Tiens, une nouvelle collection chez Delcourt ? En tout cas c’est le premier album que je lis sous ce label. Et c’est plutôt une heureuse découverte.
Le dessin n’est pas forcément extraordinaire (visages surtout), mais il est un tout cas fluide, et j’ai vraiment bien aimé l’utilisation du Noir et Blanc, avec un style proche de la carte à gratter pour les fonds parfois.
L’histoire elle-même est assez amusante. Le personnage principal est un gros cynique, adepte de l’humour noir, qui va être pris à son propre piège après une séance de spiritisme assez houleuse : un démon vient alors lui pourrir la vie.
Le dernier tiers de l’album bascule alors dans le fantastique, faisant même peu à peu disparaître l’humour noir (ce que je regrette un peu), au point qu’on pourrait presque placer cet album dans la catégorie « inclassable ». Seule l’extrême fin de l’album m’a paru un peu moins intéressante. Mais pour le reste, j’ai bien aimé ma lecture, que ce soit les joutes verbales de la première moitié, ou, par la suite, la lutte du héros contre le monstre qui l’obsède.
Note réelle 3,5/5.
C’est une bonne série d’aventure que nous concocté là les frères Stalner. Rien d’hyper original, mais presque tout est bien fait.
Que ce soit le Paris des apaches ou le bagne de Cayenne et la jungle guyanaise, ils ont su retranscrire une dure réalité, et décors et ambiance sont vraiment conformes à ce qu’on peut imaginer de ces univers au début du XXème siècle. Le dernier album, se déroulant en Italie (autour de Venise), détonne un peu au niveau du décor, sans doute est-ce moins âpre, mais c’est là-aussi bien fichu.
Les passages à Paris, lorsque Fabien fait preuve de débrouillardise et de cynisme en volant, sont proches dans l’esprit des bouquins de Georges Darien (en particulier « Le voleur »). Ecrivain qui au passage avait aussi écrit un beau livre sur un bagne (« Biribi »), mais lui localisé en Afrique.
L’intrigue se déroule autour d’un lourd secret, d’histoires de vengeance, avec les membres d’un puissant « syndicat du crime », sorte de société secrète dont les chefs ont une pièce d’échecs tatouées sur eux : chaque album nous rapproche du roi, chef énigmatique de ce groupe, que recherche Fabien, pour se venger de la mort de son père, mais aussi pour comprendre certaines choses…
Les facilités scénaristiques inhérentes à ce genre d’histoire mêlant complot, vengeance passent relativement bien. Même si le dernier tome accumule trop les rebondissements (les deux derniers albums sont d’ailleurs moins intéressants, auraient peut-être dû être condensés en un seul), et la fin m’est apparu improbable et décevante. Mais l’ensemble reste une série d’aventure de bonne facture.
Note réelle 3,5/5.
L'absurde n'est pas vraiment ma tasse de thé mais là, c'est expliqué par une maladie de l'héroïne qui lui ravage peu à peu le cerveau. Il faut dire qu'elle était soldat marine dans la guerre en Irak et que cela a a laissé des traces.
Elle vient se réfugier dans une décharge du Nevada appartenant à une veille dame assez bienveillante avec elle. Elle converse également avec un ami imaginaire qui n'est autre qu'un gorille mais en réalité cela cache d'autres souffrances bien plus intimes. On ne sait pas vraiment ce qui relève de la réalité ou du fantasme imaginaire.
Au début, je n'étais pas parti dans ce récit mais cela m'a séduit contre toute attente. Et dire que je ne suis pas fan de Terry Moore. Cependant, non seulement le graphisme en noir et blanc m'a plu mais cette histore avait un sens pour moi.
Une oeuvre parfois rigolote mais parfois assez touchante.
L’histoire se déroule dans une ville minière du « Grand Nord » (les noms de personnages et de lieu renvoient vers la Finlande, mais cela pourrait tout aussi bien se dérouler dans le Nord du Canada, où ce genre de choses s’est beaucoup développé ces derniers temps, avec les conséquences humaines et écologiques qu’on imagine).
Un homme débarque dans cet espace du bout du monde pour y travailler dans une mine où l’on extrait des schistes bitumineux. Pendant qu’il débute son travail, sa fille découvre la région, mais aussi certains de ses habitants, plus ou moins marginaux, et qui luttent contre les ravages écologiques de la mine.
Peu à peu une intrigue policière s’ajoute – tout en étant bien relié à ce thème – à la découverte de la folie que constitue l’extraction et le traitement (à base de produits chimiques très nocifs) de ce type de pétrole. Et l’on voit bien l’ambiguïté du système, puisqu’une partie de la population et la police, dépendant de l’entreprise pour vivre, se trouvent de facto complices de quelque chose qui les détruira à terme.
Si la chute de l’histoire peut paraître un chouia optimiste, elle ne fait que laisser des points de suspensions, comme la pollution, qui détruit et détruira des écosystèmes pendant encore des siècles, pour quelques barils (et royalties versés à de lointains actionnaires).
L’histoire est bien menée, simplement, à son rythme. Les personnages sont eux aussi simples, on ne sombre pas dans une caricature manichéenne. Et le dessin (particulier pour les visages) est lui aussi finalement intéressant, comme l’est le choix des couleurs (une économie de moyens au service d’une histoire simple et forte).
Un album à découvrir.
Note réelle 3,5/5.
Avec cette nouvelle publication des éditions Sarbacane, préparez-vous à en prendre plein les mirettes ! De très belle facture avec dos toilé et vernis sélectif (ce qui n’est pas surprenant quand on sait que l’éditeur est autant attaché au contenu qu’à la forme), doté d’une couverture splendide, cet album très personnel de l’italien Fabrizio Dori est à la croisée de l’art et de la littérature.
« Le Dieu vagabond », c’est une sorte de road trip mystique, où l’on suit la quête d’un satyre échoué dans le monde des humains, après avoir été puni par la déesse Artémis pour avoir pénétré dans son royaume en pourchassant une nymphe. Désormais alcoolique et à la rue, Eustis, ce dieu « inférieur », désormais simple clochard céleste, doit partager le triste quotidien des humains, dépourvu de la magie qui régnait jadis sur le monde avant que les dieux de l’Olympe ne soient remplacés par le nouveau dieu unique. Bientôt, il va se voir confier une mission par Hécate, la sœur d’Artémis. Cette mission pour le moins délicate consistera à sceller les retrouvailles de Séléné et de Pan, ce dernier étant mort trop tôt pour faire ses adieux à la déesse, sœur d’Artémis et d’Hécate. La récompense promise s’il réussit : se retrouver lui-même tel qu’il était et mettre ainsi fin à son long exil. C’est ainsi qu’équipé de son baluchon, il va prendre la route en compagnie d’un vieux professeur très myope.
Graphiquement, c’est une pure merveille. Fabrizio Dori nous enchante littéralement en jouant avec les styles et les couleurs, au risque de paraître trop disparate. Il y a pourtant un vrai parti pris, mais qui fonctionne parfaitement bien car en symbiose totale avec le récit, à savoir que ce que l’auteur a produit ici n’est rien de moins qu’une ode à la vie, à la beauté et à l’amour. Le lecteur pourra ainsi se délecter de ces illustrations extraordinaires qui sont, au-delà du style contemporain propre à Dori, tout autant de références à Van Gogh, Klimt et aux peintres romantiques du XIXe siècle.
Ainsi, l’auteur italien – dans le cas présent on doit pouvoir dire l’artiste – nous propose, avec ce très beau conte pour lequel il a puisé à pleines mains dans la mythologie grecque, de réenchanter le monde, notre triste monde auquel même Dori parvient à trouver une certaine poésie, quand il représente une banlieue hérissée de tours et de pylônes électriques géants… La couverture à elle seule, parfaite allégorie de notre époque, résume parfaitement le propos : assis devant sa tente Quechua, Eustis, l’ancien dieu-satyre devenu SDF, contemple l’air hagard, une boutanche de gros rouge à la main, l’immensité du ciel étoilé, souvenir résiduel de l’ancien monde, celui de la magie, de la beauté et de l’hédonisme. Ainsi, nous sentons-nous interpelés. Et si les clochards sur lesquels nous, clochards potentiels, préférons détourner le regard, étaient tout simplement des dieux déchus ? Et si pour eux le vin était juste le moyen d’oublier et d’embellir un tant soit peu la laideur qui nous environne et que nous ne voyons plus, ou que nous ne voulons plus voir ?
« Le Dieu vagabond » dégage une vraie beauté malgré quelques tout petits défauts - des regards pas toujours très expressifs par exemple ou des postures un peu balourdes, guère normées « BD » parce que sans doute, cela relève davantage de l’art pictural – Fabrizio expose dans des galeries de peinture… Mais ces « maladresses » sont d’autant plus touchantes qu’on a envie de les oublier, car qui dit œuvre poétique, dit albatros aux ailes trop grandes pour se mouvoir sur une Terre trop ferme, trop fermée. D’autant que le scénario est très bien construit, reste fluide, et que l’humour est aussi là pour empêcher à quiconque toute velléité de tomber dans le sérieux comme on tomberait dans le panneau.
Laissez vous emmener par ce petit chef d’œuvre, laissez infuser les merveilleuses images et la poésie de Fabrizio dans votre subconscient, des images inouïes qui pourraient bien vous aider à étoiler votre vie intérieure et vous accorder la légèreté – tout dépend évidemment de votre capacité à affronter le quotidien, à lutter contre sa pesanteur si puissante qui cloue nombre d’entre nous au sol sans que l’on en soit réellement conscient. « Les mythes sont faits pour être racontés, sans ça, le monde s’appauvrit et meurt. » Cette phrase d’Eustis synthétise à merveille la teneur du projet. Magique, je vous dis !
Il y a de cela une centaine d'année, un écrivain Lafciano Hearn a réunit une selection de contes fantastiques tirés de la tradition japonaise. Les mangakas ont repris six de ces histoires dans une adaptation assez réussie.
Il faut dire que cette présente oeuvre a été nominé au Will Eisner Award et a reçu le prix indépendant Publisher Book Awards en 2016. Je dois dire après lecture que c'est plutôt mérité. Certains de ces contes sont très prenants et la chute est vraiment étonnante (notamment pour la première nouvelle intitulée "de la diplomatie").
Ces contes ne sont d'ailleurs pas si macabres que cela mais ils demeurent fantastiques. Je trouve également que la couverture n'est guère représentative mais c'est pour mieux illustrer le masque traditionnel japonais.
Au final, des contes exotiques et fascinant qui nous font découvrir tout l'imaginaire de cette merveilleuse culture japonaise.
(Avis dédicacé pour mon fils actuellement à Tokyo ;) ).
Quel superbe album qui met très bien en valeur cette femme exceptionnelle et admirable qu'a été Simone Veil ! Non seulement son entrée au Panthéon en Juillet 2018 est justifiée mais son oeuvre est même pérénisée par la bande dessinée. C'est une véritable consécration.
On entre tout de suite dans le contexte de l'année 1974 où elle monte au créneau d'une assemblée nationale gauliste et machiste pour faire passer la loi sur la dépénalisation de l'avortement qui portera son nom. A chaque fois qu'une femme a mené un combat progressiste sur des questions de société, qu'elle soit de droit ou de gauche, elle se heurte à une puissante opposition totalement indigne. Je pense également à Christina Taubira sur le mariage pour tous où la France est devenue le 14ème pays au monde à l'autoriser.
Simone Veil a été une femme courageuse car elle n'a pas eu une vie très facile avec une adolescence marquée par les camps de la mort d'Auschwitz-Birkenau où elle perdra ses parents et son frère. On arrive à comprendre ce qu'elle ressent quand on la traite de nazi, elle qui a subie leur barbarie. On assistera à ces tristes épisodes qui sont fort émouvants. A noter que cela ne verse pas dans le pathologique grâce à une certaine dignité qui ne joue pas dans la surrenchère.
C'est une lecture fort utile pour toutes les générations. Cela nous permet par exemple de relativiser chaque chose dans un contexte de violence sociale que traverse notre pays. Un mot sur le dessin pour dire qu'il est assez limpide ce qui facilite la lecture. On reconnait par exemple très bien Jacques Chirac et le président Valéry Giscard d'Estaing qui ne sont pas vraiment monté au créneau pour défendre cette loi même s'ils l'ont soutenu.
Bref, une belle démonstration de cette femme extraordinaire et immortelle qui restera pour moi une héroïne des temps modernes !
Un éditeur de BD Jeunesse et grand public (genre Dupuis) découvre par hasard que le contenu d’un bouquin qu’il vient de publier (sans trop l’avoir lu) est en fait carrément trash (un peu comme si les histoires de « Bambi » avaient été soudainement parasitées par celles de Bang et son gang). Avec son assistant il part alors à la recherche de l’auteur, et des exemplaires en circulation, dans le but de les faire disparaître. Cela part alors rapidement dans le n’importe quoi, l’éditeur dézinguant tous ceux qu’il trouve sur son passage.
Cette partie de l’histoire – purement BD – occupe en tout un tiers de l’album, mais est entrecoupée par de nombreuses illustrations (une image page de droite, accompagnée d’une légende décalée page de gauche) plus ou moins trash, bien remplies d’humour noir, que l’auteur (qui n’a pas de nouvelles de son éditeur et croit avoir son aval, prépare pour un prochain potentiel album).
L’ensemble est inégal, certes, mais moi qui suis très friand de ce type d’humour, j’ai trouvé cet album marrant et globalement réussi. Cela se lit vite, mais les amateurs d’humour noir y trouveront leur compte.
Note réelle 3,5/5.
Pour moi, Michel Bussi c'était un auteur, que je n'ai jamais lu, un auteur dont la lecture des romans était réservée à la ménagère de moins de cinquante ans. Presque du roman de gare au sens péjoratif du terme.
Hop là, hop là, les aminches ! C'était, je m'en rends à présent compte, une opinion à la va vite, d'un gars qui ne s'arrêtait qu'à la notion marketing de la chose dont on nous rebattait les oreilles. Dire que Michel Bussi est un grand auteur, je n'en sais rien, mais si toutes ses œuvres sont du même tonneau, surtout en ce qui concerne le twist final, alors je dis chapeau bas.
Comme dit par mes petits camarades précédents, je me suis fait avoir comme un bleu, m'attendant à une gentillette conclusion où la vieille dame serait forcément la méchante... STOP !
Donc une histoire furieusement diabolique très bien mise en images avec cette colorisation qui sans en avoir l'air rend un très bel hommage au peintre de Giverny.
Je ne peux qu'aller dans le sens des avis précédents et vous recommander chaudement la lecture.
Amateurs de contes et de belles illustrations, cet album est fait pour vous !
Nathalie Ferlut qui semble avoir baigné dedans et vouloir nous le faire partager (je vous renvoie à son avant dernier album Andersen, les ombres d'un conteur) s'adjoint le savoir faire de Tamia Baudouin au dessin cette fois-ci. Et ma fois ça en jette !
D'une part, c'est beau mais c'est aussi très original ! Le parti pris graphique est audacieux ! Il n'y a qu'à voir l'objet : couverture et quatrième de couverture nous plongent tout de suite dans l'ambiance et m'ont tout de suite donné envie de me lancer dans sa lecture. Ça m'a rappelé la très belle collection Métamorphoses de chez Soleil.
Comtesse habite un cottage isolé de la campagne londonienne. Atteinte d'une étrange maladie, elle cherche à se réfugier dans ses rêves d'enfance. Mais ce pays merveilleux où Minon le Prince-Chat et Biche la fée la dorlotaient a doucement sombré dans les ténèbres... Comtesse cherche alors à comprendre pourquoi...
Ce conte pour adultes qui nous rappelle l'enfant que nous avons tous été et qu'on a parfois du mal à abandonner (et d'ailleurs pourquoi le faudrait-il ???) nous renvoie à tous ces mondes imaginaires qu'on affectionne toujours quelque part. On a tous un petit côté Alice tapis en nous qu'il faut savoir chérir et ressortir du chapeau à bon escient. Drapé dans un contexte très Romantique anglais du XIXe, cet album où fourmillent les clins d’œil et les références nous donne envie de replonger dans nos vieux contes classiques pour y retrouver une petite madeleine de Proust pleine de douceur.
A découvrir !
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White Spirit
Tiens, une nouvelle collection chez Delcourt ? En tout cas c’est le premier album que je lis sous ce label. Et c’est plutôt une heureuse découverte. Le dessin n’est pas forcément extraordinaire (visages surtout), mais il est un tout cas fluide, et j’ai vraiment bien aimé l’utilisation du Noir et Blanc, avec un style proche de la carte à gratter pour les fonds parfois. L’histoire elle-même est assez amusante. Le personnage principal est un gros cynique, adepte de l’humour noir, qui va être pris à son propre piège après une séance de spiritisme assez houleuse : un démon vient alors lui pourrir la vie. Le dernier tiers de l’album bascule alors dans le fantastique, faisant même peu à peu disparaître l’humour noir (ce que je regrette un peu), au point qu’on pourrait presque placer cet album dans la catégorie « inclassable ». Seule l’extrême fin de l’album m’a paru un peu moins intéressante. Mais pour le reste, j’ai bien aimé ma lecture, que ce soit les joutes verbales de la première moitié, ou, par la suite, la lutte du héros contre le monstre qui l’obsède. Note réelle 3,5/5.
Fabien M.
C’est une bonne série d’aventure que nous concocté là les frères Stalner. Rien d’hyper original, mais presque tout est bien fait. Que ce soit le Paris des apaches ou le bagne de Cayenne et la jungle guyanaise, ils ont su retranscrire une dure réalité, et décors et ambiance sont vraiment conformes à ce qu’on peut imaginer de ces univers au début du XXème siècle. Le dernier album, se déroulant en Italie (autour de Venise), détonne un peu au niveau du décor, sans doute est-ce moins âpre, mais c’est là-aussi bien fichu. Les passages à Paris, lorsque Fabien fait preuve de débrouillardise et de cynisme en volant, sont proches dans l’esprit des bouquins de Georges Darien (en particulier « Le voleur »). Ecrivain qui au passage avait aussi écrit un beau livre sur un bagne (« Biribi »), mais lui localisé en Afrique. L’intrigue se déroule autour d’un lourd secret, d’histoires de vengeance, avec les membres d’un puissant « syndicat du crime », sorte de société secrète dont les chefs ont une pièce d’échecs tatouées sur eux : chaque album nous rapproche du roi, chef énigmatique de ce groupe, que recherche Fabien, pour se venger de la mort de son père, mais aussi pour comprendre certaines choses… Les facilités scénaristiques inhérentes à ce genre d’histoire mêlant complot, vengeance passent relativement bien. Même si le dernier tome accumule trop les rebondissements (les deux derniers albums sont d’ailleurs moins intéressants, auraient peut-être dû être condensés en un seul), et la fin m’est apparu improbable et décevante. Mais l’ensemble reste une série d’aventure de bonne facture. Note réelle 3,5/5.
Motor Girl
L'absurde n'est pas vraiment ma tasse de thé mais là, c'est expliqué par une maladie de l'héroïne qui lui ravage peu à peu le cerveau. Il faut dire qu'elle était soldat marine dans la guerre en Irak et que cela a a laissé des traces. Elle vient se réfugier dans une décharge du Nevada appartenant à une veille dame assez bienveillante avec elle. Elle converse également avec un ami imaginaire qui n'est autre qu'un gorille mais en réalité cela cache d'autres souffrances bien plus intimes. On ne sait pas vraiment ce qui relève de la réalité ou du fantasme imaginaire. Au début, je n'étais pas parti dans ce récit mais cela m'a séduit contre toute attente. Et dire que je ne suis pas fan de Terry Moore. Cependant, non seulement le graphisme en noir et blanc m'a plu mais cette histore avait un sens pour moi. Une oeuvre parfois rigolote mais parfois assez touchante.
Akkinen - Zone toxique
L’histoire se déroule dans une ville minière du « Grand Nord » (les noms de personnages et de lieu renvoient vers la Finlande, mais cela pourrait tout aussi bien se dérouler dans le Nord du Canada, où ce genre de choses s’est beaucoup développé ces derniers temps, avec les conséquences humaines et écologiques qu’on imagine). Un homme débarque dans cet espace du bout du monde pour y travailler dans une mine où l’on extrait des schistes bitumineux. Pendant qu’il débute son travail, sa fille découvre la région, mais aussi certains de ses habitants, plus ou moins marginaux, et qui luttent contre les ravages écologiques de la mine. Peu à peu une intrigue policière s’ajoute – tout en étant bien relié à ce thème – à la découverte de la folie que constitue l’extraction et le traitement (à base de produits chimiques très nocifs) de ce type de pétrole. Et l’on voit bien l’ambiguïté du système, puisqu’une partie de la population et la police, dépendant de l’entreprise pour vivre, se trouvent de facto complices de quelque chose qui les détruira à terme. Si la chute de l’histoire peut paraître un chouia optimiste, elle ne fait que laisser des points de suspensions, comme la pollution, qui détruit et détruira des écosystèmes pendant encore des siècles, pour quelques barils (et royalties versés à de lointains actionnaires). L’histoire est bien menée, simplement, à son rythme. Les personnages sont eux aussi simples, on ne sombre pas dans une caricature manichéenne. Et le dessin (particulier pour les visages) est lui aussi finalement intéressant, comme l’est le choix des couleurs (une économie de moyens au service d’une histoire simple et forte). Un album à découvrir. Note réelle 3,5/5.
Le Dieu vagabond
Avec cette nouvelle publication des éditions Sarbacane, préparez-vous à en prendre plein les mirettes ! De très belle facture avec dos toilé et vernis sélectif (ce qui n’est pas surprenant quand on sait que l’éditeur est autant attaché au contenu qu’à la forme), doté d’une couverture splendide, cet album très personnel de l’italien Fabrizio Dori est à la croisée de l’art et de la littérature. « Le Dieu vagabond », c’est une sorte de road trip mystique, où l’on suit la quête d’un satyre échoué dans le monde des humains, après avoir été puni par la déesse Artémis pour avoir pénétré dans son royaume en pourchassant une nymphe. Désormais alcoolique et à la rue, Eustis, ce dieu « inférieur », désormais simple clochard céleste, doit partager le triste quotidien des humains, dépourvu de la magie qui régnait jadis sur le monde avant que les dieux de l’Olympe ne soient remplacés par le nouveau dieu unique. Bientôt, il va se voir confier une mission par Hécate, la sœur d’Artémis. Cette mission pour le moins délicate consistera à sceller les retrouvailles de Séléné et de Pan, ce dernier étant mort trop tôt pour faire ses adieux à la déesse, sœur d’Artémis et d’Hécate. La récompense promise s’il réussit : se retrouver lui-même tel qu’il était et mettre ainsi fin à son long exil. C’est ainsi qu’équipé de son baluchon, il va prendre la route en compagnie d’un vieux professeur très myope. Graphiquement, c’est une pure merveille. Fabrizio Dori nous enchante littéralement en jouant avec les styles et les couleurs, au risque de paraître trop disparate. Il y a pourtant un vrai parti pris, mais qui fonctionne parfaitement bien car en symbiose totale avec le récit, à savoir que ce que l’auteur a produit ici n’est rien de moins qu’une ode à la vie, à la beauté et à l’amour. Le lecteur pourra ainsi se délecter de ces illustrations extraordinaires qui sont, au-delà du style contemporain propre à Dori, tout autant de références à Van Gogh, Klimt et aux peintres romantiques du XIXe siècle. Ainsi, l’auteur italien – dans le cas présent on doit pouvoir dire l’artiste – nous propose, avec ce très beau conte pour lequel il a puisé à pleines mains dans la mythologie grecque, de réenchanter le monde, notre triste monde auquel même Dori parvient à trouver une certaine poésie, quand il représente une banlieue hérissée de tours et de pylônes électriques géants… La couverture à elle seule, parfaite allégorie de notre époque, résume parfaitement le propos : assis devant sa tente Quechua, Eustis, l’ancien dieu-satyre devenu SDF, contemple l’air hagard, une boutanche de gros rouge à la main, l’immensité du ciel étoilé, souvenir résiduel de l’ancien monde, celui de la magie, de la beauté et de l’hédonisme. Ainsi, nous sentons-nous interpelés. Et si les clochards sur lesquels nous, clochards potentiels, préférons détourner le regard, étaient tout simplement des dieux déchus ? Et si pour eux le vin était juste le moyen d’oublier et d’embellir un tant soit peu la laideur qui nous environne et que nous ne voyons plus, ou que nous ne voulons plus voir ? « Le Dieu vagabond » dégage une vraie beauté malgré quelques tout petits défauts - des regards pas toujours très expressifs par exemple ou des postures un peu balourdes, guère normées « BD » parce que sans doute, cela relève davantage de l’art pictural – Fabrizio expose dans des galeries de peinture… Mais ces « maladresses » sont d’autant plus touchantes qu’on a envie de les oublier, car qui dit œuvre poétique, dit albatros aux ailes trop grandes pour se mouvoir sur une Terre trop ferme, trop fermée. D’autant que le scénario est très bien construit, reste fluide, et que l’humour est aussi là pour empêcher à quiconque toute velléité de tomber dans le sérieux comme on tomberait dans le panneau. Laissez vous emmener par ce petit chef d’œuvre, laissez infuser les merveilleuses images et la poésie de Fabrizio dans votre subconscient, des images inouïes qui pourraient bien vous aider à étoiler votre vie intérieure et vous accorder la légèreté – tout dépend évidemment de votre capacité à affronter le quotidien, à lutter contre sa pesanteur si puissante qui cloue nombre d’entre nous au sol sans que l’on en soit réellement conscient. « Les mythes sont faits pour être racontés, sans ça, le monde s’appauvrit et meurt. » Cette phrase d’Eustis synthétise à merveille la teneur du projet. Magique, je vous dis !
Contes macabres du Japon
Il y a de cela une centaine d'année, un écrivain Lafciano Hearn a réunit une selection de contes fantastiques tirés de la tradition japonaise. Les mangakas ont repris six de ces histoires dans une adaptation assez réussie. Il faut dire que cette présente oeuvre a été nominé au Will Eisner Award et a reçu le prix indépendant Publisher Book Awards en 2016. Je dois dire après lecture que c'est plutôt mérité. Certains de ces contes sont très prenants et la chute est vraiment étonnante (notamment pour la première nouvelle intitulée "de la diplomatie"). Ces contes ne sont d'ailleurs pas si macabres que cela mais ils demeurent fantastiques. Je trouve également que la couverture n'est guère représentative mais c'est pour mieux illustrer le masque traditionnel japonais. Au final, des contes exotiques et fascinant qui nous font découvrir tout l'imaginaire de cette merveilleuse culture japonaise. (Avis dédicacé pour mon fils actuellement à Tokyo ;) ).
Simone Veil - L'Immortelle
Quel superbe album qui met très bien en valeur cette femme exceptionnelle et admirable qu'a été Simone Veil ! Non seulement son entrée au Panthéon en Juillet 2018 est justifiée mais son oeuvre est même pérénisée par la bande dessinée. C'est une véritable consécration. On entre tout de suite dans le contexte de l'année 1974 où elle monte au créneau d'une assemblée nationale gauliste et machiste pour faire passer la loi sur la dépénalisation de l'avortement qui portera son nom. A chaque fois qu'une femme a mené un combat progressiste sur des questions de société, qu'elle soit de droit ou de gauche, elle se heurte à une puissante opposition totalement indigne. Je pense également à Christina Taubira sur le mariage pour tous où la France est devenue le 14ème pays au monde à l'autoriser. Simone Veil a été une femme courageuse car elle n'a pas eu une vie très facile avec une adolescence marquée par les camps de la mort d'Auschwitz-Birkenau où elle perdra ses parents et son frère. On arrive à comprendre ce qu'elle ressent quand on la traite de nazi, elle qui a subie leur barbarie. On assistera à ces tristes épisodes qui sont fort émouvants. A noter que cela ne verse pas dans le pathologique grâce à une certaine dignité qui ne joue pas dans la surrenchère. C'est une lecture fort utile pour toutes les générations. Cela nous permet par exemple de relativiser chaque chose dans un contexte de violence sociale que traverse notre pays. Un mot sur le dessin pour dire qu'il est assez limpide ce qui facilite la lecture. On reconnait par exemple très bien Jacques Chirac et le président Valéry Giscard d'Estaing qui ne sont pas vraiment monté au créneau pour défendre cette loi même s'ils l'ont soutenu. Bref, une belle démonstration de cette femme extraordinaire et immortelle qui restera pour moi une héroïne des temps modernes !
Mauvaises mines
Un éditeur de BD Jeunesse et grand public (genre Dupuis) découvre par hasard que le contenu d’un bouquin qu’il vient de publier (sans trop l’avoir lu) est en fait carrément trash (un peu comme si les histoires de « Bambi » avaient été soudainement parasitées par celles de Bang et son gang). Avec son assistant il part alors à la recherche de l’auteur, et des exemplaires en circulation, dans le but de les faire disparaître. Cela part alors rapidement dans le n’importe quoi, l’éditeur dézinguant tous ceux qu’il trouve sur son passage. Cette partie de l’histoire – purement BD – occupe en tout un tiers de l’album, mais est entrecoupée par de nombreuses illustrations (une image page de droite, accompagnée d’une légende décalée page de gauche) plus ou moins trash, bien remplies d’humour noir, que l’auteur (qui n’a pas de nouvelles de son éditeur et croit avoir son aval, prépare pour un prochain potentiel album). L’ensemble est inégal, certes, mais moi qui suis très friand de ce type d’humour, j’ai trouvé cet album marrant et globalement réussi. Cela se lit vite, mais les amateurs d’humour noir y trouveront leur compte. Note réelle 3,5/5.
Nymphéas noirs
Pour moi, Michel Bussi c'était un auteur, que je n'ai jamais lu, un auteur dont la lecture des romans était réservée à la ménagère de moins de cinquante ans. Presque du roman de gare au sens péjoratif du terme. Hop là, hop là, les aminches ! C'était, je m'en rends à présent compte, une opinion à la va vite, d'un gars qui ne s'arrêtait qu'à la notion marketing de la chose dont on nous rebattait les oreilles. Dire que Michel Bussi est un grand auteur, je n'en sais rien, mais si toutes ses œuvres sont du même tonneau, surtout en ce qui concerne le twist final, alors je dis chapeau bas. Comme dit par mes petits camarades précédents, je me suis fait avoir comme un bleu, m'attendant à une gentillette conclusion où la vieille dame serait forcément la méchante... STOP ! Donc une histoire furieusement diabolique très bien mise en images avec cette colorisation qui sans en avoir l'air rend un très bel hommage au peintre de Giverny. Je ne peux qu'aller dans le sens des avis précédents et vous recommander chaudement la lecture.
Dans la forêt des lilas
Amateurs de contes et de belles illustrations, cet album est fait pour vous ! Nathalie Ferlut qui semble avoir baigné dedans et vouloir nous le faire partager (je vous renvoie à son avant dernier album Andersen, les ombres d'un conteur) s'adjoint le savoir faire de Tamia Baudouin au dessin cette fois-ci. Et ma fois ça en jette ! D'une part, c'est beau mais c'est aussi très original ! Le parti pris graphique est audacieux ! Il n'y a qu'à voir l'objet : couverture et quatrième de couverture nous plongent tout de suite dans l'ambiance et m'ont tout de suite donné envie de me lancer dans sa lecture. Ça m'a rappelé la très belle collection Métamorphoses de chez Soleil. Comtesse habite un cottage isolé de la campagne londonienne. Atteinte d'une étrange maladie, elle cherche à se réfugier dans ses rêves d'enfance. Mais ce pays merveilleux où Minon le Prince-Chat et Biche la fée la dorlotaient a doucement sombré dans les ténèbres... Comtesse cherche alors à comprendre pourquoi... Ce conte pour adultes qui nous rappelle l'enfant que nous avons tous été et qu'on a parfois du mal à abandonner (et d'ailleurs pourquoi le faudrait-il ???) nous renvoie à tous ces mondes imaginaires qu'on affectionne toujours quelque part. On a tous un petit côté Alice tapis en nous qu'il faut savoir chérir et ressortir du chapeau à bon escient. Drapé dans un contexte très Romantique anglais du XIXe, cet album où fourmillent les clins d’œil et les références nous donne envie de replonger dans nos vieux contes classiques pour y retrouver une petite madeleine de Proust pleine de douceur. A découvrir !