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Couverture de la série L'Hiver d'un monde
L'Hiver d'un monde

Après avoir découvert cet auteur avec Philibert (Les aventures de), je poursuis avec cette série. Et c’est encore une bonne pioche. Et cela révèle aussi l’éclectisme de Mazan, puisque l’univers développé est ici très différent, comme le dessin d’ailleurs, les personnages, le décor et la colorisation étant très éloignés (est-ce le même auteur ? peut-on même se demander). J’ai eu du mal à accrocher au début, car le dessin et l’intrigue étaient un peu obscurs. Mais une fois embarqué, c’est vraiment une aventure très intéressante que nous présente Mazan. C’est pas mal une histoire d’ambiance. Et l’univers développé, difficilement situable dans le temps ou l’espace – même si la France du début du XXème siècle pourrait convenir comme modèle (on parle ici de Francardie) – se révèle assez original, intriguant. Comme le sont les personnages. J’ai préféré les deux premiers albums – même si le troisième se laisse aussi lire agréablement (ma remarque est valable pour l’histoire, mais aussi pour le dessin, qui évolue d’un album à l’autre, comme la colorisation : très sombre dans le premier, cuivré dans le suivant, un peu plus coloré dans le dernier). Ce qui est bizarre, c’est que chaque album est quasi indépendant des autres – en tout cas peut se lire sans que les autres l’aient été. Le seul lien, mais il est quand même tenu, c’est que les personnages principaux des albums précédents réapparaissent en toute fin d’album à chaque fois, dans une petite ville de bord de mer. Mais du coup il reste quelques frustrations, puisqu’on ne saura jamais comment se finissent certaines intrigues. Et surtout certains pans d’histoire restent inexplorés (comme ce que sont les « aériens », la maladie qui ronge le pays dans le premier tome, la guerre absurde et loufoque dans le deuxième, le sens de l’échouage des baleines dans les deux premiers, etc.). Toujours est-il que la lecture de ce triptyque est très recommandable.

11/02/2019 (modifier)
Couverture de la série Les Aventures de Philibert
Les Aventures de Philibert

Je n’ai eu que le premier tome sous la main pour le moment (mais ce n’est pas un problème, car il se lit comme un one-shot de toute façon). Si au départ je me demandais où ça allait nous amener, j’ai peu à peu été conquis par cette histoire simple et chouette. Philibert, médecin légiste de son état, vit des relations difficiles avec sa grosse logeuse et sa grosse amie – obnubilées par les courses et les bonnes affaires en supermarché. Parti se ressourcer en vacances, il fait la connaissance d’une jeune femme, avec qui il s’installe par la suite. Elle se révèle anorexique, mais surtout ultra maniaque, atteinte d’une série de tocs dont il tente de s’accommoder, plus ou moins bien, avec plus ou moins d’humour. L’album se lit vite, car peu de dialogues. Mais c’est plein de fraicheur et d’humour. Et l’aspect graphique et aussi chouette, avec des corps filiformes (Philibert et sa copine) au milieu d’autres souvent plus qu’obèse. Le dessin quasi caricatural et la colorisation – très album pour enfant – ajoutent une touche ma foi bien agréable à cette histoire sans prétention, mais qui est très plaisante à lire, emplie de poésie et d’humour.

11/02/2019 (modifier)
Par Josq
Note: 4/5
Couverture de la série Blanc Casque
Blanc Casque

Une fois n'est pas coutume, Jijé nous propose une bande dessinée d'aventures de grande qualité. Si la structure du récit et de la mise en page est très classique, c'est au niveau de l'écriture des personnages que l'on trouvera le principal intérêt de ce one-shot. En effet, Jijé s'ingénie à briser tout manichéisme avec son personnage principal, fermier courageux aux valeurs fortes, mais dont les faiblesses prennent parfois le dessus. Autant qu'une BD sur l'immigration des fermiers européens au Canada, "Blanc Casque" est aussi une BD sur l'alcool et sur la nature humaine, et en tant que telle, une BD vraiment réussie. Certes, Jijé ne s'épargne sans doute pas certains clichés un brin idéalistes sur la colonisation pacifique du Canada, mais le contexte est néanmoins très bien dressé, illustrant la polyvalence des cultures au sein des colons (qui n'étaient sans doute pas tous aussi solidaires que Jijé nous le montre, en passant), les tensions entre indiens convertis et indiens païens, le rôle des missionnaires chrétiens, nécessaires traits d'union entre les colons et les indiens, et véritable âme de l'organisation des terres agricoles au Canada... Bref, mine de rien, Jijé nous propose une fresque assez ambitieuse, dont on aura le droit de penser qu'elle propage une vision un peu trop unilatéralement positive de la période, mais qui impressionne par le talent avec lequel s'y entremêlent histoire intime et tableau historique. Bien évidemment, c'est aussi très convaincant visuellement, le trait de Jijé ayant l'efficacité qu'on lui connaît. Parfois un peu bavard : il arrive que le texte écrase quelque peu l'image. Mais c'est du détail, l'ensemble est très beau à voir, le dessin est fluide et le récit bien mené. Si je ne le savais pas, je ne me serais pas douté que Jijé adaptait là un livre en BD... Bref, encore une jolie pépite à découvrir ! Je ne conseille pas l'achat à un prix exorbitant, mais ça reste une bande dessinée intéressante à avoir.

10/02/2019 (modifier)
Par Josq
Note: 4/5
Couverture de la série Dieu en personne
Dieu en personne

Etrange. C'est le premier mot qui m'est venu à l'esprit en terminant cette bande dessinée. J'aurais pu dire bien des choses : inhabituel, décalé, intelligent, recherché, lent, surprenant, casse-tête... Mais c'est bien le terme qui résume tout ça le mieux : étrange. Ça dit tout et ça ne dit rien. Comme Dieu, finalement: il est tout et il n'est rien. Enfin, ça, c'est ce qu'on pourrait tirer des longs débats auxquels Marc-Antoine Mathieu nous fait assister. Un être paradoxal qui prouve son existence tout en donnant des arguments pour prouver sa non-existence. Un peu court, tout de même... Mais ça a au moins le mérite d'actualiser la citation de Saint Athanase (IVe siècle) : "Un Dieu compréhensible ne serait pas un Dieu." Mais en réalité, ce n'est pas vraiment une bande dessinée qui parle de Dieu comme on pourrait le penser qu'a écrit ici Marc-Antoine Mathieu, c'est bien une bande dessinée qui parle de l'homme. La question "Dieu existe-t-il ou non ?" n'a aucune importance. Ce qui compte, c'est ce qu'en pense l'homme, c'est ce qu'en fait l'homme. Et là, le constat n'est pas vraiment reluisant... Tout d'abord, l'homme réfléchit. Il cherche à comprendre. Instruments scientifiques à l'appel, il va essayer de prouver ou de réfuter l'existence de Dieu. Mais comment remettre son existence en cause lorsqu'il se présente en chair et en os devant vous ? Et qu'il accomplit un certain nombre de "prodiges" pour prouver qu'il est bien celui qu'il prétend être ? Seulement voilà, l'homme n'est pas du genre à se laisser avoir comme un bleu. Si Dieu existe, alors il est coupable. Et s'il n'est pas coupable, il est au moins responsable. Responsable de quoi ? De tout, de rien, qu'est-ce qu'on en sait ? Est-ce que ça a une importance, d'abord ? Si Dieu existe, s'il est parfait, comment le monde qu'il a créé peut-il être aussi imparfait ? Et voilà comment se trouve organisé le plus grand procès de toute l'histoire de la justice. Le procès de Dieu... Il y a de quoi attirer les foules ! Et qui dit "foules" dit "succès", dit "produit dérivé", dit "commercialisation", dit "argent"... Et c'est là que se trouve le coeur de la bande dessinée, c'est ce que dénonce Marc-Antoine Mathieu, avec plus ou moins de pertinence : la frénésie de l'argent, de la commercialisation à outrance... Si la charge est parfois un peu pesante voire - plus rarement - naïve, elle illustre à merveille les dérives et le ridicule de nos sociétés contemporaines, dans son désir de désacraliser le sacré, de mettre à bas tout ce qui dépasse l'homme. Dérives de l'art contemporain, bavard, vain et dont la prétention est mise au jour lorsqu'il transforme Dieu en objet d'art; dérives de la publicité, qui ne voit en Dieu qu'un produit marketing; dérives de la pensée enfin, qui, partant d'une dialectique intéressante, finit par basculer dans la masturbation intellectuelle... Débats interminables qu'on suit pourtant avec intérêt, malgré leurs longueurs, pour peu qu'on s'intéresse aux conceptions philosophiques de Dieu, mais qui finissent par tourner en rond. Car ce que cherche l'homme d'aujourd'hui dans ces débats, ce n'est pas la vérité, non. Ce qu'il cherche, c'est à prouver qu'il a raison. Ce qui explique que Dieu finisse par dormir pendant son propre procès... Malgré son apparente aridité et ses quelques temps morts, la bande dessinée de Marc-Antoine Mathieu se révèle esthétiquement achevée, notamment par une maîtrise impressionnante du noir et blanc, mais aussi passionnante sur le fond, d'autant que l'auteur parvient à construire toute une bande dessinée autour de Dieu sans jamais aborder la religion. Tour de force qui permet, déjà, d'éviter la polémique inutile dont on est un peu trop friand aujourd'hui, et ensuite, de mieux faire ressortir l'absence de transcendance qui caractérise les sociétés contemporaines, dans leur volonté de se débarrasser de tout ce qui touche de près ou de loin au divin. Car si Dieu n'existe plus, alors n'est-ce pas l'homme qui peut devenir Dieu ? Si la fin permet à chacun de se retrouver dans ses convictions, et de renvoyer (intelligemment) dos-à-dos athées et croyants, elle affirme au moins une chose avec force : que s'il y a une chose qui est infinie, c'est bien la bêtise humaine. Et le mot de la fin, ce sera Einstein, cité à de multiples reprises par l'auteur, qui l'aura : "Deux choses sont infinies : l’Univers et la bêtise humaine. Mais en ce qui concerne l’Univers, je n’en ai pas encore acquis la certitude absolue..."

10/02/2019 (modifier)
Par Josq
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Will dans Spirou
Will dans Spirou

Réunir toutes les courtes histoires en BD dessinées par Will parues dans Spirou, c'est une idée absolument géniale, et ça nous promet la découverte de bon nombre de pépites inédites et délicieuses, toujours drôles et parfois même poétiques, qui nous font rentrer dans l'imaginaire malheureusement trop méconnu aujourd'hui de cet immense artiste qu'était Will. Chaque seconde passée à lire les cases de cet album est un délice... Rarement j'avais ressenti la même jubilation en tournant la page et en me disant : "Qu'est-ce qui va venir après ?" L'album est très bien fait, suivant un ordre chronologique qui permet de voir l'évolution de Will, que ce soit dans son dessin ou son humour (même s'il n'a pas scénarisé beaucoup des histoires présentes ici). J'avoue avoir une préférence pour la première partie de l'album, où on retrouve l'innocence de la BD des années 60-70 à la Spirou, et son côté très familial. Rien que la première histoire, "Le rêve de Noël de Petit Jean" est un chef-d'oeuvre dans sa maîtrise de la narration, et tout particulièrement de la couleur, qui occupe une place particulière dans ce court récit. Mais tout l'ensemble suit, et aucune histoire n'est vraiment mauvaise. Bref, un album très réussi, qui permet de découvrir plus en détail un grand auteur de bande dessinée. Essentiel.

09/02/2019 (modifier)
Par Gaston
Note: 4/5
Couverture de la série Le Frère de Göring
Le Frère de Göring

3.5 Un bon récit historique bien plus intéressant que la plupart des biographies que j'ai lues en bande dessinée ces dernières années. Il faut dire que cette série raconte la plupart de la vie d'Albert Göring avec des flashbacks lorsqu'il se constitue prisonnier et que les alliés croient qu'il est coupable de crimes horribles. C'est beaucoup plus intéressant de voir le frère Göring raconter sa vie et répondre aux interrogations d'un major que si les auteurs avaient bêtement montré des bouts de sa vie en sautant d'années en années toutes les 3-4 pages. Je connaissais l'existence du frère d'Hermann Göring et il y a certaines anecdotes présentes dans le premier tome que je connaissais déjà comme le fait qu'il va s'humilier en public pour que des nazis arrêtent de persécuter des juifs. C'est un personnage assez intéressant qui est le contraire de son frère. Le dessin est un peu froid, mais il est correct et pas du tout désagréable à regarder. J'ai bien hâte de lire le second tome.

08/02/2019 (modifier)
Par Gaston
Note: 4/5
Couverture de la série Godman
Godman

3.5 Tiens, maintenant Fluide Glacial sort des albums avec des histoires qui durent 44 pages ? C'est différent des histoires courtes que j'ai l'habitude de lire chez cet éditeur. L'auteur s'amuse autour des thèmes de la religion et des super-héros. L'humour fonctionne bien, le dessin est dynamique et expressif et les personnages sont attachants. Ce que j'ai surtout apprécié est que le scénario révèle petit à petit des informations sur les protagonistes de ce récit jusqu'au dénouement explosif. Le récit est vraiment bien maitrisé et me donne envie de mieux connaitre cet auteur.

07/02/2019 (modifier)
Couverture de la série Au nom du père...
Au nom du père...

3.5/5 Agréable thriller au scénario bien construit, "Au nom du père..." est un ouvrage assez surprenant. Je ne savais pas à quoi m'attendre en achetant cette BD, et j'ai été agréablement surpris. L'histoire est vraiment prenante et le rythme est très bien soutenu. Le twist final se devine quelques pages avant qu'il n'arrive mais bon, il est suffisamment original pour pardonner ce petit défaut. Graphiquement, j'ai beaucoup aimé ce noir et blanc très efficace, je n'ai pas grand chose à y redire, les formes, notamment féminines et émoustillantes (...) sont bien rendues. Mes quelques griefs sont les suivants: parfois la mise en scène perd en clarté, notamment à la fin lorsque l'héroïne se fait tirer dessus, j'ai eu du mal à comprendre ce que je voyais, comment ça se produisait, il y avait moyen de faire plus clair et mieux construit comme point de vue. Ce qui m'a vraiment agacé et qui gâche un peu le truc, c'est le fait que l'auteur cherche vraiment à américaniser ce polar qui se déroule en France, ambiance un peu Floridienne ou Californienne, le policier français, qui se présente comme faisant partie de la brigade fédérale...??? Pourquoi ? Je n'ai pas bien compris.... Au final une BD réussie et bien faite. Bravo.

07/02/2019 (modifier)
Couverture de la série Keko le magicien
Keko le magicien

J’avais acheté cet album il y a longtemps, à sa sortie je crois. A l’époque, je ne connaissais pas l’auteur, et c’est le feuilletage de certaines planches qui m’avait fait sauter le pas. J’ai depuis lu d’autres œuvres de cet auteur, avec plus ou moins de plaisir. Mais aucune ne m’a fait le même effet. Proposer un résumé de cet album est une gageure, et n’est pas souhaitable non plus. C’est, en effet, autour du magicien Keko et de quelques autres personnages, une longue errance, un long poème visuel, qui relève en grande partie du surréalisme. En effet, certaines planches ont une esthétique proche de celle de Dali, ont aussi les mêmes sources d’inspiration (esthétique « Modern Style » par exemple). Objets, personnages se déforment. Des objets (voire des parties de corps, comme un sein) deviennent des personnages. L’imagerie populaire est aussi détournée – comme l’est aussi Disney (une Clarabelle loufoque). C’est souvent surchargé, cela serait encore plus kitch sans le dessin et surtout la colorisation de Nine, comme tamisée, en retenue, alors même que les personnages, les dialogues (plus ou moins lyriques et « littéraires », en tout cas décalés et eux aussi loufoques) portent l’album vers des délires dans lesquels l’érotisme, l’humour et bien sûr la poésie jouent leur partition (sur un air de tango bien entendu !). C’est très particulier, mais c’est particulièrement intéressant ! J’ajoute que l’édition proposée par Rackham est vraiment de haute tenue, avec une couverture et un papier épais (un peu ce que propose Cornélius pour certains album de Blanquet par exemple). Cet effort (pas que financier) honore cette maison d’édition, qui n’a sans doute pas gagné beaucoup de sous avec cet album, mais qui a donné vie à quelque chose d’original. Que je vous encourage à découvrir, si vous êtes amateur de ce genre de publication poétique (à feuilleter avant d’acheter !).

06/02/2019 (modifier)
Par Jetjet
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Célestin Gobe-la-lune
Célestin Gobe-la-lune

Envie d'une série légère et divertissante sertie de jolis dessins accessibles et de sourires coupables ? Bienvenue alors dans les tribulations de Célestin Gobe-la-lune, gentil illuminé du XVIIIème siècle promu à un noble avenir dans un futur qu'il souhaite proche mais bien plus occupé à trousser toute jolie bourgeoise et ravir enfin un titre digne de son rang et à fuir toutes les autres responsabilités de son rang actuel. Car oui, Célestin n'est qu'un gueux oisif régulièrement poursuivi par des maris cocus ou des frères voulant laver l'honneur de leur famille bafouée par les tentatives lubriques de ce vil coquin. Lupano nous sert sur un plateau une histoire pétrie de qualité dont la principale est de nous faire passer un très joli moment entremêlé de sourires et de bonne humeur. En portant son dévolu sur une princesse pimbêche, Célestin va se retrouver bien malgré lui au milieu de complots divers, de philtres magiques et pourquoi pas même d'une révolution civile ? On a souvent comparé à tort ou à raison cette aventure à celles de Garulfo ou des mousquetaires de Alain Ayroles. Si le cadre et les quelques vers détournés peuvent prêter à confusion, l'histoire se rapproche davantage d'un Fanfan la Tulipe ou des Fourberies de Scapin dont on y conserve le rythme parfait d'une vaudeville. Yannick Corboz dont on a critiqué souvent l'encrage ou même le dessin doit être réhabilité pour un dessin expressif et parfaitement découpé. Le travail s'améliore même sur le second tome mais il serait injuste de ne pas parler des décors travaillés avec de majestueuses cités détaillées ni de la jolie colorisation rappelant l'aquarelle. Le tour de force vient également de Lupano qui arrive à conclure rapidement une histoire en deux tomes par un tour de force historique et plutôt malin. Que de plaisir à lire les aventures de Célestin, un des rares héro franco-belges se promenant la plupart du temps défroqué. Mais même cela trouvera son explication. Incontournable.

06/02/2019 (modifier)