A son tour Le Gall nous propose sa version de Spirou. Il use d’un trait relativement classique. Un petit air rétro, qui nous ramène presque à la période des années 1960, mais avec une sorte de ligne claire ayant quelques aspects modernes : j’ai bien aimé ce dessin.
Il situe l’essentiel de l’intrigue dans une époque plutôt atypique, le XIXème siècle. Du dépaysement donc. Dans le Paris populaire de 1865, avec un langage argotique fleuri.
L’intrigue elle-même se laisse lire, avec quelques longueurs et facilités vers la fin, lorsqu’il faut réparer et faire fonctionner la machine à voyager dans le temps responsable de cette aventure. J’ai aussi trouvé le personnage de Zorglub trop « gentil », sous employé, alors qu’il est souvent davantage le dynamiteur des histoires.
Une aventure sympathique.
Le dessin de Tarrin est classique pour la série, dynamique, il n’y a là rien d’étonnant ni d’extraordinaire, cest efficace.
C’est plutôt le scénario de Tarrin et Yann qui m’a quelque peu laissé sur ma faim. J’ai suivi l’histoire sans trop accrocher.
Seuls les échanges entre Seccotine et Fantasio (surtout au début), et le personnage un peu gaffeur de Fantasio lui-même, ont un peu relevé un plat que j’ai trouvé un peu fade. J’ai été étonné par l’aventure entre Spirou et Seccotine (« hors cadre », dans tous les sens du terme), qui ne m’a pas convaincu. L’aspect « sexué » de Spirou (un tabou ?) sera bien mieux et plus subtilement amené par Emile Bravo dans son Histoire d'un ingénu !
Note réelle 2,5.5.
Trondheim est dans le panthéon de mes auteurs BD préférés et j'aime beaucoup la ligne claire et un peu cartoon de Fabrice Parme. Les deux réunis dans un album hommage à l'une des séries préférées de ma jeunesse ne pouvaient donc que me réjouir. Et pourtant, je reste un peu sur ma faim...
Spirou et Fantasio se retrouvent sur un transatlantique en tant que groom d'une part, et paparazzi d'autre part. A bord, outre la faune de milliardaires excentriques et exigeants, se trouve également le Comte de Champignac et l'une de ses inventions extraordinaires destinée à sauver le bateau d'un éventuel naufrage. Mais forcément, ça va mal tourner et le navire et ses occupants vont se retrouver dans une situation particulièrement incongrue.
C'est une série d'aventure et d'humour.
Le dessin de Fabrice Parme y est de très bonne facture, plein de légèreté et de bonne humeur, avec l'aide des couleurs lumineuses de Véronique Dreher. La nature de ce graphisme et de son trait insiste toutefois plus sur la partie humoristique que sur le côté aventureux du récit.
L'intrigue, elle, s'entame sur la carte du pur humour, proche du dessin animé. Puis a lieu la catastrophe et à l'humour vient enfin s'ajouter pour de bon l'aventure. Celle-ci joue sur les propriétés de l'invention de Champignac et en explore les possibilités logiques. J'aime beaucoup ce concept que je retrouvais avec grand plaisir dans les aventures du Picsou de Don Rosa.
Toutefois, jamais je n'ai vraiment ri, et jamais non plus je n'ai vraiment pris l'aventure que vivent nos héros au sérieux. Elle n'arrive pas à prendre pour de bon son envol et la mayonnaise ne prend qu'à moitié.
Il manque quelque chose que je ne saurais définir et qui fait qu'au final, il en ressort une lecture certes divertissante sur le moment, mais trop vite oubliée malheureusement.
J'étais un peu inquiet vis-à-vis du Groom Vert-de-gris, et ce pour plusieurs raisons. La première était que, alors même que j'adore les anciennes oeuvres irrévérencieuses de Yann (notamment Les Innommables), j'ai bien du mal à apprécier pleinement ses scénarios les plus récents, à commencer par "Le Tombeau des Champignac", autre reprise de Spirou et Fantasio. Je craignais de voir dans cet album un récit artificiel destiné uniquement à la provocation, mettant Spirou et Fantasio dans des situations de collaboration ou de résistance violente vis-à-vis des Nazis qui dénatureraient les personnages. Je craignais également un abus de belgicismes, mais il faut avouer sur ce dernier point que ma crainte provenait du fait que j'avais parcouru sans le savoir quelques planches de la version Bruxelloise de cet album. Et je craignais enfin une trop grande profusion de clins d'oeil à l'univers de la BD.
Finalement, mes craintes n'étaient pas fondées. De toutes ces appréhensions, il reste de nombreuses traces mais elles sont bien moins rédhibitoires que je le redoutais.
De la provocation, il y en a : un Spirou qui fait brûler des soldats allemands en parlant de "cornet de fritz", plusieurs relations amoureuses avec embrassades pour Spirou et même passage à l'acte avec une belle allemande pour Fantasio, un Spirou en partie responsable de la défaite de résistants belges et d'un enlisement des alliés, et j'en passe...
Des belgicismes, il y en a aussi beaucoup, mais les dialogues restent naturels.
Des clins d'oeil, il y en a énormément et les citer tous serait fastidieux. Je craignais qu'ils soient intrusifs, artificiellement amenés et qu'ils gâchent la fluidité de la lecture. Mais au final, à part deux cases précises (celle de la brocante page 29 où les personnages d'autres BD sont partout et celle où Joe, Zette et le gamin du match de boxe de Spirou jettent une tomate sur Fantasio), je n'ai pas trouvé ces références dérangeantes et j'ai trouvé la majorité assez plaisantes.
Et pour finir, le scénario tient bien la route, original même si pas exempt de défauts.
Il est surtout joliment mis en valeur par un dessin très agréable. Le trait de Schwartz rappellera immanquablement celui de Chaland. Ce style rétro est très appréciable. Je regrette juste des compositions manquant parfois un peu de finesse et de clarté.
S'il fallait faire un reproche à cette BD, hélas, ce serait le manque de rythme et la confusion de son intrigue. L'album est dense et j'apprécie ce fait, mais le scénario donne l'impression de partir dans tous les sens, avec des changements de rythme un peu pénibles qui m'ont empêché d'y accrocher pour de bon. Plusieurs fois, sur la fin, j'ai cru que l'histoire arrivait à sa conclusion avant d'être relancée puis ralentie de nouveau puis relancée... Même la provocation voulue par Yann n'y a pas la saveur d'une vraie claque donnée à des personnages mythiques. Elle passe presque inaperçue dans la somme d'évènements et de personnages de ce récit.
Tant et si bien qu'il reste en mémoire davantage un gros ensemble de saynètes un peu confuses plutôt qu'un scénario mené avec brio de bout en bout.
Les 2 albums suivants, La Femme-Léopard et Le Maître des Hosties noires" reprennent les mêmes et recommencent une paire d'années plus tard.
Le premier tome est l'occasion pour les auteurs de faire une critique douce-amère de la Belgique d'après-guerre, avec l'influence dominante des américains et le souffle de la libération, mais c'est aussi l'occasion ici et surtout dans le second tome de confronter la Belgique à son passé colonialiste.
Là encore le dessin de Schwartz est tout à fait appréciable, et le scénario n'est pas mauvais. Il présente plusieurs saillies percutantes et des critiques bien vues. Mais comme dans le Groom vert-de-gris, j'ai trouvé l'intrigue globale et sa narration un peu trop confuse. Il se passe trop de choses et on perd assez facilement le fil rouge du récit au point d'en venir à avoir du mal à résumer le souvenir qu'il laisse en mémoire une fois terminé.
Mon avis est donc mitigé pour ces trois albums, quoique globalement positif car j'ai passé un moment de lecture pas désagréable.
Légère déception à la lecture de cet album. J'en attendais sans doute trop. J'attendais beaucoup de Yann dont les scénarios mêlant classicisme revisité et humour caustique avaient su quasiment tous me séduire. J'attendais beaucoup de Tarrin dont l'excellent trait me donnait l'impression d'être le seul à pouvoir redonner l'âme graphique de Franquin à Spirou et Fantasio. Mais au final, je suis partagé.
Le dessin est bon, dynamique, très proche de l'aspect visuel des meilleurs Spirou, quelque part entre Franquin et Janry, entre classicisme appliqué et moderne échevelé. Je regrette cependant un peu ses décors souvent légèrement vides, son trait épais qui ressort un peu trop gros dans le grand format des albums de la série, ses couleurs dont les dégradés informatiques ne me plaisent pas. Les personnages sont bons mais les décors me laissent une certaine impression de vide. Je n'ai pas su être plongé dans un univers graphique se suffisant à lui-même pour donner le cadre à l'histoire, ce sont plutôt l'histoire et l'action qui portent le récit et utilisent le dessin comme outil. C'est difficile à exprimer.
Ce ne sont pas de réels reproches, plutôt des histoires de goût, mais je m'attendais à quelque chose d'aussi éclatant et appliqué que les planches de Franquin, et le résultat me parait juste bon, pas épatant.
Quant au scénario, lui aussi me laisse une impression mitigé. Il m'a plu car il rappelle les grandes heures de Franquin : on y retrouve une aventure façon "les prisonniers du bouddha", avec de nombreuses références à la période de Zorglub, de nombreux champignaciens, le château de Champignac, Seccotine, etc.
Mais le récit m'a paru assez confus. En fait, il y a deux intrigues qui se jouent en parallèle : une autour du tombeau des Champignac, l'autre au Népal, et quand on y réfléchit, elles ne devraient strictement pas être liées logiquement et statistiquement parlant. Mais les auteurs choisissent tout de même de les rendre totalement complémentaires, ce qui parait trop artificiel à mes yeux.
Et puis il y a cette créature surnaturelle, la Sphinge, qui franchement ne me plait pas. Elle n'ajoute rien d'utile au récit et introduit une franche part de fantastique qui aurait pu être évitée. J'aurais davantage apprécié le récit sans elle, je pense. Cela donne le sentiment que Yann aurait aimé intégrer le Marsupilami à son récit mais, ne pouvant pas, il a créé un substitut.
Malgré ces reproches, j'ai bien aimé ma lecture, c'est prenant et divertissant. Il y a moins d'humour que je l'espérais mais certains passages sont amusants.
La petite "histoire" entre Spirou et Seccotine est assez particulière. Elle brise un carcan autour du personnage asexué de Spirou mais elle le rend également assez bêta du coup, complètement dominé par un Seccotine au tempérament d'allumeuse assez étonnant pour le personnage. J'apprécie moyennement même si je salue l'audace d'avoir intégré une telle chose dans ce récit. "Mais saperlipopette, saura-t-on jamais ce qu'il s'est vraiment passé dans la grotte ?!"
Avis mi-figue mi-raisin donc mais probablement dû au fait que j'attendais beaucoup de ce duo Yann/Tarrin. Le résultat est bon, c'est une bonne BD et une bonne lecture, qui redonne avec plaisir vie au monde de Spirou et Fantasio, mais ce n'est pas l'excellent cru que j'espérais.
Bon… baaahhh, je vais aller à contre-courant de la majorité des avis, cette fois. Non qu’il s’agisse d’un mauvais album mais il ne m’a en rien subjugué.
Le dessin de Mobidic est pourtant très agréable, de prime abord. Sa narration est tout sauf envahissante et laisse donc beaucoup d’espace pour de belles illustrations. Pourtant aucune planche ne m’a marqué et je garde cette impression d’un dessin bien mieux adapté pour l’animation que pour la bande dessinée. Mais c’est très lisible et donc agréable à suivre, et du coup si le scénario m’avait captivé, ce manque d’ampleur dans les vues d’ensemble ne m’aurait en rien gêné.
Sauf que le scénario ne m’a pas passionné. Il y a de bonnes idées comme celle de ce personnage qui va de communautés en communautés pour collecter le savoir ancien mais il y a aussi pas mal d’idées qui m’ont paru bien trop naïves pour me convaincre. Par ailleurs, je n'ai jamais réellement ressenti de tension dans le fil du récit (qui se veut quand même dramatique par plusieurs aspects) ni d'empathie pour ces personnages.
Donc voilà, je reste le cul entre deux chaises. L’album est réalisé avec soin et n’est certainement pas désagréable à lire mais il manque de profondeur dans son dessin (et surtout les vues d’ensemble) comme dans son scénario pour que j’en ressorte en me disant « wouaouw, quelle claque ! » Du coup, pour moi, ça reste pas mal et clairement, au vu des avis, j’en attendais plus.
L'Ecole buissonnière raconte l'histoire d'un petit groupe de lycéens durant l'hiver 1943. Alors que le Bac est pour dans quelques mois, ils subissent de plus en plus mal l'oppression exercée par l'occupant allemand et la police sous ses ordres. D'autant plus que l'un de leurs amis a une juive dans ses aïeux et se retrouve sur les listes de la Gestapo. Ils souhaiteraient du coup quitter la capitale, ne serait-ce que le temps des vacances de Noël, pour éviter à leur ami de se faire arrêter et aussi pour se retrouver loin de cette ambiance délétère. L'un des leurs, fils d'aristocrate, leur propose de passer Noël dans son château en Corrèze. Mais déjà qu'il est très difficile de circuler en France sans laisser-passer, les choses se précipitent quand le groupe attire encore plus l'attention sur eux suite à une altercation avec un soldat allemand éméché.
Ce récit se démarque de ceux classiques sur la seconde guerre mondiale dans le sens où l'on y suit de jeunes héros qui, à la base, n'ont rien de farouches soldats, d'espions ou de juifs en péril, même si l'un d'eux est considéré comme tel bien malgré lui. Ce sont des adolescents avec les mêmes préoccupations que pourraient avoir ceux de nos jours. Ils pensent à leurs études, à leurs vacances, à leurs amours et à leur amitié... et ce sont les circonstances qui vont les ramener à une rude réalité et finalement - je suis obligé de vous dévoiler une part de l'intrigue - à la Résistance armée. C'est ainsi intéressant de voir comment certains jeunes français sans histoire ont pu devenir des combattants résistants, vieillissant brutalement alors qu'ils risquent soudain leur vie et celles de leurs proches.
Le graphisme d'Alain Mounier est très appréciable. Il est peint en couleurs directes pour des planches soignées et agréables. Je lui reproche d'abuser des plans serrés sur les visages pour les nombreux dialogues, ce qui me gêne d'autant plus que certains d'entre eux se ressemblent vus ainsi de près et que j'ai parfois eu du mal à voir qui était qui. Mais pour le reste, les planches sont belles, surtout celles dans les décors enneigés.
L'histoire est intéressante et abordée par un angle assez original. Je lui trouve toutefois un côté abrupt dans sa narration qui, si elle n'est pas forcément décousue, se révèle dotée d'un rythme assez haché. On saute parfois brutalement d'une situation à la suivante, comme si on avait manqué un épisode intermédiaire ou comme si les choses se passaient trop vite pour être assimilées. C'est l'effet que ça m'a fait quand les jeunes héros arrivent en Corrèze et se retrouvent en un instant enrôlés dans la Résistance, puis l'impression que dès la nuit suivante ils sont en pleine action armée. Cela reflète sans doute le ressenti des protagonistes qui ont vu leur vie basculer du jour au lendemain, mais cela donne aussi l'impression d'avoir manquer une étape dans la narration pour bien comprendre ses enchainements.
Malgré ces reproches, j'ai apprécié l'état d'esprit de cette BD, son dessin de qualité, la plongée réaliste qu'elle permet dans l'atmosphère de cette époque, et l'émotion qu'elle réussit à dégager par moments, notamment sur sa conclusion. On ressent bien l'attachement entre ces jeunes amis, le fait qu'ils ont dû grandir trop vite, que leur jeunesse s'est évanouie brutalement et la peine que cela leur a causé. C'est bien fait et forcément on en vient à se demander comment on aurait réagi à leur place.
Zidrou et Frank Pé rendent à leur tour hommage aux aventures de Spirou et Fantasio. Franquin et Frank Pé partageaient une même passion pour la nature, les animaux, la vie simple et la beauté dans son ensemble. Alors quoi de mieux pour Zidrou que de faire revivre le personnage de Monsieur Noé, le gentil dresseur de Bravo, les Brothers, symbole de cet amour pour la vie animale dans les aventures de Spirou, et d'amener ce dernier à vivre une aventure à mi-chemin entre celle de la série Zoo e Frank Pé et la thématique de l'art comme moyen d'exprimer la vérité, le beau et d'embellir l'âme humaine ?
D'emblée l'album épate par sa beauté visuelle. Le dessin de Frank Pé y est à son sommet et chaque planche est superbe. Le trait est dynamique, les personnages sont vivants, les décors beaux et soignés et la mise en page travaillée. On y retrouve aussi la patte de Frank Pé, en particulier son maestria à dessiner des animaux. Sans parler des tableaux peints en couleurs directes qui sont des éléments de l'intrigue et qu'on trouve sur différentes pages de l'album.
Chaque planche vaut le coup d'oeil et on se prendrait à rêver d'aventures classiques de nos deux héros dessinées par cet auteur.
Maintenant, le scénario lui-même m'a moins emballé. Il mélange plusieurs thématiques sans vraiment trouver sa voie.
On y trouve le sujet de la paternité avec une adolescente difficile qui rappelle parfois trop fortement l'héroïne de Zoo. Mais celle-ci est tellement caricaturale dans son entêtement à jouer les ados boudeuses et râleuses qu'elle en devient pénible.
On y trouve le sujet de la cause animale et environnementale, une critique de la société capitaliste, une admiration pour l'art mais aussi pour le monde du spectacle. Mais tout cela est amené de manière presque nunuche par moment tant cela manque de finesse dans le ton. Le message parait tellement cousu de fil blanc qu'il rate sa cible. Et ça suinte tellement de bons sentiments que ça en devient poisseux.
Sans parler de l'intrigue parallèle autour de Champignac et d'une invasion mondiale de champignons noirs qui n'aboutit finalement à rien et semble parfaitement dispensable tant elle n'a aucun impact sur l'intrigue principale. J'imagine qu'elle tient de l'analogie mais là encore elle a raté sa cible car je n'en ai vu ni le message ni surtout l'intérêt.
Bref, même si elle se laisse lire, l'intrigue de cet album n'est malheureusement pas terrible.
C'est dommage car en contrepartie le graphisme est superbe. Et du coup, c'est lui qui fait toute la force de cet album, mais cela ne suffit pas à en faire une suffisamment bonne BD.
Si l’histoire se déroule à Téhéran, dans une famille iranienne, elle pourrait tout aussi bien se passer ailleurs, en France par exemple. En effet, à part les noms, et certains termes – culinaires en particulier, nous ne sommes pas trop dépaysés par cette intrigue.
Car c’est avant tout les bisbilles au sein de cette famille qui intéressent Gelsomino. Dès le départ le ton est donné : après la mort de sa femme, Amir voit ses enfants (sa fille Shirin et ses deux frères) se chamailler – comme toujours visiblement, anticiper leur part d’héritage, révélant tous un côté égoïste, petit bourgeois, mesquin et intéressé, qui les rend odieux à leur père (et pas mal antipathiques aux lecteurs !). Pas un pour rattraper les autres (voir la scène ou chacun vend en cachette sur un marché ce qu’il a volé aux autres – ils sont censés se partager comme héritage de la mère un terrain sur lequel se trouvent des arbres fruitiers, ce qui se finit par une bagarre générale)…
Le scénario surjoue un peu l’animosité plus ou moins larvée au sein de la fratrie, pour développer une comédie douce-amère (crise plus ou moins hystérique entre la sœur et ses deux frères), accompagnée de quelques petits gags récurrents (le gamin qui tire au lance pierre sur les fesses de son grand père Amir).
Et puis le récit prend un peu d’épaisseur dans le dernier tiers, où le drame s’invite, après que Shirin se soit expliquée avec son père. Shirin qui, contrairement à ses frères, s’avère moins monolithique, évolue, et devient bien plus attachante à la fin.
Petite comédie sans prétention au sein d’une famille iranienne, l’album se laisse lire agréablement.
Dans cette série, on suit le destin de Joàn, un gamin des rues colombiennes qui deviendra un membre important de la mafia puis un homme politique. Chaque tome concerne une période de sa vie : son enfance, ses dix-sept ans, son âge adulte et enfin son âge mûr.
L’histoire est assez captivante au début. La ville de Medellin est décrite d’une façon particulièrement glauque, et l’absence de tout sens moral du personnage principal (et de certains autres) est bien rendue.
Par la suite, c’est un peu moins passionnant, mais cela reste une lecture agréable. D’un côté, j’aime bien le fait que chaque tome effectue un saut important dans le temps, ce qui permet de faire avancer l’histoire de manière significative sans rallonger la sauce inutilement. De l’autre, j’ai trouvé certains passages un peu rapides, et on a parfois un peu l’impression de survoler certains arcs scénaristiques. Aussi bien en BD qu’en film ou en roman, les récits de mafiosos sont nombreux, et certains autres comprennent des scènes plus marquantes que les trois derniers tomes de cette série.
Comme cela a déjà été dit, certains cadrages sont originaux mais cela ne facilite pas toujours la lisibilité.
Au final, il s’agit tout de même d’une bonne série, que je prendrai plaisir à relire à l’occasion.
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Le Spirou de Frank Le Gall - Les Marais du Temps
A son tour Le Gall nous propose sa version de Spirou. Il use d’un trait relativement classique. Un petit air rétro, qui nous ramène presque à la période des années 1960, mais avec une sorte de ligne claire ayant quelques aspects modernes : j’ai bien aimé ce dessin. Il situe l’essentiel de l’intrigue dans une époque plutôt atypique, le XIXème siècle. Du dépaysement donc. Dans le Paris populaire de 1865, avec un langage argotique fleuri. L’intrigue elle-même se laisse lire, avec quelques longueurs et facilités vers la fin, lorsqu’il faut réparer et faire fonctionner la machine à voyager dans le temps responsable de cette aventure. J’ai aussi trouvé le personnage de Zorglub trop « gentil », sous employé, alors qu’il est souvent davantage le dynamiteur des histoires. Une aventure sympathique.
Le Spirou de Tarrin et Yann - Le Tombeau des Champignac
Le dessin de Tarrin est classique pour la série, dynamique, il n’y a là rien d’étonnant ni d’extraordinaire, cest efficace. C’est plutôt le scénario de Tarrin et Yann qui m’a quelque peu laissé sur ma faim. J’ai suivi l’histoire sans trop accrocher. Seuls les échanges entre Seccotine et Fantasio (surtout au début), et le personnage un peu gaffeur de Fantasio lui-même, ont un peu relevé un plat que j’ai trouvé un peu fade. J’ai été étonné par l’aventure entre Spirou et Seccotine (« hors cadre », dans tous les sens du terme), qui ne m’a pas convaincu. L’aspect « sexué » de Spirou (un tabou ?) sera bien mieux et plus subtilement amené par Emile Bravo dans son Histoire d'un ingénu ! Note réelle 2,5.5.
Le Spirou de Fabrice Parme et Lewis Trondheim - Panique en Atlantique
Trondheim est dans le panthéon de mes auteurs BD préférés et j'aime beaucoup la ligne claire et un peu cartoon de Fabrice Parme. Les deux réunis dans un album hommage à l'une des séries préférées de ma jeunesse ne pouvaient donc que me réjouir. Et pourtant, je reste un peu sur ma faim... Spirou et Fantasio se retrouvent sur un transatlantique en tant que groom d'une part, et paparazzi d'autre part. A bord, outre la faune de milliardaires excentriques et exigeants, se trouve également le Comte de Champignac et l'une de ses inventions extraordinaires destinée à sauver le bateau d'un éventuel naufrage. Mais forcément, ça va mal tourner et le navire et ses occupants vont se retrouver dans une situation particulièrement incongrue. C'est une série d'aventure et d'humour. Le dessin de Fabrice Parme y est de très bonne facture, plein de légèreté et de bonne humeur, avec l'aide des couleurs lumineuses de Véronique Dreher. La nature de ce graphisme et de son trait insiste toutefois plus sur la partie humoristique que sur le côté aventureux du récit. L'intrigue, elle, s'entame sur la carte du pur humour, proche du dessin animé. Puis a lieu la catastrophe et à l'humour vient enfin s'ajouter pour de bon l'aventure. Celle-ci joue sur les propriétés de l'invention de Champignac et en explore les possibilités logiques. J'aime beaucoup ce concept que je retrouvais avec grand plaisir dans les aventures du Picsou de Don Rosa. Toutefois, jamais je n'ai vraiment ri, et jamais non plus je n'ai vraiment pris l'aventure que vivent nos héros au sérieux. Elle n'arrive pas à prendre pour de bon son envol et la mayonnaise ne prend qu'à moitié. Il manque quelque chose que je ne saurais définir et qui fait qu'au final, il en ressort une lecture certes divertissante sur le moment, mais trop vite oubliée malheureusement.
Le Spirou de Schwartz et Yann
J'étais un peu inquiet vis-à-vis du Groom Vert-de-gris, et ce pour plusieurs raisons. La première était que, alors même que j'adore les anciennes oeuvres irrévérencieuses de Yann (notamment Les Innommables), j'ai bien du mal à apprécier pleinement ses scénarios les plus récents, à commencer par "Le Tombeau des Champignac", autre reprise de Spirou et Fantasio. Je craignais de voir dans cet album un récit artificiel destiné uniquement à la provocation, mettant Spirou et Fantasio dans des situations de collaboration ou de résistance violente vis-à-vis des Nazis qui dénatureraient les personnages. Je craignais également un abus de belgicismes, mais il faut avouer sur ce dernier point que ma crainte provenait du fait que j'avais parcouru sans le savoir quelques planches de la version Bruxelloise de cet album. Et je craignais enfin une trop grande profusion de clins d'oeil à l'univers de la BD. Finalement, mes craintes n'étaient pas fondées. De toutes ces appréhensions, il reste de nombreuses traces mais elles sont bien moins rédhibitoires que je le redoutais. De la provocation, il y en a : un Spirou qui fait brûler des soldats allemands en parlant de "cornet de fritz", plusieurs relations amoureuses avec embrassades pour Spirou et même passage à l'acte avec une belle allemande pour Fantasio, un Spirou en partie responsable de la défaite de résistants belges et d'un enlisement des alliés, et j'en passe... Des belgicismes, il y en a aussi beaucoup, mais les dialogues restent naturels. Des clins d'oeil, il y en a énormément et les citer tous serait fastidieux. Je craignais qu'ils soient intrusifs, artificiellement amenés et qu'ils gâchent la fluidité de la lecture. Mais au final, à part deux cases précises (celle de la brocante page 29 où les personnages d'autres BD sont partout et celle où Joe, Zette et le gamin du match de boxe de Spirou jettent une tomate sur Fantasio), je n'ai pas trouvé ces références dérangeantes et j'ai trouvé la majorité assez plaisantes. Et pour finir, le scénario tient bien la route, original même si pas exempt de défauts. Il est surtout joliment mis en valeur par un dessin très agréable. Le trait de Schwartz rappellera immanquablement celui de Chaland. Ce style rétro est très appréciable. Je regrette juste des compositions manquant parfois un peu de finesse et de clarté. S'il fallait faire un reproche à cette BD, hélas, ce serait le manque de rythme et la confusion de son intrigue. L'album est dense et j'apprécie ce fait, mais le scénario donne l'impression de partir dans tous les sens, avec des changements de rythme un peu pénibles qui m'ont empêché d'y accrocher pour de bon. Plusieurs fois, sur la fin, j'ai cru que l'histoire arrivait à sa conclusion avant d'être relancée puis ralentie de nouveau puis relancée... Même la provocation voulue par Yann n'y a pas la saveur d'une vraie claque donnée à des personnages mythiques. Elle passe presque inaperçue dans la somme d'évènements et de personnages de ce récit. Tant et si bien qu'il reste en mémoire davantage un gros ensemble de saynètes un peu confuses plutôt qu'un scénario mené avec brio de bout en bout. Les 2 albums suivants, La Femme-Léopard et Le Maître des Hosties noires" reprennent les mêmes et recommencent une paire d'années plus tard. Le premier tome est l'occasion pour les auteurs de faire une critique douce-amère de la Belgique d'après-guerre, avec l'influence dominante des américains et le souffle de la libération, mais c'est aussi l'occasion ici et surtout dans le second tome de confronter la Belgique à son passé colonialiste. Là encore le dessin de Schwartz est tout à fait appréciable, et le scénario n'est pas mauvais. Il présente plusieurs saillies percutantes et des critiques bien vues. Mais comme dans le Groom vert-de-gris, j'ai trouvé l'intrigue globale et sa narration un peu trop confuse. Il se passe trop de choses et on perd assez facilement le fil rouge du récit au point d'en venir à avoir du mal à résumer le souvenir qu'il laisse en mémoire une fois terminé. Mon avis est donc mitigé pour ces trois albums, quoique globalement positif car j'ai passé un moment de lecture pas désagréable.
Le Spirou de Tarrin et Yann - Le Tombeau des Champignac
Légère déception à la lecture de cet album. J'en attendais sans doute trop. J'attendais beaucoup de Yann dont les scénarios mêlant classicisme revisité et humour caustique avaient su quasiment tous me séduire. J'attendais beaucoup de Tarrin dont l'excellent trait me donnait l'impression d'être le seul à pouvoir redonner l'âme graphique de Franquin à Spirou et Fantasio. Mais au final, je suis partagé. Le dessin est bon, dynamique, très proche de l'aspect visuel des meilleurs Spirou, quelque part entre Franquin et Janry, entre classicisme appliqué et moderne échevelé. Je regrette cependant un peu ses décors souvent légèrement vides, son trait épais qui ressort un peu trop gros dans le grand format des albums de la série, ses couleurs dont les dégradés informatiques ne me plaisent pas. Les personnages sont bons mais les décors me laissent une certaine impression de vide. Je n'ai pas su être plongé dans un univers graphique se suffisant à lui-même pour donner le cadre à l'histoire, ce sont plutôt l'histoire et l'action qui portent le récit et utilisent le dessin comme outil. C'est difficile à exprimer. Ce ne sont pas de réels reproches, plutôt des histoires de goût, mais je m'attendais à quelque chose d'aussi éclatant et appliqué que les planches de Franquin, et le résultat me parait juste bon, pas épatant. Quant au scénario, lui aussi me laisse une impression mitigé. Il m'a plu car il rappelle les grandes heures de Franquin : on y retrouve une aventure façon "les prisonniers du bouddha", avec de nombreuses références à la période de Zorglub, de nombreux champignaciens, le château de Champignac, Seccotine, etc. Mais le récit m'a paru assez confus. En fait, il y a deux intrigues qui se jouent en parallèle : une autour du tombeau des Champignac, l'autre au Népal, et quand on y réfléchit, elles ne devraient strictement pas être liées logiquement et statistiquement parlant. Mais les auteurs choisissent tout de même de les rendre totalement complémentaires, ce qui parait trop artificiel à mes yeux. Et puis il y a cette créature surnaturelle, la Sphinge, qui franchement ne me plait pas. Elle n'ajoute rien d'utile au récit et introduit une franche part de fantastique qui aurait pu être évitée. J'aurais davantage apprécié le récit sans elle, je pense. Cela donne le sentiment que Yann aurait aimé intégrer le Marsupilami à son récit mais, ne pouvant pas, il a créé un substitut. Malgré ces reproches, j'ai bien aimé ma lecture, c'est prenant et divertissant. Il y a moins d'humour que je l'espérais mais certains passages sont amusants. La petite "histoire" entre Spirou et Seccotine est assez particulière. Elle brise un carcan autour du personnage asexué de Spirou mais elle le rend également assez bêta du coup, complètement dominé par un Seccotine au tempérament d'allumeuse assez étonnant pour le personnage. J'apprécie moyennement même si je salue l'audace d'avoir intégré une telle chose dans ce récit. "Mais saperlipopette, saura-t-on jamais ce qu'il s'est vraiment passé dans la grotte ?!" Avis mi-figue mi-raisin donc mais probablement dû au fait que j'attendais beaucoup de ce duo Yann/Tarrin. Le résultat est bon, c'est une bonne BD et une bonne lecture, qui redonne avec plaisir vie au monde de Spirou et Fantasio, mais ce n'est pas l'excellent cru que j'espérais.
Le Culte de Mars
Bon… baaahhh, je vais aller à contre-courant de la majorité des avis, cette fois. Non qu’il s’agisse d’un mauvais album mais il ne m’a en rien subjugué. Le dessin de Mobidic est pourtant très agréable, de prime abord. Sa narration est tout sauf envahissante et laisse donc beaucoup d’espace pour de belles illustrations. Pourtant aucune planche ne m’a marqué et je garde cette impression d’un dessin bien mieux adapté pour l’animation que pour la bande dessinée. Mais c’est très lisible et donc agréable à suivre, et du coup si le scénario m’avait captivé, ce manque d’ampleur dans les vues d’ensemble ne m’aurait en rien gêné. Sauf que le scénario ne m’a pas passionné. Il y a de bonnes idées comme celle de ce personnage qui va de communautés en communautés pour collecter le savoir ancien mais il y a aussi pas mal d’idées qui m’ont paru bien trop naïves pour me convaincre. Par ailleurs, je n'ai jamais réellement ressenti de tension dans le fil du récit (qui se veut quand même dramatique par plusieurs aspects) ni d'empathie pour ces personnages. Donc voilà, je reste le cul entre deux chaises. L’album est réalisé avec soin et n’est certainement pas désagréable à lire mais il manque de profondeur dans son dessin (et surtout les vues d’ensemble) comme dans son scénario pour que j’en ressorte en me disant « wouaouw, quelle claque ! » Du coup, pour moi, ça reste pas mal et clairement, au vu des avis, j’en attendais plus.
L'Ecole buissonnière
L'Ecole buissonnière raconte l'histoire d'un petit groupe de lycéens durant l'hiver 1943. Alors que le Bac est pour dans quelques mois, ils subissent de plus en plus mal l'oppression exercée par l'occupant allemand et la police sous ses ordres. D'autant plus que l'un de leurs amis a une juive dans ses aïeux et se retrouve sur les listes de la Gestapo. Ils souhaiteraient du coup quitter la capitale, ne serait-ce que le temps des vacances de Noël, pour éviter à leur ami de se faire arrêter et aussi pour se retrouver loin de cette ambiance délétère. L'un des leurs, fils d'aristocrate, leur propose de passer Noël dans son château en Corrèze. Mais déjà qu'il est très difficile de circuler en France sans laisser-passer, les choses se précipitent quand le groupe attire encore plus l'attention sur eux suite à une altercation avec un soldat allemand éméché. Ce récit se démarque de ceux classiques sur la seconde guerre mondiale dans le sens où l'on y suit de jeunes héros qui, à la base, n'ont rien de farouches soldats, d'espions ou de juifs en péril, même si l'un d'eux est considéré comme tel bien malgré lui. Ce sont des adolescents avec les mêmes préoccupations que pourraient avoir ceux de nos jours. Ils pensent à leurs études, à leurs vacances, à leurs amours et à leur amitié... et ce sont les circonstances qui vont les ramener à une rude réalité et finalement - je suis obligé de vous dévoiler une part de l'intrigue - à la Résistance armée. C'est ainsi intéressant de voir comment certains jeunes français sans histoire ont pu devenir des combattants résistants, vieillissant brutalement alors qu'ils risquent soudain leur vie et celles de leurs proches. Le graphisme d'Alain Mounier est très appréciable. Il est peint en couleurs directes pour des planches soignées et agréables. Je lui reproche d'abuser des plans serrés sur les visages pour les nombreux dialogues, ce qui me gêne d'autant plus que certains d'entre eux se ressemblent vus ainsi de près et que j'ai parfois eu du mal à voir qui était qui. Mais pour le reste, les planches sont belles, surtout celles dans les décors enneigés. L'histoire est intéressante et abordée par un angle assez original. Je lui trouve toutefois un côté abrupt dans sa narration qui, si elle n'est pas forcément décousue, se révèle dotée d'un rythme assez haché. On saute parfois brutalement d'une situation à la suivante, comme si on avait manqué un épisode intermédiaire ou comme si les choses se passaient trop vite pour être assimilées. C'est l'effet que ça m'a fait quand les jeunes héros arrivent en Corrèze et se retrouvent en un instant enrôlés dans la Résistance, puis l'impression que dès la nuit suivante ils sont en pleine action armée. Cela reflète sans doute le ressenti des protagonistes qui ont vu leur vie basculer du jour au lendemain, mais cela donne aussi l'impression d'avoir manquer une étape dans la narration pour bien comprendre ses enchainements. Malgré ces reproches, j'ai apprécié l'état d'esprit de cette BD, son dessin de qualité, la plongée réaliste qu'elle permet dans l'atmosphère de cette époque, et l'émotion qu'elle réussit à dégager par moments, notamment sur sa conclusion. On ressent bien l'attachement entre ces jeunes amis, le fait qu'ils ont dû grandir trop vite, que leur jeunesse s'est évanouie brutalement et la peine que cela leur a causé. C'est bien fait et forcément on en vient à se demander comment on aurait réagi à leur place.
Le Spirou de Frank Pé et Zidrou - La Lumière de Bornéo
Zidrou et Frank Pé rendent à leur tour hommage aux aventures de Spirou et Fantasio. Franquin et Frank Pé partageaient une même passion pour la nature, les animaux, la vie simple et la beauté dans son ensemble. Alors quoi de mieux pour Zidrou que de faire revivre le personnage de Monsieur Noé, le gentil dresseur de Bravo, les Brothers, symbole de cet amour pour la vie animale dans les aventures de Spirou, et d'amener ce dernier à vivre une aventure à mi-chemin entre celle de la série Zoo e Frank Pé et la thématique de l'art comme moyen d'exprimer la vérité, le beau et d'embellir l'âme humaine ? D'emblée l'album épate par sa beauté visuelle. Le dessin de Frank Pé y est à son sommet et chaque planche est superbe. Le trait est dynamique, les personnages sont vivants, les décors beaux et soignés et la mise en page travaillée. On y retrouve aussi la patte de Frank Pé, en particulier son maestria à dessiner des animaux. Sans parler des tableaux peints en couleurs directes qui sont des éléments de l'intrigue et qu'on trouve sur différentes pages de l'album. Chaque planche vaut le coup d'oeil et on se prendrait à rêver d'aventures classiques de nos deux héros dessinées par cet auteur. Maintenant, le scénario lui-même m'a moins emballé. Il mélange plusieurs thématiques sans vraiment trouver sa voie. On y trouve le sujet de la paternité avec une adolescente difficile qui rappelle parfois trop fortement l'héroïne de Zoo. Mais celle-ci est tellement caricaturale dans son entêtement à jouer les ados boudeuses et râleuses qu'elle en devient pénible. On y trouve le sujet de la cause animale et environnementale, une critique de la société capitaliste, une admiration pour l'art mais aussi pour le monde du spectacle. Mais tout cela est amené de manière presque nunuche par moment tant cela manque de finesse dans le ton. Le message parait tellement cousu de fil blanc qu'il rate sa cible. Et ça suinte tellement de bons sentiments que ça en devient poisseux. Sans parler de l'intrigue parallèle autour de Champignac et d'une invasion mondiale de champignons noirs qui n'aboutit finalement à rien et semble parfaitement dispensable tant elle n'a aucun impact sur l'intrigue principale. J'imagine qu'elle tient de l'analogie mais là encore elle a raté sa cible car je n'en ai vu ni le message ni surtout l'intérêt. Bref, même si elle se laisse lire, l'intrigue de cet album n'est malheureusement pas terrible. C'est dommage car en contrepartie le graphisme est superbe. Et du coup, c'est lui qui fait toute la force de cet album, mais cela ne suffit pas à en faire une suffisamment bonne BD.
Azizam
Si l’histoire se déroule à Téhéran, dans une famille iranienne, elle pourrait tout aussi bien se passer ailleurs, en France par exemple. En effet, à part les noms, et certains termes – culinaires en particulier, nous ne sommes pas trop dépaysés par cette intrigue. Car c’est avant tout les bisbilles au sein de cette famille qui intéressent Gelsomino. Dès le départ le ton est donné : après la mort de sa femme, Amir voit ses enfants (sa fille Shirin et ses deux frères) se chamailler – comme toujours visiblement, anticiper leur part d’héritage, révélant tous un côté égoïste, petit bourgeois, mesquin et intéressé, qui les rend odieux à leur père (et pas mal antipathiques aux lecteurs !). Pas un pour rattraper les autres (voir la scène ou chacun vend en cachette sur un marché ce qu’il a volé aux autres – ils sont censés se partager comme héritage de la mère un terrain sur lequel se trouvent des arbres fruitiers, ce qui se finit par une bagarre générale)… Le scénario surjoue un peu l’animosité plus ou moins larvée au sein de la fratrie, pour développer une comédie douce-amère (crise plus ou moins hystérique entre la sœur et ses deux frères), accompagnée de quelques petits gags récurrents (le gamin qui tire au lance pierre sur les fesses de son grand père Amir). Et puis le récit prend un peu d’épaisseur dans le dernier tiers, où le drame s’invite, après que Shirin se soit expliquée avec son père. Shirin qui, contrairement à ses frères, s’avère moins monolithique, évolue, et devient bien plus attachante à la fin. Petite comédie sans prétention au sein d’une famille iranienne, l’album se laisse lire agréablement.
Cuervos
Dans cette série, on suit le destin de Joàn, un gamin des rues colombiennes qui deviendra un membre important de la mafia puis un homme politique. Chaque tome concerne une période de sa vie : son enfance, ses dix-sept ans, son âge adulte et enfin son âge mûr. L’histoire est assez captivante au début. La ville de Medellin est décrite d’une façon particulièrement glauque, et l’absence de tout sens moral du personnage principal (et de certains autres) est bien rendue. Par la suite, c’est un peu moins passionnant, mais cela reste une lecture agréable. D’un côté, j’aime bien le fait que chaque tome effectue un saut important dans le temps, ce qui permet de faire avancer l’histoire de manière significative sans rallonger la sauce inutilement. De l’autre, j’ai trouvé certains passages un peu rapides, et on a parfois un peu l’impression de survoler certains arcs scénaristiques. Aussi bien en BD qu’en film ou en roman, les récits de mafiosos sont nombreux, et certains autres comprennent des scènes plus marquantes que les trois derniers tomes de cette série. Comme cela a déjà été dit, certains cadrages sont originaux mais cela ne facilite pas toujours la lisibilité. Au final, il s’agit tout de même d’une bonne série, que je prendrai plaisir à relire à l’occasion.