Plusieurs pages peuvent être découpées (mais ça serait vraiment dommage de gâcher ce livre si vous avez l’insigne chance de tomber dessus !), les consignes pour monter son « décor/maquette » occupant elles-mêmes plusieurs pages de BD.
Car Tardi donne ici la pleine mesure de son talent, pour décrire l’horreur de la première guerre mondiale – l’horreur de la guerre tout simplement. Le très grand format de cette belle collection permet de découvrir de belles planches aérées.
Les amateurs de Tardi ne seront pas surpris, il a maintes fois dépeint ces tranchées et les pauvres bougres que l’on a envoyé au casse-pipe. Au travers de textes où pointent l’ironie, l’amertume, c’est encore une fois pour Tardi l’occasion de dénoncer la guerre, les officiers planqués, l’absurdité d’une boucherie dont les victimes ont perdu le sens (à l’image de ce soldat corse fusillé pour avoir mal interprété – car mal compris – une consigne).
De « belles images d’Epinal », un triste et beau réquisitoire. Un très bel album, sans doute moins facile à dégotter que C'était la guerre des tranchées, son chef d’œuvre du genre (mais Varlot soldat, ou Putain de guerre ! complètent son travail sur le sujet).
J'avais été moyennement séduit par l'univers de Pico Bogue que je trouvais un peu intello pour des enfants aussi jeunes. Une fois n'est pas coutume j'ai préféré le spin off de cette série.
Je me suis beaucoup plus retrouvé dans cet univers de doudous si attachants. Ana et ses six doudous proposent une vraie plongée poétique dans le monde de l'imaginaire de la période qui suit la très petite enfance.
Cette période où l'enfant commence à créer son propre univers sans les parents grâce aux doudous. Les auteurs emploient un ton particulièrement juste sans mièvrerie pour faire vivre cette ambiance.
La vingtaine de pages suffit pour nous entrainer dans une histoire dynamique et pleine de fantaisie attendrissante. Chaque petite histoire met l'accent sur une thématique particulière un peu dans le genre de "Max et Lili" mais en plus poétique.
Le graphisme d'Alexis Dormal est toujours aussi réussi. Ses personnages sont tellement expressifs et drôles mis en valeurs par une excellente mise en couleur très lumineuse. Le découpage est moderne Dormal équilibrant les pleines pages lumineuses avec des pages plus classiques qui donnent beaucoup de rythme à la narration visuelle.
Une très bonne série pour les lecteurs et lectrices débutant(e)s.
Voilà encore une belle surprise à côté de laquelle je serais passé si je ne venais pas ici régulièrement. J'adore ce genre de saga familiale qui s’étend sur plusieurs décennies et qui te fait plonger dans un univers où chaque membre de la tribu a son caractère bien trempé. C’est vraiment dans la lignée des grandes sagas à la Malaussène de Pennac ou Les Vieux Fourneaux : des personnages hauts en couleur, des histoires qui se croisent, se répondent, et une bonne dose d’humanité.
L’intrigue suit cette tribu un peu décalée, avec ses conflits, ses moments de tendresse, et surtout son envie de vivre librement, à l’écart des conventions. Chaque génération apporte son lot de drames et de réjouissances, et c’est cette continuité sur plusieurs décennies qui donne toute sa richesse au récit. On voit évoluer les personnages, on s’attache à eux, et au fil des pages, on a l’impression de faire partie de cette tribu indocile.
Le dessin accompagne parfaitement l’ambiance du récit. Ce n’est pas forcément le genre de style qui tape à l’œil, mais il capte bien les émotions et l’énergie de la famille. Les moments d’humour sont là, bien placés, et malgré la longueur de la saga, on ne s’ennuie jamais. Il y a cette fluidité dans le récit qui fait qu’on enchaîne les tomes sans vraiment s’en rendre compte.
Encore une belle trouvaille, merci Grogro d'avoir influencé les autres si je comprends bien :). C’est le genre de lecture qui te laisse un bon feeling, avec ce mélange de nostalgie et de joie de vivre, comme une bouffée d’air frais dans un monde où tout va trop vite. Une saga à savourer doucement, comme un bon vin qu’on laisse vieillir pour en apprécier toutes les nuances
Deux auteurs dont on connait la complicité – et ce depuis pas mal d’albums ! Ici cela se sent et explique sans doute la fluidité du récit.
L’intrigue est difficile à résumer, et elle a sans doute dû être pas mal improvisée par ces deux auteurs. C’est un récit assez poétique, un genre que j’apprécie vraiment. Poésie des textes déjà. Mais aussi des images.
En effet, le dessin de Mattotti est vraiment très chouette. Très simple, très fluide, plein de trouvailles graphiques. Une grande légèreté, mais aussi une grande force. C’est parfois nerveux, hachuré, et souvent porté par les courbes. Un bestiaire original, mais surtout de superbes planches muettes, dans lesquelles Mattotti donne libre court à son talent, alternant cases quasi minimalistes et cases très chargées.
Un gros coup de cœur visuel !
A force de lire obsessivement les polars noirs de Brubaker (Criminal, Reckless), j’en oublierais presque qu’il s’essaye aussi à d’autres genre. Ici, il cite comme inspiration les romans « YA », c’est-à-dire « Young Adult » où typiquement un groupe d’enfants ou d’ados essayent de résoudre un mystère, enquêtent sur une disparition etc. Il préfère toutefois le terme « post-YA » : les protagonistes sont un peu plus âgés (une 20aine d’années), et le ton plus sombre.
Le résultat ? Une enquête enjouée et remplie de mystère, des personnages attachants, un ton relativement adulte (il est question de relations amoureuses) et plutôt sombre. J’ai englouti les 3 tomes, l’intrigues est haletante, bien construite, et les révélations fracassantes sont toujours bien amenées… la fin est logique et satisfaisante, et réussit à réconcilier tous les éléments du récit, ce qui n’était pas donné.
J’ai eu un peu de mal à me faire au dessin de Marcos Martin, la faute principalement à ces visages un peu écrasés. Il sert toutefois parfaitement l’histoire, et contribue grandement à l’ambiance inquiétante de cette petite bourgade oppressante. Il est très détaillé et superbement mis en valeur par les couleurs de Vincente.
Une superbe série, qui a d’ailleurs gagné l’Eisner Award de la meilleure BD numérique en 2021 et en 2024. Une suite (ou prequelle) est possible, même si les auteurs ne semblent pas intéressés à l’heure actuelle. Je croise les doigts pour qu’ils changent un jour d’avis !
Avec "Friday", je découvre un nouveau Ed Brubaker après ses nombreux thrillers.
Pour décor la petite ville de Kings Hill, Friday Fitzhugh, âgée de 18 ans, y revient pour fêter Noël avec sa mère et sa tante. Mais aussi pour y retrouver son meilleur ami d'enfance, Lance Jones, qu'elle avait quitté pour le lycée. Au collège, ils étaient inséparables et passaient leur temps libre à élucider toutes sortes d'énigmes, Lance est un petit génie en son genre. A peine revenue, Friday se retrouve embarquée avec Lance dans une drôle d'histoire avec une 'dame blanche'...
Brubaker, comme à son habitude, distille les premiers éléments de l'intrigue dès les premières pages pour mieux happer le lecteur. Une intrigue qui commence comme un polar pour doucement bifurquer vers le fantastique. Des flash-back sur le passé de nos deux jeunes gens pour comprendre l'évolution de leur relation feront quelques irruptions. Un récit sombre, mystérieux et captivant.
Friday est vraiment attachante et avec une sacrée personnalité.
Un second tome qui prend une nouvelle tournure, beaucoup plus fantastique, ce qui n'est pas pour me déplaire. Une narration toujours maîtrisée et les surprises seront au rendez-vous. Que du bonheur.
Le troisième tome va nous faire découvrir deux Friday, celle du présent et celle du passé. J'ai beaucoup aimé cette partie de l'album, elle explique beaucoup de petits évènements qui paraissaient sans importance. Le savoir-faire de Brubaker. Par contre, le déroulé final m'a moins convaincu, des séquences où le hasard est un peu trop présent. Cela ne m'a pas empêché de passer un excellent moment.
De nouvelles aventures de Friday pourraient voir le jour, si c'est le cas je serai du voyage.
Je découvre Marcos Martin et je suis sous le charme de son dessin rétro, détaillé, expressif et de sa mise en page dynamique.
Les couleurs de Muntsa Visente sont magnifiques.
Du très bon boulot.
Un ensemble très seventies que je recommande aux amateurs du genre.
Un bon 4 étoiles.
Coup de coeur pour "Swan" de Nejib !
Si le tome 1 était déjà très bon, le tome 2 est encore plus prenant. On y trouve un véritable souffle romanesque ainsi que des rebondissements crédibles et bien amenés. Les personnages sont attachants, consistants, ils ont l'épaisseur de personnages de roman, ça bouillonne, c'est la vie qui défile sous nos yeux avec toute la galerie des artistes du XIXème siècle que Nejib croque sans fioriture mais avec un talent évident.
J'ai également apprécié les dialogues ciselés qui font mouche et la présence de nombreuses oeuvres d'art jalonnant le récit (même si je ne les ai sans doute pas toutes repérées).
Le tome 3 qui vient conclure cette superbe histoire est peut-être un peu plus attendu, mais l'ensemble est vraiment bien ficelé. Une belle série sur l'histoire de l'art que je relirai avec plaisir !
Nejib poursuit donc son chemin en traitant un de ses thèmes de prédilection : la mémoire, la construction d'un souvenir, déjà présent dans Stupor Mundi tout en affinant au passage sa technique. Le trait est parfaitement adapté, dynamique, expressif et fluide.
Ce fut un grand plaisir de parcourir ce récit aux multiples enjeux et personnages et où tout est limpide. Nejib a vraiment un talent particulier pour raconter ses histoires. Pas d'effets de manche, de prétention, tout coule de source.
C'est instructif sans être pédant (et ça donne envie de s'informer davantage), l'auteur mêle personnages fictifs et personnalités marquantes du XIXème siècle avec une facilité déconcertante, il rend hommage aux artistes (mais ne se prive pas pour autant de les croquer avec humour) tout en nous contant une histoire familiale qui a de la chair, bravo !
J’aime le dessin de Dany. Surtout dans sa collaboration avec Greg. Je ne pouvais pas passer à côté de cet album. Conquise oui, mais pas complètement non plus. Il y a un (petit) chouïa de réserves.
Le dessin, rien à dire, avant ou après Olivier Rameau, on reconnaît sa patte, ou plutôt ses pattes, fantaisiste ou réaliste, il excelle. Ce sont surtout les scénarios de ces historiettes qui ne m’ont pas toujours convaincue.
Il s’agissait pour certaines de commandes données au dessinateur par les directeurs de revues. Intéressaient-elles Dany ? Je ne sais, mais pour ma part, toutes ne m’intéressent pas.
Les histoires de guerres et de techniques militaires, non seulement me laissent froide, mais surtout dans mon esprit éloignent Dany de l’univers d’Olivier Rameau que j’apprécie tant. Comme si ado, dans ma caboche, j’avais assimilé le dessinateur à son héros fétiche. Snif.
Mais dans la première partie, tous ces petits récits humoristiques, ont été bien agréables à découvrir, ou à redécouvrir, comme l’histoire du bouquet de fleurs. Je l’avais lue dans le Tintin de l’époque et l’avais complètement oubliée, j’ai apprécié.
Belle histoire, triste et réaliste celle-là, de la vie du dernier indien se sa tribu, même si les scénarios de l’époque, ramènent les indiens à des sauvages restés à l’âge de pierre, ça pique un peu, quand même.
La dernière histoire, publicité assumée pour la ville d’Istanbul, n’est pas si mal. Pour une pub j’entends. L’art de concilier une vraie intrigue, certes un peu mièvre, et un catalogue touristique, chapeau.
Voilà, éclectique cet album. Nul doute qu'il ravira les fans de l’auteur ou les nostalgiques de l’époque Tintin. Et je coche les deux. Merci à Josq de l’avoir postée, j’aurais pu rater ça.
Contente de l’avoir lu et contente de le posséder. Donc coup de coeur quand même.
On ne se refait pas !
L’Intranquille monsieur Pessoa nous offre plus qu’une simple biographie. Nicolas Barral parvient en effet à nous raconter une histoire humaine et émouvante avant tout… tout en relatant la vie de l’écrivain. Ainsi ce récit s’avère encore plus touchant qu’instructif.
Franchement, chapeau !
Si le nom de Pessoa ne m’était pas inconnu, je ne connais aucun de ses écrits. Mais qu’importe car c’est à l’homme que Nicolas Barral a réussi à m’intéresser. Pessoa est un inadapté de la vie qui s’invente mille vies, un homme lettré et cultivé qui semble ne pouvoir s’exprimer que derrière l’anonymat d’une feuille de papier. Le personnage ainsi décrit est fascinant, touchant, drôle, inaccessible, poète, humain, décalé. Et déjà, rien que pour lui, cette bande dessinée mérite d’être lue.
Mais le coup de génie de Barral aura été de ne pas nous proposer une biographie mais un vrai roman graphique. Roman dans lequel nous suivons un jeune pigiste alors que lui-même se documente sur l’écrivain. Et, plus qu’un simple portrait, c’est tout le rapport à l’écriture qui devient le sujet du livre. « Faites concis » lui dit son patron, mais comment décrire en peu de mots un tel personnage ? Sinon, en le connaissant jusque dans ses failles, en se l’appropriant et en nous délivrant l’essence même du personnage. Et alors qu’un personnage s’éteint, un autre s’éveille. « Avant d’écrire, vivez », lui dira son premier baiser, mais comment faire quand son sujet, lui, n’aura eu de cesse d’écrire pour avoir le sentiment d’exister ?
Le récit baigne dans une ambiance ouateuse, entre les vapeurs d’alcool et l’intranquilité de Pessoa, entre les rêves et la vie, entre l’écrit et le réel (mais l’écrit n’est-il pas parfois plus réel que la réalité ?), au rythme du pas de Pessoa dans les rues de Lisbonne. Plusieurs scènes font à mes yeux montre d’une grande intelligence (lorsque Pessoa demande à son coiffeur de lui décrire un ballon, par exemple) et démontrent l’importance de la littérature et de la culture. C’est une ode à l’écriture et à l’imaginaire, et pourtant un récit très terre à terre. C’est poétique, intelligent, triste et drôle à la fois.
A titre personnel, j’ai adoré !
A l’origine, Oscar et la dame rose est un roman d’Eric-Emmanuel Schmitt. Roman rapidement adapté en pièce de théâtre par l’auteur lui-même puis adapté en film en 2009.
… Et malgré tout, je ne connaissais absolument pas cette histoire. Il aura donc fallu attendre cette troisième adaptation, en bande dessinée cette fois, pour que je la découvre avec ravissement. C’est le nom de Vincent Zabus qui m’a séduit dans un premier temps (parce que très sincèrement, celui d’Eric-Emmanuel Schmitt, moi, hein, pfff… (comme quoi, je suis vraiment un vieux con)), couplé à la rondeur du trait de Valérie Vernay. Du premier, j’aime l’humanité des scénarios que j’ai eu la chance de lire. De la seconde, j’aime la candeur et la fraicheur qui se dégagent de son trait.
Oscar et la dame rose est une œuvre extrêmement touchante, poétique, humaine, sensible, drôle et légère sur un sujet difficile (la mort) voire tabou (la mort d’un enfant). Sujet casse-gueule s’il en est car il est très tentant d’en faire de trop et de tomber dans le larmoyant insipide. Or, ici, j’ai trouvé son traitement tout simplement parfait. Je me suis attaché aux personnages, j’ai trouvé l’idée d’une journée équivalente à dix ans très poétique et ludique, j’ai été touché par la candeur autant que par la maturité d’Oscar, j’ai aimé cette idée de ces lettres de l’un permettant à l’autre de conserver une relative sérénité à l’heure de sa mort.
Et puis j’ai aimé la rondeur du dessin, l’harmonie des couleurs, la composition des planches, le découpage…
J’ai aimé, quoi !
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Le Trou d'obus
Plusieurs pages peuvent être découpées (mais ça serait vraiment dommage de gâcher ce livre si vous avez l’insigne chance de tomber dessus !), les consignes pour monter son « décor/maquette » occupant elles-mêmes plusieurs pages de BD. Car Tardi donne ici la pleine mesure de son talent, pour décrire l’horreur de la première guerre mondiale – l’horreur de la guerre tout simplement. Le très grand format de cette belle collection permet de découvrir de belles planches aérées. Les amateurs de Tardi ne seront pas surpris, il a maintes fois dépeint ces tranchées et les pauvres bougres que l’on a envoyé au casse-pipe. Au travers de textes où pointent l’ironie, l’amertume, c’est encore une fois pour Tardi l’occasion de dénoncer la guerre, les officiers planqués, l’absurdité d’une boucherie dont les victimes ont perdu le sens (à l’image de ce soldat corse fusillé pour avoir mal interprété – car mal compris – une consigne). De « belles images d’Epinal », un triste et beau réquisitoire. Un très bel album, sans doute moins facile à dégotter que C'était la guerre des tranchées, son chef d’œuvre du genre (mais Varlot soldat, ou Putain de guerre ! complètent son travail sur le sujet).
Ana Ana
J'avais été moyennement séduit par l'univers de Pico Bogue que je trouvais un peu intello pour des enfants aussi jeunes. Une fois n'est pas coutume j'ai préféré le spin off de cette série. Je me suis beaucoup plus retrouvé dans cet univers de doudous si attachants. Ana et ses six doudous proposent une vraie plongée poétique dans le monde de l'imaginaire de la période qui suit la très petite enfance. Cette période où l'enfant commence à créer son propre univers sans les parents grâce aux doudous. Les auteurs emploient un ton particulièrement juste sans mièvrerie pour faire vivre cette ambiance. La vingtaine de pages suffit pour nous entrainer dans une histoire dynamique et pleine de fantaisie attendrissante. Chaque petite histoire met l'accent sur une thématique particulière un peu dans le genre de "Max et Lili" mais en plus poétique. Le graphisme d'Alexis Dormal est toujours aussi réussi. Ses personnages sont tellement expressifs et drôles mis en valeurs par une excellente mise en couleur très lumineuse. Le découpage est moderne Dormal équilibrant les pleines pages lumineuses avec des pages plus classiques qui donnent beaucoup de rythme à la narration visuelle. Une très bonne série pour les lecteurs et lectrices débutant(e)s.
Les Indociles
Voilà encore une belle surprise à côté de laquelle je serais passé si je ne venais pas ici régulièrement. J'adore ce genre de saga familiale qui s’étend sur plusieurs décennies et qui te fait plonger dans un univers où chaque membre de la tribu a son caractère bien trempé. C’est vraiment dans la lignée des grandes sagas à la Malaussène de Pennac ou Les Vieux Fourneaux : des personnages hauts en couleur, des histoires qui se croisent, se répondent, et une bonne dose d’humanité. L’intrigue suit cette tribu un peu décalée, avec ses conflits, ses moments de tendresse, et surtout son envie de vivre librement, à l’écart des conventions. Chaque génération apporte son lot de drames et de réjouissances, et c’est cette continuité sur plusieurs décennies qui donne toute sa richesse au récit. On voit évoluer les personnages, on s’attache à eux, et au fil des pages, on a l’impression de faire partie de cette tribu indocile. Le dessin accompagne parfaitement l’ambiance du récit. Ce n’est pas forcément le genre de style qui tape à l’œil, mais il capte bien les émotions et l’énergie de la famille. Les moments d’humour sont là, bien placés, et malgré la longueur de la saga, on ne s’ennuie jamais. Il y a cette fluidité dans le récit qui fait qu’on enchaîne les tomes sans vraiment s’en rendre compte. Encore une belle trouvaille, merci Grogro d'avoir influencé les autres si je comprends bien :). C’est le genre de lecture qui te laisse un bon feeling, avec ce mélange de nostalgie et de joie de vivre, comme une bouffée d’air frais dans un monde où tout va trop vite. Une saga à savourer doucement, comme un bon vin qu’on laisse vieillir pour en apprécier toutes les nuances
Guirlanda
Deux auteurs dont on connait la complicité – et ce depuis pas mal d’albums ! Ici cela se sent et explique sans doute la fluidité du récit. L’intrigue est difficile à résumer, et elle a sans doute dû être pas mal improvisée par ces deux auteurs. C’est un récit assez poétique, un genre que j’apprécie vraiment. Poésie des textes déjà. Mais aussi des images. En effet, le dessin de Mattotti est vraiment très chouette. Très simple, très fluide, plein de trouvailles graphiques. Une grande légèreté, mais aussi une grande force. C’est parfois nerveux, hachuré, et souvent porté par les courbes. Un bestiaire original, mais surtout de superbes planches muettes, dans lesquelles Mattotti donne libre court à son talent, alternant cases quasi minimalistes et cases très chargées. Un gros coup de cœur visuel !
Friday
A force de lire obsessivement les polars noirs de Brubaker (Criminal, Reckless), j’en oublierais presque qu’il s’essaye aussi à d’autres genre. Ici, il cite comme inspiration les romans « YA », c’est-à-dire « Young Adult » où typiquement un groupe d’enfants ou d’ados essayent de résoudre un mystère, enquêtent sur une disparition etc. Il préfère toutefois le terme « post-YA » : les protagonistes sont un peu plus âgés (une 20aine d’années), et le ton plus sombre. Le résultat ? Une enquête enjouée et remplie de mystère, des personnages attachants, un ton relativement adulte (il est question de relations amoureuses) et plutôt sombre. J’ai englouti les 3 tomes, l’intrigues est haletante, bien construite, et les révélations fracassantes sont toujours bien amenées… la fin est logique et satisfaisante, et réussit à réconcilier tous les éléments du récit, ce qui n’était pas donné. J’ai eu un peu de mal à me faire au dessin de Marcos Martin, la faute principalement à ces visages un peu écrasés. Il sert toutefois parfaitement l’histoire, et contribue grandement à l’ambiance inquiétante de cette petite bourgade oppressante. Il est très détaillé et superbement mis en valeur par les couleurs de Vincente. Une superbe série, qui a d’ailleurs gagné l’Eisner Award de la meilleure BD numérique en 2021 et en 2024. Une suite (ou prequelle) est possible, même si les auteurs ne semblent pas intéressés à l’heure actuelle. Je croise les doigts pour qu’ils changent un jour d’avis !
Friday
Avec "Friday", je découvre un nouveau Ed Brubaker après ses nombreux thrillers. Pour décor la petite ville de Kings Hill, Friday Fitzhugh, âgée de 18 ans, y revient pour fêter Noël avec sa mère et sa tante. Mais aussi pour y retrouver son meilleur ami d'enfance, Lance Jones, qu'elle avait quitté pour le lycée. Au collège, ils étaient inséparables et passaient leur temps libre à élucider toutes sortes d'énigmes, Lance est un petit génie en son genre. A peine revenue, Friday se retrouve embarquée avec Lance dans une drôle d'histoire avec une 'dame blanche'... Brubaker, comme à son habitude, distille les premiers éléments de l'intrigue dès les premières pages pour mieux happer le lecteur. Une intrigue qui commence comme un polar pour doucement bifurquer vers le fantastique. Des flash-back sur le passé de nos deux jeunes gens pour comprendre l'évolution de leur relation feront quelques irruptions. Un récit sombre, mystérieux et captivant. Friday est vraiment attachante et avec une sacrée personnalité. Un second tome qui prend une nouvelle tournure, beaucoup plus fantastique, ce qui n'est pas pour me déplaire. Une narration toujours maîtrisée et les surprises seront au rendez-vous. Que du bonheur. Le troisième tome va nous faire découvrir deux Friday, celle du présent et celle du passé. J'ai beaucoup aimé cette partie de l'album, elle explique beaucoup de petits évènements qui paraissaient sans importance. Le savoir-faire de Brubaker. Par contre, le déroulé final m'a moins convaincu, des séquences où le hasard est un peu trop présent. Cela ne m'a pas empêché de passer un excellent moment. De nouvelles aventures de Friday pourraient voir le jour, si c'est le cas je serai du voyage. Je découvre Marcos Martin et je suis sous le charme de son dessin rétro, détaillé, expressif et de sa mise en page dynamique. Les couleurs de Muntsa Visente sont magnifiques. Du très bon boulot. Un ensemble très seventies que je recommande aux amateurs du genre. Un bon 4 étoiles.
Swan
Coup de coeur pour "Swan" de Nejib ! Si le tome 1 était déjà très bon, le tome 2 est encore plus prenant. On y trouve un véritable souffle romanesque ainsi que des rebondissements crédibles et bien amenés. Les personnages sont attachants, consistants, ils ont l'épaisseur de personnages de roman, ça bouillonne, c'est la vie qui défile sous nos yeux avec toute la galerie des artistes du XIXème siècle que Nejib croque sans fioriture mais avec un talent évident. J'ai également apprécié les dialogues ciselés qui font mouche et la présence de nombreuses oeuvres d'art jalonnant le récit (même si je ne les ai sans doute pas toutes repérées). Le tome 3 qui vient conclure cette superbe histoire est peut-être un peu plus attendu, mais l'ensemble est vraiment bien ficelé. Une belle série sur l'histoire de l'art que je relirai avec plaisir ! Nejib poursuit donc son chemin en traitant un de ses thèmes de prédilection : la mémoire, la construction d'un souvenir, déjà présent dans Stupor Mundi tout en affinant au passage sa technique. Le trait est parfaitement adapté, dynamique, expressif et fluide. Ce fut un grand plaisir de parcourir ce récit aux multiples enjeux et personnages et où tout est limpide. Nejib a vraiment un talent particulier pour raconter ses histoires. Pas d'effets de manche, de prétention, tout coule de source. C'est instructif sans être pédant (et ça donne envie de s'informer davantage), l'auteur mêle personnages fictifs et personnalités marquantes du XIXème siècle avec une facilité déconcertante, il rend hommage aux artistes (mais ne se prive pas pour autant de les croquer avec humour) tout en nous contant une histoire familiale qui a de la chair, bravo !
Les Inédits de Dany
J’aime le dessin de Dany. Surtout dans sa collaboration avec Greg. Je ne pouvais pas passer à côté de cet album. Conquise oui, mais pas complètement non plus. Il y a un (petit) chouïa de réserves. Le dessin, rien à dire, avant ou après Olivier Rameau, on reconnaît sa patte, ou plutôt ses pattes, fantaisiste ou réaliste, il excelle. Ce sont surtout les scénarios de ces historiettes qui ne m’ont pas toujours convaincue. Il s’agissait pour certaines de commandes données au dessinateur par les directeurs de revues. Intéressaient-elles Dany ? Je ne sais, mais pour ma part, toutes ne m’intéressent pas. Les histoires de guerres et de techniques militaires, non seulement me laissent froide, mais surtout dans mon esprit éloignent Dany de l’univers d’Olivier Rameau que j’apprécie tant. Comme si ado, dans ma caboche, j’avais assimilé le dessinateur à son héros fétiche. Snif. Mais dans la première partie, tous ces petits récits humoristiques, ont été bien agréables à découvrir, ou à redécouvrir, comme l’histoire du bouquet de fleurs. Je l’avais lue dans le Tintin de l’époque et l’avais complètement oubliée, j’ai apprécié. Belle histoire, triste et réaliste celle-là, de la vie du dernier indien se sa tribu, même si les scénarios de l’époque, ramènent les indiens à des sauvages restés à l’âge de pierre, ça pique un peu, quand même. La dernière histoire, publicité assumée pour la ville d’Istanbul, n’est pas si mal. Pour une pub j’entends. L’art de concilier une vraie intrigue, certes un peu mièvre, et un catalogue touristique, chapeau. Voilà, éclectique cet album. Nul doute qu'il ravira les fans de l’auteur ou les nostalgiques de l’époque Tintin. Et je coche les deux. Merci à Josq de l’avoir postée, j’aurais pu rater ça. Contente de l’avoir lu et contente de le posséder. Donc coup de coeur quand même. On ne se refait pas !
L'Intranquille monsieur Pessoa
L’Intranquille monsieur Pessoa nous offre plus qu’une simple biographie. Nicolas Barral parvient en effet à nous raconter une histoire humaine et émouvante avant tout… tout en relatant la vie de l’écrivain. Ainsi ce récit s’avère encore plus touchant qu’instructif. Franchement, chapeau ! Si le nom de Pessoa ne m’était pas inconnu, je ne connais aucun de ses écrits. Mais qu’importe car c’est à l’homme que Nicolas Barral a réussi à m’intéresser. Pessoa est un inadapté de la vie qui s’invente mille vies, un homme lettré et cultivé qui semble ne pouvoir s’exprimer que derrière l’anonymat d’une feuille de papier. Le personnage ainsi décrit est fascinant, touchant, drôle, inaccessible, poète, humain, décalé. Et déjà, rien que pour lui, cette bande dessinée mérite d’être lue. Mais le coup de génie de Barral aura été de ne pas nous proposer une biographie mais un vrai roman graphique. Roman dans lequel nous suivons un jeune pigiste alors que lui-même se documente sur l’écrivain. Et, plus qu’un simple portrait, c’est tout le rapport à l’écriture qui devient le sujet du livre. « Faites concis » lui dit son patron, mais comment décrire en peu de mots un tel personnage ? Sinon, en le connaissant jusque dans ses failles, en se l’appropriant et en nous délivrant l’essence même du personnage. Et alors qu’un personnage s’éteint, un autre s’éveille. « Avant d’écrire, vivez », lui dira son premier baiser, mais comment faire quand son sujet, lui, n’aura eu de cesse d’écrire pour avoir le sentiment d’exister ? Le récit baigne dans une ambiance ouateuse, entre les vapeurs d’alcool et l’intranquilité de Pessoa, entre les rêves et la vie, entre l’écrit et le réel (mais l’écrit n’est-il pas parfois plus réel que la réalité ?), au rythme du pas de Pessoa dans les rues de Lisbonne. Plusieurs scènes font à mes yeux montre d’une grande intelligence (lorsque Pessoa demande à son coiffeur de lui décrire un ballon, par exemple) et démontrent l’importance de la littérature et de la culture. C’est une ode à l’écriture et à l’imaginaire, et pourtant un récit très terre à terre. C’est poétique, intelligent, triste et drôle à la fois. A titre personnel, j’ai adoré !
Oscar et la dame rose
A l’origine, Oscar et la dame rose est un roman d’Eric-Emmanuel Schmitt. Roman rapidement adapté en pièce de théâtre par l’auteur lui-même puis adapté en film en 2009. … Et malgré tout, je ne connaissais absolument pas cette histoire. Il aura donc fallu attendre cette troisième adaptation, en bande dessinée cette fois, pour que je la découvre avec ravissement. C’est le nom de Vincent Zabus qui m’a séduit dans un premier temps (parce que très sincèrement, celui d’Eric-Emmanuel Schmitt, moi, hein, pfff… (comme quoi, je suis vraiment un vieux con)), couplé à la rondeur du trait de Valérie Vernay. Du premier, j’aime l’humanité des scénarios que j’ai eu la chance de lire. De la seconde, j’aime la candeur et la fraicheur qui se dégagent de son trait. Oscar et la dame rose est une œuvre extrêmement touchante, poétique, humaine, sensible, drôle et légère sur un sujet difficile (la mort) voire tabou (la mort d’un enfant). Sujet casse-gueule s’il en est car il est très tentant d’en faire de trop et de tomber dans le larmoyant insipide. Or, ici, j’ai trouvé son traitement tout simplement parfait. Je me suis attaché aux personnages, j’ai trouvé l’idée d’une journée équivalente à dix ans très poétique et ludique, j’ai été touché par la candeur autant que par la maturité d’Oscar, j’ai aimé cette idée de ces lettres de l’un permettant à l’autre de conserver une relative sérénité à l’heure de sa mort. Et puis j’ai aimé la rondeur du dessin, l’harmonie des couleurs, la composition des planches, le découpage… J’ai aimé, quoi !