Celles et ceux qui me connaissent savent que je suis un geek absolu et un gros consommateur de jeux-vidéos, modernes ou rétros. Ce genre de BD est donc forcément ma tasse de thé, et je suis ressorti ravi de ma lecture.
L’auteur (que j’ai rencontré en dédicace à Angoulême 2018.) raconte la complexe histoire de Tetris : sa création en URSS par Alexey Pajitnov, chercheur au centre informatique de l'Académie des sciences, sa découverte par l’éditeur de jeux britannique Andromeda, le coup de maître de Nintendo avec la version Gameboy, son succès mondial, mais aussi la bataille légale autour des droits d’auteur… ce dernier aspect est certes important, mais assez complexe et laborieux à lire. Box Brown ne se limite pas à Tetris, il raconte aussi l’histoire de Nintendo, parle du rôle des jeux-vidéos et des jeux de manière plus générale, mais aussi de l’histoire récente de Alexey Pajitnov aux USA… bref, tout un programme.
Le style graphique épuré est parfait pour ce genre d’histoire. J’ai notamment beaucoup aimé la mise en image du processus de création de Tetris.
J’imagine que cet album ne va pas passionner tout le monde, mais moi, je suis fan !
Il est certains titres qui s’accordent si bien à l’œuvre que cela en est troublant. Tout d’abord, c’est le grand format qui retient l’attention mais surtout la reliure soignée avec son dos toilé. L’objet en lui-même semble exercer un certain magnétisme dès l’instant où on le feuillette. Grâce à sa colorisation trichromique et son graphisme « vintage », on est comme happé par cet univers singulier, à la croisée d’Hergé et de Charles Burns, fait de longues plages silencieuses et intrigantes.
De Hergé, on retrouve non seulement cette ligne claire et ce souci porté au réalisme des décors, mais également le personnage de Pierre qui évoque immédiatement Tintin, pas seulement dans l’aspect et la jeunesse mais aussi dans sa curiosité de détective et sa propension à se retrouver dans des situations périlleuses. En voyant Pierre sillonner les sombres dédales des thermes de Vals, dont la froide minéralité apparaît un rien menaçante une fois passée l’heure de fermeture, c'est l’image du reporter à la houpe qui se superpose, par exemple lorsque celui-ci arpente les labyrinthes de « l’Île noire », à moins que ce ne soit ceux de la pyramide dans les « Cigares du pharaon »… Et puis ces éléments mystérieux émaillant le récit, qui rapprocheraient plutôt « L’Aimant » de l’œuvre de Burns, tel ce Zippo, celui de Pierre, qui s’impose comme un objet-clé de l’histoire, mais cela on ne le comprendra qu’en toute fin de l’ouvrage. Et puis ces événements inexplicables, comme ce caillou projeté par une fenêtre du train où voyage Pierre, juste avant son arrivée à Vals, un caillou comme « aimanté » par le jeune homme, lancé ni d’on ne sait où ni par qui (la montagne ?).
Mais que donc cherche ce jeune étudiant, à coup de croquis savants, fortement attiré par ce bâtiment aux lignes si modernes et si pures qu’on finit nous-mêmes, en tant que lecteurs, par trouver fascinant ? Une porte dérobée sans doute, mais qui mènerait où ? Quant aux thermes, ils sont un personnage à eux seuls, comme doté d’une âme propre, formant avec Pierre et la montagne avoisinante une sorte de trio amoureux relié par une force irrépressible. Un trio dont la communication silencieuse semble inaccessible au commun des mortels, lequel peut au mieux déduire un lien évident avec la « pierre », représentée par ce mineral aux propriétés magnétiques, vraisemblablement contenu dans les entrailles de la montagne surplombant les thermes, elles-mêmes à moitié enfouies dans la terre. Et c’est peut-être bien, de façon consciente ou non chez son auteur, ce qui a inspiré le titre, car dans « aimant » il y a « aimer », et en amour il est toujours question d’attirance et de magnétisme…
C’est une bien belle découverte que cet auteur, dont c’est la première bande dessinée, et qui nous propose ici une promenade architecturale oscillant entre réalisme et onirisme, sur fond de légende locale. Même si le dénouement peut laisser une impression d’inachevé, Lucas Harari rentre incontestablement dans la caste des artistes à suivre dans le monde du neuvième art.
Une bonne série qui mélange l'aventure, l'humour et le récit historique et cela peut effectivement rappeler le travail de Cauvin.
On retrouve trois personnages hauts-en-couleurs et j'adore l'idée que Honoré travaille secrètement pour les ennemis de Napoléon. Cela permet de rendre la situation un peu originale et cela donne de bons quiproquos entre ses amis et lui. D'ailleurs l'humour marche très bien et j'ai souvent rigolé à la lecture de ces deux tomes. Les histoires sont prenantes et j'attends la suite avec une certaine impatience.
Le dessin est correct. Le seul reproche que je puisse faire c'est que je trouve la couverture du premier tome un peu moche à cause des bras du gros musclé qui me semblent un peu disproportionnés.
C'est pas la série du siècle, mais c'est un très bon divertissement.
Vous devez aimer le style narratif de DeCrecy afin de ne pas être déçu lorsque vous avez fini de lire un de ses livres.
Plein d'idées originales et étranges, Prosopopus suit cette ligne narrative, mais cette fois sans texte. Le design est fluide et cinématographique, donnant la sensation de voir un film muet mais moderne et en couleur. Le recit, un polar, est très intéressante et complexe, se terminant de la même manière que les films de David Lynch, avec de la place pour plusieurs interprétations, et peut ne pas plaire à tout le monde, mais c'est le risque que courent les expérimentalistes comme DeCrecy.
Davide Reviati est ce que j'appellerai un auteur social, un chroniqueur d'une jeunesse italienne, qui tourne en rond, sans horizon aucun et qui tue le temps comme elle peut. C'était déjà un peu le cas avec son autre album Etat de veille. Il continue ici, avec cet album présent dans la sélection d'Angoulême 2018.
Nous voilà plongés dans le quotidien d'une bande d'amis au Nord de l'Italie, qui végètent dans un lycée technique. Hormis, les sorties nocturnes, où l'on consomme alcool et cannabis, rien ne vient égayer son quotidien. Aucun horizon radieux ne s'offre à elle.
Et puis, à coté, il y a ce camp de gens du voyage, encore plus marginalisés qu'eux et qui a tant souffert lors de la période nazie. On les méprise autant qu'ils fascinent, surtout lorsque parmi eux apparait une jeune fille, qui ne semble pas des plus farouches.
Une chronique du racisme ordinaire tel qu'il existe dans toutes nos sociétés.
Les lecteurs de ce genre d'histoire, qui s'étale sur près de 550 pages, apprécieront la qualité d'écriture de Davide Reviati, tout comme son trait en noir et blanc, où l'on reste plutôt dans l'esquisse que dans le dessin parfaitement abouti. Son trait m'a fait penser à Cuvelier en certaines circonstances. Une histoire qui n'est pas destinée au grand public, mais les amateurs de récits exigeants apprécieront sans nul doute.
J'ai commencé à lire ce livre avec très peu d'attentes et j'ai fini par l'aimer. Le design est très bon, mais c'est la colorisation qui est fantastique, très atmosphérique, surtout l'éclairage. L'histoire est aussi très bien racontée, et bien qu'elle ne soit rien d'extraordinaire, elle est très absorbante, avec des dialogues très réussis et des personnages mystérieux qui stimulent la lecture jusqu'à la fin.
Ben oui je sais c'est ce qui s’appelle un achat compulsif. Suite à l'avis de PAco je n'ai fait ni une ni deux, des images dans la galerie qui donnent envie et Marc Moreno au dessin! C'est peu de dire que depuis Le Régulateur le dessin s'est amélioré, je trouve que les proportions notamment des personnages se sont grandement améliorées, ici c'est maitrisé, pas loin du grand art.
Et puis j'aime bien le thème du vampire, surtout lorsque l'on voit celui-ci en action à travers les siècles. Et puis avouons que le look des bestioles, surtout quand elles se fâchent, a un aspect pour le moins nouveau et intéressant.
Sur le fond pas une originalité folle, encore une histoire de lutte entre différents clans de vampires mais je trouve que les choses sont bien amenées. Du rythme, du sang avec des scènes de combats plutôt réussies, personnellement je suis preneur, j'attends la suite. Ah si un dernier mot pour la couverture assez réussie je trouve.
Nouvelle œuvre de Christian Rossi et retour pour ce dernier à ces anciennes amours. De fait, l’auteur de (entre autres) « La Gloire d'Héra » et de « Tirésias » continue son exploration de la Grèce antique avec « Le Cœur des Amazones ».
Le scénario, signé Géraldine Bindi, nous entraine dans la forêt des Amazones, proche d’une Troie alors en guerre. Si les références à la mythologie sont nombreuses, ce récit peut séduire n’importe quel lecteur, féru ou non de la Grèce antique. Pourvu qu’il connaisse un tant soit peu le mythe des farouches guerrières amazones, pourvu que les noms d’Achille et d’Hélène de Troie ne lui soient pas totalement inconnus, il s’en sortira sans trop de dommages. Bon, certes, il passera à côté de l’une ou l’autre référence mais l’intrigue centrale, elle, lui sera totalement accessible.
Et quid donc de cette intrigue ? Et bien, c’est à une plongée dans la société des Amazones et au mode de fonctionnement de celle-ci que nous convient les artistes. Violence, spiritualité et sensualité sont au rendez-vous. Et nous sommes conviés à assister à un tournant majeur de leur histoire. Le début du récit est un peu lent, je ne savais pas exactement vers quoi les auteurs voulaient m’amener mais le dessin de Christian Rossi suffisait alors à garder mon attention en éveil. Puis les enjeux apparaissent de plus en plus clairement et la seconde partie du récit donne toute sa raison d’être à cet album, s’éloignant d’une simple évocation mythologique pour développer des propos plus intemporels.
Comme il se doit lorsque l’on traite de manière classique de la mythologie grecque, le ton est dramatique, les phrases sonnent comme des couperets. Clairement, rapidement, on comprend qu’on n’est pas là pour rigoler. Ne craignez cependant pas de tomber sur une narration lourde ou absconse. Si les passages légers sont rares, l’album se lit sans peine.
Et puis, il y a le dessin de Christian Rossi. Son trait explose de finesse lorsqu’il est traité en noir et blanc tandis que la colorisation adoucit les formes et apporte de la profondeur aux cases. Bien souvent, ces cases combinent donc des parties en noir et blanc et des parties colorisées dans des teintes monochromes. La combinaison des deux est parfaite et dote les planches d’un visuel sans égal. C’est fin, beau, sensuel, dynamique, expressif, original et accessible à un large public (je parle ici de la lisibilité du trait).
A titre personnel, je ne suis pas un grand admirateur de la Grèce antique et de sa mythologie. Pourtant, j’ai beaucoup aimé ce récit. Sans doute parce que, outre la beauté du dessin (feuilletez ce livre ne fusse que pour voir la case illustrant le Cœur des Amazones), ses auteurs ont eu l’intelligence de lui donner un sens plus intemporel, qui s’inscrit dans cette grande mouvance actuelle pour une égalité des sexes, mais aussi pour un respect de l’autre, pour la reconnaissance de ce que chaque sexe peut apporter à l’autre.
Un bel album, dans tous les sens du terme.
Avec ce dernier album, Gipi tape fort ! Dans la lignée du roman "La route" de Cormac McCarthy, il nous largue dans un monde post-apocalyptique mystérieux où un père et ses deux fils essayent de survivre tant bien que mal.
On est dans le minimalisme, l'économie, tant sur le fond que sur la forme. Très peu de survivants, mais souvent tous plus torturés les uns que les autres. Chaque objet a de l'importance dans ce monde où les sociétés ont été balayées. Même le langage en a fait les frais et semble anémié.
Et c'est la force de cet album coup de poing qui nous saisit par cette relation complexe entre ce père qui semble avoir vécu la transition de ce monde et sa déchéance, et ses deux fils qu'il malmène "pour leur bien" ou tout du moins pour les rendre aptes à une survie incertaine. Sauf qu'entre la théorie et la pratique, forcément rien ne se passe comme prévu...
Un conte noir et loin d'être optimiste, mais d'une rare puissance.
J’ai beaucoup aimé cette histoire, originale et sensible.
Malgré son dessin (clairement estampillé underground américain), par-delà la fausse impression de nous trouver devant un récit déjanté et peu facile d’accès, ‘Dans la forêt sombre et mystérieuse’ se révèle très agréable à lire, pas du tout prise de tête et aborde des thèmes universels qui plairont à tout lecteur de bande dessinée (petits et grands).
Le dessin expressif en diable, le scénario bien construit, l’originalité de l’univers, tout concoure à un agréable moment de lecture. L’humour est omniprésent tandis que le personnage d’Angelo touche tant dans sa candeur que dans ses excès.
Un bel album, en somme.
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Tetris - Jouer le jeu
Celles et ceux qui me connaissent savent que je suis un geek absolu et un gros consommateur de jeux-vidéos, modernes ou rétros. Ce genre de BD est donc forcément ma tasse de thé, et je suis ressorti ravi de ma lecture. L’auteur (que j’ai rencontré en dédicace à Angoulême 2018.) raconte la complexe histoire de Tetris : sa création en URSS par Alexey Pajitnov, chercheur au centre informatique de l'Académie des sciences, sa découverte par l’éditeur de jeux britannique Andromeda, le coup de maître de Nintendo avec la version Gameboy, son succès mondial, mais aussi la bataille légale autour des droits d’auteur… ce dernier aspect est certes important, mais assez complexe et laborieux à lire. Box Brown ne se limite pas à Tetris, il raconte aussi l’histoire de Nintendo, parle du rôle des jeux-vidéos et des jeux de manière plus générale, mais aussi de l’histoire récente de Alexey Pajitnov aux USA… bref, tout un programme. Le style graphique épuré est parfait pour ce genre d’histoire. J’ai notamment beaucoup aimé la mise en image du processus de création de Tetris. J’imagine que cet album ne va pas passionner tout le monde, mais moi, je suis fan !
L'Aimant
Il est certains titres qui s’accordent si bien à l’œuvre que cela en est troublant. Tout d’abord, c’est le grand format qui retient l’attention mais surtout la reliure soignée avec son dos toilé. L’objet en lui-même semble exercer un certain magnétisme dès l’instant où on le feuillette. Grâce à sa colorisation trichromique et son graphisme « vintage », on est comme happé par cet univers singulier, à la croisée d’Hergé et de Charles Burns, fait de longues plages silencieuses et intrigantes. De Hergé, on retrouve non seulement cette ligne claire et ce souci porté au réalisme des décors, mais également le personnage de Pierre qui évoque immédiatement Tintin, pas seulement dans l’aspect et la jeunesse mais aussi dans sa curiosité de détective et sa propension à se retrouver dans des situations périlleuses. En voyant Pierre sillonner les sombres dédales des thermes de Vals, dont la froide minéralité apparaît un rien menaçante une fois passée l’heure de fermeture, c'est l’image du reporter à la houpe qui se superpose, par exemple lorsque celui-ci arpente les labyrinthes de « l’Île noire », à moins que ce ne soit ceux de la pyramide dans les « Cigares du pharaon »… Et puis ces éléments mystérieux émaillant le récit, qui rapprocheraient plutôt « L’Aimant » de l’œuvre de Burns, tel ce Zippo, celui de Pierre, qui s’impose comme un objet-clé de l’histoire, mais cela on ne le comprendra qu’en toute fin de l’ouvrage. Et puis ces événements inexplicables, comme ce caillou projeté par une fenêtre du train où voyage Pierre, juste avant son arrivée à Vals, un caillou comme « aimanté » par le jeune homme, lancé ni d’on ne sait où ni par qui (la montagne ?). Mais que donc cherche ce jeune étudiant, à coup de croquis savants, fortement attiré par ce bâtiment aux lignes si modernes et si pures qu’on finit nous-mêmes, en tant que lecteurs, par trouver fascinant ? Une porte dérobée sans doute, mais qui mènerait où ? Quant aux thermes, ils sont un personnage à eux seuls, comme doté d’une âme propre, formant avec Pierre et la montagne avoisinante une sorte de trio amoureux relié par une force irrépressible. Un trio dont la communication silencieuse semble inaccessible au commun des mortels, lequel peut au mieux déduire un lien évident avec la « pierre », représentée par ce mineral aux propriétés magnétiques, vraisemblablement contenu dans les entrailles de la montagne surplombant les thermes, elles-mêmes à moitié enfouies dans la terre. Et c’est peut-être bien, de façon consciente ou non chez son auteur, ce qui a inspiré le titre, car dans « aimant » il y a « aimer », et en amour il est toujours question d’attirance et de magnétisme… C’est une bien belle découverte que cet auteur, dont c’est la première bande dessinée, et qui nous propose ici une promenade architecturale oscillant entre réalisme et onirisme, sur fond de légende locale. Même si le dénouement peut laisser une impression d’inachevé, Lucas Harari rentre incontestablement dans la caste des artistes à suivre dans le monde du neuvième art.
Les Trois Grognards
Une bonne série qui mélange l'aventure, l'humour et le récit historique et cela peut effectivement rappeler le travail de Cauvin. On retrouve trois personnages hauts-en-couleurs et j'adore l'idée que Honoré travaille secrètement pour les ennemis de Napoléon. Cela permet de rendre la situation un peu originale et cela donne de bons quiproquos entre ses amis et lui. D'ailleurs l'humour marche très bien et j'ai souvent rigolé à la lecture de ces deux tomes. Les histoires sont prenantes et j'attends la suite avec une certaine impatience. Le dessin est correct. Le seul reproche que je puisse faire c'est que je trouve la couverture du premier tome un peu moche à cause des bras du gros musclé qui me semblent un peu disproportionnés. C'est pas la série du siècle, mais c'est un très bon divertissement.
Prosopopus
Vous devez aimer le style narratif de DeCrecy afin de ne pas être déçu lorsque vous avez fini de lire un de ses livres. Plein d'idées originales et étranges, Prosopopus suit cette ligne narrative, mais cette fois sans texte. Le design est fluide et cinématographique, donnant la sensation de voir un film muet mais moderne et en couleur. Le recit, un polar, est très intéressante et complexe, se terminant de la même manière que les films de David Lynch, avec de la place pour plusieurs interprétations, et peut ne pas plaire à tout le monde, mais c'est le risque que courent les expérimentalistes comme DeCrecy.
Crache trois fois
Davide Reviati est ce que j'appellerai un auteur social, un chroniqueur d'une jeunesse italienne, qui tourne en rond, sans horizon aucun et qui tue le temps comme elle peut. C'était déjà un peu le cas avec son autre album Etat de veille. Il continue ici, avec cet album présent dans la sélection d'Angoulême 2018. Nous voilà plongés dans le quotidien d'une bande d'amis au Nord de l'Italie, qui végètent dans un lycée technique. Hormis, les sorties nocturnes, où l'on consomme alcool et cannabis, rien ne vient égayer son quotidien. Aucun horizon radieux ne s'offre à elle. Et puis, à coté, il y a ce camp de gens du voyage, encore plus marginalisés qu'eux et qui a tant souffert lors de la période nazie. On les méprise autant qu'ils fascinent, surtout lorsque parmi eux apparait une jeune fille, qui ne semble pas des plus farouches. Une chronique du racisme ordinaire tel qu'il existe dans toutes nos sociétés. Les lecteurs de ce genre d'histoire, qui s'étale sur près de 550 pages, apprécieront la qualité d'écriture de Davide Reviati, tout comme son trait en noir et blanc, où l'on reste plutôt dans l'esquisse que dans le dessin parfaitement abouti. Son trait m'a fait penser à Cuvelier en certaines circonstances. Une histoire qui n'est pas destinée au grand public, mais les amateurs de récits exigeants apprécieront sans nul doute.
L'Arche de Noé a flashé sur vous
J'ai commencé à lire ce livre avec très peu d'attentes et j'ai fini par l'aimer. Le design est très bon, mais c'est la colorisation qui est fantastique, très atmosphérique, surtout l'éclairage. L'histoire est aussi très bien racontée, et bien qu'elle ne soit rien d'extraordinaire, elle est très absorbante, avec des dialogues très réussis et des personnages mystérieux qui stimulent la lecture jusqu'à la fin.
Dark Blood
Ben oui je sais c'est ce qui s’appelle un achat compulsif. Suite à l'avis de PAco je n'ai fait ni une ni deux, des images dans la galerie qui donnent envie et Marc Moreno au dessin! C'est peu de dire que depuis Le Régulateur le dessin s'est amélioré, je trouve que les proportions notamment des personnages se sont grandement améliorées, ici c'est maitrisé, pas loin du grand art. Et puis j'aime bien le thème du vampire, surtout lorsque l'on voit celui-ci en action à travers les siècles. Et puis avouons que le look des bestioles, surtout quand elles se fâchent, a un aspect pour le moins nouveau et intéressant. Sur le fond pas une originalité folle, encore une histoire de lutte entre différents clans de vampires mais je trouve que les choses sont bien amenées. Du rythme, du sang avec des scènes de combats plutôt réussies, personnellement je suis preneur, j'attends la suite. Ah si un dernier mot pour la couverture assez réussie je trouve.
Le Coeur des Amazones
Nouvelle œuvre de Christian Rossi et retour pour ce dernier à ces anciennes amours. De fait, l’auteur de (entre autres) « La Gloire d'Héra » et de « Tirésias » continue son exploration de la Grèce antique avec « Le Cœur des Amazones ». Le scénario, signé Géraldine Bindi, nous entraine dans la forêt des Amazones, proche d’une Troie alors en guerre. Si les références à la mythologie sont nombreuses, ce récit peut séduire n’importe quel lecteur, féru ou non de la Grèce antique. Pourvu qu’il connaisse un tant soit peu le mythe des farouches guerrières amazones, pourvu que les noms d’Achille et d’Hélène de Troie ne lui soient pas totalement inconnus, il s’en sortira sans trop de dommages. Bon, certes, il passera à côté de l’une ou l’autre référence mais l’intrigue centrale, elle, lui sera totalement accessible. Et quid donc de cette intrigue ? Et bien, c’est à une plongée dans la société des Amazones et au mode de fonctionnement de celle-ci que nous convient les artistes. Violence, spiritualité et sensualité sont au rendez-vous. Et nous sommes conviés à assister à un tournant majeur de leur histoire. Le début du récit est un peu lent, je ne savais pas exactement vers quoi les auteurs voulaient m’amener mais le dessin de Christian Rossi suffisait alors à garder mon attention en éveil. Puis les enjeux apparaissent de plus en plus clairement et la seconde partie du récit donne toute sa raison d’être à cet album, s’éloignant d’une simple évocation mythologique pour développer des propos plus intemporels. Comme il se doit lorsque l’on traite de manière classique de la mythologie grecque, le ton est dramatique, les phrases sonnent comme des couperets. Clairement, rapidement, on comprend qu’on n’est pas là pour rigoler. Ne craignez cependant pas de tomber sur une narration lourde ou absconse. Si les passages légers sont rares, l’album se lit sans peine. Et puis, il y a le dessin de Christian Rossi. Son trait explose de finesse lorsqu’il est traité en noir et blanc tandis que la colorisation adoucit les formes et apporte de la profondeur aux cases. Bien souvent, ces cases combinent donc des parties en noir et blanc et des parties colorisées dans des teintes monochromes. La combinaison des deux est parfaite et dote les planches d’un visuel sans égal. C’est fin, beau, sensuel, dynamique, expressif, original et accessible à un large public (je parle ici de la lisibilité du trait). A titre personnel, je ne suis pas un grand admirateur de la Grèce antique et de sa mythologie. Pourtant, j’ai beaucoup aimé ce récit. Sans doute parce que, outre la beauté du dessin (feuilletez ce livre ne fusse que pour voir la case illustrant le Cœur des Amazones), ses auteurs ont eu l’intelligence de lui donner un sens plus intemporel, qui s’inscrit dans cette grande mouvance actuelle pour une égalité des sexes, mais aussi pour un respect de l’autre, pour la reconnaissance de ce que chaque sexe peut apporter à l’autre. Un bel album, dans tous les sens du terme.
La Terre des fils
Avec ce dernier album, Gipi tape fort ! Dans la lignée du roman "La route" de Cormac McCarthy, il nous largue dans un monde post-apocalyptique mystérieux où un père et ses deux fils essayent de survivre tant bien que mal. On est dans le minimalisme, l'économie, tant sur le fond que sur la forme. Très peu de survivants, mais souvent tous plus torturés les uns que les autres. Chaque objet a de l'importance dans ce monde où les sociétés ont été balayées. Même le langage en a fait les frais et semble anémié. Et c'est la force de cet album coup de poing qui nous saisit par cette relation complexe entre ce père qui semble avoir vécu la transition de ce monde et sa déchéance, et ses deux fils qu'il malmène "pour leur bien" ou tout du moins pour les rendre aptes à une survie incertaine. Sauf qu'entre la théorie et la pratique, forcément rien ne se passe comme prévu... Un conte noir et loin d'être optimiste, mais d'une rare puissance.
Dans la forêt sombre et mystérieuse
J’ai beaucoup aimé cette histoire, originale et sensible. Malgré son dessin (clairement estampillé underground américain), par-delà la fausse impression de nous trouver devant un récit déjanté et peu facile d’accès, ‘Dans la forêt sombre et mystérieuse’ se révèle très agréable à lire, pas du tout prise de tête et aborde des thèmes universels qui plairont à tout lecteur de bande dessinée (petits et grands). Le dessin expressif en diable, le scénario bien construit, l’originalité de l’univers, tout concoure à un agréable moment de lecture. L’humour est omniprésent tandis que le personnage d’Angelo touche tant dans sa candeur que dans ses excès. Un bel album, en somme.