Le début du récit est extrêmement prenant, avec ce flash-forward intrigant. Et si l’on comprend rapidement comment tout cela va se terminer et qu’il sera question de voyage dans le temps et l’espace,… la vérité est qu’on ne sait encore rien.
La découverte du monde clos dans lequel va se dérouler la majeure partie de ce récit nous plonge dans ce que j’appelle de la science-fiction prophétique. Comprenez par là que l’auteur crée un futur et se plait à l’approfondir sur base de notre situation actuelle. L’omniprésence de la publicité, la manipulation des masses, le racisme, le terrorisme, la radicalisation, l’écologie, tous ces sujets sont le terreau même du récit. Cet écho à notre propre quotidien transforme ce récit en parabole, ce qui ne fait que nous le rendre encore plus prenant.
Mais après la découverte de cet univers, je dois bien avouer que je n’ai plus ressenti le même engouement pour la partie plus centrée sur l’action. Non que ce soit mal fait ou inintéressant mais je me sentais moins concerné, plus spectateur du récit. Ceci dit, l’intrigue est prenante et le fait d’avoir placé ce flash-forward en début d’album avait tellement intensément titillé mon cortex qu’il m’aurait été impossible d’abandonner la lecture en cours de route.
En plus il y a le dessin ! Exceptionnel, ce dessin ! Avec des angles de vue qui donnent le tournis, des créations graphiques originales et cohérentes, un trait fin et incisif, de la vivacité et une méticulosité qui frise l’obsession. Vraiment du très grand art qui vient renforcer l’aspect technique et froid du récit.
Le final, enfin, est conforme aux attentes. Et si, au début de ma lecture je me croyais parti pour accorder un 5/5 à l’album, la dernière page tournée, je demeure avec un sentiment plus que positif. Ce récit est vraiment à lire, que vous aimiez ou non la science-fiction.
L’appel constitue mon gros coup de cœur du moment. Cela m’a beaucoup touché car il est vrai que cela reprend un thème d’actualité qui fait froid dans le dos. On sait que nos jeunes veulent combattre les valeurs de notre société contre un tyran sanguinaire en Syrie que nous soutenons indirectement par notre inaction. Cela s’appelle faire le djihad.
Dans la plupart des cas, les parents tombent de haut lorsqu’ils apprennent que leurs chérubins ont rejoint le rang de l’Etat islamique. C’est souvent trop tard pour faire marche arrière. Ils partent en indiquant qu’ils vont faire du tourisme en Turquie et puis ils sont sur le théâtre des opérations avec une kalachnikov à la main si ce n’est pas un sabre pour couper les têtes des pauvres otages.
Cela fait peur car les parents ne voient rien venir. L’appel est tout l’histoire d’une mère célibataire qui essaie de comprendre le parcours de son fils et de le faire renoncer à distance. Il y a tout d’abord les fréquentations mais également les accidents de vie comme l’absence d’un père ou les bavures policières liées à la brutalité de ce corps plutôt raciste. J’apprécie tout particulièrement cette exploration pour aller au fond des choses et comprendre pourquoi on se détourne de la société actuelle et de ses valeurs. Il y a bien des exploiteurs de faille qui arrivent à laver le cerveau à des êtres fragiles en devenir. Cette maman qui va perdre son fils est totalement impuissante et anéantie. C’est une immersion assez terrible.
Le ras-le-bol sociétal ne doit jamais conduire à soutenir des gens qui nous détestent et qui détestent ce qu’on possède à savoir notre société de consommation ainsi que la démocratie. Au fond, ils envient nos libertés. Cette lecture peut permettre une déracalisation assez louable dans son principe afin de trouver une autre solution à la violence. Nul ne devrait donner sa vie pour une religion quel qu’elle soit.
Probablement le meilleur scénario de Vehlmann que j'ai lu jusqu'à présent. C'est un conte où on parle de... contes.
J'ai trouvé que l'histoire était originale et passionnante à lire même si on sait d'avance le dénouement final. Il y a tout de même des surprises à la fin. Les auteurs parlent de l'art de conter de manière intelligente et avec de l'humour, ce qui fait en sorte que le one-shot ne parait pas comme trop intello. Il y a des réflexions intéressantes et des passages totalement savoureux. J'aime particulièrement la façon dont est racontée l'histoire de Jésus.
Le dessin est bon. J'aime bien l'atmosphère qui s'en dégage.
Album « L’art invisible »
Certes, cette étude sur le médium bande dessinée n’est pas forcément faite pour une lecture détente, et ne s’adresse pas forcément au lecteur lambda. Il n’empêche, c’est quand même une lecture que je recommande à tous.
En effet, McCloud a su éviter le pensum aride, et son entreprise pédagogique est plutôt bien menée, que ce soit sur le fond (il emploie un ton volontiers primesautier, des termes et des exemples simples) ou sur la forme (c’est aéré, le dessin est lui aussi simple) : de la simplicité donc, mais qui n’est jamais simpliste.
C’est donc un minimum exigeant, mais la démonstration est réussie. Et globalement complète, puisqu’il puise assez loin dans l’histoire du médium (les écritures cunéiformes mésopotamiennes ; les écritures mésoaméricaines ; les hiéroglyphes, etc sont appelées à la barre des témoins).
Alors certes, en y songeant, rien de révolutionnaire dans ce premier tome, pour qui s’intéresse à la BD avec un éventail assez large, mais cette somme est vraiment bien fichue, et mérite vraiment le détour.
Même si Mc Cloud s’appuie surtout sur la BD américaine – qu’il côtoie davantage, il utilise aussi certains exemples européens (Hergé surtout) et japonais (ses remarques sur la spécificité japonaise sont intéressantes). Les parallèles faits avec les arts proches (peintures essentiellement, ou collages, comme ceux du génial Max Ernst) sont aussi bien vus : et encore, il aurait pu davantage s’appuyer sur les innovations typographiques, graphiques et éditoriales de Dada !
Quelques légers bémols toutefois. Outre que la BD européenne est ici minorée, un pan de la recherche et de la pratique de certains auteurs mériterait de compléter l’étude de Mc Cloud (mais c’est que ça s’est aussi développé après la publication de son opus). C’est pourquoi je recommande fortement à ceux qui ont été très intéressés par cette étude, de se plonger dans les travaux de l’Oubapo (voir mon long avis sur cette « série » [qui n’en est pas une mais bon] sur ce même site), en particulier le dernier tome en date, véritable mine pour ceux qui chercheraient des publications ayant joué sur les possibilités offertes par ce médium.
*******************************
Album « Réinventer la bande dessinée »
L’album « réinventer la bande dessinée », s’il est intéressant, traite le sujet par un autre biais. Alors que « L’art invisible » cherchait à définir le médium, ses racines, ses possibilités, « réinventer… » est lui plus ancré dans la réalité de la BD américaine du XXe siècle, en analysant ses capacités, les obstacles à franchir, sur le plan de la diffusion : les aspects économiques sont alors essentiels, comme le sont les moyens de diffusion.
Mac Cloud détaille aussi longuement les évolutions consécutives au développement de l’informatique, puis d’internet (pour la fabrication et la diffusion de la bande dessinée).
La démonstration est tout aussi limpide, bien fichue que dans le tome précédent, mais, si c’est globalement intéressant, cela m’a un chouia moins captivé (affaire de goût, d’attente certainement, plus que défauts de l’album).
Je regrette aussi le centrage assez hermétique sur le cas des Etats-Unis (celui que l’auteur connaît le mieux certes), un éclairage plus important sur la situation européenne ou japonaise (ce dernier cas est parfois évoqué) aurait été intéressant, pour pointer les différences – même si quelques paradigmes sont communs.
Enfin, si les réflexions sur le développement de la BD numérique sont intéressantes et pertinentes, l’album ayant été réalisé à l’extrême fin du XXe siècle, il est un peu dépassé et mériterait une « mise à jour » sur certains points. Par ailleurs, je ne suis pas si optimiste que Mac Cloud concernant la démocratisation de l’accès à la BD pour les lecteurs et/ou aux lecteurs par les auteurs : les géants, type Amazon se sont déjà chargé de phagocyter ce « commerce » - même si internet permet des espaces de liberté, il n’est pas aussi « libre » que rêvé à ses débuts.
Le travail de Mac Cloud est néanmoins de haute qualité, et devrait intéresser tous ceux que le medium BD captive (mais j’insiste, allez voir les travaux de l’oubapo !).
C'est un titre qui ne paie pas de mine mais je suis ressortie plutôt conquis par cette lecture. Il est vrai que j'ai découvert assez récemment cet auteur Max de Radiguès par des oeuvres comme Hobo Mom ou encore Weegee, deux séries que j'ai posté sur le présent site.
Le thème est celui des brimades et autres harcèlements que peuvent subir des élèves plus faibles en apparence. Certains peuvent utiliser des armes dans des lycées par vengeance, d'autres peuvent laisser crever leur camarade dans un trou au milieu de la neige. Il faut dire que l'orignal a bien aidé dans le présent cas.
J'avoue que la moralité de ce récit m'a un peu rebuté sur la fin. Certes, on peut se dire que le méchant gamin harceleur n'a que ce qu'il mérite. Cependant, à mon humble avis, il ne faut pas basculer dans la haine et une espèce d'inhumanité. En même temps, il y a matière à réflexion entre des élèves et des professeurs qui laissent faire cette situation et des parents qui ne devinent rien à ce calvaire.
Une oeuvre qui mine de rien est très forte et qui pose de véritables questions dont on peut avoir peur des réponses.
Waouh ! Je suis assez scotché par cette lecture. Voilà ce que je recherche désespérément. Il y a tout dans Chronosquad: de l'inventivité, de l'humour, de l'action, du mystère.
Plus encore, c'est surtout l'auteur Gregory Panaccione qui me surprend. Je l'avais découvert il y a à peine deux ans dans Match. Puis avait suivi Un océan d'amour avec Wilfrid Lupano. Je constate qu'il reprend son drôle de personnage à la tête d'un Gérard Depardieu que nous avions déjà vu dans Âme perdue et puis dans Toby mon Ami et surtout dans le fameux Match. Or, le mystère réside dans le fait que ce personnage prend un chaque fois un nom différent (Marcel Coste,Toby, Blotch). Il faut dire également que ces oeuvres sont totalement différentes.
En effet, ici, on passe véritablement à la vitesse supérieure. On change de registre de l'humour à la science-fiction même si cela demeure drôle par moment en raison de ce personnage si caractéristique. En même temps, j'ai apprécié qu'il ne faisait pas dans le délire ou le n'importe quoi car cet album gagne en profondeur avec l'avancée de l'histoire. C'est totalement maîtrisé. Je suis fan, c'est clair.
Ame perdue fut l'une des premières oeuvres de Gregory Panaccione. On suit les aventures d'un petit être dans un monde où la nature est très hostile. On a froid et on a peur pour ce petit personnage mignon tout plein. On ne sait pas à quelle époque on peut situer ce récit. J'avais opté par le Paléolithique supérieur mais je me suis visiblement lourdement trompé.
Là encore, on croit qu'il s'agit d'une bd totalement muette mais cela ne sera pas le cas. Il est vrai qu'il y a une bonne centaine de pages qui défilent sans le moindre dialogue dans ce monde froid et terrifiant. J'ai bien aimé la mise en image, le graphisme, les couleurs ainsi que la tournure que prend les événements.
Là encore, on sentait que l'auteur a un formidable potentiel et qu'il n'a pas déçu dans ses oeuvres postérieures. C'est plus qu'un brillant exercice de style. C'est une découverte et presque une consécration.
C'est typiquement le genre d'aventure fantastique que j'aime bien lire. Le cadre est celui d'une uchronie située au coeur de la Seconde Guerre Mondiale entre un complot autour d'armes secrètes pouvant faire basculer le conflit.
On connait le combat acharné que mena Tesla contre Edison. Dans l'histoire, c'est le second qui est ressortit vainqueur. Et pourtant, Nikola Tesla a été un des plus grands inventeurs dans le domaine de l'électricité et de l'électro-magnétisme (dépôt de 300 brevets dont 125 inventions). Beaucoup de ses inventions seront attribués à tort à Thomas Edison. Il est bon de voir qu'il y a une forme de réhabilitation à travers une bd qui lui rend hommage. le méchant dans ce récit, c'est bien Edison. En effet, la bd en avait fait jusqu'à présent une sorte de savant fou.
J'ai bien aimé également le graphisme réaliste qui restitue à merveille le New-York des années 40 avec une touche assez rétro. Le cadrage ainsi que la mise en case sont bien réalisés. Il y a également une bonne gestion de la couleur. Que dire également de cette couverture très intrigante ? Techniquement, c'est plutôt maîtrisé.
Bref, une histoire prenante avec un dessin magnifique, que demander de plus ? On attend tout simplement la suite avec impatience.
Cela faisait longtemps que je voulais lire cet album et je ne suis pas déçu ! C'est un des meilleurs scénarios de Desberg.
J'adore le ton de l'album. C'est raconté comme un conte où tout semble bien se passer avec cet orphelin qui a enfin une famille... un peu spéciale. Et puis soudainement tout devient sombre et pessimiste lorsque les nazis prennent le pouvoir. Ce mélange conte-réalité historique est très dosé et en plus les personnages principaux sont attachants. L'histoire d'amour entre l'orphelin et la petite bohémienne m'a beaucoup touché et la fin est vraiment triste.
Une histoire assez originale bien servie par le trait de Will. De tous les dessinateurs classiques du vieux Journal de Spirou, c'est lui qui savait le mieux dessiner les femmes de manière sensuelle.
Il a fallu 4 ans à Grégory Panaccione pour s'imposer magistralement dans le monde de la bd. Un océan d'amour réalisé avec Wilfrid Lupano a rencontré un énorme succès public et critique. Le créneau est toujours celui d'une forme de bd humoristique mais qui cache toujours une belle histoire sentimentale. A noter également un clin d'oeil à on personnage fétiche en fin de volume.
Pour cet album, il est accompagné au scénario de Stéphane de Groodt dont c'est la première incursion dans la bd. C'est plutôt un acteur belge qui fait du cinéma et du théâtre. A ses heures perdues, il fut aussi un célèbre chroniqueur dans le grand journal de Canal +. Il faut dire que cette bd est une ballade au pays des mots comme une espèce de jeux télévisés digne de la téléréalité.
On éprouve un certain malaise pendant la durée de cette bd car on ne sait pas où les auteurs veulent véritablement en venir. cela semble partir dans tous les sens. On perd presque les pédales avec notre héros tant les repères se désagrègent. Pour autant, le final nous montre qu'il y a une parfaite maîtrise de cette oeuvre. Le ressort final est en effet à entrer dans les annales du genre. Je ne révélerais rien pour en laisser la totale surprise. Et cela veut le coup. Je n'entends rien ? Qui ne dit mot...
En France, les livres sont au même prix partout. C'est la loi !
Avec BDfugue, vous payez donc le même prix qu'avec les géants de la vente en ligne mais pour un meilleur service :
des promotions et des goodies en permanence
des réceptions en super état grâce à des cartons super robustes
une équipe joignable en cas de besoin
2. C'est plus avantageux pour nous
Si BDthèque est gratuit, il a un coût.
Pour financer le service et le faire évoluer, nous dépendons notamment des achats que vous effectuez depuis le site. En effet, à chaque fois que vous commencez vos achats depuis BDthèque, nous touchons une commission. Or, BDfugue est plus généreux que les géants de la vente en ligne !
3. C'est plus avantageux pour votre communauté
En choisissant BDfugue plutôt que de grandes plateformes de vente en ligne, vous faites la promotion du commerce local, spécialisé, éthique et indépendant.
Meilleur pour les emplois, meilleur pour les impôts, la librairie indépendante promeut l'émergence des nouvelles séries et donc nos futurs coups de cœur.
Chaque commande effectuée génère aussi un don à l'association Enfance & Partage qui défend et protège les enfants maltraités. Plus d'informations sur bdfugue.com
Pourquoi Cultura ?
Indépendante depuis sa création en 1998, Cultura se donne pour mission de faire vivre et aimer la culture.
La création de Cultura repose sur une vision de la culture, accessible et contributive. Nous avons ainsi considéré depuis toujours notre responsabilité sociétale, et par conviction, développé les pratiques durables et sociales. C’est maintenant au sein de notre stratégie de création de valeur et en accord avec les Objectifs de Développement Durable que nous déployons nos actions. Nous traitons avec lucidité l’impact de nos activités, avec une vision de long terme. Mais agir en responsabilité implique d’aller bien plus loin, en contribuant positivement à trois grands enjeux de développement durable.
Nos enjeux environnementaux
Nous sommes résolument engagés dans la réduction de notre empreinte carbone, pour prendre notre part dans la lutte contre le réchauffement climatique et la préservation de la planète.
Nos enjeux culturels et sociétaux
La mission de Cultura est de faire vivre et aimer la culture. Pour cela, nous souhaitons stimuler la diversité des pratiques culturelles, sources d’éveil et d’émancipation.
Nos enjeux sociaux
Nous accordons une attention particulière au bien-être de nos collaborateurs à la diversité, l’inclusion et l’égalité des chances, mais aussi à leur épanouissement, en encourageant l’expression des talents artistiques.
Votre vote
Shangri-La
Le début du récit est extrêmement prenant, avec ce flash-forward intrigant. Et si l’on comprend rapidement comment tout cela va se terminer et qu’il sera question de voyage dans le temps et l’espace,… la vérité est qu’on ne sait encore rien. La découverte du monde clos dans lequel va se dérouler la majeure partie de ce récit nous plonge dans ce que j’appelle de la science-fiction prophétique. Comprenez par là que l’auteur crée un futur et se plait à l’approfondir sur base de notre situation actuelle. L’omniprésence de la publicité, la manipulation des masses, le racisme, le terrorisme, la radicalisation, l’écologie, tous ces sujets sont le terreau même du récit. Cet écho à notre propre quotidien transforme ce récit en parabole, ce qui ne fait que nous le rendre encore plus prenant. Mais après la découverte de cet univers, je dois bien avouer que je n’ai plus ressenti le même engouement pour la partie plus centrée sur l’action. Non que ce soit mal fait ou inintéressant mais je me sentais moins concerné, plus spectateur du récit. Ceci dit, l’intrigue est prenante et le fait d’avoir placé ce flash-forward en début d’album avait tellement intensément titillé mon cortex qu’il m’aurait été impossible d’abandonner la lecture en cours de route. En plus il y a le dessin ! Exceptionnel, ce dessin ! Avec des angles de vue qui donnent le tournis, des créations graphiques originales et cohérentes, un trait fin et incisif, de la vivacité et une méticulosité qui frise l’obsession. Vraiment du très grand art qui vient renforcer l’aspect technique et froid du récit. Le final, enfin, est conforme aux attentes. Et si, au début de ma lecture je me croyais parti pour accorder un 5/5 à l’album, la dernière page tournée, je demeure avec un sentiment plus que positif. Ce récit est vraiment à lire, que vous aimiez ou non la science-fiction.
L'Appel
L’appel constitue mon gros coup de cœur du moment. Cela m’a beaucoup touché car il est vrai que cela reprend un thème d’actualité qui fait froid dans le dos. On sait que nos jeunes veulent combattre les valeurs de notre société contre un tyran sanguinaire en Syrie que nous soutenons indirectement par notre inaction. Cela s’appelle faire le djihad. Dans la plupart des cas, les parents tombent de haut lorsqu’ils apprennent que leurs chérubins ont rejoint le rang de l’Etat islamique. C’est souvent trop tard pour faire marche arrière. Ils partent en indiquant qu’ils vont faire du tourisme en Turquie et puis ils sont sur le théâtre des opérations avec une kalachnikov à la main si ce n’est pas un sabre pour couper les têtes des pauvres otages. Cela fait peur car les parents ne voient rien venir. L’appel est tout l’histoire d’une mère célibataire qui essaie de comprendre le parcours de son fils et de le faire renoncer à distance. Il y a tout d’abord les fréquentations mais également les accidents de vie comme l’absence d’un père ou les bavures policières liées à la brutalité de ce corps plutôt raciste. J’apprécie tout particulièrement cette exploration pour aller au fond des choses et comprendre pourquoi on se détourne de la société actuelle et de ses valeurs. Il y a bien des exploiteurs de faille qui arrivent à laver le cerveau à des êtres fragiles en devenir. Cette maman qui va perdre son fils est totalement impuissante et anéantie. C’est une immersion assez terrible. Le ras-le-bol sociétal ne doit jamais conduire à soutenir des gens qui nous détestent et qui détestent ce qu’on possède à savoir notre société de consommation ainsi que la démocratie. Au fond, ils envient nos libertés. Cette lecture peut permettre une déracalisation assez louable dans son principe afin de trouver une autre solution à la violence. Nul ne devrait donner sa vie pour une religion quel qu’elle soit.
Les Cinq Conteurs de Bagdad
Probablement le meilleur scénario de Vehlmann que j'ai lu jusqu'à présent. C'est un conte où on parle de... contes. J'ai trouvé que l'histoire était originale et passionnante à lire même si on sait d'avance le dénouement final. Il y a tout de même des surprises à la fin. Les auteurs parlent de l'art de conter de manière intelligente et avec de l'humour, ce qui fait en sorte que le one-shot ne parait pas comme trop intello. Il y a des réflexions intéressantes et des passages totalement savoureux. J'aime particulièrement la façon dont est racontée l'histoire de Jésus. Le dessin est bon. J'aime bien l'atmosphère qui s'en dégage.
L'Art Invisible
Album « L’art invisible » Certes, cette étude sur le médium bande dessinée n’est pas forcément faite pour une lecture détente, et ne s’adresse pas forcément au lecteur lambda. Il n’empêche, c’est quand même une lecture que je recommande à tous. En effet, McCloud a su éviter le pensum aride, et son entreprise pédagogique est plutôt bien menée, que ce soit sur le fond (il emploie un ton volontiers primesautier, des termes et des exemples simples) ou sur la forme (c’est aéré, le dessin est lui aussi simple) : de la simplicité donc, mais qui n’est jamais simpliste. C’est donc un minimum exigeant, mais la démonstration est réussie. Et globalement complète, puisqu’il puise assez loin dans l’histoire du médium (les écritures cunéiformes mésopotamiennes ; les écritures mésoaméricaines ; les hiéroglyphes, etc sont appelées à la barre des témoins). Alors certes, en y songeant, rien de révolutionnaire dans ce premier tome, pour qui s’intéresse à la BD avec un éventail assez large, mais cette somme est vraiment bien fichue, et mérite vraiment le détour. Même si Mc Cloud s’appuie surtout sur la BD américaine – qu’il côtoie davantage, il utilise aussi certains exemples européens (Hergé surtout) et japonais (ses remarques sur la spécificité japonaise sont intéressantes). Les parallèles faits avec les arts proches (peintures essentiellement, ou collages, comme ceux du génial Max Ernst) sont aussi bien vus : et encore, il aurait pu davantage s’appuyer sur les innovations typographiques, graphiques et éditoriales de Dada ! Quelques légers bémols toutefois. Outre que la BD européenne est ici minorée, un pan de la recherche et de la pratique de certains auteurs mériterait de compléter l’étude de Mc Cloud (mais c’est que ça s’est aussi développé après la publication de son opus). C’est pourquoi je recommande fortement à ceux qui ont été très intéressés par cette étude, de se plonger dans les travaux de l’Oubapo (voir mon long avis sur cette « série » [qui n’en est pas une mais bon] sur ce même site), en particulier le dernier tome en date, véritable mine pour ceux qui chercheraient des publications ayant joué sur les possibilités offertes par ce médium. ******************************* Album « Réinventer la bande dessinée » L’album « réinventer la bande dessinée », s’il est intéressant, traite le sujet par un autre biais. Alors que « L’art invisible » cherchait à définir le médium, ses racines, ses possibilités, « réinventer… » est lui plus ancré dans la réalité de la BD américaine du XXe siècle, en analysant ses capacités, les obstacles à franchir, sur le plan de la diffusion : les aspects économiques sont alors essentiels, comme le sont les moyens de diffusion. Mac Cloud détaille aussi longuement les évolutions consécutives au développement de l’informatique, puis d’internet (pour la fabrication et la diffusion de la bande dessinée). La démonstration est tout aussi limpide, bien fichue que dans le tome précédent, mais, si c’est globalement intéressant, cela m’a un chouia moins captivé (affaire de goût, d’attente certainement, plus que défauts de l’album). Je regrette aussi le centrage assez hermétique sur le cas des Etats-Unis (celui que l’auteur connaît le mieux certes), un éclairage plus important sur la situation européenne ou japonaise (ce dernier cas est parfois évoqué) aurait été intéressant, pour pointer les différences – même si quelques paradigmes sont communs. Enfin, si les réflexions sur le développement de la BD numérique sont intéressantes et pertinentes, l’album ayant été réalisé à l’extrême fin du XXe siècle, il est un peu dépassé et mériterait une « mise à jour » sur certains points. Par ailleurs, je ne suis pas si optimiste que Mac Cloud concernant la démocratisation de l’accès à la BD pour les lecteurs et/ou aux lecteurs par les auteurs : les géants, type Amazon se sont déjà chargé de phagocyter ce « commerce » - même si internet permet des espaces de liberté, il n’est pas aussi « libre » que rêvé à ses débuts. Le travail de Mac Cloud est néanmoins de haute qualité, et devrait intéresser tous ceux que le medium BD captive (mais j’insiste, allez voir les travaux de l’oubapo !).
Orignal
C'est un titre qui ne paie pas de mine mais je suis ressortie plutôt conquis par cette lecture. Il est vrai que j'ai découvert assez récemment cet auteur Max de Radiguès par des oeuvres comme Hobo Mom ou encore Weegee, deux séries que j'ai posté sur le présent site. Le thème est celui des brimades et autres harcèlements que peuvent subir des élèves plus faibles en apparence. Certains peuvent utiliser des armes dans des lycées par vengeance, d'autres peuvent laisser crever leur camarade dans un trou au milieu de la neige. Il faut dire que l'orignal a bien aidé dans le présent cas. J'avoue que la moralité de ce récit m'a un peu rebuté sur la fin. Certes, on peut se dire que le méchant gamin harceleur n'a que ce qu'il mérite. Cependant, à mon humble avis, il ne faut pas basculer dans la haine et une espèce d'inhumanité. En même temps, il y a matière à réflexion entre des élèves et des professeurs qui laissent faire cette situation et des parents qui ne devinent rien à ce calvaire. Une oeuvre qui mine de rien est très forte et qui pose de véritables questions dont on peut avoir peur des réponses.
Chronosquad
Waouh ! Je suis assez scotché par cette lecture. Voilà ce que je recherche désespérément. Il y a tout dans Chronosquad: de l'inventivité, de l'humour, de l'action, du mystère. Plus encore, c'est surtout l'auteur Gregory Panaccione qui me surprend. Je l'avais découvert il y a à peine deux ans dans Match. Puis avait suivi Un océan d'amour avec Wilfrid Lupano. Je constate qu'il reprend son drôle de personnage à la tête d'un Gérard Depardieu que nous avions déjà vu dans Âme perdue et puis dans Toby mon Ami et surtout dans le fameux Match. Or, le mystère réside dans le fait que ce personnage prend un chaque fois un nom différent (Marcel Coste,Toby, Blotch). Il faut dire également que ces oeuvres sont totalement différentes. En effet, ici, on passe véritablement à la vitesse supérieure. On change de registre de l'humour à la science-fiction même si cela demeure drôle par moment en raison de ce personnage si caractéristique. En même temps, j'ai apprécié qu'il ne faisait pas dans le délire ou le n'importe quoi car cet album gagne en profondeur avec l'avancée de l'histoire. C'est totalement maîtrisé. Je suis fan, c'est clair.
Âme perdue
Ame perdue fut l'une des premières oeuvres de Gregory Panaccione. On suit les aventures d'un petit être dans un monde où la nature est très hostile. On a froid et on a peur pour ce petit personnage mignon tout plein. On ne sait pas à quelle époque on peut situer ce récit. J'avais opté par le Paléolithique supérieur mais je me suis visiblement lourdement trompé. Là encore, on croit qu'il s'agit d'une bd totalement muette mais cela ne sera pas le cas. Il est vrai qu'il y a une bonne centaine de pages qui défilent sans le moindre dialogue dans ce monde froid et terrifiant. J'ai bien aimé la mise en image, le graphisme, les couleurs ainsi que la tournure que prend les événements. Là encore, on sentait que l'auteur a un formidable potentiel et qu'il n'a pas déçu dans ses oeuvres postérieures. C'est plus qu'un brillant exercice de style. C'est une découverte et presque une consécration.
Les Trois Fantômes de Tesla
C'est typiquement le genre d'aventure fantastique que j'aime bien lire. Le cadre est celui d'une uchronie située au coeur de la Seconde Guerre Mondiale entre un complot autour d'armes secrètes pouvant faire basculer le conflit. On connait le combat acharné que mena Tesla contre Edison. Dans l'histoire, c'est le second qui est ressortit vainqueur. Et pourtant, Nikola Tesla a été un des plus grands inventeurs dans le domaine de l'électricité et de l'électro-magnétisme (dépôt de 300 brevets dont 125 inventions). Beaucoup de ses inventions seront attribués à tort à Thomas Edison. Il est bon de voir qu'il y a une forme de réhabilitation à travers une bd qui lui rend hommage. le méchant dans ce récit, c'est bien Edison. En effet, la bd en avait fait jusqu'à présent une sorte de savant fou. J'ai bien aimé également le graphisme réaliste qui restitue à merveille le New-York des années 40 avec une touche assez rétro. Le cadrage ainsi que la mise en case sont bien réalisés. Il y a également une bonne gestion de la couleur. Que dire également de cette couverture très intrigante ? Techniquement, c'est plutôt maîtrisé. Bref, une histoire prenante avec un dessin magnifique, que demander de plus ? On attend tout simplement la suite avec impatience.
La 27e lettre
Cela faisait longtemps que je voulais lire cet album et je ne suis pas déçu ! C'est un des meilleurs scénarios de Desberg. J'adore le ton de l'album. C'est raconté comme un conte où tout semble bien se passer avec cet orphelin qui a enfin une famille... un peu spéciale. Et puis soudainement tout devient sombre et pessimiste lorsque les nazis prennent le pouvoir. Ce mélange conte-réalité historique est très dosé et en plus les personnages principaux sont attachants. L'histoire d'amour entre l'orphelin et la petite bohémienne m'a beaucoup touché et la fin est vraiment triste. Une histoire assez originale bien servie par le trait de Will. De tous les dessinateurs classiques du vieux Journal de Spirou, c'est lui qui savait le mieux dessiner les femmes de manière sensuelle.
Qui ne dit mot
Il a fallu 4 ans à Grégory Panaccione pour s'imposer magistralement dans le monde de la bd. Un océan d'amour réalisé avec Wilfrid Lupano a rencontré un énorme succès public et critique. Le créneau est toujours celui d'une forme de bd humoristique mais qui cache toujours une belle histoire sentimentale. A noter également un clin d'oeil à on personnage fétiche en fin de volume. Pour cet album, il est accompagné au scénario de Stéphane de Groodt dont c'est la première incursion dans la bd. C'est plutôt un acteur belge qui fait du cinéma et du théâtre. A ses heures perdues, il fut aussi un célèbre chroniqueur dans le grand journal de Canal +. Il faut dire que cette bd est une ballade au pays des mots comme une espèce de jeux télévisés digne de la téléréalité. On éprouve un certain malaise pendant la durée de cette bd car on ne sait pas où les auteurs veulent véritablement en venir. cela semble partir dans tous les sens. On perd presque les pédales avec notre héros tant les repères se désagrègent. Pour autant, le final nous montre qu'il y a une parfaite maîtrise de cette oeuvre. Le ressort final est en effet à entrer dans les annales du genre. Je ne révélerais rien pour en laisser la totale surprise. Et cela veut le coup. Je n'entends rien ? Qui ne dit mot...