Voilà une BD que j'ai du mal à aviser, et que je noterais soit 3/5 soit 5/5. Et je ne parviens pas à totalement trancher entre les deux notes ...
En fait, la BD est une œuvre monumentale et dense, riche et complète. Mais aussi obscure et cryptique si l'on n'a pas les clés de compréhension, ce qui explique peut-être que cette BD semble être passée relativement inaperçue (contrairement à Neonomicon du même auteur). Après, c'est qu'il faut s'y attaquer, au bestiau ! Épais et long, dense, et beaucoup de textes ! Je dois confesser d'ailleurs ne pas avoir lu toutes les pages manuscrites glissées entre chaque chapitres, et qui ne sont pas nécessaires à la compréhension de l'histoire. Il me reste donc encore un peu de lecture à faire ...
Ce qui me gène avec cette BD, c'est qu'il s'agit d'une adaptation/extrapolation de l'univers de Lovecraft à la sauce Moore. Et si vous n'y connaissez rien à Lovecraft, je pense que la lecture de cette BD sera bien plus laborieuse qu'intéressante. C'est ce qui me fait hésiter sur ma note : la BD est excellente mais s'adresse assez clairement à un public d'initiés et de personnes déjà bien renseignées (ce qui rejoint les thèmes de Lovecraft, sur les initiés et les textes obscurs ... Il est fort ce Moore !).
En fait, j'ai apprécié ma lecture parce que j'ai pu recouper les histoires avec les écrits de Lovecraft que j'ai déjà lus, mais aussi parce que je joue à des jeux de rôle "lovecraftiens" qui développent justement cet univers et ajoutent les textes d'autres auteurs (ce que fait Moore en faisant référence à tous ces auteurs de fantastique qu'on rattache aujourd'hui à l'univers lovecraftien). C'est d'une richesse incroyable, chaque histoire étant à la fois une création nouvelle, une référence et un maillon d'une chaîne. Du travail d'orfèvre qui continue d'un bout à l'autre de la série.
Cela dit, j'ai quelques réserves tout de même : c'est dense et lourd à lire, pas très palpitant niveau action et très posé. En fait ça me rappelle beaucoup les textes de Lovecraft, souvent peu dynamiques et très posés. Le dessin renforce cet aspect, avec un aspect très froid et raide (clairement volontaire), et des personnages souvent caricaturaux de l'Américain moyen. Les passages fantastiques sont bien rendus, même si certains "monstres" font moins peur une fois représentés. L'ambiance est bien rendue aussi, avec de la tension et des incohérences visuelles qui rendent le tout inquiétant.
Il est assez difficile de juger et noter Providence au final, et j'ai beaucoup de mal à me prononcer. J'ai l'impression de devoir faire une dissertation sans quoi mon avis ne pourrait être clair et cohérent. Alors qu'en dire à ceux qui ne savent quoi en penser ? Premièrement, que si vous aimez l'univers de Lovecraft et tout ce qui en découle, c'est probablement fait pour vous. Ensuite, que c'est dur et long à lire (avec Moore faut s'y attendre), mais que c'est également riche et dense. Un achat est rentable, puisqu'on peut le relire plusieurs fois et que le temps de lecture est long. Enfin, que je ne sais trop quoi dire si vous n'êtes pas familier de cet univers et de ce genre : ça peut vous indifférer comme vous intéresser, et là je ne suis d'aucun secours.
C'est quand même pas évident de parler des séries de Moore ... Il est fort, le bougre.
C'est avec Fulù que j'avais découvert tout le talent du duo argentin Eduardo Risso et Carlos Trillo.
Si l'histoire n'était pas des plus gaies, j'avais apprécié son âpreté mêlée de sensualité.
Ici, on est plus dans le domaine de ce qu'on pourrait appeler des nouvelles format BD ; Risso et Trillo nous proposent sept courtes histoires qui s'enchaînent sans titres et sans prévenir. Construction surprenante au début, on se demande même si on n'a pas raté quelque chose la première fois, mais en fait, une fois assimilé, on ne s'en rend même plus compte. Et moi qui suis rarement satisfait dans ce genre d'exercice, soit frustré par la brièveté des histoires, soit à cause d'une trop grande inégalité de leur qualité, là je me suis régalé de bout en bout !
D'une part le dessin d'Eduardo est toujours aussi somptueux dans sa maîtrise du noir et blanc, tout en aplats, d'autre part le cynisme et l'humour noir qui suintent de ces récits rondement menés sont assez jubilatoires pour qui aime ces genres. Voilà le genre de récits courts que j'aimerais lire beaucoup plus souvent en BD !
Une BD que j'avais envie de lire principalement pour le coup de crayon de Ileana Surducan que j'apprécie beaucoup, et que j'avais hâte de voir dans une nouvelle BD. J'avais une petite réserve sur le scénario de Ced, principalement parce que je ne suis pas très fan de ses BD humoristiques. J'avais une grande crainte à ce niveau, mais finalement la BD est clairement plus jeunesse et fantastique.
Niveau dessin, je n'ai rien à dire : j'adore ce que fait Ileana Surducan (je me répète, non ?) et c'est très coloré, très adouci et mignon. Le genre auquel j'adhère particulièrement. Et il convient très bien au ton du récit, avec ce mélange de poésie et de noirceur. L'influence de E. Poe est là, dirait-on !
Pour l'histoire, je rejoins totalement ce que dis McArthur, en ajoutant que j'ai beaucoup aimé le caractère du personnage principal (peut-être parce que ça me rappelait des souvenirs). Bref, je suis très content de ma lecture, et j'ai beaucoup aimé le petit univers qui est dévoilé au fur et à mesure des pages. La division en chapitres me semble un peu étonnante, mais c'est compréhensible (surtout pour un livre jeunesse, lorsqu'on veut que les jeunes lisent par petits bouts).
Encore un livre jeunesse que je recommanderais. J'ai vraiment adoré le dessin et trouvé l'histoire très sympathique, je vous recommande évidemment la lecture !
Juste deux volumes pour une vie de Geisha qui défile sous notre regard. C'est beau, sensible, juste, prenant, profondément humain, dramatique.
Deux aspects m'ont surpris ici. Tout d'abord la qualité des caractères dépeints. Ils ont une profondeur, une complexité et une singularité qui rend tout ce récit tellement plus concret, plus réaliste. Puis ce récit de l'intérieur d'une vie de geisha m'a finalement appris beaucoup de chose sur ce milieu.
Je vous recommande cette lecture divertissante et forte soutenue par un N&B très réussi.
Le premier coup de coeur de mes lectures d'Angoulême, avec cette BD pour jeune qui est vraiment bien faite ! J'ai eu l'occasion de pouvoir parler avec l'auteur, auteur que je n'ai jamais vu auparavant, et c'est bien normal : il est issu de l'animation. Charlotte et moi est sa première BD, et je peux déjà vous dire que ça me plait beaucoup !
L'histoire est simple, mais d'une redoutable efficacité : c'est la complicité naissante entre Charlotte, une fille introvertie et timide, souffrant d'un handicap (mais celui-ci n'est jamais nommé), et Gus, petit garçon qui vient de déménager avec sa mère et n'a aucune envie d'être ici. Le déroulement de l'histoire est plutôt classique, mais sait rapidement nous prendre au dépourvu en sortant des sentiers battus de plusieurs façons. Ce qui semblait un cheminement classique devient rapidement original et surprenant. Et ce jusqu'à la fin.
Ce qui m'a vraiment fait aimer cette BD, c'est le traitement très humain des personnages, le côté attachant et amusant de chacune des personnalités présentées. Ce n'est pas manichéen, et jusqu'au bout j'ai trouvé les réactions justifiées et crédibles. En terme de BD pour enfant, ça vaut le détour. Sans compter qu'on parle de plusieurs sujets plutôt grave au final : le terrorisme, l'abandon d'enfant, le handicap, le divorce ... Mais toujours fait de façon intelligente et douce. Le personnage de Gus est adorable, et très crédible dans ses réactions également.
Le dessin est très efficace, on sent un peu le côté animation dans les décors mais c'est très expressif et ça convient à merveille au récit. En plus, j'ai beaucoup aimé la colorisation.
En terme de BD jeunesse, j'ai rarement lu quelque chose de ce niveau. C'est vraiment agréable à lire, même adulte, et ça prend son temps pour faire une belle histoire, crédible et intelligente. Je vous recommande très fortement !
Voilà une bien jolie histoire qui met du baume au cœur !
Écrite à quatre mains par Lou Lubie et Manon Desvaux, La fille dans l’écran est l’histoire d’une rencontre par écrans interposés entre deux jeunes filles ; l’une vit en France, gère comme elle peut ses crises d’angoisses et tente de devenir illustratrice. La seconde est exilée au Canada, mène une vie banale et a laissé en chemin ses rêves de photographe.
Le concept de raconter en parallèle leurs vies et leurs échanges en alternant une planche dessinée par chaque auteure est original et très bien exploité. L’utilisation des technologies modernes pour communiquer sert plutôt bien la mise en scène, notamment par le biais de trouvailles graphiques et de mises en page originales. Les deux jeunes filles sont attachantes, j’ai aimé leurs caractères et la justesse de leurs réactions.
Si j’ai une préférence pour le dessin de Manon Desvaux, l’alternance des deux ne m’a pas gênée outre mesure, d’autant plus que Lou Lubie apporte de la couleur ce qui est plutôt bienvenu. Les deux dessinatrices ont un style résolument moderne ; elles se sont bien trouvées, ce que l’on peut constater dans les planches où leurs dessins se mélangent en s’accordant à la perfection.
Bien entendu cette bande dessinée est destinée davantage aux romantiques qui ont envie d’une histoire un peu fleur bleue qu’aux cyniques en recherche de noirceur. Cependant, au-delà de la jolie histoire d’amour, le récit traite aussi des choix que l’on fait dans la vie, et des rêves que l’on laisse de côté ; j’ai pour ma part apprécié cet aspect qui donne du relief à ce qui aurait pu être une banale histoire d’amour.
En conclusion, j’ai plongé avec beaucoup de plaisir dans cette bande dessinée que je n’avais plus envie de refermer, et que je relirai sans doute avec beaucoup de plaisir.
Luz raconte des souvenirs du temps où il était à Charlie Hebdo. Les anecdotes tournent autour de sa carrière et de ses relations avec les autres personnalités du journal (surtout Cabu qui état un genre de mentor pour lui). Si vous voulez un livre qui parle de l'histoire de Charlie, passez votre chemin parce qu'au lieu de sujet comme le procès avec Choron, on a droit plutôt à des anecdotes de Luz sur des reportages ou encore des problèmes que rencontre les dessinateurs lorsqu'ils dessinent à la rédaction.
Ce sont des anecdotes intéressantes et remplient d'émotions. Le dessin de Luz est excellent comme d'habitude et il sait comment bien communiquer les sentiments qu'il éprouvent. C'est une lecture à la fois rigolote et un peu triste. On retrouve un peu l'esprit de Charlie vu que dans plusieurs anecdotes les gens vont très loin dans l'humour noir et la déconnage (je pense notamment à pratiquement tout ce que Luz et ses potes font durant l'Angoulême de 1996). La narration est très fluide.
Cet album fait suite à Le Sentier des Reines, que j’avais adoré. Quel plaisir de retrouver les mêmes personnages dans un contexte historique complètement différent, à savoir la Nouvelle-Calédonie coloniale.
J’ai eu un peu plus de mal à rentrer dans l’histoire (disons une vingtaine de pages), que je trouvais plus austère et sédentaire que les grandes escapades Alpines du tome précédent… et puis elle a fini par m’emporter, et je n’ai plus lâché l’album avant sa conclusion. Le dossier en fin d’ouvrage est toujours aussi intéressant et instructif, et présente la situation historique complexe qui sert de toile de fond à cette aventure.
Le dessin de Anthoby Pastor est toujours aussi beau, et sied parfaitement le ton calédonien pourtant très diffèrent de l’album précèdent.
Un excellent moment de lecture, qui m’a fait découvrir un épisode historique intéressant, en compagnie de personnages attachants et aux personnalités complexes et développées.
Le récit est centré sur la condition humaine d’Hom. Son esprit parasité le prive de libertés d’action. Pire encore, il est contraint d’agir contre sa volonté. Les questions se bousculent dans sa tête et les réponses qu’il trouvera lui permettront de recouvrer sa liberté … mais pour jusque quand ?
Voici donc un album dont le propos intemporel questionne l’homme dans toute sa complexité et ses contradictions. Ça a l’air assez bateau en apparence mais les réflexions sont nombreuses et pertinentes. Le monde hostile dans lequel évolue Hom est richement développé avec une faune originale (les êtres liés à l’arbre mère par exemple, le dauphin terrestre) et une flore luxuriante (les plantes carnivores) et terrifiante (la masse parasite qui prend possession d’Hom). Le questionnement ne remet pas en cause l’action de l’homme sur son environnement (au sens large) mais bien sur lui-même. Côté dessin, le trait léché de Carlos Gimenez convainc malgré une mise en couleurs datée qui trahit l’âge honorable de cette bd.
Lecture conseillée !
Le baron noir est une critique bien sentie des rouages de nos sociétés capitalistes où quelques têtes pensantes décident pour le bien de tous.
Bien que daté de plus de 40 ans, il nous renvoie à une réalité intemporelle. Got est brillant avec un trait aussi acéré que les serres du vorace qui tient le haut de l’affiche. Quelques esquisses lui suffisent à donner vie à des strips dont la pertinence égale la justesse du propos. On rit jaune, on broie du noir avec une échappatoire inexistante.
Bref, voici un petit traité quasi philosophique concocté par le pétillant Pétillon dont sa portée est plus universelle qu’on ne l’imagine de prime abord.
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Providence
Voilà une BD que j'ai du mal à aviser, et que je noterais soit 3/5 soit 5/5. Et je ne parviens pas à totalement trancher entre les deux notes ... En fait, la BD est une œuvre monumentale et dense, riche et complète. Mais aussi obscure et cryptique si l'on n'a pas les clés de compréhension, ce qui explique peut-être que cette BD semble être passée relativement inaperçue (contrairement à Neonomicon du même auteur). Après, c'est qu'il faut s'y attaquer, au bestiau ! Épais et long, dense, et beaucoup de textes ! Je dois confesser d'ailleurs ne pas avoir lu toutes les pages manuscrites glissées entre chaque chapitres, et qui ne sont pas nécessaires à la compréhension de l'histoire. Il me reste donc encore un peu de lecture à faire ... Ce qui me gène avec cette BD, c'est qu'il s'agit d'une adaptation/extrapolation de l'univers de Lovecraft à la sauce Moore. Et si vous n'y connaissez rien à Lovecraft, je pense que la lecture de cette BD sera bien plus laborieuse qu'intéressante. C'est ce qui me fait hésiter sur ma note : la BD est excellente mais s'adresse assez clairement à un public d'initiés et de personnes déjà bien renseignées (ce qui rejoint les thèmes de Lovecraft, sur les initiés et les textes obscurs ... Il est fort ce Moore !). En fait, j'ai apprécié ma lecture parce que j'ai pu recouper les histoires avec les écrits de Lovecraft que j'ai déjà lus, mais aussi parce que je joue à des jeux de rôle "lovecraftiens" qui développent justement cet univers et ajoutent les textes d'autres auteurs (ce que fait Moore en faisant référence à tous ces auteurs de fantastique qu'on rattache aujourd'hui à l'univers lovecraftien). C'est d'une richesse incroyable, chaque histoire étant à la fois une création nouvelle, une référence et un maillon d'une chaîne. Du travail d'orfèvre qui continue d'un bout à l'autre de la série. Cela dit, j'ai quelques réserves tout de même : c'est dense et lourd à lire, pas très palpitant niveau action et très posé. En fait ça me rappelle beaucoup les textes de Lovecraft, souvent peu dynamiques et très posés. Le dessin renforce cet aspect, avec un aspect très froid et raide (clairement volontaire), et des personnages souvent caricaturaux de l'Américain moyen. Les passages fantastiques sont bien rendus, même si certains "monstres" font moins peur une fois représentés. L'ambiance est bien rendue aussi, avec de la tension et des incohérences visuelles qui rendent le tout inquiétant. Il est assez difficile de juger et noter Providence au final, et j'ai beaucoup de mal à me prononcer. J'ai l'impression de devoir faire une dissertation sans quoi mon avis ne pourrait être clair et cohérent. Alors qu'en dire à ceux qui ne savent quoi en penser ? Premièrement, que si vous aimez l'univers de Lovecraft et tout ce qui en découle, c'est probablement fait pour vous. Ensuite, que c'est dur et long à lire (avec Moore faut s'y attendre), mais que c'est également riche et dense. Un achat est rentable, puisqu'on peut le relire plusieurs fois et que le temps de lecture est long. Enfin, que je ne sais trop quoi dire si vous n'êtes pas familier de cet univers et de ce genre : ça peut vous indifférer comme vous intéresser, et là je ne suis d'aucun secours. C'est quand même pas évident de parler des séries de Moore ... Il est fort, le bougre.
Lectures macabres
C'est avec Fulù que j'avais découvert tout le talent du duo argentin Eduardo Risso et Carlos Trillo. Si l'histoire n'était pas des plus gaies, j'avais apprécié son âpreté mêlée de sensualité. Ici, on est plus dans le domaine de ce qu'on pourrait appeler des nouvelles format BD ; Risso et Trillo nous proposent sept courtes histoires qui s'enchaînent sans titres et sans prévenir. Construction surprenante au début, on se demande même si on n'a pas raté quelque chose la première fois, mais en fait, une fois assimilé, on ne s'en rend même plus compte. Et moi qui suis rarement satisfait dans ce genre d'exercice, soit frustré par la brièveté des histoires, soit à cause d'une trop grande inégalité de leur qualité, là je me suis régalé de bout en bout ! D'une part le dessin d'Eduardo est toujours aussi somptueux dans sa maîtrise du noir et blanc, tout en aplats, d'autre part le cynisme et l'humour noir qui suintent de ces récits rondement menés sont assez jubilatoires pour qui aime ces genres. Voilà le genre de récits courts que j'aimerais lire beaucoup plus souvent en BD !
Hôtel Pennington
Une BD que j'avais envie de lire principalement pour le coup de crayon de Ileana Surducan que j'apprécie beaucoup, et que j'avais hâte de voir dans une nouvelle BD. J'avais une petite réserve sur le scénario de Ced, principalement parce que je ne suis pas très fan de ses BD humoristiques. J'avais une grande crainte à ce niveau, mais finalement la BD est clairement plus jeunesse et fantastique. Niveau dessin, je n'ai rien à dire : j'adore ce que fait Ileana Surducan (je me répète, non ?) et c'est très coloré, très adouci et mignon. Le genre auquel j'adhère particulièrement. Et il convient très bien au ton du récit, avec ce mélange de poésie et de noirceur. L'influence de E. Poe est là, dirait-on ! Pour l'histoire, je rejoins totalement ce que dis McArthur, en ajoutant que j'ai beaucoup aimé le caractère du personnage principal (peut-être parce que ça me rappelait des souvenirs). Bref, je suis très content de ma lecture, et j'ai beaucoup aimé le petit univers qui est dévoilé au fur et à mesure des pages. La division en chapitres me semble un peu étonnante, mais c'est compréhensible (surtout pour un livre jeunesse, lorsqu'on veut que les jeunes lisent par petits bouts). Encore un livre jeunesse que je recommanderais. J'ai vraiment adoré le dessin et trouvé l'histoire très sympathique, je vous recommande évidemment la lecture !
Geisha ou Le jeu du shamisen
Juste deux volumes pour une vie de Geisha qui défile sous notre regard. C'est beau, sensible, juste, prenant, profondément humain, dramatique. Deux aspects m'ont surpris ici. Tout d'abord la qualité des caractères dépeints. Ils ont une profondeur, une complexité et une singularité qui rend tout ce récit tellement plus concret, plus réaliste. Puis ce récit de l'intérieur d'une vie de geisha m'a finalement appris beaucoup de chose sur ce milieu. Je vous recommande cette lecture divertissante et forte soutenue par un N&B très réussi.
Charlotte et moi
Le premier coup de coeur de mes lectures d'Angoulême, avec cette BD pour jeune qui est vraiment bien faite ! J'ai eu l'occasion de pouvoir parler avec l'auteur, auteur que je n'ai jamais vu auparavant, et c'est bien normal : il est issu de l'animation. Charlotte et moi est sa première BD, et je peux déjà vous dire que ça me plait beaucoup ! L'histoire est simple, mais d'une redoutable efficacité : c'est la complicité naissante entre Charlotte, une fille introvertie et timide, souffrant d'un handicap (mais celui-ci n'est jamais nommé), et Gus, petit garçon qui vient de déménager avec sa mère et n'a aucune envie d'être ici. Le déroulement de l'histoire est plutôt classique, mais sait rapidement nous prendre au dépourvu en sortant des sentiers battus de plusieurs façons. Ce qui semblait un cheminement classique devient rapidement original et surprenant. Et ce jusqu'à la fin. Ce qui m'a vraiment fait aimer cette BD, c'est le traitement très humain des personnages, le côté attachant et amusant de chacune des personnalités présentées. Ce n'est pas manichéen, et jusqu'au bout j'ai trouvé les réactions justifiées et crédibles. En terme de BD pour enfant, ça vaut le détour. Sans compter qu'on parle de plusieurs sujets plutôt grave au final : le terrorisme, l'abandon d'enfant, le handicap, le divorce ... Mais toujours fait de façon intelligente et douce. Le personnage de Gus est adorable, et très crédible dans ses réactions également. Le dessin est très efficace, on sent un peu le côté animation dans les décors mais c'est très expressif et ça convient à merveille au récit. En plus, j'ai beaucoup aimé la colorisation. En terme de BD jeunesse, j'ai rarement lu quelque chose de ce niveau. C'est vraiment agréable à lire, même adulte, et ça prend son temps pour faire une belle histoire, crédible et intelligente. Je vous recommande très fortement !
La Fille dans l'écran
Voilà une bien jolie histoire qui met du baume au cœur ! Écrite à quatre mains par Lou Lubie et Manon Desvaux, La fille dans l’écran est l’histoire d’une rencontre par écrans interposés entre deux jeunes filles ; l’une vit en France, gère comme elle peut ses crises d’angoisses et tente de devenir illustratrice. La seconde est exilée au Canada, mène une vie banale et a laissé en chemin ses rêves de photographe. Le concept de raconter en parallèle leurs vies et leurs échanges en alternant une planche dessinée par chaque auteure est original et très bien exploité. L’utilisation des technologies modernes pour communiquer sert plutôt bien la mise en scène, notamment par le biais de trouvailles graphiques et de mises en page originales. Les deux jeunes filles sont attachantes, j’ai aimé leurs caractères et la justesse de leurs réactions. Si j’ai une préférence pour le dessin de Manon Desvaux, l’alternance des deux ne m’a pas gênée outre mesure, d’autant plus que Lou Lubie apporte de la couleur ce qui est plutôt bienvenu. Les deux dessinatrices ont un style résolument moderne ; elles se sont bien trouvées, ce que l’on peut constater dans les planches où leurs dessins se mélangent en s’accordant à la perfection. Bien entendu cette bande dessinée est destinée davantage aux romantiques qui ont envie d’une histoire un peu fleur bleue qu’aux cyniques en recherche de noirceur. Cependant, au-delà de la jolie histoire d’amour, le récit traite aussi des choix que l’on fait dans la vie, et des rêves que l’on laisse de côté ; j’ai pour ma part apprécié cet aspect qui donne du relief à ce qui aurait pu être une banale histoire d’amour. En conclusion, j’ai plongé avec beaucoup de plaisir dans cette bande dessinée que je n’avais plus envie de refermer, et que je relirai sans doute avec beaucoup de plaisir.
Indélébiles
Luz raconte des souvenirs du temps où il était à Charlie Hebdo. Les anecdotes tournent autour de sa carrière et de ses relations avec les autres personnalités du journal (surtout Cabu qui état un genre de mentor pour lui). Si vous voulez un livre qui parle de l'histoire de Charlie, passez votre chemin parce qu'au lieu de sujet comme le procès avec Choron, on a droit plutôt à des anecdotes de Luz sur des reportages ou encore des problèmes que rencontre les dessinateurs lorsqu'ils dessinent à la rédaction. Ce sont des anecdotes intéressantes et remplient d'émotions. Le dessin de Luz est excellent comme d'habitude et il sait comment bien communiquer les sentiments qu'il éprouvent. C'est une lecture à la fois rigolote et un peu triste. On retrouve un peu l'esprit de Charlie vu que dans plusieurs anecdotes les gens vont très loin dans l'humour noir et la déconnage (je pense notamment à pratiquement tout ce que Luz et ses potes font durant l'Angoulême de 1996). La narration est très fluide.
La Vallée du Diable
Cet album fait suite à Le Sentier des Reines, que j’avais adoré. Quel plaisir de retrouver les mêmes personnages dans un contexte historique complètement différent, à savoir la Nouvelle-Calédonie coloniale. J’ai eu un peu plus de mal à rentrer dans l’histoire (disons une vingtaine de pages), que je trouvais plus austère et sédentaire que les grandes escapades Alpines du tome précédent… et puis elle a fini par m’emporter, et je n’ai plus lâché l’album avant sa conclusion. Le dossier en fin d’ouvrage est toujours aussi intéressant et instructif, et présente la situation historique complexe qui sert de toile de fond à cette aventure. Le dessin de Anthoby Pastor est toujours aussi beau, et sied parfaitement le ton calédonien pourtant très diffèrent de l’album précèdent. Un excellent moment de lecture, qui m’a fait découvrir un épisode historique intéressant, en compagnie de personnages attachants et aux personnalités complexes et développées.
Hom
Le récit est centré sur la condition humaine d’Hom. Son esprit parasité le prive de libertés d’action. Pire encore, il est contraint d’agir contre sa volonté. Les questions se bousculent dans sa tête et les réponses qu’il trouvera lui permettront de recouvrer sa liberté … mais pour jusque quand ? Voici donc un album dont le propos intemporel questionne l’homme dans toute sa complexité et ses contradictions. Ça a l’air assez bateau en apparence mais les réflexions sont nombreuses et pertinentes. Le monde hostile dans lequel évolue Hom est richement développé avec une faune originale (les êtres liés à l’arbre mère par exemple, le dauphin terrestre) et une flore luxuriante (les plantes carnivores) et terrifiante (la masse parasite qui prend possession d’Hom). Le questionnement ne remet pas en cause l’action de l’homme sur son environnement (au sens large) mais bien sur lui-même. Côté dessin, le trait léché de Carlos Gimenez convainc malgré une mise en couleurs datée qui trahit l’âge honorable de cette bd. Lecture conseillée !
Le Baron Noir
Le baron noir est une critique bien sentie des rouages de nos sociétés capitalistes où quelques têtes pensantes décident pour le bien de tous. Bien que daté de plus de 40 ans, il nous renvoie à une réalité intemporelle. Got est brillant avec un trait aussi acéré que les serres du vorace qui tient le haut de l’affiche. Quelques esquisses lui suffisent à donner vie à des strips dont la pertinence égale la justesse du propos. On rit jaune, on broie du noir avec une échappatoire inexistante. Bref, voici un petit traité quasi philosophique concocté par le pétillant Pétillon dont sa portée est plus universelle qu’on ne l’imagine de prime abord.