Exceptionnel et grandiose !
C'est pour moi LE roman graphique de ce début d'année qui nous propose un récit apocalyptique sans zombies à la démarche saccadée et pathétique, et qui dans sa cruelle possibilité nous donne à réfléchir sur certains aspects de notre monde.
Il y avait bien longtemps que je n'avais pas lu quelque chose d'aussi fort. Imaginez un gros roman graphique de 380 pages qui dès sa lecture entamée ne vous lâche plus. Nul doute qu'en tant qu'amateur de BD, vous soyez également un adepte du cinéma, et donc vous connaissez forcément Alejandro Gonzàles Inarritu et plus particulièrement deux de ses films : "21 grammes" et "Babel". C'est à ces films "chorale" que fait indubitablement penser cette histoire. Grâce à un découpage nerveux et intelligemment pensé, nous passons d'un personnage à l'autre. J'aime particulièrement Yoyo et ses devinettes.
Dans un futur pas trop éloigné, "le Chuchoteur" est recherché par toutes les polices du pays car il pirate les ondes du plus grand réseau d'information qui soit, TV Net. Il diffuse des messages à une population qu'il juge docile et trop aliénée par le pouvoir. Qui est cet homme qui heurte les consciences de uns et fait trembler le pouvoir ? Est-ce un des membres de ce groupe de rock qui malgré la situation cherche à enregistrer un album ? Est-ce ce vieil écrivain en mal d'inspiration ? L'assassin aux ordres d'une puissante multinationale ? Quand en plus une terrible épidémie véhicule un virus dit de "la dépression" qui se propage sur toute la planète (quelques instants avant leur mort les personnes infectées pleurent des larmes de sang ), plutôt que de soigner la population les autorités préfèrent se concentrer sur la capture du "Chuchoteur".
Au scénario, dessin et colorisation, Colo, un auteur que je connaissais pas. Ce gars est un furieux que ce soit au niveau de la construction, du découpage et de la lente mais inéluctable montée en tension. Il n'y a rien à redire. Le dessin est dans un style semi-réaliste avec surtout un découpage qui insère des pages notamment celles où "le Chuchoteur" s'exprime, sans parler des récits que l'écrivain vieilli ne racontera jamais. Je ne sais qu'ajouter de plus pour vous donner envie de lire ce gros pavé qui renouvelle le genre du récit apocalyptique et de fort belle manière qui plus est.
Merci aux Éditions du Long Bec d'avoir eu l'audace de sortir ce gros pavé, merci à Fabrice scénariste à ses heures, ici chargé de l'adaptation des dialogues.
Je dois dire que j’ai vraiment aimé le dessin, assez original, et davantage encore la colorisation, qui donne un air étrange aux personnages et teinte certaines scènes d’un halo de mystère. Quelques cases ressemblent dans leur rendu à des photographies retouchées. D’autres ressemblent à certains tableaux contemporains de la période où se situe l’histoire (milieu du XIXème siècle).
Toute la tristesse et la noirceur de l’histoire est en tout cas bien rendue par ce dessin.
L’histoire est globalement assez triste en effet. Suite à la mort de leur grand-mère, deux sœurs de la noblesse britannique se déchirent et se séparent définitivement : l’une d’elle s’en va, laissant sa cadette s’occuper du domaine dont elle a hérité.
C’est cette dernière que nous suivons surtout, dans sa déchéance qui fait de son histoire une sorte de conte noir à la Cendrillon, mais à l’envers, puisque l’héroïne, Clara, passe de lady à souillon.
Le titre – que j’avais trouvé au début énigmatique – révèle tous son sens à la fin de l’album, qu’il encadre finalement assez bien. De la partition/division du départ, à la partition musicale de la fin (que j’ai quand même trouvée un peu brutale).
C’est en tout cas l’aspect graphique qui me fait arrondir aux 4 étoiles. L'histoire elle-même, est finalement très classique et manque d'aspérités.
Note réelle 3,5/5.
Pour mon 5000 ème avis sur ce merveilleux site, j'avais envie de prendre un comics vu que pour mes autres millièmes avis j'avais déjà choisi une série franco-belge, une québécoise et deux mangas. J'ai finalement arrêté mon choix sur un récit mettant en vedette mon super-héros préféré depuis que je suis tout petit à savoir Batman.
Ce one-shot met en avant la relation du chevalier noir et son vieil ennemi le Joker et ça tombe bien le Joker est un de mes méchants préférés de Batman. L'auteur utilise bien la relation entre les deux personnages et le Joker est à son meilleur : manipulateur et sachant comment briser les gens. J'ai trouvé le récit prenant du début jusqu'à la fin.
Le dessin de Sam Kieth est assez spécial et je comprends que certains n'aiment pas. Personnellement, je trouvais que cela avait de la classe et un certain charme, mais au niveau découpage c'est vrai que ce n'est pas toujours facile à suivre. J'ai du relire certaines scènes parce que les transitions et les éclipses ne sont pas toujours évidentes. Malgré ce défaut cela reste un des meilleurs Batman à mes yeux quoique je pense que pour apprécier il faut déjà connaitre son univers. Ce n'est pas un truc pour les lecteurs qui veulent découvrir le personnage qu'ils ont vu uniquement à la télé ou au cinéma.
J'ai beaucoup aimé ce conte qui raconte le récit d'une créature des marais avide de sang et de vengeance. Il faut dire que Layla est très séduisante pour peu qu'on aime les femmes serpents. Fort heureusement, tout ne se concentre pas autour d'elle mais il est question de la gestion d'un royaume. A noter également la présence de rôles secondaires assez intéressants car bien exploités.
Les explications de la vieille sorcière vers la fin ne sont guère convaincantes et sont un peu balancées sans que le contexte ne le justifie vraiment. Pour autant, je pardonne cet écart scénaristique car la fin est plutôt réussie même s'il nous reste quelques interrogations en suspend.
Mika qui n'est pas qu'un célèbre chanteur se produisant dans The Voice se débrouille très bien au dessin. C'est le genre de graphisme que j'apprécie particulièrement car précis et réaliste tout en étant assez dépaysant. Rien à reduire de ce côté là.
Au final, un conte moyenâgeux assez original et plein de passion.
J’ai eu un peu de mal à entrer dans cet album (j’ai lu l’histoire dans l’épais album de l’intégrale). La faute au dessin, dans une sorte d’aquarelle aux tons presque délavés. Mais une fois amadoué, ce dessin s’est avéré beau et je l’ai finalement apprécié.
Quant à l’histoire, elle se laisse lire très agréablement, et aussi relativement rapidement (car de nombreuses cases sont muettes). On suit avec intérêt le héros (ou anti-héros), bonhomme un peu pathétique, balloté par des événements qu’il prétend (généralement à tort) réussir à exploiter à son profit.
L’intrigue se déroule en Russie, durant les Révolutions (et à Istanbul sur la fin), et notre bonhomme est une sorte de parasite, aussi résistant que mauvais. Fuyant (dans tous les sens du terme d’ailleurs), lâche, opportuniste, mais aussi relativement chanceux, arrivant toujours à rebondir, malgré les déboires qui s’abattent sur lui.
Je ne sais pas ce que valait le roman ici adapté (pas plus que Rabaté je ne connais cet homonyme du grand Léon !), et ne sais donc pas ce qu’il en a changé. Et on s’en fout en fait. Car cette « mise en image » est vraiment chouette.
En mêlant des acteurs fictifs aux protagonistes réels de cette triste et symbolique histoire, les auteurs ont réussi à bâtir un album intéressant, dont la lecture est fluide (le dessin efficace de Damien Vidal y étant aussi pour quelque chose).
Ce qui est arrivé aux « LIP », leur combat en effet symbolique d’un changement de société. Si le mouvement par plusieurs aspects peut être rattaché à celui de Mai 1968, il est plutôt annonciateur de la mainmise du capitalisme boursier (ou ultra libéralisme) qui va peu à peu vampiriser nos sociétés (l’avènement des Reagan et autres Thatcher n’en sera qu’un signe visible un peu plus tard).
En effet, la lutte de ces ouvriers pour garder leur travail, pour conserver leur outil de travail -avec une activité tout ce qu’il y a de plus viable économiquement- est devenue symbolique. Et donc c’est justement la force de leur lutte, le côté symbolique de celle-ci qui les a condamnés. En effet, ils devaient perdre pour ne pas donner le mauvais exemple.
La postface rappelle à juste titre que cela s’est reproduit continuellement depuis (Florange ou d’autres sites moins médiatisés), les actionnaires sacrifiant des usines viables, qui ne rapportent pas les 15% annuels, ou alors des industriels achetant des sociétés pour les piller, licenciant ensuite les ouvriers devenus inutiles. Bernard Tapie s’en était fait le spécialiste, mais Bernard Arnaud, aujourd’hui l’un des hommes les plus riches de France, en a fait de même avec les usines textiles du Nord de la France. A chaque fois avec la complicité de dirigeants (quand bien même ceux-ci annonçaient-ils que « la finance est leur ennemi » !). Il n’y a qu’à voir ce que fait l’avocat d’affaires aujourd’hui au pouvoir en France…
Un sujet sensible donc, traité sensiblement, sans pathos, avec une bonne mise en perspective finale : c’est un album à lire et qui doit nourrir les discussions. Comme le conclut le postfacier – ancien dirigeant de LIP, tout le monde doit lutter pour que ce libéralisme prédateur ne nous mène pas à l’enfer.
Cet album montre aussi que les médias – relayant là la doxa des dominants, présente systématiquement ce genre de révolte sous le prisme de la violence (voir les Gilets jaunes actuellement), alors que la casse sociale – à la violence bien plus grande et durable – n’est jamais éclairée par les médias – le Monde diplomatique et quelques rares autres exceptés.
Ben moi j'aime bien, j'aime même beaucoup. A l'heure du zapping, de la vitesse où plus personne ne sait prendre son temps il est bon de pouvoir se poser un instant, l'instant de lire une BD qui par son caractère un peu nonchalant est capable de vous envoûter.
Faut-il pour apprécier cette BD être un gars de la mer ? Quelqu'un sur qui la mer à toujours exercé une fascination parfois empreinte de morbidité ? Quoi qu'il en soit certaines pages sont tout bonnement magnifiques, c'est le moment où la Bretagne se métamorphose peu à peu en Normandie mais c'est toujours une terre de taiseux, d'iliens, des gens qui savent reconnaître la valeur du travail, il n'est que de voir les mains d''un mien ami pêcheur aux casiers vers Perros-Guirrec pour comprendre.
Ces planches parfois contemplatives sans texte sont donc pour moi comme un reposoir, mais que l'on ne s'y trompe pas, elles sont aussi le contrepoint de la violence de ce qui s'exerce à terre. Autre intérêt avec ce récit c'est qu'il ne prend pas parti, qu'aurions nous fait sous le poids du quand dira t'on, sous le poids de l'église ?
Si vous souhaitez prendre le temps, je conseille l'achat, j'ajouterais par ailleurs que les auteurs croisés dans un petit festival des bords de Loire sont fort sympathiques, les yeux couleur de varech de la dessinatrice n'y sont pour rien je le jure.
The Promised Neverland sous ses airs de série un peu convenue se révèle au fil des pages une série pleine de surprises !
On part effectivement d'une situation et de personnages un peu convenus jusqu'à LA révélation qui tombe rapidement sur les réelles motivations de cet étrange orphelinat et de sa directrice. Petit à petit les personnages vont prendre de l'épaisseur et le côté un peu trop manichéen du début de série va laisser place à une réelle richesse. Les "gentils" ne le sont peut-être pas tant que ça et les motivations des "méchants" finissent par s'expliquer sans pour autant s'excuser grâce à des flashbacks judicieux.
Mais au delà de la richesse et de la profondeur accordée aux personnages c'est surtout l'intensité du scénario qui nous accroche très rapidement et nous rend accroc ! Dans cette série personne n'est éternel et chaque page que l'on tourne peut se révéler fatale pour chacun des personnages auquel on aurait pu s'attacher. C'est aussi tout le jeu stratégique entre les enfants et leurs ennemis qui est rudement intéressant. Véritable partie d'échec, chacun y va de ses coups cachés et muris longtemps à l'avance avec plus ou moins d'efficacité pour parvenir à ses fins.
En tout cas, au bout de cinq tomes qu'on avale avidement, une chose est sûre, la suite se fait attendre avec impatience !
Oui, 5 sur 5...
Très très belle surprise.
C'est un mélange intéressant entre quelques ingrédients de la série Seuls (cf. le thème de la jeunesse isolée) et d'autres séries dans un univers post-apocalyptique. L'équilibre fonctionne très bien, même si je note une très légère descente de rythme dans le 4ème volet paru en ce 1er trimestre 2019.
Le dessin a été réalisé sur ordinateur : je ne fais cette précision que pour ajouter combien l'auteur a réussi à sublimer la technique pour la faire oublier et donner à cette saga une ambiance très prenante, jolie mais angoissante.
Côté négatif, on ne peut que regretter un rythme de parution digne du Sénat.
Si Jack Manini explique en préface comment et pourquoi il s’est plongé dans ce projet autour d’Arthur Cravan, il faut dire que la période qui lui fait décor semble l’intéresser, si j’en crois certaines des séries auxquelles il a participé (La Guerre des Amants ou S.O.S. Lusitania par exemple).
Pour en revenir à Cravan, il a été s’abreuver à une bonne source. En effet, la galerie 1900-2000 (rue Bonaparte, à Paris) et ceux qui l’animent depuis pas mal d’années (Marcel et David Fleiss) sont des défenseurs des artistes ayant participé ou étant apparentés aux mouvements Dada et surréaliste.
Cravan (avec Vaché et Rigaut, l’un des « trois suicidés de la société », pour reprendre le titre d’un recueil, qui paraphrasait Antonin Artaud) est un personnage haut en couleur. Un personnage déjà, jouant son propre rôle. Jouant. Terriblement. On ressent dans ses textes une tension, une pulsion de vie hautement poétique.
On peut le vérifier avec les nombreux extraits parus surtout dans sa revue « Maintenant » (rééditée – mais cette édition est aussi épuisée – par Jean-Michel Place il y a une quarantaine d’années) placés en exergue des différents chapitres de l’album.
Cravan est un personnage électrisant, en phase avec le fracas poétique et politique contemporain du premier conflit mondial (André Breton s’en fera très rapidement l’écho), et quelqu’un, mais aussi un auteur dont j’aime depuis longtemps l’exubérance, la fraîcheur, la poésie incarnée, dans toute sa liberté, son absence de soumission : en cela Cravan est un déserteur fanatique, superbe.
Manini en a ici dressé un portrait amusant, qui n’efface pas les contradictions, qui poursuit cet électron libre avec autant de lyrisme que celui-ci en a usé pour brûler sa vie. Je suis plus réservé sur sa présentation de Picabia ou Duchamp – mais bon, ce n’est pas le sujet central de l’album.
A noter que Squarzoni avait publié un petit album, Portrait inédit de Arthur Cravan sur ce poète boxeur. Et je serais assez curieux de voir ce que pourrait faire de ce sujet (qui l’intéresse forcément) un auteur comme Benoît Preteseille.
C’est en tout cas un album très recommandable. D'autant plus que le travail éditorial est de belle qualité (plus de 200 pages, avec une couverture épaisse, comme le papier, affiche en fac-simile jointe, etc.).
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Exceptionnel et grandiose ! C'est pour moi LE roman graphique de ce début d'année qui nous propose un récit apocalyptique sans zombies à la démarche saccadée et pathétique, et qui dans sa cruelle possibilité nous donne à réfléchir sur certains aspects de notre monde. Il y avait bien longtemps que je n'avais pas lu quelque chose d'aussi fort. Imaginez un gros roman graphique de 380 pages qui dès sa lecture entamée ne vous lâche plus. Nul doute qu'en tant qu'amateur de BD, vous soyez également un adepte du cinéma, et donc vous connaissez forcément Alejandro Gonzàles Inarritu et plus particulièrement deux de ses films : "21 grammes" et "Babel". C'est à ces films "chorale" que fait indubitablement penser cette histoire. Grâce à un découpage nerveux et intelligemment pensé, nous passons d'un personnage à l'autre. J'aime particulièrement Yoyo et ses devinettes. Dans un futur pas trop éloigné, "le Chuchoteur" est recherché par toutes les polices du pays car il pirate les ondes du plus grand réseau d'information qui soit, TV Net. Il diffuse des messages à une population qu'il juge docile et trop aliénée par le pouvoir. Qui est cet homme qui heurte les consciences de uns et fait trembler le pouvoir ? Est-ce un des membres de ce groupe de rock qui malgré la situation cherche à enregistrer un album ? Est-ce ce vieil écrivain en mal d'inspiration ? L'assassin aux ordres d'une puissante multinationale ? Quand en plus une terrible épidémie véhicule un virus dit de "la dépression" qui se propage sur toute la planète (quelques instants avant leur mort les personnes infectées pleurent des larmes de sang ), plutôt que de soigner la population les autorités préfèrent se concentrer sur la capture du "Chuchoteur". Au scénario, dessin et colorisation, Colo, un auteur que je connaissais pas. Ce gars est un furieux que ce soit au niveau de la construction, du découpage et de la lente mais inéluctable montée en tension. Il n'y a rien à redire. Le dessin est dans un style semi-réaliste avec surtout un découpage qui insère des pages notamment celles où "le Chuchoteur" s'exprime, sans parler des récits que l'écrivain vieilli ne racontera jamais. Je ne sais qu'ajouter de plus pour vous donner envie de lire ce gros pavé qui renouvelle le genre du récit apocalyptique et de fort belle manière qui plus est. Merci aux Éditions du Long Bec d'avoir eu l'audace de sortir ce gros pavé, merci à Fabrice scénariste à ses heures, ici chargé de l'adaptation des dialogues.
La Partition de Flintham
Je dois dire que j’ai vraiment aimé le dessin, assez original, et davantage encore la colorisation, qui donne un air étrange aux personnages et teinte certaines scènes d’un halo de mystère. Quelques cases ressemblent dans leur rendu à des photographies retouchées. D’autres ressemblent à certains tableaux contemporains de la période où se situe l’histoire (milieu du XIXème siècle). Toute la tristesse et la noirceur de l’histoire est en tout cas bien rendue par ce dessin. L’histoire est globalement assez triste en effet. Suite à la mort de leur grand-mère, deux sœurs de la noblesse britannique se déchirent et se séparent définitivement : l’une d’elle s’en va, laissant sa cadette s’occuper du domaine dont elle a hérité. C’est cette dernière que nous suivons surtout, dans sa déchéance qui fait de son histoire une sorte de conte noir à la Cendrillon, mais à l’envers, puisque l’héroïne, Clara, passe de lady à souillon. Le titre – que j’avais trouvé au début énigmatique – révèle tous son sens à la fin de l’album, qu’il encadre finalement assez bien. De la partition/division du départ, à la partition musicale de la fin (que j’ai quand même trouvée un peu brutale). C’est en tout cas l’aspect graphique qui me fait arrondir aux 4 étoiles. L'histoire elle-même, est finalement très classique et manque d'aspérités. Note réelle 3,5/5.
Batman - Secrets
Pour mon 5000 ème avis sur ce merveilleux site, j'avais envie de prendre un comics vu que pour mes autres millièmes avis j'avais déjà choisi une série franco-belge, une québécoise et deux mangas. J'ai finalement arrêté mon choix sur un récit mettant en vedette mon super-héros préféré depuis que je suis tout petit à savoir Batman. Ce one-shot met en avant la relation du chevalier noir et son vieil ennemi le Joker et ça tombe bien le Joker est un de mes méchants préférés de Batman. L'auteur utilise bien la relation entre les deux personnages et le Joker est à son meilleur : manipulateur et sachant comment briser les gens. J'ai trouvé le récit prenant du début jusqu'à la fin. Le dessin de Sam Kieth est assez spécial et je comprends que certains n'aiment pas. Personnellement, je trouvais que cela avait de la classe et un certain charme, mais au niveau découpage c'est vrai que ce n'est pas toujours facile à suivre. J'ai du relire certaines scènes parce que les transitions et les éclipses ne sont pas toujours évidentes. Malgré ce défaut cela reste un des meilleurs Batman à mes yeux quoique je pense que pour apprécier il faut déjà connaitre son univers. Ce n'est pas un truc pour les lecteurs qui veulent découvrir le personnage qu'ils ont vu uniquement à la télé ou au cinéma.
Layla - Conte des Marais Ecarlates
J'ai beaucoup aimé ce conte qui raconte le récit d'une créature des marais avide de sang et de vengeance. Il faut dire que Layla est très séduisante pour peu qu'on aime les femmes serpents. Fort heureusement, tout ne se concentre pas autour d'elle mais il est question de la gestion d'un royaume. A noter également la présence de rôles secondaires assez intéressants car bien exploités. Les explications de la vieille sorcière vers la fin ne sont guère convaincantes et sont un peu balancées sans que le contexte ne le justifie vraiment. Pour autant, je pardonne cet écart scénaristique car la fin est plutôt réussie même s'il nous reste quelques interrogations en suspend. Mika qui n'est pas qu'un célèbre chanteur se produisant dans The Voice se débrouille très bien au dessin. C'est le genre de graphisme que j'apprécie particulièrement car précis et réaliste tout en étant assez dépaysant. Rien à reduire de ce côté là. Au final, un conte moyenâgeux assez original et plein de passion.
Ibicus
J’ai eu un peu de mal à entrer dans cet album (j’ai lu l’histoire dans l’épais album de l’intégrale). La faute au dessin, dans une sorte d’aquarelle aux tons presque délavés. Mais une fois amadoué, ce dessin s’est avéré beau et je l’ai finalement apprécié. Quant à l’histoire, elle se laisse lire très agréablement, et aussi relativement rapidement (car de nombreuses cases sont muettes). On suit avec intérêt le héros (ou anti-héros), bonhomme un peu pathétique, balloté par des événements qu’il prétend (généralement à tort) réussir à exploiter à son profit. L’intrigue se déroule en Russie, durant les Révolutions (et à Istanbul sur la fin), et notre bonhomme est une sorte de parasite, aussi résistant que mauvais. Fuyant (dans tous les sens du terme d’ailleurs), lâche, opportuniste, mais aussi relativement chanceux, arrivant toujours à rebondir, malgré les déboires qui s’abattent sur lui. Je ne sais pas ce que valait le roman ici adapté (pas plus que Rabaté je ne connais cet homonyme du grand Léon !), et ne sais donc pas ce qu’il en a changé. Et on s’en fout en fait. Car cette « mise en image » est vraiment chouette.
LIP (des héros ordinaires)
En mêlant des acteurs fictifs aux protagonistes réels de cette triste et symbolique histoire, les auteurs ont réussi à bâtir un album intéressant, dont la lecture est fluide (le dessin efficace de Damien Vidal y étant aussi pour quelque chose). Ce qui est arrivé aux « LIP », leur combat en effet symbolique d’un changement de société. Si le mouvement par plusieurs aspects peut être rattaché à celui de Mai 1968, il est plutôt annonciateur de la mainmise du capitalisme boursier (ou ultra libéralisme) qui va peu à peu vampiriser nos sociétés (l’avènement des Reagan et autres Thatcher n’en sera qu’un signe visible un peu plus tard). En effet, la lutte de ces ouvriers pour garder leur travail, pour conserver leur outil de travail -avec une activité tout ce qu’il y a de plus viable économiquement- est devenue symbolique. Et donc c’est justement la force de leur lutte, le côté symbolique de celle-ci qui les a condamnés. En effet, ils devaient perdre pour ne pas donner le mauvais exemple. La postface rappelle à juste titre que cela s’est reproduit continuellement depuis (Florange ou d’autres sites moins médiatisés), les actionnaires sacrifiant des usines viables, qui ne rapportent pas les 15% annuels, ou alors des industriels achetant des sociétés pour les piller, licenciant ensuite les ouvriers devenus inutiles. Bernard Tapie s’en était fait le spécialiste, mais Bernard Arnaud, aujourd’hui l’un des hommes les plus riches de France, en a fait de même avec les usines textiles du Nord de la France. A chaque fois avec la complicité de dirigeants (quand bien même ceux-ci annonçaient-ils que « la finance est leur ennemi » !). Il n’y a qu’à voir ce que fait l’avocat d’affaires aujourd’hui au pouvoir en France… Un sujet sensible donc, traité sensiblement, sans pathos, avec une bonne mise en perspective finale : c’est un album à lire et qui doit nourrir les discussions. Comme le conclut le postfacier – ancien dirigeant de LIP, tout le monde doit lutter pour que ce libéralisme prédateur ne nous mène pas à l’enfer. Cet album montre aussi que les médias – relayant là la doxa des dominants, présente systématiquement ce genre de révolte sous le prisme de la violence (voir les Gilets jaunes actuellement), alors que la casse sociale – à la violence bien plus grande et durable – n’est jamais éclairée par les médias – le Monde diplomatique et quelques rares autres exceptés.
Bleu amer
Ben moi j'aime bien, j'aime même beaucoup. A l'heure du zapping, de la vitesse où plus personne ne sait prendre son temps il est bon de pouvoir se poser un instant, l'instant de lire une BD qui par son caractère un peu nonchalant est capable de vous envoûter. Faut-il pour apprécier cette BD être un gars de la mer ? Quelqu'un sur qui la mer à toujours exercé une fascination parfois empreinte de morbidité ? Quoi qu'il en soit certaines pages sont tout bonnement magnifiques, c'est le moment où la Bretagne se métamorphose peu à peu en Normandie mais c'est toujours une terre de taiseux, d'iliens, des gens qui savent reconnaître la valeur du travail, il n'est que de voir les mains d''un mien ami pêcheur aux casiers vers Perros-Guirrec pour comprendre. Ces planches parfois contemplatives sans texte sont donc pour moi comme un reposoir, mais que l'on ne s'y trompe pas, elles sont aussi le contrepoint de la violence de ce qui s'exerce à terre. Autre intérêt avec ce récit c'est qu'il ne prend pas parti, qu'aurions nous fait sous le poids du quand dira t'on, sous le poids de l'église ? Si vous souhaitez prendre le temps, je conseille l'achat, j'ajouterais par ailleurs que les auteurs croisés dans un petit festival des bords de Loire sont fort sympathiques, les yeux couleur de varech de la dessinatrice n'y sont pour rien je le jure.
The Promised Neverland
The Promised Neverland sous ses airs de série un peu convenue se révèle au fil des pages une série pleine de surprises ! On part effectivement d'une situation et de personnages un peu convenus jusqu'à LA révélation qui tombe rapidement sur les réelles motivations de cet étrange orphelinat et de sa directrice. Petit à petit les personnages vont prendre de l'épaisseur et le côté un peu trop manichéen du début de série va laisser place à une réelle richesse. Les "gentils" ne le sont peut-être pas tant que ça et les motivations des "méchants" finissent par s'expliquer sans pour autant s'excuser grâce à des flashbacks judicieux. Mais au delà de la richesse et de la profondeur accordée aux personnages c'est surtout l'intensité du scénario qui nous accroche très rapidement et nous rend accroc ! Dans cette série personne n'est éternel et chaque page que l'on tourne peut se révéler fatale pour chacun des personnages auquel on aurait pu s'attacher. C'est aussi tout le jeu stratégique entre les enfants et leurs ennemis qui est rudement intéressant. Véritable partie d'échec, chacun y va de ses coups cachés et muris longtemps à l'avance avec plus ou moins d'efficacité pour parvenir à ses fins. En tout cas, au bout de cinq tomes qu'on avale avidement, une chose est sûre, la suite se fait attendre avec impatience !
Gung Ho
Oui, 5 sur 5... Très très belle surprise. C'est un mélange intéressant entre quelques ingrédients de la série Seuls (cf. le thème de la jeunesse isolée) et d'autres séries dans un univers post-apocalyptique. L'équilibre fonctionne très bien, même si je note une très légère descente de rythme dans le 4ème volet paru en ce 1er trimestre 2019. Le dessin a été réalisé sur ordinateur : je ne fais cette précision que pour ajouter combien l'auteur a réussi à sublimer la technique pour la faire oublier et donner à cette saga une ambiance très prenante, jolie mais angoissante. Côté négatif, on ne peut que regretter un rythme de parution digne du Sénat.
Arthur Cravan
Si Jack Manini explique en préface comment et pourquoi il s’est plongé dans ce projet autour d’Arthur Cravan, il faut dire que la période qui lui fait décor semble l’intéresser, si j’en crois certaines des séries auxquelles il a participé (La Guerre des Amants ou S.O.S. Lusitania par exemple). Pour en revenir à Cravan, il a été s’abreuver à une bonne source. En effet, la galerie 1900-2000 (rue Bonaparte, à Paris) et ceux qui l’animent depuis pas mal d’années (Marcel et David Fleiss) sont des défenseurs des artistes ayant participé ou étant apparentés aux mouvements Dada et surréaliste. Cravan (avec Vaché et Rigaut, l’un des « trois suicidés de la société », pour reprendre le titre d’un recueil, qui paraphrasait Antonin Artaud) est un personnage haut en couleur. Un personnage déjà, jouant son propre rôle. Jouant. Terriblement. On ressent dans ses textes une tension, une pulsion de vie hautement poétique. On peut le vérifier avec les nombreux extraits parus surtout dans sa revue « Maintenant » (rééditée – mais cette édition est aussi épuisée – par Jean-Michel Place il y a une quarantaine d’années) placés en exergue des différents chapitres de l’album. Cravan est un personnage électrisant, en phase avec le fracas poétique et politique contemporain du premier conflit mondial (André Breton s’en fera très rapidement l’écho), et quelqu’un, mais aussi un auteur dont j’aime depuis longtemps l’exubérance, la fraîcheur, la poésie incarnée, dans toute sa liberté, son absence de soumission : en cela Cravan est un déserteur fanatique, superbe. Manini en a ici dressé un portrait amusant, qui n’efface pas les contradictions, qui poursuit cet électron libre avec autant de lyrisme que celui-ci en a usé pour brûler sa vie. Je suis plus réservé sur sa présentation de Picabia ou Duchamp – mais bon, ce n’est pas le sujet central de l’album. A noter que Squarzoni avait publié un petit album, Portrait inédit de Arthur Cravan sur ce poète boxeur. Et je serais assez curieux de voir ce que pourrait faire de ce sujet (qui l’intéresse forcément) un auteur comme Benoît Preteseille. C’est en tout cas un album très recommandable. D'autant plus que le travail éditorial est de belle qualité (plus de 200 pages, avec une couverture épaisse, comme le papier, affiche en fac-simile jointe, etc.).