Un peu trop court mais très précis et juste et beau...
Le dessin noir et blanc un peu trash, sans demi-mesure de gris, ni traits fins, se confronte à un scénario très nuancé : par moment quotidien, par moment symbolique. La mort, la vieillesse, l'enfance y sont convoquées dans un univers villageois un peu suranné.
Comme dit Hervé c'est un album qui laisse des traces profondes, comme une sorte de non-dit qui restera à l'intérieur de nous quelles que soient les couches de vie qui recouvreront le moment de notre lecture...
Le titre n'est peut-être pas le bon, ce ne sont pas les funérailles DE Luce, mais celles qu'elle a vu. Et que les autres ne voient pas. Le grand-père, son voisin, le fils du voisin, et la voisine (personne n'a parlé de cette voisine, je pense que c'est une des choses qui est aussi marquante dans cet album : des vieux qui font l'amour, et la mort qui vient, juste après). Et puis le couple improbable qui représente la mort : étrange, mais pas malveillant, simplement muet.
Bonne lecture, ça vaut le coup !
J’avais déjà vu cette série dans les bacs il y a quelque temps, et ne m’y étais pas attardé – je ne l’avais d’ailleurs même pas feuilletée – croyant n’y trouver qu’une énième version franchisée de Walt Disney. En effet, cette couverture du premier tome – et l’intérieur le confirme, fait rudement penser à la version Disney de « Robin des Bois ».
Et puis j’ai eu l’occasion de lire ces albums, mes préventions ayant été du coup chassées très loin.
Car en effet, les personnages animaliers, dans un univers moyenâgeux, font furieusement penser au film précité – même si le dessin et la colorisation s’en écarte un peu à partir du deuxième tome.
Mais le parallèle s’arrête là. D’abord parce que ce n’est pas la même histoire. Ensuite parce que le traitement est très éloigné de la gentillesse manichéenne de Disney.
Ici le sang coule, on meurt. Un certain érotisme (certes très soft) affleure avec le personnage de La Fouine. Et les « gentils » et les « méchants » ne ont ni monolithiques ni forcément clairement identifiés. Il faut dire que l’intrigue est assez élaborée, pimentant d’un peu de fantastique l’univers médiéval, s’inspirant pas mal du « Seigneur des anneaux » de Tolkien (les cartes en intérieur de couvertures, certains noms de personnages ou de lieu, une partie de l’intrigue).
C’est une chouette réussite que je vous encourage à découvrir !
La lecture de ce triptyque est relativement exigeante, et il faut savoir passer outre les circonvolutions du scénario. Mais au final cela en vaut la peine.
En effet, j’ai mis du temps à m’y retrouver avec cette construction ante et post point de départ : le jour zéro, durant lequel, suite à un accident, deux hommes ont échangé une partie de leur corps. Nous suivons donc, de manière totalement « déconstruite » les mouvements de balancier du scénario, sur les quelques semaines qui suivent ce point zéro, et les jours, parfois les mois et même les siècles qui l’ont précédé, dans une intrigue qui n’a commencé à faire sens pour moi qu’au dernier tiers du premier tome.
Mais quand tous les éléments du puzzle sont mis en place, que l’on s’est fait à cette construction spéciale, c’est une histoire que l’on savoure, et qui mérite un petit détour, pour les amoureux de thriller bien fichus.
Ma seule petite déception vient du dessin, qui ne me convient pas vraiment. Trop souvent, l’impression d’inachevé, de flou – principalement les personnages, visages et corps, comme « fondus », des variations sur les traits de ces mêmes personnages m’ont quelque peu gêné. Mais pas au point de gâcher ma lecture d’une aventure assez prenante.
Note réelle 3,5/5.
Tout simplement drôle !
Le scénario est bien goupillé, l'époque du roi soleil bien traduite, dans sa démesure, son ridicule, son obséquiosité. Mais les deux principales qualités résident dans la langue utilisée et l'habileté du dessin.
Truculence des dialogues épicée par une langue du XVIIème siècle quelque peu imaginaire (comme la langue d'Agrippine imaginée par Claire Brétecher aujourd'hui, ou plus proche (aussi par le trait): celle du landais volant de Dumontheuil). Les noms des personnages rappellent l'humour d'Arleston dans ses trolls, c'est-à-dire pas bégueule, un peu gras mais ça glisse d'autant mieux !
Le contraste ménagé par le dessin entre les deux jeunes premiers (la belle et le grand costaud, pas très volubile) d'un coté et le reste de la cour de l'autre : ramassis de rondouillards emperruqués, et de damoiselles poudrées aux visages cadavériques, rappelle la caricature à la Uderzo, (dans le grand fossé par exemple) mais avec un souci plus juste des couleurs, et même des valeurs (ombres et lumières). Les excentricités de la cour sont mises en valeur dans un décors, certes simplifié, mais dans lequel on ressent très bien la richesse forcenée (cf les carrosses)
L'humour, la caricature mais aussi une certaine fidélité historique donnent à cet album un caractère franchement sympathique ; j'en conseille chaleureusement la lecture.
Un petit exemple de la langue du roi expliquant son souhait qu'on lui invente une chaise à porteur percée : "En cas de forte intempérie des entrailles, il doit être grisant de les soulager en pleine locomotion !"
L’histoire se situe en 2050 à un moment où l’homme va commencer sa colonisation vers d’autres planètes. Ce futur n’est pas si éloigné du nôtre ce qui le rend intéressant car possible. Le héros « un peu trop sans peur ni reproche » Travis, pilote de navette, va combattre des grandes multinationales qui veulent conquérir l’espace.
Le scénario est passionnant laissant une très grande place à l’action. Certaines planches sont excellentes. Les « méchants » de l’histoire sont bien exploités car on comprend ce qui les amène à commettre leurs actes répréhensibles. Cela les rend presque sympathiques. Des personnages secondaires très intéressants notamment Pacman et Vlad Nyrki…
Une série qui se lit très bien avec beaucoup de rythme. Du pur divertissement digne des grosses productions hollywoodiennes avec son lot de révélations. J’ai presque honte d’avouer que j’aime bien cela, que je suis presque le lecteur tout désigné pour lire ce genre de série. Cependant, force est de constater que sur la longueur, cette série parvient toujours à conserver sa qualité graphique et narrative.
Il y a 3 cycles assez distincts :
- 1er cycle (du tome 1 au 5) : Les Cyberneurs
- 2ème cycle (du tome 6.1 à 7) : Vitruvia
- 3ème cycle (du tome 8 à 10) : H2O
- 4ème cycle (du tome 11 à 12) : Les enfants de Marcos
- 5ème cycle (du tome 13 à 16) : La révolte des EGM
Il est vrai qu'avec les tomes 6.1 et 6.2, le 7ème tome est en réalité le 8ème et ainsi de suite ce qui pourra un peu troubler le lecteur cartésien.
En conclusion, le scénario est véritablement haletant et les scènes d’action sont diablement efficaces. Une vraie bd d’anticipation de très bonne facture !
Note Dessin : 4/5 – Note Scénario : 4/5 – Note Globale : 4/5
Voilà un album relativement original quant à son sujet, que l’on devine avec cette couverture, réunissant un mineur et un Indien.
L’histoire se déroule essentiellement en 1905, dans le Nord de la France, près de la tranchée d’Arenberg (que personnellement je connais surtout à travers Paris-Roubaix…), autour de mineurs, et en particulier d’un gamin, Gervais, qui réussit bien à l’école, qui pourrait faire des études et devenir ingénieur, mais qui doit obéir à son père et descendre comme lui dans les boyaux de la mine.
L’univers de ces mineurs, la vie des corons, tout est bien rendu, on est proche de Les Mangeurs de Cailloux ou de Sang noir - La catastrophe de Courrières, deux belles séries de Loyer se déroulant dans le même cadre à la même époque.
Mais voilà, la richesse de cet album, c’est que Jean-Michel Dupont introduit dans ce cadre très noir, très « Germinal », et quelque peu rigide depuis un siècle, de multiples agents perturbateurs, qui propagent leurs secousses plus ou moins profondément dans l’intrigue et les personnages.
L’arrivée du cirque de Buffalo Bill à Valenciennes va bouleverser Gervais, qui va se lier d’amitié avec deux Indiens, et les aider à se disculper d’une accusation de meurtre. C’est l’aventure, le rêve, la maturité qui bousculent Gervais, gueules noires et gueules rouges ayant tous affaire à la police et aux préjugés de classe et de race de la bonne société.
C’est qu’en plus l’histoire est bien ancrée dans son époque : on est en pleine discussion à propos de la loi de séparation des Eglises et de l’Etat qui renforcera la laïcité, et Eglise et bouffeurs de curés se déchirent, alors que certains ouvriers sont sensibles à la propagande anarchiste (certains ouvriers sont eux-aussi des « gueules rouges » !) : le monde de Gervais se fissure, mais au travers de ces fissures il entrevoit la lumière.
L’épilogue, dans la boucherie des tranchées, laisse ouverte la conclusion qu’on peut tirer de cette histoire : la fin d’un monde, ou pas ?
Les seuls petits bémols concernant cet album n’occultent en rien sa qualité.
Le dessin d’Eddy Vaccaro, dans une sorte d’aquarelle, est parfois trop brouillon, même si la colorisation, sombre, rouille, colle elle très bien au sujet, au titre et aux idées développées.
La narration est parfois un peu ralentie par certaines explications (de termes ou dates), mais je le répète, ce n’est pas trop gênant.
Les personnages s’expriment dans le langage chti populaire, et j’ai eu aussi parfois du mal à m’y faire, mais il faut passer outre, car au final, j’ai plutôt bien aimé ce parti pris.
En tout cas, c’est une belle découverte que cet album, pas exempt de menus défauts, mais qui est très riche, et qui mérite à l’évidence qu’on s’y intéresse.
Après L'Homme qui s'évada, c'est la deuxième fois que le livre-reportage d'Albert Londres sur le bagne guyanais est adapté en BD. Pat Perna semble avoir intégré un peu plus Londres à son récit, ses sources semblent être plus diverses que celles de Laurent Maffre, comme la biographie de Londres et l'ouvrage d'Eugène Dieudonné. Cela donne un récit très vivant, avec un point de vue peut-être plus extérieur. Un reportage qui se transforme peu à peu en récit d'aventure, rythmé par les tentatives d'évasion de Dieudonné.
J'avais beaucoup aimé le ton du premier tome, alors que le second est bien différent.
Pat Perna nous propose en effet de suivre encore Albert Londres, dans son combat, après son retour, afin d'améliorer les conditions de vie des forçats à Cayenne. L'action y est moins présente, même si Dieudonné parle de façon plus libérée (et pour cause). Un tome plus calme, mais pas moins intéressant que le premier.
Le dessin de Fabien Bedouel est puissant, presque mégalithique, il se montre à l'aise dans les extérieurs autant qu'avec des décors froids de prison. L'apport aux couleurs de Florence Fantini est essentiel, elle confère des ambiances presque inoubliables à ce récit rondement mené.
J’ai emprunté cette série – dont je n’avais auparavant jamais entendu parler – en médiathèque, dans le rayon jeunesse, au vu du nom de Matthieu Bonhomme.
Eh bien le moins que l’on puisse dire, c’est que, si le public jeunesse peut y trouver son compte, il n’est pas le seul, c’est vraiment une série tout public.
En effet, dès les premières pages du tome inaugural, la mort violente des proches et de la mère d’Esteban efface tout risque de mièvrerie.
Par la suite, les aventures se lisent agréablement, avec un capitaine bourru – comme le veulent les clichés, mais pas monolithique, ni sans défaut. Son sale caractère, mais aussi son égoïsme vont même plonger Esteban et le reste de l’équipage dans une aventure aux multiples rebondissements, au milieu de la banquise, dans un pénitencier du bout du monde, etc.
Une lecture agréable et fluide (le dessin de Bonhomme y est pour beaucoup, du « Dupuis Modernisé », sans copier sur Franquin), que je vous recommande chaudement.
Les cinq albums que j’ai lus forment le premier cycle, même si je ne sais s’il y aura une suite, plusieurs années s’étant écoulées depuis la parution du dernier tome.
Mon petit coup de coeur du moment.
Il y a chez les Editions Maghen, ce souci de faire de belles bandes dessinées, au sens visuel du terme. Je ne dis pas que les scenarii sont en reste, mais la qualité privilégiée par les membres de l'éditorial de cette maison est celle-là.
C'est bien sûr encore le cas avec TER, qui nous montre un monde apparemment post-apocalyptique relativement classique, des personnages à la psychologie elle aussi relativement classique, même si l'intrus évolue un peu trop vite à mon goût. Je suis assez client de ce genre d'histoire, surtout que la fin de ce premier tome nous dévoile un beau cliffhanger, que je n'ai pas vu venir...
Visuellement, donc, c'est une tuerie, surtout sur les paysages, où Christophe Dubois se montre très intéressant. On respire beaucoup sur ce monde si particulier... Je suis plus réservé sur les visages, qui manquent à mon goût de maturité, et c'est bien dommage, car on aurait eu l'album visuellement presque parfait.
A suivre, avec avidité.
J'avais zappé cette série alors que sa lecture m'avait procuré plus qu'un agréable moment. Que dire après déjà 32 avis ?. C'est rafraichissant, plaisant plein de gouaille, un autre avis évoque le film "Mon oncle Benjamin" comme lui ce récit est empreint de libertinage mais avec un détachement, le pas de côté qui donne une lecture fluide, aérée, dynamique.
Des personnages fort bien croqués avec des trognes certes un brin caricaturales mais qui au bout du compte semblent naturelles, des dialogues amusants mêlant poésie et verve, bref que du bon.
Le dessin un poil grossier dans la première partie s'améliore grandement dans la deuxième. Alors je sais les pinailleurs diront toujours que nous ne sommes pas devant la BD du siècle mais en voilà une qui fait son office : divertir en utilisant un texte ciselé. Pas exempte de petits défauts, surtout au niveau de la colorisation par exemple, cela n'en reste pas moins une bonne série dont je conseille l'achat.
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Les Funérailles de Luce
Un peu trop court mais très précis et juste et beau... Le dessin noir et blanc un peu trash, sans demi-mesure de gris, ni traits fins, se confronte à un scénario très nuancé : par moment quotidien, par moment symbolique. La mort, la vieillesse, l'enfance y sont convoquées dans un univers villageois un peu suranné. Comme dit Hervé c'est un album qui laisse des traces profondes, comme une sorte de non-dit qui restera à l'intérieur de nous quelles que soient les couches de vie qui recouvreront le moment de notre lecture... Le titre n'est peut-être pas le bon, ce ne sont pas les funérailles DE Luce, mais celles qu'elle a vu. Et que les autres ne voient pas. Le grand-père, son voisin, le fils du voisin, et la voisine (personne n'a parlé de cette voisine, je pense que c'est une des choses qui est aussi marquante dans cet album : des vieux qui font l'amour, et la mort qui vient, juste après). Et puis le couple improbable qui représente la mort : étrange, mais pas malveillant, simplement muet. Bonne lecture, ça vaut le coup !
L'Épée d'Ardenois
J’avais déjà vu cette série dans les bacs il y a quelque temps, et ne m’y étais pas attardé – je ne l’avais d’ailleurs même pas feuilletée – croyant n’y trouver qu’une énième version franchisée de Walt Disney. En effet, cette couverture du premier tome – et l’intérieur le confirme, fait rudement penser à la version Disney de « Robin des Bois ». Et puis j’ai eu l’occasion de lire ces albums, mes préventions ayant été du coup chassées très loin. Car en effet, les personnages animaliers, dans un univers moyenâgeux, font furieusement penser au film précité – même si le dessin et la colorisation s’en écarte un peu à partir du deuxième tome. Mais le parallèle s’arrête là. D’abord parce que ce n’est pas la même histoire. Ensuite parce que le traitement est très éloigné de la gentillesse manichéenne de Disney. Ici le sang coule, on meurt. Un certain érotisme (certes très soft) affleure avec le personnage de La Fouine. Et les « gentils » et les « méchants » ne ont ni monolithiques ni forcément clairement identifiés. Il faut dire que l’intrigue est assez élaborée, pimentant d’un peu de fantastique l’univers médiéval, s’inspirant pas mal du « Seigneur des anneaux » de Tolkien (les cartes en intérieur de couvertures, certains noms de personnages ou de lieu, une partie de l’intrigue). C’est une chouette réussite que je vous encourage à découvrir !
La Main du singe
La lecture de ce triptyque est relativement exigeante, et il faut savoir passer outre les circonvolutions du scénario. Mais au final cela en vaut la peine. En effet, j’ai mis du temps à m’y retrouver avec cette construction ante et post point de départ : le jour zéro, durant lequel, suite à un accident, deux hommes ont échangé une partie de leur corps. Nous suivons donc, de manière totalement « déconstruite » les mouvements de balancier du scénario, sur les quelques semaines qui suivent ce point zéro, et les jours, parfois les mois et même les siècles qui l’ont précédé, dans une intrigue qui n’a commencé à faire sens pour moi qu’au dernier tiers du premier tome. Mais quand tous les éléments du puzzle sont mis en place, que l’on s’est fait à cette construction spéciale, c’est une histoire que l’on savoure, et qui mérite un petit détour, pour les amoureux de thriller bien fichus. Ma seule petite déception vient du dessin, qui ne me convient pas vraiment. Trop souvent, l’impression d’inachevé, de flou – principalement les personnages, visages et corps, comme « fondus », des variations sur les traits de ces mêmes personnages m’ont quelque peu gêné. Mais pas au point de gâcher ma lecture d’une aventure assez prenante. Note réelle 3,5/5.
Cour royale
Tout simplement drôle ! Le scénario est bien goupillé, l'époque du roi soleil bien traduite, dans sa démesure, son ridicule, son obséquiosité. Mais les deux principales qualités résident dans la langue utilisée et l'habileté du dessin. Truculence des dialogues épicée par une langue du XVIIème siècle quelque peu imaginaire (comme la langue d'Agrippine imaginée par Claire Brétecher aujourd'hui, ou plus proche (aussi par le trait): celle du landais volant de Dumontheuil). Les noms des personnages rappellent l'humour d'Arleston dans ses trolls, c'est-à-dire pas bégueule, un peu gras mais ça glisse d'autant mieux ! Le contraste ménagé par le dessin entre les deux jeunes premiers (la belle et le grand costaud, pas très volubile) d'un coté et le reste de la cour de l'autre : ramassis de rondouillards emperruqués, et de damoiselles poudrées aux visages cadavériques, rappelle la caricature à la Uderzo, (dans le grand fossé par exemple) mais avec un souci plus juste des couleurs, et même des valeurs (ombres et lumières). Les excentricités de la cour sont mises en valeur dans un décors, certes simplifié, mais dans lequel on ressent très bien la richesse forcenée (cf les carrosses) L'humour, la caricature mais aussi une certaine fidélité historique donnent à cet album un caractère franchement sympathique ; j'en conseille chaleureusement la lecture. Un petit exemple de la langue du roi expliquant son souhait qu'on lui invente une chaise à porteur percée : "En cas de forte intempérie des entrailles, il doit être grisant de les soulager en pleine locomotion !"
Travis
L’histoire se situe en 2050 à un moment où l’homme va commencer sa colonisation vers d’autres planètes. Ce futur n’est pas si éloigné du nôtre ce qui le rend intéressant car possible. Le héros « un peu trop sans peur ni reproche » Travis, pilote de navette, va combattre des grandes multinationales qui veulent conquérir l’espace. Le scénario est passionnant laissant une très grande place à l’action. Certaines planches sont excellentes. Les « méchants » de l’histoire sont bien exploités car on comprend ce qui les amène à commettre leurs actes répréhensibles. Cela les rend presque sympathiques. Des personnages secondaires très intéressants notamment Pacman et Vlad Nyrki… Une série qui se lit très bien avec beaucoup de rythme. Du pur divertissement digne des grosses productions hollywoodiennes avec son lot de révélations. J’ai presque honte d’avouer que j’aime bien cela, que je suis presque le lecteur tout désigné pour lire ce genre de série. Cependant, force est de constater que sur la longueur, cette série parvient toujours à conserver sa qualité graphique et narrative. Il y a 3 cycles assez distincts : - 1er cycle (du tome 1 au 5) : Les Cyberneurs
- 2ème cycle (du tome 6.1 à 7) : Vitruvia
- 3ème cycle (du tome 8 à 10) : H2O
- 4ème cycle (du tome 11 à 12) : Les enfants de Marcos
- 5ème cycle (du tome 13 à 16) : La révolte des EGM
Il est vrai qu'avec les tomes 6.1 et 6.2, le 7ème tome est en réalité le 8ème et ainsi de suite ce qui pourra un peu troubler le lecteur cartésien.
En conclusion, le scénario est véritablement haletant et les scènes d’action sont diablement efficaces. Une vraie bd d’anticipation de très bonne facture !
Note Dessin : 4/5 – Note Scénario : 4/5 – Note Globale : 4/5
Les Gueules rouges
Voilà un album relativement original quant à son sujet, que l’on devine avec cette couverture, réunissant un mineur et un Indien. L’histoire se déroule essentiellement en 1905, dans le Nord de la France, près de la tranchée d’Arenberg (que personnellement je connais surtout à travers Paris-Roubaix…), autour de mineurs, et en particulier d’un gamin, Gervais, qui réussit bien à l’école, qui pourrait faire des études et devenir ingénieur, mais qui doit obéir à son père et descendre comme lui dans les boyaux de la mine. L’univers de ces mineurs, la vie des corons, tout est bien rendu, on est proche de Les Mangeurs de Cailloux ou de Sang noir - La catastrophe de Courrières, deux belles séries de Loyer se déroulant dans le même cadre à la même époque. Mais voilà, la richesse de cet album, c’est que Jean-Michel Dupont introduit dans ce cadre très noir, très « Germinal », et quelque peu rigide depuis un siècle, de multiples agents perturbateurs, qui propagent leurs secousses plus ou moins profondément dans l’intrigue et les personnages. L’arrivée du cirque de Buffalo Bill à Valenciennes va bouleverser Gervais, qui va se lier d’amitié avec deux Indiens, et les aider à se disculper d’une accusation de meurtre. C’est l’aventure, le rêve, la maturité qui bousculent Gervais, gueules noires et gueules rouges ayant tous affaire à la police et aux préjugés de classe et de race de la bonne société. C’est qu’en plus l’histoire est bien ancrée dans son époque : on est en pleine discussion à propos de la loi de séparation des Eglises et de l’Etat qui renforcera la laïcité, et Eglise et bouffeurs de curés se déchirent, alors que certains ouvriers sont sensibles à la propagande anarchiste (certains ouvriers sont eux-aussi des « gueules rouges » !) : le monde de Gervais se fissure, mais au travers de ces fissures il entrevoit la lumière. L’épilogue, dans la boucherie des tranchées, laisse ouverte la conclusion qu’on peut tirer de cette histoire : la fin d’un monde, ou pas ? Les seuls petits bémols concernant cet album n’occultent en rien sa qualité. Le dessin d’Eddy Vaccaro, dans une sorte d’aquarelle, est parfois trop brouillon, même si la colorisation, sombre, rouille, colle elle très bien au sujet, au titre et aux idées développées. La narration est parfois un peu ralentie par certaines explications (de termes ou dates), mais je le répète, ce n’est pas trop gênant. Les personnages s’expriment dans le langage chti populaire, et j’ai eu aussi parfois du mal à m’y faire, mais il faut passer outre, car au final, j’ai plutôt bien aimé ce parti pris. En tout cas, c’est une belle découverte que cet album, pas exempt de menus défauts, mais qui est très riche, et qui mérite à l’évidence qu’on s’y intéresse.
Forçats
Après L'Homme qui s'évada, c'est la deuxième fois que le livre-reportage d'Albert Londres sur le bagne guyanais est adapté en BD. Pat Perna semble avoir intégré un peu plus Londres à son récit, ses sources semblent être plus diverses que celles de Laurent Maffre, comme la biographie de Londres et l'ouvrage d'Eugène Dieudonné. Cela donne un récit très vivant, avec un point de vue peut-être plus extérieur. Un reportage qui se transforme peu à peu en récit d'aventure, rythmé par les tentatives d'évasion de Dieudonné. J'avais beaucoup aimé le ton du premier tome, alors que le second est bien différent. Pat Perna nous propose en effet de suivre encore Albert Londres, dans son combat, après son retour, afin d'améliorer les conditions de vie des forçats à Cayenne. L'action y est moins présente, même si Dieudonné parle de façon plus libérée (et pour cause). Un tome plus calme, mais pas moins intéressant que le premier. Le dessin de Fabien Bedouel est puissant, presque mégalithique, il se montre à l'aise dans les extérieurs autant qu'avec des décors froids de prison. L'apport aux couleurs de Florence Fantini est essentiel, elle confère des ambiances presque inoubliables à ce récit rondement mené.
Esteban (Le Voyage d'Esteban)
J’ai emprunté cette série – dont je n’avais auparavant jamais entendu parler – en médiathèque, dans le rayon jeunesse, au vu du nom de Matthieu Bonhomme. Eh bien le moins que l’on puisse dire, c’est que, si le public jeunesse peut y trouver son compte, il n’est pas le seul, c’est vraiment une série tout public. En effet, dès les premières pages du tome inaugural, la mort violente des proches et de la mère d’Esteban efface tout risque de mièvrerie. Par la suite, les aventures se lisent agréablement, avec un capitaine bourru – comme le veulent les clichés, mais pas monolithique, ni sans défaut. Son sale caractère, mais aussi son égoïsme vont même plonger Esteban et le reste de l’équipage dans une aventure aux multiples rebondissements, au milieu de la banquise, dans un pénitencier du bout du monde, etc. Une lecture agréable et fluide (le dessin de Bonhomme y est pour beaucoup, du « Dupuis Modernisé », sans copier sur Franquin), que je vous recommande chaudement. Les cinq albums que j’ai lus forment le premier cycle, même si je ne sais s’il y aura une suite, plusieurs années s’étant écoulées depuis la parution du dernier tome.
TER
Mon petit coup de coeur du moment. Il y a chez les Editions Maghen, ce souci de faire de belles bandes dessinées, au sens visuel du terme. Je ne dis pas que les scenarii sont en reste, mais la qualité privilégiée par les membres de l'éditorial de cette maison est celle-là. C'est bien sûr encore le cas avec TER, qui nous montre un monde apparemment post-apocalyptique relativement classique, des personnages à la psychologie elle aussi relativement classique, même si l'intrus évolue un peu trop vite à mon goût. Je suis assez client de ce genre d'histoire, surtout que la fin de ce premier tome nous dévoile un beau cliffhanger, que je n'ai pas vu venir... Visuellement, donc, c'est une tuerie, surtout sur les paysages, où Christophe Dubois se montre très intéressant. On respire beaucoup sur ce monde si particulier... Je suis plus réservé sur les visages, qui manquent à mon goût de maturité, et c'est bien dommage, car on aurait eu l'album visuellement presque parfait. A suivre, avec avidité.
Célestin Gobe-la-lune
J'avais zappé cette série alors que sa lecture m'avait procuré plus qu'un agréable moment. Que dire après déjà 32 avis ?. C'est rafraichissant, plaisant plein de gouaille, un autre avis évoque le film "Mon oncle Benjamin" comme lui ce récit est empreint de libertinage mais avec un détachement, le pas de côté qui donne une lecture fluide, aérée, dynamique. Des personnages fort bien croqués avec des trognes certes un brin caricaturales mais qui au bout du compte semblent naturelles, des dialogues amusants mêlant poésie et verve, bref que du bon. Le dessin un poil grossier dans la première partie s'améliore grandement dans la deuxième. Alors je sais les pinailleurs diront toujours que nous ne sommes pas devant la BD du siècle mais en voilà une qui fait son office : divertir en utilisant un texte ciselé. Pas exempte de petits défauts, surtout au niveau de la colorisation par exemple, cela n'en reste pas moins une bonne série dont je conseille l'achat.