Les derniers avis (77 avis)

Par Simili
Note: 4/5
Couverture de la série Boule & Bill
Boule & Bill

Boule & Bill c'est le retour en enfance et le temps de l'innocence et des bêtises pas très graves. Autant je déteste Titeuf, autant j'ai une tendresse particulière pour cette série. Certainement parce qu'elle fut une des premières que j'ai lue et qui mettait en scène un enfant (et son chien, surtout son chien). La star de Boule & Bill c'est Bill, le chien, qui ne pense qu'avec son estomac, qui n'aime pas les chats et les bains. Et voilà on a fait a peu près fait le tour des gags car cela va surtout tourné autour des ces sujets Il y a donc effectivement une certaine redondance dans les gags. La série est produite depuis 1962 c'est donc inévitable. C'est d'ailleurs peut être là qu'est le problème, aurait-elle dû survivre à Roba ? Je n'en suis vraiment pas sûr. Graphiquement je les préfère de loin à Titeuf ou Kid Paddle que je trouve horribles. Niveau humour ma préférence va pour Le Petit Spirou (et l'inénarrable prof Mégot) Comme le dit gruizzli dans sa critique Boule & Bill c'est gentil, c'est rétro mais cela se lit toujours bien. Boule & Bill c'est la BD d'été à lire sur le transat à l'ombre du cerisier en attendant que Morphée vienne vous chercher pour une petite sieste Allez je met un 4, histoire de remonter la note car c'est impossible que "Boule & Bill" soit plus mauvais que Titeuf

25/07/2024 (modifier)
Par Jeïrhk
Note: 4/5
Couverture de la série Ma révérence
Ma révérence

4eme lecture d'une BD de Lupano et 4eme coup de cœur. Il faut dire que j'ai choisi les mieux notées jusqu'à présent. Un véritable régal cette lecture. Ça me fais penser à des films comme *Snatch* ou *Arnaques, Crimes et Botanique* avec un bon rythme du début à la fin, des personnages se retrouvant dans des situations loufoques, et une dernière partie qui ne laisse aucun répit. J'ai adoré la narration, les flashbacks, et la mise en page originale de certains passages. Gaby, le personnage que je pensais aimer le moins, m'a finalement beaucoup fait rire, surtout quand il s'imagine des choses dans l'appartement en venant chercher le gamin. Le style de dessin est plutôt sympa et colle bien avec cette ambiance de "quartier" et les grossièretés du langage. C'est une histoire de braquage du dimanche qui nous tient en haleine tout du long avec un final franchement sympathique.

25/07/2024 (modifier)
Par Simili
Note: 5/5
Couverture de la série Les Bidochon
Les Bidochon

Robert et Raymonde BIDOCHON, couple de français moyen que rien (alors vraiment rien) ne destinait à entrer au panthéon ... Et pourtant plus de 40 ans après leur apparition ils sont aujourd'hui les symboles de tous nos petits défauts (bon certains les cumulent plus que les autres) Car oui on a tous en nous une part de Robert ou de Raymonde même si on ne veut pas se l'avouer (et encore moins aux autres). Robert est lâche, prétentieux, de mauvaise foi (ah ça c'est pour ma pomme), condescendant, ... Raymonde est blasée, soumise, pas très futée, pas courageuse, ... Raymonde voulait un enfant, Robert a un problème de testicules. Heureusement pour la France ils ne se reproduiront pas, mais cela sera toute la tragédie de la vie de Raymonde ( et peut être pour nous aussi car j'aurai bien aimé les voir élever un enfant). Ce gag est hilarant, il met pourtant le doigt sur une vraie souffrance. Et c'est là tout le génie de Binet que d'arriver à nous faire rire de ça. Je trouve d'ailleurs que ce gag résume assez bien l'esprit "Bidochon". On peut arriver à rire de tout à condition que cela ne soit pas méchant. Le fait que Binet est choisi de découper ses albums par thème est géniale car elle évite selon moi une certaine redondance des gags, ce qui est salvateur dans ce genre de série, mais elle permet également au lecteur de se projeter dans la situation et donc d'analyser ses propres comportements. Cela lui permet également aussi de distiller une critique de la société de consommation dans laquelle on vit. Les Bidochon c'est un MUST HAVE pour tout Bédéphile qui se respecte

25/07/2024 (modifier)
Par Présence
Note: 5/5 Coups de coeur du moment
Couverture de la série Malcolm McLaren - L'Art du désastre
Malcolm McLaren - L'Art du désastre

T'as jamais rien compris au rock, Malc' ! T'es un type de la mode, c'est tout ! - Ce tome correspond à une biographie, celle Malcolm McLaren (1946-2006), homme d'affaires, producteur de disques et agent artistique britannique. le scénario est de Manu Leduc & Marie Eynard, les dessins de Lionel Chouin, les couleurs de Philippe Ory. L'ouvrage commence avec une introduction d'une page écrite par Jean-Charles de Castelbajac. Il se termine avec un texte d'une page évoquant le retour de la paternité de la musique des Sex Pistols aux membres du groupe, les techniques initiées par McLaren (le buzz, la trash culture et le viral), la suite de sa carrière après ce groupe, le décès de McLaren et la destruction des archives et des objets du punk par son fils quarante ans après, et cinq pages d'étude graphique du dessinateur. Cette BD compte quatre-vingt-douze planches. En Angleterre dans les années 1990, Stuart conduit sa voiture sur une route côtière de nuit. Il s'arrête devant un bunker sur lequel a été peint le nom de McLaren : il dépose Malcolm, enchanté de découvrir que son père vit dans un bunker. Un chien retenu par une chaîne au mur leur aboie dessus. Un homme sort du bunker, le fusil à la main et demande qui se trouve là. Son fils répond en s'identifiant : Malcolm McLaren. À Londres en 1947, dans le salon de l'appartement de Rose McLaren, la grand-mère, Stuart, le petit frère, regarde vaguement le poste de télévision : plus d'un million à regarder passer le carrosse de la princesse Elizabeth, future reine d'Angleterre, le mariage fastueux avec le prince Philip Mountbatten retransmis à la télévision pour la première fois. Malcolm joue aux petits soldats, organisant une bataille sur la table basse. Peter McLaren sonne à la porte et indique à sa belle-mère qu'il est venu voir ses fils. Celle-ci le met à la porte sans ménagement l'informant que ces fils n'ont pas besoin d'un père escroc. Londres en 1953. le jeune Malcolm prend des leçons de piano : le professeur n'en peut plus des dissonances, sa grand-mère est tout sourire, sa mère souffre en silence. le professeur rend son avis : il n'a jamais eu un élève qui massacrait la musique à ce point, il n'y a rien à en faire, désolé. Sa mère explique que Malcolm est atteint du syndrome de la Tourette, c'est pour ça qu'il a des mouvements si désordonnés. Une fois dehors, la grand-mère rassérène son petit-fils : il n'a pas d'autre syndrome que le talent pur. Il ne massacre pas la musique, il la dépoussière. Sa mère part vaquer à ses occupations en recommandant à Rose de ne pas le coucher trop tard car il va à l'école le lendemain. Une fois la mère éloignée, la grand-mère rassure Malcolm : sa mère est tellement vieille Angleterre ! Elle ne comprend rien, et Rose est sûr qu'il deviendra un artiste. Il en profite pour demander s'il faut vraiment qu'il aille à l'école, il trouve le maître trop autoritaire. La grand-mère répond qu'autant qu'il n'y aille pas : il faut toujours se méfier des gens autoritaires, ils veulent que rien ne change pour garder leur petit pouvoir. Malcolm lui demande pourquoi il y a autant de gens avec des télévisions ? Le texte de la quatrième couverture explicite l'enjeu de cette biographie, en commençant par la devise de l'insolent manager des New York Dolls et des Sex Pistols : Mieux vaut un échec retentissant qu'une réussite médiocre. Viennent ensuite les questions : commerçant, artiste, provocateur, visionnaire, pitre génial ? Et la réponse : Malcolm McLaren était tout cela à la fois. Cette biographie s'attache à la période de sa vie allant de son enfance et son adolescence, de 1946 à 1965 en une dizaine de pages, pour développer la période de 1965 à 1979, c'est-à-dire la mort et les obsèques de John Simon Ritchie. Au travers de cette biographie, le lecteur assiste à la naissance du punk par celui qui est présenté comme en étant l'instigateur, et même le concepteur. Pour pleinement apprécier cette biographie, il vaut mieux que le lecteur dispose déjà de quelques repères basiques sur ce mouvement, comme l'importance des Sex Pistols, celle des New York Dolls, et quelques noms en tête comme Steve Jones, Vivienne Westwood, Marc Zermatti (1945-2020). Il goûtera encore plus aux saveurs du récit s'il est familier avec le contexte culturel de l'époque, par exemple les films de Russ Meyer (ce dernier apparaissant le temps d'une page), la carrière de Richard Branson, les morceaux des Sex Pistols et les autres groupes infréquentables de l'époque comme les Ramones, ou leurs héritiers comme Siouxie and the Banshees, le célèbre passage des Sex Pistols à l'émission de Bill Grundy. Il vaut mieux qu'il ait déjà entendu parler de Sylvain Sylvain, Nick Kent, Bernie Rhodes, Jaimie Reid, Wally Nightingale, Jean-Charles de Castelbajac. Le récit commence en douceur par une courte introduction de Jean-Charles de Castelbajac qui loue les qualités de son ami : enfant du situationnisme et frère d'âme du mouvement viennois des actionnistes, créateur avec une vision transversale, une approche artistique du décloisonnement, le génie du détournement, c'est-à-dire un précurseur de l'hybridité des styles. La bande dessinée s'ouvre avec un dessin en pleine page montrant une route côtière, avec un encrage un peu rugueux, une composante descriptive qui incorpore du ressenti, sans rechercher une précision photographique. À sa manière, l'artiste respecte le principe de désacraliser la narration ou l'art. Il refuse d'astreindre ses personnages à des cadres rigides, en s'affranchissant des bordures de case. Il utilise des perspectives isométriques qu'il tord pour apporter un aspect de guingois à chaque endroit. Pour autant, il s'implique pour représenter des environnements conformes à l'Angleterre des années traversées. le lecteur peut ainsi regarder les grilles qui bordent les entresols des immeubles sur le trottoir, l'intérieur d'une boutique de spiritueux, les pierres tombales d'un cimetière, un grand atelier d'artistes, des grands magasins en période de Noël, le magasin de fripes de Vivienne Westwood, le CBGB, des clubs minables où se produisent les Sex Pistols en Angleterre et dans les états du sud des États-Unis, les bureaux spartiates de la société de McLaren, le bureau luxueux d'un ponte d'EMI, le plateau télé de Bill Grundy, un quartier ensoleillé de Los Angeles, les grilles de Buckingham Palace, des aéroports, des hôpitaux, etc. En surface, ces décors semblent représentés avec désinvolture, avec parfois quelques inexactitudes sur le mobilier ou l'électroménager (pas forcément des modèles d'époque) ; dans le fond, le lecteur n'oublie jamais où l'action se situe, et il reconnaît au premier coup d’œil les sites célèbres. Le dessinateur met en œuvre les mêmes principes pour représenter les personnages. Il se montre iconoclaste en simplifiant et en exagérant les traits de leur visage, en augmentant l'intensité des émotions, en leur donnant parfois des visages et des attitudes de gamins mal élevés et égocentriques. Difficile de prendre Malcolm McLaren au sérieux avec son nez en triangle pointu et sa chevelure volumineuse pleine d'arrondis enfantins. Dans le même temps, Lionel Chouin sait reproduire l'apparence des personnes connues avec fidélité, le lecteur les identifiant également du premier coup d'oeil, sauf peut-être Nick Kent avec une astérisque pour une note en bas de page indiquant, dans un élan d'autodérision, qu'il n'est pas très réussi. D'un côté, ces dessins jouant avec la caricature ont tendance à neutraliser les éléments les plus sordides ; de l'autre côté, le lecteur habitué à ces caractéristiques visuelles voit bien que de nombreux actes sont réprouvés par la morale, voire parfois par le bon sens. Dans le même temps, les auteurs ne mettent pas en scène les symptômes physiques de l'autodestruction : par exemple, ils ne montrent pas le perçage par épingle à nourrice. Cette forme de contradiction devient une évidence en page 39 quand Malcolm fuit une descente de police, tel un personnage de dessin animé, tout en poussant le landau dans lequel se trouve son fils. le lecteur peine à imaginer un adulte capable d'emmener son tout jeune fils dans une salle de concert où il a tout fait pour que ça dégénère. Les scénaristes ont donc choisi d'adopter le point de vue de Malcolm McLaren pour raconter sa vie, de fait il apparaît comme le personnage principal, et comme le héros de sa propre vie. Il n'y a pas de questionnement moral sur sa façon de créer, ou tout du moins de se conduire en artiste. La première dizaine de pages établit quelques faits dans la jeunesse de McLaren, sans les monter en épingle comme expliquant tout son parcours d'adulte. Pour autant, libre de le faire, le lecteur relie par lui-même les points, que ce soit le situationnisme de Guy Debord, ou la séquence d'ouverture qui trouve sa conclusion à la fin et qui permet de considérer les motivations profondes de McLaren sous un autre angle, si cela sied au lecteur. La bande dessinée suit rigoureusement le fil chronologique de la vie de cet agitateur. Qu'il en soit familier ou non, le lecteur découvre une vision très cohérente de ce monsieur bien peu recommandable, mais à la vision artistique novatrice et d'une grande solidité. Un créateur intègre dans son œuvre, avec un égocentrisme en rapport pour pouvoir réaliser son œuvre. Au panégyrique dressé par Castelbajac, le lecteur est tenté d'ajouter de nombreux qualificatifs peu flatteurs, plus en cohérence avec la notion de grande escroquerie du rock'n'roll, que ce soit son comportement vis-à-vis de son fils (reproduisant ainsi le schéma de son propre père, d'une autre manière), sa façon de gérer les revenus financiers des Sex Pistols, de se déclarer seule véritable force créatrice du groupe, de leur coller l'étiquette de musiciens en-dessous de tout, ou de manipuler John Ritchie en flattant sa fibre autodestructrice jusqu'à la conclusion logique et inéluctable. Pour un lecteur qui n'entretiendrait pas d'admiration particulière pour cet individu, la bande dessinée apparaît globalement à charge. Les Sex Pistols constituent une référence incontournable dans la culture populaire, que ce soit le slogan No Future, ou un comportement iconoclaste et autodestructeur sulfureux. Les auteurs montrent les coulisses en retraçant la vie de leur manager pendant ces années déterminantes. La narration visuelle apparaît également iconoclaste à sa manière, sans la dimension destructrice. Les choix opérés par les scénaristes donnent une impression d'évidence à chaque scène, que ce soit pour sa pertinence ou pour ce en quoi elle contribue à brosser le portrait de Malcolm McLaren. Les détails en passant finissent par produire un effet cumulé prouvant que les auteurs ont bien choisi un point de vue particulier qui apporte une dimension tragique et analytique à cet agitateur nihiliste.

25/07/2024 (modifier)
Par Gaston
Note: 4/5
Couverture de la série Des maux à dire
Des maux à dire

3.5 Un très bon one-shot qui parle de troubles mentaux. Je ne sais pas du tout si le récit est entièrement fictif ou si l'autrice s'est basé sur sa vie. Je ne connais pas du tout la biographie de cette dernière, mais tout ce que je peux dire c'est que le tout semble très réaliste. L'héroïne a une mère qui souffre d'un problème mental et qui ne sera diagnostic pendant des années. Du coup pendant des années elle va se comporter de façon bizarre et sa famille ne sait pas trop quoi faire. L'autrice brasse plusieurs thèmes et n'a pas peur de parler de sujets graves, notamment dans les scènes montrant l'enfance peu reluisante que la mère de l'héroïne a eu et qui explique en partie son comportement une fois devenue adulte. J'ai bien aimé le dessin qui est particulier, mais va très bien pour illustrer ce genre d'histoire.

24/07/2024 (modifier)
Par Présence
Note: 5/5 Coups de coeur du moment
Couverture de la série Semences
Semences

En prise directe sur l'inconscient collectif - Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre. Il regroupe les 4 épisodes de la minisérie, dont les deux premiers sont initialement parus en 2018, écrits par Ann Nocenti, dessinés, encrés et mis en couleurs par David Aja qui a également réalisé le lettrage. C'est la première fois que les épisodes 3 & 4 sont publiés. Elle est en train de me quitter. C'était une bonne fille, une bosseuse. On ne peut pas contrôler les filles sauvages et peut-être en attendais-tu trop d'elle. Astra est une journaliste : elle est train de prendre des photographies du mur de séparation entre la zone où elle habite, et la zone B dans laquelle les gens vivent sans technologie de communication. Elle pense au premier commandement du journalisme : il y a toujours deux facettes à chaque histoire. Elle estime qu'une approche plus juste serait de dire une cinquantaine de facettes. Elle voit un monsieur en train de regarder des photographies accrochées au mur : il explique qu'elle ne l'a pas quitté, mais qu'elle est partie pour sortir de ce monde pourri où elle était en train de devenir aveugle à forcer de travailler à regarder des écrans. Une enfant assise sur la bordure de trottoir, avec un masque à gaz sur le visage, indique que son père a fait le mur parce qu'il en avait assez de vivre dans l'ombre des gratte-ciels, dans l'ombre des nantis. Une autre jeune femme indique que son idiot de mari est passé de l'autre côté, comme un abruti parce qu'il n'est pas possible de revenir en arrière. Astra continue de prendre quelques photographies, puis elle les envoie à son journal Scoop Weekly, et se décide à rentrer car un message diffusé par haut-parleur annonce une neige acide. Dans une chambre d'hôtel à bas prix, un homme avec un masque à gaz intégral regarde une femme nue se lever du lit. Elle a un gros idéogramme tatoué dans le dos et elle rattache son soutien-gorge. Elle se rend aux toilettes en s'appuyant lourdement sur ses deux cannes anglaises. Ils papotent. Lola demande à Race pourquoi il la quitte s'il l'aime : il doit récolter des graines. Il remarque que ses doigts tremblent. Elle s'est rhabillée et installée sur son fauteuil roulant. Elle lui demande s'il veut son numéro de téléphone portable. Il répond qu'il n'a pas de téléphone et qu'ils ne fonctionnent pas là où il va. Elle en déduit qu'il se rend de l'autre côté du mur, et lui souhaite bonne chance avec ça. Astra est arrivé dans les bureaux du journal, et elle se rend dans celui de Gabrielle la rédactrice en cheffe. Cette dernière lui indique que son histoire de famille brisée par le passage de l'autre côté du mur est ennuyeuse. Astra répond que cette histoire Club Death sent l'intox. Pour Gabrielle peu importe : si elle peut annoncer qu'il existe une drogue qui permet de voir sa mort, alors les lecteurs achèteront quoi qu'il en soit. Il suffit parfois de publier une histoire pour que les gens lui apportent de la réalité : une histoire inventée de toute pièce devient un mythe, et le mythe devient réalité. Gabrielle a besoin d'un scoop et vite. En fonction de sa culture comics, le lecteur peut être attiré par cette histoire soit pour Ann Nocenti, scénariste d'épisodes inoubliables de Daredevil dessinés par John Romita junior et Al Williamson, de la série Kid Eternity avec Sean Phillips, de la série Ruby Falls avec Flavia Biondi, soit pour David Aja, dessinateur de la série Hawkeye de Matt Fraction, ou encore parce que ce récit est supervisé par Karen Berger. Il peut aussi être attiré par les pages après avoir feuilleter le tome, ou simplement par le texte de la quatrième de couverture, pourtant assez cryptique. de fait, la dynamique de la série est rapidement installée : un futur très proche, une ville séparée en deux avec une zone sans technologie informatique, la présence probable (mais pas certaines) d'extraterrestres, une journaliste qui doit rapporter un scoop, une prostituée en fauteuil roulant, un (peut-être) extraterrestre amoureux, sans oublier les abeilles et les graines. Oui, il y a bien une intrigue : l'enquête d'Astra sur les potentiels extraterrestres. Oui, l'intrigue est menée à son terme avec une résolution en bonne et due forme. La scénariste sait insuffler une personnalité dans chaque protagoniste, par le biais de petites touches, à la fois leurs réactions, à la fois quelques brèves réflexions dans des cartouches. La narration visuelle s'avère effectivement très séduisante. L'artiste a choisi d'utiliser une seule couleur : un vert de gris. Il s'en sert aussi bien pour ajouter des précisions sur les sources de lumières, renforçant ainsi l'ombrage, que pour faire apparaître des éléments non délimités par un trait encré, ou encore pour créer une zone de contraste accentuant l'effet de profondeur. Aja renforce de petites zones colorées en vert par l'équivalent d'une trame de points, renforçant l'impression d'ombre, dans un degré entre le noir complet, et le simple vert. du coup en première impression, les pages dégagent une ambiance un peu chargée, et un peu pesante, vaguement déprimante. du côté avec la technologie, ce n'est pas la joie. Dans la deuxième page, le lecteur découvre un haut mur avec des barbelés au sommet, un véhicule militaire blindé, la silhouette de deux soldats en train de patrouiller avec casque, gilet pare-balle et arme automatique. Il y a des graffitis sur le mur. Les murs de la chambre d'hôtel donnent l'impression d'un revêtement craquelé et moisi par endroit, avec également quelques tags. Il en va de même pour ceux de la salle de bain. La salle de rédaction de Scoop Weekly est plus propre, mais plongée dans une pénombre laissant supposer que certains éléments ont commencé à être gagnés par l'usure. Il en va de même pour le court passage dans la boîte de nuit, et dans la ruelle à l'arrière. le dessinateur a l'art et la manière pour laisser supposer que ce milieu urbain n'est plus de première jeunesse. Cela devient explicite en passant dans la zone B de l'autre côté du mur avec des bâtiments décrépits, des déchets, des gravats. L'artiste accentue encore cette sensation de malaise, ou plutôt de mal-être latent avec une maîtrise extraordinaire du niveau de détails, et avec la densité des zones de noir. À la simple lecture, les dessins donnent l'impression générale d'une photographie dont les contours auraient été simplifiés en augmentant les contrastes pour obtenir des traits un peu plus épais, et des surfaces intérieures dépourvues d'aspérité. Mais quand il laisse son regard s'attarder sur une case ou une autre, le lecteur prend conscience que l'artiste a su gommer les détails superficiels, donnant l'impression d'une grande précision, tout en allégeant la représentation, puis en passant en mode impressionniste avec la couleur et les trames. Cela conserve tout le naturel des personnages, tout en empêchant de les regarder avec insistance, comme si on les dévisageait longuement. Les pages combinent une apparence très claire, avec une impossibilité de saisir les menus détails, des cases ouvertes sur les paysages, avec une vision très cadrée dans des pages découpées sur une base de 9 cases de la même dimension, en 3 cases pour chacune des 3 bandes. Cette forme renforce la bizarrerie de certaines cases : une femme uniquement vêtue d'un soutien-gorge allant aux toilettes avec des cannes anglaises, un monsieur tout nu assis sur un fauteuil avec un masque à gaz lui couvrant le visage, un fusil dans la main gauche, pointé à la verticale, des agneaux dans un enclos, des porcs dans un autre, un squelette dans une combinaison d'astronaute dans un module s'étant écrasé sur une planète, etc. Sans oublier le motif géométrique récurrent de l'hexagone régulier. Il est possible que le lecteur finisse par se demander si l'assemblage de tous ces éléments hétéroclites a bien un sens. Finalement quel sens donner à la prolifération des abeilles ? Pourquoi des (peut-être) extraterrestres avec insémination de femmes et trépanation ? Et puis cette zone sans technologie de communication informatique ? Dans le même temps, cela provoque un ressenti déstabilisant, avec un peu de fin du monde (mais ce n'est pas sûr) des comportements bizarres, mais adaptés à l'environnement et à l'état de la société, des rapprochements saugrenus (par le biais du leitmotiv des hexagones), provoquant des résonnances avec le monde contemporain, et des artefacts culturels des quatre décennies passées. Ce n'est pas une écriture de type automatique, mais il y a une composante proche de l'onirisme. le lecteur peut être tenté de relever ces éléments presque superflus : la réflexion sur l'éthique du journalisme et les prophéties auto-réalisatrices, la neige acide qui renvoie à la pluie acide, le mur séparant la ville évoquant celui de Berlin avant 09 novembre 1989,la prolifération des abeilles à une époque où on craint leur disparition, l'éventualité de coloniser d'autres planètes mais réservée aux riches, la peur de la technologie informatique, le passage d'avions dans le ciel pouvant épandre toutes sortes de produits chimiques à l'insu de la population, et bien sûr les théories du complot telle que la présence d'extraterrestres sur Terre. Sous cet angle, cette bande dessinée renvoie le lecteur à un mélange d'informations et de rumeurs sensationnelles composant le bruit de fond de sa vie, ou en tout cas de celle de la scénariste. Une mythologie diffuse, invérifiable, dépassant l'individu, échappant à l'expérience directe, mais avec des effets très concrets au quotidien. En découvrant cette histoire, le lecteur espère bien qu'il s'agit d'une œuvre d'auteurs : il n'est pas déçu. Ann Nocenti raconte bien une histoire avec une intrigue, mais avant tout elle évoque une forme de mythologie du quotidien mêlant réalisations technologiques rendues possibles par une science inaccessible au commun des mortels, et rumeurs aussi improbables que séduisantes. David Aja parvient à donner corps à ces ressentis avec des dessins combinant extraordinairement une précision palpable, avec une liberté onirique, dans une mise en page rigide qui offre une grande liberté de mouvements, et une des environnements très ouverts.

24/07/2024 (modifier)
Par Présence
Note: 3/5
Couverture de la série Green Valley
Green Valley

Se battre contre l'inconnu - Ce tome contient une histoire complète indépendante de toute autre. Il regroupe les 9 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2016/2017, écrits par Max Landis, dessinés par Giuseppe Camuncoli, encrés par Cliff Rathburn et mis en couleurs par Jean-François Beaulieu. Tout a commencé par une erreur. Au cinquième siècle en Europe, deux cavaliers se tiennent en travers du chemin au milieu de collines : Berthus, avec son casque un peu trop grand, fait remarquer à Bertwald qu'il a l'air encore plus grognon que d'habitude. L'autre lui répond qu'Amalia avait fait cuire un cochon et qu'il avait prévu de faire autre chose de sa journée. Gulliver qui surveille l'horizon, les informe que les ennemis sont en vue. Une ligne continue de barbares de grande taille se tient devant eux, et leur chef Brutus Gargus de Pendergast s'avance au-devant des deux chevaliers et leur annonce ses intentions. Il est à la tête d'une armée forte de quatre cents hommes. Ils vont massacrer et violer leur peuple, sauf s'ils se rendent immédiatement et sans condition. Bertwald l'interrompt d'une voix calme et posée, sans hurler comme son interlocuteur : il le remercie de l'avoir informé de ses intentions, et lui indique que maintenant il faut qu'il opère un demi-tour et qu'il parte avec son armée, au risque de perdre son oreille gauche. Brutus charge, et une flèche lui arrache son oreille gauche. Brutus lance sa lourde hache sur Bertwald qui l'attrape au vol sans effort et sans coup férir. Brutus ordonne à ses archers de tirer : aucune ne touche les deux chevaliers qui les évitent ou les parent à l'épée. Brutus ordonne une retraite à ses hommes, et promet de tuer les deux chevaliers pour ce qu'ils viennent de lui faire subir. Les quatre chevaliers rentrent victorieux à Kelodia, acclamés par la foule : Bertwald, Berthus, Gulliver et Indrid l'archer. Les jeunes femmes leur sourient. Bertwald arrive devant chez lui, rentre et appelle sa compagne. Elle ne répond pas, il trouve un mot sur la porte. Il se rend au rendez-vous : un pique-nique nocturne en amoureux au bord du lac, avec un feu de camp, et le petit cochon cuit. Alors qu'elle ouvre le torchon qui le contient, elle fait un faux mouvement, et tombe la tête la première sur le cochon, renversant l'amphore de vin. Bertwald se met à rire et s'appuie sur le tronc d'arbre à ses côtés, sans se rendre compte que sa main pénètre dedans. Il vient de déranger un nid de guêpes et il en retire rapidement sa main alors qu'elle est déjà pleine de piqûres. Une fois que tout s'est calmé, il revient auprès d'Amalia qui enlève un aiguillon après l'autre. Ils commencent à discuter de manière sérieuse, et Bertwald explique qu'il se lasse de sa vie de chevalier et qu'il aimerait bien s'installer et élever une famille. Il finit par lui faire une demande en mariage. La cérémonie se déroule dans l'allégresse, avec un pincement de tristesse chez Berthus qui se rend compte que son fidèle ami ne sera plus à ses côtés pour se battre. Dans la nuit, les barbares attaquent la ville et la mettent à feu et à sang. La couverture annonce qu'il y a quelque chose de bizarre dans ce monde de chevaliers, sans expliciter ce qu'il en est. L'arrivée des barbares déstabilise le lecteur qui ne sait pas trop s'il faut comprendre qu'il s'agit d'une race surnaturelle, présentant un lien de parenté avec les gobelins, ou juste des individus de haute taille particulièrement costauds, une branche de l'humanité un peu éloignée de celle des chevaliers de Kelodia. de la même manière, il n'est pas trop certain si les quatre chevaliers sont des êtres humains normaux ou s'ils disposent de capacités qui expliquent que deux d'entre eux aient pu éviter une telle pluie de flèches. Les dessins sont dans un registre descriptif avec un niveau de détails satisfaisant, et ils ne donnent pas d'indication sur la possibilité de la magie dans ce monde. le lecteur se retrouve donc un état d'esprit où il ne sait pas trop sur quel pied danser, s'il doit s'attendre à un récit naturaliste, ou de type Fantasy. Il se retrouve donc très attentif à ce que disent les personnages, ce qu'ils font et ce que montrent les dessins pour être sûr de ne pas rater une indication. La reconstitution historique est agréable à regarder, mais sujette à caution pour les tenues vestimentaires et les cottes de maille. L'intérêt du récit ne réside donc pas dans l'évocation d'un temps passé. L'artiste sait montrer des éléments visuels qui présentent une cohérence visuelle pour un environnement qui possède sa logique interne. Au tiers du récit, une première créature impossible fait son apparition, puis un être humain qui ne devrait pas se trouver dans cet environnement. L'élément bizarre de la couverture prend alors tout son sens, et le lecteur comprend quelle est la nature de l'élément fantastique du récit. Il est visible que l'artiste prend plaisir à les dessiner et que le scénariste s'est également bien amusé à les imaginer. Il faut alors quelques pages au lecteur pour bien saisir la situation et la manière dont s'explique la présence de ces créatures et de Cyril. L'auteur a eu l'idée de présenter un récit de science-fiction très classique, mais avec un point de vue inhabituel, ce qui lui donne une nouvelle saveur. La narration visuelle est fort agréable dès le départ, grâce aux riches couleurs mises en place par Jean-François Beaulieu. Il ne sature pas ses couleurs. Il fait un usage soutenu des possibilités de dégradés d'une teinte, sans les lisser artificiellement. Ainsi il souligne et accentue le relief de chaque élément détouré. Ainsi les sols nus deviennent plus réalistes avec les dépressions diverses et variées. Les cieux sans nuages prennent des teintes différentes en fonction du moment de la journée et de la météo. Il utilise avec élégance les fonctionnalités de l'infographie pour les effets spéciaux : les flammes plus intenses, la pluie qui détrempe tout, les énergies qui crépitent, et la luminosité de la technologie inattendue. le lecteur prend les chevaliers en sympathie dès le départ également grâce à l'expressivité de leur visage, qui n'est pas exagérée, mais qui est parlante. Il est visible que Bertwald est ronchon, et que Berthus est contrarié par cet état d'esprit. En page 3, ils se détendent l'un et l'autre au cours de la conversation, ce qui se voit sur leur visage, sans que le scénariste ne doive le dire dans les dialogues ou dans un cartouche de texte. Par la suite, le lecteur ressent l'agressivité de Brutus Gargus, le contentement d'Indrid voyant l'intérêt que lui portent les jeunes femmes à son arrivée en ville, l'affection profonde que se portent Bertwald et Amalia, le plaisir que prend Gulliver à s'écouter parler, le découragement des chevaliers après l'attaque de Kelodia, l'espoir de Percival en réussissant à convaincre les chevaliers, l'esprit tordu et entièrement égoïste de Cyril, etc. Cette histoire est avant tout une grande aventure de quatre chevaliers au milieu du premier siècle, et l'artiste sait en tirer des visuels mémorables. le lecteur apprécie de pouvoir se promener aux côtés de ces chevaliers dans un environnement sauvage et souvent verdoyant, une région où il fait bon vivre. Il ressent la tristesse de ce même paysage sous la pluie, après la défaite. Il contemple l'armée de barbares, tous à cheval, mais pas en rangs bien ordonnés. Il constate le caractère impressionnant et aussi très banals des quatre chevaliers sur leur monture dans la grande artère de Kelodia. Il se désole devant le ravage des flammes lors de l'incendie de la cité. Il retient son souffle comme les chevaliers en découvrant la cité fortifiée de Perceval. Il perçoit la sauvagerie des créatures utilisées par Cyril. Il prend conscience que les images portent une grande partie de la narration, ce qui rend la lecture d'autant plus agréable et divertissante. Le scénariste part donc d'un groupe de quatre valeureux chevaliers qui défendent leur cité contre les envahisseurs et autres pilleurs. Ils ont déjà une longue expérience derrière eux et savent s'y prendre pour vaincre sans avoir à massacrer leurs ennemis. Malheureusement, la fureur des barbares dépasse leur l'élégante parade déployée par les chevaliers et la population de Kelodia en payent le prix fort. Ayant survécu tous les quatre, ils se voient offrir une occasion de redevenir les protecteurs d'une autre ville, rachetant ainsi leur échec. Mieux encore, ils doivent intervenir pour sauver la population d'un dangereux sorcier aux pouvoirs peu clairs, mais bien réels. Leur cause est donc tout acquise aux lecteurs, même s'il voit bien que leur personnalité ne sera pas très développée, juste confirmée pour ce qui concerne les vantardises de Gulliver. L'intrigue se déroule linéairement, permettant de découvrir qui est ce mystérieux sorcier, quel est la nature de son pouvoir et comment il arrivé là, les chevaliers luttant contre lui avec une compréhension limitée de sa magie, et pour cause. L'auteur met à profit son idée originale, pour une aventure très agréable et divertissante, avec des personnages bien sympathiques, des héros faillibles mais pas trop. C'est également la limite du récit qui n'a d'autre ambition que d'être un divertissement original, ce qui est déjà beaucoup. Le lecteur est intrigué par cette couverture qui promet une aventure de chevaliers, avec un ingrédient bizarre dedans. Il plonge dans un haut moyen âge peu historique, mais divertissant, avec des chevaliers d'expérience luttant contre un sorcier qu'ils ne comprennent pas. La narration visuelle est fluide et agréable, et l'intrigue linéaire et divertissante.

24/07/2024 (modifier)
Par Présence
Note: 4/5
Couverture de la série Lois Lane – Ennemie du peuple
Lois Lane – Ennemie du peuple

Les faits parlent à l'esprit, la vérité au cœur. - Ce tome contient une histoire complète, entretenant un lien avec la continuité de l'époque des titres Superman. Il regroupe les 12 épisodes, initialement parus en 2019/2020, écrits par Greg Rucka, dessinés et encrés par Mike Perkins, qui a également réalisé les couvertures principales. La mise en couleurs a été réalisée par Paul Mounts pour les épisodes 1 à 4 et 6, Gabriel Eltaeb pour les épisodes 5, 7 et 8 par Andy Troy pour les épisodes 9 à 12. Les couvertures alternatives ont été réalisées par Jenny Frison, Nicola Scott, Sana Takeda, Emanuela Lupacchino, Mirka Andolfo, Elena Casagrande, Yasmine Putri, Kamome Shirahama, Bilquis Evely, Tula Lotay, Joëlle Jones, Amanda Conner. À Chicago, dans le luxueux hôtel Drake, la femme de chambre Alejandra Ortiz est en train de faire le ménage dans la suite occupée par Lois Lane : elle fait le lit, elle prend bien soin de ne pas déranger tout ce qui traîne par terre ou sur les meubles. Elle laisse la télévision allumée en continue sur une chaine d'informations, tout en entendant le staccato du clavier alors que la journaliste rédige un article. Ayant achevé son article, elle s'adresse enfin à la femme de ménage en rappelant ses trois consignes : faire le lit, changer les serviettes, remplir le minibar, et ne pas prêter attention au bazar omniprésent. Une fois Ortiz partie, elle envoie son article à Perry White. Celui-ci l'appelle rapidement en lui reprochant ses fautes d'orthographe, en lui posant des questions sur son article, sur la solidité de ses sources, si elle veut vraiment signer l'article de son nom ou si elle préfère qu'il soit attribué à l'équipe du journal. Il termine en l'informant du décès de la journaliste Mariska Voronova. La version officielle est qu'elle souffrait de dépression et qu'elle s'est suicidée. Cette version ne mentionne pas qu'elle avait pour habitude de critiquer le Kremlin. Au beau milieu de la nuit, Lois envoie un très court courriel : besoin de se voir, en mode Woodward. Peu de temps après, au beau milieu de la nuit, Lois Lane se retrouve dans un parking souterrain où elle rencontre un mystérieux individu. Elle lui explique que la journaliste Voronova a été retrouvée morte ce jour et qu'elle a la certitude que ce n'était pas un suicide. Voronova conservait des sauvegardes cachées et elle lui a avait confié leur localisation. Lane confie les documents permettant de les récupérer à son interlocuteur et lui demande de les ramener. Enfin elle rentre dans sa suite d'hôtel et se déshabille pour aller prendre une douche. Elle se rend compte avec plaisir qu'il y a déjà quelqu'un sous la douche et elle y rejoint son mari. Elle se réveille peu après six heures, et Clark est toujours à ses côtés : il la regardait dormir. Ils vont prendre un petit déjeuner ensemble, à l'extérieur. Clark a du mal à se contenir quand il surprend un homme murmurer une épithète injurieuse vis-à-vis de Lois parce qu'elle a embrassé Superman publiquement. À Moscou, un groupe de nervis est déjà en train de rechercher les clés USB de la journaliste. En 2017, l'éditeur DC Comics commence la publication de Mister Miracle de Tom King & Mitch Gerads en 12 numéros. le récit est un succès et l'éditeur décide de publier d'autres récits dans ce format, dont deux dérivés du personnage de Superman : celui-ci et Superman's Pal Jimmy Olsen: Who Killed Jimmy Olsen? de Matt Fraction & Steve Lieber. le début de l'histoire laisse supposer que Lois Lane va partir en guerre, ou du moins aller enquêter sur l'assassinat de sa consœur. Mais en fait, elle confie la récupération de la clé à une autre personne. Par la suite, il est question de malversations et de prévarication, d'affaires de corruption et de prises illégales d'intérêt. Mais en fait, il est question de tentative d'assassinat sur sa propre personne, ou peut-être sur celle d'un intermédiaire haut placé. Lois Lane doit également gérer sa relation avec son époux et ses capacités extraordinaires, ce que lui a dit le père de Clark, et ce que souhaite faire leur fils Jon. Mais en fait, c'est l'existence même de l'homme de main qu'elle emploie qui soulève des interrogations difficiles. Au bout de la moitié des épisodes, le lecteur n'est plus très sûr de l'histoire que raconte réellement le scénariste, entre allusions transparentes à la porte-parole du gouvernement du quarante-cinquième président des États-Unis, et continuité des aventures de Superman en 2020. D'un autre côté, les responsables éditoriaux ont su affecter un artiste unique tout le long de ces 12 épisodes, avec une approche réaliste et urbaine qui colle bien à cette ambiance d'enquête journalistique à haut risque. Il porte une attention soutenue aux différents environnements : la chambre d'hôtel et sa décoration, son ameublement, les piliers en béton et les murs nus du parking souterrain, la promenade à pied sur les quais à Chicago, la salle de conférence pour la conférence de presse de la porte-parole du gouvernement, l'appartement saccagé de Mariska Voronova, le bureau de rédacteur en chef de Perry White, les vues du ciel de Chicago quand Superman tient Lois dans ses bras, quelques bars et cafés, bien ou mal fréquentés, un cimetière où se déroule une cérémonie d'enterrement, un parloir, un plateau de télévision, etc. de la même manière, il soigne l'apparence des personnages, que ce soient les tenues de Lois Lane, des figurants civils, des militaires, des hommes de main, de Superman et de deux autres superhéros. le degré d'implication de l'artiste apparaît encore plus lors des séquences de combat physique : elles sont réfléchies, donnant à voir un enchaînement de coups logique et cohérent, avec une exagération mesurée pour les rendre plus spectaculaires. En y prêtant plus attention, le lecteur se rend également compte que les scènes de discussion bénéficient aussi d'un plan de prise de vue pensé, plus riche qu'un simple enchaînement de cases avec seulement des têtes en train de parler dans une alternance de champ et contrechamp. Les différents metteurs en couleurs œuvrent dans un registre naturaliste, avec une palette de couleurs souvent assombries. Jusqu'à l'épisode 6, le lecteur éprouve des difficultés à déterminer le fil directeur du récit. À l'évidence, ce n'est pas une enquête journalistique dépourvue de superhéros. La question de l'assassinat de la journaliste russe ne constitue pas le fil directeur du récit, voire disparaît même en cours de route. Avec l'épisode 6, celui de l'enterrement, le scénariste met au cœur de son récit un décès survenu dans les séries Superman, alors écrites par Brian Michael Bendis. Dans un premier temps, le lecteur peut n'y voir que le professionnalisme de l'auteur qui s'accommode des événements d'actualité pour Superman et donc son épouse. de la même manière, il se dit que les responsables éditoriaux sont bien accommodants de le laisser reprendre des éléments que Rucka a développé plus de dix ans plutôt, tels que la religion du crime dans la série hebdomadaire 52 (2006/2007), puis dans The Question: Five Books of Blood (2007), et de mettre en scène un de ses personnages fétiches, Renee Montoya, présente dans plusieurs séries qu'il a écrites. La deuxième moitié du récit s'avère encore plus inattendue avec une intrigue qui repose sur l'existence du multivers. Mais dans cet épisode 6… … Lois Lane confronte ses valeurs à celles de son père : c'est une véritable profession de foi Finalement, malgré la présence d'une superhéroïne en tant que gare du corps, malgré la présence en filigrane de Superman, malgré cette intrigue qui tourne autour de la présence d'individus issus d'un autre univers, l'histoire est bien focalisée sur Lois Lane, et pas simplement parce qu'elle est le personnage principal. Derrière l'apparence réaliste et adulte des dessins, le lecteur est déstabilisé par la présence d'éléments superhéros très premier degré avec costume moulant coloré, d'une science-fiction qui porte la marque des années passées. Ce n'est pas forcément ce qu'il attendait. Il voit bien que Greg Rucka s'amuse avec la porte-parole du gouvernement qui évoque l'aplomb de Sarah Huckabee Sanders, et la collusion entre le gouvernement et des intérêts financiers privés. Cela reste des évocations, sans devenir une analyse critique avec un questionnement de la liberté de la presse, des effets tangibles du quatrième pouvoir ou de la pandémie d'infox. Pourtant la dernière de l'histoire met en lumière le questionnement sur une facette du journalisme qui court tout du long : la recherche de la vérité. le scénariste se montre plus fin que prévu sur le thème des faits avérés et de la vérité. A priori, le lecteur s'attend à un bon polar sous forme d'enquête journalistique menée par l'héroïne. Il remarque bien le teeshirt porté par l'héroïne sous la couverture, mais en se disant qu'il s'agit juste d'attirer le client. Il trouve bien une narration visuelle dans un ton urbain assez réaliste et sombre. du coup, il s'interroge sur la pertinence d'éléments typiquement superhéros, en décalage avec son attente. Il faut alors qu'il accorde sa confiance au scénariste. Sous cette réserve, le récit révèle sa subtilité, à la fois en prise directe avec les éléments superhéros inévitables pour l'épouse de Superman, à la fois une étude de caractère sur la motivation de cette femme hors du commun.

24/07/2024 (modifier)
Par PAco
Note: 3/5
Couverture de la série Mission in the apocalypse
Mission in the apocalypse

Voici une nouvelle courte série post-apocalyptique prévue en 2 tomes. Haruo Iwamune nous propose de suivre le périple d'une jeune fille et de son drôle d'animal de compagnie (on dirait une sorte de Pikachu) à travers ce qui reste de la civilisation humaine. Son objectif est de tenter de retrouver des survivants et de décontaminer les zones qu'elle traverse. Mais les ruines qu'elle traverse semblent désespérément vides... On remarquera tout d'abord la splendide couverture que nous propose Delcourt, et qui donne très envie de découvrir ce qui se cache derrière. Une très belle invitation ! Bon, c'est loin d'être rose, l'humanité semble avoir été décimée par une virus assez radical, et notre jeune héroïne bien solitaire passe une grande partie de ses journées à incinérer les cadavres qu'elle découvre. Le dessin est agréable, surtout quand il s'agit des mornes ruines ou bâtisses qu'explore notre Saya Ishimitsu. On sent que l'auteur s'amuse et se plait à représenter de tels décors et leurs détails. Je suis par contre plus mitigé sur la représentation des visages que je trouve plutôt sommaires. Côté ambiance, on est plus proche de "Je suis une légende" que de Blame !. Le récit évolue au fil de courts chapitres qui ponctuent l'évolution de notre héroïne et qui nous font découvrir petit à petit son environnement. C'est assez lent, on est rarement dans l'action mais plutôt dans le contemplatif. Le résumé proposé "Une histoire où la solitude côtoie de somptueuses ruines" est des plus perspicace ! Reste qu'on aimerait qu'il se passe quand même un peu plus de choses ou que les révélations sur les points d'interrogations soient plus nombreuses ; la suite et fin du second tome nous en apprendra davantage je l'espère.

24/07/2024 (modifier)
Couverture de la série Pillages
Pillages

Triste récit que celui-ci. Triste mais essentiel car il est important que nous, occidentaux, prenions conscience des impacts sur la planète de notre mode de vie et de notre mode de consommation, que celui-ci concerne les énergies, l’alimentation ou n’importe quel autre domaine. Pillages s’intéresse à l’alimentation, et plus exactement à la surpêche telle qu’elle est pratiquée dans le golfe de Guinée. Les auteurs en analysent les raisons et les conséquences. Le documentaire est très bien conçu, malgré quelques redites, et permet de comprendre toute l’horreur et toute l’absurdité du système mondial mis en place. Destruction des milieux marins, assèchement des ressources d’une population (la condamnant à devoir émigrer pour pouvoir vivre), massacre d’espèces de poissons jusqu’à les menacer d’extinction… tout ça pour, en grande partie, nourrir des poissons élevés en pisciculture de l’autre côté de la planète. C’est tellement con, c’est tellement absurde ! Le récit permet de suivre plusieurs acteurs sur le terrain, depuis le petit pêcheur local finalement obligé de s’engager sur un chalutier pour survivre à un équipage engagé dans la défense des océans (les Sea Shepherd) en passant par le commandant d’un chalutier, un armateur ou un garde-côte local. Corruption, braconnage, esclavagisme… tous les travers humains sont ici mis en évidence, au nom du profit et de la loi du plus fort. L’exploit de la part des auteurs est de ne pas faire montre d’un manichéisme outrancier, expliquant à quel point les différents acteurs sont prisonniers d’un système destructeur. Le constat, par contre, est incroyablement triste tant la lutte parait disproportionnée. Pillages porte bien son nom et son propos devrait nous inciter à réfléchir. Est-ce le monde dont on rêve ? Je me rends compte que je n’ai pas parlé du dessin. Si celui-ci s’efface devant la force du propos, il n’en constitue pas moins un bon support. Le trait est agréable, la colorisation est soignée, les différents tableaux (peu nombreux et toujours pertinents) sont clairs, les personnages sont faciles à reconnaitre. Ce n’est pas le trait qui fait acheter ce genre de documentaire mais, dans le cas présent, il est d’une très belle qualité. Pour moi, il s’agit d’une lecture plus que recommandée. Il aura réussi, en tous les cas, à me dissuader de consommer du saumon pour quelques temps. Pas un coup de cœur, non. Plutôt un fameux coup de poing !

24/07/2024 (modifier)