Les éditions Tanibis, comme d’autres petites structures (2024 par exemple) font un travail extraordinaire, prennent des risques – dans tous les sens du terme – pour défendre des œuvres originales, qui peuvent sortir des sentiers battus par les « grandes » maisons d’édition. Et, comme souvent – comme toujours ? – Tanibis le fait très bien, avec un travail éditorial remarquable : couverture cartonnée avec dos en simili cuir, papier lui aussi épais, belle mise en page, on ne peut que saluer ce travail.
Tanibis m’avait fait découvrir cet auteur avec Le Bus (ou alors est-ce cet album qui m’avait fait découvrir cette maison d’édition ?), et ils ont récemment publié un superbe album anthologique du travail ancien de Kirchner, période underground et psychédélique (En attendant l'apocalypse). Ils poursuivent avec un inédit, très différent dans le fond et la forme de ce que je connais de Kirchner, même si certains aspects peuvent se retrouver dans Le Bus.
Lorsque j’ai commencé à avoir des infos sur cette publication, je me suis immédiatement dit que j’allais l’acheter. En effet, un album de Paul Kirchner, sur Jérôme Bosch (artiste génial) ! En fait, seul Kirchner est au rendez-vous, puisqu’il n’est pas question ici de l’artiste flamand – encore que le personnage principal pourrait chronologiquement en être une version, même s’il meurt 8 ans avant le peintre… Et l’imagerie de Bosch, sa vision encore médiévale de l’enfer n’est finalement pas si éloignée de celle rendue par Kirchner, qui la traite par contre sur un mode humoristique et désabusé.
Un court « prologue » - dans lequel est prononcée la seule parole de l’album (« Bosch ! ») nous présente le héros, Jheronimus donc, malandrin haineux, voleur, emmerdeur, qui meurt en 1508, après avoir chapardé à un gamin son jouet, un canard sur roulettes que l’on tire (et qui donc avait été nommé Bosch par son jeune propriétaire).
Le reste de l’album – très épais (près d’une centaine de pages) – est constitué d’une série d’histoires courtes/gags d’une page à chaque fois, se déroulant en enfer. Jheronimus, qui se balade sans arrêt en tirant Bosch, son canard à roulettes, se voit torturé, emmerdé, pourrir la vie par le diable et ses créatures infernales (Dieu et les anges faisant quelques très rares apparitions).
Le ton est à l’humour noir, absurde (c’est là que l’on peut trouver des accointances avec Le Bus, mais c’est quand même très différent et moins répétitif et froid), voire parfois débile.
L’ensemble est inégal, mais j’ai bien aimé – même si, affaire de goût, j’aurais apprécié plus de folie, de noirceur et de trash. Mais cela reste quand même un chouette album (note réelle 3,5/5, que j’arrondis à 4 eu égard à la qualité du travail de l’éditeur).
Je voudrais tout d’abord saluer le beau travail éditorial, avec un papier épais (et une couverture « à trou », illustrant bien le fonctionnement de l’histoire développée à l’intérieur), qui met très bien en valeur le travail de l’auteur.
Tom Haugomat a d’ailleurs dû y passer pas mal de temps, pour la bâtir, la « mettre en place ». Je le dis d’autant mieux qu’une lecture superficielle pourrait donner l’impression contraire. En effet, c’est une suite d’illustrations muettes (une par page), qui n’occupent qu’une partie de la page, le reste encadrant d’un blanc immaculé, vide, ces images.
Le principe de l’histoire est assez simple. Nous suivons la vie d’un homme, de son enfance à la fin de sa vie – et même au-delà, de ses rêves, passions à leur réalisation, leur concrétisation. Sur la page de gauche le personnage principal qui vit sa vie, qui regarde au travers (d’où le titre) un écran, une fenêtre, une fissure, etc., ce que nous voyons sur la page de droite.
C’est brillamment exécuté, et plein de poésie (la volonté de l’auteur de n’utiliser que des couleurs pures, loin des mélanges habituels renforce le calme, le silence poétique qui accompagne la lecture de cette vie).
Mais voilà, je ne sais pas si je reviendrai vers cet album, que j’ai aussi trouvé un peu froid. A voir, c’est peut-être affaire d’humeur. En tout cas je vous encourage vraiment à y jeter un coup d’œil.
Note réelle 3,5/5.
Vue la moyenne des notes ci-alentour, nul besoin n'est de faire de l'explication de texte en ce qui concerne ce nouvel album de Fabcaro.
Après "Plus qu'hier, moins que demain", il creuse le sillon des relations de couple en se focalisant cette fois sur une histoire extra-conjugale, entre la femme d'un patron de start-up (tiens, bizarrement, elle n'a pas d'autre existence, il semblerait que Sandrine soit femme au foyer...) et un livreur de macédoine. Le ton est donné dès les premières cases, entre absurde et parodie de romans-photo des années 1970, des soap opéra ou d'autres comédies romantiques. On se marre très vite face aux dialogues surréalistes, aux discours à rallonge ou aux situations complètement décalées.
Et toujours avec des plans fixes, des personnages inexpressifs au possible, ce qui ajoute au comique de la situation.
Fabcaro, j'en veux, j'en redemande !
Fabcaro, après s'être moqué de lui-même, avoir montré son acuité à analyser et déformer les soap opera, s'attaque à un autre gros morceau : les couples.
Et comme d'habitude, c'est un bijou. Il utilise désormais le même running gag ou fil rouge dans plusieurs de ses albums, avec une situation apparemment anodine (ici un homme seul dans son lit, visiblement délaissé par sa compagne), et en fera la ponctuation de son album, constitué de saynètes, aussi absurdes que drôles. Et tout ça à base de plans fixes (mais pas photocopiés), sur lesquels mon humoriste préféré plaque ses dialogues savoureux. Je me suis esclaffé à plusieurs reprises.
Bref, c'était très sympa.
Décidément Ankama au travers de son Label 619 nous sort des petites pépites, j'en veux pour preuve cet excellentissime Monkey Bizness. N'en jetez plus la coupe est pleine: Mutafukaz, "Doggy bags", "Mapple Squares", Teddy Bear, "Beware of Rednecks", sans oublier Midnight Tales. Le point commun à toutes ces parutions c'est bien sur l'aspect iconoclaste du propos. N'en déplaise aux âmes sensibles et aux bien pensants ces lectures ne s'adressent pas à n'importe qui. Trop c'est trop ? Littérature excessive ? Peut être, mais en ces temps de consensus mou, je trouve personnellement que cela possède une fraicheur, un enthousiasme, un côté foutraque fort plaisant.
Bien souvent dans ces histoires les problèmes rencontrés par les personnages se règlent grâce à l'ultra violence et au sexe. Cela est il incitatif ? Ou faut il y voir une sorte de catharsis permettant à tout à chacun d'évacuer un stress plombant et énergivore ?
Mais foin de propos trop cérébraux, concentrons nous sur cette intégrale composée de plusieurs chapitres nous contant les aventures de deux membres de la race des primates parvenus par la folie des hommes ( finalement elle a pétée la bombinette ) au sommet de la chaine alimentaire. Cette chaine alimentaire n'est bien sur pas le même que celle du quidam moyen. Bouffe approximative, boissons curieuses aux effets non moins curieux et diverses substances que la morale réprouvent mais dont là aussi les effets sont assurés ( pas par la sécu , mais diantre, on s'en fiche ).
Si l'on y regarde de plus près le scénario contrairement à ce qu'il donne à voir rapidement n'est pas si foutraque qu'il y parait. Tout ça est bien tenu, l'utilisation de flashbacks est bienvenue. S'il fallait pinailler je dirais que c'est peut être au niveau du dessin que les choses sont certainement perfectibles, un manque de rondeur dans les traits et de la profondeur vraiment édulcorée. Les couleurs sont très sympas et je reviens au scénario pour signaler l'absence de temps mort, ça fonce à fond les ballons.
Reste les dialogues qui certes utilisent un langage peu châtié mais jubilatoire, comme je l'ai dit plus haut cet ouvrage ne s'adresse pas aux oies blanches.
Non véritablement cette œuvre tout à fait dans la lignée du Label 619 ne dépare en rien dans une bibliothèque, même si parfois le propos est un poil radical, il n'en assène pas moins quelques vérités sur le genre humain. C'est sans grande hésitation que je conseille cet ouvrage avec la note de culte.
Bienvenue dans l’univers impitoyable du Big Data, le « pétrole du XXIe siècle » ! Grâce aux auteurs, qui sont allés interroger des spécialistes et chercheurs dans le domaine, on comprend que, bien plus que nos opinions politiques, ce sont nos actions quotidiennes les plus banales qui intéressent les géants du web, les GAFAM. De plus en plus, l’internaute est suivi à la trace, que ce soit en naviguant innocemment sur son smartphone ou par l’utilisation de ses objets connectés qui tendent à proliférer. Ces multinationales, qui prennent de plus en plus l’ascendant sur les Etats, vous connaitront bientôt mieux que vous ne vous connaissez vous-même, grâce à leurs algorithmes puissants qui leur permettent d’accumuler quantité de données, un phénomène dont on commence à peine à percevoir les enjeux et les risques. Un jour peut-être, vous pourriez être privé d’assurance ou on vous refusera un crédit immobilier parce qu'on jugera votre santé défaillante ou votre comportement à risque…
Le dessinateur Josh Neufeld, co-auteur de La Machine à influencer donne à cette enquête dense et touffue un tour ludique par son style très proche de Scott McCloud. Le tout est passionnant et terrifiant à la fois. Une des solutions pour protéger sa vie privée selon un des experts interrogés : désactiver la géolocalisation sur son téléphone, ne pas être sur Facebook ! Que l’on soit disposé à le faire ou non, cette petite BD donne à réfléchir et fournit quelques pistes pour naviguer sur Internet avec plus de circonspection.
Et hop, une nouvelle série de Yuki Yoshihara !
Fidèle à elle-même, elle nous sert une histoire religieusement disjonctée, sur fond de romance plus ou moins improbable.
Une fois de plus, nous avons droit au même couple : la blonde assez à la masse (un peu moins que d'habitude) et le grand brun impassible, mais ce dernier possède un caractère plus machiavélique que d'habitude.
Le dessin est toujours élégant, mais les décors sont de plus en plus vides, c'est dommage.
Les bonus, un peu moins nombreux, décrivent caricaturalement la vie de la mangaka. Triste vie, de quoi en faire le sujet d'une future série si elle est en panne d'inspiration !
Ceci dit, j'ai pris grand plaisir à lire ces 3 tomes que j'ai achetés et que j'ai religieusement mis en bonne place dans ma bibliothèque, à côté de tous les autres tomes de cette dessinatrice.
Contrairement à ce qui est dit dans le précédent avis, Asylum ne parle pas des terres d’asile. Il ne montre pas les pays occidentaux comme des havres de paix (à moins de considérer qu'un camp de concentration sur une plage française ou un centre fermé en Espagne sont des lieux de villégiature des plus accueillants... ou de croire que le Venezuela et le Mexique sont des pays occidentaux). C’est plutôt un manifeste, un plaidoyer pour l’accueil des exilés… et une dénonciation à l’encontre des nations européennes sur la manière dont elles acceptent cette immigration (ici, ce sont principalement la France et l’Espagne qui en prennent pour leur grade).
Au travers des souvenirs d’une Basque espagnole, victime du fascisme, rejetée comme des dizaines de milliers d’autres par une France qui ne voulait pas se fâcher avec le petit moustachu, et de l’évocation du parcours de plusieurs autres exilés (d’Afrique ou d’Amérique centrale, pour des raisons diverses et variées), l’auteur dresse un portrait empli d’humanité de cette problématique. Il va chercher l’humain derrière ce que nous considérons trop souvent comme une source d’ennui. Il nous rappelle que ces femmes et ces hommes n’ont pas fui leur pays par goût de l’aventure, mais bien par obligation. Il nous montre à quel point ces personnes sont résignées, détruites, réduites à ne plus être que des ombres de l’homme, de la femme ou de l’enfant qu’elles étaient. Il insiste sur l’importance d’une main tendue. Il nous montre combien ces victimes n’en ont rien à foutre du nom de la terre qui les accueille, tant qu’elles peuvent y vivre en paix, dans un sentiment de sécurité (et combien elles seront reconnaissantes envers le pays qui pourra leur offrir un tel asile, quel que soit son nom, la couleur de son drapeau ou la devise de sa nation).
Il s’agit donc d’une œuvre engagée qui joue principalement sur l’émotion, à l’opposé d’une analyse macro-économique. Elle est réalisée avec sincérité et intelligence. Le début du récit m’est apparu un brin artificiel mais une fois rentré dedans, je n’ai plus quitté ma lecture. Le dessin est agréable et la colorisation lui donne un aspect « artisanal » qui cadre bien avec l’esprit « témoignage » de ce récit.
C’est une œuvre sincère, très accessible, bien écrite et bien traduite, avec un dessin agréable et une colorisation adéquate. Dans le genre, oui, c’est franchement bien.
Un album dont le sujet est la quête du scénariste pour retrouver et pouvoir regarder les films d'Édouard Luntz, un cinéaste qui a eu un certain succès critique dans les années 60-70 avant de tomber dans l'oubli.
Julien Frey l'a rencontré lorsqu'il était étudiant en cinéma et avait envoyé son scénario de film à plusieurs producteurs. Comme Luntz ne semblait pas avoir un sou, il ne l'a pas pris au sérieux et il n'a pas continué de collaboration avec lui. Puis, quelques années plus tard, il apprend par la bouche d'un professeur que ce que lui a dit Luntz était vrai. Et, une dizaine plus tard, il tombe sur le vinyle de la musique d'un film de Luntz et il décide de sérieusement rechercher les films de Luntz.
Je préviens tout de suite que ce livre ne raconte pas la biographie de Luntz. On a droit à des anecdotes, notamment autour du film Le Grabuge pour la Fox où le réalisateur a eu un gros conflit avec le producteur qui avait remonté le film à sa manière et coupé plusieurs scènes et Frey rencontre des connaissances du réalisateur (notamment l'acteur Michel Bouquet qui signe la préface de l'album), mais la vie de Luntz reste un sujet peu approfondi dans l'album et ainsi je n'ai qu'une vague idée de la raison pour laquelle la carrière de Luntz a complètement arrêté au milieu des années 1970 (apparemment il avait, entre autres, des problèmes de drogues) et je n'ai aucune idée de ce qu'il a bien pu faire durant les dernières décennies de sa vie. Il y a d'ailleurs une scène avec le fils de Luntz qui dit qu'il voudrait lui-même faire un livre sur son père et j'espère qu'il va le faire un jour !
Le sujet principal est la quête du scénariste pour retrouver les films de Luntz et l'impact qu'ils ont sur lui car il va trouver l'oeuvre de Luntz très touchante. On parle aussi de sujets divers liés aux films comme leur préservation et les problèmes de droits. Frey raconte très bien et j'ai trouvé son parcours passionnant. Je ne savais pas qu'un jour j'aurais pris plaisir à voir un type se promener d'une institution cinématique à une autre pour pouvoir des films que tout le monde semble avoir oublié ! Je pense que si j'ai aimé ce one-shot, c'est en partie parce que même si je ne suis pas un grand cinéphile, je comprends que Frey ait mis tant d'effort pour retrouver des oeuvres qu'il tenait à voir absolument. Personnellement, si j'avais le temps et l'argent, je me verrais bien me promener aux quatre coins de la planète pour retrouver des bds oubliées que j'aimerais lire. J'aime bien le trait de Nadar aussi.
Un bon livre qui nous fait découvrir l'oeuvre d'un réalisateur injustement méconnu.
Tiens, je ne suis pas le seul à avoir préféré la première partie de ce récit : un conte noir, enfantin, et cruel (surtout sur la fin). Cette première partie aurait fait un chouette one-shot.
La deuxième partie est loin d’être mauvaise, et se déroule plusieurs années après les évènements du premier chapitre. A ce titre, il s’agit vraiment d’une suite, presque d’un tome 2. L’histoire reste belle, mais plus classique, voire un peu convenue. Les personnages sont un peu « clichés », même si je dois avouer que la toute fin a réussi à me toucher.
Cet album fut avant tout pour moi un coup de cœur graphique. La couverture m’a interpellé et un feuilletage rapide m’a convaincu d’investir, sans en savoir plus sur l’histoire. Et de ce côté-là je ne suis pas déçu : j’adore le style, le noir et blanc avec des touches de couleur, et les personnages, que je trouve très beaux.
Un chouette album, un peu plus classique sur la deuxième partie. A conseiller aux amateurs de contes un peu noirs.
PS : ceci est mon 1000ème avis :)
En France, les livres sont au même prix partout. C'est la loi !
Avec BDfugue, vous payez donc le même prix qu'avec les géants de la vente en ligne mais pour un meilleur service :
des promotions et des goodies en permanence
des réceptions en super état grâce à des cartons super robustes
une équipe joignable en cas de besoin
2. C'est plus avantageux pour nous
Si BDthèque est gratuit, il a un coût.
Pour financer le service et le faire évoluer, nous dépendons notamment des achats que vous effectuez depuis le site. En effet, à chaque fois que vous commencez vos achats depuis BDthèque, nous touchons une commission. Or, BDfugue est plus généreux que les géants de la vente en ligne !
3. C'est plus avantageux pour votre communauté
En choisissant BDfugue plutôt que de grandes plateformes de vente en ligne, vous faites la promotion du commerce local, spécialisé, éthique et indépendant.
Meilleur pour les emplois, meilleur pour les impôts, la librairie indépendante promeut l'émergence des nouvelles séries et donc nos futurs coups de cœur.
Chaque commande effectuée génère aussi un don à l'association Enfance & Partage qui défend et protège les enfants maltraités. Plus d'informations sur bdfugue.com
Pourquoi Cultura ?
Indépendante depuis sa création en 1998, Cultura se donne pour mission de faire vivre et aimer la culture.
La création de Cultura repose sur une vision de la culture, accessible et contributive. Nous avons ainsi considéré depuis toujours notre responsabilité sociétale, et par conviction, développé les pratiques durables et sociales. C’est maintenant au sein de notre stratégie de création de valeur et en accord avec les Objectifs de Développement Durable que nous déployons nos actions. Nous traitons avec lucidité l’impact de nos activités, avec une vision de long terme. Mais agir en responsabilité implique d’aller bien plus loin, en contribuant positivement à trois grands enjeux de développement durable.
Nos enjeux environnementaux
Nous sommes résolument engagés dans la réduction de notre empreinte carbone, pour prendre notre part dans la lutte contre le réchauffement climatique et la préservation de la planète.
Nos enjeux culturels et sociétaux
La mission de Cultura est de faire vivre et aimer la culture. Pour cela, nous souhaitons stimuler la diversité des pratiques culturelles, sources d’éveil et d’émancipation.
Nos enjeux sociaux
Nous accordons une attention particulière au bien-être de nos collaborateurs à la diversité, l’inclusion et l’égalité des chances, mais aussi à leur épanouissement, en encourageant l’expression des talents artistiques.
Votre vote
Jheronimus & Bosch
Les éditions Tanibis, comme d’autres petites structures (2024 par exemple) font un travail extraordinaire, prennent des risques – dans tous les sens du terme – pour défendre des œuvres originales, qui peuvent sortir des sentiers battus par les « grandes » maisons d’édition. Et, comme souvent – comme toujours ? – Tanibis le fait très bien, avec un travail éditorial remarquable : couverture cartonnée avec dos en simili cuir, papier lui aussi épais, belle mise en page, on ne peut que saluer ce travail. Tanibis m’avait fait découvrir cet auteur avec Le Bus (ou alors est-ce cet album qui m’avait fait découvrir cette maison d’édition ?), et ils ont récemment publié un superbe album anthologique du travail ancien de Kirchner, période underground et psychédélique (En attendant l'apocalypse). Ils poursuivent avec un inédit, très différent dans le fond et la forme de ce que je connais de Kirchner, même si certains aspects peuvent se retrouver dans Le Bus. Lorsque j’ai commencé à avoir des infos sur cette publication, je me suis immédiatement dit que j’allais l’acheter. En effet, un album de Paul Kirchner, sur Jérôme Bosch (artiste génial) ! En fait, seul Kirchner est au rendez-vous, puisqu’il n’est pas question ici de l’artiste flamand – encore que le personnage principal pourrait chronologiquement en être une version, même s’il meurt 8 ans avant le peintre… Et l’imagerie de Bosch, sa vision encore médiévale de l’enfer n’est finalement pas si éloignée de celle rendue par Kirchner, qui la traite par contre sur un mode humoristique et désabusé. Un court « prologue » - dans lequel est prononcée la seule parole de l’album (« Bosch ! ») nous présente le héros, Jheronimus donc, malandrin haineux, voleur, emmerdeur, qui meurt en 1508, après avoir chapardé à un gamin son jouet, un canard sur roulettes que l’on tire (et qui donc avait été nommé Bosch par son jeune propriétaire). Le reste de l’album – très épais (près d’une centaine de pages) – est constitué d’une série d’histoires courtes/gags d’une page à chaque fois, se déroulant en enfer. Jheronimus, qui se balade sans arrêt en tirant Bosch, son canard à roulettes, se voit torturé, emmerdé, pourrir la vie par le diable et ses créatures infernales (Dieu et les anges faisant quelques très rares apparitions). Le ton est à l’humour noir, absurde (c’est là que l’on peut trouver des accointances avec Le Bus, mais c’est quand même très différent et moins répétitif et froid), voire parfois débile. L’ensemble est inégal, mais j’ai bien aimé – même si, affaire de goût, j’aurais apprécié plus de folie, de noirceur et de trash. Mais cela reste quand même un chouette album (note réelle 3,5/5, que j’arrondis à 4 eu égard à la qualité du travail de l’éditeur).
A travers
Je voudrais tout d’abord saluer le beau travail éditorial, avec un papier épais (et une couverture « à trou », illustrant bien le fonctionnement de l’histoire développée à l’intérieur), qui met très bien en valeur le travail de l’auteur. Tom Haugomat a d’ailleurs dû y passer pas mal de temps, pour la bâtir, la « mettre en place ». Je le dis d’autant mieux qu’une lecture superficielle pourrait donner l’impression contraire. En effet, c’est une suite d’illustrations muettes (une par page), qui n’occupent qu’une partie de la page, le reste encadrant d’un blanc immaculé, vide, ces images. Le principe de l’histoire est assez simple. Nous suivons la vie d’un homme, de son enfance à la fin de sa vie – et même au-delà, de ses rêves, passions à leur réalisation, leur concrétisation. Sur la page de gauche le personnage principal qui vit sa vie, qui regarde au travers (d’où le titre) un écran, une fenêtre, une fissure, etc., ce que nous voyons sur la page de droite. C’est brillamment exécuté, et plein de poésie (la volonté de l’auteur de n’utiliser que des couleurs pures, loin des mélanges habituels renforce le calme, le silence poétique qui accompagne la lecture de cette vie). Mais voilà, je ne sais pas si je reviendrai vers cet album, que j’ai aussi trouvé un peu froid. A voir, c’est peut-être affaire d’humeur. En tout cas je vous encourage vraiment à y jeter un coup d’œil. Note réelle 3,5/5.
Et si l'amour c'était aimer ?
Vue la moyenne des notes ci-alentour, nul besoin n'est de faire de l'explication de texte en ce qui concerne ce nouvel album de Fabcaro. Après "Plus qu'hier, moins que demain", il creuse le sillon des relations de couple en se focalisant cette fois sur une histoire extra-conjugale, entre la femme d'un patron de start-up (tiens, bizarrement, elle n'a pas d'autre existence, il semblerait que Sandrine soit femme au foyer...) et un livreur de macédoine. Le ton est donné dès les premières cases, entre absurde et parodie de romans-photo des années 1970, des soap opéra ou d'autres comédies romantiques. On se marre très vite face aux dialogues surréalistes, aux discours à rallonge ou aux situations complètement décalées. Et toujours avec des plans fixes, des personnages inexpressifs au possible, ce qui ajoute au comique de la situation. Fabcaro, j'en veux, j'en redemande !
Moins qu'hier (plus que demain)
Fabcaro, après s'être moqué de lui-même, avoir montré son acuité à analyser et déformer les soap opera, s'attaque à un autre gros morceau : les couples. Et comme d'habitude, c'est un bijou. Il utilise désormais le même running gag ou fil rouge dans plusieurs de ses albums, avec une situation apparemment anodine (ici un homme seul dans son lit, visiblement délaissé par sa compagne), et en fera la ponctuation de son album, constitué de saynètes, aussi absurdes que drôles. Et tout ça à base de plans fixes (mais pas photocopiés), sur lesquels mon humoriste préféré plaque ses dialogues savoureux. Je me suis esclaffé à plusieurs reprises. Bref, c'était très sympa.
Monkey Bizness
Décidément Ankama au travers de son Label 619 nous sort des petites pépites, j'en veux pour preuve cet excellentissime Monkey Bizness. N'en jetez plus la coupe est pleine: Mutafukaz, "Doggy bags", "Mapple Squares", Teddy Bear, "Beware of Rednecks", sans oublier Midnight Tales. Le point commun à toutes ces parutions c'est bien sur l'aspect iconoclaste du propos. N'en déplaise aux âmes sensibles et aux bien pensants ces lectures ne s'adressent pas à n'importe qui. Trop c'est trop ? Littérature excessive ? Peut être, mais en ces temps de consensus mou, je trouve personnellement que cela possède une fraicheur, un enthousiasme, un côté foutraque fort plaisant. Bien souvent dans ces histoires les problèmes rencontrés par les personnages se règlent grâce à l'ultra violence et au sexe. Cela est il incitatif ? Ou faut il y voir une sorte de catharsis permettant à tout à chacun d'évacuer un stress plombant et énergivore ? Mais foin de propos trop cérébraux, concentrons nous sur cette intégrale composée de plusieurs chapitres nous contant les aventures de deux membres de la race des primates parvenus par la folie des hommes ( finalement elle a pétée la bombinette ) au sommet de la chaine alimentaire. Cette chaine alimentaire n'est bien sur pas le même que celle du quidam moyen. Bouffe approximative, boissons curieuses aux effets non moins curieux et diverses substances que la morale réprouvent mais dont là aussi les effets sont assurés ( pas par la sécu , mais diantre, on s'en fiche ). Si l'on y regarde de plus près le scénario contrairement à ce qu'il donne à voir rapidement n'est pas si foutraque qu'il y parait. Tout ça est bien tenu, l'utilisation de flashbacks est bienvenue. S'il fallait pinailler je dirais que c'est peut être au niveau du dessin que les choses sont certainement perfectibles, un manque de rondeur dans les traits et de la profondeur vraiment édulcorée. Les couleurs sont très sympas et je reviens au scénario pour signaler l'absence de temps mort, ça fonce à fond les ballons. Reste les dialogues qui certes utilisent un langage peu châtié mais jubilatoire, comme je l'ai dit plus haut cet ouvrage ne s'adresse pas aux oies blanches. Non véritablement cette œuvre tout à fait dans la lignée du Label 619 ne dépare en rien dans une bibliothèque, même si parfois le propos est un poil radical, il n'en assène pas moins quelques vérités sur le genre humain. C'est sans grande hésitation que je conseille cet ouvrage avec la note de culte.
Dans l'ombre de la peur - Le Big Data et nous
Bienvenue dans l’univers impitoyable du Big Data, le « pétrole du XXIe siècle » ! Grâce aux auteurs, qui sont allés interroger des spécialistes et chercheurs dans le domaine, on comprend que, bien plus que nos opinions politiques, ce sont nos actions quotidiennes les plus banales qui intéressent les géants du web, les GAFAM. De plus en plus, l’internaute est suivi à la trace, que ce soit en naviguant innocemment sur son smartphone ou par l’utilisation de ses objets connectés qui tendent à proliférer. Ces multinationales, qui prennent de plus en plus l’ascendant sur les Etats, vous connaitront bientôt mieux que vous ne vous connaissez vous-même, grâce à leurs algorithmes puissants qui leur permettent d’accumuler quantité de données, un phénomène dont on commence à peine à percevoir les enjeux et les risques. Un jour peut-être, vous pourriez être privé d’assurance ou on vous refusera un crédit immobilier parce qu'on jugera votre santé défaillante ou votre comportement à risque… Le dessinateur Josh Neufeld, co-auteur de La Machine à influencer donne à cette enquête dense et touffue un tour ludique par son style très proche de Scott McCloud. Le tout est passionnant et terrifiant à la fois. Une des solutions pour protéger sa vie privée selon un des experts interrogés : désactiver la géolocalisation sur son téléphone, ne pas être sur Facebook ! Que l’on soit disposé à le faire ou non, cette petite BD donne à réfléchir et fournit quelques pistes pour naviguer sur Internet avec plus de circonspection.
Le Diable s'habille en soutane
Et hop, une nouvelle série de Yuki Yoshihara ! Fidèle à elle-même, elle nous sert une histoire religieusement disjonctée, sur fond de romance plus ou moins improbable. Une fois de plus, nous avons droit au même couple : la blonde assez à la masse (un peu moins que d'habitude) et le grand brun impassible, mais ce dernier possède un caractère plus machiavélique que d'habitude. Le dessin est toujours élégant, mais les décors sont de plus en plus vides, c'est dommage. Les bonus, un peu moins nombreux, décrivent caricaturalement la vie de la mangaka. Triste vie, de quoi en faire le sujet d'une future série si elle est en panne d'inspiration ! Ceci dit, j'ai pris grand plaisir à lire ces 3 tomes que j'ai achetés et que j'ai religieusement mis en bonne place dans ma bibliothèque, à côté de tous les autres tomes de cette dessinatrice.
Asylum
Contrairement à ce qui est dit dans le précédent avis, Asylum ne parle pas des terres d’asile. Il ne montre pas les pays occidentaux comme des havres de paix (à moins de considérer qu'un camp de concentration sur une plage française ou un centre fermé en Espagne sont des lieux de villégiature des plus accueillants... ou de croire que le Venezuela et le Mexique sont des pays occidentaux). C’est plutôt un manifeste, un plaidoyer pour l’accueil des exilés… et une dénonciation à l’encontre des nations européennes sur la manière dont elles acceptent cette immigration (ici, ce sont principalement la France et l’Espagne qui en prennent pour leur grade). Au travers des souvenirs d’une Basque espagnole, victime du fascisme, rejetée comme des dizaines de milliers d’autres par une France qui ne voulait pas se fâcher avec le petit moustachu, et de l’évocation du parcours de plusieurs autres exilés (d’Afrique ou d’Amérique centrale, pour des raisons diverses et variées), l’auteur dresse un portrait empli d’humanité de cette problématique. Il va chercher l’humain derrière ce que nous considérons trop souvent comme une source d’ennui. Il nous rappelle que ces femmes et ces hommes n’ont pas fui leur pays par goût de l’aventure, mais bien par obligation. Il nous montre à quel point ces personnes sont résignées, détruites, réduites à ne plus être que des ombres de l’homme, de la femme ou de l’enfant qu’elles étaient. Il insiste sur l’importance d’une main tendue. Il nous montre combien ces victimes n’en ont rien à foutre du nom de la terre qui les accueille, tant qu’elles peuvent y vivre en paix, dans un sentiment de sécurité (et combien elles seront reconnaissantes envers le pays qui pourra leur offrir un tel asile, quel que soit son nom, la couleur de son drapeau ou la devise de sa nation). Il s’agit donc d’une œuvre engagée qui joue principalement sur l’émotion, à l’opposé d’une analyse macro-économique. Elle est réalisée avec sincérité et intelligence. Le début du récit m’est apparu un brin artificiel mais une fois rentré dedans, je n’ai plus quitté ma lecture. Le dessin est agréable et la colorisation lui donne un aspect « artisanal » qui cadre bien avec l’esprit « témoignage » de ce récit. C’est une œuvre sincère, très accessible, bien écrite et bien traduite, avec un dessin agréable et une colorisation adéquate. Dans le genre, oui, c’est franchement bien.
Avec Édouard Luntz - Le Cinéaste des âmes inquiètes
Un album dont le sujet est la quête du scénariste pour retrouver et pouvoir regarder les films d'Édouard Luntz, un cinéaste qui a eu un certain succès critique dans les années 60-70 avant de tomber dans l'oubli. Julien Frey l'a rencontré lorsqu'il était étudiant en cinéma et avait envoyé son scénario de film à plusieurs producteurs. Comme Luntz ne semblait pas avoir un sou, il ne l'a pas pris au sérieux et il n'a pas continué de collaboration avec lui. Puis, quelques années plus tard, il apprend par la bouche d'un professeur que ce que lui a dit Luntz était vrai. Et, une dizaine plus tard, il tombe sur le vinyle de la musique d'un film de Luntz et il décide de sérieusement rechercher les films de Luntz. Je préviens tout de suite que ce livre ne raconte pas la biographie de Luntz. On a droit à des anecdotes, notamment autour du film Le Grabuge pour la Fox où le réalisateur a eu un gros conflit avec le producteur qui avait remonté le film à sa manière et coupé plusieurs scènes et Frey rencontre des connaissances du réalisateur (notamment l'acteur Michel Bouquet qui signe la préface de l'album), mais la vie de Luntz reste un sujet peu approfondi dans l'album et ainsi je n'ai qu'une vague idée de la raison pour laquelle la carrière de Luntz a complètement arrêté au milieu des années 1970 (apparemment il avait, entre autres, des problèmes de drogues) et je n'ai aucune idée de ce qu'il a bien pu faire durant les dernières décennies de sa vie. Il y a d'ailleurs une scène avec le fils de Luntz qui dit qu'il voudrait lui-même faire un livre sur son père et j'espère qu'il va le faire un jour ! Le sujet principal est la quête du scénariste pour retrouver les films de Luntz et l'impact qu'ils ont sur lui car il va trouver l'oeuvre de Luntz très touchante. On parle aussi de sujets divers liés aux films comme leur préservation et les problèmes de droits. Frey raconte très bien et j'ai trouvé son parcours passionnant. Je ne savais pas qu'un jour j'aurais pris plaisir à voir un type se promener d'une institution cinématique à une autre pour pouvoir des films que tout le monde semble avoir oublié ! Je pense que si j'ai aimé ce one-shot, c'est en partie parce que même si je ne suis pas un grand cinéphile, je comprends que Frey ait mis tant d'effort pour retrouver des oeuvres qu'il tenait à voir absolument. Personnellement, si j'avais le temps et l'argent, je me verrais bien me promener aux quatre coins de la planète pour retrouver des bds oubliées que j'aimerais lire. J'aime bien le trait de Nadar aussi. Un bon livre qui nous fait découvrir l'oeuvre d'un réalisateur injustement méconnu.
Le Signe de la Lune
Tiens, je ne suis pas le seul à avoir préféré la première partie de ce récit : un conte noir, enfantin, et cruel (surtout sur la fin). Cette première partie aurait fait un chouette one-shot. La deuxième partie est loin d’être mauvaise, et se déroule plusieurs années après les évènements du premier chapitre. A ce titre, il s’agit vraiment d’une suite, presque d’un tome 2. L’histoire reste belle, mais plus classique, voire un peu convenue. Les personnages sont un peu « clichés », même si je dois avouer que la toute fin a réussi à me toucher. Cet album fut avant tout pour moi un coup de cœur graphique. La couverture m’a interpellé et un feuilletage rapide m’a convaincu d’investir, sans en savoir plus sur l’histoire. Et de ce côté-là je ne suis pas déçu : j’adore le style, le noir et blanc avec des touches de couleur, et les personnages, que je trouve très beaux. Un chouette album, un peu plus classique sur la deuxième partie. A conseiller aux amateurs de contes un peu noirs. PS : ceci est mon 1000ème avis :)