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Par Présence
Note: 4/5
Couverture de la série La Forêt (Ott)
La Forêt (Ott)

Deuil enfantin - Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre. Sa première édition date de 2020. Il a été réalisé par Thomas Ott. Il s'agit d'une bande dessinée en noir & blanc, comportant vingt-cinq pages, entièrement dépourvue de dialogue. Il s'agit d'un format imposé dans cette collection des éditions Martin de Halleux, inspiré de l'ouvrage 25 images de la passion d'un homme (1918), réalisé par Frans Masereel (1889-1972). La forêt est le premier tome de cette collection. Il s'agit d'une histoire racontée en 25 gravures sur bois, chacune imprimée comme un dessin en pleine page, sans aucun dialogue non plus. L'auteur suisse respecte cette contrainte à la lettre, à raison d'une image par page. Un. Dans le salon d'une maison bourgeoise, un jeune garçon est assis sur le canapé, avec une place vide de chaque côté de lui. Il porte des culottes courtes noires et une chemisette blanche. Il est bien peigné. À une extrémité, une vieille femme pleure et essuie ses larmes dans un mouchoir. Derrière, sur le manteau de la cheminée se trouvent des gerbes de fleurs, l'une d'elle portant une banderole, ainsi qu'une enveloppe. Encore un peu derrière, à côté de l'escalier qui mène à l'étage, deux hommes en costume tiennent un verre à la main, la tête inclinée vers le bas, l'air grave, recueilli. Deux. le garçon a quitté le salon et il est sorti dans le jardin, une simple pelouse, par la porte de derrière. Il y a un tuyau d'arrosage et quelques piquets en bois, ainsi qu'une pelle posés contre le mur. le garçon jette un coup d'œil en arrière, tout en passant par-dessus la clôture en bois. Trois. le garçon marche sur un chemin d'un pas tranquille et assuré. Il longe une bordure herbue qui ceinture un champ au milieu duquel se trouve un épouvantail. Il passe devant un tas de piquets sur sa droite, en attente d'être utilisés pour une clôture. À quelques centaines de mètres devant lui, se trouve la lisière de la forêt. Quatre. le garçon se tient immobile à l'orée de la forêt. Il se trouve à la frontière entre la lumière des espaces ouverts derrière lui, et l'obscurité du chemin qui s'enfonce dans la forêt devant lui. Il marque une pause avant de s'y engager. Cinq. le garçon s'est remis à marcher, d'un pas plus lent. Il se tient légèrement courbé, comme s'il sentait la pesanteur de la pénombre, ou comme s'il appréhendait ce qui va se trouver sur sa route. Il apparaît bien petit par comparaison avec les hauts troncs des arbres formant la forêt et bordant le chemin. Quelques rares rayons de lumière transpercent les frondaisons et parviennent jusqu'au sol. Cinq. le garçon continue de marcher sur le sentier, peut-être d'un pas un peu plus rapide. Les racines des arbres courent juste sous la surface du sol ; elles traversent le chemin dans un entrelacs. Six. le chemin se fait plus difficile et la forêt plus sombre. le garçon doit enjamber un arbre mort, en se tenant avec les mains de chaque côté. Derrière un gros tronc d'arbre, semble se tenir une vague silhouette, ce qui s'apparente à oeil captant un reflet de lumière. Voilà un défi très contraint : raconter une histoire complète en vingt-cinq pages, sans avoir recours à aucun mot, uniquement par les images. Il s'agit donc d'une histoire qui se lit rapidement, très simple en termes d'intrigue, pouvant se dévorer en cinq minutes, même en prêtant un peu d'attention aux dessins, et en fournissant un petit effort pour formuler le lien logique permettant de passer d'une image à l'autre. S'il a lu 25 images de la passion d'un homme, le lecteur ne retrouve pas la même ambition narrative dans le présent récit. Sa temporalité est beaucoup plus courte : de l'ordre d'une heure vraisemblablement, deux grand maximum. Il n'y a pas d'enjeu social apparent, ni de reconstitution historique ou de témoignage sur une époque. Comme pour l'original, le lecteur peut se poser la question de la nature de la forme narrative : est-ce vraiment une bande dessinée ? Est-ce une suite de tableaux ou d'illustrations ? En l'absence d'une définition définitive de ce mode d'expression, il se dit que cette question s'avère un peu oiseuse : voilà un récit raconté sous la forme d'une succession d'images qui auraient très bien pu être disposées à raisons de deux ou quatre par page, ou plus, et la question ne se serait alors pas posée. L'auteur narre son récit sous une forme visuelle, avec des images descriptives. le lecteur observe également que le parti pris esthétique de l'artiste s'inscrit dans un mode descriptif, avec des dessins dans lesquels les textures prennent une forte importance, représentées avec des treillis de petites hachures. Ces illustrations formeraient des dessins un peu chargés dans une mise en page traditionnelle, c'est-à-dire des cases alignées en bande. Elles ne s'inscrivent pas non plus dans un courant pictural artistique marqué, comme c'était le cas pour les bois gravés de Frans Masereel. Le lecteur se focalise plus sur l'intrigue : un jeune garçon dont le grand-père est décédé et qui assiste à une réunion sociale qu'il subit, où les adultes se retrouvent pour accomplir un rituel de deuil, chacun prenant acte de la disparition de cet homme, perdu à tout jamais pour les vivants, sans possibilité de nouvelles interactions avec lui qui ne participe plus à la vie. L'absence de texte souligne le fait qu'aucun adulte ne vienne communiquer avec le garçon pour mettre en mots ce changement radical : avant cet être humain existait même s'il n'était pas en présence du garçon, après il n'y a plus de contact possible et cet être humain ne sera plus jamais présent avec une possibilité d'interagir. Dans ce contexte, le garçon doit lui-même faire son deuil avec son entendement de petit garçon. de fait, il ne participe pas vraiment à la société des adultes. L'image le montrant franchissant la petite clôture autour de la maison peut s'entendre comme une métaphore : il franchit la frontière séparant la société des adultes, et son paysage intérieur de petit garçon. Dans l'image suivante, il s'en éloigne progressivement, dans un paysage encore familier, mais avec cette forêt comme horizon, un lieu ne permettant pas de voir ce qu'il contient, un territoire mystérieux. Lorsqu'il s'arrête à la lisière de la forêt, il doit faire le choix conscient de s'aventurer par lui-même dans le questionnement sur la mort de son grand-père, sans rien pour le préparer à ce qu'il va trouver. Il apparaît donc assez rapidement que ce récit peut être considéré sous la forme d'un conte : à la suite du décès d'un proche, un petit garçon s'aventure dans une forêt pour… Pour quoi au fait ? Visiblement, il n'entretient pas de lien affectif particulier avec les adultes présents, ou bien ses parents sont occupés avec d'autres adultes, et il s'éloigne de cette atmosphère pesante pour se promener. Dans un conte, une forêt recèle forcément des surprises, et souvent des dangers, des créatures ou des individus auxquels le lecteur sait bien qu'il ne fait surtout pas faire confiance. Effectivement, le petit garçon se retrouve face à un ou deux monstres. Il fuit le premier, se cache du deuxième, regarde avec appréhension le troisième, pas très sûr de comment il doit les envisager autrement que comme des dangers évidents. le dessinateur n'essaye pas de leur donner une forme plausible ou merveilleuse. Il les représente avec la même approche descriptive, avec la même densité de textures. le premier est un géant sans bras entièrement recouvert de longs poils qui ne laisse pas voir son visage, et qui obligent à deviner la forme globale de sa silhouette, sans réelle certitude de son physique. le second est une femme nue flottant dans les airs, avec ses cheveux lui masquant le visage. L'apparence du troisième permet au lecteur de comprendre qu'il s'agit selon toute vraisemblance de la manière dont le petit garçon personnifie la mort. N'ayant pas les constructions mentales lui permettant d'en faire un concept, il l'imagine sous forme d'un monstre ou d'un autre, par association d'idées avec les mots qu'il a pu entendre dans la bouche des adultes. Au cœur de la forêt, il trouve non pas un trésor, mais une personne : toujours sans aucun mot, l'auteur sait mettre en scène un processus psychologique complexe permettant à l'enfant d'accepter cette mort. Le récit peut également être considéré comme une métaphore de ce processus psychologique. Sans un mot, uniquement avec des images formant un récit, l'auteur parvient à évoquer l'isolation de l'enfant dans un monde d'adultes, ne parvenant pas à donner un sens à l'adieu au défunt, hautement ritualisé, par des pratiques qui ne restent indéchiffrables pour l'enfant. L'esprit de celui-ci se met alors à vagabonder, laissant son imagination prendre le dessus. Ses pensées s'aventurent dans des territoires jusqu'alors inexplorés. Son imagination fait en sorte de conjurer des images de la mort à partir des contes qu'on lui a lus, des illustrations qu'il a déjà pu observer. Ce processus mental le ramène tout naturellement à l'objet qui préoccupe toutes les personnes rassemblées par l'occasion. L'enfant formule alors tout naturellement une stratégie lui permettant de concevoir avec ses moyens et son expérience de la vie, comment appréhender ce phénomène et comment vivre avec. Le titre de cette collection explicite qu'il s'agit d'un exercice de style : raconter une histoire en vingt-cinq images sans mot. Une première lecture laisse un sentiment de frustration : trop rapide, des dessins trop pragmatiques, pas de place pour l'interprétation ou pour l'imagination. Une seconde lecture permet d'apprécier comment l'auteur s'y est pris pour évoquer le processus de deuil chez un enfant, dans l'idée qu'il ne peut pas être identique à celui des adultes, que les rituels mis en place par eux ne font pas sens pour l'enfant. Vu sous cet angle, cette bande dessinée révèle alors son ambition et sa réussite apparaît.

27/07/2024 (modifier)
Par Jeïrhk
Note: 3/5
Couverture de la série Obscurcia
Obscurcia

Sympa, une bonne série pour ados, mais clairement pas pour les plus jeunes effectivement, ça gicle de partout. Le scénario est original bien que classique dans sa structure. C'est une bonne petite BD pour passer le temps. Le dessinateur m'a encore une fois séduit avec son style graphique. J'ai adoré observer tous les petits détails des décors et des différentes peluches qui nous font sourire à de nombreuses reprises. L'action omniprésente est bien réalisée, et le côté bien sanglant parfois un peu gore, ajoute un petit plus au plaisir visuel ainsi qu'au plaisir de la lecture . Il m'a tout de même manqué un petit quelque chose pour vraiment apprécier la série dans sa globalité, le gore et l'originalité de l'univers proposé ne font pas tout. En tout cas, cette fin qui nous prend par surprise, est vraiment appréciable. Bref, un bon 3.5 bien mérité.

27/07/2024 (modifier)
Par Gaston
Note: 3/5
Couverture de la série Un monde d'art brut
Un monde d'art brut

Je rejoins l'avis de Blue boy. Ce que j'ai surtout aimé dans ce one-shot est le dessin qui est plutôt bon et en plus le dessinateur s'applique pout imiter le style des artistes présentés dans l'album. Le problème s'est que le scénario est un peu décousu. Je pense notamment lorsqu'en plus de la présentation d'un artiste, il y a les commentaires des trois fantômes des trois spécialistes de l'art bru, je ne savais pas si je devais commencer à lire la case et ensuite les commentaires ou l'inverse ! Par moment cela sens la patte d'un spécialiste qui veut trop en mettre et qui n'est pas trop habitué avec le médium BD. Cela se laisse lire et j'ai appris des choses sur l'art brut, mais ce n'est pas une lecture qui va me marquer.

27/07/2024 (modifier)
Par Gaston
Note: 4/5
Couverture de la série Hong Kong - Révolutions de notre temps
Hong Kong - Révolutions de notre temps

Un bon album qui explique bien la situation à Hong Kong, cette ancienne colonie qui est revenu que tardivement dans le giron chinois et du coup a développé une histoire et un mode de pensé différent du reste de la Chine ce qui va finir par mener aux répressions qu'on connait. C'est du documentaire comme je l'aime. On explique bien la situation particulière de Hong Kong, son histoire et les événements qui ont mené aux affrontent entre une bonne partie de la population avec les forces de l'ordre chinoise. Tout est clair et précis et un lecteur qui n'a que de vagues connaissances sur le sujet ne va pas se perdre. J'ai eu du plaisir à apprendre des choses sur Hong Kong et le tout est servit par une narration bien dynamique et une mise en scène efficace. Le graphique participe au récit contrairement à d'autres documentaires en BD où tout est plat et on dirait presque que le dessin est facultatif et sert juste attirer des lecteurs jugés trop stupides pour lire un livre qui ne contient pas d'images.

27/07/2024 (modifier)
Par Jeïrhk
Note: 4/5
Couverture de la série Wanted - Portrait de sang
Wanted - Portrait de sang

Un régal ! Court mais efficace. J'adore ce genre de western, surtout avec ce style de dessin. J'ai pris d'autres BD de ce dessinateur et auteur, et ça va bien occuper ma soirée ! Le scénario a quelques facilités, mais on les oublie vite parce qu'on ne s'ennuie jamais. Il y a des touches originales qui apportent un peu de renouveau au genre. Comme ça a déjà été mentionné, il y a un bon équilibre dans ces éléments originaux, ce que j'ai particulièrement apprécié dans cette lecture. Bref, pas grand-chose à dire de plus. C'est le genre de BD qui nous offre de superbes planches sans être trop chargées, avec peu de dialogues, de la bonne action et des scènes sans retenue : ça se lit vite et on passe un bon moment !

26/07/2024 (modifier)
Par Présence
Note: 5/5 Coups de coeur du moment
Couverture de la série Kang le conquérant - La conquête ultime
Kang le conquérant - La conquête ultime

Devenir soi. - Ce tome contient une histoire complète, très intégrée dans l'univers partagé Marvel, mais accessible également pour les néophytes. Il regroupe les cinq épisodes de la minisérie, initialement parus en 2021, coécrits par Jackson Lanzing & Collin Kelly, dessinés et encrés par Carlos Magno, avec une mise en couleurs réalisée par Espen Grundetjern. Les couvertures ont été réalisées par Mike del Mundo. Kang, adulte, médite sur sa vie. Il y a des milliers d'années, Alexandre le Grand s'était assis avec un sage de renom. À cette occasion, il avait appris un secret qui allait le secouer au tréfonds de son être. Il y a plus de mondes que celui-ci, avait dit le sage. Leur nombre est quasiment infini et ils sont disséminés à travers le cosmos, hors de portée de l'atteinte des sens de l'être humain. Alexandre contempla son propre empire, depuis la riche Méditerranée, jusqu'aux steppes de l'Asie, depuis son cœur dans le berceau de la civilisation, jusqu'à ses plus lointaines frontières. Et ses yeux s'emplirent de larmes. Ô grand Alexandre, pourquoi pleures-tu ? demanda le sage. Tu as tous les honneurs qu'un être humain a pu connaître. Il répondit qu'il y avait de quoi désespérer de savoir qu'il y ait un nombre infini de mondes à conquérir, et qu'il ne parvienne pas à être le maître d'un seul de ces mondes. Son nom est Nathaniel Richards, il est né au trente-et-unième siècle. À l'âge de dix-huit ans, il n'a rien conquis. Il vit dans une utopie, la ressentant comme une forme de fin de l'Histoire. Il commence à voir le temps pour ce qu'il est : une cage. Nathaniel Richards décide de concevoir une clé pour se libérer de la cage dans laquelle il considère qu'il se trouve. En deux ans, il conçoit la stratégie qui va lui permettre de réaliser son évasion. de manière clandestine, il se rend en Latvérie, dans le château qui fut autrefois celui de Victor von Doom. Dans les ruines, il parvient à la librairie du monarque, au milieu de laquelle se tient une statue de l'ancien régent. Il s'apprête à consulter les tomes qu'il cherche, mais la statue bouge : c'est un Doombot qui s'apprête à l'agresser. Un rayon destructeur atteint le robot dans le dos : Kang abat l'agresseur. Nathaniel lui demande qui il est : Kang enlève son masque et indique qu'il a été le pharaon Rama-Tut, le gardien des temps Immortus, et qu'il s'appelle Kang, qu'il a été Nathaniel lui-même au début. Il propose à son jeune interlocuteur de le suivre à travers le portail par lequel il est arrivé. Nathaniel choisit de le faire, et il se retrouve avec Kang, à Chixulub, sur le continent Laramidia, soixante-cinq millions d'années dans le passé. Des ptérodactyles volent au-dessus de leur tête. Kang entreprend d'éduquer Nathaniel pendant une année, lui transmettant ses souvenirs, et lui donne cette injonction : ne jamais être amoureux. En 1963, le personnage d'Immortus apparaît pour la première fois dans le numéro 19 de la série Fantastic Four. Puis, Kang apparaît dans le numéro 4 de la série Avengers l'année suivante. Il s'en suit un développement empirique de ce personnage au gré des auteurs et des desiderata éditoriaux : il finit par être établi durablement que sous l'amure de Kang se trouve Nathaniel Richards, le propre père de Reed Richards, connu sous le nom de Mister Fantastic au sein de l'équipe des Fantastic Four. Nathaniel a endossé plusieurs personnalités au cours de sa vie, et voyagé dans le temps aussi bien vers le futur que dans le passé, ses différentes incarnations se croisant dans un désordre chronologique chaotique et générateur de paradoxes temporels à gogo. En 2021, le duo de scénaristes Lanzing & Kelly débutent leur carrière dans les comics, et ils s'attaquent à un défi intimidant : raconter une histoire des origines de ce personnage à l'histoire éditoriale d'une complexité alambiquée. En outre, il leur faut contenter aussi bien le lecteur chevronné qui connaît le personnage, que le lecteur néophyte qui le découvre. de fait, les éléments constitutifs de ce personnage peu facile à manier sont présents : les voyages dans le temps, ses différentes identités, son amour pour Ravona Renslaver. Il s'agit bien d'un récit des origines commençant au trente-et-unième siècle et montrent Nathaniel face à Kang pour la première fois. le paradoxe des origines est posé : l'adolescent a en face de lui la personne qu'il deviendra dans de nombreuses années. Ce destin est-il immuable ? Les coscénaristes s'en donnent à coeur joie avec les différentes incarnations de Kang, et les voyages dans le temps. Afin de ne pas donner l'impression d'évoluer dans des lignes temporelles en carton-pâte, il faut un artiste capable de leur donner de la consistance, de montrer les lieux et les époques dans le détail. Carlos Magno avait impressionné le lecteur dans la saison Invaders (2019/2020) écrite par Chip Zdarsky. Dès l'illustration en pleine page en ouverture, le lecteur retrouve sa minutie, et le niveau de petits détails incroyables, ainsi qu'un sens de l'exubérance dans la composition, rendant très impressionnant cet individu habillé de vert et violet, confortablement assis, avec une scène de bataille derrière lui, impliquant des dizaines de combattants. La page suivante montre Nathaniel également assis, en train d'étudier devant plusieurs écrans holographiques se superposant par partie, et c'est à nouveau une composition sophistiquée fourmillant d'informations visuelles. le lecteur habitué aux comics sait à quoi s'attendre, une diminution progressive du niveau de détails au fil des épisodes, pour finir sur un affrontement physique avec des fonds de case vides. Il n'en est rien : il n'observe aucune baisse de qualité, aucune diminution de l'implication de l'artiste dans ses planches. Il est tout aussi impressionné par le travail réalisé par le coloriste. Celui-ci sait composer sa palette de sorte à améliorer la lisibilité de chaque case pour que les détails se distinguent bien, tout en concevant sa mise en couleurs à l'échelle de chaque page d'une séquence. Il met en œuvre les effets spéciaux attendus pour l'éclairage, les ambiances lumineuses et les superpouvoirs. Il gère admirablement bien la superposition de ces effets, sans jamais perdre en lisibilité. Le dessinateur semble être capable de tout gérer, de tout représenter avec une facilité et avec une conviction déconcertante. Il restitue avec fidélité le costume de tous les superhéros qui apparaissent le temps d'une case ou d'une séquence, en cohérence avec l'épisode de la série référencée, par exemple la version des Avengers de 1964. Il sait faire exister sur le même plan le costume pourtant daté de Kang, les tenues des soldats de l'Égypte antique, la tenue de combat de Ravona, etc. Il s'investit tout autant dans la représentation des environnements, avec un trait d'encrage tout aussi fin, tout aussi précis et méticuleux. le lecteur éprouve la sensation de se tenir dans cette salle d'étude du trente-et-unième siècle, dans la salle poussiéreuse de la bibliothèque abandonnée depuis longtemps du château de Doom, dans une jungle dense traversée par des dinosaures, dans un village aux constructions et au mur d'enceinte en bois, dans un temple égyptien avec des bas-reliefs décorant de gigantesques colonnes, sous l'ombre d'une énorme soucoupe volante, etc. Carlos Magno impressionne de bout en bout avec sa narration visuelle descriptive très riche et précise, rendant tangible tous les personnages, tous les lieux, apportant la consistance nécessaire pour donner corps au merveilleux de ces voyages dans le temps. Les coscénaristes ont également fort à faire : à commencer par rétablir une chronologie du personnage qui reprenne la majeure partie des événements déjà connus par le lecteur de longue date, à gérer la ligne temporelle propre de Kang qui voyage dans le temps, et à s'assurer que les morceaux puissent également être recollés dans une chronologie classique. Ils ne s'attardent pas sur la logique du voyage dans le temps : Nathaniel Richards récupère la technologie du docteur Doom, et les voyages s'effectuent également dans l'espace (la Terre se déplaçant elle-même dans l'espace) de manière implicite. le lecteur constate qu'ils se montrent tout aussi investis que le dessinateur, en particulier avec des cartouches de texte en nombre assez élevé sans être non plus trop copieux pris un par un. Ils répondent à la lettre à la commande : un récit des origines racontant comment Nathaniel Richards est devenu un Kang adulte. le lecteur n'éprouve aucune difficulté à suivre le fil directeur de l'intrigue sautant d'une époque à l'autre, et revenant de temps à autre sur ses pas, ce qui est déjà remarquable au vu de la complexité de l'histoire cumulative de ce personnage. Les coscénaristes ne se contentent pas de re-raconter les origines de Kang de manière qu'elles soient cohérentes et débarrassées des ajouts incompatibles. Dès la première page, le lecteur a accès aux pensées intérieures du personnage, à son ambition mise en perspective avec celle d'Alexandre le Grand. Ce n'est pas un ajout artificiel : cette référence au grand conquérant fait sens et permet de comprendre la motivation principale du personnage. Lorsque Kang adulte vient proposer à Nathaniel jeune de le suivre, le lecteur hésite dans son pari : le chemin de vie peut être changé, ou bien est-il immuable ? Il y a tant de différences entre les deux. Au fur et à mesure, il découvre que les auteurs ont pris son titre au pied de la lettre : le conquérant, et que le titre n'est pas qu'une tournure de phrase. Nathaniel Richards doit conquérir l'individu qu'il va devenir. Ils se montrent aussi habiles et émouvants à expliquer le sort de Ravonna Renslayer, qu'à montrer comment le jeune Nathaniel plein d'entrain devient Kang. A priori, pas de quoi se plonger dans la lecture de ce comics : une réécriture modernisée des origines d'un supercriminel un peu obsolète, à l'allure un peu ridicule, même dans le monde des superhéros. Dès la première page, le lecteur constate la qualité descriptive de la narration visuelle, aussi bien dans le degré de détails, que dans la mise en couleurs sophistiquée. Au moins, il en sortira avec des images plein les yeux. Bien vite il se rend compte que les coscénaristes connaissent l'histoire de ce personnage sur le bout des doigts, qu'ils savent la restituer de manière compréhensible et cohérente, avec une bonne maîtrise du dispositif des voyages dans le temps, et en insufflant une réelle personnalité aussi bien au jeune Nathaniel qu'au Kang vétéran. Alors même que la fin est connue (le premier devient le second), le suspense tient en haleine, et la progression de l'évolution surprend.

26/07/2024 (modifier)
Par Présence
Note: 4/5
Couverture de la série Fight Girls
Fight Girls

Des athlètes niveau excellence - Ce tome contient une histoire complète indépendante de toute autre. Il regroupe les cinq épisodes de la minisérie, initialement parus en 2021, écrits, dessinés et encrés par Frank Cho, avec une mise en couleurs réalisée par Sabine Rich. Les couvertures originales ont été réalisées par Cho, les couvertures variantes par Derrick Chew, Elias Chatzoudis, BUZZ, Cho (*2), Mike Deodato junior, John Gallagher, Richard Ortiz. Il y a douze mois, la reine Regina Victoria Dore a abdiqué. Conformément à la constitution, un parlement spécial a été constitué car la reine était stérile et n'a pas porté d'héritier. le parlement a alors annulé le mariage de la reine Regina avec le roi Gilmoran VIII, et a ressuscité le tournoi des championnes pour pouvoir pourvoir le trône avec une nouvelle reine. Dix femmes de sang royal ou non, provenant des territoires les plus lointains de l'empire ont passé des tests et ont été sélectionnées pour ce tournoi. Il y a quatre phases : l'épreuve de la jungle, l'épreuve du désert, l'épreuve de l'eau, et l'épreuve du combat. Dans la capitale flottante de Califax, sur la planète de l'empire Gilmoran, les dix candidates font leur entrée dans l'immense arène : Dyana Adamson, Jaxa Wyman, Kelsey Otu, Tora Winter, Lily Dupree, Asher Vindal, Xandra Blackwater, Rache Lauren, Danni Vore, Pondo Shem. Elles portent toutes la même tenue de sport : chaussures de sport, short et maillot sans manche laissant la peau dénudée au-dessus short, avec leur numéro. Elles montent sur la plateforme et sont téléportées dans la jungle en dessous, une réserve naturelle établie il y a mille ans. Les dix sélectionnées se retrouvent sur la berge d'une rivière au milieu d'une forêt, avec des petits dinosaures d'une vingtaine de centimètres qui les observent. Elles doivent rallier le plateau de téléportation qu'elles aperçoivent à une quinzaine de kilomètres de là au sommet d'une pyramide à degré. Deux drones sphériques flottant les filment pour retransmettre l'épreuve. Dyana Adamson, la numéro 1, leur conseille de ne pas se montrer présomptueuses, car cette zone est infestée de dinosaures, et de rester dignes car l'une d'elles deviendra la reine et tout l'empire les observe. Elle continue en leur expliquant que leur intérêt commun est de coopérer pour rester vivantes, et qu'elles pourront se mesurer dans une course une fois qu'elles auront toutes atteintes le pied de la pyramide. Xandra Blackwater, dossard numéro 7, s'approche d'elle dans son dos et lui assène un violent coup de branche dans la nuque, en déclarant : chacune pour soi. À Deep Mine, dans le secteur 4, sur Helgrave, Nigel et Butcher voient le début de l'épreuve sur l'écran vidéo et ils savent que le temps est venu pour eux de commencer leur mission. de retour dans la jungle, Kelsey Otu (dossard 3) et Tora Winter (dossard 4) avancent ensemble d'un bon pas. Elles sont suivies du regard par un félin tapi en hauteur. Il bondit sur elles en émettant un grognement. Frank Cho a acquis sa réputation en réalisant des dessins réalistes mettant en avant la beauté du corps féminin, et en faisant preuve d'un goût appuyé pour dessiner des dinosaures. Il avait déjà réalisé une série taillée sur mesure pour lui alliant ces deux préférences : Shanna, the She-Devil (2005/2006). Il réalise plutôt des couvertures, et de temps à autre un récit complet, les deux les plus récents étant Savage Wolverine (2013) avec des dinosaures et Shanna, Skybourne (2016-2018) avec une agente secrète. En commençant ce récit, le lecteur constate que les principaux personnages sont dix femmes magnifiques et sportives, combattantes émérites dans des tenues peu couvrantes, et que dès la première épreuve, elles se battent contre des dinosaures. le créateur se fait donc plaisir en dessinant ce qu'il préfère, dans une histoire simple : remporter la victoire pour devenir la reine. le lecteur ne cherche pas trop la logique qui consiste à mettre en compétition les femmes les plus valeureuses de l'empire, et à les laisser se faire tuer jusqu'à ce qu'il n'en reste plus que deux ou trois. le coup asséné par la numéro 7 montre que c'est chacun pour soi et que tous les coups sont permis. La présence de dinosaures montre que le récit s'inscrit dans le registre Aventure sans explication sur l'existence de dinosaures, ou sur le système politique de l'empire. C'est un décor sans épaisseur à prendre en l'état. Le lecteur s'attend à ce que l'artiste s'en donne à cœur joie dans les plans racoleur, du fait de sa réputation pas imméritée. Effectivement les shorts sont vraiment courts, plus des culottes que des shorts, mais sans dentelles ou fentes encore plus révélatrices. le haut relève de la brassière cardio-fitness, mais sans exagération de la taille de la poitrine, sans que chaque sein soit moulé par le tissu. Une tenue très proche de ce que peuvent porter les candidates lors des épreuves de jeux comme Ninja Warrior. de même, le dessinateur proscrit tout plan culotte, ou tout gros plan sur la poitrine. Il s'attache à montrer les exploits physiques de chaque candidate : sa musculature, la course, la natation, les évitements acrobatiques, les techniques de combats, les réflexes. le lecteur se fait la réflexion que la représentation de ces athlètes est traitée de la même manière que s'il s'était agi d'hommes, avec même une volonté de mettre en valeur leurs différentes capacités, sans dessin dramatisé à outrance. Par ailleurs, Cho traite avec les dinosaures la même déférence, le même respect et la même admiration respectueuse. C'est un vrai plaisir de les voir évoluer et attaquer, du vélociraptor dans la jungle, au mégalodon dans l'océan, en passant par le scorpion géant des sables. L'artiste les représente avec amour : la forme, les articulations, les mouvements, la texture de la peau ou de la carapace, les griffes, les dents, les pointes dorsales, etc. C'est un spectacle d'une qualité rare pour tout amateur de ces bestioles que de les voir ainsi à l'honneur, le vélociraptor bondissant vers lui, les griffes en avant, le mégalodon bondissant dans l'air, la gueule grande ouverte. De fait le lecteur se repaît du spectacle : une histoire d'action et d'aventure, un spectacle très divertissant. le créateur se fait plaisir et ça se voit dans des pages enjouées : la réaction des autres participantes quand Dyana s'écroule à terre après avoir été frappée par Xandra, le tyrannosaure qui s'en prend au félin, le tronc d'arbre recouvert de mousse et de lianes servant de pont, le ptérodactyle qui enlève une athlète prête à gravir les marches de la pyramide, l'énorme créature qui surgit des sables, le pari de gravir la carapace d'un dinosaure, les méduses dans l'eau, le duel à main nue pour départager les deux dernières combattantes, et plein d'autres. La coloriste complète à merveille les traits encrés, que ce soit pour les mises en lumière, les textures comme celle de l'océan, ou encore les effets spéciaux. Totalement séduit, le lecteur ne se montre pas trop regardant sur la logique du scénario (Pourquoi Xandra Blackwater n'élimine-t-elle pas les autres candidates, comme elle a tué Dyana ?) : il profite du spectacle. Et puis, il y a deux intrigues secondaires : les deux mercenaires en route pour une mission indéterminé, l'agent Matteo qui se fait passer pour un journaliste d'un magazine spécialisé dans les chats, et qui enquête sur le passé de Xandra Blackwater, parce que le premier ministre lui trouve quelque chose de pas entièrement convaincant. Le lecteur assiste donc en spectateur privilégié aux quatre épreuves de la jungle, du désert, de l'eau, et du combat. Il se demande quel peut bien être le plan de Xandra Blackwater, et si elle va être découverte avant de pouvoir mener à bien son plan. Chaque épreuve étant racontée dans un épisode différent, il découvre les réponses à ces mystères dans le cinquième épisode. L'auteur a conçu une intrigue sympathique, qui n'invalide pas les épreuves des candidates, et dont le dernier mouvement est cohérent avec l'ambiance générale du récit : de l'action spectaculaire, une touche d'horreur, une touche de cynisme. La révélation finale est bien raccord avec le caractère bien trempé des candidates et leur excellence. le récit ne se limite pas à de beaux exploits sportifs et combatifs, puisque certaines s'avèrent mortelles, et la baignade se termine dans le sang, avec les tripes à l'air, faisant que le récit ne reste pas dans un registre propre sur lui et sans conséquence palpable pour les blessées. A priori, le lecteur se dit qu'il va plonger dans une histoire à l'intrigue riquiqui et aux jolis dessins, un peu trop focalisés sur les courbes féminines. Il découvre une série d'épreuves pour devenir reine, avec des dessins montrant des corps féminins proches de la perfection physique, mais sans fixette sur les postérieurs, sans hypertrophie mammaire. Il retrouve la passion de l'auteur pour les dinosaures, avec des épreuves spectaculaires, et un amour de ces animaux qui transparaît dans le soin apporté à leur représentation. Il se rend compte qu'il y a une intrigue secondaire légère qui met encore plus en valeur l'intelligence de certaines participantes, et leur excellence. Un récit qu'il est impossible de bouder.

26/07/2024 (modifier)
Par Présence
Note: 4/5
Couverture de la série Beta Ray Bill - Etoile d'argent
Beta Ray Bill - Etoile d'argent

Retrouver l'espoir d'une vie plus pleine - Ce tome contient une histoire qui ne nécessite pas de connaissance préalable du personnage, car le scénariste rappelle tout ce qu'il faut en savoir en cours de route. Elle se déroule après Thor T01 : Le Roi dévoreur (épisodes 1 à 6, 2020), écrits par Donny Cates et dessinés par Nic Klein dont les événements sont également rappelés dans le présent tome. Il regroupe les 5 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2021, écrits, dessinés et encrés par Daniel Warren Johnson, et mis en couleurs par Mike Spicer. Les couvertures ont été réalisées par Warren Johnson, et les couvertures variantes par Ryan Stegman, Iban Coello, Walter Simonson, Todd Nauck Chase Conley, Paul Pope, Mike del Mundo, Declan Shalvey, Nick Dragotta. Il commence avec une introduction d'une page de Donny Cates. Il se termine avec une interview de 3 pages, de Walter Simonson répondant à des questions posées par Warren Johnson. Il y a des décennies de cela sur la planète Korbin, les astronomes détectent l'arrivée proche d'une menace planétaire. Quelques temps plus tard, deux officiels viennent frapper à la porte d'une maison pour les informer que leur fils a été choisi. Au temps présent, sur Asgard, une poste de télévision diffuse un match de Rufio, pendant que Beta Ray Bill contemple la trace de propreté sur le mur, là où devrait se trouver son marteau Stormbreaker qui a été détruit il y a peu par Thor. Sif interrompt sa rêverie pour lui annoncer que l'ennemi est tout proche, et qu'il n'y a aucun signe de Thor. le guerrier comprend : il prend une hache à double lame, et met son casque à crinière. Il sort à l'extérieur et depuis les marches, il harangue les guerriers d'Asgard. La gigantesque bête du Roi Noir arrive et les asgardiens sont prêts. Leurs forces combinées sont à même de vaincre l'ennemi. Beta Ray Bill n'a pas le temps de terminer son discours qu'un énorme poing fracasse le mur d'enceinte, le projetant à terre. Fin Fang Foom, possédé par un symbiote de Knull, se tient devant lui et s'avance pour l'exterminer. Sif ordonne aux Asgardiens de se lancer dans la bataille pour protéger leur champion. Ils effectuent une sortie massive par la tête de Galactus qui remplit la fonction de porte de l'enceinte. Au-dessus de cette dernière apparaît le gigantesque vaisseau de Beta Ray Bill, piloté par l'intelligence artificielle Skuttlebutt. Elle a armé les canons et elle tire avec toute sa puissance de feu. le dragon étant ainsi distrait, Beta Ray Bill en profite pour se jeter sur lui, afin de lui asséner un puissant coup de hache. Il est intercepté en plein bond par le dragon d'un coup si puissant qu'il en perd son casque et sa hache. D'un coup tout aussi terrible, Fin Fang Foom le projette à terre, ce qui soulève un tel nuage de poussière que l'IA en perd le contact visuel. Puis il assène un violent coup de poing au vaisseau qui va percuter la muraille d'enceinte, projetant à terre de nombreux guerriers dont Sif. Celle-ci ne parvient pas à se relever, alors que Fin Fang Foom avance inexorablement vers elle. Dans son introduction, Cates précise que les événements de cette minisérie se déroule concomitamment à la saison de Thor qu'il écrit, et qu'il s'est abstenu de donner quelque conseil que ce soit à l'auteur, tout en ayant la ferme intention d'intégrer les évolutions apportées au personnage. Daniel Warren Johnson joue le jeu de s'intégrer à la continuité du moment : il met à profit l'ennemi bien pratique qu'est Fin Fang Foom, possédé par Knull pendant King In Black (2020/2021) de Donny Cates & Ryan Stegman. Dès ce premier épisode, le lecteur retrouve la fougue de l'artiste qu'il avait pu apprécier dans Wonder Woman : Dead Earth (2020) : des combats épiques, brutaux, sauvages, des coups portés sans retenue. C'est parti dès la page 7 avec le poing massif qui pulvérise une enceinte de pierre. Puis vient un dessin en double page pour rendre compte de la taille gigantesque de Fin Fang Foom. Skuttlebutt a droit à un dessin en pleine page pour bien rendre compte de la taille du vaisseau spatial. Puis le lecteur ressent une douleur au ventre en voyant la force avec laquelle le dragon arrête Beta Ray Bill en plein bond, au point d'en perdre son casque et son arme. Dans l'épisode suivant, le lecteur assiste à une bagarre de bar, et les consommateurs ne font pas semblant. Dans l'épisode suivant, Beta Ray Bill et ses compagnons exterminent des créatures démoniaques à grand coup de hache, et avec des armes automatiques, sans aucune retenue. le duel du dernier épisode est d'une ampleur et d'une violence inouïes. Il est visible que l'artiste prend grand plaisir à mettre en scène ces affrontements physiques, à concevoir comment rendre compte de la sauvagerie des combattants, de l'énergie déployée, de la force des impacts. Il ne remplit pas son quota de pages d'action : il raconte des combats vitaux, essentiels au récit, au cœur de la nature des personnages. Même la partie de ping-pong dégage une intensité peu commune. Mike Spicer sait habiller les pages avec des couleurs plutôt chaudes et assez intenses, venant souligner légèrement les reliefs car les dessins sont déjà structurés par des traits encrés, et installer une ambiance lumineuse cohérente avec le lieu, en extérieur, comme en intérieur. L'artiste ne se contente pas de dessiner des échanges de coup dans des grandes cases. Il assure également une narration visuelle lors des dialogues, avec des pages comprenant de 6 à 8 cases, ce qui est un nombre consistant pour un comics de superhéros. Il représente les personnages avec des postures et un langage corporel parlants, ce qui emporte la conviction du lecteur sur leur existence, malgré leur apparence plus ou moins bizarre, très bizarre même pour Beta Ray Bill avec son crâne chevalin. Il se montre tellement convaincant que le lecteur finit par craindre que sa mâchoire allongée ne se brise trop facilement sous les coups. Les petits traits gras encrés apportent une texture un peu rugueuse, un peu abimée par le temps et les coups reçus, en totale cohérence avec la nature de guerrier de Beta Ray Bill, mais aussi des Asgardiens, Sif comprise. le dessinateur prend le temps de représenter les décors régulièrement, même s'il profite aussi de larges espaces dégagés pour les combats, sans arrière-plan. Comme l'indique le titre de la série, le récit se focalise sur Beta Ray Bill, et le lecteur est impressionné par la capacité de l'artiste à lui faire exprimer des émotions, ou des états d'esprit au travers de son visage, malgré sa forme si particulière, et de ses postures. L'auteur a donc choisi d'intégrer cette aventure dans la continuité du moment de Thor, sans toutefois que cela ne devienne pesant. En fait, Knull ne sert qu'à donner plus de puissance à Fin Fang Foom, sans que le lecteur n'ait besoin de savoir quoi que ce soit sur King in Black. le sort de Stormbreaker est rappelé en une case, ce qui suffit. En cours de route, le scénariste revient sur les origines de Beta Ray Bill, donnant là encore tous les éléments nécessaires à la compréhension pour le lecteur néophyte, sans y consacrer dix pages ce qui évite toute lassitude d'un lecteur connaisseur. Il intègre d'autres éléments de l'univers partagé Marvel pour que le héros dispose de compagnons lors de sa quête d'une nouvelle arme, Skurge, personnage créé par Jack Kirby & Stan Lee en 1964 dans la série Thor, un autre personnage qui a été créé en 1975 par Jim Starlin, et un ennemi créé par Kirby & Lee en 1963 également dans la série Thor. À part pour le personnage de Starlin qui ressemble plus à un caprice de l'auteur, les deux autres sont parfaitement à leur place. Warren Johnson semble avoir une affinité élective beaucoup plus forte pour Beta Ray Bill que pour Wonder Woman, le caractère et la personnalité du premier étant en cohérence totale avec ses précédentes apparitions. Il maîtrise bien l'histoire du personnage, et il a trouvé une motivation et un objectif entièrement logiques pour lui. Ce dernier ne part pas au combat pour une simple histoire de fierté ou de besoin d'une arme extraordinaire. Sa décision trouve ses racines dans son histoire personnelle, ses aspirations, la situation intenable dans laquelle il se trouve depuis que Thor a brisé son marteau. Si le personnage créé par Starlin n'apporte pas grand-chose pour définir Beta Ray Bill, il en va tout autrement de Skurge et de Skuttlebutt. L'amitié du premier est aussi dérangeante, le recours sciemment à la violence pour exterminer les ennemis, que l'amitié de la seconde, une intelligence artificielle désincarnée tout entière dévouée à soutenir Beta Ray Bill. Un changement d'état de l'IA va introduire un mal-être problématique, tout autant que les avances de Sif l'ont été avec Beta Ray Bill. Sans en avoir l'air, l'auteur met en scène la notion d'intimité d'une manière trouble et gênante. Il est possible que le lecteur n'ait pas été entièrement convaincu par l'histoire de Wonder Woman réalisée par l'auteur, magnifique sur le plan visuel, mais pas tout à fait en phase avec la nature du personnage. Il revient pour un festival de violence visuelle, et il est servi au-delà de ses espérances, avec un panache remarquable. Il découvre que le récit n'est pas un prétexte pour passer d'un combat à l'autre, mais qu'il repose sur la personnalité de Beta Ray Bil et sur une motivation profonde générant une forte empathie chez le lecteur.

26/07/2024 (modifier)
Par Cleck
Note: 2/5
Couverture de la série Tous à la campagne !
Tous à la campagne !

Tronchet réalise son Retour à la terre. Même thématique initiale que chez Larcenet, même conception via des gags d'une planche. C'est malheureusement assez poussif, très attendu. Côté illustrations, Tronchet adopte un style plus carré qu'à son habitude ; ce qui ne constitue pas une belle idée visuellement, et n'est pas travaillé ni justifié formellement. Une BD d'apparence sympathique, ne décollant jamais tant l'humour est globalement absent. Très anecdotique et fort dispensable, pas désagréable non plus.

26/07/2024 (modifier)
Par Cacal69
Note: 4/5
Couverture de la série Catwoman - Lonely City
Catwoman - Lonely City

Une agréable surprise. Catwoman dans un univers alternatif, elle vient de sortir de prison dix après la nuit du fou qui coûta la vie à Batman et au Joker entre autres, elle a 55 ans et ses genoux la font souffrir, dur de vieillir (je sais de quoi je parle, j'ai 55 ans). La ville de Gotham a changé, la criminalité n'est plus qu'un mauvais souvenir et cela on le doit au maire Harvey Dent et à sa police qui bénéficie des avancées technologiques de Wayne Industrie. Cliff Chiang a su créer un univers cohérent où l'on retrouvera beaucoup de personnages qui gravitent autour de Batman. Des personnages bien (re)travaillés qui ont eux aussi pris des rides. Un scénario original et bien ficelé pour un récit captivant et rondement mené, même si j'ai peu apprécié la petite part de fantastique dans le dernier chapitre, elle gâche un peu tout ce qui avait été construit avant. Mais cela reste une lecture recommandable et un excellent comics. Un dessin simple, lisible et rétro qui a régalé mes rétines. Une mise en page audacieuse qui donne du peps au récit. La colorisation vintage est parfaite. Du très bon boulot. Un petit 4 étoiles pour une surprenante Selina Kyle.

26/07/2024 (modifier)