennent le plus naturellement à l’esprit. Légèreté dans la narration tout comme dans l’intrigue (si tant est qu’on puisse parler d’intrigue). La lecture est fluide, avec un gros rebondissement au milieu du récit alors que le reste coule comme un long fleuve tranquille. Espièglerie dans le sens de l’observation de l’auteur qui se moque gentiment de ses personnages ainsi que de l’évolution de notre société. C’est doux, c’est frais, c’est amusant sans être hilarant, vraiment un sympathique moment de lecture pourvu qu’on n’en attende pas plus. Quant au dessin, rien à redire. J’aime le style très expressif et anguleux de Cyril Pedrosa. Ses personnages sont toujours bien croqués et l’auteur dispose d’une véritable personnalité qui lui permet de se distinguer de la masse sans jamais rien perdre de sa lisibilité. La colorisation de Walter est tout à fait idoine pour ce genre de trait comme pour le ton du récit. Vraiment très agréable… Il ne manque pas grand-chose pour que je fasse de cet album un réel must-have. Peut-être juste un tome ou deux en plus, histoire d’approfondir un peu ces personnages.

30/09/2019 (modifier)
Par Erik
Note: 5/5
Couverture de la série Les Indes fourbes
Les Indes fourbes

Il est des bd qui marquent car elles sont le fruit d’une association unique comme on en fait peu. Nous avons en effet le dessinateur de Blacksad avec le scénariste de la série bien aimée De Cape et de Crocs. J’avoue que le résultat est magnifique tant au niveau du scénario assez élaboré qu’au niveau du dessin qui est somptueux. C’est une bd fort ambitieuse mais qui tient une bonne partie des promesses. Il y a un livre d’origine « La vie de l'Aventurier Don Pablos de Ségovie » qui se passait en Espagne alors que cette suite se passe sur le continent américain. Le titre « Les Indes fourbes » est alors un peu trompeur mais c’est l’effet recherché. On va plutôt partir à la recherche de l’Eldorado mythique avec une fripouille sympathique. C’est parfois assez amoral mais bon. A retenir le commandement : tu ne travailleras point. Le dessin de Juanjo Guarnido est parfaitement maîtrisé. Il n’y a rien à jeter car tout est parfaitement maîtrisé. C’est du grand art. Nous avons là l’un des plus grands dessinateurs de la bd actuelle et il le prouve encore par cette nouvelle œuvre. Le travail de mise en aquarelle est également magnifique. De l’aventure, de l’humour, de l’action, de la bassesse et de la grandeur humaine. Cet album est un concentré de bonheur sur un ton savoureux. C’est d’ailleurs un récit plein de vie et de surprises avec de bonnes trouvailles. Il est vrai que le final est assez étonnant. Cet album est évidemment un indispensable à acquérir pour tout bédéphile qui se respecte. Nul doute qu’il fera date. En tout cas, c’est un immense plaisir de lecture.

30/09/2019 (modifier)
Par r0ud0ud0u
Note: 4/5
Couverture de la série Hold-up - Journal d'un braqueur
Hold-up - Journal d'un braqueur

Tome 2 trouvé par hasard, le dessin m'a attiré. Couverture sobre mais travaillée, comme un vieux journal que quelqu'un aurait utilisé pendant des années (ça tombe bien justement avec le thème). C'est l'histoire d'Heliot, en prison, il y consigne ses années de survie là-bas. Histoire entrecoupée du journal d'Héliot scotché et raturé, ça donne un côté vrai au scénario. Là-dessus, une bonne intrigue avec un codétenu psychopathe à tête de clown (on dirait le Joker). Un bon dessin, de bonnes couleurs, un scénario, tous les ingrédients d'une bonne BD. Je vous laisse découvrir, moi, j'ai aimé. Je viens de trouver, enfin, le tome 1, c'est la genèse de l'histoire, introduction au tome 2. J'ai sans doute eu la chance de lire le 2 avant le 1, je m'explique ; le 2 est à mon avis meilleur en terme de scénario, je ne suis pas sûr d'avoir cherché la suite dans le bon sens de lecture. Je dis pas que le 1 est mauvais, mais le 2 est meilleur. Ca me donne quand même envie de chercher le hors série qui existe. Note réelle : 3.5/5

29/09/2019 (modifier)
Par Alix
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série L'Anneau des 7 Mondes
L'Anneau des 7 Mondes

J’étais à la recherche d’une histoire de science-fiction prenante et terminée en 3 ou 4 tomes, et je ressors ravi de ma lecture de L’anneau des 7 mondes. Ce qui marque en premier, c’est bien entendu le graphisme superbe, à mi-chemin entre BD occidentale et manga... Ce style couplé à une ambience steampunk, avec ces navires volants et ces villes flottantes, rappellent vraiment certaines histoires de Miyazaki. J’imagine que cela ne sera pas du goût de tout le monde, mais moi j’ai trouvé ça magnifique, et surtout très lisible. L’histoire est aussi excellente. Elle est passionnante, et le côté un peu ado (à commencer par son héroïne) ne m’a finalement pas du tout dérangé. J’ai eu un peu de mal à suivre tous les méandres du scénario, notamment les intentions pas toujours très claires des nombreuses factions, races et autres castes s’affrontant tout au long du récit... le dernier tome remet cependant tout en place de façon habile et satisfaisante, même si il semble un peu dense (je me demande si les auteurs ont été obligés de réduire le nombre de tomes). Difficile d’en dire plus sans trop spoiler, mais disons que j’ai beaucoup adhéré au message sur les gâchis de la guerre, que j’ai trouvé très subtil et surtout plus que jamais d’actualité. Un excellent moment de lecture en ce qui me concerne.

29/09/2019 (modifier)
Par sloane
Note: 4/5
Couverture de la série Les Sans-Visages
Les Sans-Visages

D'abord une couverture, très belle mais intrigante avec ce cavalier qui porte un masque inhabituel. Même le titre ne dit que peu de choses sur le contenu. Nous sommes en Allemagne au 17 ème siècle pendant la guerre de Trente ans, une période plus que troublée. A cette époque l'empereur catholique des Habsbourg mène bataille contre les princes protestants, s'y mêlent aussi quelques armées françaises et espagnoles. Seul quelques historiens chevronnés seraient capable de dire qui combat qui et surtout pourquoi ? Les bandes de mercenaires ravagent la contrée dans une boucherie sans nom. Au cœur de ces batailles on pille, on viole et on tue. De nombreux soldats désertent et se rassemblent en bandes. Les Sans-Visages sont de ceux-là, ils sont vendus au plus offrant, parmi eux quelques illuminés portés par une foi aveugle, quelques nobles désargentés, un capitaine autrefois plein d'honneur qui s'est peu à peu transformé en loup sanguinaire et les hommes de troupes, affamés, las de courir après des causes perdues d'avance. Depuis peu cette troupe a déserté, tous les hommes portent des masques pour cacher des blessures extérieures ou intérieures. Alors qu'ils sont poursuivis par un parti ennemi ils découvrent une faille dans une falaise qui les mènent non sans mal dans une vallée de conte de fées, isolée et préservée des batailles. Accueillis par les habitants les guerriers décident de s'y installer, de déposer les armes et tenter de vivre enfin normalement. Cette histoire est tout bonnement magistrale, elle parle de guerre, de violence, de vengeance mais aussi de pardon et de rédemption. Le scénario de Pierre Dubois que l'on a connu amoureux des petites bêtes est au final assez malin, il nous entraine sur un chemin que l'on pourrait croire balisé mais qui nous emmène là où il le veut. Il n'y a pas d'issue heureuse, pas de happy end comme quelques détails auraient pu nous le laisser croire. Au dessin Kas qui a officié sur Hans et Halloween Blues possède un coup de crayon qui ici vient en contrepoint d'une histoire finalement tragique. Ses paysages bucoliques ne font que renforcer les événements dramatiques. Un trait réaliste bref on s'y croirait. Lorsque l'histoire se clôt on en vient à éprouver un certain regret de quitter ces personnages forts et attachants même si l'on a affaire à des guerriers sanguinaires.

28/09/2019 (modifier)
Par sloane
Note: 4/5
Couverture de la série The Kong Crew
The Kong Crew

Cette BD est une sorte de petit ovni dans le monde de l'édition, en effet nous sommes face à du franco belge parue à l'origine dans un format comics. C'est également un hommage appuyé au séries d'aventure de l'âge d'or. En vrac c'est un joyeux mélange de Mad Max des clins d’œil à F. Frazetta, on y trouve des pilotes de chasse gouailleurs aux sourires ultra brite, une pin up avec du caractère, un journaliste et un scientifique qui partent explorer ce New York revenu à l'âge préhistorique et bien sur l'armée américaine chargée d 'interdire l'accès à la zone. J'allais oublié, bien sur l'ombre de King Kong juste entraperçu dans ce premier tome. D'emblée Eric Herenguel place la barre assez haute les premières pages nous présentent un New York de 1947 après que le gorille géant se soit échappé. Manhattan est devenue une jungle inextricable ou traine encore quelques carcasses de l'ancien monde. La cité est devenue une île ou plus personne n'a le droit de s'aventurer. L'île est sillonnée par des patrouilles aériennes, la Kong Crew composée de pilotes qui veulent prouver qu'ils seront ceux qui abattrons Kong. Pas de perte de temps dans ce récit dynamique ou les personnages sont vite posés et s'engagent immédiatement dans l'action. Tout comme eux le lecteur n'attend que La rencontre mais hélas il lui faudra attendre un second tome, pour autant il y a matière à se mettre sous la dent ou plutôt l’œil tant l'on a envie d'en savoir plus sur un certains nombre de questions; pourquoi la flore a t'elle autant poussé en seulement quelques années ? Qui sont ces mystérieux militaires armés de lances flammes parcourent la zone interdite ? Quels sont les dangers que recèlent le métro ou personne n'ose descendre ? Graphiquement on ne peut pas reprocher grand chose à l'auteur, les scènes d'un Manhattan revenu à l'état de nature sont magnifiques, sans parler des arrières plans travaillés, la colorisation quand à elle réserve de belles planches. Nous sommes donc face à une histoire rondement menée qui donne envie de connaitre la suite, celle ci devant être prête pour Angoulême 2020. Personnellement j'adhère à ce type de projet, nul doute qu'il devrait plaire au plus grand nombre. Faites tourner.

28/09/2019 (modifier)
Par sloane
Note: 4/5
Couverture de la série Les 5 Terres
Les 5 Terres

Les BD qui mettent en scène des personnages d'animaux anthropomorphes sont parfois un peu casse gueule, certaines s'en sortent avec les honneurs, je ne citerais que Blacksad. Ici même si le dessin est bien sur totalement différent il fait plus que son boulot. Jerôme Lereculey sait manier un crayon, il suffit pour s'en persuader de se souvenir de son travail sur Wollodrïn et le cycle d'Arthur pour ne citer qu'eux. Les décors sont très beaux, la colorisation est comme je l'aime c'est à dire pas trop flashy ni trop terne et cerise sur le gâteau les scènes d'action qui ponctuent le récit sont dynamiques, choses pas toujours évidentes dans le monde de la BD. Ce premier tome est frustrant car il ne fait que poser les bases de l'intrigue ( c'est bien sur le rôle d'un premier tome) mais cela est tellement bien fait que l'on a qu'une hâte vite se replonger dans cette contrée qui oui en rappelle une autre. A ce propos pour finir moi aussi comme Mac Arthur je vais râler un brin ou plutôt exprimer un petit regret c'est que ce premier tome pourrait être un peu plus épicé. Je n'en fait cependant pas trop car plus épicé avec des animaux même anthropomorphes vais me faire traiter de zoophile moi. Non au final une très bonne histoire qui sait prendre le lecteur avec elle, j'ai plutôt hâte de lire la suite.

28/09/2019 (modifier)
Par Blue Boy
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Le Roi des Scarabées
Le Roi des Scarabées

Je recommande vivement de découvrir ce chef d’œuvre injustement oublié, qui avait rencontré assez peu d’écho à sa sortie. « Le Roi des scarabées » est une adaptation librement inspirée du roman « Niels Lyhne », publié en 1880 par l’écrivain et poète danois Jens Peter Jacobsen. Sans avoir lu le livre, difficile de dire si la qualité narrative de l’ouvrage est due à ce dernier ou à Anne-Caroline Pandolfo elle-même. Quoi qu’il en soit, il y a un vrai talent de conteur derrière tout cela, et c’est avec une immense fascination que l’on suit le parcours de cet anti-héros qu’est Aksel, aussi performant en poète lunaire qu’en loser mélancolique. Et il le prouve admirablement : on peut parfaitement être un perdant magnifique et faire montre de panache en délaissant l’ignoble réalité âpre et butée pour la folie douce, envisagée ici comme un refuge merveilleux peuplé de scarabées aux reflets lumineux, « sauvages et raffinés à la fois ». Aksel, poète blessé et agrippé au monde de l’enfance... L’horloge tournera trop vite pour ce doux tocard contemplatif qui décevra les espoirs trop lourds à porter de sa mère qui voulait voir en lui un futur poète de génie adulé par le monde entier et une planche de salut pour s’extirper de la boue de sa campagne où elle mourrait à petit feu, déçue par un mariage pourtant prometteur… Mais comme par une sorte de malédiction familiale, Aksel va être à l’adolescence totalement subjugué puis aspiré par cet « astre noir » qu’est Fredrik, fils charismatique d’une cousine de son père et talentueux dessinateur promis à une carrière artistique. Aksel scellera très tôt avec Fredrik un pacte d’amitié comme on scelle un pacte avec le diable. Il partagera quelques temps la vie de son complice à Copenhague, mais celui-ci, également désireux de l’encourager dans son art, sera vite consumé par son inclination aux plaisirs terrestres. Son attirance pour l’ivresse et les jolies femmes aura finalement raison de son talent, et cet écorché vif exubérant, « lamentable jouisseur » comme il se définira lui-même, connaîtra une fin tragique, entraînant Aksel vers des gouffres existentiels dont il ne se sortira pas. Pour mettre en valeur cette histoire prenante traversée par de très beaux personnages, Terkel Risbjerg nous livre un dessin pur, en noir et blanc, comme s’il avait trempé son pinceau dans les tréfonds de son âme, conférant à l’œuvre une qualité poétique remarquable, ce qui est la moindre des choses ici. Alimenté par les sensations, le trait semble inachevé, d’une tournure minimaliste exprimant l’essentiel des choses et des sentiments, avec une splendide évocation des rêves enfantins. C’est très fort, très puissant. Fidèle à la grande tradition romanesque, ce chef d’œuvre, qui nous immerge dans l’hiver danois du XIXe siècle, suscite une réflexion profonde sur l’identité et la folie en poussant le parcours de chaque personnage vers des extrémités spectaculaires qui laissent le lecteur sidéré. Sous une obscurité apparente liée à un contexte climatique glacial et à la description de destins funestes, une certaine luminosité émerge, de l’ordre peut-être de celle qui se reflète sur les ailes des scarabées.

28/09/2019 (modifier)