Imaginez une petite fille morte, son corps d'écolière oublié et gisant au coeur d'une forêt. Imaginez alors que tous les petits personnages qui peuplaient son esprit et son imaginaire s'en échappent, fées, ballerines, poupées et autres princesses. Tout ce petit monde, insouciant et désemparé, va alors tenter de vivre autour, voire à l'intérieur, du cadavre bientôt en décomposition. Un petit peuple de conte de fées côtoyant la mort et la pourriture, voilà qui entame le récit sur une note bien morbide et étonnante.
Mais ce n'est là que le début d'une fable largement plus cruelle.
Sa Majesté des mouches est enfoncé. Jolies ténèbres fait exploser la douceur et l'insouciance des rêves d'enfant, de petites filles, pour afficher la dureté de la réalité et plus encore la cruauté des personnages enfantins.
Car bien rapidement, la vie de cette communauté de petits personnages va se transformer en véritable jeu de massacre. La naïveté va être la première cause des disparitions, dans cet univers naturel où les dangers et les prédateurs rôdent un peu partout. Mais ce seront surtout les comportements de chacun d'entre eux qui vont entrainer les pires atrocités. Egoïsme, inconscience, orgueil, méchanceté, fainéantise, régression, peur, manque d'assurance...
Sous des aspects enfantins, ce récit est incroyablement dur. Les morts sont plus cruelles et horribles les unes que les autres, d'autant plus marquantes qu'elle se masquent sous des allures d'amusement d'enfants, de recherche de nourriture ou de découvertes insouciantes et souriantes de la nature environnante. Certains petits personnages, aux traits de princesses ou de gentils garçons, se révèlent de véritables monstres. C'en est parfois à vous retourner le coeur. Le pire étant l'indifférence souriante de ceux qui voient mourir leurs comparses dans d'atroces situations sans réagir.
Le graphisme joue précisément la carte du contraste entre un style simplifié, assez enfantin, servi par de très jolies couleurs, comparé à l'horreur de ce qu'il raconte. Je regrette cependant le manque de détail du trait des Kerascoët sur la majorité des pages. Seuls les décors et certains animaux sont joliment ouvragés et peints. Les Kerascoët prouvent pourtant dans une double page de cet album qu'ils sont capables d'un style nettement plus soigné et réaliste.
La narration est parfaitement orchestrée. Elle se déroule avec une fausse insouciance enfantine. Le récit est dense et l'album très conséquent. Les auteurs ont su savamment doser la progression dans l'horreur, par touches de plus en plus saisissantes pour les lecteurs. Cela frise l'accumulation sans jamais l'atteindre pour de bon. Et tandis que les émotions se font de plus en plus noires, la fin vient donner le coup de grâce vengeur attendu depuis de nombreuses pages.
Voilà une oeuvre vraiment très forte. Elle est puissante par son contraste entre horreur et imaginaire enfantin. Elle est belle et très dérangeante à la fois. Une lecture marquante, suffisamment saisissante pour pouvoir créer soit un rejet soit un envoûtement total. Un vrai coup au ventre en ce qui me concerne, et un album possiblement culte.
Vive recommandation de ma part mais sachez que vous risquez de ne pas en sortir indemne.
Welcome to Hope, bienvenue à Ploucland...
Ce petit village perdu au fin fond du Kansas à des dizaines de miles de la première ville à tout pour plaire. Des bons paysans du cru, des champs de maïs à perte de vue, de vrais péquenauds à tous les coins de rues, des notables (banquier, shérif...,) tous aussi véreux les uns que les autres, des jeunes filles (serveuses en général) qui rêvent de quitter ce trou perdu, et enfin, évidement, son étranger de passage dans le coin.
La lente immersion dans ce décor est réussie à tous les points, les personnages font évidemment clichés mais on ne tombe pas dans le caricatural, ils sont juste "comme il faut". Le cadre est terrible, on s'y croirait. L'histoire qui si au départ à un petit air de déjà-vu (l'étranger qui se retrouve bloqué dans ce bled paumé) prend une tournure plutôt inattendue à la fin du tome 1. Excellent, ça fait même un peu froid dans le dos. La suite n'est pas si originale mais vraiment prenante et savamment dosée. L'histoire est à la fois rythmée et bien équilibrée entre les 3 tomes. On à l'impression que nos héros n'arriveront jamais à quitter ce putain de village.
J'ai également beaucoup apprécié le final et le dessin. Réaliste, détaillé, précis, et aux couleurs bien agréables.
Bref, que du bon, j'ai enchaîné les 3 tomes. Un grand moment de lecture, qui pourrait prétendre à une étoile de plus lors d'une relecture. J'aime ce type d'histoire et on n'est pas loin d'avoir un des must du genre.
Dans un pays d'Amérique Latine, la dictature règne. L'insécurité est partout, les blancs ont creusé des carrières en utilisant les indiens, les menant souvent jusqu'à la mort..., et un trésor a été découvert. A présent, tout le monde le convoite, pour acheter des armes et régner en maître. Une troupe hétéroclite de personnages se retrouvent dans un bus, avec lequel ils devront fuir les forces armées s'ils ne veulent pas finir en cadavres. A vous de découvrir s'ils s'en sortiront ou pas. Parmi tous ces voyageurs, trois mémés apportent une exceptionnelle dose d'humour à cette aventure.
L'histoire est simple mais attachante, et l'on prend beaucoup de plaisir à la lire, d'autant que les couleurs directes sont assez jolies, et surtout les visages des personnages excellents. Il y a juste un démarrage un peu lent et une scène un peu longuette sur le deuxième tome, hormis cela tout se déroule dans une bonne humeur communicatrice - même si le scénario recèle une bonne partie de drame. La narration est juste, belle et drôle, lisez l'histoire de la série, vous y prendrez la température narrative.
Une très agréable surprise.
J'ai mis fantastique comme genre, mais le vrai genre serait un mélange d'horreur et de thriller que ne renierait pas l'auteur de Monster ! J'ai tout de suite accroché à l'histoire, alors que j'avais emprunté ces deux tomes sans trop savoir à quoi m'attendre.
L'enquête que mène Koh-hyuk m'a tenu en haleine du début à la fin. De plus, l'histoire s'enrichit progressivement car on a droit au point de vue d'autres personnes. Il y a aussi des retours en arrière, car chaque fois qu'on a le point de vue d'un autre personnage, cela commence quand il est indirectement impliqué dans l'affaire.
En revanche, les dernières pages m'ont paru un peu nulles. Je ne sais pas trop pourquoi, mais je les ai trouvées sans intérêt. Heureusement que ce n'est pas le cas du dénouement !
Je commence à me faire aux couleurs informatisées un peu artificielles et froides, il le faut bien si je ne veux pas passer à côté de bon scénarios comme celui-ci. Car si le dessin m'a plu les couleurs elles sont glaciales ! Le titre est moyen, pour ne pas dire… mauvais, il m'a fait penser à une bd pour adolescents à la découverte de leur corps. Voilà tout ce qui fâche est dit…, passons maintenant à l'excellence.
Oui, le scénario est excellent. Le premier tome m'a fait penser à du Morvan pour son originalité et le deuxième à Téhy pour l'action bien menée, d'autant plus que la couverture de ce dernier tome ressemble à l'une de la série Yiu. Deux maîtres de la bd ! "Ceci est mon corps" est du même niveau.
Le postulat de départ est peut-être un peu tiré par les cheveux, certes, mais tout à fait crédible. D'ailleurs c'est un bd d'anticipation, on ne peut qu'y adhérer. La façon subtile dont Damien Marie nous fait entrer dans cet univers donne à cette bd tout son réalisme. Le monde dans lequel évoluent les personnages est bien développé, tout se tient, tout reste logique et les événements s'enchaînent naturellement.
La narration est souvent caustique, parfois méchante. Les personnages sont égoïstes et égocentriques, mais beaucoup de gens ne le sont-ils pas ? Souvent cachés sous une chape de fausse modestie. J'aime ce ton réaliste et direct donné à la psychologie des personnages, qui prend ici toute sa valeur dans ce monde où les privilégiés se foutent royalement de ceux qui n'ont rien. Le tout nous est servi sans leçon de morale, superbement jouissif.
Le deuxième tome est nettement plus axé sur l'action, et nous entraîne dans une course poursuite pour la survie extrêmement palpitante. La fin de ce premier cycle m'a laissé totalement affamée, les doigts crispés sur la bd, et je vous passerai tous les vilains mots que j'ai prononcés, frustrée de ne pas avoir la suite immédiatement !
Quelle claque !!!
Je n'ai pas souvenir d'avoir lu une BD aussi bouleversante.
Je connaissais très mal cette page noire de l'histoire.
Il n'y a pas de mots pour décrire ces horreurs.
Ce one shot arrive pourtant à retranscrire ce qu'il s'est passé par le biais de quelques personnages.
Le lecteur n'est pas épargné par les images, la vérité devant être dite, certains passages sont difficiles.
Le dessin est agréable avec ses nuances de gris très douces. Mais la forme n'est pas la priorité contrairement au contenu.
Le seul reproche que j'ai trouvé à cette BD est le manque de fluidité à certains moments, on passe d'un personnage à un autre sans crier gare, cela m'a parfois dérouté.
Sinon c'est parfait, le prix compris : 9,50 euros.
Pour ceux qui ne cherchent que le divertissement dans une BD, il est préférable de passer son chemin, pour les autres l'achat est indispensable.
Ma BD préférée, tout simplement. Alan Moore est mon idole :) Je viens de relire « Watchmen » à l’occasion de la sortie du film, et j’ai pris encore plus de plaisir que lors de ma 1ere lecture.
J’avais oublié le degré de perfectionnement de la psychologie des personnages, la noirceur du propos, les réflexions poussées sur la nature humaine, sur la guerre (une ambiance de guerre froide règne sur toute la BD, époque de parution oblige). Les passages de la psychanalyse de Rorschach sont parmi les tout meilleurs qu’il m’ait été donné de lire en BD. J’adore aussi les discours un peu métaphysiques du docteur Manhattan débâtant de l’importance même de la vie, de notre survie en tant qu’espèce humaine.
Alors oui, les couleurs ont affreusement vieilli, et une recolorisation (voire même une réédition en noir et blanc) serait appréciable. Mais je trouve qu’il serait dommage de passer à coté de ce chef d’œuvre pour si peu. D’autant plus que derrière ces couleurs se cache un superbe dessin très détaillé, Dave Gibbons a fait du bon boulot.
Je vois aussi que beaucoup de lecteurs trouvent éprouvants les passages où le gamin assis prés du stand de presse lit un comics dont l’histoire et les textes viennent s’entremêler avec la trame principale. Oui, ça rend la lecture un peu fastidieuse, mais cela n’est jamais gratuit, car ces textes font habilement écho aux événements de l’histoire principale.
Bref, moi je suis d’avis que tout amateur de BD se doit d’avoir lu Watchmen, ne serait-ce que pour se faire une opinion sur ce qui est souvent considéré être le meilleur « comics » jamais écrit. Un conseil pour finir : lors de votre 1ere lecture, ne lisez pas les passages textuels présents entre chaque chapitre. Ils sont intéressants, mais cassent carrément le rythme, et peuvent tout à fait être lus « après coup ».
Voila, lisez Watchmen !
Je suis un peu surpris des notes attribuées à Dorohedoro car personnellement je dévore cette série.
Dorohedoro parle de Hole, ville crasseuse dont les habitants sont victimes des expérimentations du monde des mages. Caïman, homme à la tête de reptile amnésique, cherche à savoir quel mage l'a transformé et surtout pourquoi.
On suit plusieurs personnages de chaque camp dans leurs aventures qui naturellement les amènent à se croiser.
Découverte tardivement, j'accroche particulièrement à cette série, l'univers punk futuriste post apocalyptique développé par l'auteur me plaît au plus haut point.
Je trouve le pitch, le background et le scénario excellents au contraire de mes collègues ci-dessous.
Il y a une intrigue claire et originale, des enjeux bien décris, et un univers particulièrement attachant. Le manga alterne l'hyper violent tendance gore et le plus léger, sans jamais aller dans le gros comique niais de certains mangas. Il décrit à merveille un univers sombre, ou deux camps s'opposent sans que l'on ne puisse déterminer qui sont les bons des méchants. On s'attache aux deux camps dans leurs mésaventures.
Le dessin est particulier mais à mon goût excellent, les scans de la rubrique galerie ne lui rendent aucunement hommage.
Les éditions sont magnifiques, pages en couleurs, couvertures hyper chiadées.
Bref, amateurs de manga seinen, jetez-y sérieusement un coup d'oeil.
Petit détail notable, l'auteur de ce manga est une femme, Q Hayashida.
Ah ce trait, ces courbes, ces émotions qui transpirent de cette BD ! Sublime !
Sous un dessin d'apparence simple, Cyril Perdrosa nous offre un magnifique conte philosophique sur un thème difficile : la mort d'un enfant... Et c'est sans tomber dans des clichés sentimentalistes qu'il s'affranchit des poncifs du genre pour faire de la fuite en avant du père une fable merveilleuse.
Sans rentrer dans le détail de l'histoire, "Trois Ombres" se décompose en parties distinctes. Un première qui met en place nos protagonistes et l'apparition de ces 3 ombres mystérieuses : ou comment glisser du bonheur quotidien vers une angoisse croissante qui débouchera sur le départ précipité du père et de son fils.
Ensuite, vient la fuite et le refus de l'inéluctable, jalonné de péripéties et de rencontres plus ou moins heureuses... Entre alors en scène le fantastique, et Pedrosa revisite le thème du pacte ténébreux et de la vie éternelle. Et dans cet exercice onirique très réussit, vient enfin la résignation et l'acceptation de la disparition de l'être aimé.
Vient enfin un épilogue un peu inattendu qui voit la Mort rompre ce pacte et rendre ce père à la vie pour lui donner une seconde chance. Son heure n'est pas encore venue...
Au final j'ai trouvé cette BD admirablement bien menée et servi par un dessin qui colle parfaitement à l'histoire. Un petit bijou serti de perles d'émotions que je garde précieusement en mémoire et à portée de main pour la relire régulièrement !
Chef d’œuvre majeur de la BD. Comme le Canada dry, ce n’est pas tout à fait malgré les apparences une histoire classique de super-héros. C’est bien plus que ça, il s’agit là d’une œuvre littéraire et graphique où les couleurs crues et flashy ne servent qu’à tromper l’ennemi. Une œuvre d’une richesse incroyable, avec un scénario béton et une atmosphère unique, qui se déguste et se relit ad vitam eternam, chaque détail y a son importance, chaque personnage secondaire n’est pas si secondaire que ça, chaque plan ou arrière-plan, chaque détail nous dit quelque chose.
Dans cette histoire, les « super-héros » sont quelque peu sur le retour (oui, ils ont du bide !) et ne sont pas comme on pourrait le croire l’incarnation du bien censé lutter contre le mal, ils ont leurs doutes et leurs faiblesses, et ne sont pas réellement des enfants de chœur. Les frontières entre « bons » et « méchants » sont brouillées, W. Bush en perdrait son parler texan s’il devait s’imposer cette lecture. Oui, il n’est pas si simple de vouloir « sauver le monde » à notre époque (il s’agit bien de notre époque !) tellement cynique et gouvernée par l’instinct de mort. Conçue avant la chute du mur de Berlin, à un moment où l’on parlait encore de guerre froide, « Les Gardiens » ont conservé toute leur actualité, car si l’équilibre de la terreur n’est plus, on se rend compte que notre monde actuel est rempli d’incertitudes, baignant dans un chaos politique, économique et écologique dont nul ne connaît l’issue (ou ne veut la connaître…).
Il faut lire les Watchmen et les hisser très haut dans sa bibliothèque. A une semaine de la sortie du film en salles, je souhaite simplement que le réalisateur Zack Snyder ne trahira pas l’esprit de ce diamant pur.
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Jolies ténèbres
Imaginez une petite fille morte, son corps d'écolière oublié et gisant au coeur d'une forêt. Imaginez alors que tous les petits personnages qui peuplaient son esprit et son imaginaire s'en échappent, fées, ballerines, poupées et autres princesses. Tout ce petit monde, insouciant et désemparé, va alors tenter de vivre autour, voire à l'intérieur, du cadavre bientôt en décomposition. Un petit peuple de conte de fées côtoyant la mort et la pourriture, voilà qui entame le récit sur une note bien morbide et étonnante. Mais ce n'est là que le début d'une fable largement plus cruelle. Sa Majesté des mouches est enfoncé. Jolies ténèbres fait exploser la douceur et l'insouciance des rêves d'enfant, de petites filles, pour afficher la dureté de la réalité et plus encore la cruauté des personnages enfantins. Car bien rapidement, la vie de cette communauté de petits personnages va se transformer en véritable jeu de massacre. La naïveté va être la première cause des disparitions, dans cet univers naturel où les dangers et les prédateurs rôdent un peu partout. Mais ce seront surtout les comportements de chacun d'entre eux qui vont entrainer les pires atrocités. Egoïsme, inconscience, orgueil, méchanceté, fainéantise, régression, peur, manque d'assurance... Sous des aspects enfantins, ce récit est incroyablement dur. Les morts sont plus cruelles et horribles les unes que les autres, d'autant plus marquantes qu'elle se masquent sous des allures d'amusement d'enfants, de recherche de nourriture ou de découvertes insouciantes et souriantes de la nature environnante. Certains petits personnages, aux traits de princesses ou de gentils garçons, se révèlent de véritables monstres. C'en est parfois à vous retourner le coeur. Le pire étant l'indifférence souriante de ceux qui voient mourir leurs comparses dans d'atroces situations sans réagir. Le graphisme joue précisément la carte du contraste entre un style simplifié, assez enfantin, servi par de très jolies couleurs, comparé à l'horreur de ce qu'il raconte. Je regrette cependant le manque de détail du trait des Kerascoët sur la majorité des pages. Seuls les décors et certains animaux sont joliment ouvragés et peints. Les Kerascoët prouvent pourtant dans une double page de cet album qu'ils sont capables d'un style nettement plus soigné et réaliste. La narration est parfaitement orchestrée. Elle se déroule avec une fausse insouciance enfantine. Le récit est dense et l'album très conséquent. Les auteurs ont su savamment doser la progression dans l'horreur, par touches de plus en plus saisissantes pour les lecteurs. Cela frise l'accumulation sans jamais l'atteindre pour de bon. Et tandis que les émotions se font de plus en plus noires, la fin vient donner le coup de grâce vengeur attendu depuis de nombreuses pages. Voilà une oeuvre vraiment très forte. Elle est puissante par son contraste entre horreur et imaginaire enfantin. Elle est belle et très dérangeante à la fois. Une lecture marquante, suffisamment saisissante pour pouvoir créer soit un rejet soit un envoûtement total. Un vrai coup au ventre en ce qui me concerne, et un album possiblement culte. Vive recommandation de ma part mais sachez que vous risquez de ne pas en sortir indemne.
Welcome to Hope
Welcome to Hope, bienvenue à Ploucland... Ce petit village perdu au fin fond du Kansas à des dizaines de miles de la première ville à tout pour plaire. Des bons paysans du cru, des champs de maïs à perte de vue, de vrais péquenauds à tous les coins de rues, des notables (banquier, shérif...,) tous aussi véreux les uns que les autres, des jeunes filles (serveuses en général) qui rêvent de quitter ce trou perdu, et enfin, évidement, son étranger de passage dans le coin. La lente immersion dans ce décor est réussie à tous les points, les personnages font évidemment clichés mais on ne tombe pas dans le caricatural, ils sont juste "comme il faut". Le cadre est terrible, on s'y croirait. L'histoire qui si au départ à un petit air de déjà-vu (l'étranger qui se retrouve bloqué dans ce bled paumé) prend une tournure plutôt inattendue à la fin du tome 1. Excellent, ça fait même un peu froid dans le dos. La suite n'est pas si originale mais vraiment prenante et savamment dosée. L'histoire est à la fois rythmée et bien équilibrée entre les 3 tomes. On à l'impression que nos héros n'arriveront jamais à quitter ce putain de village. J'ai également beaucoup apprécié le final et le dessin. Réaliste, détaillé, précis, et aux couleurs bien agréables. Bref, que du bon, j'ai enchaîné les 3 tomes. Un grand moment de lecture, qui pourrait prétendre à une étoile de plus lors d'une relecture. J'aime ce type d'histoire et on n'est pas loin d'avoir un des must du genre.
Terre à Chaos
Dans un pays d'Amérique Latine, la dictature règne. L'insécurité est partout, les blancs ont creusé des carrières en utilisant les indiens, les menant souvent jusqu'à la mort..., et un trésor a été découvert. A présent, tout le monde le convoite, pour acheter des armes et régner en maître. Une troupe hétéroclite de personnages se retrouvent dans un bus, avec lequel ils devront fuir les forces armées s'ils ne veulent pas finir en cadavres. A vous de découvrir s'ils s'en sortiront ou pas. Parmi tous ces voyageurs, trois mémés apportent une exceptionnelle dose d'humour à cette aventure. L'histoire est simple mais attachante, et l'on prend beaucoup de plaisir à la lire, d'autant que les couleurs directes sont assez jolies, et surtout les visages des personnages excellents. Il y a juste un démarrage un peu lent et une scène un peu longuette sur le deuxième tome, hormis cela tout se déroule dans une bonne humeur communicatrice - même si le scénario recèle une bonne partie de drame. La narration est juste, belle et drôle, lisez l'histoire de la série, vous y prendrez la température narrative. Une très agréable surprise.
Appartement
J'ai mis fantastique comme genre, mais le vrai genre serait un mélange d'horreur et de thriller que ne renierait pas l'auteur de Monster ! J'ai tout de suite accroché à l'histoire, alors que j'avais emprunté ces deux tomes sans trop savoir à quoi m'attendre. L'enquête que mène Koh-hyuk m'a tenu en haleine du début à la fin. De plus, l'histoire s'enrichit progressivement car on a droit au point de vue d'autres personnes. Il y a aussi des retours en arrière, car chaque fois qu'on a le point de vue d'un autre personnage, cela commence quand il est indirectement impliqué dans l'affaire. En revanche, les dernières pages m'ont paru un peu nulles. Je ne sais pas trop pourquoi, mais je les ai trouvées sans intérêt. Heureusement que ce n'est pas le cas du dénouement !
Ceci est mon corps
Je commence à me faire aux couleurs informatisées un peu artificielles et froides, il le faut bien si je ne veux pas passer à côté de bon scénarios comme celui-ci. Car si le dessin m'a plu les couleurs elles sont glaciales ! Le titre est moyen, pour ne pas dire… mauvais, il m'a fait penser à une bd pour adolescents à la découverte de leur corps. Voilà tout ce qui fâche est dit…, passons maintenant à l'excellence. Oui, le scénario est excellent. Le premier tome m'a fait penser à du Morvan pour son originalité et le deuxième à Téhy pour l'action bien menée, d'autant plus que la couverture de ce dernier tome ressemble à l'une de la série Yiu. Deux maîtres de la bd ! "Ceci est mon corps" est du même niveau. Le postulat de départ est peut-être un peu tiré par les cheveux, certes, mais tout à fait crédible. D'ailleurs c'est un bd d'anticipation, on ne peut qu'y adhérer. La façon subtile dont Damien Marie nous fait entrer dans cet univers donne à cette bd tout son réalisme. Le monde dans lequel évoluent les personnages est bien développé, tout se tient, tout reste logique et les événements s'enchaînent naturellement. La narration est souvent caustique, parfois méchante. Les personnages sont égoïstes et égocentriques, mais beaucoup de gens ne le sont-ils pas ? Souvent cachés sous une chape de fausse modestie. J'aime ce ton réaliste et direct donné à la psychologie des personnages, qui prend ici toute sa valeur dans ce monde où les privilégiés se foutent royalement de ceux qui n'ont rien. Le tout nous est servi sans leçon de morale, superbement jouissif. Le deuxième tome est nettement plus axé sur l'action, et nous entraîne dans une course poursuite pour la survie extrêmement palpitante. La fin de ce premier cycle m'a laissé totalement affamée, les doigts crispés sur la bd, et je vous passerai tous les vilains mots que j'ai prononcés, frustrée de ne pas avoir la suite immédiatement !
Medz Yeghern - Le Grand Mal
Quelle claque !!! Je n'ai pas souvenir d'avoir lu une BD aussi bouleversante. Je connaissais très mal cette page noire de l'histoire. Il n'y a pas de mots pour décrire ces horreurs. Ce one shot arrive pourtant à retranscrire ce qu'il s'est passé par le biais de quelques personnages. Le lecteur n'est pas épargné par les images, la vérité devant être dite, certains passages sont difficiles. Le dessin est agréable avec ses nuances de gris très douces. Mais la forme n'est pas la priorité contrairement au contenu. Le seul reproche que j'ai trouvé à cette BD est le manque de fluidité à certains moments, on passe d'un personnage à un autre sans crier gare, cela m'a parfois dérouté. Sinon c'est parfait, le prix compris : 9,50 euros. Pour ceux qui ne cherchent que le divertissement dans une BD, il est préférable de passer son chemin, pour les autres l'achat est indispensable.
Watchmen
Ma BD préférée, tout simplement. Alan Moore est mon idole :) Je viens de relire « Watchmen » à l’occasion de la sortie du film, et j’ai pris encore plus de plaisir que lors de ma 1ere lecture. J’avais oublié le degré de perfectionnement de la psychologie des personnages, la noirceur du propos, les réflexions poussées sur la nature humaine, sur la guerre (une ambiance de guerre froide règne sur toute la BD, époque de parution oblige). Les passages de la psychanalyse de Rorschach sont parmi les tout meilleurs qu’il m’ait été donné de lire en BD. J’adore aussi les discours un peu métaphysiques du docteur Manhattan débâtant de l’importance même de la vie, de notre survie en tant qu’espèce humaine. Alors oui, les couleurs ont affreusement vieilli, et une recolorisation (voire même une réédition en noir et blanc) serait appréciable. Mais je trouve qu’il serait dommage de passer à coté de ce chef d’œuvre pour si peu. D’autant plus que derrière ces couleurs se cache un superbe dessin très détaillé, Dave Gibbons a fait du bon boulot. Je vois aussi que beaucoup de lecteurs trouvent éprouvants les passages où le gamin assis prés du stand de presse lit un comics dont l’histoire et les textes viennent s’entremêler avec la trame principale. Oui, ça rend la lecture un peu fastidieuse, mais cela n’est jamais gratuit, car ces textes font habilement écho aux événements de l’histoire principale. Bref, moi je suis d’avis que tout amateur de BD se doit d’avoir lu Watchmen, ne serait-ce que pour se faire une opinion sur ce qui est souvent considéré être le meilleur « comics » jamais écrit. Un conseil pour finir : lors de votre 1ere lecture, ne lisez pas les passages textuels présents entre chaque chapitre. Ils sont intéressants, mais cassent carrément le rythme, et peuvent tout à fait être lus « après coup ». Voila, lisez Watchmen !
Dorohedoro
Je suis un peu surpris des notes attribuées à Dorohedoro car personnellement je dévore cette série. Dorohedoro parle de Hole, ville crasseuse dont les habitants sont victimes des expérimentations du monde des mages. Caïman, homme à la tête de reptile amnésique, cherche à savoir quel mage l'a transformé et surtout pourquoi. On suit plusieurs personnages de chaque camp dans leurs aventures qui naturellement les amènent à se croiser. Découverte tardivement, j'accroche particulièrement à cette série, l'univers punk futuriste post apocalyptique développé par l'auteur me plaît au plus haut point. Je trouve le pitch, le background et le scénario excellents au contraire de mes collègues ci-dessous. Il y a une intrigue claire et originale, des enjeux bien décris, et un univers particulièrement attachant. Le manga alterne l'hyper violent tendance gore et le plus léger, sans jamais aller dans le gros comique niais de certains mangas. Il décrit à merveille un univers sombre, ou deux camps s'opposent sans que l'on ne puisse déterminer qui sont les bons des méchants. On s'attache aux deux camps dans leurs mésaventures. Le dessin est particulier mais à mon goût excellent, les scans de la rubrique galerie ne lui rendent aucunement hommage. Les éditions sont magnifiques, pages en couleurs, couvertures hyper chiadées. Bref, amateurs de manga seinen, jetez-y sérieusement un coup d'oeil. Petit détail notable, l'auteur de ce manga est une femme, Q Hayashida.
Trois ombres
Ah ce trait, ces courbes, ces émotions qui transpirent de cette BD ! Sublime ! Sous un dessin d'apparence simple, Cyril Perdrosa nous offre un magnifique conte philosophique sur un thème difficile : la mort d'un enfant... Et c'est sans tomber dans des clichés sentimentalistes qu'il s'affranchit des poncifs du genre pour faire de la fuite en avant du père une fable merveilleuse. Sans rentrer dans le détail de l'histoire, "Trois Ombres" se décompose en parties distinctes. Un première qui met en place nos protagonistes et l'apparition de ces 3 ombres mystérieuses : ou comment glisser du bonheur quotidien vers une angoisse croissante qui débouchera sur le départ précipité du père et de son fils. Ensuite, vient la fuite et le refus de l'inéluctable, jalonné de péripéties et de rencontres plus ou moins heureuses... Entre alors en scène le fantastique, et Pedrosa revisite le thème du pacte ténébreux et de la vie éternelle. Et dans cet exercice onirique très réussit, vient enfin la résignation et l'acceptation de la disparition de l'être aimé. Vient enfin un épilogue un peu inattendu qui voit la Mort rompre ce pacte et rendre ce père à la vie pour lui donner une seconde chance. Son heure n'est pas encore venue... Au final j'ai trouvé cette BD admirablement bien menée et servi par un dessin qui colle parfaitement à l'histoire. Un petit bijou serti de perles d'émotions que je garde précieusement en mémoire et à portée de main pour la relire régulièrement !
Watchmen
Chef d’œuvre majeur de la BD. Comme le Canada dry, ce n’est pas tout à fait malgré les apparences une histoire classique de super-héros. C’est bien plus que ça, il s’agit là d’une œuvre littéraire et graphique où les couleurs crues et flashy ne servent qu’à tromper l’ennemi. Une œuvre d’une richesse incroyable, avec un scénario béton et une atmosphère unique, qui se déguste et se relit ad vitam eternam, chaque détail y a son importance, chaque personnage secondaire n’est pas si secondaire que ça, chaque plan ou arrière-plan, chaque détail nous dit quelque chose. Dans cette histoire, les « super-héros » sont quelque peu sur le retour (oui, ils ont du bide !) et ne sont pas comme on pourrait le croire l’incarnation du bien censé lutter contre le mal, ils ont leurs doutes et leurs faiblesses, et ne sont pas réellement des enfants de chœur. Les frontières entre « bons » et « méchants » sont brouillées, W. Bush en perdrait son parler texan s’il devait s’imposer cette lecture. Oui, il n’est pas si simple de vouloir « sauver le monde » à notre époque (il s’agit bien de notre époque !) tellement cynique et gouvernée par l’instinct de mort. Conçue avant la chute du mur de Berlin, à un moment où l’on parlait encore de guerre froide, « Les Gardiens » ont conservé toute leur actualité, car si l’équilibre de la terreur n’est plus, on se rend compte que notre monde actuel est rempli d’incertitudes, baignant dans un chaos politique, économique et écologique dont nul ne connaît l’issue (ou ne veut la connaître…). Il faut lire les Watchmen et les hisser très haut dans sa bibliothèque. A une semaine de la sortie du film en salles, je souhaite simplement que le réalisateur Zack Snyder ne trahira pas l’esprit de ce diamant pur.