Frédérik Peeters est un auteur original, très éclectique – et qui réussit à surprendre dans à peu près tous les genres auxquels il touche. Pour ce qui est de la Science-Fiction (puisque c’est le cas avec cette série), il avait déjà à son actif le très beau Lupus, assez planant. Avec « aâma », on est dans une veine SF peut-être plus classique, mais là aussi c’est vraiment très bon – et très beau !
Avec quelques détours vers la chronique sentimentale (pas gnangnan, et qui vers la fin en plus se rattache à l’intrigue quasi thriller qui va envahir le côté purement SF), Peeters bâtit ici une histoire à la fois dense et aérée, voire aérienne. On est accroché petit à petit, puis vissé à cette intrigue (qui va nous questionner sur la relation entre homme et robot, sur la naissance de la vie, etc.), mais aussi et surtout à son traitement.
En effet, j’ai trouvé superbe le travail graphique de Peeters, que ce soit le dessin ou la colorisation. On y retrouve des tons (dégradés de violets par exemple) déjà dominants dans Pachyderme, mais aussi très présents dans son dernier album, Saccage.
Ces couleurs habillent un dessin parfois psychédélique, avec quelques planches qui m’ont fait penser à certains tableaux de Salvador Dali, voire aux paysages minéraux d’Yves Tanguy, dans une veine très surréaliste donc.
Un dessin souvent épuré, mais qui fait la part belle à l’imagination, créant un bestiaire proche de celui imaginé par Léo dans ces séries SF, mais en plus poétique. Un monde beau et dangereux, une planète mêlant rêves et cauchemars.
Les 4 albums, pourtant relativement épais (près de 90 pages chacun !) se laissent lire rapidement, et très agréablement. C’est une série pleine de poésie, d’une richesse graphique et scénaristique telle qu’il serait vraiment dommage de passer à côté.
J’ai encore relu cette série pour l’aviser. C’est qu’elle m’avait un peu impressionné à sa sortie. C’est encore le cas aujourd’hui, même si elle traine quand même certains défauts.
D’abord, Dorison a su bâtir un scénario plus que prenant ! Pas forcément hyper original. En effet, il pique des influences un peu partout. Des films comme Abyss ou Alien pour les ambiances. Mais aussi une flopée de films, BD jouant sur les dieux anciens, les malédictions réveillés par le hasard et des explorateurs.
Mais c’est bien fait, bien sombre, bien flippant, Dorison ayant construit, étape par étape, une ambiance oppressante, faisant monter la tension, ajoutant, scène par scène, des touches plus ou moins angoissantes. Et le dessin de Bec, très sombre, jouant lui aussi sur la noirceur, l’obscurité des grands fonds et des grottes immenses, est tout à fait raccord avec l’ambiance créée par Dorison.
Mais le problème de ces intrigues alambiquées, qui jouent sur une surenchère, sur des vagues successives de montées d’angoisse et de tension, c’est qu’au bout d’un moment, on a du mal à retomber sur ses pieds, car il faut bien « finir » l’histoire. Et c’est là que le bât blesse un peu. En effet, je trouve que le troisième tome, sur la lancée des premiers, peine à trouver une fin « crédible ». Et la chute reste un peu maladroite, très – trop ? – ouverte ?
Autre bémol : le dessin de Bec, certes sombre à souhait, l’est sans doute parfois trop, la lecture de certaines cases étant de ce fait rendue difficile. D’autant qu’il y a une foule de personnages à suivre dans ce quasi huis clos, et qu’ils sont parfois difficilement reconnaissables, distinguables les uns des autres. J’ai dû du coup parfois faire quelques retours en arrière pour suivre et comprendre certaines péripéties.
Mais voilà, malgré ces défauts et une fin qui m’a un peu déçu (mais pouvait-il en être autrement ?), la lecture de ce triptyque reste quand même agréable. C’est globalement du travail bien fait, et l’une des meilleures séries du genre.
Je viens de relire cette série pour l’aviser. Mais j’en avais gardé de très bons souvenirs, ici confirmés.
Lors de ma première lecture, j’avais eu du mal avec le dessin. Ou plutôt avec la colorisation, très terne, comme insolée. Mais finalement on s’y fait. Quant au dessin, je dois dire qu’il y a certaines planches un peu confuses, certains passages pas toujours très clairs. Mais quelle beauté dans l’ensemble ! On a parfois affaire à un artbook – le manque de clarté relevé précédemment passant alors au second plan, même si cela ralentit un peu la lecture.
L’intrigue – sans être originale, est plutôt bien fichue, avec une habituelle quête, menée par un groupe de personnages hétéroclites. Depuis La Quête de l'Oiseau du Temps - mais en fait depuis Tolkien !, c’est du déjà-vu.
Bien fait donc, avec des personnages bien campés, et surtout un univers qui, par-delà son très bel aspect graphique, se révèle très riche. Là aussi avec quelques bémols : les langages des Puissances sont intéressants, mais parfois difficiles à lire.
Toujours est-il que c’est à chaque fois avec grand plaisir que je me replonge dans ces légendes, qui se révèlent une lecture très agréable.
Au départ conçu comme une suite (« L’ami Javin » portait la mention tome 5), c’est en fait devenu une série « indépendante », c’est-à-dire un préquel de la série mère, qui nous présente l’enfance de Bragon, mais aussi et surtout l’adolescence, la maturité et la rencontre des personnages que nous croiserons dans la grande série d’origine.
Peut-être un peu moins surprenant, mais ça se laisse lire très agréablement, avec une menace qui se précise (comme Sauron dans « Le seigneur des anneaux »), un complot que Bragon doit déjouer. Je ne sais pas combien de titres sont prévus, mais pour le moment les 5 tomes parus sont intéressants.
Même si, comme dans la série mère, j’ai trouvé l’univers du Rige (là encore le tome 3 !) très riche, sauvage et beau.
Loisel n’est plus que coscénariste avec Le Tendre, et a laissé sa place pour les dessins. Et les dessinateurs changent presque à chaque tome. Je n’aime généralement pas ça, mais ici les styles graphiques ne diffèrent pas trop, et cela passe.
C’est en tout cas une série qui plaira aux amateurs de la série d’origine.
Note réelle 3,5/5.
Voilà une série qui a en partie vieilli (globalement plutôt bien je trouve), et qu’il faut savoir aviser sans anachronisme. En effet, elle a presque fait figure de pionnière dans ces univers vaguement inspirés par les œuvres de Tolkien, avec un petit groupe de personnages hétéroclites unis dans une quête dangereuse et dont dépend le salut du monde.
Et le dessin de Loisel – du moins dans les premiers albums –, avec un trait gras, est encore brouillon. La colorisation n’est pas toujours réussie non plus.
Voilà pour les quelques bémols qui me viennent à l’esprit après une énième relecture de la série pour l’aviser. Car pour le reste, c’est encore avec beaucoup de plaisir que j’ai retrouvé ces personnages et leurs aventures.
Car le Tendre a su développer une belle galerie de personnages. Et quand je parle de beauté, il faut bien sûr commencer par parler de Pelisse, belle rouquine très bien en chair, franchement pulpeuse (et très éloignée des pin-up qui garnissent depuis la plupart des séries). Une poitrine et des fesses qui font souvent leur effet sur certains acteurs de l’intrigue – et peut-être aussi sur certains lecteurs ? Et son duo avec Bragon, vieux guerrier bougon (son père et protecteur) est bien construit (même si l’immaturité de Pelisse peut énerver à force). Et le reste de l’ « équipe », petites bestioles comprises, comme le bestiaire en général est lui aussi amusant, original et varié : et pas mal copié ensuite !
C’est dans l’album « Le Rige » (par ailleurs mon préféré) que le dessin de Loisel atteint une maturité, une beauté qui n’a pas vieilli.
J’ai hésité entre 4 toiles et « culte », et ai opté pour le moment pour la première solution. Mais cela n’est peut-être pas définitif, car la série a gardé énormément de richesse, 30 ans après sa création, et supporte encore la comparaison (à son avantage souvent) avec d’autres du même genre publiées depuis.
Voilà du western classique, proche de Durango par certains aspects – même si on n’est pas dans du spaghetti. Western crépusculaire aussi, par son traitement, mais aussi et surtout son sujet.
Car cela se déroule dans cet ouest qui n’est presque plus sauvage, alors que la « frontier » est en passe d’être résorbée. Nous assistons au chant du cygne de la nation Sioux (et des Indiens des plaines en général), puisque le premier cycle de trois albums se conclut presque par l’assassinat de Sitting Bull et le massacre de Wounded Knee (Marc-Renier reprend même dans une case la fameuse photo du cadavre du chef Big Foot statufié par le froid).
Au milieu des embrouilles, du scandale du détournement des moyens prétendument alloués aux Indiens des réserves, un duo mal assorti : Lewis, un cow-boy solitaire, proche des Sioux (sa femme a été assassiné quelques années auparavant) et Lebon, un photographe français idéaliste venu de la côte Est. C’est au travers des yeux de Lebon, décillés par l’horreur des massacres et le désespoir déchirant des derniers Sioux « libres », que Swolfs montre l’ethnocide, voire le génocide menés au nom de la civilisation. Cet aspect de l’histoire est très intéressant et bien fichu.
Classique mais bien fichue donc, l’intrigue aurait pu se conclure avec la mort de Lewis à la fin du troisième tome. Swolfs abandonne d’ailleurs le navire, Marc-Renier officiant seul pour un tome supplémentaire, qui voit Lebon accomplir la vengeance de Lewis. Pourquoi pas ?
Reste que si l’histoire se laisse lire agréablement, elle le doit aussi au dessin de Marc-Renier, que j’ai trouvé vraiment bon – malgré des personnages un peu statiques parfois.
Je surnote peut-être, mais j’arrondis aux quatre étoiles pour le plaisir des nombreuses lectures des albums de cette série, que j’avais adorée lorsque je l’avais découverte, adolescent, en bibliothèque. Je possède les albums, et les relis de loin en loin. Toujours avec plaisir – sans doute moins qu’au départ, je suis devenu plus exigent et ai muri, mais j’y trouve encore mon bonheur.
Paru dans les années 1970, elle est clairement influencée par les westerns crépusculaires des années précédentes à Hollywood. Ceux qui éclairaient d’une lumière plus crue et réaliste le massacre des Indiens et le racisme qui le sous-tendait (« Little Big Man » ou « Soldat bleu » par exemple). Mais aussi des westerns plus contemplatifs comme « Jérémiah Jonhson », dont l’influence se fait aussi sentir sur Buddy Longway, publiée à la même époque, voire sur La Saga du Grizzli. J’aime bien cette veine du western, qui s’écarte du spaghetti, pour mettre en avant une ambiance quasi planante, naturaliste. Même s’il faut dire que peu à peu les intrigues s’écartent un peu de cet aspect contemplatif (sans complètement l’éliminer).
Les scénarios de Laurence Harlé sont assez variés. Nous suivons Jonathan Cartland (trappeur proche des Indiens) durant les décennies 1850-1860. Souvent recruté comme guide, il est mêlé à pas mal d’aventures. Classiques parfois (« Le trésor de la femme araignée » m’a fait penser au diptyque des « Monts de la superstition » de Blueberry), parfois plus originales (comme le diptyque voyant une sorte de Louis II de Bavière bâtir un château en plein territoire Cheyenne).
Harlé donne un traitement de plus en plus baroque à ces aventures, avec des incursions dans le fantastique. A noter que si une partie de la série se déroule au moment de la guerre de Sécession, celle-ci n’est qu’évoquée, et ne sert pas de décor ou de dynamiteur à l’histoire.
Le dessin de Blanc-Dumont, un peu brouillon au départ, se bonifie pour devenir très bon – même si les personnages sont un peu statiques parfois. Mais les décors naturels, les chevaux sont franchement réussis (c’est un autre point commun avec Derib). On a donc souvent droit aux grands espaces – même si un des meilleurs albums de la série, « Silver Canyon », se déroule dans un quasi huis-clos.
C’est en tout cas une des belles réussites de la collection « Western » de chez Dargaud, avec Mac Coy. A redécouvrir si ce n’est déjà fait.
« Meurtres fatals » est une série qui est au polar ce que Bill Baroud est à l’espionnage : de la très grosse déconne, de la caricature grasse, du bon n’importe quoi qui fait exploser les zygomatiques de tous ceux qui ne font pas la fine bouche.
Maester reprend ici Charolles, un personnage sorti de l’imagination et des Rubrique-à-Brac du génial Gotlib (qui donne aussi ses traits au bonhomme). Cet inspecteur de police, flanqué de son débile d’adjoint Piggs, se trouve embarqué dans des enquêtes improbables – et dont on se fout complètement, puisqu’elles ne sont que des prétextes pour caser un maximum de gags (jeux de mots, gags visuels, etc.).
En plus de Gotlib dans le premier rôle, Maester use régulièrement des trognes de ses camarades de chez Fluide Glacial (et, j’imagine, pas mal de private jokes entre eux mais invisibles pour moi). Surtout, il multiplie les références (à certaines séries télé, mais surtout à des films connus et à leurs personnages principaux) pour caser ses conneries.
Il faut aimer le genre, mais moi ça me va, et c’est vraiment bien fait. De plus, et cela compte beaucoup, le dessin de Maester est vraiment excellent, dans un style caricatural qui dynamite les pauvres intrigues. C’est l’une de ses meilleures réussites, avec l’inénarrable Soeur Marie-Thérèse.
Grosse poilade bien dans la veine du meilleur Fluide. J’aime beaucoup ce défouloir !
Des histoires SF des années 70 surtout, voilà un petit recueil sympathique des oeuvres de Moebius de l’époque.
On y retrouve son dessin classique, à la fois gras et épuré (en tout cas il est beau, c’est sûr). On y retrouve aussi des décors habituels.
Les histoires sont un peu inégales, mais j’ai trouvé ce recueil globalement intéressant et bon. Moebius y glisse quelques clins d’œil (à Gotlib par exemple), de l’humour (comme le faisait Bilal à la même époque). On peut presque voir l’histoire qui donne son nom à l’ensemble comme un pastiche de polar noir (dans le ton du commentaire off), qui a quelques accointances avec L'Incal. Druillet participe à un scénario (et Moebius tente de se rapprocher du style graphique de ce dernier), ajoutant une touche fantastique à l’ensemble.
Un ensemble qui se situe dans la très bonne moyenne de cet auteur protéiforme et génial.
Note réelle 3,5/5.
Le premier album est vraiment excellent, bien construit, mêlant réflexions sérieuses et bons mots « déconne » comme Manu Larcenet en a glissé pas mal ailleurs. En tout cas les frangins Larcenet ont réussi là quelque chose de bien marrant.
Et le dessin moderne, allié à une colorisation aux petits oignons, rendent la lecture de ces aventures « post-mortem » très fluides et agréables.
Le second tome est sympathique, certes, mais un peu moins bon que le premier. Cela fuse moins au niveau des mots et du rythme, même si ça se laisse lire très facilement.
Je dirais 3/5 pour le second, et 4/5 pour le premier, j’arrondis aux 4 étoiles, car c’est quand même bien fichu.
Sans prétention, mais un bon millésime de la collection Poisson Pilote.
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Aâma
Frédérik Peeters est un auteur original, très éclectique – et qui réussit à surprendre dans à peu près tous les genres auxquels il touche. Pour ce qui est de la Science-Fiction (puisque c’est le cas avec cette série), il avait déjà à son actif le très beau Lupus, assez planant. Avec « aâma », on est dans une veine SF peut-être plus classique, mais là aussi c’est vraiment très bon – et très beau ! Avec quelques détours vers la chronique sentimentale (pas gnangnan, et qui vers la fin en plus se rattache à l’intrigue quasi thriller qui va envahir le côté purement SF), Peeters bâtit ici une histoire à la fois dense et aérée, voire aérienne. On est accroché petit à petit, puis vissé à cette intrigue (qui va nous questionner sur la relation entre homme et robot, sur la naissance de la vie, etc.), mais aussi et surtout à son traitement. En effet, j’ai trouvé superbe le travail graphique de Peeters, que ce soit le dessin ou la colorisation. On y retrouve des tons (dégradés de violets par exemple) déjà dominants dans Pachyderme, mais aussi très présents dans son dernier album, Saccage. Ces couleurs habillent un dessin parfois psychédélique, avec quelques planches qui m’ont fait penser à certains tableaux de Salvador Dali, voire aux paysages minéraux d’Yves Tanguy, dans une veine très surréaliste donc. Un dessin souvent épuré, mais qui fait la part belle à l’imagination, créant un bestiaire proche de celui imaginé par Léo dans ces séries SF, mais en plus poétique. Un monde beau et dangereux, une planète mêlant rêves et cauchemars. Les 4 albums, pourtant relativement épais (près de 90 pages chacun !) se laissent lire rapidement, et très agréablement. C’est une série pleine de poésie, d’une richesse graphique et scénaristique telle qu’il serait vraiment dommage de passer à côté.
Sanctuaire
J’ai encore relu cette série pour l’aviser. C’est qu’elle m’avait un peu impressionné à sa sortie. C’est encore le cas aujourd’hui, même si elle traine quand même certains défauts. D’abord, Dorison a su bâtir un scénario plus que prenant ! Pas forcément hyper original. En effet, il pique des influences un peu partout. Des films comme Abyss ou Alien pour les ambiances. Mais aussi une flopée de films, BD jouant sur les dieux anciens, les malédictions réveillés par le hasard et des explorateurs. Mais c’est bien fait, bien sombre, bien flippant, Dorison ayant construit, étape par étape, une ambiance oppressante, faisant monter la tension, ajoutant, scène par scène, des touches plus ou moins angoissantes. Et le dessin de Bec, très sombre, jouant lui aussi sur la noirceur, l’obscurité des grands fonds et des grottes immenses, est tout à fait raccord avec l’ambiance créée par Dorison. Mais le problème de ces intrigues alambiquées, qui jouent sur une surenchère, sur des vagues successives de montées d’angoisse et de tension, c’est qu’au bout d’un moment, on a du mal à retomber sur ses pieds, car il faut bien « finir » l’histoire. Et c’est là que le bât blesse un peu. En effet, je trouve que le troisième tome, sur la lancée des premiers, peine à trouver une fin « crédible ». Et la chute reste un peu maladroite, très – trop ? – ouverte ? Autre bémol : le dessin de Bec, certes sombre à souhait, l’est sans doute parfois trop, la lecture de certaines cases étant de ce fait rendue difficile. D’autant qu’il y a une foule de personnages à suivre dans ce quasi huis clos, et qu’ils sont parfois difficilement reconnaissables, distinguables les uns des autres. J’ai dû du coup parfois faire quelques retours en arrière pour suivre et comprendre certaines péripéties. Mais voilà, malgré ces défauts et une fin qui m’a un peu déçu (mais pouvait-il en être autrement ?), la lecture de ce triptyque reste quand même agréable. C’est globalement du travail bien fait, et l’une des meilleures séries du genre.
Légendes des Contrées Oubliées
Je viens de relire cette série pour l’aviser. Mais j’en avais gardé de très bons souvenirs, ici confirmés. Lors de ma première lecture, j’avais eu du mal avec le dessin. Ou plutôt avec la colorisation, très terne, comme insolée. Mais finalement on s’y fait. Quant au dessin, je dois dire qu’il y a certaines planches un peu confuses, certains passages pas toujours très clairs. Mais quelle beauté dans l’ensemble ! On a parfois affaire à un artbook – le manque de clarté relevé précédemment passant alors au second plan, même si cela ralentit un peu la lecture. L’intrigue – sans être originale, est plutôt bien fichue, avec une habituelle quête, menée par un groupe de personnages hétéroclites. Depuis La Quête de l'Oiseau du Temps - mais en fait depuis Tolkien !, c’est du déjà-vu. Bien fait donc, avec des personnages bien campés, et surtout un univers qui, par-delà son très bel aspect graphique, se révèle très riche. Là aussi avec quelques bémols : les langages des Puissances sont intéressants, mais parfois difficiles à lire. Toujours est-il que c’est à chaque fois avec grand plaisir que je me replonge dans ces légendes, qui se révèlent une lecture très agréable.
La Quête de l'Oiseau du Temps - Avant la Quête
Au départ conçu comme une suite (« L’ami Javin » portait la mention tome 5), c’est en fait devenu une série « indépendante », c’est-à-dire un préquel de la série mère, qui nous présente l’enfance de Bragon, mais aussi et surtout l’adolescence, la maturité et la rencontre des personnages que nous croiserons dans la grande série d’origine. Peut-être un peu moins surprenant, mais ça se laisse lire très agréablement, avec une menace qui se précise (comme Sauron dans « Le seigneur des anneaux »), un complot que Bragon doit déjouer. Je ne sais pas combien de titres sont prévus, mais pour le moment les 5 tomes parus sont intéressants. Même si, comme dans la série mère, j’ai trouvé l’univers du Rige (là encore le tome 3 !) très riche, sauvage et beau. Loisel n’est plus que coscénariste avec Le Tendre, et a laissé sa place pour les dessins. Et les dessinateurs changent presque à chaque tome. Je n’aime généralement pas ça, mais ici les styles graphiques ne diffèrent pas trop, et cela passe. C’est en tout cas une série qui plaira aux amateurs de la série d’origine. Note réelle 3,5/5.
La Quête de l'Oiseau du Temps
Voilà une série qui a en partie vieilli (globalement plutôt bien je trouve), et qu’il faut savoir aviser sans anachronisme. En effet, elle a presque fait figure de pionnière dans ces univers vaguement inspirés par les œuvres de Tolkien, avec un petit groupe de personnages hétéroclites unis dans une quête dangereuse et dont dépend le salut du monde. Et le dessin de Loisel – du moins dans les premiers albums –, avec un trait gras, est encore brouillon. La colorisation n’est pas toujours réussie non plus. Voilà pour les quelques bémols qui me viennent à l’esprit après une énième relecture de la série pour l’aviser. Car pour le reste, c’est encore avec beaucoup de plaisir que j’ai retrouvé ces personnages et leurs aventures. Car le Tendre a su développer une belle galerie de personnages. Et quand je parle de beauté, il faut bien sûr commencer par parler de Pelisse, belle rouquine très bien en chair, franchement pulpeuse (et très éloignée des pin-up qui garnissent depuis la plupart des séries). Une poitrine et des fesses qui font souvent leur effet sur certains acteurs de l’intrigue – et peut-être aussi sur certains lecteurs ? Et son duo avec Bragon, vieux guerrier bougon (son père et protecteur) est bien construit (même si l’immaturité de Pelisse peut énerver à force). Et le reste de l’ « équipe », petites bestioles comprises, comme le bestiaire en général est lui aussi amusant, original et varié : et pas mal copié ensuite ! C’est dans l’album « Le Rige » (par ailleurs mon préféré) que le dessin de Loisel atteint une maturité, une beauté qui n’a pas vieilli. J’ai hésité entre 4 toiles et « culte », et ai opté pour le moment pour la première solution. Mais cela n’est peut-être pas définitif, car la série a gardé énormément de richesse, 30 ans après sa création, et supporte encore la comparaison (à son avantage souvent) avec d’autres du même genre publiées depuis.
Black Hills
Voilà du western classique, proche de Durango par certains aspects – même si on n’est pas dans du spaghetti. Western crépusculaire aussi, par son traitement, mais aussi et surtout son sujet. Car cela se déroule dans cet ouest qui n’est presque plus sauvage, alors que la « frontier » est en passe d’être résorbée. Nous assistons au chant du cygne de la nation Sioux (et des Indiens des plaines en général), puisque le premier cycle de trois albums se conclut presque par l’assassinat de Sitting Bull et le massacre de Wounded Knee (Marc-Renier reprend même dans une case la fameuse photo du cadavre du chef Big Foot statufié par le froid). Au milieu des embrouilles, du scandale du détournement des moyens prétendument alloués aux Indiens des réserves, un duo mal assorti : Lewis, un cow-boy solitaire, proche des Sioux (sa femme a été assassiné quelques années auparavant) et Lebon, un photographe français idéaliste venu de la côte Est. C’est au travers des yeux de Lebon, décillés par l’horreur des massacres et le désespoir déchirant des derniers Sioux « libres », que Swolfs montre l’ethnocide, voire le génocide menés au nom de la civilisation. Cet aspect de l’histoire est très intéressant et bien fichu. Classique mais bien fichue donc, l’intrigue aurait pu se conclure avec la mort de Lewis à la fin du troisième tome. Swolfs abandonne d’ailleurs le navire, Marc-Renier officiant seul pour un tome supplémentaire, qui voit Lebon accomplir la vengeance de Lewis. Pourquoi pas ? Reste que si l’histoire se laisse lire agréablement, elle le doit aussi au dessin de Marc-Renier, que j’ai trouvé vraiment bon – malgré des personnages un peu statiques parfois.
Cartland
Je surnote peut-être, mais j’arrondis aux quatre étoiles pour le plaisir des nombreuses lectures des albums de cette série, que j’avais adorée lorsque je l’avais découverte, adolescent, en bibliothèque. Je possède les albums, et les relis de loin en loin. Toujours avec plaisir – sans doute moins qu’au départ, je suis devenu plus exigent et ai muri, mais j’y trouve encore mon bonheur. Paru dans les années 1970, elle est clairement influencée par les westerns crépusculaires des années précédentes à Hollywood. Ceux qui éclairaient d’une lumière plus crue et réaliste le massacre des Indiens et le racisme qui le sous-tendait (« Little Big Man » ou « Soldat bleu » par exemple). Mais aussi des westerns plus contemplatifs comme « Jérémiah Jonhson », dont l’influence se fait aussi sentir sur Buddy Longway, publiée à la même époque, voire sur La Saga du Grizzli. J’aime bien cette veine du western, qui s’écarte du spaghetti, pour mettre en avant une ambiance quasi planante, naturaliste. Même s’il faut dire que peu à peu les intrigues s’écartent un peu de cet aspect contemplatif (sans complètement l’éliminer). Les scénarios de Laurence Harlé sont assez variés. Nous suivons Jonathan Cartland (trappeur proche des Indiens) durant les décennies 1850-1860. Souvent recruté comme guide, il est mêlé à pas mal d’aventures. Classiques parfois (« Le trésor de la femme araignée » m’a fait penser au diptyque des « Monts de la superstition » de Blueberry), parfois plus originales (comme le diptyque voyant une sorte de Louis II de Bavière bâtir un château en plein territoire Cheyenne). Harlé donne un traitement de plus en plus baroque à ces aventures, avec des incursions dans le fantastique. A noter que si une partie de la série se déroule au moment de la guerre de Sécession, celle-ci n’est qu’évoquée, et ne sert pas de décor ou de dynamiteur à l’histoire. Le dessin de Blanc-Dumont, un peu brouillon au départ, se bonifie pour devenir très bon – même si les personnages sont un peu statiques parfois. Mais les décors naturels, les chevaux sont franchement réussis (c’est un autre point commun avec Derib). On a donc souvent droit aux grands espaces – même si un des meilleurs albums de la série, « Silver Canyon », se déroule dans un quasi huis-clos. C’est en tout cas une des belles réussites de la collection « Western » de chez Dargaud, avec Mac Coy. A redécouvrir si ce n’est déjà fait.
Meurtres Fatals
« Meurtres fatals » est une série qui est au polar ce que Bill Baroud est à l’espionnage : de la très grosse déconne, de la caricature grasse, du bon n’importe quoi qui fait exploser les zygomatiques de tous ceux qui ne font pas la fine bouche. Maester reprend ici Charolles, un personnage sorti de l’imagination et des Rubrique-à-Brac du génial Gotlib (qui donne aussi ses traits au bonhomme). Cet inspecteur de police, flanqué de son débile d’adjoint Piggs, se trouve embarqué dans des enquêtes improbables – et dont on se fout complètement, puisqu’elles ne sont que des prétextes pour caser un maximum de gags (jeux de mots, gags visuels, etc.). En plus de Gotlib dans le premier rôle, Maester use régulièrement des trognes de ses camarades de chez Fluide Glacial (et, j’imagine, pas mal de private jokes entre eux mais invisibles pour moi). Surtout, il multiplie les références (à certaines séries télé, mais surtout à des films connus et à leurs personnages principaux) pour caser ses conneries. Il faut aimer le genre, mais moi ça me va, et c’est vraiment bien fait. De plus, et cela compte beaucoup, le dessin de Maester est vraiment excellent, dans un style caricatural qui dynamite les pauvres intrigues. C’est l’une de ses meilleures réussites, avec l’inénarrable Soeur Marie-Thérèse. Grosse poilade bien dans la veine du meilleur Fluide. J’aime beaucoup ce défouloir !
The Long Tomorrow
Des histoires SF des années 70 surtout, voilà un petit recueil sympathique des oeuvres de Moebius de l’époque. On y retrouve son dessin classique, à la fois gras et épuré (en tout cas il est beau, c’est sûr). On y retrouve aussi des décors habituels. Les histoires sont un peu inégales, mais j’ai trouvé ce recueil globalement intéressant et bon. Moebius y glisse quelques clins d’œil (à Gotlib par exemple), de l’humour (comme le faisait Bilal à la même époque). On peut presque voir l’histoire qui donne son nom à l’ensemble comme un pastiche de polar noir (dans le ton du commentaire off), qui a quelques accointances avec L'Incal. Druillet participe à un scénario (et Moebius tente de se rapprocher du style graphique de ce dernier), ajoutant une touche fantastique à l’ensemble. Un ensemble qui se situe dans la très bonne moyenne de cet auteur protéiforme et génial. Note réelle 3,5/5.
Les Entremondes
Le premier album est vraiment excellent, bien construit, mêlant réflexions sérieuses et bons mots « déconne » comme Manu Larcenet en a glissé pas mal ailleurs. En tout cas les frangins Larcenet ont réussi là quelque chose de bien marrant. Et le dessin moderne, allié à une colorisation aux petits oignons, rendent la lecture de ces aventures « post-mortem » très fluides et agréables. Le second tome est sympathique, certes, mais un peu moins bon que le premier. Cela fuse moins au niveau des mots et du rythme, même si ça se laisse lire très facilement. Je dirais 3/5 pour le second, et 4/5 pour le premier, j’arrondis aux 4 étoiles, car c’est quand même bien fichu. Sans prétention, mais un bon millésime de la collection Poisson Pilote.