Contrairement à mes deux précédents collègues j'ai bien aimé cette histoire d'un homme qui un jour décide de tout laisser tomber, de partir. Il faut malgré tout une certaine dose de caractère voire même une dose certaine pour oser tout laisser tomber de la sorte.
Chacun appréhendera ce récit en fonction de son rapport au monde et surtout à sa vie. Qu'est-ce que cela nous montre ? A mon sens le fait que quoi que l'on fasse il ne sert à rien de vouloir aller contre le destin, l'homme serait immanquablement contraint de se comporter en rapport avec un chemin tout tracé. Ici notre héros quitte une routine pour finalement tomber sur une autre société elle aussi pétrie de codes qui n'est pas sans rappeler un certain village où le héros n'était pas un numéro. Quant au retour à la vie sauvage que d'aucuns idéalisent l'on voit ici qu'elle possède sous des dehors idylliques ses propres limites.
Même si cela se lit vite je trouve que les choses sont bien pensées, elles amènent à réfléchir de manière intelligente sur le sens de la vie ce que l'on veut y mettre et pourquoi. En tout état de cause un album malin, à lire.
Il semble y avoir un consensus en rapport aux BDs de Prugne : un dessin magnifique, mais des histoires un peu légères.
Pas de discussion possible sur le dessin. Dans Pawnee, l’auteur s’est surpassé, et les planches sont un véritable régal pour les yeux. Des couleurs aquarelles magnifiques transcendent un dessin précis et maitrisé. Un carnet de croquis en fin d’album enfonce le clou et propose de nombreuses illustrations toutes aussi belles les unes que les autres.
Quant à l’histoire, cela dépendra de vos gouts et de vos attentes. Moi, j’aime bien ce genre d’aventures, les grands espaces, les fusillades, les courses poursuites, les indiens… ce n’est pas très recherché, certes, ni terriblement original, mais les multiples destins sont habillement racontés, les déboires des protagonistes m’ont tenu en haleine, et j’ai trouvé le dénouement beau et satisfaisant. Et puis l’auteur s’est clairement bien documenté, et campe son intrigue dans un contexte historique intéressant.
Une chouette aventure, bien dans le ton des autres albums de cet auteur.
Chaque chapitre de cette BD évoque une rencontre de cet étrange voyageur qui parcourt les Etats Unis en auto-stop et semble immortel malgré lui. D'où vient-il ? Quel est son but ?
On comprend vite que le récit comporte de nombreuses ellipses et que l'imagination du lecteur sera mise à contribution pour comprendre les non dits de l'histoire.
Si le premier épisode se déroule dans les années 50, les autres se situent dans un futur proche qui apparaît de plus en plus inquiétant.
J'ai beaucoup aimé cette BD. Le dessin et le scénario contribuent à installer une atmosphère à la fois étrange et anxiogène . Le récit est très fluide et ce one shot se dévore d'une traite.
Virevoltant, étonnant, amusant, touchant, séduisant, généreux, audacieux, talentueux, original. Je ne sais quel superlatif utiliser pour qualifier cet album tant tous ceux qui précèdent peuvent lui convenir sans totalement le cerner.
Différent ?
Oui, clairement ! Car les auteures partent d’un thème que l’on imaginerait bien plus vite traité à la manière d’un roman graphique réaliste avec des larmes, des vérités, des phylactères grands comme le monde et remplis des réflexions des acteurs, des petites notes scientifiques… mais le traitent à la manière d’un film muet de la belle époque, burlesque, sur-joué bien comme il faut, tendre et drôle à la fois.
Et ça marche incroyablement bien ! Pourquoi ? Tout d’abord pour une question de rythme. Comme je disais, cet album est virevoltant et le dessin de Julie Rocheleau explose de dynamisme et d’émotion. Ce trait, graphique et séduisant, envoûte le regard du lecteur. A titre personnel, j’ai été happé, hypnotisé, fasciné.
Mais cette fascination n’aurait été que temporaire si le récit en lui-même n’avait tenu la route. Et là encore le découpage est excellent. L’exercice délicat de la narration muette est parfaitement maîtrisé. Le message passe, les sentiments se partagent, les scènes burlesques gardent une rare élégance.
Oui, mais le fond ? Me direz-vous. Ce récit nous parle du cancer du sein et de son impact sur l’image de la femme. Comment il est ressenti, accepté dans notre société, tellement basée sur le paraître. Un sujet sérieux s’il en est. Et très bien traité dans cette comédie burlesque, en fait. Cette approche différente, inattendue, dédramatise le sujet mais force le lecteur à réfléchir sur son propre regard, sa propre vision de la féminité et son acceptation de la différence.
Donc voilà ! Cet album n’a l’air de rien, là, comme ça, et le lecteur distrait pourrait même croire qu’il s’agit d’une biographie imaginaire de Betty Boop. Il passerait alors à côté d’une petite perle burlesque et touchante, intelligente et vive, drôle et belle.
Bon ! J’arrête là avec mes superlatifs. Lisez-le et puis c’est tout. On en reparlera après si vous voulez.
Je continue de poursuivre ma quête de tous les Tezuka publiés en France, et Ayako était dans les premiers que je voulais lire. Et c'est bien ce que je pensais : Tezuka reste un incroyable génie.
Ce manga est dans la lignée de tous ses prédécesseurs : dessins mignons sur les personnages, hyper réaliste sur les décors, histoire bien sombre et très humaine, dénonciation des facettes les plus sombres de l'humanité, peinture de mœurs et réflexions philosophiques. On ne dirait pas comme ça, mais le bougre arrive à nous mélanger tout ça dans une histoire du Japon d'après guerre qui tient la route, mais qui est aussi très référencée. Je ne connais que très peu l'histoire du Japon, mais là je dois reconnaître que j'ai beaucoup apprécié ma découverte.
Tezuka prend à prétexte les réformes agricoles pour démontrer encore une fois, toute l'imbécillité de l'être humain. Parce qu'ici, l'humanité en prend sacrément pour son grade. Tout le monde a sa part d'ombre, souvent très sombre, et au final chacun n'aura que ce qu'il mérite. C'est d'ailleurs une fin très dure, mais le manga ne prétend pas montrer quelque chose de très gentil.
Comme souvent avec les lectures de Tezuka, je trouve qu'il a une vision sombre de l'être humain (connaissant l’histoire du bonhomme, c'est normal) mais qui est curieusement presque optimiste. Et c'est ça qui fait la force de Ayako. La tragédie ne se finit pas bien, mais presque. Il y a comme une note d'espoir final, et ça fait du bien. Surtout après toute la noirceur du propos.
C'est le genre de manga que j'affectionne, et j'apprécie de plus en plus le travail époustouflant de Tezuka, qui mérite décidément son surnom de "Dieu du manga". Un manga mature, adulte, sombre et violent, à ne pas mettre entre toutes les mains.
Bon sang, ce que c'est bien fait !
J'ai moi-même une amie sourde (disons très malentendante plutôt), et cette BD m'a fait l'effet d'une claque sur la condition qu'elle peut avoir. En effet, si l'idée est bien de considérer un garçon qui s'en veut de ce qu'il a fait, la BD est avant tout un excellent regard sur le handicap et ce qu'il apporte ou enlève, à celui ou celle qui le subit, mais également aux autres. La série développe cela très bien, par des petites touches que j'ai trouvé bien senties, aussi bien au niveau des caractères des personnages que des situations. Entre la famille, les connaissances, les camarades et les gens de manière générale, il y a une superbe mise en relation de tout cela avec l'héroïne et sa surdité.
Je ne m'attarderais pas sur le dessin, que j'ai trouvé efficace et clair sans que je ne note quelque chose de particulièrement exceptionnel, mais j'ai surtout adoré la façon dont elle met en image certaines situations. Le meilleur exemple est pour moi le chapitre où l'on voit du point de vue de l'héroïne sourde et que le texte est coupé, quasiment illisible. Une très bonne transcription de ce qu'on peut éprouver, et qui fait bien ressentir tout le côté "handicapant".
Bon, j'aurais bien deux trois défauts à rajouter, notamment sur certains personnages un peu trop stéréotypés, mais j'ai aimé la façon dont l'auteur arrive à utiliser son propos de base pour ensuite développer sur nos faiblesses à tous. Quoi de mieux que d'utiliser un sourd pour parler de manque de communication, et surtout d'écoute ?
J'ai bien des raisons d'aimer cette série, mais c'est surtout par valeur personnelle, et parce que je crois que je comprends un peu mieux ce que vis une amie, que j'ai l'envie de vous le préconiser. Et puis, pour une fois que ça finit bien sans mariage ...
Peu de dialogues dans cet album, qui se lit assez vite donc, mais qui, malgré la froideur du thème, se révèle aussi agréable à lire.
C’est une adaptation de l’œuvre de Kafka. Une bonne adaptation. En effet, on est d’emblée placé, en même temps que monsieur K, dans un univers absurde – qui flirte parfois avec le loufoque, pour tout aussitôt basculer vers une sorte de fantastique angoissant.
K ne sait pas qui l’accuse, de quoi il est accusé, où et comment se défendre, et son imagination échafaude des hypothèses, des antidotes à un poison qui agit de manière lancinante : il est forcément coupable !
Les décors, que ce soit les décors urbains ou les intérieurs, font la part belle à une géométrie labyrinthique, elle aussi manquant de sens, dans laquelle K se perd. La partie graphique est vraiment réussie.
Bref, voilà un album tout à fait recommandable pour les amoureux de l’univers kafkaïen (dont les Julius de MAM se sont un peu inspirés).
Note réelle 3,5/5.
Mémoires de Marie-Antoinette où la reine elle-même se livre et raconte sa vie, de sa jeunesse à Vienne jusqu'à son exécution durant la Révolution, en passant bien sûr par son mariage avec Louis XVI et la vie à la cour de Versailles.
Cet ouvrage respectueux de la véracité historique se lit comme un récit d'aventure, d'histoire et de romance au ton moderne et dynamique.
La narratrice est Marie-Antoinette elle-même et découvrir sa vision des choses est intéressante et permet de se rapprocher d'elle plus facilement. D'emblée, elle se présente avec honnêteté comme étant certes gentille mais aussi très futile et superficielle, s'ennuyant dès lors qu'il n'y a pas de fêtes, de rires et de danses. Et pourtant, grâce à la façon dont le lecteur est placé au plus près de ses pensées, on finit par lui pardonner son insouciance et ses dépenses somptuaires et presque à la plaindre quand les choses finissent par mal tourner. Ça donne vraiment l'impression d'une brave personne dans une prison dorée qui n'a pas les moyens de se rendre compte que ses actes de petite fille gâtée ne peuvent qu'attiser la haine du peuple et l'amener à sa perte en même temps que celle du royaume.
Sur le plan historique, le récit est en outre bien instructif. On y découvre de l'intérieur un pan des rouages du fonctionnement du royaume, de la cour et de la société française de l'époque, même si cet aperçu est forcément incomplet puisque vu par les yeux d'une reine qui souhaiterait éviter autant que possible de s'impliquer dans la politique. J'ai apprécié en tout cas de voir sous un autre angle les événements et personnages rencontrés dans le prenant manga La Rose de Versailles.
Et l'ensemble est rendu d'autant plus plaisant à lire que le dessin est très agréable. Le trait est doux, frais et fin. Les personnages sont bien rendus. Et si les paysages d'ensemble manquent un peu de détails, les décors plus rapprochés comme les couloirs et jardins de Versailles sont de belle qualité. Et surtout j'ai beaucoup apprécié les couleurs qui donnent une atmosphère jeune et lumineuse au récit, lui permettant de s'éloigner encore plus d'une BD historique trop académique.
C'est un plaisir de découvrir l'Histoire de France de cette manière.
C'est à Angoulême que j'ai craqué pour cette BD dont j'avais lu des avis plutôt élogieux. Tommy Redolfi étant présent sur le stand de la Boîte à Bulles, je n'ai pas hésité longtemps.
Ce qui frappe avant tout quand on ouvre cet album c'est la touche personnelle de l'auteur dans son graphisme. Que ce soit ce côté un peu caricatural des traits de ses personnages ou les couleurs utilisées, tout est fait pour nos faire vibrer, pour exacerber notre ressenti vis à vis de ce récit fantasmé de Marilyn. Ses personnages m'ont renvoyé au style de Grazia La Padula (qui dessine avec Tony Sandoval) que j'apprécie beaucoup aussi, et les touches de fantastique qui fleurissent de-ci de-là ne sont pas étrangères à ce sentiment non plus.
Tout cela donne à l'ensemble un petit parfum Lynchien à cette histoire (en même temps, pas étonnant, Lynch a déjà bien donné côté Hollywood...) avec son lot de personnages étranges et dérangeants, et une esthétique singulière, avec au centre Marilyn et la forge de sa légende... et de sa déchéance.
Dur de parle de l'histoire sans trop en dévoiler, je vous laisse donc ce plaisir pour profiter pleinement du talent de Tommy Redolfi qui a su construire un récit intrigant et prenant sur une personnalité hors norme
Et revoilà Lapinot.
Trondheim fait dans la continuité, avec un album cartonné couleur au format classique (nouveauté pour la maison d'édition "L'Association").
J'ai beaucoup aimé cet album, qui, comme les autres Lapinot, contient son lot de petites réflexions sur la vie.
Concernant l'intrigue, je la trouve plutôt davantage travaillée que dans les albums précédents. De plus, Trondheim fait passer quelques messages politiques, sur le journalisme, les réseaux sociaux, dont il ne me semblait pas être coutumier dans les albums précédents.
Côté dessin, on retrouve le trait de Trondheim, avec des décors plus détaillés qu'avant.
Bref, du tout bon.
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L'Échappée
Contrairement à mes deux précédents collègues j'ai bien aimé cette histoire d'un homme qui un jour décide de tout laisser tomber, de partir. Il faut malgré tout une certaine dose de caractère voire même une dose certaine pour oser tout laisser tomber de la sorte. Chacun appréhendera ce récit en fonction de son rapport au monde et surtout à sa vie. Qu'est-ce que cela nous montre ? A mon sens le fait que quoi que l'on fasse il ne sert à rien de vouloir aller contre le destin, l'homme serait immanquablement contraint de se comporter en rapport avec un chemin tout tracé. Ici notre héros quitte une routine pour finalement tomber sur une autre société elle aussi pétrie de codes qui n'est pas sans rappeler un certain village où le héros n'était pas un numéro. Quant au retour à la vie sauvage que d'aucuns idéalisent l'on voit ici qu'elle possède sous des dehors idylliques ses propres limites. Même si cela se lit vite je trouve que les choses sont bien pensées, elles amènent à réfléchir de manière intelligente sur le sens de la vie ce que l'on veut y mettre et pourquoi. En tout état de cause un album malin, à lire.
Pawnee
Il semble y avoir un consensus en rapport aux BDs de Prugne : un dessin magnifique, mais des histoires un peu légères. Pas de discussion possible sur le dessin. Dans Pawnee, l’auteur s’est surpassé, et les planches sont un véritable régal pour les yeux. Des couleurs aquarelles magnifiques transcendent un dessin précis et maitrisé. Un carnet de croquis en fin d’album enfonce le clou et propose de nombreuses illustrations toutes aussi belles les unes que les autres. Quant à l’histoire, cela dépendra de vos gouts et de vos attentes. Moi, j’aime bien ce genre d’aventures, les grands espaces, les fusillades, les courses poursuites, les indiens… ce n’est pas très recherché, certes, ni terriblement original, mais les multiples destins sont habillement racontés, les déboires des protagonistes m’ont tenu en haleine, et j’ai trouvé le dénouement beau et satisfaisant. Et puis l’auteur s’est clairement bien documenté, et campe son intrigue dans un contexte historique intéressant. Une chouette aventure, bien dans le ton des autres albums de cet auteur.
Le Voyageur
Chaque chapitre de cette BD évoque une rencontre de cet étrange voyageur qui parcourt les Etats Unis en auto-stop et semble immortel malgré lui. D'où vient-il ? Quel est son but ? On comprend vite que le récit comporte de nombreuses ellipses et que l'imagination du lecteur sera mise à contribution pour comprendre les non dits de l'histoire. Si le premier épisode se déroule dans les années 50, les autres se situent dans un futur proche qui apparaît de plus en plus inquiétant. J'ai beaucoup aimé cette BD. Le dessin et le scénario contribuent à installer une atmosphère à la fois étrange et anxiogène . Le récit est très fluide et ce one shot se dévore d'une traite.
Betty Boob
Virevoltant, étonnant, amusant, touchant, séduisant, généreux, audacieux, talentueux, original. Je ne sais quel superlatif utiliser pour qualifier cet album tant tous ceux qui précèdent peuvent lui convenir sans totalement le cerner. Différent ? Oui, clairement ! Car les auteures partent d’un thème que l’on imaginerait bien plus vite traité à la manière d’un roman graphique réaliste avec des larmes, des vérités, des phylactères grands comme le monde et remplis des réflexions des acteurs, des petites notes scientifiques… mais le traitent à la manière d’un film muet de la belle époque, burlesque, sur-joué bien comme il faut, tendre et drôle à la fois. Et ça marche incroyablement bien ! Pourquoi ? Tout d’abord pour une question de rythme. Comme je disais, cet album est virevoltant et le dessin de Julie Rocheleau explose de dynamisme et d’émotion. Ce trait, graphique et séduisant, envoûte le regard du lecteur. A titre personnel, j’ai été happé, hypnotisé, fasciné. Mais cette fascination n’aurait été que temporaire si le récit en lui-même n’avait tenu la route. Et là encore le découpage est excellent. L’exercice délicat de la narration muette est parfaitement maîtrisé. Le message passe, les sentiments se partagent, les scènes burlesques gardent une rare élégance. Oui, mais le fond ? Me direz-vous. Ce récit nous parle du cancer du sein et de son impact sur l’image de la femme. Comment il est ressenti, accepté dans notre société, tellement basée sur le paraître. Un sujet sérieux s’il en est. Et très bien traité dans cette comédie burlesque, en fait. Cette approche différente, inattendue, dédramatise le sujet mais force le lecteur à réfléchir sur son propre regard, sa propre vision de la féminité et son acceptation de la différence. Donc voilà ! Cet album n’a l’air de rien, là, comme ça, et le lecteur distrait pourrait même croire qu’il s’agit d’une biographie imaginaire de Betty Boop. Il passerait alors à côté d’une petite perle burlesque et touchante, intelligente et vive, drôle et belle. Bon ! J’arrête là avec mes superlatifs. Lisez-le et puis c’est tout. On en reparlera après si vous voulez.
Ayako
Je continue de poursuivre ma quête de tous les Tezuka publiés en France, et Ayako était dans les premiers que je voulais lire. Et c'est bien ce que je pensais : Tezuka reste un incroyable génie. Ce manga est dans la lignée de tous ses prédécesseurs : dessins mignons sur les personnages, hyper réaliste sur les décors, histoire bien sombre et très humaine, dénonciation des facettes les plus sombres de l'humanité, peinture de mœurs et réflexions philosophiques. On ne dirait pas comme ça, mais le bougre arrive à nous mélanger tout ça dans une histoire du Japon d'après guerre qui tient la route, mais qui est aussi très référencée. Je ne connais que très peu l'histoire du Japon, mais là je dois reconnaître que j'ai beaucoup apprécié ma découverte. Tezuka prend à prétexte les réformes agricoles pour démontrer encore une fois, toute l'imbécillité de l'être humain. Parce qu'ici, l'humanité en prend sacrément pour son grade. Tout le monde a sa part d'ombre, souvent très sombre, et au final chacun n'aura que ce qu'il mérite. C'est d'ailleurs une fin très dure, mais le manga ne prétend pas montrer quelque chose de très gentil. Comme souvent avec les lectures de Tezuka, je trouve qu'il a une vision sombre de l'être humain (connaissant l’histoire du bonhomme, c'est normal) mais qui est curieusement presque optimiste. Et c'est ça qui fait la force de Ayako. La tragédie ne se finit pas bien, mais presque. Il y a comme une note d'espoir final, et ça fait du bien. Surtout après toute la noirceur du propos. C'est le genre de manga que j'affectionne, et j'apprécie de plus en plus le travail époustouflant de Tezuka, qui mérite décidément son surnom de "Dieu du manga". Un manga mature, adulte, sombre et violent, à ne pas mettre entre toutes les mains.
A Silent voice
Bon sang, ce que c'est bien fait ! J'ai moi-même une amie sourde (disons très malentendante plutôt), et cette BD m'a fait l'effet d'une claque sur la condition qu'elle peut avoir. En effet, si l'idée est bien de considérer un garçon qui s'en veut de ce qu'il a fait, la BD est avant tout un excellent regard sur le handicap et ce qu'il apporte ou enlève, à celui ou celle qui le subit, mais également aux autres. La série développe cela très bien, par des petites touches que j'ai trouvé bien senties, aussi bien au niveau des caractères des personnages que des situations. Entre la famille, les connaissances, les camarades et les gens de manière générale, il y a une superbe mise en relation de tout cela avec l'héroïne et sa surdité. Je ne m'attarderais pas sur le dessin, que j'ai trouvé efficace et clair sans que je ne note quelque chose de particulièrement exceptionnel, mais j'ai surtout adoré la façon dont elle met en image certaines situations. Le meilleur exemple est pour moi le chapitre où l'on voit du point de vue de l'héroïne sourde et que le texte est coupé, quasiment illisible. Une très bonne transcription de ce qu'on peut éprouver, et qui fait bien ressentir tout le côté "handicapant". Bon, j'aurais bien deux trois défauts à rajouter, notamment sur certains personnages un peu trop stéréotypés, mais j'ai aimé la façon dont l'auteur arrive à utiliser son propos de base pour ensuite développer sur nos faiblesses à tous. Quoi de mieux que d'utiliser un sourd pour parler de manque de communication, et surtout d'écoute ? J'ai bien des raisons d'aimer cette série, mais c'est surtout par valeur personnelle, et parce que je crois que je comprends un peu mieux ce que vis une amie, que j'ai l'envie de vous le préconiser. Et puis, pour une fois que ça finit bien sans mariage ...
Le Procès
Peu de dialogues dans cet album, qui se lit assez vite donc, mais qui, malgré la froideur du thème, se révèle aussi agréable à lire. C’est une adaptation de l’œuvre de Kafka. Une bonne adaptation. En effet, on est d’emblée placé, en même temps que monsieur K, dans un univers absurde – qui flirte parfois avec le loufoque, pour tout aussitôt basculer vers une sorte de fantastique angoissant. K ne sait pas qui l’accuse, de quoi il est accusé, où et comment se défendre, et son imagination échafaude des hypothèses, des antidotes à un poison qui agit de manière lancinante : il est forcément coupable ! Les décors, que ce soit les décors urbains ou les intérieurs, font la part belle à une géométrie labyrinthique, elle aussi manquant de sens, dans laquelle K se perd. La partie graphique est vraiment réussie. Bref, voilà un album tout à fait recommandable pour les amoureux de l’univers kafkaïen (dont les Julius de MAM se sont un peu inspirés). Note réelle 3,5/5.
Mémoires de Marie-Antoinette
Mémoires de Marie-Antoinette où la reine elle-même se livre et raconte sa vie, de sa jeunesse à Vienne jusqu'à son exécution durant la Révolution, en passant bien sûr par son mariage avec Louis XVI et la vie à la cour de Versailles. Cet ouvrage respectueux de la véracité historique se lit comme un récit d'aventure, d'histoire et de romance au ton moderne et dynamique. La narratrice est Marie-Antoinette elle-même et découvrir sa vision des choses est intéressante et permet de se rapprocher d'elle plus facilement. D'emblée, elle se présente avec honnêteté comme étant certes gentille mais aussi très futile et superficielle, s'ennuyant dès lors qu'il n'y a pas de fêtes, de rires et de danses. Et pourtant, grâce à la façon dont le lecteur est placé au plus près de ses pensées, on finit par lui pardonner son insouciance et ses dépenses somptuaires et presque à la plaindre quand les choses finissent par mal tourner. Ça donne vraiment l'impression d'une brave personne dans une prison dorée qui n'a pas les moyens de se rendre compte que ses actes de petite fille gâtée ne peuvent qu'attiser la haine du peuple et l'amener à sa perte en même temps que celle du royaume. Sur le plan historique, le récit est en outre bien instructif. On y découvre de l'intérieur un pan des rouages du fonctionnement du royaume, de la cour et de la société française de l'époque, même si cet aperçu est forcément incomplet puisque vu par les yeux d'une reine qui souhaiterait éviter autant que possible de s'impliquer dans la politique. J'ai apprécié en tout cas de voir sous un autre angle les événements et personnages rencontrés dans le prenant manga La Rose de Versailles. Et l'ensemble est rendu d'autant plus plaisant à lire que le dessin est très agréable. Le trait est doux, frais et fin. Les personnages sont bien rendus. Et si les paysages d'ensemble manquent un peu de détails, les décors plus rapprochés comme les couloirs et jardins de Versailles sont de belle qualité. Et surtout j'ai beaucoup apprécié les couleurs qui donnent une atmosphère jeune et lumineuse au récit, lui permettant de s'éloigner encore plus d'une BD historique trop académique. C'est un plaisir de découvrir l'Histoire de France de cette manière.
Holy Wood - Portrait fantasmé de Marilyn Monroe
C'est à Angoulême que j'ai craqué pour cette BD dont j'avais lu des avis plutôt élogieux. Tommy Redolfi étant présent sur le stand de la Boîte à Bulles, je n'ai pas hésité longtemps. Ce qui frappe avant tout quand on ouvre cet album c'est la touche personnelle de l'auteur dans son graphisme. Que ce soit ce côté un peu caricatural des traits de ses personnages ou les couleurs utilisées, tout est fait pour nos faire vibrer, pour exacerber notre ressenti vis à vis de ce récit fantasmé de Marilyn. Ses personnages m'ont renvoyé au style de Grazia La Padula (qui dessine avec Tony Sandoval) que j'apprécie beaucoup aussi, et les touches de fantastique qui fleurissent de-ci de-là ne sont pas étrangères à ce sentiment non plus. Tout cela donne à l'ensemble un petit parfum Lynchien à cette histoire (en même temps, pas étonnant, Lynch a déjà bien donné côté Hollywood...) avec son lot de personnages étranges et dérangeants, et une esthétique singulière, avec au centre Marilyn et la forge de sa légende... et de sa déchéance. Dur de parle de l'histoire sans trop en dévoiler, je vous laisse donc ce plaisir pour profiter pleinement du talent de Tommy Redolfi qui a su construire un récit intrigant et prenant sur une personnalité hors norme
Les Nouvelles Aventures de Lapinot
Et revoilà Lapinot. Trondheim fait dans la continuité, avec un album cartonné couleur au format classique (nouveauté pour la maison d'édition "L'Association"). J'ai beaucoup aimé cet album, qui, comme les autres Lapinot, contient son lot de petites réflexions sur la vie. Concernant l'intrigue, je la trouve plutôt davantage travaillée que dans les albums précédents. De plus, Trondheim fait passer quelques messages politiques, sur le journalisme, les réseaux sociaux, dont il ne me semblait pas être coutumier dans les albums précédents. Côté dessin, on retrouve le trait de Trondheim, avec des décors plus détaillés qu'avant. Bref, du tout bon.