Thorgal a de grandes qualités, son héros, les vikings, les étoiles, le dessin, la magie… Mais il s'essouffle, mais il s'essouffle, il me semble tomber moins bas que d'autres séries, mais quand il n'y a plus de magie, bye, bye ! Et plus on promettait, plus on déçoit.
Vraiment dur, on aime un héros aimable, qui ne veut pas dominer, la gloire et autres poudres aux yeux mais simplement être libre, aimer et être aimé par celle qu'il aime. Et la famille qu'il fonde avec elle. Son antagoniste principal est une femme qu'on en vient à apprécier pour son courage et une façon désillusionnée de voir la vie, heureusement comme parfois que quand le héros patine un peu, l'opposant est là pour relancer l'intérêt, je dirais, avec mon mauvais esprit, mais cela ne suffit pas ! Dommage, il y avait des trouvailles, le concours de tir à l'arc où tous renonçaient car comment lancer la flèche assez bien ? Mais une femme - est-ce celle du héros, je ne sais plus ? - remarque qu'il n'est pas spécifié qu'il faut lancer la flèche, en prend une et fait ce qui doit l'être, ce qui permet de continuer l'aventure autrement bloquée. Hélas, Thorgal, lui, nous a perdu.
La couverture, très belle, particulièrement réussie, à la forte connotation sexuelle, vous oblige à ouvrir cet album.
D'autant qu'il s'agit d'un road-trip de pré-ados qui souhaitent aller voir la Mano Negra à... 100km de de là, et espèrent y aller à deux avec leur petit solex.
La lecture est fluide, les dessins très beaux.
Un pas de côté discret dans l'histoire semble aborder une histoire douloureuse d'agression sexuelle du personnage ado principal.
On y croise aussi des adultes gris, tel un garagiste mélancolique, plein de regrets, ou un chauffeur de bus graveleux.
Heureusement au milieu de tout ça, il y a la Mano Negra, avec son énergie positive et solaire.
Franchement pas mal !
Un dessin vif, plein de fraicheur. Ça m'a furieusement fait penser à F'murr (les génies des Alpages), tant pour les dessins, que les histoires avec leurs personnages verbeux à la philosophie quotidienne.
J'ai bien aimé, même si passé le premier tiers de l'album je me suis un peu assoupi. Ca manque un peu de nerf. Les dialogues faussement médiévaux sont funs mais ralentissent un peu la lecture. D'autant que l'histoire reste un peu légère, cependant le côté féministe fait du bien, qui est le fond de l'affaire, rend le tout drôle et donne du peps à l'ensemble. Les dernières pages rajoutent du fun et de la légèreté, rendant le tout franchement sympathique.
A lire.
Culte ou qui le mériterait ! A rempli le job pour moi, une histoire et des dessins agencés de telle sorte qu'on plonge dedans avec l'idée de revenir. Parfois, on confond des personnages ? Quand bien même, quelle importance, car cela montre le chaos de l'époque, soit une des raisons poussant si fortement au détachement, soit dans un monastère, soit seul au hasard des routes ! De plus, quand j'ai tenu ces bd, je n'ai eu de cesse de les relire. C'est dense, et en même temps, rempli de moments de grâce contemplative, une grâce qui exprime le meilleur du Japon !
Le héros ne serait pas sympatoche ? Eh bien, les êtres en quêtes, par exemple les artistes et les mystiques ne le sont pas toujours : obsédés par leur but et ne prenant pas toujours de gants. En plus, le bouddhisme prône certes la compassion, mais aussi toutes sortes de moyens pour sortir les gens de leurs illusions, et parler de façon énigmatique ou brutale peut en faire partie. Le héros a une sorte de rival pas présenté de façon très flatteuse, mais qui ne manque pas non plus de perspicacité, comprenant bien comment tout ce que rejette le héros peut être utile aux masses de fidèles. Les samouraïs ne sont pas flattés, ce n'est rien de le dire et ça change, le peuple souffre, les aristocrates sont raffinés, eux ne font que ravager ! L'enfant qui subsiste dans le héros ne cesse de regretter d'être séparé de sa mère, et c'est ce qui conserve une humanité secrète mais poignante au héros.
Cet album regroupe deux récits signés Darwyn Cooke : Batman: Ego et Catwoman: Le Gros Coup de Sélina. Le premier m’a vraiment plu. Il plonge dans la psychologie de Batman, partagé entre Bruce Wayne et la créature qu’il a créée. C’est un récit introspectif, sombre et élégant, porté par un style graphique rétro qui colle parfaitement à l’ambiance.
Le second récit, centré sur Catwoman et un hold-up qu’elle organise, m’a en revanche moins convaincu. L’histoire se lit bien, mais elle m’a semblé plus classique et moins marquante que la première. L’ensemble reste intéressant pour découvrir une autre facette de ces personnages, mais le contraste entre les deux histoires est assez fort.
Au final, Batman: Ego m’a vraiment accroché, tandis que Le Gros Coup de Sélina m’a laissé plus indifférent.
Cette série n'a pas été censurée mais Chott l'a arrêtée de lui-même en 1949 par peur d'être censuré. C'est en 1955 que les soucis commencent avec une série de 5 procès contre BIG BILL le Casseur, un cow-boy masqué. Après avoir gagné les 4 premiers procès, Chott perd le dernier en 1961. Ceci met fin à sa maison d'édition.
Pour se replonger dans cette série mythique (le numéro 1 a été tiré à 90 000 exemplaires à l'époque), il existe 6 albums regroupant toutes les aventures de FANTAX accompagnées de documents et récits inédits sur la vie de Pierre Mouchot.
Et cette année, deux nouveaux albums couleurs sont sortis pour relancer les nouvelles aventures de FANTAX avec ARROYO et MILLET aux crayons et DEPELLEY et MORNET aux stylos.
Site : https://fantaxbd.com
Pour moi, c'est donc incontournable mais en fouillant vous comprendrez pourquoi... ;)
« Silent Jenny » était l’une des BD les plus attendues de cette rentrée. Et sans trop se tromper, on peut affirmer que le résultat est tout à fait à la hauteur des attentes. L’objet en lui-même est déjà impressionnant : un pavé grand format de 311 pages, bénéficiant de la touche haut de gamme du « Label 619 » des éditions Rue de Sèvres. La couverture représentant la monade géante hébergeant le groupe de dissidents de ce road trip SF fait également son petit effet.
Il ne s’agit là que de la « vitrine », mais lorsqu’on franchit la porte du magasin, la promesse est tenue, et l’émerveillement opère instantanément. Mathieu Bablet est un démiurge du neuvième art, cela va sans dire. Comme pour ses précédents opus, il a édifié ici un univers avec ses codes et une structure très élaborée. Et bien que l’action se déroule sur une Terre totalement ravagée, le lecteur aurait presque l’impression d’être transporté dans une autre galaxie, même si nombre de détails nous semblent familiers. Et pourtant, non. Il s’agit juste de notre planète en voie d’extinction, asséchée par un soleil brûlant et les diverses pollutions des siècles passés.
Avant de poursuivre cet avis, peut-être serait-il utile de rappeler la signification du terme « monade ». Si dans cette histoire, il s’agit de ces mastodontes mécaniques errant à travers des paysages désolés, c’est à la base un concept philosophique, qui signifie étymologiquement « unité », l’unité parfaite qui est le principe absolu, ce qui prend ici tout son sens. Dans le roman de l’écrivain de science-fiction Robert Silverberg, « Les Monades urbaines » sont des tours gigantesques où s’entasse la population.
Bref. C’est dans ce contexte cataclysmique que « Jenny la silencieuse » va effectuer des missions pour la Pyrrhocorp, l’entreprise tentaculaire qui contrôle ce qui reste du monde. La jeune femme est obsédée à l’idée de trouver de l’ADN d’abeilles qui permettrait de « repoliniser » le monde, un véritable sacerdoce pour elle, plus instinctif que raisonné. Mais la multinationale, si elle la rémunère pour ses actions, et plutôt mal d’ailleurs, n’est pas une organisation altruiste. Ankylosée par ses propres procédures administratives qui lui ont fait oublier le sens de ces missions, elle se contente de consigner les découvertes des prospecteurs dans d’immenses salles aux murs garnis de tiroirs, sans que l’on sache vraiment si celles-ci seront un jour exploitées.
De plus, Jenny prend de très gros risques lors de ses expéditions. Dans sa combinaison usée qui laisse passer l’air vicié, elle doit se rendre sous terre (« l’inframonde ») après s’être miniaturisée, puis affronter les microïdes, des humains ayant échoué dans leur mission après avoir muté en zombies informes en voie de calcification. Mais il en faudrait plus pour dissuader la jeune femme de poursuivre son projet. Et même si elle se révèle une solitaire invétérée, elle reste fidèle à sa tribu de dissidents et ne s’éloigne jamais vraiment de l’itinéraire de la monade dans laquelle elle peut reprendre des forces.
Sur cette planète devenue hostile, le danger est partout. La monade ne doit jamais s’arrêter, au risque d’être détruite par les canons de la Pyrrhocorp ou attaquée par les mange-cailloux, des parias cachant leur maladie sous des casques, espérant ainsi gagner les faveurs de la multinationale.
On l’aura compris, « Silent Jenny » est une lecture riche et foisonnante, mais bénéficiant d’une narration fluide, même s’il faudra peut-être un peu de temps pour rentrer dedans. Mathieu Bablet prend le temps de poser son histoire, évite les rebondissements faciles et à outrance, et tant pis pour les lecteurs les plus impatients. Mais ici, la réflexion philosophique et l’action parviennent à trouver un point d’équilibre idéal, avec une tension omniprésente tout au long du récit.
Les thématiques y sont nombreuses, en résonance avec notre époque. La trame principale du livre porte sur l’insoumission de ces « déserteurs » ayant opté pour le « nomadisme en monades », des monades énormes et passablement déglinguées se déplaçant à l’allure de l’escargot, face à une multinationale qui s’est substituée on ne sait trop comment au pouvoir politique, peu versée dans la démocratie et déterminée à mettre au pas les moutons égarés… En marge de ce duel larvé, il y a ces mange-cailloux, des clodos casqués, maladifs et teigneux. Ils sont à la fois les petits soldats et les idiots utiles d’un pouvoir autoritaire et sans visage, dont le seul but semble être le contrôle pour le contrôle. En s’en prenant au peuple des monades, ils espèrent obtenir de leurs maîtres une reconnaissance plus qu’hypothétique.
Dans ce contexte anxiogène, les personnages sont bien campés psychologiquement, et on s’attache à ce petit groupe en résistance, même si on peut regretter une vision unilatérale voire manichéenne des choses, sachant que les personnages des camps adverses (ceux qui vivent sous l’emprise de la corp ou les mange-cailloux) sont réduits à de simples « silhouettes ». Quant à Jenny, la figure centrale, elle nous touche par son action sacrificielle et son sentiment de solitude inconsolable dissimulé sous un scaphandre usé. La jeune femme se burine à chacune de ses missions, la rapprochant un peu plus de la calcification donc de la mort, cette dernière représentée par cette faucheuse qui va la hanter tout au long du récit.
Côté dessin, le trait de Mathieu Bablet est toujours très fouillé. On reste abasourdi devant l’abondance de détails et la richesse graphique, avec une bonne part d’onirisme, donnant l’impression que rien n’a été fait par hasard. L’influence d’un certain Moebius semble incontestable, mais un Moebius qui aurait intégré une dose de cyberpunk dans sa boîte à outil. L’imagination fertile de l’auteur fait le reste. Le Cherche-Midi, cette monade rafistolée, telle un Centre Pompidou zadiste à roulettes, est impressionnant, s’imposant comme une image forte, à l’instar du Nostromo dans « Alien ». Pour preuve sa mise à l’honneur en couverture. Quant à la colorisation, très soignée, elle est raccord avec cet univers toxique et calciné, oscillant généralement du rouge ardent au brun oxydé en passant par le vert maladif, tandis que le bleu du ciel, plutôt rare, symbolise principalement l’espoir du renouveau.
D’une ambition folle, « Silent Jenny » est une œuvre que certains jugeront peut-être un peu complexe, mais la puissance du propos et la sophistication graphique sont telles qu’elles battent potentiellement en brèche les critiques des plus réticents. Cet album en forme de road trip post-apo n’est assurément pas une balade de santé, mais s’apparenterait plutôt à un pèlerinage hasardeux et difficile sur une route très escarpée, une quête où il n’est pas seulement question de retour aux origines mais de résistance, de résilience et d’humanité. Incontestablement un des albums qui marquera l’année.
Une lecture qui m’a laissé circonspect disons, dans un premier temps. Je me suis procuré cette BD avant tout pour voir ce qu’allait donner l’association Brüno – Lucky Luke. Sur cet aspect là je n’ai pas été déçu, si on apprécie le trait de cet artiste c’est vraiment très sympa de redécouvrir le plus célèbre des « lonesome cowboy ». J’aime particulièrement toutes ces séries de « vu par... » qui fleurissent ces dernières années où on laisse des artistes contemporains remodeler nos grands personnages de fiction. (Enfin pas trop toucher non plus hein, faut pas qu'il fume, faut pas qu'il tue, il y a un cahier des charges à respecter... ).
En fait cet album est chapitré en sept histoires (très, très très très) courtes qui se suivent plus ou moins. Un clin d’œil à un album bien connu de Sept histoires courtes de Morris et Goscinny ? Peut être… Bref. C’est pas très excitant tout ça, hormis l’opening façon "The Hateful Eight" de Tarantino, on ne s’attache à aucun personnage secondaire au centre de chacune des histoires. Mis à part dans une seule histoire, Luky Luke reste fidèle à lui-même, au gars qu’on connaît bien, gentil, serviable, le chevalier blanc qui défend la veuve et l’orphelin sans verser le sang. Aussi, ça ne tourne qu’autour de son boulot de « shotgun » de diligence, et à chaque fois ça raconte pas grand-chose, c’est pas accrocheur. Et je me suis dit qu’il y avait un problème, comment l’éditeur a pu laisser passer « ça » ? Où est le travail de relecture ?
Mais ensuite vient un dossier de fin d'album où, sous couvert d'une fausse interview, les auteurs nous explique qu’en réalité Lucky Luke a vraiment existé d'une certaine manière. « Choke », révélation pour moi, j’ignorais cela, et donc cet album Dakota 1880 serait en quelque sorte une adaptation des écrits de Baldwin Chenier (qui n’est autre que le jeune Baldwin qui fait route avec le héros), un noir américain de la fin du XIXème, romancé par Appollo qui vient de son côté apporter une touche moderne et lisible à ces carnets de route. Dakota 1880 se pose d’une certaine façon comme un préquel réel des aventures (fictives celles-ci) de Lucky Luke par Morris et Goscinny (pas de Jolly Jumper ici).
Vu comme ça, je comprends mieux pourquoi cet album manque d’épaisseur dans la narration. Le mieux peut être aurait été de placer cet "entretien" en préambule, en guise de trigger warning. Parce que pendant un moment je me disais « mais qu’est-ce que je suis en train de lire ?! ». Avec les explications, encore une fois, ça change un peu la donne et… ouais du coup, c’est pas si mal. Un bon essai.
Un manga thriller qui parle d'un des problèmes du Japon : les sectes. Un journaliste découvre par hasard l'existence d'une secte étrange dont les adeptes n'ont aucun problème pour tuer. Il y a un côté horreur vu que les membres de la secte abordent un sourire très glauque et c'est pas très rassurant lorsqu'ils rient !
C'est un peu dur de noter la série pour le moment. J'ai lu les trois premiers tomes et une grande partie de ce que j'ai lu est surtout une longue introduction qui met en place les différents éléments du scénario. Un autre problème est que si pour l'instant le scénario est efficace, il fait aussi déjà vu pour quiconque a déjà lu ce genre de thriller : le journaliste qui découvre sans le vouloir quelque chose d'étrange et enquête, le collègue qui lui dit de ne pas le faire, le héros qui ne l'écoute pas et finit par voir sa vie intime ruinée parce qu'il s'attaque à une organisation plus puissante que lui... Il y a rien de nouveau. Il manque aussi quelque chose pour que le récit soit palpitant à lire, j'avoue que je suis tout de même un peu indifférent de voir si le héros va réussir ou non à combattre cette secte.
Le dessin est pas trop mal, c'est du réalisme comme c'est la norme pour ce type de manga.
La beauté ?! C’est la plus grande arnaque de la création !
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Ce tome contient une histoire complète indépendante de toute autre. Son édition originale date de 2025. Il a été réalisé par Pierre Alexandrine pour le scénario, les dessins et les couleurs. Il comprend deux-cent-vingt-huit pages de bande dessinée.
Au temps présent, un soir à Paris, dans le vingtième arrondissement, non loin du parc des Buttes-Chaumont, Zayn, un jeune homme, se rend dans un bel appartement spacieux et haut de plafond, habité par Louise. Elle accepte qu’il monte chez elle. Elle l’accueille poliment en lui disant qu’elle était en train de s’endormir devant une série. Il est très impressionné par l’appartement. Il finit par indiquer qu’il est venu parce qu’il n’arrête pas de penser à elle depuis la dernière fois, et il voulait savoir s’il y avait la moindre chance que… Elle répond immédiatement : Non. Elle pensait avoir été claire : c’était bien, tous les deux, mais elle préfère qu’ils en restent là. Il lui dit qu’il ne comprend pas : c’est elle qui l’a abordé dans ce bar, qui l’a séduit, qui l’a embrassé, et cette nuit chez lui, il avait cru… Et ses textos à elle, ses déclarations enflammées. Elle ne s’en souvient pas. Il a juste besoin de comprendre pourquoi. Il la supplie. Elle finit par accepter, tout en le prévenant qu’il risque d’avoir du mal à la croire. Elle lâche le morceau : elle a fait en sorte qu’il tombe amoureux d’elle parce que, faute d’amour, elle se met à vieillir. Mais quand on l’aime elle devient éternelle. C’est la stricte vérité : tant que quelqu’un a des sentiments pour elle, elle ne peut pas vieillir. Elle lui montre un tableau dont elle a été le modèle, datant de 1527.
Zayn acceptant de l’écouter, Louise continue. Elle a dans les six ans, elle est née au quinzième siècle. Au risque de le décevoir, elle raconte qu’elle n’a pas rencontré beaucoup de gens célèbres. Jean-Sébastien Bach lui a parlé une fois. Elle a dû croiser Oscar Wilde à deux trois soirées. Elle a bu du porto avec Marlene Dietrich en 1934… C’est tout. Ah, et elle a couché avec Spinoza, excellent amant d’ailleurs. Répondant à une question du jeune homme, elle indique qu’il lui est arrivé quelques bricoles, mais la plupart des trucs qui font mourir les humains sont inefficaces sur elle. Son corps se régénère de façon quasi instantanée. Il n’y a guère que le feu qui puisse la détruire. Elle est née avec ce pouvoir miraculeux, et elle ignore d’où il lui vient. Devant ses yeux, elle se tire une belle dans la poitrine et en ressort indemne. Il comprend qu’elle est une sorte de vampire de l’amour et que la vie a dû être facile pour elle. Cette remarque la fait sortir de ses gonds. IL n’a aucune idée de ce à quoi ressemblait le monde avant son petit vingt-et-unième siècle. A-t-il déjà connu le vrai froid ? Et la faim ? La guerre ? La misère ? La peur ? A-t-il déjà été traqué par un village entier juste parce qu’on le trouvait bizarre ? Est-ce qu’on l’a déjà pendu parce qu’il avait flirté avec la mauvaise personne ? Combien de fois dans sa vie s’est-il fait traiter de succube ? De renarde, de stryge ? De chienne impudique ? De puterelle malfaisante et vérolée ?
Un point de départ fantastique très simple : tant que quelqu’un aime Louise, elle ne peut pas vieillir, et elle a maintenant six cents ans. Un jeune homme épris d’elle vient pour obtenir une réponse claire sur les raisons qui ont poussé Louise à le laisser tomber du jour au lendemain : parce qu’il est sympathique elle accepte de lui raconter son histoire. Le lecteur trouve ce qu’il est en droit d’attendre : des moments historiques, ou plutôt des époques identifiées avec parfois une référence historique, des leçons d’amour, ou plutôt de séduction, ou plutôt comment rendre un homme fou de désir, des périodes sans rien de particulier, le temps qui passe, le questionnement sur le pourquoi de cette immortalité, la solitude, la tentation de succomber à l’amour, etc. Il s’agit d’une histoire avec une forte pagination qui se lit très facilement. L’artiste se place dans un registre proche de la Ligne Claire : des traits de contours nets et une légère simplification dans les visages et dans la représentation des objets et des décors, par comparaison avec une approche qui aurait été plus photoréaliste. La mise en couleurs déroge quelque peu aux dogmes de la Ligne Claire : elle intègre des variations de nuances pour une même couleur, de discrets ombrages en fonction des sources de lumière, quelques rares effets discrètement expressionnistes. Le lecteur remarque également quelques personnages en ombre chinoise, se faisant écho entre ces séquences, une demi-douzaine de dessins en pleine page.
Le lecteur ressent immédiatement qu’il s’agit de l’œuvre d’un artiste complet : à la fois pour la complémentarité entre les textes et les dessins sans redondances, à la fois pour la personnalité de la narration. En effet l’appartenance à la famille de la Ligne Claire donne une apparence assez jeune aux personnages, de jeunes adultes en tout cas, à l’exception de Martin de la Fôle étant devenu un vieil homme, ou encore d’Eleanore, elle aussi atteinte par l’âge. Dans le même temps, le soin apporté aux tenues vestimentaires et aux décors place la narration visuelle dans un registre adulte, plutôt que tout public, sans voyeurisme graphique pour autant. Au fil des années qui passent, des décennies qui défilent, des siècles qui siècles qui s’accumulent, le personnage principal voit du paysage, à la fois par ses voyages, à la fois par l’évolution de la société aussi bien technologique que sociétale. Une fois bien calé dans son fauteuil dans ce bel appartement parisien aux côtés de Zayn pour écouter Louise, le lecteur voyage lui aussi : au galop dans un champ, dans une maison close parisienne au quinzième siècle y compris lors d’une réception aussi somptueuse que décadente ou dans la plus belle chambre, en Hollande au pied des moulins, dans une cathédrale, dans un grand bal à Venise, sur une scène de théâtre, aux portes de l’université de Samarcande, à la cour de Catherine II. Puis le temps d’une case : à Lhassa, à bord d’un grand voilier militaire, dans la jungle des Indes, au Japon devant le mont Fuji. Etc. L’artiste sait faire voyager le lecteur, sans ostentation, de manière organique et intégrée au récit, servant le déroulement de la vie de l’amourante.
Tout au long du récit, le lecteur relève également un usage à bon escient d’éléments visuels variés. Quelques exemples : trente pages muettes dépourvues de tout texte où les dessins portent toute la narration, cinq dessins en pleine page, un dessin en double page, quelques visuels se répondant (par exemple le passage au pied des moulins qui revient plus tard avec le même cadrage, mais à une autre saison, page cinquante rappelé en page cent-trente-trois), des silhouettes en ombre chinoise, le jeu des couleurs, etc. Il remarque que l’artiste utilise des découpages de page à base de cases rectangulaires bien alignées en bande, avec un nombre variable en fonction de la nature de la scène. Il met en œuvre une direction d’acteurs de type naturaliste, sans exagérer les émotions ou les gestes, sauf lorsqu’ils sont en représentation, littéralement sur une scène de théâtre, ou en phase de séduction en appliquant des techniques. Le lecteur se trouve vite séduit par cette narration visuelle facile à lire, agréable à l’œil, riche en informations sans être indigeste. Une narration douce et substantielle donnant à voir cette vie longue de plusieurs siècles, riche de voyages et de découvertes, avec quelques péripéties, sans se transformer en une suite d’aventures échevelées. Louise elle-même dit qu’elle n’a pas rencontré beaucoup de personnes célèbres.
L’histoire raconte donc la vie de cette femme qui se découvre un pouvoir extraordinaire : vivre éternellement jeune, sous réserve que quelqu’un soit amoureux d’elle. Elle rencontre Eleanor qui lui explique comment faire pour séduire et éveiller la passion, et les décennies se succèdent les unes aux autres. Le lecteur voit apparaître un thème : l’évolution de la vie amoureuse de Louise. Cela commence par un bon mariage de raison avec un paysan, puis par un veuvage soudain. Dans ce quinzième siècle, elle se retrouve jeune veuve sans le sou et décide de monter à Paris. Dépourvue de ressources, elle se retrouve contrainte à la prostitution dans une maison close, où ses qualités (la maladie n’a pas de prise sur elle, elle ne risque pas de tomber enceinte) en font une professionnelle inégalable. Puis le schéma s’inverse : ayant bénéficié de la tutelle d’une autre amourante, c’est elle qui suscite l’amour chez les hommes, selon sa volonté. Le lecteur assiste alors à une leçon, une technique en cinq étapes : le désir, le mystère, l’obstacle, une pincée d’espoir, la souffrance. L’amour devient ainsi un simple moyen pour parvenir à ses fins. Eleanor le décrit ainsi : Le véritable amour, celui qui fait brûler de désir et mourir de jalousie… L’amour qui brise les amitiés et provoque des guerres, le grand et terrible amour qui se presse dans les cœurs depuis que le monde est monde, ce n’est pas un noble sentiment. Il est chaotique, violent, incontrôlable. C’est une maladie…
L’histoire raconte également une forme d’émancipation : cette femme qui maîtrise son corps, qui séduit les hommes pour les utiliser, qui maîtrise parfaitement la psychologie de la séduction. Une chose importante à retenir, c’est qu’à chaque variété d’homme correspond une approche bien précise. Avec les jeunes, il suffit d’être entreprenante. Les types mûrs, il faut les flatter. Les riches, ne pas avoir l’air impressionné par leur argent. Avec les débauchés, il faut surjouer l’innocence. Avec les chastes, la dépravation. Être directe avec les timides et évasive avec les téméraires. Face à un orgueilleux, le coup de froideur indifférente est la meilleure option. Sauf si on a affaire à un demeuré. Auquel cas mieux vaut passer tout de suite à la technique de la demoiselle en détresse. […] Un être humain également détaché des contingences matérielles pouvant satisfaire sa soif de découvertes, de voyages, de savoir grâce à un temps sans limite. Une personne dans un corps jeune, avec une expérience de plusieurs siècles, en pleine possession de ses moyens physiques et intellectuels. Comme tout être humain, Louise est la recherche du sens à donner à sa vie, à cette existence éternelle, cette vie dont elle a la totale jouissance et la totale responsabilité, dont la seule limite est de devoir s’accommoder des évolutions de la société.
Une simple histoire d’amour, ou d’amoureuse, avec une touche de fantastique ? Tellement plus que ça : une narration visuelle accessible et impeccable, riche et agréable, sympathique et solide. Un récit s’étalant sur plusieurs siècles, mêlant amour, séduction, quelques aventures, et une touche de perversité dans la manière d’instrumentaliser le désir des hommes. Un exercice de pensée sur ce que l’on peut attendre de l’existence, ou ce que l’on peut rechercher dans la vie de telles conditions de vie. Formidable.
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Thorgal
Thorgal a de grandes qualités, son héros, les vikings, les étoiles, le dessin, la magie… Mais il s'essouffle, mais il s'essouffle, il me semble tomber moins bas que d'autres séries, mais quand il n'y a plus de magie, bye, bye ! Et plus on promettait, plus on déçoit. Vraiment dur, on aime un héros aimable, qui ne veut pas dominer, la gloire et autres poudres aux yeux mais simplement être libre, aimer et être aimé par celle qu'il aime. Et la famille qu'il fonde avec elle. Son antagoniste principal est une femme qu'on en vient à apprécier pour son courage et une façon désillusionnée de voir la vie, heureusement comme parfois que quand le héros patine un peu, l'opposant est là pour relancer l'intérêt, je dirais, avec mon mauvais esprit, mais cela ne suffit pas ! Dommage, il y avait des trouvailles, le concours de tir à l'arc où tous renonçaient car comment lancer la flèche assez bien ? Mais une femme - est-ce celle du héros, je ne sais plus ? - remarque qu'il n'est pas spécifié qu'il faut lancer la flèche, en prend une et fait ce qui doit l'être, ce qui permet de continuer l'aventure autrement bloquée. Hélas, Thorgal, lui, nous a perdu.
La Main heureuse
La couverture, très belle, particulièrement réussie, à la forte connotation sexuelle, vous oblige à ouvrir cet album. D'autant qu'il s'agit d'un road-trip de pré-ados qui souhaitent aller voir la Mano Negra à... 100km de de là, et espèrent y aller à deux avec leur petit solex. La lecture est fluide, les dessins très beaux. Un pas de côté discret dans l'histoire semble aborder une histoire douloureuse d'agression sexuelle du personnage ado principal. On y croise aussi des adultes gris, tel un garagiste mélancolique, plein de regrets, ou un chauffeur de bus graveleux. Heureusement au milieu de tout ça, il y a la Mano Negra, avec son énergie positive et solaire.
Ballades
Franchement pas mal ! Un dessin vif, plein de fraicheur. Ça m'a furieusement fait penser à F'murr (les génies des Alpages), tant pour les dessins, que les histoires avec leurs personnages verbeux à la philosophie quotidienne. J'ai bien aimé, même si passé le premier tiers de l'album je me suis un peu assoupi. Ca manque un peu de nerf. Les dialogues faussement médiévaux sont funs mais ralentissent un peu la lecture. D'autant que l'histoire reste un peu légère, cependant le côté féministe fait du bien, qui est le fond de l'affaire, rend le tout drôle et donne du peps à l'ensemble. Les dernières pages rajoutent du fun et de la légèreté, rendant le tout franchement sympathique. A lire.
Ikkyu
Culte ou qui le mériterait ! A rempli le job pour moi, une histoire et des dessins agencés de telle sorte qu'on plonge dedans avec l'idée de revenir. Parfois, on confond des personnages ? Quand bien même, quelle importance, car cela montre le chaos de l'époque, soit une des raisons poussant si fortement au détachement, soit dans un monastère, soit seul au hasard des routes ! De plus, quand j'ai tenu ces bd, je n'ai eu de cesse de les relire. C'est dense, et en même temps, rempli de moments de grâce contemplative, une grâce qui exprime le meilleur du Japon ! Le héros ne serait pas sympatoche ? Eh bien, les êtres en quêtes, par exemple les artistes et les mystiques ne le sont pas toujours : obsédés par leur but et ne prenant pas toujours de gants. En plus, le bouddhisme prône certes la compassion, mais aussi toutes sortes de moyens pour sortir les gens de leurs illusions, et parler de façon énigmatique ou brutale peut en faire partie. Le héros a une sorte de rival pas présenté de façon très flatteuse, mais qui ne manque pas non plus de perspicacité, comprenant bien comment tout ce que rejette le héros peut être utile aux masses de fidèles. Les samouraïs ne sont pas flattés, ce n'est rien de le dire et ça change, le peuple souffre, les aristocrates sont raffinés, eux ne font que ravager ! L'enfant qui subsiste dans le héros ne cesse de regretter d'être séparé de sa mère, et c'est ce qui conserve une humanité secrète mais poignante au héros.
Batman - Ego
Cet album regroupe deux récits signés Darwyn Cooke : Batman: Ego et Catwoman: Le Gros Coup de Sélina. Le premier m’a vraiment plu. Il plonge dans la psychologie de Batman, partagé entre Bruce Wayne et la créature qu’il a créée. C’est un récit introspectif, sombre et élégant, porté par un style graphique rétro qui colle parfaitement à l’ambiance. Le second récit, centré sur Catwoman et un hold-up qu’elle organise, m’a en revanche moins convaincu. L’histoire se lit bien, mais elle m’a semblé plus classique et moins marquante que la première. L’ensemble reste intéressant pour découvrir une autre facette de ces personnages, mais le contraste entre les deux histoires est assez fort. Au final, Batman: Ego m’a vraiment accroché, tandis que Le Gros Coup de Sélina m’a laissé plus indifférent.
Fantax
Cette série n'a pas été censurée mais Chott l'a arrêtée de lui-même en 1949 par peur d'être censuré. C'est en 1955 que les soucis commencent avec une série de 5 procès contre BIG BILL le Casseur, un cow-boy masqué. Après avoir gagné les 4 premiers procès, Chott perd le dernier en 1961. Ceci met fin à sa maison d'édition. Pour se replonger dans cette série mythique (le numéro 1 a été tiré à 90 000 exemplaires à l'époque), il existe 6 albums regroupant toutes les aventures de FANTAX accompagnées de documents et récits inédits sur la vie de Pierre Mouchot. Et cette année, deux nouveaux albums couleurs sont sortis pour relancer les nouvelles aventures de FANTAX avec ARROYO et MILLET aux crayons et DEPELLEY et MORNET aux stylos. Site : https://fantaxbd.com Pour moi, c'est donc incontournable mais en fouillant vous comprendrez pourquoi... ;)
Silent Jenny
« Silent Jenny » était l’une des BD les plus attendues de cette rentrée. Et sans trop se tromper, on peut affirmer que le résultat est tout à fait à la hauteur des attentes. L’objet en lui-même est déjà impressionnant : un pavé grand format de 311 pages, bénéficiant de la touche haut de gamme du « Label 619 » des éditions Rue de Sèvres. La couverture représentant la monade géante hébergeant le groupe de dissidents de ce road trip SF fait également son petit effet. Il ne s’agit là que de la « vitrine », mais lorsqu’on franchit la porte du magasin, la promesse est tenue, et l’émerveillement opère instantanément. Mathieu Bablet est un démiurge du neuvième art, cela va sans dire. Comme pour ses précédents opus, il a édifié ici un univers avec ses codes et une structure très élaborée. Et bien que l’action se déroule sur une Terre totalement ravagée, le lecteur aurait presque l’impression d’être transporté dans une autre galaxie, même si nombre de détails nous semblent familiers. Et pourtant, non. Il s’agit juste de notre planète en voie d’extinction, asséchée par un soleil brûlant et les diverses pollutions des siècles passés. Avant de poursuivre cet avis, peut-être serait-il utile de rappeler la signification du terme « monade ». Si dans cette histoire, il s’agit de ces mastodontes mécaniques errant à travers des paysages désolés, c’est à la base un concept philosophique, qui signifie étymologiquement « unité », l’unité parfaite qui est le principe absolu, ce qui prend ici tout son sens. Dans le roman de l’écrivain de science-fiction Robert Silverberg, « Les Monades urbaines » sont des tours gigantesques où s’entasse la population. Bref. C’est dans ce contexte cataclysmique que « Jenny la silencieuse » va effectuer des missions pour la Pyrrhocorp, l’entreprise tentaculaire qui contrôle ce qui reste du monde. La jeune femme est obsédée à l’idée de trouver de l’ADN d’abeilles qui permettrait de « repoliniser » le monde, un véritable sacerdoce pour elle, plus instinctif que raisonné. Mais la multinationale, si elle la rémunère pour ses actions, et plutôt mal d’ailleurs, n’est pas une organisation altruiste. Ankylosée par ses propres procédures administratives qui lui ont fait oublier le sens de ces missions, elle se contente de consigner les découvertes des prospecteurs dans d’immenses salles aux murs garnis de tiroirs, sans que l’on sache vraiment si celles-ci seront un jour exploitées. De plus, Jenny prend de très gros risques lors de ses expéditions. Dans sa combinaison usée qui laisse passer l’air vicié, elle doit se rendre sous terre (« l’inframonde ») après s’être miniaturisée, puis affronter les microïdes, des humains ayant échoué dans leur mission après avoir muté en zombies informes en voie de calcification. Mais il en faudrait plus pour dissuader la jeune femme de poursuivre son projet. Et même si elle se révèle une solitaire invétérée, elle reste fidèle à sa tribu de dissidents et ne s’éloigne jamais vraiment de l’itinéraire de la monade dans laquelle elle peut reprendre des forces. Sur cette planète devenue hostile, le danger est partout. La monade ne doit jamais s’arrêter, au risque d’être détruite par les canons de la Pyrrhocorp ou attaquée par les mange-cailloux, des parias cachant leur maladie sous des casques, espérant ainsi gagner les faveurs de la multinationale. On l’aura compris, « Silent Jenny » est une lecture riche et foisonnante, mais bénéficiant d’une narration fluide, même s’il faudra peut-être un peu de temps pour rentrer dedans. Mathieu Bablet prend le temps de poser son histoire, évite les rebondissements faciles et à outrance, et tant pis pour les lecteurs les plus impatients. Mais ici, la réflexion philosophique et l’action parviennent à trouver un point d’équilibre idéal, avec une tension omniprésente tout au long du récit. Les thématiques y sont nombreuses, en résonance avec notre époque. La trame principale du livre porte sur l’insoumission de ces « déserteurs » ayant opté pour le « nomadisme en monades », des monades énormes et passablement déglinguées se déplaçant à l’allure de l’escargot, face à une multinationale qui s’est substituée on ne sait trop comment au pouvoir politique, peu versée dans la démocratie et déterminée à mettre au pas les moutons égarés… En marge de ce duel larvé, il y a ces mange-cailloux, des clodos casqués, maladifs et teigneux. Ils sont à la fois les petits soldats et les idiots utiles d’un pouvoir autoritaire et sans visage, dont le seul but semble être le contrôle pour le contrôle. En s’en prenant au peuple des monades, ils espèrent obtenir de leurs maîtres une reconnaissance plus qu’hypothétique. Dans ce contexte anxiogène, les personnages sont bien campés psychologiquement, et on s’attache à ce petit groupe en résistance, même si on peut regretter une vision unilatérale voire manichéenne des choses, sachant que les personnages des camps adverses (ceux qui vivent sous l’emprise de la corp ou les mange-cailloux) sont réduits à de simples « silhouettes ». Quant à Jenny, la figure centrale, elle nous touche par son action sacrificielle et son sentiment de solitude inconsolable dissimulé sous un scaphandre usé. La jeune femme se burine à chacune de ses missions, la rapprochant un peu plus de la calcification donc de la mort, cette dernière représentée par cette faucheuse qui va la hanter tout au long du récit. Côté dessin, le trait de Mathieu Bablet est toujours très fouillé. On reste abasourdi devant l’abondance de détails et la richesse graphique, avec une bonne part d’onirisme, donnant l’impression que rien n’a été fait par hasard. L’influence d’un certain Moebius semble incontestable, mais un Moebius qui aurait intégré une dose de cyberpunk dans sa boîte à outil. L’imagination fertile de l’auteur fait le reste. Le Cherche-Midi, cette monade rafistolée, telle un Centre Pompidou zadiste à roulettes, est impressionnant, s’imposant comme une image forte, à l’instar du Nostromo dans « Alien ». Pour preuve sa mise à l’honneur en couverture. Quant à la colorisation, très soignée, elle est raccord avec cet univers toxique et calciné, oscillant généralement du rouge ardent au brun oxydé en passant par le vert maladif, tandis que le bleu du ciel, plutôt rare, symbolise principalement l’espoir du renouveau. D’une ambition folle, « Silent Jenny » est une œuvre que certains jugeront peut-être un peu complexe, mais la puissance du propos et la sophistication graphique sont telles qu’elles battent potentiellement en brèche les critiques des plus réticents. Cet album en forme de road trip post-apo n’est assurément pas une balade de santé, mais s’apparenterait plutôt à un pèlerinage hasardeux et difficile sur une route très escarpée, une quête où il n’est pas seulement question de retour aux origines mais de résistance, de résilience et d’humanité. Incontestablement un des albums qui marquera l’année.
Dakota 1880
Une lecture qui m’a laissé circonspect disons, dans un premier temps. Je me suis procuré cette BD avant tout pour voir ce qu’allait donner l’association Brüno – Lucky Luke. Sur cet aspect là je n’ai pas été déçu, si on apprécie le trait de cet artiste c’est vraiment très sympa de redécouvrir le plus célèbre des « lonesome cowboy ». J’aime particulièrement toutes ces séries de « vu par... » qui fleurissent ces dernières années où on laisse des artistes contemporains remodeler nos grands personnages de fiction. (Enfin pas trop toucher non plus hein, faut pas qu'il fume, faut pas qu'il tue, il y a un cahier des charges à respecter... ). En fait cet album est chapitré en sept histoires (très, très très très) courtes qui se suivent plus ou moins. Un clin d’œil à un album bien connu de Sept histoires courtes de Morris et Goscinny ? Peut être… Bref. C’est pas très excitant tout ça, hormis l’opening façon "The Hateful Eight" de Tarantino, on ne s’attache à aucun personnage secondaire au centre de chacune des histoires. Mis à part dans une seule histoire, Luky Luke reste fidèle à lui-même, au gars qu’on connaît bien, gentil, serviable, le chevalier blanc qui défend la veuve et l’orphelin sans verser le sang. Aussi, ça ne tourne qu’autour de son boulot de « shotgun » de diligence, et à chaque fois ça raconte pas grand-chose, c’est pas accrocheur. Et je me suis dit qu’il y avait un problème, comment l’éditeur a pu laisser passer « ça » ? Où est le travail de relecture ? Mais ensuite vient un dossier de fin d'album où, sous couvert d'une fausse interview, les auteurs nous explique qu’en réalité Lucky Luke a vraiment existé d'une certaine manière. « Choke », révélation pour moi, j’ignorais cela, et donc cet album Dakota 1880 serait en quelque sorte une adaptation des écrits de Baldwin Chenier (qui n’est autre que le jeune Baldwin qui fait route avec le héros), un noir américain de la fin du XIXème, romancé par Appollo qui vient de son côté apporter une touche moderne et lisible à ces carnets de route. Dakota 1880 se pose d’une certaine façon comme un préquel réel des aventures (fictives celles-ci) de Lucky Luke par Morris et Goscinny (pas de Jolly Jumper ici). Vu comme ça, je comprends mieux pourquoi cet album manque d’épaisseur dans la narration. Le mieux peut être aurait été de placer cet "entretien" en préambule, en guise de trigger warning. Parce que pendant un moment je me disais « mais qu’est-ce que je suis en train de lire ?! ». Avec les explications, encore une fois, ça change un peu la donne et… ouais du coup, c’est pas si mal. Un bon essai.
Smile!
Un manga thriller qui parle d'un des problèmes du Japon : les sectes. Un journaliste découvre par hasard l'existence d'une secte étrange dont les adeptes n'ont aucun problème pour tuer. Il y a un côté horreur vu que les membres de la secte abordent un sourire très glauque et c'est pas très rassurant lorsqu'ils rient ! C'est un peu dur de noter la série pour le moment. J'ai lu les trois premiers tomes et une grande partie de ce que j'ai lu est surtout une longue introduction qui met en place les différents éléments du scénario. Un autre problème est que si pour l'instant le scénario est efficace, il fait aussi déjà vu pour quiconque a déjà lu ce genre de thriller : le journaliste qui découvre sans le vouloir quelque chose d'étrange et enquête, le collègue qui lui dit de ne pas le faire, le héros qui ne l'écoute pas et finit par voir sa vie intime ruinée parce qu'il s'attaque à une organisation plus puissante que lui... Il y a rien de nouveau. Il manque aussi quelque chose pour que le récit soit palpitant à lire, j'avoue que je suis tout de même un peu indifférent de voir si le héros va réussir ou non à combattre cette secte. Le dessin est pas trop mal, c'est du réalisme comme c'est la norme pour ce type de manga.
L'Amourante
La beauté ?! C’est la plus grande arnaque de la création ! - Ce tome contient une histoire complète indépendante de toute autre. Son édition originale date de 2025. Il a été réalisé par Pierre Alexandrine pour le scénario, les dessins et les couleurs. Il comprend deux-cent-vingt-huit pages de bande dessinée. Au temps présent, un soir à Paris, dans le vingtième arrondissement, non loin du parc des Buttes-Chaumont, Zayn, un jeune homme, se rend dans un bel appartement spacieux et haut de plafond, habité par Louise. Elle accepte qu’il monte chez elle. Elle l’accueille poliment en lui disant qu’elle était en train de s’endormir devant une série. Il est très impressionné par l’appartement. Il finit par indiquer qu’il est venu parce qu’il n’arrête pas de penser à elle depuis la dernière fois, et il voulait savoir s’il y avait la moindre chance que… Elle répond immédiatement : Non. Elle pensait avoir été claire : c’était bien, tous les deux, mais elle préfère qu’ils en restent là. Il lui dit qu’il ne comprend pas : c’est elle qui l’a abordé dans ce bar, qui l’a séduit, qui l’a embrassé, et cette nuit chez lui, il avait cru… Et ses textos à elle, ses déclarations enflammées. Elle ne s’en souvient pas. Il a juste besoin de comprendre pourquoi. Il la supplie. Elle finit par accepter, tout en le prévenant qu’il risque d’avoir du mal à la croire. Elle lâche le morceau : elle a fait en sorte qu’il tombe amoureux d’elle parce que, faute d’amour, elle se met à vieillir. Mais quand on l’aime elle devient éternelle. C’est la stricte vérité : tant que quelqu’un a des sentiments pour elle, elle ne peut pas vieillir. Elle lui montre un tableau dont elle a été le modèle, datant de 1527. Zayn acceptant de l’écouter, Louise continue. Elle a dans les six ans, elle est née au quinzième siècle. Au risque de le décevoir, elle raconte qu’elle n’a pas rencontré beaucoup de gens célèbres. Jean-Sébastien Bach lui a parlé une fois. Elle a dû croiser Oscar Wilde à deux trois soirées. Elle a bu du porto avec Marlene Dietrich en 1934… C’est tout. Ah, et elle a couché avec Spinoza, excellent amant d’ailleurs. Répondant à une question du jeune homme, elle indique qu’il lui est arrivé quelques bricoles, mais la plupart des trucs qui font mourir les humains sont inefficaces sur elle. Son corps se régénère de façon quasi instantanée. Il n’y a guère que le feu qui puisse la détruire. Elle est née avec ce pouvoir miraculeux, et elle ignore d’où il lui vient. Devant ses yeux, elle se tire une belle dans la poitrine et en ressort indemne. Il comprend qu’elle est une sorte de vampire de l’amour et que la vie a dû être facile pour elle. Cette remarque la fait sortir de ses gonds. IL n’a aucune idée de ce à quoi ressemblait le monde avant son petit vingt-et-unième siècle. A-t-il déjà connu le vrai froid ? Et la faim ? La guerre ? La misère ? La peur ? A-t-il déjà été traqué par un village entier juste parce qu’on le trouvait bizarre ? Est-ce qu’on l’a déjà pendu parce qu’il avait flirté avec la mauvaise personne ? Combien de fois dans sa vie s’est-il fait traiter de succube ? De renarde, de stryge ? De chienne impudique ? De puterelle malfaisante et vérolée ? Un point de départ fantastique très simple : tant que quelqu’un aime Louise, elle ne peut pas vieillir, et elle a maintenant six cents ans. Un jeune homme épris d’elle vient pour obtenir une réponse claire sur les raisons qui ont poussé Louise à le laisser tomber du jour au lendemain : parce qu’il est sympathique elle accepte de lui raconter son histoire. Le lecteur trouve ce qu’il est en droit d’attendre : des moments historiques, ou plutôt des époques identifiées avec parfois une référence historique, des leçons d’amour, ou plutôt de séduction, ou plutôt comment rendre un homme fou de désir, des périodes sans rien de particulier, le temps qui passe, le questionnement sur le pourquoi de cette immortalité, la solitude, la tentation de succomber à l’amour, etc. Il s’agit d’une histoire avec une forte pagination qui se lit très facilement. L’artiste se place dans un registre proche de la Ligne Claire : des traits de contours nets et une légère simplification dans les visages et dans la représentation des objets et des décors, par comparaison avec une approche qui aurait été plus photoréaliste. La mise en couleurs déroge quelque peu aux dogmes de la Ligne Claire : elle intègre des variations de nuances pour une même couleur, de discrets ombrages en fonction des sources de lumière, quelques rares effets discrètement expressionnistes. Le lecteur remarque également quelques personnages en ombre chinoise, se faisant écho entre ces séquences, une demi-douzaine de dessins en pleine page. Le lecteur ressent immédiatement qu’il s’agit de l’œuvre d’un artiste complet : à la fois pour la complémentarité entre les textes et les dessins sans redondances, à la fois pour la personnalité de la narration. En effet l’appartenance à la famille de la Ligne Claire donne une apparence assez jeune aux personnages, de jeunes adultes en tout cas, à l’exception de Martin de la Fôle étant devenu un vieil homme, ou encore d’Eleanore, elle aussi atteinte par l’âge. Dans le même temps, le soin apporté aux tenues vestimentaires et aux décors place la narration visuelle dans un registre adulte, plutôt que tout public, sans voyeurisme graphique pour autant. Au fil des années qui passent, des décennies qui défilent, des siècles qui siècles qui s’accumulent, le personnage principal voit du paysage, à la fois par ses voyages, à la fois par l’évolution de la société aussi bien technologique que sociétale. Une fois bien calé dans son fauteuil dans ce bel appartement parisien aux côtés de Zayn pour écouter Louise, le lecteur voyage lui aussi : au galop dans un champ, dans une maison close parisienne au quinzième siècle y compris lors d’une réception aussi somptueuse que décadente ou dans la plus belle chambre, en Hollande au pied des moulins, dans une cathédrale, dans un grand bal à Venise, sur une scène de théâtre, aux portes de l’université de Samarcande, à la cour de Catherine II. Puis le temps d’une case : à Lhassa, à bord d’un grand voilier militaire, dans la jungle des Indes, au Japon devant le mont Fuji. Etc. L’artiste sait faire voyager le lecteur, sans ostentation, de manière organique et intégrée au récit, servant le déroulement de la vie de l’amourante. Tout au long du récit, le lecteur relève également un usage à bon escient d’éléments visuels variés. Quelques exemples : trente pages muettes dépourvues de tout texte où les dessins portent toute la narration, cinq dessins en pleine page, un dessin en double page, quelques visuels se répondant (par exemple le passage au pied des moulins qui revient plus tard avec le même cadrage, mais à une autre saison, page cinquante rappelé en page cent-trente-trois), des silhouettes en ombre chinoise, le jeu des couleurs, etc. Il remarque que l’artiste utilise des découpages de page à base de cases rectangulaires bien alignées en bande, avec un nombre variable en fonction de la nature de la scène. Il met en œuvre une direction d’acteurs de type naturaliste, sans exagérer les émotions ou les gestes, sauf lorsqu’ils sont en représentation, littéralement sur une scène de théâtre, ou en phase de séduction en appliquant des techniques. Le lecteur se trouve vite séduit par cette narration visuelle facile à lire, agréable à l’œil, riche en informations sans être indigeste. Une narration douce et substantielle donnant à voir cette vie longue de plusieurs siècles, riche de voyages et de découvertes, avec quelques péripéties, sans se transformer en une suite d’aventures échevelées. Louise elle-même dit qu’elle n’a pas rencontré beaucoup de personnes célèbres. L’histoire raconte donc la vie de cette femme qui se découvre un pouvoir extraordinaire : vivre éternellement jeune, sous réserve que quelqu’un soit amoureux d’elle. Elle rencontre Eleanor qui lui explique comment faire pour séduire et éveiller la passion, et les décennies se succèdent les unes aux autres. Le lecteur voit apparaître un thème : l’évolution de la vie amoureuse de Louise. Cela commence par un bon mariage de raison avec un paysan, puis par un veuvage soudain. Dans ce quinzième siècle, elle se retrouve jeune veuve sans le sou et décide de monter à Paris. Dépourvue de ressources, elle se retrouve contrainte à la prostitution dans une maison close, où ses qualités (la maladie n’a pas de prise sur elle, elle ne risque pas de tomber enceinte) en font une professionnelle inégalable. Puis le schéma s’inverse : ayant bénéficié de la tutelle d’une autre amourante, c’est elle qui suscite l’amour chez les hommes, selon sa volonté. Le lecteur assiste alors à une leçon, une technique en cinq étapes : le désir, le mystère, l’obstacle, une pincée d’espoir, la souffrance. L’amour devient ainsi un simple moyen pour parvenir à ses fins. Eleanor le décrit ainsi : Le véritable amour, celui qui fait brûler de désir et mourir de jalousie… L’amour qui brise les amitiés et provoque des guerres, le grand et terrible amour qui se presse dans les cœurs depuis que le monde est monde, ce n’est pas un noble sentiment. Il est chaotique, violent, incontrôlable. C’est une maladie… L’histoire raconte également une forme d’émancipation : cette femme qui maîtrise son corps, qui séduit les hommes pour les utiliser, qui maîtrise parfaitement la psychologie de la séduction. Une chose importante à retenir, c’est qu’à chaque variété d’homme correspond une approche bien précise. Avec les jeunes, il suffit d’être entreprenante. Les types mûrs, il faut les flatter. Les riches, ne pas avoir l’air impressionné par leur argent. Avec les débauchés, il faut surjouer l’innocence. Avec les chastes, la dépravation. Être directe avec les timides et évasive avec les téméraires. Face à un orgueilleux, le coup de froideur indifférente est la meilleure option. Sauf si on a affaire à un demeuré. Auquel cas mieux vaut passer tout de suite à la technique de la demoiselle en détresse. […] Un être humain également détaché des contingences matérielles pouvant satisfaire sa soif de découvertes, de voyages, de savoir grâce à un temps sans limite. Une personne dans un corps jeune, avec une expérience de plusieurs siècles, en pleine possession de ses moyens physiques et intellectuels. Comme tout être humain, Louise est la recherche du sens à donner à sa vie, à cette existence éternelle, cette vie dont elle a la totale jouissance et la totale responsabilité, dont la seule limite est de devoir s’accommoder des évolutions de la société. Une simple histoire d’amour, ou d’amoureuse, avec une touche de fantastique ? Tellement plus que ça : une narration visuelle accessible et impeccable, riche et agréable, sympathique et solide. Un récit s’étalant sur plusieurs siècles, mêlant amour, séduction, quelques aventures, et une touche de perversité dans la manière d’instrumentaliser le désir des hommes. Un exercice de pensée sur ce que l’on peut attendre de l’existence, ou ce que l’on peut rechercher dans la vie de telles conditions de vie. Formidable.