Voila un avis mitigé…
Pas sur le dessin de Bilal en tout cas, qui continue de se bonifier et à être plus net. Pas sur la colorisation non plus, qui m’a plait bien. J’ai profité du voyage dans cette Europe de l’Ouest: Espagne, France, Italie, Pays-Bas… il y a de très beaux décors ruraux et urbains. La retranscription générale de l’époque ‘70 me permet de plonger facilement dans l’environnement.
Le scénariste et le dessinateur mettent en avant l’absurdité de cette quête vengeresse menée par des sexagénaires gauchistes ayant combattus contre les franquistes, qu’ils recherchent et retrouvent pour un nouvel affrontement, 40 ans plus tard. Leur comportement et la mort donnée à certains proposent ici un ton plus comique que dans « Partie de chasse ». Si j’ose dire, car pour le reste il n’y a pas de quoi rire. Minés par leur existence, dans un monde qui avance sans eux, ils sont complètement indécis entre leur envie de vengeance et leur secrète volonté de tourner la page.
J’ai eu du mal à parcourir l’intrigue, qui a trop de longueurs à mon goût, la course à l’homme dure tout le récit et n’a pas vraiment de rebondissements. Aussi, l’écriture est assez lourde et verbeuse.
Les auteurs ont eu de la suite dans les idées, impossible de ne pas voir la passerelle reliant ce récit avec leur collaboration future, « Partie de chasse », dont j’identifie un peu les mêmes défauts. Ça reste digeste et je ne suis pas sans le relire, mais c’est de loin le récit qui m’a le moins plu de cette saga.
Edit: je remarque qu’on retrouve ce personnage anonyme, qui ressemblé étrangement à celui que l’on croise dans la saga des « Légendes d’aujourd’hui ». Intriguant !
Si la guerre en Ukraine a assurément réactivé l’intérêt pour Vladimir Poutine, il faut souligner le fait que « Poutine, l’ascension d’un dictateur » a été publié dans les pays anglo-saxons quelques mois avant le début du conflit. Pour sa sortie chez Delcourt, l’auteur y a ajouté une préface plus récente, histoire peut-être de signifier au lecteur que l’ouvrage n’a pas été produit juste à cause du contexte actuel.
Visiblement, Darryl Cunnigham s’est beaucoup documenté, à en juger par le nombre de publications et d’articles cités en fin de volume. L’auteur a réussi à synthétiser le tout de manière fluide, nous rappelant de manière détaillé le parcours du dictateur, de ses débuts au KGB jusqu’au sommet du pouvoir russe. Le gamin teigneux et bagarreur, « petit voyou des rues peu instruit », n’a jamais été un enfant de chœur. Déjà, lorsqu’il travaillait pour la Stasi, il fut impliqué dans des accords d’exportations à la légalité douteuse, sans être inquiété. Lorsqu’il succéda à Boris Elstine dans les années 90, Poutine a rapidement montré son visage sanguinaire et belliqueux, par des méthodes mafieuses dont le KGB était coutumier (avec plusieurs assassinats de journalistes ou de personnalités gênantes, y compris sur un sol étranger). Bien sûr, son nom n’était jamais cité lors de ces mauvais coups, mais il paraissait évident qu’il était celui qui tirait les ficelles.
L’invasion récente de l’Ukraine ne sera pas une surprise, mais pas seulement parce que le bras de fer dure depuis 2014 : Cunningham nous rappelle que l’homme fort de la Russie avait inauguré son premier mandat « en fanfare » en intervenant en Tchétchénie, décrite à l’époque comme une simple « opération antiterroriste ». Depuis, il y a eu d’autres « opérations spéciales » : en Géorgie et en Syrie (où Poutine a soutenu vigoureusement Bachar El-Assad).
Pour ce mégalomane né, la guerre n’est qu’un jeu de société, peu importe ses conséquences désastreuses sur la vie des gens, peu importe la terreur et les traumatismes qu’elles engendrent dans le psychisme collectif, sans parler de la haine et de la rancœur. Mais Poutine sait également recourir aux technologies modernes, et l’auteur explique comment le tyran a manipulé l’information à travers les médias de son propre pays, mais également à l’international en utilisant les réseaux sociaux à l’aide de hackers ou de trolls, en y répandant des « fake news », qui accessoirement auront largement facilité l’élection en 2016 d’un autre sinistre personnage, un certain Donald Trump. Et il se pourrait bien que la recette ait fonctionné également pour l’Europe, notamment outre-Manche où l’argent russe coule à flot… Boris Johnson et son parti conservateur ont sûrement un avis, même s’ils le gardent secret jusqu’à présent…
On ne s’étendra pas sur le dessin minimaliste, qui, bien que tout à fait adapté à une narration documentaire, reste très ordinaire. Cunnigham alterne entre portraits « réalistes » de figures célèbres inspirés de clichés photographiques et illustrations simplistes ou symboliques, souvent épurées à l’extrême, parfois un rien répétitives. Le tout est plus démonstratif qu’esthétique, ce qui incitera le lecteur à se concentrer davantage sur le fond que sur la forme.
En résumé, le livre nous fait bien comprendre que les initiatives du dictateur sont davantage motivées par l’amour du pouvoir et de l’argent que par le bien-être de son peuple. Et l’argent, on apprendra qu’il en connaît parfaitement la couleur, et serait même à la tête de la plus grosse fortune mondiale… L’évolution de l’humanité peut-elle s’accommoder de tels personnages ? Si cette biographie édifiante ne répond pas à la question, elle nous aide à comprendre comment le « nouveau tsar » a construit son pouvoir principalement par le mensonge et la manipulation.
Prado est un auteur éclectique, mais que j’aime bien.
Dans cet album, on a un polar social, dont l’aspect « social/politique » prend rapidement le pas, au point que l’intrigue purement policière passe presque au second plan, bien qu’elle occupe tout l’album.
La présentation du contexte par Prado en préface donne le ton, mais révèle en même temps les ressors et quasiment les coupables des crimes qu’il va falloir élucider. Les amateurs d’énigmes policières en seront pour leurs frais. Mais ça ne veut pas dire que l’histoire perd tout intérêt, bien au contraire, j’ai trouvé qu’elle restait agréable à suivre, et intéressante sur le fond.
J’aime bien le dessin de Prado, ici un trait semi réaliste. L’omniprésence du gris donne le ton à cette histoire, qui parle de cheveux gris, mais aussi d’une société de prédation triste à regarder.
Au final, voilà un album que j’ai apprécié.
Issu du Fluide Glacial de la grande époque, SM-TB en est un parfait résumé: de la grosse caricature pour se marrer un bon coup avec des personnages hauts en couleur, un peu comme un album de Renaud période Gérard Lambert. Aucune retenue, transgressif et pourtant jamais fondamentalement méchant, c'est ce qui permet à chacun d'y trouver ce qui le fera marrer. Vous avez des réticences sur la religion? Vous rirez tout de même du bataillon des bonnes soeurs. Vous êtes pointilleux sur le racisme façon Michel Leeb ? Vous poufferez en écoutant le petit Portugais remballant notre grande gueule.
Une grande gueule parmi beaucoup d'autres, Maester est un caricaturiste hors-pair. Un de ceux qui ont inspiré tous ces croqueurs de portrait sur les places touristiques, faisant bomber les poitrines et grossir les nez à l'extrême.
Bien sûr très redondant, car destiné à une lecture de mensuel, en lire un de temps à autre ne pourra que faire du bien à votre moral!
Trouvé cet album à 2 euros en bouquinerie, un prix pas étonnant malgré le très bon état, car ce polar est totalement méconnu, et pour cause puisqu'il n'y a eu qu'un seul épisode. A ma connaissance, il n'y a pas eu de prépublication dans Circus ou tout autre journal de BD à l'époque, alors que c'était encore la règle en 1986, il est vrai que ce n'est pas édité par Glénat mais par un petit éditeur. C'est d'ailleurs dommage que ça n'ait pas continué, ça aurait pu déboucher sur une série policière pas plus bête qu'une autre... le héros journaliste n'est pas antipathique, et surtout Bucquoy y développe encore magouilles et trucs pas propres comme il l'a fait dans ses autres Bd comme Stone, Le Bal du rat mort, Alain Moreau, Autonomes ou Jaunes, avec toujours son ton frondeur et provocateur, dans une ambiance de belgitude, c'est ce qui fait un peu le sel de cette bande.
Quant au dessin, je ne connaissais de Le Hir que Cholms et Stetson, une Bd animalière prépubliée dans Circus, c'est pour ça que j'évoquais cette revue ; sur cette bande, le style graphique était caricatural et humoristique puisqu'il s'agissait d'une parodie animalière de Sherlock Holmes, alors qu'ici, le style réaliste de Le Hir n'est pas vilain, il y a quelques petites erreurs de perspective, et sa manie des fonds de cases vides se répètent un peu trop, sinon, ses décors sont pas trop mal. On sent cependant une certaine fébrilité, mais ça n'handicape pas vraiment la lecture. Un petit polar sympa à découvrir en occase.
Cet album a été enregistré comme un one-shot, mais en fait, il s'agit d'une série qui compte 3 albums, cependant ce sont bien des albums développant une histoire par tome. A noter que ce récit n'a rien à voir avec le chef-d'oeuvre hollywoodien l'Homme aux colts d'or, réalisé par Edward Dmytryk en 1959 (dont le titre original était Warlock, nom du patelin où se déroulait l'action).
Le personnage de Tex Willer est tellement emblématique dans la BD italienne et plus largement dans la BD populaire de western qu'il a pu non seulement sortir de l'ornière des pockets aux récits non publiés en albums, lorsque Clair de Lune a édité de beaux albums reprenant ses aventures de la grande époque qui étaient traduites en France par la société Lug dans les petits formats légendaires comme Rodeo et Nevada. Mais aussi, Tex a obtenu une telle aura qu'il a tenté plusieurs dessinateurs, comme Serpieri avec Tex, Le Héros et la Légende, Tisselli avec Prisonnière des Apaches, ou De Vita avec Montana - Une aventure de Tex...
Les nostalgiques comme moi des petits formats se régaleront donc de cette bande dans la lignée des anciens récits que je lisais dans ma chambre d'ado en rêvant. C'est un honnête scénario qui même s'il utilise des situations archi vues et des ficelles très éprouvées, procure un bon moment de lecture ; un récit à l'ancienne qui n'a rien à voir avec les nouveaux codes des westerns modernes qui ont resurgi ces dernières années. Peu de psychologie, les personnages sont d'un seul bloc, tout réside dans l'ambiance et l'action illustrées par le dessin de RM Guera que j'avais déja pu apprécier sur une Bd abandonnée du nom de Howard Blake. C'est un dessin rugueux et efficace dans le mouvement et les fusillades nombreuses, avec une mise en page alternant le classicisme des cadrages et une technique à la Derib avec des montages hardis.
Bref, c'est pas mal du tout, un bon western populaire !
La belle couverture d'album est trompeuse, je ne m'attendais pas à trouver un dessin aussi quelconque à l'intérieur. J'y reviendrai.
Cette adaptation du célèbre recueil de nouvelles d'Alphonse Daudet n'est pas aussi académique que la version Les Lettres de mon Moulin par Mittéï chez Joker. Ici, les auteurs font des rajouts humoristiques et un peu modernes censés séduire les nouvelles générations ; heureusement, ce n'est pas trop appuyé et ça ne déforme pas trop la narration d'origine, mais je préfère néanmoins la version plus classique vue par Mittéï.
Il y a aussi une autre raison à cela, c'est que je n'aime pas le dessin. C'est un dessin sans personnalité, qu'on dirait mal fini, inesthétique, peu attrayant et sans malice ; il aurait fallu justement un dessin à la Mitteï, plus savoureux, plus pétillant, et aux jolis contours, qui donnait une certaine vigueur aux personnages. Disons que ça m'a un peu gâché la lecture de ces histoires que j'ai souvent lues dans mes jeunes années. D'autre part, j'aurais plutôt mis cette Bd en conte plutôt qu'en aventure. Note réelle : 2,5/5.
J'ai retrouvé dans cet album un exotisme typique des années 30, qu'on voyait dans certains films français de cette époque, comme Macao l'enfer du jeu par exemple, sauf que là on est à Borneo, mais le principe reste le même, c'est un exotisme asiatique avec une faune interlope aux personnages pittoresques ou crapuleux, et des indigènes étranges.
Le scénario est assez banal et convenu, le capitaine Drake est une sorte de clone de Corto Maltese, dans une aventure à la Corto Maltese, et le dessin de Vianello est dans une belle imitation de Hugo Pratt sur Corto Maltese, c'est un style dont il n'a jamais pu se détacher, il est vrai que d'être assistant d'un tel géant de la BD, ça doit marquer. En tout cas, son noir & blanc est superbe, il rattrappe un peu la banalité du récit, et accentue son aspect mystérieux. Un album sympathique mais pas inoubliable.
Tiens, voilà une coopération surprenante, pour deux auteurs dont je n’avais pas deviné les affinités. Ma curiosité était donc piquée.
L’univers qu’ils développent s’inspire du « Moby Dick » de Melville, mais aussi de Jules Verne, même s’ils font aussi œuvre de création originale. L’histoire – telle que débutée dans ce tome (la série semble prévue en deux tomes) se laisse lire, même si le fantastique, le mystère insufflé dans les premières pages perd un peu de sa force au fur et à mesure que l’intrigue se développe, et que nous en apprenons plus sur le crabe géant et la jeune fille qui s’y trouvait.
Je ne sais pas comment ça va être relancé, mais il faudrait clairement un bon coup de fouet pour la suite.
Le dessin de Sokal est bon, même si les personnages sont un chouia trop statiques (j’ai juste trouvé un peu bizarres les yeux – surtout au travers des lunettes). La colorisation est très réussie je trouve.
En résumé, du pas mal, mais je reste un peu sur ma faim, eu égard à mes attentes concernant ces deux auteurs.
*****************************
Je viens de relire le tome inaugural et ai enchaîné avec le suivant, qui conclut ce diptyque.
Je reste sur ma première impression, globalement positive, avec un je ne sais quoi de regrets, à propos d'une aventure certes belle, mais qui m'a semblé parfois manquer de souffle ou de poésie.
Mais ça reste quand même des albums intéressants, et la lecture est agréable.
Sokal est décédé avant la publication du second tome, et c'est son compère Schuiten qui l'a fini, prenant le relais au dessin. je ne suis pas fan du changement de dessinateur dans une série, a fortiori dans un même tome, mais nécessité faisant loi, ça passe ici (et le dessin de Schuiten, différent, est très beau - j'avais eu le même ressenti pour Le Passage de Vénus pour les mêmes raisons). Surtout, dans un dossier final, Schuiten présente son travail commun avec Sokal, leur grande amitié, et l'on comprend pourquoi il était naturel qu'il conclut - le travail préparatoire de Sokal ayant de toute façon été mené à son terme.
Je me retrouve en grande partie dans l’avis de Mac Arthur. J’ai préféré le premier tome, qui plante le décor, lance sur de multiples pistes, et qui joue sur des péripéties globalement crédibles.
Le second est plus rythmé, mais l’intrigue y perd en profondeur, et la chute n’est pas forcément originale. En tout cas elle m’avait traversé l’esprit bien avant de la lire.
J’ai pour le dessin un ressenti identique, mitigé. Il est globalement bon (techniquement en tout cas, car je le trouve impersonnel), dynamique, mais je n’ai pas accroché à la colorisation, sans nuance.
Ce diptyque propose une lecture détente sans trop de surprises, mais dans le genre il y a clairement mieux.
A vous de voir, mais il m’a un peu laissé sur ma faim.
Note réelle 2,5/5.
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Les Phalanges de l'ordre noir
Voila un avis mitigé… Pas sur le dessin de Bilal en tout cas, qui continue de se bonifier et à être plus net. Pas sur la colorisation non plus, qui m’a plait bien. J’ai profité du voyage dans cette Europe de l’Ouest: Espagne, France, Italie, Pays-Bas… il y a de très beaux décors ruraux et urbains. La retranscription générale de l’époque ‘70 me permet de plonger facilement dans l’environnement. Le scénariste et le dessinateur mettent en avant l’absurdité de cette quête vengeresse menée par des sexagénaires gauchistes ayant combattus contre les franquistes, qu’ils recherchent et retrouvent pour un nouvel affrontement, 40 ans plus tard. Leur comportement et la mort donnée à certains proposent ici un ton plus comique que dans « Partie de chasse ». Si j’ose dire, car pour le reste il n’y a pas de quoi rire. Minés par leur existence, dans un monde qui avance sans eux, ils sont complètement indécis entre leur envie de vengeance et leur secrète volonté de tourner la page. J’ai eu du mal à parcourir l’intrigue, qui a trop de longueurs à mon goût, la course à l’homme dure tout le récit et n’a pas vraiment de rebondissements. Aussi, l’écriture est assez lourde et verbeuse. Les auteurs ont eu de la suite dans les idées, impossible de ne pas voir la passerelle reliant ce récit avec leur collaboration future, « Partie de chasse », dont j’identifie un peu les mêmes défauts. Ça reste digeste et je ne suis pas sans le relire, mais c’est de loin le récit qui m’a le moins plu de cette saga. Edit: je remarque qu’on retrouve ce personnage anonyme, qui ressemblé étrangement à celui que l’on croise dans la saga des « Légendes d’aujourd’hui ». Intriguant !
Poutine - L'ascension d'un dictateur
Si la guerre en Ukraine a assurément réactivé l’intérêt pour Vladimir Poutine, il faut souligner le fait que « Poutine, l’ascension d’un dictateur » a été publié dans les pays anglo-saxons quelques mois avant le début du conflit. Pour sa sortie chez Delcourt, l’auteur y a ajouté une préface plus récente, histoire peut-être de signifier au lecteur que l’ouvrage n’a pas été produit juste à cause du contexte actuel. Visiblement, Darryl Cunnigham s’est beaucoup documenté, à en juger par le nombre de publications et d’articles cités en fin de volume. L’auteur a réussi à synthétiser le tout de manière fluide, nous rappelant de manière détaillé le parcours du dictateur, de ses débuts au KGB jusqu’au sommet du pouvoir russe. Le gamin teigneux et bagarreur, « petit voyou des rues peu instruit », n’a jamais été un enfant de chœur. Déjà, lorsqu’il travaillait pour la Stasi, il fut impliqué dans des accords d’exportations à la légalité douteuse, sans être inquiété. Lorsqu’il succéda à Boris Elstine dans les années 90, Poutine a rapidement montré son visage sanguinaire et belliqueux, par des méthodes mafieuses dont le KGB était coutumier (avec plusieurs assassinats de journalistes ou de personnalités gênantes, y compris sur un sol étranger). Bien sûr, son nom n’était jamais cité lors de ces mauvais coups, mais il paraissait évident qu’il était celui qui tirait les ficelles. L’invasion récente de l’Ukraine ne sera pas une surprise, mais pas seulement parce que le bras de fer dure depuis 2014 : Cunningham nous rappelle que l’homme fort de la Russie avait inauguré son premier mandat « en fanfare » en intervenant en Tchétchénie, décrite à l’époque comme une simple « opération antiterroriste ». Depuis, il y a eu d’autres « opérations spéciales » : en Géorgie et en Syrie (où Poutine a soutenu vigoureusement Bachar El-Assad). Pour ce mégalomane né, la guerre n’est qu’un jeu de société, peu importe ses conséquences désastreuses sur la vie des gens, peu importe la terreur et les traumatismes qu’elles engendrent dans le psychisme collectif, sans parler de la haine et de la rancœur. Mais Poutine sait également recourir aux technologies modernes, et l’auteur explique comment le tyran a manipulé l’information à travers les médias de son propre pays, mais également à l’international en utilisant les réseaux sociaux à l’aide de hackers ou de trolls, en y répandant des « fake news », qui accessoirement auront largement facilité l’élection en 2016 d’un autre sinistre personnage, un certain Donald Trump. Et il se pourrait bien que la recette ait fonctionné également pour l’Europe, notamment outre-Manche où l’argent russe coule à flot… Boris Johnson et son parti conservateur ont sûrement un avis, même s’ils le gardent secret jusqu’à présent… On ne s’étendra pas sur le dessin minimaliste, qui, bien que tout à fait adapté à une narration documentaire, reste très ordinaire. Cunnigham alterne entre portraits « réalistes » de figures célèbres inspirés de clichés photographiques et illustrations simplistes ou symboliques, souvent épurées à l’extrême, parfois un rien répétitives. Le tout est plus démonstratif qu’esthétique, ce qui incitera le lecteur à se concentrer davantage sur le fond que sur la forme. En résumé, le livre nous fait bien comprendre que les initiatives du dictateur sont davantage motivées par l’amour du pouvoir et de l’argent que par le bien-être de son peuple. Et l’argent, on apprendra qu’il en connaît parfaitement la couleur, et serait même à la tête de la plus grosse fortune mondiale… L’évolution de l’humanité peut-elle s’accommoder de tels personnages ? Si cette biographie édifiante ne répond pas à la question, elle nous aide à comprendre comment le « nouveau tsar » a construit son pouvoir principalement par le mensonge et la manipulation.
Proies faciles
Prado est un auteur éclectique, mais que j’aime bien. Dans cet album, on a un polar social, dont l’aspect « social/politique » prend rapidement le pas, au point que l’intrigue purement policière passe presque au second plan, bien qu’elle occupe tout l’album. La présentation du contexte par Prado en préface donne le ton, mais révèle en même temps les ressors et quasiment les coupables des crimes qu’il va falloir élucider. Les amateurs d’énigmes policières en seront pour leurs frais. Mais ça ne veut pas dire que l’histoire perd tout intérêt, bien au contraire, j’ai trouvé qu’elle restait agréable à suivre, et intéressante sur le fond. J’aime bien le dessin de Prado, ici un trait semi réaliste. L’omniprésence du gris donne le ton à cette histoire, qui parle de cheveux gris, mais aussi d’une société de prédation triste à regarder. Au final, voilà un album que j’ai apprécié.
Soeur Marie-Thérèse des Batignolles
Issu du Fluide Glacial de la grande époque, SM-TB en est un parfait résumé: de la grosse caricature pour se marrer un bon coup avec des personnages hauts en couleur, un peu comme un album de Renaud période Gérard Lambert. Aucune retenue, transgressif et pourtant jamais fondamentalement méchant, c'est ce qui permet à chacun d'y trouver ce qui le fera marrer. Vous avez des réticences sur la religion? Vous rirez tout de même du bataillon des bonnes soeurs. Vous êtes pointilleux sur le racisme façon Michel Leeb ? Vous poufferez en écoutant le petit Portugais remballant notre grande gueule. Une grande gueule parmi beaucoup d'autres, Maester est un caricaturiste hors-pair. Un de ceux qui ont inspiré tous ces croqueurs de portrait sur les places touristiques, faisant bomber les poitrines et grossir les nez à l'extrême. Bien sûr très redondant, car destiné à une lecture de mensuel, en lire un de temps à autre ne pourra que faire du bien à votre moral!
Charles Miller
Trouvé cet album à 2 euros en bouquinerie, un prix pas étonnant malgré le très bon état, car ce polar est totalement méconnu, et pour cause puisqu'il n'y a eu qu'un seul épisode. A ma connaissance, il n'y a pas eu de prépublication dans Circus ou tout autre journal de BD à l'époque, alors que c'était encore la règle en 1986, il est vrai que ce n'est pas édité par Glénat mais par un petit éditeur. C'est d'ailleurs dommage que ça n'ait pas continué, ça aurait pu déboucher sur une série policière pas plus bête qu'une autre... le héros journaliste n'est pas antipathique, et surtout Bucquoy y développe encore magouilles et trucs pas propres comme il l'a fait dans ses autres Bd comme Stone, Le Bal du rat mort, Alain Moreau, Autonomes ou Jaunes, avec toujours son ton frondeur et provocateur, dans une ambiance de belgitude, c'est ce qui fait un peu le sel de cette bande. Quant au dessin, je ne connaissais de Le Hir que Cholms et Stetson, une Bd animalière prépubliée dans Circus, c'est pour ça que j'évoquais cette revue ; sur cette bande, le style graphique était caricatural et humoristique puisqu'il s'agissait d'une parodie animalière de Sherlock Holmes, alors qu'ici, le style réaliste de Le Hir n'est pas vilain, il y a quelques petites erreurs de perspective, et sa manie des fonds de cases vides se répètent un peu trop, sinon, ses décors sont pas trop mal. On sent cependant une certaine fébrilité, mais ça n'handicape pas vraiment la lecture. Un petit polar sympa à découvrir en occase.
Les Aventures de Tex
Cet album a été enregistré comme un one-shot, mais en fait, il s'agit d'une série qui compte 3 albums, cependant ce sont bien des albums développant une histoire par tome. A noter que ce récit n'a rien à voir avec le chef-d'oeuvre hollywoodien l'Homme aux colts d'or, réalisé par Edward Dmytryk en 1959 (dont le titre original était Warlock, nom du patelin où se déroulait l'action). Le personnage de Tex Willer est tellement emblématique dans la BD italienne et plus largement dans la BD populaire de western qu'il a pu non seulement sortir de l'ornière des pockets aux récits non publiés en albums, lorsque Clair de Lune a édité de beaux albums reprenant ses aventures de la grande époque qui étaient traduites en France par la société Lug dans les petits formats légendaires comme Rodeo et Nevada. Mais aussi, Tex a obtenu une telle aura qu'il a tenté plusieurs dessinateurs, comme Serpieri avec Tex, Le Héros et la Légende, Tisselli avec Prisonnière des Apaches, ou De Vita avec Montana - Une aventure de Tex... Les nostalgiques comme moi des petits formats se régaleront donc de cette bande dans la lignée des anciens récits que je lisais dans ma chambre d'ado en rêvant. C'est un honnête scénario qui même s'il utilise des situations archi vues et des ficelles très éprouvées, procure un bon moment de lecture ; un récit à l'ancienne qui n'a rien à voir avec les nouveaux codes des westerns modernes qui ont resurgi ces dernières années. Peu de psychologie, les personnages sont d'un seul bloc, tout réside dans l'ambiance et l'action illustrées par le dessin de RM Guera que j'avais déja pu apprécier sur une Bd abandonnée du nom de Howard Blake. C'est un dessin rugueux et efficace dans le mouvement et les fusillades nombreuses, avec une mise en page alternant le classicisme des cadrages et une technique à la Derib avec des montages hardis. Bref, c'est pas mal du tout, un bon western populaire !
Les Lettres de mon moulin d'Alphonse Daudet
La belle couverture d'album est trompeuse, je ne m'attendais pas à trouver un dessin aussi quelconque à l'intérieur. J'y reviendrai. Cette adaptation du célèbre recueil de nouvelles d'Alphonse Daudet n'est pas aussi académique que la version Les Lettres de mon Moulin par Mittéï chez Joker. Ici, les auteurs font des rajouts humoristiques et un peu modernes censés séduire les nouvelles générations ; heureusement, ce n'est pas trop appuyé et ça ne déforme pas trop la narration d'origine, mais je préfère néanmoins la version plus classique vue par Mittéï. Il y a aussi une autre raison à cela, c'est que je n'aime pas le dessin. C'est un dessin sans personnalité, qu'on dirait mal fini, inesthétique, peu attrayant et sans malice ; il aurait fallu justement un dessin à la Mitteï, plus savoureux, plus pétillant, et aux jolis contours, qui donnait une certaine vigueur aux personnages. Disons que ça m'a un peu gâché la lecture de ces histoires que j'ai souvent lues dans mes jeunes années. D'autre part, j'aurais plutôt mis cette Bd en conte plutôt qu'en aventure. Note réelle : 2,5/5.
Une île lointaine
J'ai retrouvé dans cet album un exotisme typique des années 30, qu'on voyait dans certains films français de cette époque, comme Macao l'enfer du jeu par exemple, sauf que là on est à Borneo, mais le principe reste le même, c'est un exotisme asiatique avec une faune interlope aux personnages pittoresques ou crapuleux, et des indigènes étranges. Le scénario est assez banal et convenu, le capitaine Drake est une sorte de clone de Corto Maltese, dans une aventure à la Corto Maltese, et le dessin de Vianello est dans une belle imitation de Hugo Pratt sur Corto Maltese, c'est un style dont il n'a jamais pu se détacher, il est vrai que d'être assistant d'un tel géant de la BD, ça doit marquer. En tout cas, son noir & blanc est superbe, il rattrappe un peu la banalité du récit, et accentue son aspect mystérieux. Un album sympathique mais pas inoubliable.
Aquarica
Tiens, voilà une coopération surprenante, pour deux auteurs dont je n’avais pas deviné les affinités. Ma curiosité était donc piquée. L’univers qu’ils développent s’inspire du « Moby Dick » de Melville, mais aussi de Jules Verne, même s’ils font aussi œuvre de création originale. L’histoire – telle que débutée dans ce tome (la série semble prévue en deux tomes) se laisse lire, même si le fantastique, le mystère insufflé dans les premières pages perd un peu de sa force au fur et à mesure que l’intrigue se développe, et que nous en apprenons plus sur le crabe géant et la jeune fille qui s’y trouvait. Je ne sais pas comment ça va être relancé, mais il faudrait clairement un bon coup de fouet pour la suite. Le dessin de Sokal est bon, même si les personnages sont un chouia trop statiques (j’ai juste trouvé un peu bizarres les yeux – surtout au travers des lunettes). La colorisation est très réussie je trouve. En résumé, du pas mal, mais je reste un peu sur ma faim, eu égard à mes attentes concernant ces deux auteurs. ***************************** Je viens de relire le tome inaugural et ai enchaîné avec le suivant, qui conclut ce diptyque. Je reste sur ma première impression, globalement positive, avec un je ne sais quoi de regrets, à propos d'une aventure certes belle, mais qui m'a semblé parfois manquer de souffle ou de poésie. Mais ça reste quand même des albums intéressants, et la lecture est agréable. Sokal est décédé avant la publication du second tome, et c'est son compère Schuiten qui l'a fini, prenant le relais au dessin. je ne suis pas fan du changement de dessinateur dans une série, a fortiori dans un même tome, mais nécessité faisant loi, ça passe ici (et le dessin de Schuiten, différent, est très beau - j'avais eu le même ressenti pour Le Passage de Vénus pour les mêmes raisons). Surtout, dans un dossier final, Schuiten présente son travail commun avec Sokal, leur grande amitié, et l'on comprend pourquoi il était naturel qu'il conclut - le travail préparatoire de Sokal ayant de toute façon été mené à son terme.
Macao
Je me retrouve en grande partie dans l’avis de Mac Arthur. J’ai préféré le premier tome, qui plante le décor, lance sur de multiples pistes, et qui joue sur des péripéties globalement crédibles. Le second est plus rythmé, mais l’intrigue y perd en profondeur, et la chute n’est pas forcément originale. En tout cas elle m’avait traversé l’esprit bien avant de la lire. J’ai pour le dessin un ressenti identique, mitigé. Il est globalement bon (techniquement en tout cas, car je le trouve impersonnel), dynamique, mais je n’ai pas accroché à la colorisation, sans nuance. Ce diptyque propose une lecture détente sans trop de surprises, mais dans le genre il y a clairement mieux. A vous de voir, mais il m’a un peu laissé sur ma faim. Note réelle 2,5/5.