Les derniers avis (31518 avis)

Couverture de la série Albertine a disparu
Albertine a disparu

Etrange et édifiant, ce récit se base sur un simple fait divers très révélateur de l’individualisme de nos sociétés occidentales. Autant polar que chronique sociale, cette bande dessinée m’a très agréablement surpris : le sujet est original et peu traité, le dessin est efficace et expressif, la lecture est très fluide. Le résultat ? J’ai dévoré l’album et en suis sorti quelque peu estomaqué (d’autant plus que je n’ai vu qu’a posteriori qu’il s’agit d’une histoire vraie). Ce récit nous parle de la vieillesse, de la solitude, de la culpabilité des enfants vis-à-vis de leurs parents, dont ils ont le sentiment de ne pas assez s’occuper, de l’isolement qui accompagne la crainte de déranger. Il soulève pas mal de questions dont, dans le cas présent, plusieurs restent sans réponses (et cela fait clairement partie du charme de cet album à mes yeux). Il est donc autant prenant que matière à réflexion. A titre personnel, je recommande (même s’il y a quelques rares longueurs et pertes de rythme).

04/08/2025 (modifier)
Par Gaston
Note: 4/5
Couverture de la série Spider-Man - Fake Red
Spider-Man - Fake Red

3.5 Un manga bien divertissant sur Spider-Man et surtout sur ce qu'est Spider-Man. En effet, on suit un jeune étudiant, Yu, l'adolescent typique mal dans sa peau et fan de Spider-Man qui un jour va tomber sur le costume de son idole et va devenir un nouveau Spider-Man pendant que Peter Parker a un problème. Le récit n'est pas exceptionnel, mais il est très bien fait. Contrairement à plein de comics de super-héros modernes, le scénario n'a pas peur d'être amusant à lire et ne se prend pas trop au sérieux. Il y a un bon mélange de comique et de drame, le dessin est dynamique et les scènes de combats sont réussies. Il y a quelques surprises dans le scénario qui parfois n'est pas aussi cliché qu'il parait au premier coup d'œil. Un bon divertissement pour les fans de l'homme araignée !

03/08/2025 (modifier)
Par Gaston
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Patrick Dewaere - A part ça la vie est belle
Patrick Dewaere - A part ça la vie est belle

Patrick Dewaere est un acteur que j'apprécie beaucoup et dont j'ai vu une bonne douzaine de ses films de sa trop courte filmographie. Les bonnes notes avaient attiré mon attention sur cette biographie. À force de lire des biographies médiocres en BD, je me méfie un peu, mais les auteurs évitent tous les défauts habituels de ce type de production. Déjà, il y a la bonne idée que la narration soit narrée par Dewaere lui-même ce qui donne un ton plus personnel qu'une bête narration qui ne ferait que montrer de manière chronologique les moments importants de la vie de l'acteur. Le scénario est vraiment bien fait, j'ai vraiment eu l'impression que c'était le vrai Dewaere qui racontait sa vie. Ce n'est pas raconté de manière chronologique et on saute souvent d'un sujet à l'autre, mais on ne se perd jamais et cela rend le tout encore plus authentique vu qu'il parle comme quelqu'un qui raconterait sa vie en parlant de ce qui lui passe par la tête. Je n'ai pas appris grand chose vu que j'avais déjà lu au sujet de cet acteur et aussi vu le documentaire de sa vie, mais j'ai tout de même trouvé la lecture de cette BD passionnante. On a un bon résumé de la vie compliqué de Dewaere et ses nombreux problèmes. Le dessin est très classe. Je recommande l'album à tous les fans de l'acteur.

03/08/2025 (modifier)
Par Cleck
Note: 4/5
Couverture de la série Nuits romaines
Nuits romaines

Visuellement, le rendu de cette BD est vraiment intéressant : des peintures sombres, très stylisées, traversées par de régulières hachures, multipliant les effets de lumière. Après, j'ai davantage de réserves quant au procédé informatique permettant d'y aboutir : aucun travail tortueux de la matière, juste sa reproduction, c'est moins romantique ! Ces belles illustrations servent un polar poisseux et noir à souhait : une sordide enquête autour de meurtres d'enfants, menée par le charismatique et désabusé inspecteur Flavio. Certes, l'on regrette la manière peu habile de faire avancer l'enquête : tout y est accéléré, fort peu vraisemblable. Mais c'est conduit avec un esprit sacrément joueur, les rebondissements y sont ludiques et assez cinématographiques. De manière surprenante, ce polar très noir dégage finalement beaucoup de légèreté dans sa narration, tant via la dynamique de son rythme que par la roublardise de ses péripéties. Un spectacle fort agréable, stylisé en diable !

02/08/2025 (modifier)
Par Présence
Note: 4/5
Couverture de la série Jesse Owens - Des miles et des miles
Jesse Owens - Des miles et des miles

Ce n’est plus une vie, ça, mais une épreuve de résistance sans fin ! - Ce tome contient une autobiographie de Jesse Owens (1913-1980), quadruple médaillé aux Jeux Olympiques de 1936 à Berlin, en présence d’Adolf Hitler. Son édition originale date de 2024. Il a été réalisé par Gradimir Smudja, pour le scénario, les dessins et les couleurs. Il comporte cent-vingt-et-une pages de bandes dessinées. Oakville, le douze septembre 1913. Un chat en salopette jouant du banjo est assis sur une haute branche d’un arbre, et il commente la scène qui se passe devant lui, dans une modeste cabane en bois. La naissance d’un nouveau jour, en même temps que celle d’une nouvelle vie, que c’est beau ! Le chat va raconter une histoire certainement encore jamais entendue. Cette histoire, c’est celle de son petit frère noir. Bienvenue dans ce monde cruel, et plein d’injustices et de dangers… Il voudrait que la chance soit à ses côtés et que jamais elle ne le lâche. Lui, il va prendre soin u nouveau-né, veiller à sa sécurité… Et lorsqu’il saura marcher, le chat le suivra comme son ombre. Mary-Emma et Henry Cleveland Owens avaient beaucoup d’enfants. Le dixième, le plus jeune s’appelait James, surnommé Jesse. Dans la cour de la famille Owens, on n’entend que les éclats de rire joyeux des enfants. Les parents n’en reviennent pas : Jesse n’a que cinq mois et il sait déjà marcher. Un matin, alors que le bambin est resté tout seul à la maison, il se retrouve soudain face à face avec… un monstre !!! Qui aurait pu prédire que Jesse aurait peur d’un campagnol ? Si peur qu’il va se coucher sous le lit, il y reste jusqu’au soir, lorsque son père lui vient en aide. Un autre jour, le grand jar Auguste se pavane tel un empereur régnant souverainement sur toute la cour. Personne ne sait avec certitude pourquoi Jesse se retrouve tout en haut de la liste noire d’Auguste. Le fait est qu’Auguste est perpétuellement après lui et le pourchasse partout… jusque dans la cabane au fond de la cour, servant de toilettes. Il n’y a aucun lieu sûr ou Jesse peut trouver refuge. Mais l’enfant apprend bien vite que la peur fait bouger ses jambes d’une manière incroyablement rapide. Ainsi, il distance Auguste, et il va se réfugier dans l’espace existant sous les planches formant la terrasse de la cabane. Dans le même temps, le chat, installé dans le rockingchair avec son banjo, incite Jesse à courir, courir le plus vite qu’il peut car bien d’autres dangers le poursuivront bientôt. Par une étouffante après-midi d’été, alors que Jesse n’a que cinq ans, il est assis sur les marches permettant d’accéder à la terrasse. Sans que rien n’annonce le danger, un serpent vient soudain le mordre par derrière au mollet droit. Quand il rentre le soir, le père ne trouve personne pour expliquer pour quelle raison l’enfant gît inanimé sur le sol. Même le médecin du village ne peut établir un diagnostic précis. Les parents couchent l’enfant dans son lit, personne n’imaginant qu’il passera la nuit. Invisible de tous, la mort approche pendant la nuit, mais le chat la lacère jusqu’à ce qu’elle reparte, puis il aspire le venin dans le mollet. Jesse reprend connaissance et il peut voir le chat qui se présente : il se nomme Essej Snewo. Les parents entrent dans la chambre et trouvent leur enfant conscient : ils estiment qu’il s’agit d’un miracle. Ils ne voient pas Essej. Une couverture impressionnante pour son pouvoir évocateur : le jeune garçon qui court, promis à un avenir olympique, la tenue du Ku Klux Klan comme épouvantail, les champs de coton, de nombreux esclaves et un maître, et un autre épouvantail à l’effigie d’Adolf Hitler. Le lecteur retrouve cette même beauté dans les dessins des pages intérieures, chaque case étant une illustration soignée. Cela devient une évidence lorsqu’il découvre une illustration en double, pages seize et dix-sept : un panoramique très large, avec en premier plan et second plan des dizaines d’exclaves en train de travailler dans des champs de coton. Le lecteur commence par assimiler l’image dans sa globalité, avec un troisième plan consacré à deux énormes bateaux à aube aux cheminées noires fumantes, et en arrière-plan des collines, puis encore des montagnes. Curieux, il regarde des groupes d’esclaves, puis certains un par un : chacun est occupé à une tâche propre qui s’additionne pour donner une image globale entre les cueilleurs (y compris des enfants), des personnes portant de lourds paniers, les chevaux tirant de grandes remorques pour les acheminer vers la baie de chargement d’un deux bateaux, les balles déjà à quai, les chemins de circulation s’adaptant au relief, les maitres à cheval avec leur fusil, etc. Quel tableau ! Ainsi éveillé, le regard du lecteur prend le temps de savourer des illustrations magnifiques et marquantes : la tornade qui soulève une grande cabane en bois dans un dessin en pleine page, la tornade qui détruit un bateau avec roue à aube dans un large panoramique occupant deux tiers de la hauteur sur la largeur de deux pages en vis-à-vis, le dessin en double page à couper le souffle montrant un viaduc ferroviaire en bois, une dizaine d’éléphants en équilibre les uns sur les autres dans un numéro de cirque exceptionnel (dessin en pleine page), les athlètes étatsuniens embarquant sur le paquebot transatlantique Manhattan (dessin en pleine page), une rue du Bronx (vue du ciel en oblique dans une illustration en double page). En réalité, chaque planche est un festin visuel roboratif. À raison d’un exemple par page : la vue du ciel en oblique sur la cabane de nuit, le chat en train de jouer du banjo sur les trois marches menant à la terrasse, la pose de groupe des parents Owens avec huit enfants dont six juchés sur le dos d’un âne, le campagnol pourchassant le tout petit Jesse dans la pièce principale, le jar Auguste s’en prenant à Jesse assis sur les cabinets, les deux parents consternés laissant leur fils sur son lit sans espoir de le retrouver vivant le lendemain, le chat griffant la Mort, etc. Le degré d’investissement de l’artiste dans chaque case de chaque planche emporte le lecteur, qui ressent l’importance du récit pour son auteur, pour qu’il s’y soit autant impliqué. Dans le même temps, l’artiste sait raconter une histoire par des séquences visuelles, chaque planche étant bien plus qu’une collection de superbes images. Après avoir été poursuivi par le jar, ce pauvre Jesse se fait courser par le bouc. Dans une planche irrésistible de cinq cases, le lecteur sourit devant la tête du bouc, son expression et le morceau de jean accroché à sa corne gauche, puis Jesse caché derrière le puits, ensuite à l’abri sous la carriole, l’image improbable du chat faisant tournoyer un lasso, et enfin le chat sur le dos du bouc se cabrant comme au rodéo. En page trente-trois, c’est une nuée de sauterelles qui ravage tout en quatre cases de la largeur de la page : une scène terrifiante dans leur efficacité, accablante dans la dernière case où il ne reste rien des champs. L’artiste aime bien les grandes cases, et il sait aussi raconter avec des structures de pages conçues sur mesure en fonction de la séquence. Celle relative à la qualification au saut en longueur et à la médaille olympique aux deux cents mètres repose sur un découpage à l’échelle des deux planches en vis-à-vis, trois bandes panoramiques contenant chacune trois cases, la première et la dernière étant de taille identique, et celle milieu s’étalant sur la page de gauche et celle de droite. Une composition identique pour les trois cases, une idée visuelle très intelligente pour rendre compte du point de départ, puis de la course de Jesse Owens, puis de la réaction de Hitler. Décidément, tous les malheurs du monde s’acharnent sur le pauvre Jesse Owens. Le lecteur part avec l’a priori d’une biographie factuelle sur l’un de plus grands champions olympiques du monde. Il apprécie l’idée d’un chat anthropomorphe (tout en conservant sa taille de gros chat), bluesman et narrateur omniscient, qui apporte un commentaire avec du recul sur ce que vit le futur champion. Il comprend qu’il faut y voir un dispositif narratif qui amène des métaphores, une version imagée de la réalité, par exemple quand le chat aspire le venin du serpent. Il se trouve un peu surpris par cette anecdote pour les cinq moins du bébé : étonnant que de tels détails aient survécu au passage des décennies. En fonction de sa capacité d’acceptation, il tique aussi un peu en découvrant que Nat King Cole (1919-1975) et Louis Armstrong (1901-1971) étaient présents au mariage de Jesse Owens. Encore plus fort : une version inédite de l’incendie du zeppelin LZ 129 Hindenburg qui chute sur le stade de Berlin en 1936, ou la coïncidence des causes du décès de Jesse. Une petite vérification en ligne permet de rectifier les faits. Le lecteur comprend alors que le récit amalgame à la fois une reconstitution biographique factuelle et une licence artistique relevant du conte, sensibilité de genre littéraire incarnée dans ce chat Essej Snewo. Il devient alors patent que l’auteur a choisi de rendre apparentes les conditions de vie pour les afro-américains au travers de son personnage. Le ton gentil et tout public de Essej Snewo permet d’intégrer Jesse Owens aux grandes forces systémiques accablant les citoyens de couleur noire. Et c’est ignoble et monstrueux. Sont ainsi mis en scène : l’esclavage et la cruauté des maîtres traitant les Noirs avec une cruauté pire que s’ils étaient des animaux, le règne de terreur du Ku Klux Klan avec massacres, ravages et lynchages, la ségrégation sous toutes ses formes, y compris après le retour du quadruple médaillé aux jeux olympiques, qui ne peut pas accéder aux hôtels de luxe du fait de sa couleur de peau, le fait que le président Franklin Delano Roosevelt (1882-1945) ne le remercie pas à son retour, alors qu’il remercie les athlètes blancs. Dans le même temps, la forme de conte constitue une manière de mettre en scène une époque : les bateaux à roue à aube sur le Mississipi, la tornade en Alabama, le blues, la nuée de sauterelles, les prisonniers noirs pour les chaingangs (groupe de prisonniers enchaînés ensemble et contraints d'effectuer des travaux pénibles), les trains de marchandise interminables et les hobos (vagabonds ferroviaires), le pont ferroviaire en bois, les logs (troncs d’arbre acheminés par le fleuve), le football américain, les cirques gigantesques, le métro à Cleveland (construit en 1913), les poutrelles des gratte-ciels, le linge aux fenêtres d’un immeuble à l’autre, la mafia dans le quartier italien et les règlements de compte, les majorettes (Pom-pom girls), le jazz, une parade (ticker-tape parade) à New York avec les bandelettes de papier, etc. Ce récit foisonne d’éléments, comme encore la relation avec le règne animal et son symbolisme (campagnol, jar, serpent, bouc, sauterelles, bisons, putois, éléphants, tigre), ou aussi l’évocation du troisième Reich et sa théorie de la suprématie de la race aryenne, avec Joseph Goebbels (1897-1945), Albert Speer (1905-1981) architecte, Adolf Hitler (1889-1945), Leni Riefenstahl (1902-2003) en train de tourner Les dieux du stade (1938, Olympia). Il faut peut-être un peu de temps pour que le lecteur s’adapte au parti pris de l’auteur, un récit entre biographie factuelle et conte. Il tombe immédiatement sous le charme de la narration visuelle, à la fois des dessins s’apparentant souvent à des illustrations magnifiques, à la fois dans les plans de prise de vue et les découpages. Il découvre le parcours de l’athlète, mis dans le contexte de l’oppression systémique s’exerçant sur les afro-américains. Splendide.

02/08/2025 (modifier)
Par Josq
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Sherlock Holmes contre Arsène Lupin
Sherlock Holmes contre Arsène Lupin

Je ne m'attendais pas forcément à grand-chose en ouvrant ce qui m'apparaissait comme une bande dessinée que je qualifierais de "facile". Et pourtant, quelle jolie surprise ! On est bien dans les standards du genre, et la facilité reste bien présente : on prend deux noms ultra-connus, on imagine un récit tirant vers le buddy movie tournant autour d'un artefact mystérieux et un peu mystique, et emballe tout ça dans un univers réaliste aux tonalités presque steampunk (sans y entrer totalement). Il n'y a là que du très connu, et avouons que Denis-Pierre Filippi ne s'éloigne jamais trop loin des sentiers battus. Mais je dois reconnaître qu'il sait nous offrir une variation qui, sans rien réinventer, nous balade plus qu'agréablement dans un univers plaisant. Le récit tient debout, et surtout, Filippi a fourni un très bel effort pour nous offrir un pastiche digne de ce nom. Ainsi, le pouvoir de déduction de Holmes est tout entier, et il nous offre avec Lupin quelques échanges particulièrement jouissifs. Le scénario fait la part belle aux particularités de ces deux héros (ainsi que de l'envahissant Mycroft Holmes), et on prend largement plaisir à alterner entre la rigueur déductive de Holmes et la chance insolente de Lupin (même si ce dernier n'a pas l'air mauvais non plus pour la déduction !). Les dialogues sont travaillés pour être vraiment élégants, mais ils le sont parfois presque trop. Certaines tournures un peu ampoulées ou le plaisir de faire durer une joute oratoire un peu trop longtemps ont tendance à alourdir la narration. Cela dit, le dessin de Roger Vidal est vraiment somptueux et d'une très grande clarté. Il rend certaines scènes d'action muettes avec une limpidité exemplaire, notamment une séquence sous-marine assez impressionnante. Il a l'élégance qui convient au récit et aux personnages, avec une touche de modernité pas déplaisante. A l'image d'une bande dessinée fort agréable à lire, qui n'invente pas l'eau chaude, mais ne prétend pas le faire, et se contente de mener son récit avec beaucoup de rigueur et de finesse. Croisons les doigts pour que le premier tome se vende bien pour avoir le droit à des suites qu'on espère au même niveau !

01/08/2025 (modifier)
Par Présence
Note: 4/5
Couverture de la série Maison Blanche - En coulisses avec Obama, Trump et Biden
Maison Blanche - En coulisses avec Obama, Trump et Biden

La marque présidentielle se décline sur une multitude de produits. - Ce tome contient un récit entre reportage et vulgarisation. Son édition originale date de 2024. Il a été réalisé par Jérôme Cartillier (correspondant à l’AFP à la Maison Blanche pendant sept ans) & Karim Lebhour (journaliste à Washington) pour le scénario, et par Aude Massot pour les dessins et la mise en couleurs. Il comprend cent-seize pages de bande dessinée. Il se termine par un dossier de huit pages présentant trente-deux photographies des trois présidents Obama, Trump et Biden. 1600 Pennsylvania Avenue, Washington, District of Columbia. Les touristes déambulent devant les grilles et admirent le bâtiment. Parmi eux, se trouvent Jérôme Cartillier, correspondant de l’AFP à la Maison Blanche, et Karim Lebhour, ancien journaliste installé à Washington, qui discutent ensemble, le premier commentant pour le second. Il explique que l’idée de génie de Theodor Roosevelt a été de la baptiser officiellement White House, ça sonne mieux que Executive Mansion. Il ajoute que son ami a bien choisi son jour : POTUS part en week-end dans le Delaware. Il explicite l’acronyme : President Of The United States. Et pour la First Lady : F.L.O.T.U.S., quand on travaille ici il faut s’y faire. Puis il lui propose d’aller voir le décollage de Marine One depuis le South Lawn. Il continue : Pendant les derniers mois de la présidence de Trump, il y avait des manifs tout le temps et des barrières partout, on ne pouvait plus approcher. Avec Biden c’est plus calme. Tout le monde prend des photos de la Résidence, mais la partie la plus intéressante c’est la West Wing, là-bas à droite, dit Jérôme en la désignant du doigt. C’est là que se trouvent le Bureau ovale et les proches collaborateurs du président. Et aussi la salle de presse et les bureaux des journalistes. La Maison Blanche - Bureau Ovale, Situation Room au sous-sol, points presse des visiteurs, Rose Garden, Dalle de Presse, bowling au sous-sol, salons diplomatiques, résidence privée du président, Sniper, lapin devenu célèbre parmi les journalistes, bunker au sous-sol, bureau de la Première Dame, agents du Secret Service, fontaine dont l’eau devient verte tous les ans le jour de la Saint-Patrick, vers Lafayette Square… Les deux amis sont accrédités et ils franchissent facilement le contrôle d’accès. Jérôme reprend : À l’Élysée personne ne rentre. On ne peut même pas s’arrêter sur le trottoir d’en face. La Maison Blanche est un lieu très protégé mais aussi très visité. Les Américains attachent une grande importance à la transparence du pouvoir. D’ailleurs, si on va au Capitole, l’accès est libre et ouvert à tous. Les rangées de caméras, là, on appelle ça Pebble Beach. Toutes les télés se mettent ici pour la vue imprenable sur le bâtiment de la Résidence. Là, c’est l’entrée de la West Wing. Le Marine en faction ? Ça veut dire que le président est dans le Bureau ovale. La présence permanente des journalistes à la Maison Blanche, au cœur du pouvoir est une exception américaine. Le sous-titre annonce explicitement la nature de l’ouvrage : un reportage embarqué dans la vie des journalistes à la Maison Blanche, avec des exemples pris dans l’exercice de trois présidents successifs : le quarante-quatrième, le quarante-cinquième et le quarante-sixième présidents des États-Unis, soit Barack Obama, Donald Trump et Joe Biden. Le récit passe en revue plusieurs facettes de la Maison Blanche : le bâtiment lui-même, l’histoire de sa construction, certains lieux spécifiques comme la salle James Bready (Briefing room, ou salle de presse), la pelouse sur laquelle se pose Marine One (l’hélicoptère présidentiel), la piscine que Franklin Delano Roosevelt a fait construire dans les années 1930 sous la salle de presse, le Bureau ovale et sa décoration, l’Aile Ouest (West Wing), l’avion présidentiel Air Force One (avec un schéma de son aménagement intérieur), l’organisation du convoi présidentiel (Presidential Motorcade), la balance des pouvoirs avec le Congrès et la Cour Suprême, et même un moment touristique à Stonehenge. Le lecteur apprécie vite les dessins. Comme souvent dans ce genre de documentaire ou de reportage, l’artiste adopte un registre descriptif un peu simplifié dans sa représentation, avec une gestion des détails allant vers l’essentiel, des personnages à la silhouette également simplifiée, et des expressions un peu exagérées. Cela aboutit à des pages immédiatement lisibles, apportant une forme d’équilibre avec la quantité d’informations. Sous des dehors simplifiés, les formes détourées rendent bien compte du sujet, dans ses différentes composantes. Sous certains aspects, la dessinatrice joue avec le fait que le lecteur sait ce qu’il va voir. Par exemple, elle peut compter sur le fait qu’il identifiera au premier coup d’œil Donald Trump avec une longue mèche blonde (même pas orange) et une cravate rouge. En effet, s’il s’y arrête, il peut constater que le dessin du visage de ce président est assez éloigné d’une photographie. Dans le même temps, sa gestuelle évoque le comportement massif et régulièrement agressif de ce monsieur. Elle sait également restituer l’élégance et la retenue de Barack Obama, sa gravité dans les moments difficiles, et sa gentillesse dans les moments de détente. Par comparaison, Joe Biden peut sembler un peu plus fade, portant le poids de l’âge de manière plus apparente. Sur le plan des détails et de la précision, par comparaison, la dessinatrice s’applique plus pour montrer l’architecture de la Maison Banche, les lieux rendus célèbres par les journaux télévisés, l’avion Air Force One, etc. Elle s’investit également pour les scènes historiques comme les cases consacrées à la construction de la Maison Blanche dans la double page cinquante et cinquante-et-un, ou le moment historique lorsque Trump franchit la frontière séparant la Corée du Sud de la Corée du Nord. Dans ce genre d’ouvrage didactique, il est fréquent que le scénariste (ou ici, les scénaristes) livre un texte clé en main, charge au dessinateur de l’illustrer comme il peut pour en faire une bande dessinée dans laquelle les cases présentent un intérêt visuel, sans redondance avec les informations contenues dans les cellules de texte. Ici, le lecteur peut constater que l’ouvrage constitue une véritable bande dessinée, avec des séquences pensées visuellement, et une diversité dans la mise en page. C’est une évidence dès le dessin en double page (six & sept) : une vue aérienne de la Maison Blanche en perspective isométrique pour faire comprendre l’agencement des bâtiments et leur positionnement relatif les uns par rapport aux autres. Les auteurs font à nouveau usage de ce mode de représentation pour l’aménagement du Bureau ovale, ainsi que pour Air Force One, avec une vue en coupe. Le lecteur commence par accompagner les deux journalistes qui sont mis en scène par le biais de leur avatar. Bien vite, il regarde autour de lui par leur regard, assistant ainsi au décollage de l’hélicoptère Marine One : il assiste ainsi au départ de Joe Biden, puis à celui de Barack & Michelle Obama traversant la pelouse, puis à Trump apostrophant la presse à sa manière inimitable. En page dix-neuf, il découvre des fac-similés de personnes s’étant photographiées au pupitre de la salle de presse. Un dessin en pleine page le prend par surprise page vingt-trois : Sean Spicer (après ses excès de faits alternatifs) lors de sa prestation dans Dancing with the stars ! En passant, il remarque que la représentation de Kellyanne Conway manque un peu de ressemblance. Les cases de la double page consacrée à la construction de la Maison Blanche sont disposées en cercle autour de l’image centrale. Une même image est répétée dix-huit fois en page quatre-vingt pour souligner que Trump fait durer le plaisir de savourer un moment historique quand il a franchi la frontière entre les deux Corée. Etc. Il s’agit d’une vraie bande dessinée conçue comme telle, en tirant partie des possibilités de mise en scène qui lui sont spécifiques. De séquence en séquence, le lecteur apprécie le jeu des différences entre le comportement des trois présidents pour des situations similaires. Le regard des auteurs s’avère analytique, faisant ressortir ce qu’il y a de spécifique chez chacun d’eux, la manière dont la communication présidentielle est adaptée à leur personnalité propre, une évidence chez Donald Trump, ce qui fait apparaître les spécificités pour les deux autres. La trame de l’exposé comporte dès le début des éléments culturels allant plus loin que le reportage touristique. Pour commencer, le fait que la Maison Banche soit ouverte aux visiteurs, principe très différent de l’Élysée. Ensuite la proximité des journalistes qui disposent donc de bureaux dans le siège du pouvoir. Le rôle de la White House Correspondents Association (WHCA) : Aux États-Unis comme ailleurs, le combat pour l’accès à l’information n’est jamais gagné d’avance, et c’est une bataille que mène quotidiennement la White House Correspondents Association (WHCA). Cette association centenaire travaille sans relâche pour maintenir une véritable proximité avec le président américain, que ce soit à Washington ou lors de ses déplacements. À la moindre entorse, la WHCA réagit avec vigueur, et grâce à son influence obtient souvent gaine de cause. La mise en scène du pouvoir : dans la salle de presse ou dans le Bureau ovale, en fonction des annonces. Progressivement, d’autres mécanismes sont mis en lumière. La comparaison entre le comportement des trois présidents fait apparaître le professionnalisme des communicants, et la maîtrise des présidents en la matière. Le lecteur ressent vite le respect que les auteurs portent à Obama, et le regard plus critique vis-à-vis de Trump, ne serait-ce que parce que celui-ci a clamé haut et fort et à plusieurs reprises dès son premier mandat, sa défiance à l’encontre des journalistes. Le lecteur comprend également que les différentes formes de communication sont encadrées par des professionnels aguerris, aussi bien du côté présidentiel, que du côté des journalistes : ainsi les informations et les reportages dépendent aussi bien de l’orientation choisie par un côté, que de l’autre. En passant, il note bien que les journalistes des grandes agences internationales présents à la Maison Blanche relaient les informations à leurs clients, c’est-à-dire les médias du monde entier qui n’ont pas de correspondant sur place, et qui compte sur eux pour une couverture exhaustive de la présidence américaine, quelle que soit l’heure. Les auteurs reprennent également une phrase d’Obama : Le danger de la Maison Blanche est de se laisser enfermer dans une bulle, c’est difficile de ne pas se sentir déconnecté. Les auteurs mettent en pleine lumière l’exception américaine dans le mode relationnel de la présidence avec la presse, le haut degré de conventions professionnelles dans cette relation, et dans le même temps la nature profondément démocratique de ce fonctionnement. La quatrième de couverture décrit bien la nature de l’ouvrage : la Maison Blanche et les relations du président des États-Unis avec les journalistes au travers de la salle de presse installée dans West Wing. Les auteurs ont travaillé ensemble ce qui donne une vraie bande dessinée, avec une complémentarité et une interaction organique entre les dessins, le texte, les dialogues. Le lecteur retrouve les éléments qui lui sont familiers au travers des informations télévisées et des séries. La succession de scène forme une description de ces relations, ainsi qu’une analyse comparative du mode de communication des trois présidents, et il finit aussi par apparaître comment ce dispositif de communication forge une représentation de la réalité diffusée à travers le monde. Édifiant.

31/07/2025 (modifier)
Par Gaston
Note: 4/5
Couverture de la série Racines (Delcourt)
Racines (Delcourt)

Lou Lubie montre encore une fois qu'elle est une autrice à suivre avec ce one-shot qui parle d'une métisse qui n'aime pas ses cheveux. Cela a l'air d'un scénario bateau et on peut se demander comment on peut faire un album avec ce pitch, mais Lubie sait comment raconter une histoire et surtout il y a un coté documentaire très passionnant. Parce que oui, ce n'est pas qu'une énième histoire sur une jeune mal dans sa peau, on voit que derrière les coupes de cheveux, il y a des éléments plus glauques comme du racisme et les préjugés sur les différentes coupes de cheveux... Il y a des informations très intéressantes et il faut dire que je n'avais pas réalisé plusieurs choses décrites dans l'album. Il faut dire que je suis un homme qui a la même coupe de cheveux depuis qu'il est tout de petit et qui va se faire une coupe rasée terminée en 5 minutes chez le coiffeur..... On peut donc dire que les cheveux ne font pas parti des sujets qui me passionnent, je suis même indifférent à cette partie de mon corps (tellement que je pense que j'en aurais rien à foutre si je devenais chauve !), mais Lubie a réussit à rendre ce sujet captivant pour moi ! Il faut dire qu'elle traite aussi de sujets qui m’intéressent comme la discrimination ordinaire de notre société... Comme quoi même un truc qui semble quelconque comme les coupes de cheveux peut cacher des choses si on creuse un peu ! Ajoutons que le dessin est très bon. Je vais continuer à suivre Lubie, surtout que chacune de ses œuvres est différente de l'autre.

30/07/2025 (modifier)
Par PAco
Note: 4/5
Couverture de la série Walking Dead - Clementine
Walking Dead - Clementine

Je ne connais pas le jeux vidéo dont est tiré cette série et c'est la première série de Tillie Walden que je lis. J'avoue ne pas avoir été emballé plus que ça par ce premier tome qui nous propose de suivre la jeune Clémentine dans ce monde post apocalypse où les zombies pullulent (walkind dead quoi !). Déjà, l'introduction qui nous montre la fuite de Clémentine abandonnant le jeune AJ (si j'ai bien suivi c'est pour faire la transition entre la fin du jeu et le récit qui va suivre), franchement, ça paraît déjà peu vraisemblable ; allez hop ! Je me tire en abandonnant mon jeune meilleur pote pour aller "vivre ma vie" ! Quand on réalise en plus que notre Clémentine est amputée d'un pied et qu'elle caracole en béquille en milieu hostile (et je vous parle même pas de la neige qu'elle va affronter après !), on lui donne quand même des chances de survies toutes relatives... Mais bon, passé ce gros bémol, on la suit ensuite pour un périple audacieux. Elle croise le chemin d'un jeune Hamish très naïf et décide de faire un bout de chemin avec lui. C'est comme ça qu'il vont rencontrer un groupe d'ados qui a décidé de construire en haut d'une station de ski un camp pour se mettre à l'abri des zombies. Rien de très original, de nouveau ; l'intérêt va venir de la psychologie de ce groupe d'ados, heureusement. Côté dessin, si je ne suis pas particulièrement fan du coup de crayon de Tillie Walden, j'avoue apprécier les ambiances qu'elle arrive à poser. C'est sombre et angoissant à souhait pour un tel sujet. Je suivrai la suite plus par curiosité que par addiction. (note réelle : 2.5/5) *** Tome 2 *** Et bien comme quoi des fois il faut persévérer ! J'ai fini ce second volet en passant largement par dessus les réserves que j'avais émis après ma lecture du tome 1. Car c'est vrai qu’elle est attachante cette Clémentine. Faut dire qu'elle en bave ! Après leur fuite des montagnes, c'est cette fois sur une île que notre petite troupe va se poser pour nous proposer un quasi "huis-clos" sur ce nouvel Eden espéré. Et on a envie d'y croire pour eux... Mais forcément, rien ne se passe jamais comme espéré et nos ados vont encore en baver ! C'est l'occasion de découvrir de nouveaux personnages auxquels on s'attache, mais qui, comme souvent dans walking dead, ne feront pas tous de vieux os... Le tragique est toujours au rendez-vous ! Pour le coup, j'ai aussi du m'habituer au coup de crayon de Tillie Walden car j'ai d'autant plus apprécié son travail et surtout les ambiances qu'elle pose au fil des planches. C'est toujours aussi sombre, vaporeux et angoissant : parfait pour ce récit ! Il me reste maintenant à attendre la suite avec une certaine impatience ! (Je monte ma note à 4/5) *** Tome 3 *** Et bam, c'est fini ! Je l'avais pas vu venir ! Car oui, ce 3e tome clos cette trilogie, mais perso, je n'avais pas fait attention que cet opus clôturait la série (je ne lis jamais les 4e de couverture, j'ai toujours peur du spoil). Du coup, oui, pourquoi pas, mais j'avoue que je commençait tout juste à apprécier de retrouver nos grands ados régulièrement et que ce troisième tome n'amène pas de fin "catégorique" ; le récit pourrait très bien se poursuivre et leurs aventures prendre de nouveaux chemins de traverses. En attendant, Clémentine a encore fort à faire dans ce dernier opus. Après avoir du fuir l'île où ils s'étaient réfugiés, nos ados se retrouvent du côté du Groenland dans une petite ville qui a su réinstaurer un minimum de civilisation et d'ordre social. Une école existe, chacun doit s'impliquer et aider la communauté et une faction armée gère la défense du village. C'est de ce côté que les choses vont vriller : l'égo et le pouvoir menant comme toujours notre espèce vers le pire... Tillie Walden clos sa série de façon un peu abrupte, mais peut-être cela vaut-il mieux que de laisser trainer une série qui perdrait de sa superbe au fil des tomes. Une série qui aura su me conquérir au fil des tomes et que je recommande donc.

08/12/2023 (MAJ le 30/07/2025) (modifier)
Par Blue boy
Note: 4/5
Couverture de la série Dans ses yeux
Dans ses yeux

Si cela n’est pas clairement mentionné, « Dans ses yeux » est bien un récit autobiographique de Marc Cuadrado, qui prouve d’une certaine manière que celui-ci a choisi de se mettre en retrait par rapport à son épouse Tanie, au cœur de ce témoignage. S’il paraît évident que lui-même représente un soutien essentiel pour sa compagne, on ne peut s’empêcher de rester admiratif devant le courage et la volonté de cette dernière. Et de la volonté, elle en a à revendre, grâce à un caractère bien trempé qui ne lui fait jamais renoncer à ses projets malgré les obstacles. Dans ce recueil de tranches de vie, chaque anecdote révèle comment ce handicap visuel peut compliquer le quotidien, dans les détails les plus insignifiants : régler le four à la bonne température, choisir un vêtement à sa taille, jouer d’un instrument, lire des histoires à ses petits-enfants… mais il en faudrait plus pour décourager Tanie, qui avait décidé, depuis la perte de son œil droit à l’adolescence, de prendre son destin en main grâce aux paroles de son chirurgien. D’ailleurs, on vient de lui proposer de donner des conférences sur l’art moderne, ce qui la remplit de joie, au grand dam de Marc qui tend parfois à s’inquiéter plus que nécessaire. Ce qu’on apprécie particulièrement, c’est que non seulement Marc Cuadrado évite tout pathos dans sa narration (et Tanie aurait forcément désapprouvé l’inverse !), mais en plus il réussit à injecter une bonne dose d’humour en relatant les petites chamailleries émaillant le quotidien de ce couple de sexagénaires. Et ce que l’on retient au final, c’est une immense tendresse pour sa compagne, et que celle-ci est réciproque. On retiendra cette scène significative à la sortie d’une consultation médicale concernant un problème bénin au genou, notre Marc en quête d’empathie s’offusque de l’ironie de Tanie. Celle-ci se contente d’affirmer que « le handicap [l’]a rendue plus forte face à l’adversité », et, afin de le réconforter, lui assure qu’elle sera « toujours forte pour deux ». Le dessin semi-réaliste de Cuadrado, dans sa simplicité descriptive, s’attarde davantage sur les personnages, leurs attitudes et leurs expressions. C’est très efficace, révélant une certaine maîtrise de l’auteur pour ce registre. Pourtant, hormis ses strips divers (« Parker et Badger » et une série sur le monde des motards publiée avec Margerin, « Je veux une Harley »…), des ouvrages collectifs et d’autres productions plus ou moins confidentielles, on ne peut pas dire que ce bédéiste a publié énormément. En modifiant radicalement son champ d’action, sans toutefois renoncer à ses « facéties », il démontre avec ce récit qu’il n’a pas eu tort d'essayer. « Dans ses yeux » est un portrait touchant, avec un parfait dosage entre humour et gravité. Une lecture riche d’enseignements, qui nous invite, nous les « bien-voyants », à nous mettre à la place de quelqu’un souffrant de troubles de la vision. Par un effort empathique, chacun saura relativiser ses petites douleurs et ses petits tracas, forcément très éloignés de ce type de handicap, et peut-être passer outre, afin de mieux « prendre son destin en main ».

26/07/2025 (modifier)