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Couverture de la série Milo & les créatures du grand escalier.
Milo & les créatures du grand escalier.

Voilà un album jeunesse plutôt réussi. Le pitch est des plus simples : le jeune Milo est envoyé par sa mère chercher une chaussette pour sa petite sœur. Mais, arrivé dans la cave, sombre comme de bien entendu, Milo va voir cette chaussette volée et emportée par un rat. Il va se lancer à sa poursuite, et c’est le début d’une longue aventure ! Car rapidement, des passages secrets débouchant sur des lieux improbables vont le mener très loin. Et il va rencontrer une foule de personnages plus ou moins loufoques, la Mort, un fantôme, des personnages difformes, gélatineux, un bouc prénommé Ibn Battuta, etc. C’est extrêmement rythmé, Milo vol d’aventures en aventures, plein de courage et de persévérance. La plupart des êtres rencontrés, au départ menaçants – en tout cas provoquant la peur – se révèlent rapidement amicaux, et vont aider Milo à remplir sa mission, ramener cette fichue chaussette ! Avec une chute amusante (et qui aurait pu donner lieu à une suite ?), lorsque sa mère envoie Milo chercher un carton au grenier… Un récit simple et rythmé, dans lequel un gamin dépasse ses peurs, voilà une lecture que les plus jeunes apprécieront sans doute. Malgré l’importante pagination (près de 250 pages), la lecture est rapide : peu de texte, un petit format, et un rythme empêchant de faire une pause…

18/10/2025 (modifier)
Par Ro
Note: 3/5
Couverture de la série Hors les murs - Journal d'un voyage immobile
Hors les murs - Journal d'un voyage immobile

Hors les murs est une bande dessinée publiée par la Réunion des Musées Nationaux, issue d'une collaboration entre le musée du Grand Palais, une vingtaine de commissaires, conservateurs et artistes, le Centre pénitentiaire Sud Francilien, et plusieurs détenus volontaires. Ensemble, ils ont imaginé une exposition artistique au sein même de la prison. Sous la direction d'un commissaire d'exposition, un comité de détenus a choisi les œuvres à présenter et défini le message qu'ils souhaitaient transmettre : celui du voyage et de l'ouverture sur le monde, en contraste avec leur enfermement. Le projet s'est accompagné de rencontres avec des artistes, conférenciers et restaurateurs venus partager leurs savoirs sur l'art et le fonctionnement des musées. Cendrine Borzycki, invitée à assister à plusieurs de ces séances, en a tiré ce récit documentaire. Elle y montre que la culture peut franchir les murs, tout en dévoilant les coulisses concrètes d'une exposition, bien loin de la simple installation de tableaux. L'ouvrage se veut avant tout instructif. Il documente à la fois le milieu carcéral, la démarche muséale et l'état d'esprit des participants. Le dessin de Borzycki, proche du croquis, privilégie la spontanéité à la virtuosité. Son trait simple et ses teintes sobres confèrent à l'ensemble une élégance discrète, mais le graphisme peut paraître sommaire. En revanche, la lecture reste fluide et les dialogues, vivants, donnent de l'épaisseur aux détenus, souvent curieux et réfléchis. Ils rappellent d'ailleurs eux-mêmes qu'ils ne représentent qu'une minorité : la plupart des prisonniers n'ont montré aucun intérêt pour le projet, et ceux-là ne figurent pas dans le livre. Malgré son intérêt documentaire, le récit perd un peu de souffle après son introduction. Les comptes rendus de réunions et les visites de musées manquent de dynamisme, et la frustration s'accentue lorsque l'exposition finale n'est jamais montrée. La bande dessinée se conclut en renvoyant à une page web que je n'ai pas trouvée, sans doute disparue il y a quelques années, laissant le lecteur sans image du résultat si ce n'est quelques planches de la BD montrant les prototypes visuels de ce à quoi elle pourrait ressembler lors de sa préparation. Hors les murs est un témoignage sincère et instructif sur la rencontre entre art et détention, mais dont la lecture reste un peu aride et inachevée. Une belle idée, plus enrichissante que réellement captivante. Note : 2.5/5

18/10/2025 (modifier)
Couverture de la série Electric Miles
Electric Miles

Au sortir de ce tome introductif, je ne sais pas trop quoi penser. D’abord parce que certaines choses m’ont clairement échappé, des passages sont restés obscurs, comme l’histoire elle-même. Je ne sais pas où elle va nous mener, si le polar, un certain fantastique ésotérique vont prendre le dessus. Pour le moment, Nury est aussi mystérieux que son personnage principal, auteur putatif d’un livre que quasiment personne n’a lu ou vu, mais qui attire les convoitises, jusqu’aux producteurs vénaux d’Hollywood (au passage Nury caricature – à peine – les techniques marketing et publicitaires, avec un passage savoureux lorsque deux producteurs envisagent leur campagne de lancement de l’adaptation du bouquin – qu’ils n’ont pourtant pas lu !). Du coup, entre ces mystères entretenus et les passages un peu obscurs (le rôle du clébard, les digressions religieuses, etc.), je reste pour le moment réservé. Mais la lecture n’en a pas pour autant été désagréable, en grande partie grâce au travail graphique de Brüno. En effet, je trouve que son dessin se bonifie avec le temps. Toujours aussi épuré, le rendu est ici très chouette. A voir donc ce que ça donnera par la suite.

18/10/2025 (modifier)
Couverture de la série Hors-saison
Hors-saison

Le Jour du Marché du même auteur m’avait clairement laissé sur ma faim. Je me réconcilie un peu avec lui avec cet album qui, sans être hyper emballant, se révèle quand même plaisant à lire, vraiment plus intéressant. Déjà le format à l’italienne et plus globalement le travail éditorial de Delcourt me conviennent, c’est un format que j’apprécie, et qui est adapté au récit, dans lequel nous suivons durant quelques semaines (mais des flash-backs densifient le récit et l’étendent) la vie de Mark. Mark, qui se débat alors que sa vie se délite, alors que tout s’éparpille auteur de lui, alors que ses certitudes se fragilisent. Son couple périclite et le divorce s’annonce – de moins en moins à l’amiable. Au niveau boulot ça ne va pas mieux, il est escroqué par son patron. Il se débat en tant que nouveau célibataire avec ses enfants lorsqu’il en a la garde, alors que sa mère souffre d’un cancer. En arrière-plan, les incertitudes se multiplient aussi, nous sommes en pleine campagne électorale, entre Hillary Clinton et Donald Trump… Le récit est traité de façon légère, doux-amer, sans surjouer empathie ou trop impliquer le lecteur, observateur décalé du verni qui craque. Les personnages animaliers et la colorisation usant de divers gris plutôt ternes accentuent une certaine langueur, une certaine tristesse, jusqu’aux dernières cases, où l’optimisme semble vouloir retenter sa chance.

18/10/2025 (modifier)
Par Cleck
Note: 3/5
Couverture de la série Murmures des sous-bois
Murmures des sous-bois

Voilà un album délicat, accessible aux plus jeunes, distillant progressivement sa touchante émotion. Autour d'un propos écolo sur la réouverture au monde, aux autres, l'auteur développe une non-intrigue : des promenades dans la forêt permettant de prendre le temps d'observer la faune sauvage, le ciel, d'entendre cette vie fragile que nos sociétés connectées et individualisées oublient. On découvre peu à peu une relation mère-fille emplie de silences, mais non-dénuée d'attentions ; la thématique du deuil s'invite alors et donne de l'ampleur à l'ensemble. Avec son format à l'italienne, son noir et blanc teinté de brun, la rareté du texte, un style à la lisière du manga et de la ligne claire, un découpage "façon storyplay" de cinéma, cette manière occasionnellement de créer du mouvement en démultipliant les personnages sur une même case, associé à un crescendo narratif plutôt réussi, l'auteur parvient à déployer une histoire dramatique et pleine d'espoir qui étonnamment nous fait passer de l'anecdotique aux douleurs intimes les plus belles. Surprenant de constater combien l'indéniable maladresse des ficelles narratives et dialogues aboutit à un sentiment général de délicatesse poétique. Beau comme un bébé qui pleure.

18/10/2025 (modifier)
Par pol
Note: 3/5
Couverture de la série Les Sentiers d'Anahuac
Les Sentiers d'Anahuac

Edition soignée, grand format carré, couverture élégante, cet album attire indéniablement le regard. Les Sentiers d'Anahuac retrace un pan de la civilisation aztèque et sa colonisation par les espagnols. Commençons par souligner le travail graphique très intéressant. Le style est à la fois simple et précis, les personnages sont soignés et très reconnaissables. Les pages ne sont pas surchargées mais pourtant elles contiennent beaucoup d'informations et de détails. L'utilisation de la couleur avec parcimonie met l'accent sur des petits éléments par ci par là. C'est très esthétique. Mais ce qui est plus réussi encore c'est le découpage des planches. On sort régulièrement du traditionnel gaufrier, avec des dessins pleines pages qui représentent pourtant un enchainement que d'autres dessinateurs auraient découpé en cases successives. Ces mises en pages sont très esthétiques et en plus c'est toujours fluide, lisible et compréhensible. Visuellement c'est du beau boulot et l'album est très agréable. Sur le contenu, nous avons un récit très historique. Il retrace une civilisation, découverte par le prisme d'un jeune novice, né juste après la colonisation. Le jeune Antonio aide un missionnaire à traduire et écrire l'histoire. Il y est question de croyance, de dieux anciens, d'évangélisation par les colons qui font la chasse aux croyances anciennes qui façonnaient la civilisation aztèque. On apprend tout ça au travers du regard du jeune Antonio. C'est une quête qui va durer des décennies qui est relaté dans cet album. Tout cela est très bien documenté, très précis. Si le propos est globalement intéressant, il a eu du mal à me passionner sur la longueur de l'album. L'usage de termes nahuatl est omniprésent. Il peut y avoir des phrases avec 3 ou 4 mots issus de cette langue. Il y a bien un glossaire complet en fin d'album mais c'est un peu fastidieux de s'y référer toutes les pages.

18/10/2025 (modifier)
Par Présence
Note: 4/5
Couverture de la série Épouvantail
Épouvantail

Les mamans ne reviennent pas toujours, mais ne partent jamais vraiment. - Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre. Son édition originale date de 2025. Il a été réalisé par Philippe Pelaez pour le scénario, et par Stéphane Sénégas pour les dessins. Il comporte cent-soixante-sept pages de bande dessinée en noir & blanc. Au beau milieu d’un champ, au sommet d’une butte, se tient un épouvantail à l’ancienne, un mannequin grossier de bois avec un grand manteau flottant au vent, et un chapeau à large rebord. Une personne a fait un cauchemar. Un de ceux qui se nourrissent des vivants. L’épouvantail lui tournait le dos, il se rapprochait. Cette personne glissait lentement au-dessus du sol. Et soudain, dans le silence assourdissant de l’obscurité, il s’est retourné. Les coutures de son sourire ont sauté. Ces yeux faits de deux boutons se sont allumés d’une lumière jaune. Elle ne pouvait pas bouger. Ses bras de bois se sont soudain agités et à leur extrémité ont proliféré des serpents de doigts, entortillés telles les racines d’un arbre mauvais. Son manteau s’est ouvert sur un cep de treille noueux et putrescent qui ondulait comme une vis sans fin. Son sourire écartelé par les lames de ses dents affutées lui mangeait le visage. Elle ne pouvait détacher son regard de ses yeux de lune fauve. Il chantait… Chapitre un : Lily. Dans la cour d’une ferme, Lily, une enfant de cinq ans, chantonne la comptine Promenons-nous dans les bois, en ayant substitué l’épouvantail au loup, tout en nourrissant un groupe de poules. La fillette est rappelée à l’ordre par Belle-Mère, la nouvelle compagne de son père. Cette dernière lui fait une remontrance : Lily ne devrait pas donner à manger aux poules avec ses baskets toutes neuves et toutes blanches, elle lui avait dit de mettre ses bottines. Père intervient pour appuyer les dire de sa compagne, et Lily se fâche, et décide d’aller voir l’épouvantail dans le champ. Alors que la fillette vient de partir, une voiture de police arrive et s’arrête dans la cour. Capitaine et son adjoint entre dans la ferme et posent quelques questions supplémentaires à Père, pendant que Belle-Mère leur sert un verre d’eau. Ils souhaitent avoir des détails supplémentaires sur le matin où s’est produit l’accident. L’heure, ce qu’a fait Père. Ce dernier raconte : Sept heures, sept heures quinze, oui. Le jour venait de se lever. C’est là qu’il s’est rendu compte que la barrière était mal fermée, et que deux chèvres en avaient profité pour s’échapper. Ça arrive régulièrement. Faut qu’il répare cette fichue barrière ! D’un autre côté, elles ne partent jamais bien loin. Mais parfois, elles vont jusqu’au bois. Et là, c’est plus coton pour les retrouver. Avant, il avait son chien, un beauceron, qui les retrouvait en deux temps, trois mouvements. Mais il est mort il y a quelques mois. Évidemment, cette fois-là, ça n’a pas loupé, elles étaient dans leur bois. Il n'aime pas y aller au bois. Et il n’aime pas quand les chèvres y vont pour boire dans l’étang… parce qu’il y a la route de l’autre côté, juste derrière le versant. Il a toujours peur que les chèvres traversent et se fassent renverser par une voiture ou un camion. Ce récit présente plusieurs particularités qui lui donne une forte personnalité dès la première page. L’artiste réalise dessins un registre descriptif et réaliste, avec un degré de simplification, une forme d’exagération dans l’anatomie des personnages et dans leur visage, des traits de contour fins et cassants, des aplats de noir aux formes irrégulières et souvent acérées, un usage parcimonieux des nuances de gris en lavis, des exagérations ponctuelles de perspective pour rendre un moment plus dramatique. Deuxième singularité : dès le prologue, l’épouvantail incarne une force surnaturelle, dont la nature n’est pas explicite. Troisième caractéristique : Lily a un fort caractère et elle chante une comptine dans le premier chapitre, ce qui fait tout de suite penser le lecteur à un conte, association d’idées se produisant comme un automatisme, rapprochement également induit par la couverture, avec cette nuée noire émanant de l’épouvantail comme une sorte d’émanation d’une force surnaturelle. Autre caractéristique : le scénariste a fait le choix de ne nommer que deux personnages : Lily et sa mère biologique Ophélie. Charge au lecteur de nommer les autres personnages : Père, Belle-Mère, Capitaine pour l’inspecteur de police menant l’enquête, et encore quelques seconds rôles. En fait ce n’est pas tout à fait aussi restreint. Par la suite, Lily nomme trois animaux de la ferme : Poulette, Minette, Chevrette. Au cours du récit, une évidence s’impose à elle : elle doit trouver un nom à Épouvantail. Régulièrement, les dessins et la mise en page dégagent un décalage, une étrangeté, entre menace potentielle, non-dit flagrant, réaction bizarre, et manifestation surnaturelle qui ne se trouve peut-être que dans l’esprit du personnage. Pour commencer, il en va ainsi de l’apparence de l’épouvantail : ses dents trop blanches et trop longues en page trois, les sortes de fins troncs entremêlés en page quatre. Toutefois, il faut attendre la page dix-neuf pour le revoir, une minuscule ombre chinoise au sommet de la colline. Par la suite, Épouvantail (avec une majuscule pour désigner le personnage) conserve une apparence quasi identique, immuable, si ce n’est pour son pardessus parfois agité par le vent, ou trempé par la pluie. Il retrouve un peu d’animation lors d’un cauchemar de Capitaine. Et pourtant, la narration visuelle en fait plus qu’une présence immobile, un personnage à part entière, aidée en cela par le fait que certains personnages l’entendent parler. La combinaison des dessins et des dialogues place le lecteur dans le doute, entre un conte dans lequel un objet inanimé est doté de conscience et d’une forme de parole, et la possibilité que tout cela ne soit que dans la tête des personnages qui l’entendent parler, ou peut-être même seulement l’interprétation qu’en fait un unique personnage, en l’occurrence Lily, en tant que narrateur possiblement non fiable. D’ailleurs le traitement graphique de Lily donne l’impression qu’elle est constituée des mêmes éléments que Épouvantail. Un visage simplifié, presque chérubin, une coupe de cheveux avec une frange masquant tout le front, des yeux souvent réduits à deux points, un nez représenté par un petit trait horizontal, et une bouche soit également sous forme de court trait horizontal, soit parfois grande ouverte pour un sourire éclatant. Elle est le plus souvent vêtue d’une large robe d’enfant avec une poche centrale sur le devant, et elle porte ses bottes, après la première séquence. À deux ou trois reprises, une sorte d’ectoplasme d’une grande noirceur plane au-dessus de sa tête, alors qu’elle est sous l’influence de la colère. Les autres personnages présentent également chacun une caractéristique dans le visage qui fait hésiter le lecteur entre une touche caricaturale, ou une exagération inquiétante, comme si le récit pouvait basculer à tout moment dans l’horreur, ou en tout cas dans une sensation de bascule à tout moment. Le lecteur regarde ainsi Père costaud et au visage calme qui semble ne pas percevoir les accusations sous-jacentes, le petit visage de Belle-Mère avec ses yeux cachés derrière ses énormes lunettes comme si elle souhaitait rester en retrait, le visage un peu trop allongé de Capitaine comme s’il était capable de s’enfoncer comme un clou dans la vie des gens pour découvrir tout ce qu’ils préfèreraient laisser caché. Les paysages eux-mêmes prennent souvent une allure expressionniste. Les troncs d’arbres du bois qui évoquent des tentacules en ombre chinoise. Les ondulations de la butte qui peuvent laisser penser que Épouvantail va dévaler sur la pente herbue. Un carré d’herbe isolé dans lequel Lily menace de s’enfoncer comme dans des sables mouvants. Une pluie dense dans un ciel gris, comme la pluie du jugement dernier prête à engloutir le monde. Un long couloir interminable avec une porte tout au fond de cette perspective ressemblant à un abyme. Dans le même temps, les personnages interagissent avec ces décors parfois presque animés, qui influent sur leur état d’esprit. À d’autres moments, c’est l’entrain de Lily qui va dominer, telle cette course en cariole, évoquant Calvin & Hobbes dans une activité similaire. Bien souvent, le lecteur ressent un vrai plaisir à découvrir et à savourer ces moments visuels, la prise de vue et la construction de page très vivantes. Séduit par la narration visuelle et par le caractère entier de Lily, le lecteur se prête bien volontiers au jeu de relever une pièce de puzzle à la fois pour l’intrigue et de chercher comment elles s’assemblent, d’essayer de devancer les révélations pour comprendre ce que cachent les non-dits, ce que cherche Capitaine dans son enquête, qui est coupable de quoi. Peut-être un meurtre ? Peut-être deux ? En quoi Ophélie, la mère de Lily, et son absence sont liées au mystère ? Intriqué avec cette intrigue policière, le lecteur perçoit que les éléments de conte peuvent s’interpréter comme des métaphores. À l’évidence, la relation que Lily entretient avec Épouvantail constitue une image de des émotions et de leurs fluctuations de la petite fille vis-à-vis de l’absence de sa mère, du souvenir qu’elle en garde. Les propos tenus par Épouvantail peuvent être considérés comme l’inconscient de Lily qui exprime ce qu’il a capté, mais que la petite fille ne peut exprimer faute de mots. Puis d’autres personnages réagissent à Épouvantail comme s’il incarnait quelque chose pour eux, à chaque fois différent. Comme si le fait qu’il ait été fabriqué par Ophélie l’avait également doté d’une charge émotionnelle rémanente, l’avait chargé d’une énergie occulte. Inconsciemment, Lily ressent que Père ne lui a pas dit la vérité sur le sort de sa mère. Inconsciemment Capitaine ressent que la présence de Épouvantail a dû influer sur le déroulement de l’accident. Progressivement Épouvantail change de statut grâce à l’honnêteté de l’enfance, le fait de le nommer changeant sa nature. Un album singulier. La narration visuelle en noir & blanc exprime à merveille les sensations de ce récit entre polar et conte, entre éléments factuels, ressentis, et non-dits, mensonges et culpabilité d’ordre divers. La narration met le lecteur en mode participatif, cherchant à deviner qui a fait quoi, à déterminer le lien entre des événements funestes, reconfigurant ses hypothèses à chaque nouvelle information. C’est encore Lily qui le dit le mieux : Ce qu’il y a de bien, quand on joue à refaire l’histoire, c’est qu’on peut changer la fin…

18/10/2025 (modifier)
Couverture de la série The New World
The New World

Dessin et colorisation sont surprenants, et a priori pas forcément ma tasse de thé. Mais je m’y suis rapidement fait, au point qu’au bout d’un moment ils ont presque formé l’attrait principal de cet album. Des couleurs tapantes donc, presque psychédéliques, avec un dessin pas toujours facile à déchiffrer, mais qui est dynamique. L’histoire se laisse lire. Par les outrances mises en avant, elle dénonce la surveillance généralisée de la population via les moyens techniques modernes, une certaine forme de dictature, et les médias diffusant sous forme de surenchère comme si c’était un jeu télévisé (un peu de « Le prix du danger » ici). Comme je l’ai dit, ça se laisse lire, mais j’en suis quand même sorti moins enthousiaste que mes prédécesseurs. Du pas mal sans plus me concernant, même si je reconnais une certaine originalité graphique.

17/10/2025 (modifier)
Par PAco
Note: 4/5
Couverture de la série Armelle et Mirko
Armelle et Mirko

Avec "Armelle et Mirko", Loïc Clément, Anne Montel et Julien Arnal nous emmènent dans le petit monde bien sombre d'Armelle. Pauvre petite tortue dont le comble du malheur est d'être phobique de l'obscurité... Compliqué de se prémunir des dangers quand son refuge naturel n'est qu'une source d'angoisse ingérable. Heureusement, la rencontre de la luciole Mirko va tout changer ! C'est tout en poésie, grâce notamment au trait tout en rondeur et à une colorisation contrastée et lumineuse, que Julien Arnal nous emmène dans cet univers simple mais pas simpliste. Avec cette histoire toute en subtilités, les enfants découvriront que les angoisses et les peurs, ça arrive à tout le monde et qu'en échangeant avec les bonnes personnes, il existe souvent un moyen de se sortir d'un mauvais pas, voire de se faire des amis. Voilà un album très élégant (je trouve déjà la couverture magnifique), intelligent et empreint de cette petite touche de poésie qui fait toute la différence. *** Tome 2 *** Après l'émerveillement du premier tome, j'étais curieux de voir ce que les auteurs allaient nous proposer pour ces curieux petits personnages. Personnellement, j'ai trouvé que le graphisme était encore plus majestueux mais l'histoire m'a moins touché. Mirko la luciole décide de reprendre son chemin et notre petite Armelle a bien du mal à voir son seul ami reprendre la route et la laisser à ses angoisses. Mais ayant appris à les gérer tant bien que mal, elle va réussir à se faire de nouveaux amis... Moins profond que le premier tome, cet album nous émerveille pourtant grâce au dessin de Julien Arnal qui s'est encore plus lâché, notamment sur la colorisation. C'est lumineux, avec toujours cette petite touche de poésie, tout en abordant des thématiques fortes (amitié, solitudes, angoisses, etc.). Une belle série jeunesse. *** Tome 3 *** C'est avec plaisir que nous retrouvons notre petite équipe d'animaux. L'hiver s'est installé et notre petite troupe profite joyeusement des bons côtés de l'hiver. Balades et randonnées, partage d'un bon repas, lectures solitaires... Tout est bon pour conforter cette belle amitié qui les lie. Mais la fin de l'hiver et le dérèglement climatique va s'inviter violemment dans cette routine rassurante et finir par séparer nos amis. Une nouvelle épreuve à traverser... Ce troisième tome reste toujours aussi agréable, même pour l'adulte que je suis. La qualité est toujours au rendez-vous, que ce soit dans l'écriture que dans l’illustration. Les textes relèvent en effet d'un certain niveau de lecture qui est plutôt plaisant sans donner dans le verbeux ou le pompeux, à l'image du dessin de Julien Armal toujours aussi chatoyant et lumineux. Sa colorisation aquarellée est somptueuse et se marie à merveille avec le récit pour donner cette petite touche de légèreté et de poésie qui transpire de cette série. Encore un très bon tome ! *** Tome 4 *** Oh ! Un Nouvel Armelle et Mirko ! On retrouve notre joyeuse petite bande qui après ses déboires a fini par élire domicile dans une carcasse de tank. Bon, ça ils ne le savent pas, et c'est pour le coup ils l'ont rudement bien aménagé ! Tout va donc pour le mieux, sauf que la vie en communauté, c'est pas toujours facile. Mais le problème avec nos exubérants collocs' c'est qu'Armelle doit supporter la musique matinale de Mirko, repasser derrière tout le monde pour ranger ou faire la vaisselle, supporter les recettes loufoques ou pas à son goût de la renarde... Ajoutez à cela son impossibilité de leur dire... et Armelle va finir par voir rouge !!! Toujours aussi agréable et doux visuellement, le graphisme d'Anne Montel répond à merveille à ces petites histoires malines et intelligentes, ici, l'importance de communiquer et les soucis de vivre ensemble. Une série pour les plus jeunes qui ne les prend pas pour des neuneus (le vocabulaire en est le parfait exemple) et qui traite ses sujets de façon originale ; je recommande !

27/03/2023 (MAJ le 17/10/2025) (modifier)
Par Cacal69
Note: 4/5 Coups de coeur du moment
Couverture de la série Leave them alone
Leave them alone

Un coup de cœur pour cet excellent western. Un western très classique, mais n'est-ce pas avec les vieilles recettes que l'on fait les meilleures histoires ? Les 160 pages se dévorent rapidement. En 1874, le Far West est encore sauvage dans cette contrée désertique des États-Unis. Des bandits attaquent régulièrement la diligence qui transporte les fonds nécessaires à la petite ville de Flagstaff. Le propriétaire de la banque cherche un moyen pour stopper ces attaques, et il croit l'avoir trouvé avec ce nouveau coffre piégé d'explosifs. La particularité de ce western c'est qu'il va mettre en avant trois femmes, la Jeune Elfie qui vient d'avoir 18 ans et sa grand-mère Marian, elles tiennent un relais de diligences en plein désert. La troisième, la jolie Mattie, est une prostituée qui veut changer de vie. Dans les personnages masculins, un mystérieux cow-boy solitaire tiendra un rôle important, ce qui sera moins le cas de Mad Wolf, un indien navajo qui travaille lui aussi au relais de diligences. Un récit très bien construit, le suspense est présent du début à la fin et les rebondissements sont bien amenés, mais c'est surtout la psychologie très bien travaillée des protagonistes, même des rôles moins importants, qui rend ce récit accrocheur. Certains sont attachants, malgré leurs défauts, et d'autres sont plus que détestables. La violence est omniprésente, je ne compte plus le nombre de balles dans la tête (ou de hache) et ces dames ne seront pas à la noce, tentatives de viol et viols sont malheureusement fréquents dans cette partie du Far West. Une histoire qui se termine sur une note optimiste. J'ai beaucoup aimé le dessin de Christophe Regnault (il va vraiment falloir que je lise son Jesse James). Un style dans la pure tradition du western mais avec une belle expressivité, de la lisibilité et une grande diversité dans les trognes des personnages (elle reflète parfaitement leur personnalité). La mise en scène joue sur les gros plans et ceux plus larges pour profiter des magnifiques paysages. De superbes pleines pages pour le plaisir de nos rétines Du très bon boulot. Un western à découvrir, sans le moindre doute.

17/10/2025 (modifier)