Oui, c’est une série commerciale aux personnages caricaturaux, et aux couleurs criardes mais voilà, j’aime bien Largo Winch que je viens de relire dans son intégralité. La construction en diptyques est pratique, ça donne assez de pages pour développer une histoire et le changement d’épisode tous les deux tomes permet de reprendre la lecture sans avoir à tout relire depuis le début. Même si la qualité des intrigues est irrégulière, l’ensemble est plutôt bien écrit, cohérent et bien construit. Les personnages, à la fois attachants et horripilants, nous font voyager à travers le monde et le dessin nous offre quelques vues splendides sur des paysages et des sites historiques hors du commun. A par ça, on n’échappe pas à certains clichés un peu classiques comme le rôle que les auteurs font jouer aux femmes (de vrais James Bond girls), le pouvoir illimité de l’argent et le monde merveilleux de la finance dans lequel évoluent nos héros beaux, riches, courageux, séducteurs et invincibles. Point intéressant qui distingue positivement cette série : le décryptage de la finance internationale, c’est fou, on comprend tout ! Bref, une série sympa, pas prise de tête, feel good et qui vous assure un bon moment de lecture. Attention à ne pas multiplier les albums, la série va vraiment finir par perdre de son énergie et ça serait dommage.
Une belle surprise !!
J’y suis allé un peu à reculons, je suis rarement fan des albums collectifs. Ici ma crainte a été vite envolée, c’est réalisé avec grand talent.
Nous retrouvons autour de Tiburce Oger une sorte de dream team du genre western, on aura ses préférences mais l’ensemble des dessinateurs soignent leur partie, on en prend plein les yeux niveau graphisme.
Le scénariste de Gorn explore à travers de courts récits et avec ses différents acolytes plusieurs décennies du grand Ouest sauvage, avec comme liant une montre en or qui passe de mains en mains.
L’histoire démarre fin XVIIIème pour s’achever début XXème, tout y passe : les 1ères guerres indiennes, les caravanes, le pony express, les trappeurs, la guerre de sécession, la cavalerie … une sorte de best of de la période. Les différentes saynètes (de taille variable) ne se valent pas toutes mais dans l’ensemble j’ai trouvé que c’était fort réussi, avec souvent une chute appréciable.
Du bon boulot sur plus de 100 pages, un album très plaisant et charmeur malgré le peu d’attachement aux différents personnages rencontrés.
J’ai adoré ! Joel Alessandra joue avec les couleurs. La luminosité est magnifique. L’alternance des tons ocres et des tons bleus est fascinante. Les planches sont des aquarelles. Et même si les décors sont plutôt sommaires et le trait pas trop détaillé, la poésie et la sensualité qui se dégagent de ce récit mélo dramatique - un peu autobiographique - sont ensorcelantes. Oui oui ça prend aux tripes. Cela ne peut se lire que d’une traite bien évidement.
Un homme fuit ses responsabilités. Il ne veut pas s’impliquer dans une relation partagée. Il choisit la fuite. Il préfère décamper à toutes jambes au fin fond de l’Afrique pour plonger dans l’alcool et dans la solitude. Sa lâcheté va pourtant le rattraper. Cette expérience va lui ouvrir les yeux. Il va remonter la pente. Lentement. Jusqu’à la rédemption.
Voilà donc un délicieux album émouvant qui pourra provoquer quelques larmes.
Louis Renault, sa biographie.
Mais pas seulement sa biographie, c'est aussi un récit historique sur la première moitié du vingtième siècle et plus particulièrement sur le rôle de cet industriel dans les deux guerres mondiales avec deux résultats très différents, héros puis traître de la nation.
C'est la force de ce récit, savoir décortiquer la vie incroyable de cet homme tout en n'oubliant pas de poser le contexte historique et cela à son importance.
On va donc suivre les débuts du p'tit Louis
qui aime mettre les mains dans le cambouis, mais surtout un cerveau qui va révolutioner le monde de l'automobile avec son arbre mécanique qui transmet directement la puissance du moteur.
On va suivre ses premières courses automobiles, la création de son usine jusqu'à la grande guerre et le rôle qu'il va y jouer. Puis les années vingt et l'émergence d'André Citroën jusqu'à la crise de vingt-neuf. Et enfin les années trente, les années fastes jusqu'au conflit de 39/45.
Une narration où les voix off de personnes l'ayant côtoyé donne un ton singulier au récit et qui permet de découvrir un homme solitaire qui n'aura de cesse de faire grandir et prospérer son usine, un homme au caractère intransigeant, exigeant et pas facile à vivre. Mais un homme auquel je me suis attaché.
Un bd qui m'aura permis de découvrir un personnage hors du commun et qui m'aura instruit sur les dessous des deux conflits mondiaux.
Un dessin qui n'est pas forcément ma tasse de thé, mais il est efficace et il retranscrit à merveille les époques traversées. La colorisation est au diapason.
Une lecture enrichissante que je ne peux que conseiller.
Cécile Brun et Olivier Pichard nous proposent un ouvrage sur le Japon qui sort des sentiers battus. Je l'ai lu comme une sorte de récit en trompe-l’œil où il faut faire l'effort de voir ce qui est caché.
Les images stéréotypées sur le Japon sont tellement abondantes depuis quelques années que c'est comme un bol d'air pur de lire quelque chose d'original. Point de technologie high-tech, ni de villes surpeuplées, de Yakuza violent ou de love hotel pour Gaijin dans cette série.
C'est même tout le contraire que nous offrent les auteurs. Comme une farce du destin, l'objet déclencheur du récit est un vieux jouet en plastique sans grande valeur. L'argument du vendeur se rapproche du boniment d'un habile escroc mais Cécile est envoûtée par l'objet comme si elle devenait dépositaire d'une mission.
Car si le scénario peut paraître un peu banal avec cette suite de contes fantastiques, le dernier récit très touchant peut se comprendre comme l'aboutissement et la restitution de l'objet à son petit propriétaire premier.
Les auteurs font preuve d'un humour quand ils nous font vivre cette recherche de Yôkai traditionnels à travers les rencontres de personnes d'une ancienne génération à la façon dont les jeunes générations traquent les Pokemon avec leurs téléphones hyper sophistiqués.
C'est un niveau de lecture assez poétique qui me plaît bien.
Le graphisme est à l'identique. Presque minimaliste pour croquer nos deux occidentaux aventuriers mais très précis et soigné dès qu'il faut peindre les extérieurs champêtres ou les conteurs de légendes que le hasard met sur leur chemin.
Une oeuvre qui plaira aux vieux routards qui aimaient prendre le temps des rencontres dans les trains, les bus ou sur les sentiers de montagnes. Une invite à regarder autre chose que son écran de portable.
Bonne lecture
BD assez amusante. J'admire beaucoup l'humour de Cauvin avec cette femme de caractère. Il va de soi que cette BD est là pour que l'on se distraie dans la lecture. Mais le dessin est beau et les gags réussis. Je la conseille pour ceux qui s'ennuient.
Ohhhh mais c'est énorme ça !
C'est en somme une histoire simple... et complexe. Nous avons deux supposées sorcières, qui aidées par un gamin au coeur sur la main, essaient d'échapper à l'inquisition. Très vite les questions s'accumulent : qui sont-elles vraiment ? D'où viennent leurs pouvoirs ? Comment Georg les a-t-il sorties de leur prison ? Petit à petit on raccroche les wagons, on reconstitue le puzzle... Mais ce n'est pas facile, car Ongle et Pluie elles-mêmes ont oublié jusqu'à leur nom, leur vie d'avant, si tant est qu'elles en aient eu une... Le pauvre Georg, en butte avec ces questions constantes, essaie néanmoins d'aider ces deux malheureuses, armé de ses piètres talents et de sa gentillesse. Ce qui n'est pas facile. D'autant plus que le Mage lancé à leur poursuite, n'a aucune pitié, même si lui-même est en proie à des démons comparables à ceux de ses proies...
Le récit est incroyable, il brasse le traumatisme (j'ai RESSENTI physiquement la souffrance infinie des deux fuyardes), la rédemption et encense l'amitié, envers et contre tout. Les scènes où la tendresse qui lie ces trois personnages mais aussi leur séparation, la frustration de Georg, sont purement déchirantes. A la fin de ce premier volume Aniss El Hamouri laisse encore de nombreuses zones d'ombre au sujet de ses personnages, de leurs origines et de leur destin. Il y a plus de 200 pages, et on ne les voit pas passer, j'ai rarement connu une telle prouesse !
Graphiquement il y a du Sfar dans le style d'El Hamouri, mais dans une dimension différente, à la fois plus maîtrisée et plus torturée. Le tout est réalisé en bichromie, avec un brun savamment dosé. On eût pu croire qu'il utiliserait une autre couleur pour les scènes oniriques, mais elles sont dans les mêmes tons, respectant ainsi l'impression donnée par Ongle, que rêves et réalité sont difficilement différenciables, tellement l'horreur est présente partout...
Il va falloir attendre un an avant de lire la suite, espérons qu'elle sera à la hauteur de ce premier segment.
Je viens de relire l’intégrale … je garde le même ressenti. Une tuerie cet album !!
J’attendais pas grand chose de l’histoire, un spin-off sur un des catcheurs (El Diablo) croisés dans la série mère. Au final, je trouve ça plus réussi que la série d’origine, tous les voyants sont au vert pour me « hype ».
Un récit parfaitement construit de bout en bout, noir, dense, cohérent. C’est magnifiquement séquencé.
A travers le parcours de notre héros, de son plus jeune âge à la maturité, c’est tout un pan méconnu de l’Amérique (et Mexique) que l’on découvre. Chaque chapitre amène une nouvelle pierre à l’édifice, linéaire mais non redondant. Run dans sa préface propose même de marquer un petit temps d’arrêt entre les 6 chapitres, conseil judicieux tant le tout est d’une sacré richesse, des ambiances différentes qui se dégustent, une petite claque à chaque fois.
La violence n’a jamais quitté notre héros, une jeunesse sombre, prison, guerre des gangs, passage chez nos amis de Son of Anarchy, travailleur mexicain exploité … jusqu’à ce qu’il atteigne une certaine forme de plénitude. Un voyage semé d’embûches, très riche et plaisant à suivre.
L’autre bonne nouvelle (sans être maso), c’est que les claques se sont transformés en coup de poing avec la partie graphique. Je suis tombé amoureux du trait de Neyef que je découvrais, c’est fluide, détaillé, coloré … bref ça envoie grave du pâté !!
Je vais me jeter sur ses autres albums, il possède une patte efficace et originale, ses cadrages et couleurs aperçus dans la galerie de Hoka Hey ! m’ont subjugué.
Que dire de plus ?
Un album qui se suffit seul malgré sa ramification à l’univers Mutafukaz, vous n’êtes pas obligé de tout lire ou connaître.
Une édition réussie (encore) de la part d’Ankama, on a même le droit aux 6 couvertures des chapitres (parus au préalable indépendamment en format comics), chacune réalisée par un auteur de la maison (Run, Madoux, Singelin …).
Un prix relativement modique pour une telle densité et qualité, si vous aimez ce style, ne vous privez pas ;)
Coup de cœur !! et pas loin du culte à mes yeux, un album qui me comble.
La Commune de Paris, un événement assez mal connu auquel Tardi s’est intéressé pour construire cette série en quatre volumes. Alors que monte le mécontentement depuis les quartiers populaires de la ville, un cadavre de femme est repêché dans la Seine. Dans la main de la noyée, un œil de verre marqué du numéro 13.
A partir de ce fait divers, va se dérouler toute une série d’histoires personnelles qui vont mettre en action les personnages les plus variés. Horace Grondin, condamné à tort à 20 ans de bagne, cherche à retrouver l’auteur du meurtre pour lequel il a été banni. Il est l’un des personnages centraux du récit. Le capitaine Tarpagnan, l’auteur supposé du meurtre, en est un autre. La chasse à l’homme qui s’engage se déroule sur fond d’émeutes populaires, de revendications sociales, de répression et de lâcheté des politiques. Histoires personnelles et récit des événements de la Commune s’entremêlent sans jamais perdre le lecteur. Les grands noms de l’époque croisent des anonymes galvanisés par l’espoir de lendemains qui chantent. Le vrai sujet de cette série est La Commune de Paris que Tardi traite de manière passionnée et partisane. Les personnages ont du caractère, ils défendent leurs opinions… on n’est pas dans un cours d’histoire et tant mieux !
J’avais lu « Le Cri du peuple », je viens de le relire et je trouve à nouveau le scénario bien construit, cohérent et bien écrit. Le récit historique entrecoupé de parcours personnels au fort caractère dramatique fonctionne très bien et le dessin est au rendez-vous. Le format à l’italienne offre une lecture confortable avec ses grandes cases. Un vrai coup de cœur pour les dialogues au langage fleuri. Tardi réussit à maintenir une variété des expressions argotiques tout au long de la série ce qui en fait quand même un bon paquet. Pour moi, le point faible est la longueur. Trois tomes auraient suffi pour éviter l’étirement du récit et la répétition des situations. Dommage ça a un peu gâché mon plaisir à relire cette histoire.
Cet album est une sorte de « digest », de revisite du travail sociologique réalisé par Didier Fassin. Sans doute le passage au médium BD va-t-il donner une plus forte visibilité à son propos. Ce qui serait souhaitable, tant les faits décrits sont graves, et, hélas, encore plus d’actualité près de quinze ans après la parution de son livre.
Plusieurs travers sont passés au crible : le désœuvrement porteur d’ennui et de réactions violente de pas mal de membres des BAC (qui sont au cœur de cette enquête), la « politique du chiffre » insufflée depuis Sarkozy (on va ainsi privilégier les flagrants délits de trafic et consommation de drogue, les contrôles de sans papiers potentiels) et, ce qui découle du précédent point, un racisme bien ancré, auquel s’ajoute un contrôle social : ce sont les quartiers défavorisés qui subissent le harcèlement régulier, les contrôles souvent illégaux, les insultes racistes, avec comme corollaire le développement des plaintes pour « outrage » lorsque les jeunes visés n’obtempèrent pas.
J’ai travaillé une douzaine d’année dans des « quartiers sensibles », et je peux directement témoigner de cette politique raciste et violente de la part de certaines unités d’intervention (BAC en tête), par les témoignages que je recueillais des jeunes à qui j’enseignais, mais aussi par certaines interventions scandaleuses auxquelles j’ai pu assister.
L’enquête montre bien que le développement des inégalités, le passage dans le droit commun de mesures d’exception relevant auparavant de l’état d’urgence, ont renforcé une gestion répressive, violente, des inégalités et des mouvements contestataires qu’elles entretiennent.
Les auteurs montrent aussi que certains policiers refusent cela, mais les unités de la BAC concentrent les plus déterminés « à en découdre » avec une jeunesse souvent issue de l’immigration, pauvre, éloignée de ce qu’ils ont connu (beaucoup des policiers qui interviennent ne connaissent pas les cités de banlieue avant d’y être affectés).
Le fossé se creusant entre la police et certains citoyens peut pourtant être comblé. Mais il faut une réelle volonté politique, changer les discours, et surtout travailler sur les causes : il est clair que si les habitants des quartiers huppés avaient droit au même traitement (contrôles au faciès, propos racistes, familiers, non-respect de la présomption d’innocence voire simplement de la loi), si l’on mettait proportionnellement autant de moyen à lutter contre la délinquance en col blanc, la fraude fiscale, la consommation de drogue dans les beaux quartiers, la justice sociale serait sans doute plus réelle. Et le rôle de la police plus juste et compris par tous.
Le dessin de Raynal est bon, efficace. Mais je ne sais pas s’il est adapté à ce genre de récit. Très statique, à mi-chemin entre le Fabcaro dernière manière et Vivès, il accentue une certaine déshumanisation – après tout c’est peut-être volontaire ?
La colorisation, très sombre, et sans trop de nuances, est, elle, raccord avec le sujet, et bien vue.
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Largo Winch
Oui, c’est une série commerciale aux personnages caricaturaux, et aux couleurs criardes mais voilà, j’aime bien Largo Winch que je viens de relire dans son intégralité. La construction en diptyques est pratique, ça donne assez de pages pour développer une histoire et le changement d’épisode tous les deux tomes permet de reprendre la lecture sans avoir à tout relire depuis le début. Même si la qualité des intrigues est irrégulière, l’ensemble est plutôt bien écrit, cohérent et bien construit. Les personnages, à la fois attachants et horripilants, nous font voyager à travers le monde et le dessin nous offre quelques vues splendides sur des paysages et des sites historiques hors du commun. A par ça, on n’échappe pas à certains clichés un peu classiques comme le rôle que les auteurs font jouer aux femmes (de vrais James Bond girls), le pouvoir illimité de l’argent et le monde merveilleux de la finance dans lequel évoluent nos héros beaux, riches, courageux, séducteurs et invincibles. Point intéressant qui distingue positivement cette série : le décryptage de la finance internationale, c’est fou, on comprend tout ! Bref, une série sympa, pas prise de tête, feel good et qui vous assure un bon moment de lecture. Attention à ne pas multiplier les albums, la série va vraiment finir par perdre de son énergie et ça serait dommage.
Go West young man
Une belle surprise !! J’y suis allé un peu à reculons, je suis rarement fan des albums collectifs. Ici ma crainte a été vite envolée, c’est réalisé avec grand talent. Nous retrouvons autour de Tiburce Oger une sorte de dream team du genre western, on aura ses préférences mais l’ensemble des dessinateurs soignent leur partie, on en prend plein les yeux niveau graphisme. Le scénariste de Gorn explore à travers de courts récits et avec ses différents acolytes plusieurs décennies du grand Ouest sauvage, avec comme liant une montre en or qui passe de mains en mains. L’histoire démarre fin XVIIIème pour s’achever début XXème, tout y passe : les 1ères guerres indiennes, les caravanes, le pony express, les trappeurs, la guerre de sécession, la cavalerie … une sorte de best of de la période. Les différentes saynètes (de taille variable) ne se valent pas toutes mais dans l’ensemble j’ai trouvé que c’était fort réussi, avec souvent une chute appréciable. Du bon boulot sur plus de 100 pages, un album très plaisant et charmeur malgré le peu d’attachement aux différents personnages rencontrés.
Dikhil
J’ai adoré ! Joel Alessandra joue avec les couleurs. La luminosité est magnifique. L’alternance des tons ocres et des tons bleus est fascinante. Les planches sont des aquarelles. Et même si les décors sont plutôt sommaires et le trait pas trop détaillé, la poésie et la sensualité qui se dégagent de ce récit mélo dramatique - un peu autobiographique - sont ensorcelantes. Oui oui ça prend aux tripes. Cela ne peut se lire que d’une traite bien évidement. Un homme fuit ses responsabilités. Il ne veut pas s’impliquer dans une relation partagée. Il choisit la fuite. Il préfère décamper à toutes jambes au fin fond de l’Afrique pour plonger dans l’alcool et dans la solitude. Sa lâcheté va pourtant le rattraper. Cette expérience va lui ouvrir les yeux. Il va remonter la pente. Lentement. Jusqu’à la rédemption. Voilà donc un délicieux album émouvant qui pourra provoquer quelques larmes.
Renault - Les Mains noires
Louis Renault, sa biographie. Mais pas seulement sa biographie, c'est aussi un récit historique sur la première moitié du vingtième siècle et plus particulièrement sur le rôle de cet industriel dans les deux guerres mondiales avec deux résultats très différents, héros puis traître de la nation. C'est la force de ce récit, savoir décortiquer la vie incroyable de cet homme tout en n'oubliant pas de poser le contexte historique et cela à son importance. On va donc suivre les débuts du p'tit Louis qui aime mettre les mains dans le cambouis, mais surtout un cerveau qui va révolutioner le monde de l'automobile avec son arbre mécanique qui transmet directement la puissance du moteur. On va suivre ses premières courses automobiles, la création de son usine jusqu'à la grande guerre et le rôle qu'il va y jouer. Puis les années vingt et l'émergence d'André Citroën jusqu'à la crise de vingt-neuf. Et enfin les années trente, les années fastes jusqu'au conflit de 39/45. Une narration où les voix off de personnes l'ayant côtoyé donne un ton singulier au récit et qui permet de découvrir un homme solitaire qui n'aura de cesse de faire grandir et prospérer son usine, un homme au caractère intransigeant, exigeant et pas facile à vivre. Mais un homme auquel je me suis attaché. Un bd qui m'aura permis de découvrir un personnage hors du commun et qui m'aura instruit sur les dessous des deux conflits mondiaux. Un dessin qui n'est pas forcément ma tasse de thé, mais il est efficace et il retranscrit à merveille les époques traversées. La colorisation est au diapason. Une lecture enrichissante que je ne peux que conseiller.
Onibi - Carnets du Japon invisible
Cécile Brun et Olivier Pichard nous proposent un ouvrage sur le Japon qui sort des sentiers battus. Je l'ai lu comme une sorte de récit en trompe-l’œil où il faut faire l'effort de voir ce qui est caché. Les images stéréotypées sur le Japon sont tellement abondantes depuis quelques années que c'est comme un bol d'air pur de lire quelque chose d'original. Point de technologie high-tech, ni de villes surpeuplées, de Yakuza violent ou de love hotel pour Gaijin dans cette série. C'est même tout le contraire que nous offrent les auteurs. Comme une farce du destin, l'objet déclencheur du récit est un vieux jouet en plastique sans grande valeur. L'argument du vendeur se rapproche du boniment d'un habile escroc mais Cécile est envoûtée par l'objet comme si elle devenait dépositaire d'une mission. Car si le scénario peut paraître un peu banal avec cette suite de contes fantastiques, le dernier récit très touchant peut se comprendre comme l'aboutissement et la restitution de l'objet à son petit propriétaire premier. Les auteurs font preuve d'un humour quand ils nous font vivre cette recherche de Yôkai traditionnels à travers les rencontres de personnes d'une ancienne génération à la façon dont les jeunes générations traquent les Pokemon avec leurs téléphones hyper sophistiqués. C'est un niveau de lecture assez poétique qui me plaît bien. Le graphisme est à l'identique. Presque minimaliste pour croquer nos deux occidentaux aventuriers mais très précis et soigné dès qu'il faut peindre les extérieurs champêtres ou les conteurs de légendes que le hasard met sur leur chemin. Une oeuvre qui plaira aux vieux routards qui aimaient prendre le temps des rencontres dans les trains, les bus ou sur les sentiers de montagnes. Une invite à regarder autre chose que son écran de portable. Bonne lecture
Taxi girl
BD assez amusante. J'admire beaucoup l'humour de Cauvin avec cette femme de caractère. Il va de soi que cette BD est là pour que l'on se distraie dans la lecture. Mais le dessin est beau et les gags réussis. Je la conseille pour ceux qui s'ennuient.
Ils brûlent
Ohhhh mais c'est énorme ça ! C'est en somme une histoire simple... et complexe. Nous avons deux supposées sorcières, qui aidées par un gamin au coeur sur la main, essaient d'échapper à l'inquisition. Très vite les questions s'accumulent : qui sont-elles vraiment ? D'où viennent leurs pouvoirs ? Comment Georg les a-t-il sorties de leur prison ? Petit à petit on raccroche les wagons, on reconstitue le puzzle... Mais ce n'est pas facile, car Ongle et Pluie elles-mêmes ont oublié jusqu'à leur nom, leur vie d'avant, si tant est qu'elles en aient eu une... Le pauvre Georg, en butte avec ces questions constantes, essaie néanmoins d'aider ces deux malheureuses, armé de ses piètres talents et de sa gentillesse. Ce qui n'est pas facile. D'autant plus que le Mage lancé à leur poursuite, n'a aucune pitié, même si lui-même est en proie à des démons comparables à ceux de ses proies... Le récit est incroyable, il brasse le traumatisme (j'ai RESSENTI physiquement la souffrance infinie des deux fuyardes), la rédemption et encense l'amitié, envers et contre tout. Les scènes où la tendresse qui lie ces trois personnages mais aussi leur séparation, la frustration de Georg, sont purement déchirantes. A la fin de ce premier volume Aniss El Hamouri laisse encore de nombreuses zones d'ombre au sujet de ses personnages, de leurs origines et de leur destin. Il y a plus de 200 pages, et on ne les voit pas passer, j'ai rarement connu une telle prouesse ! Graphiquement il y a du Sfar dans le style d'El Hamouri, mais dans une dimension différente, à la fois plus maîtrisée et plus torturée. Le tout est réalisé en bichromie, avec un brun savamment dosé. On eût pu croire qu'il utiliserait une autre couleur pour les scènes oniriques, mais elles sont dans les mêmes tons, respectant ainsi l'impression donnée par Ongle, que rêves et réalité sont difficilement différenciables, tellement l'horreur est présente partout... Il va falloir attendre un an avant de lire la suite, espérons qu'elle sera à la hauteur de ce premier segment.
Mutafukaz - Puta Madre
Je viens de relire l’intégrale … je garde le même ressenti. Une tuerie cet album !! J’attendais pas grand chose de l’histoire, un spin-off sur un des catcheurs (El Diablo) croisés dans la série mère. Au final, je trouve ça plus réussi que la série d’origine, tous les voyants sont au vert pour me « hype ». Un récit parfaitement construit de bout en bout, noir, dense, cohérent. C’est magnifiquement séquencé. A travers le parcours de notre héros, de son plus jeune âge à la maturité, c’est tout un pan méconnu de l’Amérique (et Mexique) que l’on découvre. Chaque chapitre amène une nouvelle pierre à l’édifice, linéaire mais non redondant. Run dans sa préface propose même de marquer un petit temps d’arrêt entre les 6 chapitres, conseil judicieux tant le tout est d’une sacré richesse, des ambiances différentes qui se dégustent, une petite claque à chaque fois. La violence n’a jamais quitté notre héros, une jeunesse sombre, prison, guerre des gangs, passage chez nos amis de Son of Anarchy, travailleur mexicain exploité … jusqu’à ce qu’il atteigne une certaine forme de plénitude. Un voyage semé d’embûches, très riche et plaisant à suivre. L’autre bonne nouvelle (sans être maso), c’est que les claques se sont transformés en coup de poing avec la partie graphique. Je suis tombé amoureux du trait de Neyef que je découvrais, c’est fluide, détaillé, coloré … bref ça envoie grave du pâté !! Je vais me jeter sur ses autres albums, il possède une patte efficace et originale, ses cadrages et couleurs aperçus dans la galerie de Hoka Hey ! m’ont subjugué. Que dire de plus ? Un album qui se suffit seul malgré sa ramification à l’univers Mutafukaz, vous n’êtes pas obligé de tout lire ou connaître. Une édition réussie (encore) de la part d’Ankama, on a même le droit aux 6 couvertures des chapitres (parus au préalable indépendamment en format comics), chacune réalisée par un auteur de la maison (Run, Madoux, Singelin …). Un prix relativement modique pour une telle densité et qualité, si vous aimez ce style, ne vous privez pas ;) Coup de cœur !! et pas loin du culte à mes yeux, un album qui me comble.
Le Cri du Peuple
La Commune de Paris, un événement assez mal connu auquel Tardi s’est intéressé pour construire cette série en quatre volumes. Alors que monte le mécontentement depuis les quartiers populaires de la ville, un cadavre de femme est repêché dans la Seine. Dans la main de la noyée, un œil de verre marqué du numéro 13. A partir de ce fait divers, va se dérouler toute une série d’histoires personnelles qui vont mettre en action les personnages les plus variés. Horace Grondin, condamné à tort à 20 ans de bagne, cherche à retrouver l’auteur du meurtre pour lequel il a été banni. Il est l’un des personnages centraux du récit. Le capitaine Tarpagnan, l’auteur supposé du meurtre, en est un autre. La chasse à l’homme qui s’engage se déroule sur fond d’émeutes populaires, de revendications sociales, de répression et de lâcheté des politiques. Histoires personnelles et récit des événements de la Commune s’entremêlent sans jamais perdre le lecteur. Les grands noms de l’époque croisent des anonymes galvanisés par l’espoir de lendemains qui chantent. Le vrai sujet de cette série est La Commune de Paris que Tardi traite de manière passionnée et partisane. Les personnages ont du caractère, ils défendent leurs opinions… on n’est pas dans un cours d’histoire et tant mieux ! J’avais lu « Le Cri du peuple », je viens de le relire et je trouve à nouveau le scénario bien construit, cohérent et bien écrit. Le récit historique entrecoupé de parcours personnels au fort caractère dramatique fonctionne très bien et le dessin est au rendez-vous. Le format à l’italienne offre une lecture confortable avec ses grandes cases. Un vrai coup de cœur pour les dialogues au langage fleuri. Tardi réussit à maintenir une variété des expressions argotiques tout au long de la série ce qui en fait quand même un bon paquet. Pour moi, le point faible est la longueur. Trois tomes auraient suffi pour éviter l’étirement du récit et la répétition des situations. Dommage ça a un peu gâché mon plaisir à relire cette histoire.
La Force de l'ordre
Cet album est une sorte de « digest », de revisite du travail sociologique réalisé par Didier Fassin. Sans doute le passage au médium BD va-t-il donner une plus forte visibilité à son propos. Ce qui serait souhaitable, tant les faits décrits sont graves, et, hélas, encore plus d’actualité près de quinze ans après la parution de son livre. Plusieurs travers sont passés au crible : le désœuvrement porteur d’ennui et de réactions violente de pas mal de membres des BAC (qui sont au cœur de cette enquête), la « politique du chiffre » insufflée depuis Sarkozy (on va ainsi privilégier les flagrants délits de trafic et consommation de drogue, les contrôles de sans papiers potentiels) et, ce qui découle du précédent point, un racisme bien ancré, auquel s’ajoute un contrôle social : ce sont les quartiers défavorisés qui subissent le harcèlement régulier, les contrôles souvent illégaux, les insultes racistes, avec comme corollaire le développement des plaintes pour « outrage » lorsque les jeunes visés n’obtempèrent pas. J’ai travaillé une douzaine d’année dans des « quartiers sensibles », et je peux directement témoigner de cette politique raciste et violente de la part de certaines unités d’intervention (BAC en tête), par les témoignages que je recueillais des jeunes à qui j’enseignais, mais aussi par certaines interventions scandaleuses auxquelles j’ai pu assister. L’enquête montre bien que le développement des inégalités, le passage dans le droit commun de mesures d’exception relevant auparavant de l’état d’urgence, ont renforcé une gestion répressive, violente, des inégalités et des mouvements contestataires qu’elles entretiennent. Les auteurs montrent aussi que certains policiers refusent cela, mais les unités de la BAC concentrent les plus déterminés « à en découdre » avec une jeunesse souvent issue de l’immigration, pauvre, éloignée de ce qu’ils ont connu (beaucoup des policiers qui interviennent ne connaissent pas les cités de banlieue avant d’y être affectés). Le fossé se creusant entre la police et certains citoyens peut pourtant être comblé. Mais il faut une réelle volonté politique, changer les discours, et surtout travailler sur les causes : il est clair que si les habitants des quartiers huppés avaient droit au même traitement (contrôles au faciès, propos racistes, familiers, non-respect de la présomption d’innocence voire simplement de la loi), si l’on mettait proportionnellement autant de moyen à lutter contre la délinquance en col blanc, la fraude fiscale, la consommation de drogue dans les beaux quartiers, la justice sociale serait sans doute plus réelle. Et le rôle de la police plus juste et compris par tous. Le dessin de Raynal est bon, efficace. Mais je ne sais pas s’il est adapté à ce genre de récit. Très statique, à mi-chemin entre le Fabcaro dernière manière et Vivès, il accentue une certaine déshumanisation – après tout c’est peut-être volontaire ? La colorisation, très sombre, et sans trop de nuances, est, elle, raccord avec le sujet, et bien vue.