Le contexte historique de cette BD est intéressant : les semaines précédant la guerre civile du Liban de 1975. On observe les tensions inter-ethniques et religieuses au travers les yeux d’une famille d’égyptiens immigrés ne se sentant pas du tout concernés par les évènements. Ce détachement renforce le sentiment d’incrédulité de la population, qui espère que les tensions vont s’apaiser.
Concrètement, la narration se concentre sur le quotidien des membres de la famille, leurs boulots, leurs sorties au cinéma, leurs relations amoureuses, la librairie du papa etc… il s’agit donc plus d’un roman graphique sur fond de tensions politiques, plutôt que d’une BD historique/documentaire sur le sujet. Le ton est très humain, bon-vivant, joie de vivre etc.
La mise en image est élégante, même si j’aurais personnellement préféré un peu plus de détails et de couleurs sur les paysages Libanais, que l’on nous décrit comme magnifiques dans la BD.
Une lecture instructive et agréable.
Our summer holiday est une gentille chronique d’un été pas comme les autres pour un jeune adolescent de 11 ans qui fait la découverte de l’amour alors que rien ne l’y prédisposait. Il est passionné par le football mais il traîne de lourdes casseroles liées à un passé un peu douloureux.
En effet, il a perdu son père suite à une maladie dans sa jeunesse. Il vit seul avec sa mère qui fait tout pour s’en sortir. Il se rendra compte qu’il y a malheureusement encore pire comme situation. Il va faire la connaissance de la belle et gracieuse Rio qui est pourtant mise à la marge par les élèves de l’école.
Le graphisme est tout à fait avenant et soigné. L’enchaînement des cases est naturel. Il n’y a pas d’accroc ni d’incohérence. Cela rend la lecture assez agréable.
La fin tout en émotion sera très touchante. On ressent néanmoins de la tristesse et de la mélancolie. Une belle lecture pour un été.
Je n'ai pas mis culte en note par rapport à la règle des commentaires, mais pour moi, elle l'est !
Certes, le dessin des années 70 est un peu désuet mais aucunement gênant. De plus, il nous plonge involontairement dans le passé du dessin de manga, ce que j'ai trouvé plutôt agréable.
Historiquement passionnant et sinistre, une plongée dans le quotidien de l'après bombe à Hiroshima.
Une histoire terrible qui m'a fait verser plusieurs fois des larmes devant cette monstruosité qu'est une bombe atomique. Aucune autre BD ne m'a fait cet effet.
Et malgré toute cette horreur, c'est l'optimisme de Gen (l'auteur) qui domine le récit. La parabole du blé que lui comptait son père germe et mûrit en lui tout au long de ces cruelles épreuves.
Une histoire émouvante pour une leçon de vie admirable (je vous le disais en introduction:culte pour moi ! ;) )
« In Waves » est un voyage dans le monde du surf et dans l’intimité, l’amour puis le deuil d’AJ Dungo pour Kristen, fauchée par le cancer.
Une véritable émotion se dégage de ce roman graphique, page après page. Malgré le caractère éminemment personnel du scénario, l’auteur parvient à garder une grande pudeur tout en faisant preuve d’une honnêteté qui force le respect. Pour écrire « In Waves », AJ Dungo se livre et a forcément dû mettre ses tripes sur la table. Parvenir à le faire avec tant de classe et une telle douceur, malgré la violence du sujet traité, a dû lui demander un immense travail d’introspection et du recul. Tout cela n’est pas sans me rappeler le fameux Pilules bleues de Frederik Peeters, la poésie en plus.
La trame narrative mêle habilement l’histoire personnelle de Kristen et AJ et l’histoire du surf, notamment par les biographies de Duke Kahanamoku et Tom Blake, légendes de ce sport. Si ce mélange peut sembler étonnant, voire superficiel, au début de l’album, les liens entre l’autobiographie et le surf se resserrent peu à peu jusqu’à devenir une évidence.
À ce propos, la citation qui suit, directement tirée de l’album, résume parfaitement le parallèle qu’AJ Dungo tire entre le deuil et l’océan :
« Cela vient par vague. C’est une réponse un peu lapidaire, mais juste. Le vide est constant. Mais le chagrin du deuil n’a pas de forme propre. Il va et il vient. Il demeure imprévisible. Il naît d’une tempête au loin, au plus profond de l’océan, à l’abri des regards, en faisant gronder les flots. Il surgit, canalisé, concentré, se forme, se précipite, chargeant toute sa force avant d’atteindre le point de rupture. Il croît jusqu’à ne plus pouvoir tenir sa forme. Il devient instable et s’effondre. Il finit par se répandre en une surface uniforme et calme. Et puis l’eau se retire, avant que la vague ne se reforme à nouveau. (…) Il faut surfer. »
Cet album n’est pas seulement une réussite scénaristique. Il est également un succès graphique. Quel talent, quelle souplesse et quelle force malgré la simplicité et la douceur du trait, presque liquide. Les planches s’enchaînent avec une homogénéité et une fluidité qui rappellent l’eau. Cela commence déjà avec la fort jolie couverture et se confirme tout au long de l’album. Quant à la mise en couleur, là encore c’est une réussite, avec le sépia pour l’histoire du surf et le bleu pour la partie autobiographique.
« In Waves » est un coup de cœur et sans doute l’un des albums les plus marquants de l’année 2019. Plusieurs heures après sa lecture, j’en suis encore imprégné…
Luc Brunschwig ne s'en cache pas, cet album n'aurait pas pu exister sans le Photonik de Ciro Tota, super héros qui paraissait dans le magazine Mustang aux éditions Lug.
Pour cette série, le scénariste opte pour un principe qui a fait ses preuves : le trio de héros. Le jeune garçon noir qui travaille dans un cirque et doté certainement d'un don, le jeune bossu et le vieil homme ancien scientifique dont l'accent et le jurons pourraient laisser supposer qu'il était un scientifique sous un régime qui s'est arrêté en 1945.
La force de ce premier tome est qu'il prend son temps pour nous faire découvrir les personnages. Cette "lenteur" aide d'ailleurs à nous mettre en empathie avec eux. Les psychologies sont fouillées, aidées en cela par le dessin réaliste de Stéphane Perger. L'album, construit en cinq chapitres, utilise des flash-back dessinés en bichromie qui fluidifient le récit.
Quoiqu'il en soit le récit aborde des thèmes multiples mais sans jamais perdre le lecteur ; amitié, vengeance, ségrégation et expériences gouvernementales secrètes.
Pour ma part, voilà un premier tome alléchant qui laisse augurer du meilleur pour la suite. J'ai entièrement confiance dans les capacités de Luc Brunschwig à nous raconter une histoire, en saluant également le remarquable travail de son dessinateur Stéphane Perger que j'avais découvert avec son boulot sur Sequana et Dark Museum.
Évidement à lire et à faire tourner sans modération.
Tenter de concilier récit cohérent et érotisme est souvent peu facile, l'un prend parfois le pas sur l'autre, mais ici, chapeau ! les auteurs livre une intrigue consistante tout en n'étant pas avare de scènes hot. Manoeuvres politiques, complots, violence, meurtres, sexe, ce sont des éléments qui composaient la société romaine dans l'Antiquité. Bon, j'avoue que ce scénario n'est pas neuf, j'ai vu ce genre de mix dans le cinéma bis italien, très friand dans les années 70 et 80 de revisiter son histoire romaine, mais comme je disais, ce scénario est suffisamment consistant et captivant pour qu'on s'y intéresse, car il fait corps si j'ose dire, avec les scènes de sexe. Les orgies romaines étaient inévitables dans un tel sujet.
Le grand intérêt de cette Bd, c'est bien évidemment le dessin de Guenet dont j'ai déjà dit du bien ailleurs. J'avais en effet été époustouflé par la qualité de son rendu quasi hyperréaliste sur Orks, série que j'avais beaucoup appréciée, et j'avais souligné déjà la formidable plastique de ses personnages. Ici, il trouve un terrain propice pour exprimer la beauté des corps tant masculins que féminins, les mecs ont tous la tablette de chocolat et les femmes sont de vraies bombasses hyper bien gaulées. Il était temps même que Guenet aborde la BD érotique et historique après la fantasy sur Orks et plus anciennement Dedal, la légende du roi barbare, un ovni foutraque où il se faisait la main mais qui déjà laissait entrevoir son style.
J'ai aussi signalé que son dessin atteignait une telle puissance graphique que ça ressemblait à du Corben ; et là sur "Inguinis", on y retrouve les mêmes composants graphiques, l'expressivité des personnages, l'exagération des corps, les anatomies, la palette de couleurs sont très voisines. Donc Guenet est un auteur à suivre, et je me réjouis d'avance de lire la suite de cette série. Encore une belle réussite de l'éditeur Tabou.
Le Royaume de Blanche-Fleur est un one-shot se déroulant dans l'univers de la série Le Royaume et mettant en scène les mêmes protagonistes mais il peut se lire sans connaître cette dernière. En effet, l'auteur prend soin de créer là une histoire complète et indépendante, avec une vraie présentation du contexte et des personnages pour les lecteurs qui ne connaîtraient pas du tout la série initiale de Benoit Féroumont. Et en même temps, cet album peut aussi être considéré comme une conclusion en apothéose de cette série.
Cela commence en racontant des événements ayant eu lieu une vingtaine d'années avant les aventures humoristiques d'Anne l'aubergiste et du brave François. C'est l'histoire d'un royaume vassal écrasé par son cruel suzerain et dont la princesse, encore tout bébé, est sauvée de la mort et doit être cachée ailleurs. Et vingt ans après, nous retrouvons le cadre du petit royaume des Six-ponts et de sa population bon enfant. Sauf que les jalousies de la Reine et d'une rivale envers Anne, la tenancière de taverne trop indépendante, vont entraîner tout le monde dans un complot de grande envergure.
C'est une aventure de grand divertissement, puisant dans les contes de fées classiques de princesse héritière et les histoires plus martiales d'espionnage et d'invasion par une armée étrangère, tout en offrant toujours le côté léger et prompt à l'humour de Benoit Féroumont. Les protagonistes de sa série Le Royaume sont ici tous exploités à leur plein potentiel, et comme l'auteur sait qu'il va nous offrir ici un récit clé, peut-être la conclusion définitive de son petit univers, il n'hésite pas à rebattre les cartes et à changer la donne.
C'est amusant, même si moins humoristique que la série initiale puisque davantage orienté vers l'aventure et l'action. L'intrigue est bien menée et prenante, quoiqu'on se doute rapidement de comment tout cela va se finir. Et l'ensemble est toujours si bien servi par le graphisme de Benoit Féroumont, lumineux, prompt à amener le sourire et nous offrant par-ci par-là quelques grands dessins en une page qui sont de très belle facture.
Un très bon moment à passer ! Et pour ceux qui l'ont lue, c'est aussi une conclusion excellente à la série Le Royaume.
C’est typiquement le genre de lecture de bd que j’aime bien et dans un domaine que j’affectionne à savoir le thriller financier. Il est vrai que le monde des banques est impitoyable. Il faut respecter la règlementation mais tout semble fait pour la contourner. On peut même y être encouragé subtilement par ses responsables qui ne veulent pas se mouiller.
J’ai bien aimé l’entrée en matière puis la suite qui tient véritablement la route. Le scénario est réellement bien maîtrisé. Par ailleurs, le dessin assez classique est d’une très grande visibilité. La lecture a été très agréable. Bonne idée également que de reprendre le thème de la vengeance façon Comte de Monte-Cristo dans une version plus moderne sur fond de complot boursier.
A noter que le héros de cette série ne sera ni un Largo Winch, ni un Larry B. Max ce qui change un peu avec ces standards. C’est une série que j’ai bien aimé. Pour autant, son évolution notamment au tome 9 ne m’a pas beaucoup plu car on s’éloigne du monde de la finance. Je pense qu’il aurait fallu clore la série bien avant.
Cela fait bien un petit moment que je n'avais pas autant aimé une série composée de gags en une planche. Habituellement, je trouve qu'au mieux les gags font sourire alors qu'ici j'ai rigolé plusieurs fois et même lorsque je ne rigolais pas, cela ne me dérangeais pas parce que j'aime vraiment l'ambiance qui se dégage de l'album.
Les auteurs ont créé des personnages attachants et les relations entre eux sont bien exploitées. On retrouve l'humour de Trondheim qui fait mouche et il y a même des moments qui m'ont touché. Je trouve que le scénariste est vraiment à son meilleur lorsque les personnages (surtout la petite fille) font des réflexions. Le dessin est très bon. C'est dans un style à gros nez dynamique et un peu personnel comme je l'aime. Les couleurs sont très bien choisies aussi.
Bref, un très bon divertissement en ce qui me concerne et j'espère qu'il y aura d'autres tomes !
Je ne m'attendais pas à autant accrocher à cette série. C'est de la pure heroïc-fantasy au sens très classique du terme, celle d'un Robert E. Howard et de son Conan le Barbare avec des hommes et des femmes aux corps dénudés et sculpturaux, de l'action, de la magie, du sexe et du sang. Le cadre s'inspire de la mythologie celtique mais lui donne un souffle nettement plus épique et plus violent, avec une grande part de tragédie mythique dans ce conte à l'issue que d'emblée on devine fatale .
Sur la forme et dans l'esprit, cela rappelle grandement la série Sláine. Le héros et son frère lui ressemblent même parfois comme deux gouttes d'eau.
Le graphisme est assez grandiose dans le sens où il offre des planches spectaculaires, comme de grands tableaux, beaux et soignés. Le style rappelle donc souvent de Simon Bisley pour Sláine mais aussi celui de Frazetta pour ses guerriers et guerrières à demi-nues, et parfois un peu celui de H.R. Giger pour certaines formes rappelant les créatures de l'inventeur d'Alien.
Sur le fond, c'est une fresque épique et dramatique. Comme dans nombre de récits mythologiques et de légendes, les protagonistes principaux sont présentés immédiatement comme au-dessus du lot, de quasi demi-dieux qui ne demandent qu'à dominer le peuple, bâtir des empires et à s'affronter dans de grandioses confrontations. Et même si l'on sait que ça va finir dans le drame, l'intrigue prend bien des chemins détournés et inattendus pour nous mener à sa conclusion.
Ce parti-pris de la fresque mythologique grandiose et sérieuse a su me séduire et m'accrocher du premier jusqu'au dernier tome.
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La Guerre des autres
Le contexte historique de cette BD est intéressant : les semaines précédant la guerre civile du Liban de 1975. On observe les tensions inter-ethniques et religieuses au travers les yeux d’une famille d’égyptiens immigrés ne se sentant pas du tout concernés par les évènements. Ce détachement renforce le sentiment d’incrédulité de la population, qui espère que les tensions vont s’apaiser. Concrètement, la narration se concentre sur le quotidien des membres de la famille, leurs boulots, leurs sorties au cinéma, leurs relations amoureuses, la librairie du papa etc… il s’agit donc plus d’un roman graphique sur fond de tensions politiques, plutôt que d’une BD historique/documentaire sur le sujet. Le ton est très humain, bon-vivant, joie de vivre etc. La mise en image est élégante, même si j’aurais personnellement préféré un peu plus de détails et de couleurs sur les paysages Libanais, que l’on nous décrit comme magnifiques dans la BD. Une lecture instructive et agréable.
Our Summer Holiday
Our summer holiday est une gentille chronique d’un été pas comme les autres pour un jeune adolescent de 11 ans qui fait la découverte de l’amour alors que rien ne l’y prédisposait. Il est passionné par le football mais il traîne de lourdes casseroles liées à un passé un peu douloureux. En effet, il a perdu son père suite à une maladie dans sa jeunesse. Il vit seul avec sa mère qui fait tout pour s’en sortir. Il se rendra compte qu’il y a malheureusement encore pire comme situation. Il va faire la connaissance de la belle et gracieuse Rio qui est pourtant mise à la marge par les élèves de l’école. Le graphisme est tout à fait avenant et soigné. L’enchaînement des cases est naturel. Il n’y a pas d’accroc ni d’incohérence. Cela rend la lecture assez agréable. La fin tout en émotion sera très touchante. On ressent néanmoins de la tristesse et de la mélancolie. Une belle lecture pour un été.
Gen aux pieds nus (Gen d'Hiroshima)
Je n'ai pas mis culte en note par rapport à la règle des commentaires, mais pour moi, elle l'est ! Certes, le dessin des années 70 est un peu désuet mais aucunement gênant. De plus, il nous plonge involontairement dans le passé du dessin de manga, ce que j'ai trouvé plutôt agréable. Historiquement passionnant et sinistre, une plongée dans le quotidien de l'après bombe à Hiroshima. Une histoire terrible qui m'a fait verser plusieurs fois des larmes devant cette monstruosité qu'est une bombe atomique. Aucune autre BD ne m'a fait cet effet. Et malgré toute cette horreur, c'est l'optimisme de Gen (l'auteur) qui domine le récit. La parabole du blé que lui comptait son père germe et mûrit en lui tout au long de ces cruelles épreuves. Une histoire émouvante pour une leçon de vie admirable (je vous le disais en introduction:culte pour moi ! ;) )
In Waves
« In Waves » est un voyage dans le monde du surf et dans l’intimité, l’amour puis le deuil d’AJ Dungo pour Kristen, fauchée par le cancer. Une véritable émotion se dégage de ce roman graphique, page après page. Malgré le caractère éminemment personnel du scénario, l’auteur parvient à garder une grande pudeur tout en faisant preuve d’une honnêteté qui force le respect. Pour écrire « In Waves », AJ Dungo se livre et a forcément dû mettre ses tripes sur la table. Parvenir à le faire avec tant de classe et une telle douceur, malgré la violence du sujet traité, a dû lui demander un immense travail d’introspection et du recul. Tout cela n’est pas sans me rappeler le fameux Pilules bleues de Frederik Peeters, la poésie en plus. La trame narrative mêle habilement l’histoire personnelle de Kristen et AJ et l’histoire du surf, notamment par les biographies de Duke Kahanamoku et Tom Blake, légendes de ce sport. Si ce mélange peut sembler étonnant, voire superficiel, au début de l’album, les liens entre l’autobiographie et le surf se resserrent peu à peu jusqu’à devenir une évidence. À ce propos, la citation qui suit, directement tirée de l’album, résume parfaitement le parallèle qu’AJ Dungo tire entre le deuil et l’océan : « Cela vient par vague. C’est une réponse un peu lapidaire, mais juste. Le vide est constant. Mais le chagrin du deuil n’a pas de forme propre. Il va et il vient. Il demeure imprévisible. Il naît d’une tempête au loin, au plus profond de l’océan, à l’abri des regards, en faisant gronder les flots. Il surgit, canalisé, concentré, se forme, se précipite, chargeant toute sa force avant d’atteindre le point de rupture. Il croît jusqu’à ne plus pouvoir tenir sa forme. Il devient instable et s’effondre. Il finit par se répandre en une surface uniforme et calme. Et puis l’eau se retire, avant que la vague ne se reforme à nouveau. (…) Il faut surfer. » Cet album n’est pas seulement une réussite scénaristique. Il est également un succès graphique. Quel talent, quelle souplesse et quelle force malgré la simplicité et la douceur du trait, presque liquide. Les planches s’enchaînent avec une homogénéité et une fluidité qui rappellent l’eau. Cela commence déjà avec la fort jolie couverture et se confirme tout au long de l’album. Quant à la mise en couleur, là encore c’est une réussite, avec le sépia pour l’histoire du surf et le bleu pour la partie autobiographique. « In Waves » est un coup de cœur et sans doute l’un des albums les plus marquants de l’année 2019. Plusieurs heures après sa lecture, j’en suis encore imprégné…
Luminary
Luc Brunschwig ne s'en cache pas, cet album n'aurait pas pu exister sans le Photonik de Ciro Tota, super héros qui paraissait dans le magazine Mustang aux éditions Lug. Pour cette série, le scénariste opte pour un principe qui a fait ses preuves : le trio de héros. Le jeune garçon noir qui travaille dans un cirque et doté certainement d'un don, le jeune bossu et le vieil homme ancien scientifique dont l'accent et le jurons pourraient laisser supposer qu'il était un scientifique sous un régime qui s'est arrêté en 1945. La force de ce premier tome est qu'il prend son temps pour nous faire découvrir les personnages. Cette "lenteur" aide d'ailleurs à nous mettre en empathie avec eux. Les psychologies sont fouillées, aidées en cela par le dessin réaliste de Stéphane Perger. L'album, construit en cinq chapitres, utilise des flash-back dessinés en bichromie qui fluidifient le récit. Quoiqu'il en soit le récit aborde des thèmes multiples mais sans jamais perdre le lecteur ; amitié, vengeance, ségrégation et expériences gouvernementales secrètes. Pour ma part, voilà un premier tome alléchant qui laisse augurer du meilleur pour la suite. J'ai entièrement confiance dans les capacités de Luc Brunschwig à nous raconter une histoire, en saluant également le remarquable travail de son dessinateur Stéphane Perger que j'avais découvert avec son boulot sur Sequana et Dark Museum. Évidement à lire et à faire tourner sans modération.
Inguinis
Tenter de concilier récit cohérent et érotisme est souvent peu facile, l'un prend parfois le pas sur l'autre, mais ici, chapeau ! les auteurs livre une intrigue consistante tout en n'étant pas avare de scènes hot. Manoeuvres politiques, complots, violence, meurtres, sexe, ce sont des éléments qui composaient la société romaine dans l'Antiquité. Bon, j'avoue que ce scénario n'est pas neuf, j'ai vu ce genre de mix dans le cinéma bis italien, très friand dans les années 70 et 80 de revisiter son histoire romaine, mais comme je disais, ce scénario est suffisamment consistant et captivant pour qu'on s'y intéresse, car il fait corps si j'ose dire, avec les scènes de sexe. Les orgies romaines étaient inévitables dans un tel sujet. Le grand intérêt de cette Bd, c'est bien évidemment le dessin de Guenet dont j'ai déjà dit du bien ailleurs. J'avais en effet été époustouflé par la qualité de son rendu quasi hyperréaliste sur Orks, série que j'avais beaucoup appréciée, et j'avais souligné déjà la formidable plastique de ses personnages. Ici, il trouve un terrain propice pour exprimer la beauté des corps tant masculins que féminins, les mecs ont tous la tablette de chocolat et les femmes sont de vraies bombasses hyper bien gaulées. Il était temps même que Guenet aborde la BD érotique et historique après la fantasy sur Orks et plus anciennement Dedal, la légende du roi barbare, un ovni foutraque où il se faisait la main mais qui déjà laissait entrevoir son style. J'ai aussi signalé que son dessin atteignait une telle puissance graphique que ça ressemblait à du Corben ; et là sur "Inguinis", on y retrouve les mêmes composants graphiques, l'expressivité des personnages, l'exagération des corps, les anatomies, la palette de couleurs sont très voisines. Donc Guenet est un auteur à suivre, et je me réjouis d'avance de lire la suite de cette série. Encore une belle réussite de l'éditeur Tabou.
Le Royaume de Blanche-Fleur
Le Royaume de Blanche-Fleur est un one-shot se déroulant dans l'univers de la série Le Royaume et mettant en scène les mêmes protagonistes mais il peut se lire sans connaître cette dernière. En effet, l'auteur prend soin de créer là une histoire complète et indépendante, avec une vraie présentation du contexte et des personnages pour les lecteurs qui ne connaîtraient pas du tout la série initiale de Benoit Féroumont. Et en même temps, cet album peut aussi être considéré comme une conclusion en apothéose de cette série. Cela commence en racontant des événements ayant eu lieu une vingtaine d'années avant les aventures humoristiques d'Anne l'aubergiste et du brave François. C'est l'histoire d'un royaume vassal écrasé par son cruel suzerain et dont la princesse, encore tout bébé, est sauvée de la mort et doit être cachée ailleurs. Et vingt ans après, nous retrouvons le cadre du petit royaume des Six-ponts et de sa population bon enfant. Sauf que les jalousies de la Reine et d'une rivale envers Anne, la tenancière de taverne trop indépendante, vont entraîner tout le monde dans un complot de grande envergure. C'est une aventure de grand divertissement, puisant dans les contes de fées classiques de princesse héritière et les histoires plus martiales d'espionnage et d'invasion par une armée étrangère, tout en offrant toujours le côté léger et prompt à l'humour de Benoit Féroumont. Les protagonistes de sa série Le Royaume sont ici tous exploités à leur plein potentiel, et comme l'auteur sait qu'il va nous offrir ici un récit clé, peut-être la conclusion définitive de son petit univers, il n'hésite pas à rebattre les cartes et à changer la donne. C'est amusant, même si moins humoristique que la série initiale puisque davantage orienté vers l'aventure et l'action. L'intrigue est bien menée et prenante, quoiqu'on se doute rapidement de comment tout cela va se finir. Et l'ensemble est toujours si bien servi par le graphisme de Benoit Féroumont, lumineux, prompt à amener le sourire et nous offrant par-ci par-là quelques grands dessins en une page qui sont de très belle facture. Un très bon moment à passer ! Et pour ceux qui l'ont lue, c'est aussi une conclusion excellente à la série Le Royaume.
Dantès
C’est typiquement le genre de lecture de bd que j’aime bien et dans un domaine que j’affectionne à savoir le thriller financier. Il est vrai que le monde des banques est impitoyable. Il faut respecter la règlementation mais tout semble fait pour la contourner. On peut même y être encouragé subtilement par ses responsables qui ne veulent pas se mouiller. J’ai bien aimé l’entrée en matière puis la suite qui tient véritablement la route. Le scénario est réellement bien maîtrisé. Par ailleurs, le dessin assez classique est d’une très grande visibilité. La lecture a été très agréable. Bonne idée également que de reprendre le thème de la vengeance façon Comte de Monte-Cristo dans une version plus moderne sur fond de complot boursier. A noter que le héros de cette série ne sera ni un Largo Winch, ni un Larry B. Max ce qui change un peu avec ces standards. C’est une série que j’ai bien aimé. Pour autant, son évolution notamment au tome 9 ne m’a pas beaucoup plu car on s’éloigne du monde de la finance. Je pense qu’il aurait fallu clore la série bien avant.
Mamma mia !
Cela fait bien un petit moment que je n'avais pas autant aimé une série composée de gags en une planche. Habituellement, je trouve qu'au mieux les gags font sourire alors qu'ici j'ai rigolé plusieurs fois et même lorsque je ne rigolais pas, cela ne me dérangeais pas parce que j'aime vraiment l'ambiance qui se dégage de l'album. Les auteurs ont créé des personnages attachants et les relations entre eux sont bien exploitées. On retrouve l'humour de Trondheim qui fait mouche et il y a même des moments qui m'ont touché. Je trouve que le scénariste est vraiment à son meilleur lorsque les personnages (surtout la petite fille) font des réflexions. Le dessin est très bon. C'est dans un style à gros nez dynamique et un peu personnel comme je l'aime. Les couleurs sont très bien choisies aussi. Bref, un très bon divertissement en ce qui me concerne et j'espère qu'il y aura d'autres tomes !
Arawn
Je ne m'attendais pas à autant accrocher à cette série. C'est de la pure heroïc-fantasy au sens très classique du terme, celle d'un Robert E. Howard et de son Conan le Barbare avec des hommes et des femmes aux corps dénudés et sculpturaux, de l'action, de la magie, du sexe et du sang. Le cadre s'inspire de la mythologie celtique mais lui donne un souffle nettement plus épique et plus violent, avec une grande part de tragédie mythique dans ce conte à l'issue que d'emblée on devine fatale . Sur la forme et dans l'esprit, cela rappelle grandement la série Sláine. Le héros et son frère lui ressemblent même parfois comme deux gouttes d'eau. Le graphisme est assez grandiose dans le sens où il offre des planches spectaculaires, comme de grands tableaux, beaux et soignés. Le style rappelle donc souvent de Simon Bisley pour Sláine mais aussi celui de Frazetta pour ses guerriers et guerrières à demi-nues, et parfois un peu celui de H.R. Giger pour certaines formes rappelant les créatures de l'inventeur d'Alien. Sur le fond, c'est une fresque épique et dramatique. Comme dans nombre de récits mythologiques et de légendes, les protagonistes principaux sont présentés immédiatement comme au-dessus du lot, de quasi demi-dieux qui ne demandent qu'à dominer le peuple, bâtir des empires et à s'affronter dans de grandioses confrontations. Et même si l'on sait que ça va finir dans le drame, l'intrigue prend bien des chemins détournés et inattendus pour nous mener à sa conclusion. Ce parti-pris de la fresque mythologique grandiose et sérieuse a su me séduire et m'accrocher du premier jusqu'au dernier tome.