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Couverture de la série Ces jours qui disparaissent
Ces jours qui disparaissent

Imaginez partager votre corps avec une seconde personnalité, ne vivre qu'un jour sur deux, l’autre moitié de votre existence étant vécue par votre autre vous. Imaginez ne garder aucun souvenir de la vie de votre deuxième personnalité. Imaginez que vos périodes d’absence se prolongent graduellement au profit de votre alter ego. « Ces jours qui disparaissent » est le troisième album du jeune Timothé Le Boucher. Malgré cette jeunesse, la maturité du ton et du thème frappe immédiatement. Lubin Maréchal, la vingtaine, est un jeune homme qui vit agréablement entre ses amis, sa copine et ses projets artistiques. Un matin, il se réveille et réalise qu'une journée s'est écoulée sans qu’il en garde le moindre souvenir. Il découvre alors qu’une autre personnalité partage son corps et vit à sa place pendant ses absences. Ce partage, au début équilibré et plutôt bénéfique, bascule doucement en faveur de son autre moitié. Ses jours sont comptés… Cette idée de départ est excellente et certains passages de l’album sont pensés avec une grande intelligence et pertinence. Malgré la légèreté des dessins (j’y reviendrai), l’atmosphère est mystérieuse et pesante. Voir Lubin céder son corps à son double a un côté oppressant qui fait réfléchir sur sa propre vie. La fuite en avant est lente mais inexorable, un peu comme notre parcours à tous. Plus les jours de vie de Lubin s’espacent, plus le récit prend de la vitesse et perd en densité. L'histoire de Lubin devient donc la métaphore de la vie elle-même. La ligne temporelle s'étend sur une cinquantaine d'années, ce qui est bien plus long qu’habituellement. Heureusement, le format et la pagination importante viennent soutenir habilement ce choix. Les personnages sont crédibles et ont une profondeur plus marquée que la moyenne, ce qui doit être salué. Tout n’est cependant pas parfait. À mon sens, la première partie de l’album pourrait être un peu plus rapide pour permettre un développement plus marqué de la seconde partie. Ici et là, quelques passages m’ont paru un peu long. Je n’ai pas non plus compris ce qu’une barbe faisait sur cette femme (!). Et puis, cette fin… je ne divulguerai rien pour ne pas gâcher le plaisir de potentiels lecteurs, mais j’aurais voulu en savoir plus ! Le plaisir se mélange avec ma frustration ! Cela reste toutefois un choix scénaristique qu’il faut respecter, sous peine de tomber dans les travers des haters qui, bien planqués derrière leur écran, refont sans cesse les scénarii de la nouvelle trilogie Star Wars ou autre Game of Thrones. Quant au dessin, il semble plutôt simple et minimaliste de prime abord. Je dois aussi avouer qu’en général, j’aime les traits plus vifs et complexes et les couleurs plus marquées. Mais au fil de l’album, il faut bien se rendre à l’évidence : l'apparente nonchalance du dessin et les couleurs légères collent bien au récit et au caractère de Lubin. En y regardant de plus près, les choses sont finalement plus complexes. J’en veux pour preuve cette belle couverture qui raconte finalement passablement de choses quand on prend le temps de la regarder d'un peu plus près. Pour être honnête avec vous, plus le temps passe depuis ma lecture de l’album et plus je l’apprécie. Voilà bien trois semaines que je l’ai achevé (en une fois) et j’y pense tous les jours. D’ailleurs, mon opinion a continué d’évoluer positivement en griffonnant ces quelques lignes. N’est-ce pas là la marque d’une bande dessinée de grande qualité ? « Ces jours qui disparaissent » est une bonne lecture et une très belle découverte que je recommande à tous. Timothée Le Boucher a assurément devant lui une grande carrière. Je lirai avec beaucoup d’intérêt son nouvel album : « Le Patient ».

25/10/2019 (modifier)
Couverture de la série Batman - The Dark Prince Charming
Batman - The Dark Prince Charming

Oui je sais… je radote… Je vais encore vous dire que Batman est mon super héros préféré, que c’est parce qu’il n’a pas de super pouvoir, qu’il n’est qu’un homme, qu’il a une part d’ombre, qu’il affronte le meilleur super vilain du monde du comics, aka le Joker, et gna gna gna gna et gna gna gna gna. Plus sérieusement, en tant qu’amateur du Chevalier noir et du papa du Gipsy, il m’aurait été difficile de passer à côté de cette série. Dès les premiers coups de bélier marketing, quand j’ai découvert que DC Comics avait approché Enrico Marini, cela a été à la fois une surprise et une évidence. Une surprise parce qu’à ma connaissance, confier un super héros de cette ampleur à un auteur européen était inédit ou à tout le moins rarissime. Une évidence en raison du style graphique de l’auteur, habitué aux jolies plantes, aux mâles bien burnés et aux planches effet ciné. Une chose est certaine, cette confiance accordée à Enrico Marini en dit long sur l’estime de ses pairs dans le milieu du neuvième art. Nous avons donc un des meilleurs dessinateurs de sa génération et une franchise en béton armé, mais la sauce prend-elle ? Force est de constater que oui ! Graphiquement tout d’abord, pas de doute, nous sommes bien devant une série du plus suisse des auteurs italiens : muscles pectoraux et abdominaux saillants, mâchoires carrées, barbe de trois jours, mini jupes, poitrine rebondie, jolis minois, etc. Tous les éléments caractéristiques du style Marini sont là. DC Comics lui a laissé carte blanche et on sent qu’il s’est éclaté tout au long des deux albums. Les designs, des personnages comme de la ville ou de la Batmobile, sont inédits et sortent tout droit de son imagination. La qualité est constante et le style cinématographique et vivant. Comme toujours, la mise en couleur est époustouflante et offre quelques cases/planches d’anthologie, comme la double page de Gotham City. Côté scénario, tout se tient plutôt bien. Comme les couvertures et les premières planches le laissent deviner, Batman sera ici opposé à son yang, son alter ego, son ennemi juré le Joker. Ce mano a mano prend place sur fond de kidnapping et des mystères qui entourent l’identité du père de la petite fille enlevée. L’histoire est intéressante et cohérente. Elle a surtout le mérite de s'achever en laissant quelques pistes de réflexion. L’humour est noir et pince-sans-rire, tant dans le manoir Wayne que dans l’antre du Joker. Bruce Wayne/Batman est impliqué et torturé, le Joker instable et violent, Harley Quinn sexy et barrée (épouse-moi Harley !!), Catwoman féline et aguicheuse. Bref, les codes sont respectés. Légère déception malgré tout s’agissant du brave Alfred que je trouve plus effacé et moins amusant que d’habitude. L’atmosphère est assez proche de la série d’animation Batman, diffusée dans les années 90, ce qui ne peut qu’être un bon point. Toutefois, comme souvent avec Enrico Marini, le scénario est légèrement en deçà de son coup de pinceau. Si l’histoire est intéressante, elle ne révolutionne pas le genre. « Batman – The Dark Prince Charming » est une excellente bande dessinée popcorn et un dyptique agréable à lire mais qui n’atteint pas les sommets scénaristiques de "Batman – The Dark Knight returns". En même temps, était-ce vraiment l'objectif ? Pour finir, cette association entre l’univers DC et le monde de la bande dessinée franco-belge est globalement une franche réussite qui mériterait d’être à nouveau exploitée. D’ailleurs, celles et ceux qui suivent Enrico Marini sur son compte Instagram ont sans doute vu quelques dessins et croquis de Superman, Wonder Woman, Flash, etc. Simple kiffe ou prémonition ? De nouveau DC ou un futur Marvel ? L’avenir nous le dira. Note réelle : 3.5/5

24/10/2019 (modifier)
Couverture de la série Kamasultra (Kamasutra)
Kamasultra (Kamasutra)

Je connaissais Jacovitti par ses Coccobill, qui nous faisaient voyager dans un univers de western totalement déjanté, avec des cases bourrées de gags visuels, d’anachronismes, et des textes volontairement loufoques et absurdes. Ici c’est beaucoup plus sobre en matière de texte, puisqu’il n’y en a quasiment pas. Mais pour le reste, l’érotisme de l’auteur italien, sa vision du kamasutra, sont aussi totalement loufoques. Les corps s’imbriquent dans des poses improbables, parfois plus proches du Tétris que du tantrisme, dans une esthétique qui fait parfois penser à Mordillo, avec des personnages aux formes généreuses, agités, frénétiques, assez cartoonesques. Et, autour d’eux parfois, les habituels objets ou bestioles (souvent des serpents) hétéroclites et incongrus. L’esthétique – et quelques délires, mais aussi le ton général font souvent penser à Edika, dont je ne serais pas surpris d’apprendre qu’il était lecteur attentif de cet auteur italien trop méconnu à mon goût. Inutile de dire qu’on est là davantage dans l’humour que dans l’érotisme ! Mais en tout cas c’est souvent amusant et si vous tombez dessus, jetez un coup d’œil à ce condensé d’humour burlesque, voire surréaliste. A noter que le souhait du posteur précédent a été exaucé, puisqu’une réédition permet depuis 2017 de découvrir plus facilement ce petit délire (c’est cette version que j’ai eu l’occasion de lire). Note réelle 3,5/5.

24/10/2019 (modifier)
Par Pierig
Note: 4/5
Couverture de la série La sémantique c'est élastique
La sémantique c'est élastique

La sémantique, c’est non seulement élastique … mais aussi fantastique ! James use d’un trait minimaliste (type dessin de presse) pour illustrer l’origine de mots, assez communs pour la plupart, et l’évolution de leur signification au cours du temps. Le ton adopté est résolument didactique mais pas barbant pour autant. L’auteur réussit à rendre le tout distrayant avec une mise en forme décontractée et décomplexée. On y apprend ainsi que les défenseurs de l’orthographe ont tout faux, que croire n’est pas synonyme de certitude, que le déjeuner a sauté un repas au cours du temps, que la suprématie du masculin sur le féminin est arrivé tardivement dans la langue française … voire même que certains mots veulent dire aujourd’hui l’exact contraire du sens premier ! Instructif … et presque jouissif. Bref, une petite pépite de la langue française !

24/10/2019 (modifier)
Par Jetjet
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Le Vagabond des Étoiles
Le Vagabond des Étoiles

Riff Reb's est un peu un cas d'école dans le monde de la bd franco-belge. Artiste complet et inspiré, il délivre un dessin puissant au service bien souvent d'adaptations d'aventures et poétiques comme ce fut déjà le cas précédemment avec Le Loup des Mers et A bord de l'Etoile Matutine qui eurent de jolis succès critiques et commerciaux à leur sortie et hissèrent l'auteur au rang des incontournables. Ce Vagabond des étoiles est à nouveau une preuve éclatante du travail graphique de Riff Reb's mais également de son adaptation d'une autre oeuvre très connue de Jack London. Il n'était pourtant pas si simple de mettre en images un univers carcéral américain du XIXème siècle aussi extrême et pénible. En effet, si pas une seule goutte de sang ne transparaît sur les images, la violence des propos et de la situation peut rendre la lecture anxiogène ou rédhibitoire. Par chance, il n'en sera rien. La puissance des mots de London couplé à un dessin expressif assurent une lecture aisée et paradoxalement agréable. On n'a de cesse de lire et tourner les pages pour en observer la folie des hommes mais également se régaler d'un découpage intelligent en courts chapitres distincts. Il est également à noter comme pour ses œuvres précédentes que Riff Reb's continue d'associer chaque partie de son récit avec une colorisation qui lui est propre. Du grand art. Tout au plus pourrait-on reprocher les parties imaginaires que le narrateur s'invente par ses évasions astrales pour échapper aux tortures de ses geôliers. En effet si elles constituent la partie "fantastique" de l'oeuvre originale, elles coupent un peu pied à la trame principale. Nul reproche à Riff Rebb's cependant car c'est le propos de Jack London qui est ici retranscrit. C'est dire si Riff Reb's a su une fois de plus nous régaler de son découpage dynamique. Voici bien une oeuvre de référence en terme d'adaptation appropriée et réussie. Le seul reproche est finalement purement éditorial : pourquoi avoir scindé cette histoire puissante en 2 livres ? Vite la suite pour se régaler à nouveau !!!

24/10/2019 (modifier)
Par Blue boy
Note: 4/5
Couverture de la série La Vision de Bacchus
La Vision de Bacchus

Pour son second opus, Jean Dytar a choisi pour cadre la ville de Venise sous la Renaissance, où les arts et la peinture rayonnaient sur l’Europe depuis plus d’un siècle. C’est à travers deux peintres majeurs de l’école vénitienne que l’auteur aborde son récit : Giorgione (1477-1510), emporté par la peste à l’âge de 32 ans, et Antonello de Messine (1430-1479), vénéré par le premier qui le considérait comme son mentor, sans l’avoir jamais rencontré. En référence à l’univers pictural des deux artistes, Jean Dytar a conçu ses cases comme des petits tableaux, en jouant avec l’ombre et la lumière (à l’époque, l’école flamande fascinait et influençait beaucoup les Italiens), entamant une sorte de dialogue entre la peinture et la bande dessinée. Cela produit un style très singulier, révélant chez son auteur une très grande finesse, pas si courante dans le neuvième art. Nous sommes ainsi plongés dans l’atmosphère vénitienne de ce siècle flamboyant, où se jouaient en coulisses les luttes de pouvoir et d’influence, tant dans le domaine politique qu’artistique. Mais ce dont nous parle surtout Jean Dytar, ce sont les affres de la création, et en particulier de la manière dont l’artiste peut parvenir à insuffler la vie dans son œuvre. De quelle manière doit-il s’impliquer pour représenter au mieux son sujet sur la toile ? Ne devra-t-il pas y laisser un peu de sa propre vie pour en mettre dans son tableau ? L’auteur effectue sa démonstration via le personnage d’Antonello de Messine, qui se voit chargé par un certain Filippo Barbarelli d’immortaliser en peinture sa jolie et magnétique épouse au regard triste, afin qu’il puisse la désirer jusqu’à la fin sans redouter le spectacle de sa lente décrépitude. Il acceptera la commande, tout en imposant ses exigences, notamment celle de travailler dans le plus grand secret vis-à-vis de son client, car pour peindre avec le plus grand réalisme l’épouse du vieux Barbarelli, il devra emprunter des chemins peu orthodoxes… Un travail brillant qui une fois terminé le rendra exsangue moralement, et laissera madame dans une solitude glacée, détrônée par son double figé dans la gouache dans le cœur de son mari. Toutes ces questions sur le processus créatif sont passionnantes et sont traitées avec subtilité par l’ex-prof d’Arts plastiques qu’est Jean Dytar, qui développe un style tout à fait unique depuis une décennie. De plus, il sait insuffler suffisamment de mystère dans ses histoires pour les rendre captivantes. Auteur modeste, il sait se faire pédagogue en évitant tout snobisme et vanité vis-à-vis de ses lecteurs. Une qualité qu’il aura sans doute conservée de son passage dans l’enseignement, et qui s’explique aussi par le plaisir de partager la connaissance, tout simplement.

23/10/2019 (modifier)
Par sloane
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Dracula (Bess)
Dracula (Bess)

Grandiose, magnifique, chef d’œuvre. Oui je sais je commence de manière dithyrambique et avec ces termes il est vrai que je place la barre très haut. Mais excusez du peu, librement inspiré du grand roman gothique Dracula et Georges Bess au dessin, il y a de quoi s'enflammer. Pour moi cet album est au delà du chef d’œuvre, tout concourt à en faire un incontournable de la BD de cette année, si Georges Bess recevait le grand prix à Angoulême l'an prochain pour l'ensemble de son œuvre et en particulier ce ne serait pas volé. Dracula, ou si l'on préfère de son nom complet VladIII, Tépes, Comte Orlok, Nosferatu, Comte Dracula, Prince de Valachie est un roman épistolaire qui date de 1897 écrit par Bram Stoker. Celui-ci n'a pas inventé la figure du vampire, il lui a juste donné sa forme moderne en en faisant la figure qu'aujourd'hui tout le monde connait au travers des nombreuses adaptations cinématographiques. Avec ce personnage, Stoker s'inscrit dans la lignée des écrivains gothiques de son temps que sont R.L. Stevenson avec "L'étrange cas du docteur Jekyll et de Mister Hyde" mais également d'O.Wilde et "Le portrait de Dorian Gray" et des textes antérieurs de Sheridan Le Fanu, le docteur Polidori et Marie Shelley. Pour rendre justice au texte de Stoker, texte d'ailleurs repris en grande partie du moins dans la première moitié de l'ouvrage et qui donne un ton fin XIXème juste parfait, de même l'emploi de ce texte parfois suranné loin d'être plombant ajoute du gothique au gothique. Ce texte donc est sublimé par le dessin de G. Bess qui avait déjà abordé le thème du vampire dans sa trilogie Le Vampire de Bénarès. Ici le trait se fait acéré, les encrages sont surpuissants, de grandes lignes partent à l’assaut des planches pour nous envouter avec des paysages gothiques de châteaux, de montagnes, le romantisme affleure dans un mélange de noirceur comme l'âme du comte, mais ces lignes peuvent aussi être d'une grande douceur lorsqu'il s'agit de décrire la vie Post victorienne du bord de mer où vivent Mine et Lucy, femmes rendues évanescentes par le génie du dessin. Ce dessin en noir et blanc arrive à vous prendre aux tripes tant il semble comme le comte doté d'un pouvoir hypnotique, ensorcelant. La figure même de Dracula n'en devient que plus complexe qu'il n'y parait, oscillant entre le monstre sanguinaire et pervers que beaucoup y ont vu et en fait une victime représentative d'une société engoncée dans un carcan de certitudes morales. Qu’ajouter de plus, les mots me semblent superflus et bien pauvres pour vous décrire cette fabuleuse bande dessinée dont j’ai fait mon coup de cœur, j'aurais aimé que l'avis de la semaine existe encore avec la V3 afin d'y être nommé pour cet avis, non pour ma gloriole personnelle mais pour qu'il soit lu par le plus grand nombre et la BD donc achetée. Je n'ai aucune action chez Glénat et ne suis pas ami avec l'auteur.

23/10/2019 (modifier)
Par Jetjet
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Formica - Une tragédie en trois actes
Formica - Une tragédie en trois actes

Fabcaro revient et..... on ne sait pas s'il est pas content mais sa dernière production en date risque de vous faire sourire à plus d'un titre. La recette est donc à présent connue de tous depuis Zaï Zaï Zaï Zaï.... à savoir des situations banales et improbables et de l'humour absurde et complètement con à effet immédiat de zygomatiques. Après avoir épluché le road movie, le soap opéra et la thérapie de couples à deux balles, cette fois notre cher Fabrice s'attaque à un sacro saint sujet qui n'avait de mémoire pas encore été épluché : le fameux repas de famille du dimanche ! Vous savez, ce repas où on se sent obligé d'y aller par obligation familiale histoire de ne pas passer pour le paria de la fratrie, oui celui-là interminable où on frise l'indigestion entre les plats qui n'en finissent plus et où il faut apprendre à sourire des blagues pas drôles du beau-frère alors qu'on est sorti faire la java la veille et qu'on aurait aimé se taper un bouillon de poules en pyjama devant un programme banal sur TF1 !!!! C'est bon ? Vous avez l'image ? Ben cette fois Fabcaro saborde d'emblée le repas de famille en nous en présentant une belle et bien tordue comme à son habitude. Problème : à force de venir s'imposer cette corvée, plus personne ne sait quoi raconter et on s'y emmerde ferme. L'intégralité du bouquin va donc tenter de trouver un sujet de conversation pendant ce repas à haut risque pendant que les gosses jouent au jeu des 7 familles dysfonctionnelles (si, si). Et si on y ajoute que le Formica, cette sorte de stratifié estampillé seventies vintage, n'y trouvera pas sa place, gageons que le sous-titre "Une tragédie en trois actes" va avoir de l'importance étant donné que les 3 actes seront bien présents (insérer un rire pour les gags à venir) et que qui dit tragédie dit grec (en insérer un autre par ici). Bref Fabcaro n'a peut-être pas ce don immédiat pour faire rire à chaque page mais croyez l'auteur de ces lignes sur paroles, y repenser le fait franchement rigoler. D'autant plus que pas mal de facettes sont ainsi employées au premier degré : dialogues abscons et très cons aussi, quatrième mur brisé, situations "what the fuck" en veux-tu en voilà ! Rien de bien nouveau pour les amateurs du style Fabcaro depuis pas mal repris ici et là y compris dans le récent Faut pas prendre les cons pour des gens mais le bougre n'a pas encore dit son dernier mot. Il utilise ici très peu de cases figées et use d'un dessin un peu plus travaillé et, dessert suprême de quelques couleurs utilisées ici et là principalement pour distinguer les individus. Le pire dans tout cela c'est que ça marche du tonnerre puisque l'envie de relire de suite ce bouquin me traverse l'esprit..... Du très bon cru et pas de la piquette, n'hésitez pas, c'est Fabcaro qui régale ! Tournée générale !

23/10/2019 (modifier)
Couverture de la série Révolution (Locard / Grouazel)
Révolution (Locard / Grouazel)

Voilà un projet très ambitieux, que ce soit pour le sujet, son approche, et sa réalisation. Cela déjà mérite d’être salué. Le dessin est assez surprenant – et de prime abord pas forcément le genre que je prise le plus. Il n’est pas toujours très clair non plus. Mais il possède néanmoins un certain charme, avec un air vieillot, proche par certains côtés de quelques ancêtres – la colorisation, un peu terne va aussi dans ce sens – même si d’autres passages font plus modernes (en particulier lors des combats). Les auteurs s’attaquent à l’une des périodes clés de l’histoire française – voire européenne, à savoir la Révolution française. Ils prévoient de mener à bien leur projet en trois tomes (près de 1000 pages en tout quand même !), et cela promet quelques heures de lecture. En effet, si certaines planches sont muettes, il y a globalement beaucoup de texte, et beaucoup de cases fourmillent de détails, il faut donc prévoir d’investir du temps pour se plonger dans cet album ! Le sujet est de ceux dans lequel les auteurs auraient pu se perdre. Mais ils ont su le canaliser, et s’entourer de garde-fous, pour se prémunir de toute dérive (romanesque, voire révisionniste), en faisant d’importantes recherches (cela se sent – et une petite bibliographie le confirme). Cet album inaugural traite de la période qui va du printemps à l’automne 1789 (pour donner quelques balises, des prémices des Etats-Généraux au retour du roi à Paris) : période courte et dense, qui voit l’édifice de la monarchie absolue s’effondrer. Mais, si quelques moments forts de la Révolution sont mis en lumière (les premières séances de Etats-Généraux, la prise de la Bastille, la nuit du 4 août, etc.), l’originalité de cette série est de mettre l’accent essentiellement sur le peuple (c’est cette approche originale qui justifie mon coup de cœur). Certes, quelques grandes figures apparaissent (peu en fait), comme Barnave, Marat, ou Robespierre en toute fin d’album (un des personnages de l’histoire de France qui m’intéressent le plus !), nous suivons surtout le petit peuple de Paris, au travers de quelques personnages (réels ou pas), mais aussi de la foule apeurée, sujette aux rumeurs, aux angoisses du quotidien. Petit peuple, mais aussi nobles et bourgeois, entraînés dans une tourmente qu’ils alimentent. La peur des complots, les rumeurs, les mouvements de foules, alors que les libelles, les journaux et les clubs plus ou moins improvisés donnent naissance à une « opinion publique », alors que les ancêtres des « réseaux sociaux » (ici à hauteur d’hommes, humanisés) diffusent vraies et fausses nouvelles, tout ceci agite la population parisienne, et nous est montré de façon très réussie. Je trouve le parti pris des auteurs intelligent, ambitieux, et pour le moment réussi. A voir comment ils vont transformer l’essai. D’autant plus que l’éclectisme de leurs sources historiques (Vovelle et Furet par exemple, difficilement compatibles à partir de l’An II) va les pousser à faire des choix, lorsque la relative euphorie des débuts révolutionnaires va diviser ceux qui veulent la ralentir, voire l’arrêter, et ceux qui souhaitent pousser la Révolution plus loin. Un album imposant, mais qui impose le respect pour le moment. Je suis curieux de découvrir la suite, mais je salue d’ores et déjà le travail réalisé.

23/10/2019 (modifier)
Par Alix
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Comment aborder les filles en soirées
Comment aborder les filles en soirées

Excellent ! J’adore quand le contenu d’une BD surprend et se démarque complètement par rapport à l’emballage. Le titre et la couverture laissent en effet supposer une histoire aux tons plutôt « rom com »… ce que je trouvais surprenant venant d’une BD adaptée d’une nouvelle de Neil Gaiman. Après un début plutôt classique on vire assez vite dans le fantastique un peu mystique, avec (selon moi) un double niveau d’interprétation intéressant… les évènements se sont-ils vraiment produits ? Est-ce une métaphore en rapport au fait que le protagoniste principal est très maladroit avec les filles, et les considère comme « venant d’un autre monde » ? Le dessin de Moon est vraiment superbe, et les couleurs acidulées renforcent cette ambiance « teuf des années 80 ». Deuxième lecture de ce duo d’auteurs (après Daytripper) et deuxième bonne pioche en ce qui me concerne.

23/10/2019 (modifier)