Inès, ou l’un des derniers sujets tabou de notre société : la violence conjugale. Il faut du cran pour s’atteler à ce genre de sujets tant la tâche va être difficile, tant il est possible de passer du cliché lourd au grotesque lourd.
Le dessin marque d’emblée le malaise, tout comme la première planche. Noir et dégradés de gris, le dessin est simpliste à l’extrême. Les ombres omniprésentes rendent admirablement l’atmosphère lourde du huis clos que nous allons vivre. Car toute la BD se situe dans l’appartement d’un couple avec une fille. Les cadrages ne sont pas vraiment innovants et plutôt monotones, mais les dessins transcrivent bien dans leur noirceur et leur âpreté l’état intérieur de la femme.
J’ai déjà débordé sur le scénario, donc nous avons une enfant qui pleure, un couple « normal » aux yeux des autres. Pourtant de l’intérieur c’est dramatique : violences physique et morale de cet homme sur cette femme avec la présence de cette petite fille qui démultiplie l’émotion et la force violente. Ce couple de voisin est intéressant, ils sont plus jeunes. La femme s’étonne du bruit, des pleurs et va oser se mêler à l’intimité des voisins en allant demander si tout va bien. Son ami la moque plus ou moins gentiment lui qui ne veut pas entendre. L’homme va ouvrir et renvoyer chez elle cette voisine au bon sentiment en disant que tout va bien et que sa fille est juste un peu capricieuse. La réalité est autre la mère est bloquée dans les toilettes que frappe l’homme tandis que la petite fille appelle sa mère… Les pensées de la femme sont écrites, lui joue sur ses faiblesse, elle donne du crédit à ses paroles et actions. La journée sera un moment sans lui parti travailler, elle voudra s’accorder un temps de répits en jouant avec sa fille sans pour autant oublier. Elle profite d’une pause tout en pensant au prochain orage. La suite sera une soirée bière avec un collègue ramené par là. Elle se demandera s’il régira devant les traces de coup, lui sera gêné. Il a vu forcément, mais peut il intervenir, doit il intervenir, il le fera finalement par une timide réprimande lorsque les paroles seront trop dures mais celle-ci sera immédiatement annihilée par le persécuteur par une pirouette en disant que c’est de l’humour… On est mal à l’aise on se demande si ce n’est pas nous qui sommes là, gênés et impuissants, n’osant pas intervenir, devinant mais n’étant pas surs, ne voulant pas voir pour ne pas se gêner nous même en nous entrainant dans les problèmes d’autrui.
La fin est tragique. Quand on pense que ne sont ici présentés que deux journées du calvaire de cette femme on remercie l’auteur de ne pas en avoir écrit plus.
Dans cette courte BD au dessin adapté dans son trait violent se dressent pêle-mêle, indifférence, violence intellectuelle et physique, devoir, oubli, relation à autrui, éducation, individualisme, autorité, vie/mort, fuite, aliénation, non intervention, égoïsme… C’est bouleversant, très bien écrit, une vraie claque à la lecture.
Acheter ce livre me parait très tendu, je ne me vois pas avec cette bombe noire à la maison, je ne me vois pas un soir vouloir lire cette BD pour passer un bon moment. Au contraire cette BD dérange, fait du bien à notre individualisme, bouscule. La lire me parait salutaire tant elle nous fait prendre conscience de notre propre individualisme face à la détresse d’autrui. Alors cette BD n’apporte pas de solution au problème, ne dit pas comment éviter le drame, elle le présente dans son horreur et sa tension si bien transcrite. Il me semble d’ailleurs que l’œuvre est construite en miroir, et j’ai l’effroi de penser que le jeune couple voisin sera lui-même dans cette situation tant les réactions de l’homme de ce couple ma paraissent faire naître celles du meurtrier…
A nous maintenant de réfléchir et de savoir ce que nous ferions et de ne pas tomber dans ce drame…
Voici pour moi une des meilleures BD jeunesse de ces dernières années !
Rares sont en effet celles qui arrivent réellement à me faire rire, ce que réussi sans conteste Julien Neel avec ses héroïnes. Ça nous change de Titeuf et de son humour pipi/caca...
Car ce qui fait la force de cette BD jeunesse, c'est justement les caractères forts des personnages et leurs relations. Lou, bien sûr, jeune fille de plus en plus mature et qu'on voit évoluer et grandir au fil des albums ; sa mère, post-ado-écrivaine de SF, quand elle lâche sa console de jeu, aux piètres talents culinaires et rebelle éternelle qui tient tant bien que vaille les rênes de sa famille mono parentale.
Et forcément ça swingue ! C'est plein de tendresse, de clins d'œil, de sentiments, tout en évitant la mièvrerie. Ce coup de zoom sur une tranche de vie très actuelle est vraiment une réussite.
Côté dessin, c'est plein de fraicheur également ! Un dessin rond, doux, expressif et très coloré. J'ai bien aimé et trouvé que ça collait parfaitement à l'ambiance de l'univers.
Julien Neel nous offre donc une série qui fait mouche tant graphiquement que sur l'histoire qu'il nous raconte. A lire de toute urgence, toute génération confondue !
J'ai découvert ou plutôt redécouvert Clifton avec l'intégrale parue chez Niffle en 2003.
Je ne vous parlerai donc que des albums dessinés et scénarisés par Macherot entre 1959 et 1961.
Même si les scénarii sont légers, même un peu trop, il ressort de la lecture une certaine fraicheur, voire une certaine naïveté qui me fait songer à d'autres bd de l'époque que j'affectionne particulièrement, comme Gil Jourdan ou Félix de Tillieux.
Témoin d'une époque désormais révolue, il faut relire Clifton avec les yeux des gosses des années 1960, lorsqu'ils le découvraient dans le journal Tintin.
Les trois premières histoires sont complètement farfelues mais je les relis toujours avec autant de plaisir et le trait de Macherot, qui s'éloignait ici du monde animalier (avec sa série phare "Clorophylle") est dynamique (bon, il faut aimer le style "gros nez" de l'école Dupuis)
Nostalgie, nostalgie...
Cette série démarre fort. Pas la peine de connaître tout le passé des super héros, les liens entre les personnages, les éventuels contentieux entre eux, les trahisons du passé, etc... Ici tout commence donc par la genèse de notre académy de super héros, du berceau à aujourd'hui. Le décor est planté dans le premier chapitre et de quelle manière ! Le ton est excellent, un petit humour cynique se glisse de ci de là dans un coin de page pour une explication de texte. J'ai adoré ces petites touches qui reflètent bien l'esprit de la série. C'est à la fois une histoire de super héros qui respecte les codes du genre (baston, pouvoirs, vilains méchants...), mais avec un style propre et séduisant.
Il ne m'a fallu que quelques pages pour être conquis. Dès les premiers événements ces héros hors normes apparaissent originaux et attachants. Alors qu'ils n'ont que 10 ans on les retrouve en plein combat contre .... la tour Eiffel... C'est tellement inattendu et bien foutu que ça en devient excellent comme idée.
L'histoire avance ensuite rapidement, les chapitres sont rythmés, pas de place à l'ennui. Plus tard, nos héros ont bien grandi et l'ambiance se noircit un peu mais le ton incisif et efficace reste le même. Du coup on ne voit pas passer les 6 chapitres.
A noter que ce premier tome peut se lire comme un one shot et qu'il contient quelques petits plus (cahier graphique, couvertures originales) qui ne gâchent rien, au contraire.
Il est des sujets très sensibles pour lesquels un auteur se doit de faire extrêmement attention au ton employé.
Trop mièvre, son récit deviendra anodin.
Trop larmoyant, on lui reprochera son apitoiement sur lui-même.
Trop véhément, il rebutera le lecteur, qui se sentira agressé.
Avec « Inès », Loïc Dauvilliers et Jérôme D’Aviau parviennent à nous livrer une œuvre poignante, digne du délicat sujet traité : la violence conjugale.
Ce portrait interpelle autant qu’il émeut. Les auteurs ont en effet l’intelligence de ne pas tomber dans la sensiblerie mais bien de laisser l’implacable poids des actes faire son œuvre. Sentiment de culpabilité de la femme battue, jalousie aveugle et machisme primaire du mari violent, aveu d’impuissance de voisins si proches mais respectueux de la vie privée d’autrui, honte et compassion du collègue de travail qui, lui non plus, ne désire pas se mêler de ce qui ne le regarde pas.
Mais Inès le regarde, et au travers de son regard, c’est nous que les auteurs touchent. Nous voulons crier ! Hurler et jurer qu’au grand jamais nous ne laisserions une telle situation se développer dans notre univers, … mais nous craignons finalement d’adopter le même comportement que ces si passifs voisins.
Œuvre poignante. Pour ce tragique destin d’une mère et de sa fille.
Œuvre miroir. Pour ces témoins dont nous craignons d’être le reflet.
Œuvre mature. Par sa maîtrise du huis clos et son art graphique, simple et dépouillé.
Œuvre majeure.
Je n’aurais pas su abandonner Inès en cours de route. Et bien après le terme de cette lecture, je reste sous le choc.
… et me reviennent en mémoire ces paroles d’un morceau de Fish : « It’s nobody’s business, this family business », tel un écho musical pour cette œuvre graphique d’importance (Fish – Vigil in a Wilderness of Mirrors – Family Business – 1990).
C’est vraiment n’importe quoi ! Mais qu’est-ce qu’on se marre…
Un « album » de ce genre a été publié voici… euh… beaucoup d’années, dans la collection « 16/22 » (c’était le format). Le titre ?… « L’ABC de la BD ». Présenté par Achille Talon, c’était assez « hénaurme ».
Ici, c’est autre chose. Un peu comme le « Professeur Blurp » de Gotlib, ce « Comment dessiner » est composé de 86 pages « didactiques » -de vraie BD- qui n’ont qu’un seul but : faire rire. Et c’est réussi.
C’est loufoque, parfois cru (le style « pipi-caca » n’est pas oublié), délirant par moments… mais aussi instructif sans en avoir l’air.
Avec ces deux « grands gamins d’auteurs » j’ai plongé avec délices dans des historiettes, des saynètes –dont certaines traitées au vitriol- qui ne m’ont laissé qu’un vrai bon souvenir.
C’est vrai qu’à leur façon « ils » essayent de vous apprendre quelque chose, mais la dose d’autodérision qui se dégage de quasi toutes les pages ne vous fait souvent penser qu’à une phrase : « Mais… c’est pas possible !…). Ben si, avec Zep et Tebo TOUT est possible, même ce qui ne pourrait l’être.
Et c’est ce qui donne sa force à ce « petit bouquin » bourré d’humour, de non-sens, que tout un chacun se devrait de posséder. Vraiment.
A ne pas réserver qu’aux fans.
J’ai lu, non pas une histoire générale divisée en 18 chapitres, mais 18 petites histoires pour chacune une femme différente.
Avec elles, je me suis arrêté un moment, m’asseyant moralement en face de chacune d’elles et, scrutant leurs regards, ai tenté de participer à leur rêverie. Je m’e suis ainsi immiscé quelques minutes dans ces pauses qu’elles se sont ordonnées, dans cet arrêt du temps par elles voulu, comme parfois il m’arrive de le faire en laissant vagabonder mon esprit.
Avec chacune de ces femmes j’ai connu la désillusion, l’espoir, la dispute, la page que l’on tourne, les amours tragiques, le passage à vide…
Ce « rouge bonbon » est une pause dans la vie, une pause qui –normalement- permet de mieux aller de l’avant.
L’auteur travaille ici une véritable délicatesse d’esprit dans des portions de vie intimistes, montre la sensibilité d’êtres que l’on pourrait croire connaître dans ce –notre- théâtre de la vie.
Hananan travaille un trait souple, « féminin », capture des instants, fait comprendre par des silences les états d’âmes de ses « héroïnes » d’un instant.
Souplesse du trait, mise en page « reposante », 18 sortes « d’arrêts sur image » qui m’ont fait entrer –un peu- dans 18 mondes que je ne connaissais pas.
Très bien fait.
J'ai eu du mal à passer le pas et enfin lire cette série - A chaque fois j'en repoussais l'achat, le dessin avait un effet un peu repoussoir pour moi. Bref, achat effectué le WE dernier, et lecture dans la foulée.
Alors le dessin est effectivement pas très glorieux, surtout les personnages, qui sont plutôt mal foutus, génériques, le trait du dessinateur est un peu sans âme, sans style. Les décors sont eux plus inspirés, ainsi que la composition des planches, qui pêchent tout de même parfois par une "sur-mise en page" un peu flagrante - comme une volonté de trop en faire. Mais ça se tient dans l'ensemble, la colorisation est elle aussi plutôt correcte, même si elle n'est pas très inspirée non plus (c'est très dégradé Photoshop tout ça).
Cette série ne brille donc pas par ses qualités artistiques, (même si tout cela reste plutôt de très bonne qualité), il faut chercher ailleurs pour y déceler ses vraies qualités.
En Fait c'est le découpage narratif, et son scénario, vraiment intéressant qui donnent un cachet vraiment particulier a UW1 - c'est très bien découpé, les personnages, sont bien fouillés, les rebondissements bien calculés, la cohérence de l'ensemble bien documentée - On est happé dès le début par l'histoire, et on a du mal à décrocher ensuite, même si sur la fin, ça s'embrouille un peu, UW1 c'est du solide.
On aurait presque envie d'en voir une adaptation au cinéma.
Je ne vais pas épiloguer sur cette BD.
Tout est dit dans le titre.
Le sujet est admirablement traité et ce, de façon objective.
On suit l'auteur et sa famille depuis la détection du mal jusqu'à sa rémission.
L'ensemble s'approche d'un documentaire. Sur le fond je le rapprocherais de Pilules bleues de Peeters.
A découvrir, on en ressort plus ouvert et "intelligent".
Le difficile sujet du cancer est abordé de façon pédagogique et humaine.
C'est avec Le Voyage en Italie,une belle réussite de Cosey.
Comme Mac Arthur, je viens de relire, plusieurs années après l'avoir acheté, ce one shot et le charme opère toujours autant.
Le thème de cette histoire (qui prend la forme de road-movie), des enfants (plutôt des adultes) à la recherche de leur vieux père parti en vadrouille, est traitée souvent de façon drôle (les dialogues entre les 2 frères et leur petite soeur sont savoureux et font mouche à chaque fois).
L'histoire prend un tournant avec l'apparition du père (qui d'ailleurs ressemble étrangement à Hemingway), à la fois fantasque, insouciant et touchant. Tout l'univers de Cosey est là dans ce personnage émouvant.
Comme d'habitude avec cet auteur, une vague impression de quiétude ressort après avoir reposé ce livre.
Sur 80 pages, Cosey nous offre un portrait d'une famille à la recherche du temps perdu...
A lire et surtout à relire.
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Inès
Inès, ou l’un des derniers sujets tabou de notre société : la violence conjugale. Il faut du cran pour s’atteler à ce genre de sujets tant la tâche va être difficile, tant il est possible de passer du cliché lourd au grotesque lourd. Le dessin marque d’emblée le malaise, tout comme la première planche. Noir et dégradés de gris, le dessin est simpliste à l’extrême. Les ombres omniprésentes rendent admirablement l’atmosphère lourde du huis clos que nous allons vivre. Car toute la BD se situe dans l’appartement d’un couple avec une fille. Les cadrages ne sont pas vraiment innovants et plutôt monotones, mais les dessins transcrivent bien dans leur noirceur et leur âpreté l’état intérieur de la femme. J’ai déjà débordé sur le scénario, donc nous avons une enfant qui pleure, un couple « normal » aux yeux des autres. Pourtant de l’intérieur c’est dramatique : violences physique et morale de cet homme sur cette femme avec la présence de cette petite fille qui démultiplie l’émotion et la force violente. Ce couple de voisin est intéressant, ils sont plus jeunes. La femme s’étonne du bruit, des pleurs et va oser se mêler à l’intimité des voisins en allant demander si tout va bien. Son ami la moque plus ou moins gentiment lui qui ne veut pas entendre. L’homme va ouvrir et renvoyer chez elle cette voisine au bon sentiment en disant que tout va bien et que sa fille est juste un peu capricieuse. La réalité est autre la mère est bloquée dans les toilettes que frappe l’homme tandis que la petite fille appelle sa mère… Les pensées de la femme sont écrites, lui joue sur ses faiblesse, elle donne du crédit à ses paroles et actions. La journée sera un moment sans lui parti travailler, elle voudra s’accorder un temps de répits en jouant avec sa fille sans pour autant oublier. Elle profite d’une pause tout en pensant au prochain orage. La suite sera une soirée bière avec un collègue ramené par là. Elle se demandera s’il régira devant les traces de coup, lui sera gêné. Il a vu forcément, mais peut il intervenir, doit il intervenir, il le fera finalement par une timide réprimande lorsque les paroles seront trop dures mais celle-ci sera immédiatement annihilée par le persécuteur par une pirouette en disant que c’est de l’humour… On est mal à l’aise on se demande si ce n’est pas nous qui sommes là, gênés et impuissants, n’osant pas intervenir, devinant mais n’étant pas surs, ne voulant pas voir pour ne pas se gêner nous même en nous entrainant dans les problèmes d’autrui. La fin est tragique. Quand on pense que ne sont ici présentés que deux journées du calvaire de cette femme on remercie l’auteur de ne pas en avoir écrit plus. Dans cette courte BD au dessin adapté dans son trait violent se dressent pêle-mêle, indifférence, violence intellectuelle et physique, devoir, oubli, relation à autrui, éducation, individualisme, autorité, vie/mort, fuite, aliénation, non intervention, égoïsme… C’est bouleversant, très bien écrit, une vraie claque à la lecture. Acheter ce livre me parait très tendu, je ne me vois pas avec cette bombe noire à la maison, je ne me vois pas un soir vouloir lire cette BD pour passer un bon moment. Au contraire cette BD dérange, fait du bien à notre individualisme, bouscule. La lire me parait salutaire tant elle nous fait prendre conscience de notre propre individualisme face à la détresse d’autrui. Alors cette BD n’apporte pas de solution au problème, ne dit pas comment éviter le drame, elle le présente dans son horreur et sa tension si bien transcrite. Il me semble d’ailleurs que l’œuvre est construite en miroir, et j’ai l’effroi de penser que le jeune couple voisin sera lui-même dans cette situation tant les réactions de l’homme de ce couple ma paraissent faire naître celles du meurtrier… A nous maintenant de réfléchir et de savoir ce que nous ferions et de ne pas tomber dans ce drame…
Lou !
Voici pour moi une des meilleures BD jeunesse de ces dernières années ! Rares sont en effet celles qui arrivent réellement à me faire rire, ce que réussi sans conteste Julien Neel avec ses héroïnes. Ça nous change de Titeuf et de son humour pipi/caca... Car ce qui fait la force de cette BD jeunesse, c'est justement les caractères forts des personnages et leurs relations. Lou, bien sûr, jeune fille de plus en plus mature et qu'on voit évoluer et grandir au fil des albums ; sa mère, post-ado-écrivaine de SF, quand elle lâche sa console de jeu, aux piètres talents culinaires et rebelle éternelle qui tient tant bien que vaille les rênes de sa famille mono parentale. Et forcément ça swingue ! C'est plein de tendresse, de clins d'œil, de sentiments, tout en évitant la mièvrerie. Ce coup de zoom sur une tranche de vie très actuelle est vraiment une réussite. Côté dessin, c'est plein de fraicheur également ! Un dessin rond, doux, expressif et très coloré. J'ai bien aimé et trouvé que ça collait parfaitement à l'ambiance de l'univers. Julien Neel nous offre donc une série qui fait mouche tant graphiquement que sur l'histoire qu'il nous raconte. A lire de toute urgence, toute génération confondue !
Clifton
J'ai découvert ou plutôt redécouvert Clifton avec l'intégrale parue chez Niffle en 2003. Je ne vous parlerai donc que des albums dessinés et scénarisés par Macherot entre 1959 et 1961. Même si les scénarii sont légers, même un peu trop, il ressort de la lecture une certaine fraicheur, voire une certaine naïveté qui me fait songer à d'autres bd de l'époque que j'affectionne particulièrement, comme Gil Jourdan ou Félix de Tillieux. Témoin d'une époque désormais révolue, il faut relire Clifton avec les yeux des gosses des années 1960, lorsqu'ils le découvraient dans le journal Tintin. Les trois premières histoires sont complètement farfelues mais je les relis toujours avec autant de plaisir et le trait de Macherot, qui s'éloignait ici du monde animalier (avec sa série phare "Clorophylle") est dynamique (bon, il faut aimer le style "gros nez" de l'école Dupuis) Nostalgie, nostalgie...
Umbrella Academy
Cette série démarre fort. Pas la peine de connaître tout le passé des super héros, les liens entre les personnages, les éventuels contentieux entre eux, les trahisons du passé, etc... Ici tout commence donc par la genèse de notre académy de super héros, du berceau à aujourd'hui. Le décor est planté dans le premier chapitre et de quelle manière ! Le ton est excellent, un petit humour cynique se glisse de ci de là dans un coin de page pour une explication de texte. J'ai adoré ces petites touches qui reflètent bien l'esprit de la série. C'est à la fois une histoire de super héros qui respecte les codes du genre (baston, pouvoirs, vilains méchants...), mais avec un style propre et séduisant. Il ne m'a fallu que quelques pages pour être conquis. Dès les premiers événements ces héros hors normes apparaissent originaux et attachants. Alors qu'ils n'ont que 10 ans on les retrouve en plein combat contre .... la tour Eiffel... C'est tellement inattendu et bien foutu que ça en devient excellent comme idée. L'histoire avance ensuite rapidement, les chapitres sont rythmés, pas de place à l'ennui. Plus tard, nos héros ont bien grandi et l'ambiance se noircit un peu mais le ton incisif et efficace reste le même. Du coup on ne voit pas passer les 6 chapitres. A noter que ce premier tome peut se lire comme un one shot et qu'il contient quelques petits plus (cahier graphique, couvertures originales) qui ne gâchent rien, au contraire.
Inès
Il est des sujets très sensibles pour lesquels un auteur se doit de faire extrêmement attention au ton employé. Trop mièvre, son récit deviendra anodin. Trop larmoyant, on lui reprochera son apitoiement sur lui-même. Trop véhément, il rebutera le lecteur, qui se sentira agressé. Avec « Inès », Loïc Dauvilliers et Jérôme D’Aviau parviennent à nous livrer une œuvre poignante, digne du délicat sujet traité : la violence conjugale. Ce portrait interpelle autant qu’il émeut. Les auteurs ont en effet l’intelligence de ne pas tomber dans la sensiblerie mais bien de laisser l’implacable poids des actes faire son œuvre. Sentiment de culpabilité de la femme battue, jalousie aveugle et machisme primaire du mari violent, aveu d’impuissance de voisins si proches mais respectueux de la vie privée d’autrui, honte et compassion du collègue de travail qui, lui non plus, ne désire pas se mêler de ce qui ne le regarde pas. Mais Inès le regarde, et au travers de son regard, c’est nous que les auteurs touchent. Nous voulons crier ! Hurler et jurer qu’au grand jamais nous ne laisserions une telle situation se développer dans notre univers, … mais nous craignons finalement d’adopter le même comportement que ces si passifs voisins. Œuvre poignante. Pour ce tragique destin d’une mère et de sa fille. Œuvre miroir. Pour ces témoins dont nous craignons d’être le reflet. Œuvre mature. Par sa maîtrise du huis clos et son art graphique, simple et dépouillé. Œuvre majeure. Je n’aurais pas su abandonner Inès en cours de route. Et bien après le terme de cette lecture, je reste sous le choc. … et me reviennent en mémoire ces paroles d’un morceau de Fish : « It’s nobody’s business, this family business », tel un écho musical pour cette œuvre graphique d’importance (Fish – Vigil in a Wilderness of Mirrors – Family Business – 1990).
Comment dessiner ?
C’est vraiment n’importe quoi ! Mais qu’est-ce qu’on se marre… Un « album » de ce genre a été publié voici… euh… beaucoup d’années, dans la collection « 16/22 » (c’était le format). Le titre ?… « L’ABC de la BD ». Présenté par Achille Talon, c’était assez « hénaurme ». Ici, c’est autre chose. Un peu comme le « Professeur Blurp » de Gotlib, ce « Comment dessiner » est composé de 86 pages « didactiques » -de vraie BD- qui n’ont qu’un seul but : faire rire. Et c’est réussi. C’est loufoque, parfois cru (le style « pipi-caca » n’est pas oublié), délirant par moments… mais aussi instructif sans en avoir l’air. Avec ces deux « grands gamins d’auteurs » j’ai plongé avec délices dans des historiettes, des saynètes –dont certaines traitées au vitriol- qui ne m’ont laissé qu’un vrai bon souvenir. C’est vrai qu’à leur façon « ils » essayent de vous apprendre quelque chose, mais la dose d’autodérision qui se dégage de quasi toutes les pages ne vous fait souvent penser qu’à une phrase : « Mais… c’est pas possible !…). Ben si, avec Zep et Tebo TOUT est possible, même ce qui ne pourrait l’être. Et c’est ce qui donne sa force à ce « petit bouquin » bourré d’humour, de non-sens, que tout un chacun se devrait de posséder. Vraiment. A ne pas réserver qu’aux fans.
Rouge Bonbon
J’ai lu, non pas une histoire générale divisée en 18 chapitres, mais 18 petites histoires pour chacune une femme différente. Avec elles, je me suis arrêté un moment, m’asseyant moralement en face de chacune d’elles et, scrutant leurs regards, ai tenté de participer à leur rêverie. Je m’e suis ainsi immiscé quelques minutes dans ces pauses qu’elles se sont ordonnées, dans cet arrêt du temps par elles voulu, comme parfois il m’arrive de le faire en laissant vagabonder mon esprit. Avec chacune de ces femmes j’ai connu la désillusion, l’espoir, la dispute, la page que l’on tourne, les amours tragiques, le passage à vide… Ce « rouge bonbon » est une pause dans la vie, une pause qui –normalement- permet de mieux aller de l’avant. L’auteur travaille ici une véritable délicatesse d’esprit dans des portions de vie intimistes, montre la sensibilité d’êtres que l’on pourrait croire connaître dans ce –notre- théâtre de la vie. Hananan travaille un trait souple, « féminin », capture des instants, fait comprendre par des silences les états d’âmes de ses « héroïnes » d’un instant. Souplesse du trait, mise en page « reposante », 18 sortes « d’arrêts sur image » qui m’ont fait entrer –un peu- dans 18 mondes que je ne connaissais pas. Très bien fait.
Universal War One
J'ai eu du mal à passer le pas et enfin lire cette série - A chaque fois j'en repoussais l'achat, le dessin avait un effet un peu repoussoir pour moi. Bref, achat effectué le WE dernier, et lecture dans la foulée. Alors le dessin est effectivement pas très glorieux, surtout les personnages, qui sont plutôt mal foutus, génériques, le trait du dessinateur est un peu sans âme, sans style. Les décors sont eux plus inspirés, ainsi que la composition des planches, qui pêchent tout de même parfois par une "sur-mise en page" un peu flagrante - comme une volonté de trop en faire. Mais ça se tient dans l'ensemble, la colorisation est elle aussi plutôt correcte, même si elle n'est pas très inspirée non plus (c'est très dégradé Photoshop tout ça). Cette série ne brille donc pas par ses qualités artistiques, (même si tout cela reste plutôt de très bonne qualité), il faut chercher ailleurs pour y déceler ses vraies qualités. En Fait c'est le découpage narratif, et son scénario, vraiment intéressant qui donnent un cachet vraiment particulier a UW1 - c'est très bien découpé, les personnages, sont bien fouillés, les rebondissements bien calculés, la cohérence de l'ensemble bien documentée - On est happé dès le début par l'histoire, et on a du mal à décrocher ensuite, même si sur la fin, ça s'embrouille un peu, UW1 c'est du solide. On aurait presque envie d'en voir une adaptation au cinéma.
Le Cancer de Maman
Je ne vais pas épiloguer sur cette BD. Tout est dit dans le titre. Le sujet est admirablement traité et ce, de façon objective. On suit l'auteur et sa famille depuis la détection du mal jusqu'à sa rémission. L'ensemble s'approche d'un documentaire. Sur le fond je le rapprocherais de Pilules bleues de Peeters. A découvrir, on en ressort plus ouvert et "intelligent". Le difficile sujet du cancer est abordé de façon pédagogique et humaine.
Orchidea
C'est avec Le Voyage en Italie,une belle réussite de Cosey. Comme Mac Arthur, je viens de relire, plusieurs années après l'avoir acheté, ce one shot et le charme opère toujours autant. Le thème de cette histoire (qui prend la forme de road-movie), des enfants (plutôt des adultes) à la recherche de leur vieux père parti en vadrouille, est traitée souvent de façon drôle (les dialogues entre les 2 frères et leur petite soeur sont savoureux et font mouche à chaque fois). L'histoire prend un tournant avec l'apparition du père (qui d'ailleurs ressemble étrangement à Hemingway), à la fois fantasque, insouciant et touchant. Tout l'univers de Cosey est là dans ce personnage émouvant. Comme d'habitude avec cet auteur, une vague impression de quiétude ressort après avoir reposé ce livre. Sur 80 pages, Cosey nous offre un portrait d'une famille à la recherche du temps perdu... A lire et surtout à relire.