Les derniers avis (9312 avis)

Par Ro
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Gaza 1956 - En marge de l'histoire
Gaza 1956 - En marge de l'histoire

Cette BD est à mes yeux un formidable documentaire qui m'a appris une quantité énorme de choses tout en me frappant par la force de certains de ses passages. Depuis le temps que Joe Sacco use du médium qu'est la bande dessinée pour mettre en texte et en images ses reportages en ex-Yougoslavie ou au Moyen Orient, on peut dire qu'il a appris à développer son art et sa méthode. Ce qu'il raconte sur le conflit Israelo-Palestinien dans cet album est triplement instructif. En effet, son objectif premier est d'investiguer et de nous décrire ce qu'il s'est passé dans la bande de Gaza en 1956, lors de la Crise de Suez. Je n'en avais aucune idée, et c'est particulièrement édifiant, voire terrifiant. En même temps, il nous raconte son enquête sur les lieux en 2003 à la recherche de témoignages de survivants et il nous décrit de l'intérieur la situation plus actuelle à Gaza, à une époque où les bulldozers israéliens démolissaient l'une après l'autre les maisons palestiniennes en bordure des frontières imposées et où les USA menaçaient d'attaquer à tout moment l'Irak de Saddam Hussein. Et, troisième récit dans le récit, l'auteur nous fait part de son travail d'investigation et surtout du tri, des recoupements et de l'analyse qu'il est obligé de réaliser pour faire ressortir ce qui s'approche le plus de la vérité sur les évènements qui ont eu lieu cinquante ans auparavant quand de nombreuses versions contradictoires s'opposent entre les souvenirs confus, les traumatismes et la propagande. J'ai été particulièrement captivé par le récit des évènements de 1956. Joe Sacco fait le choix judicieux de décrire auparavant la situation d'ensemble, partant d'une anecdote concernant le congrès sioniste de Bâle en 1897 puis la création d'Israël, l'expropriation, la fuite et le parquage des palestiniens dans des camps de réfugiés tout d'abord totalement démunis, puis les incursions des réfugiés en territoire nouvellement israélien, l'escalade de la violence, des représailles, et tout ce qui a amené à une haine totale et mutuelle et à la situation complètement bloquée de la région. Mais je ne savais pas à quel point les choses avaient atteint un pic dans l'horreur en 1956. C'est terrifiant ! Aberrant ! Surtout quand on s'imagine que ces évènements ont eu lieu à peine une dizaine d'années après la seconde guerre mondiale et ce que les Juifs avaient subi de leur côté. L'horreur des évènements parait telle que j'en venais à douter, à me demander s'il y avait une part de dramatisation accentuée par les années, de mythe additionné aux faits historiques. Mais Joe Sacco présente l'ensemble avec la plus grande impartialité possible. En même temps qu'il fouille les souvenirs et les témoignages des anciens palestiniens, il écarte ce qui ne lui semble pas formellement prouvé, donne la parole à un ancien officier israélien, présente la version officielle du gouvernement israélien ainsi que celle adoptée par les rapports de l'ONU. La somme et la corrélation des témoignages (ainsi que la confiance que j'ai dans l'honnêteté du travail de l'auteur) ne laissent au final guère de doutes. Et le pire, c'est que ces évènements ont été suffisamment occultés dans l'histoire officielle pour que je ne les découvre qu'à la lecture de cet album. Cet album se révèle donc un document informatif ultra-complet, intensément intéressant et instructif. Sur la forme, maintenant, c'est également du très bon boulot. Joe Sacco a fait de grands progrès en matière de dessin depuis ses premières oeuvres où je trouvais son trait un peu ingrat. Ici, les décors sont particulièrement réussis, les angles de vue très bien choisis et les personnages sont tout à fait corrects. La seule chose qui m'empêche de donner la note maximale à cet ouvrage, c'est le côté assez indigeste de la narration. La somme d'informations à assimiler est énorme, les témoignages différents amènent de nombreuses répétitions à chaque fois légèrement différentes les unes des autres, et tout cela amène le lecteur à devoir s'accrocher pour ne pas s'y perdre. Malgré la force du récit, il se révèle donc un petit peu assommant sur la longueur. Et prendre des pauses en cours de lecture n'est pas très conseillé pour autant car, vu la complexité du récit, il est possible d'être largué le temps de reprendre le récit. C'est là tout le reproche que je ferais à cette bande dessinée qui, outre cela, est extrêmement instructive, dense et bien foutue. J'ajouterais en outre que les dernières planches, muettes, sont particulièrement fortes en émotion, conclusion idéale en impact et en évocation de ce qu'ont vécu les réfugiés de Rafah à l'époque.

19/11/2010 (modifier)
Couverture de la série Donjon Zenith
Donjon Zenith

Cette série est incontournable. La lecture de la série Donjon Zénith aura été pour moi une véritable partie de plaisir. J'aime par dessus tout l'humour du canard Herbert. Ce personnage est indéniablement mon favori... Les dessins sont bien sympathiques et donnent une bonne "bouille" aux monstres en tous genres. Les autres albums Donjon que j'ai pu lire, où n'apparaît pas mon ami Herbert, sont fades à mon goût. Alors privilégiez la série Zénith qui est vraiment délirante. Tong Deum !

19/11/2010 (modifier)
Par Spooky
Note: 3/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Banc de touche
Banc de touche

Difficile de faire plus actuel comme bande dessinée. Avec Sarkozy, Raymond Domenech est probablement le personnage public le plus sujet à polémique dans l’Hexagone. L’Equipe de France, qui s’est qualifiée de façon très contestable –pour ne pas dire plus- pour la plus grande compétition, se trouve au cœur des interrogations de tous les amateurs de football en France. « Le Banc de touche » nous plonge donc au cœur de la préparation, avec humour. Et il y a un invité de marque en la personne de Nicolas Sarkozy, actuel chef de l’Etat, dans le rôle du magouilleur cherchant à rendre service à l’équipe en proposant des joueurs hallucinants à Domenech. Celui-ci, de son côté, est assez fidèle à l’image que le grand public en a : compositions d’équipe fantaisiste, pas très au courant de l’identité de ses joueurs (il confond par exemple Lloris et Mandanda), et complètement à l’ouest dans ses relations avec ses joueurs. Outre le blagueur Ribéry, Henry l’Anaconda ou Toulalan l’homme à tout faire, on retrouve en outre des personnages comme Pierre Menès, Estelle Denis… Le risque avec un sujet pareil, c’est la répétition ; or les co-scénaristes ont su contourner cet écueil pour « sortir » du contexte fermé de l’Equipe de France (ce qui n’est pas vraiment le cas des joueurs, toujours protégés par plusieurs cordons de sécurité). Les gags sont diversifiés, très bien vus –à cet égard je vous recommande ceux relatifs à la liste des 23 et aux résultats de l’équipe au premier tour de la Coupe du Monde- et la plupart du temps assez drôles. Dans le second tome la Coupe du monde s'achève, dans le fiasco que l'on sait, et les auteurs diversifient un peu les gags en introduisant Paul le poulpe -et ses successeurs- et en augmentant la présence de Laurent Blanc, qui deviendra le pilier de la série par la suite. Curieux de voir ce que ça va donner... En mai 2011 est sorti un hors série consacré au club de l'Olympique de Marseille, s'adressant essentiellement aux supporters du club. Les auteurs ont continué sur le même mode, l'humour potache, avec des blagues de collégiens entre joueurs (Valbuena prend quelques tomates pourries au passage, même si je trouve que ça reste trop sage au vu de la réputation du joueur). Comme la série s'efforce de coller à l'actualité et veut parler aux supporters actuels, l'essentiel des gags traitent de la période contemporaine du club (disons depuis l'arrivée de Tapie). C'est plutôt parlant, même si personnellement je n'ai pas forcément reconnu tous les personnages présents. Ce hors-série m'a semblé un petit cran en-dessous de la série régulière, sans doute parce que je ne suis pas supporter de l'OM et ne baigne pas forcément dans cette ambiance. Sur le plan graphique, le travail d’Albert Carreres, assez proche de celui de Philippe Cardona, est très agréable à l’œil avec ces personnages aux grosses têtes. On reconnaît assez bien les personnages. Une série très sympathique, à recommander toutefois presque exclusivement aux lecteurs qui s’intéressent au football. A rapprocher de Domenech, en bleu... et contre tous, dans une sorte de suite chronologique. Moi je suis preneur.

21/06/2010 (MAJ le 19/11/2010) (modifier)
Par yann75000
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série La Nuit
La Nuit

Certainement l'album le plus bouleversant de la bande dessinée contemporaine. Je me demande comment vivent les gens, souvent. Philippe Druillet répond avec ses tripes, avec tout son Art, comment on peut mourir. Cette bande dessinée est une symphonie, un cri à la nuit qui va nous ensevelir. La Nuit, c'est le combat hallucinant de la vie qui s'arrache d'un dernier souffle, c'est l'immense talent d'un artiste sans concession qui s'exprime à travers la perte de l'être qu'il aime, c'est la beauté infini de l'amour qui perd face à la terrible sentence de la mort. "La Nuit" n'est pas une bande dessinée comme une autre. Elle a été écrite, dessinée, hurlée avec la force de celui qui ne peut plus rien. Mais Druillet, grandiose, ne s'avoue pas battu malgré la fin inéluctable. Il se lève, face à l'impossible, face à l'intolérable, et se lance dans une dernière bataille perdue d'avance avec la force de ses pinceaux, avec le coeur déchiré de l'amant hébété, pour nous emmener dans un maeström de souffrance, dans les profondeurs des âmes consumées par la douleur! C'est certainement l'une des oeuvres qui donna à la bande dessinée ses lettres de noblesse. Jamais aucun artiste n'avait osé auparavant mettre autant de puissance poétique dans l'histoire, mettre autant d'intimité dans son récit. D'ailleurs combien l'ont fait ensuite? C'est une bande dessinée épique qui nous parle de ce que l'on n'ose savoir, et l'immense artiste qu'est Druillet nous offre une ode à la vie sans chichi, sans minauderie, avec le talent d'un poète comme Villon, avec l'insupportable conviction que seul l'Art Majuscule peut être une réponse à l'innommable. "Dis moi comment tu meurs, je te dirais comment tu as vécu". Merci Monsieur Druillet, et chapeau bas.

17/11/2010 (modifier)
Couverture de la série Les Années Spoutnik
Les Années Spoutnik

Sourire, rire et être ému par un même récit est un plaisir rare. Ce que j’ai lu ici m’a permis de l’atteindre avec brio ! C’est une petite merveille … une pépite … un de ces récits qui devraient être remboursés par la sécurité sociale tant ils font du bien au cœur ! Parce que là, l’espace d’un temps, je me suis retrouvé dans la cour de récré de ma jeunesse. Même candeur, même fraîcheur, même sens du jeu avec toute la dramaturgie enfantine qui y est liée, le récit de Baru est tellement simple et sincère, tellement tendre et joyeux, tellement truculent que j’ai plongé à pieds joints au cœur de cette bande d’écoliers et de ce quartier populaire. Pour tout vous dire, j’ai l’habitude, après mes achats réguliers, d’aller savourer une petite bière spéciale en feuilletant mes acquisitions. Rarement dans le brouhaha d’un café, je parviens à me concentrer sur un album au-delà de la vingtième page. Exceptionnellement, j’arrive à la fin d’un format traditionnel (45, 52 pages), que je peux alors qualifier de passionnant. Ici, ce n’est qu’après 122 pages et trois Orval que j’ai relevé la tête hors du guidon. Et encore, j’ai eu du mal ! Si je n’avais pas été en voiture, j’aurai sans doute mené la lecture de cette intégrale jusqu’à son terme. Parce que, mon dieu ! Que c’est frais ! Que c’est vivant ! Un mot wallon me vient à l’esprit : spitant ! Oui, ce récit, il « spite », il gicle de vivacité, de gaieté, de joie de vivre … Que dire de plus ? Que les planches consacrées au foot « de rue » sont les plus vraies que j’ai jamais lues ? Que le trait brut de Baru est d’une efficacité jamais prise en défaut ? Que les petites anecdotes sentent l’instant vécu ? Que les passages caricaturaux sont à se tordre de rire (ahhhh, ces scènes autour de la table de la cuisine où le gamin fuit le chat à neuf queues de sa mère) ? Que la candeur du récit n’empêche pas la gravité du contexte social ? Que l’album est un hymne à la société multiculturelle ? Oui, je pourrais dire tout ça, et bien plus encore … Alors voilà, si comme l’auteur (et comme moi), vous gardez de votre enfance le souvenir de matches de foot endiablés, de grosses bagarres entre bandes, de sarbacanes, d’inconscientes bêtises, de premiers émois, de voisins dont on ne comprenait pas un traitre mot, vous aimerez sans doute ce récit. A 10 ans, chaque penalty que l’on tire dans la cour de récré, c’est en finale de la Champion’s League qu’on le tire. Baru vient de me le rappeler de fort belle manière ! Merci …

17/11/2010 (modifier)
Couverture de la série Poupée d'Ivoire
Poupée d'Ivoire

J’aime Franz, et ce n’est pas cette Poupée d’Ivoire qui me fera changer d’avis. Tout d’abord, il y a ce trait, riche, travaillé, dynamique et d’aspect si spontané. L’auteur aimait les chevaux et cela se sent tant ceux-ci « bougent » avec naturel sous son trait. Ses personnages humains sont eux aussi très « vivants ». Faciles à distinguer, naturels dans leurs mouvements, expressifs et dynamiques, ils donnent vie à la saga. Ensuite, il y a « ses femmes ». Les personnages féminins de Franz dégagent souvent plus de charisme que les rôles masculins. C’est encore le cas ici même si les personnages principaux, tous sexes confondus, sont tous intéressants … mais la poupée d’ivoire demeure la plus attachante de la bande. Sensuelle, drôle, capricieuse, audacieuse, impulsive et capable d'auto-dérision, elle mène la saga à sa guise et constitue, à mes yeux, un des personnages les plus réussis du monde de la bande dessinée. Dans cet univers barbare, intuitif, animal, le simple fait qu’elle se pose des questions sur sa propre animalité lui confère une humanité incroyable. Pendant six tomes, cette série m’offrira un vrai souffle épique. Durant ces six premiers tomes, en effet, l’aventure consistera en une incroyable course vers l’avant. L’avenir est devant les principaux acteurs et ils n’auront de cesse de l’atteindre, découvrant constamment de nouveaux horizons, de nouvelles coutumes et de nouveaux personnages. Il y a bien une grosse facilité scénaristique avec le fait que toutes ces peuplades parlent un langage commun (ou du moins parviennent à se comprendre), mais cela ne m’a pas dérangé car la volonté de reconstituer un théâtre historiquement crédible est telle que ce procédé m’a permis d’apprendre pas mal de choses sur les contrées traversées tout en gardant le dynamisme du récit. Et puis, il y a chez Franz la volonté de créer une série « barbare ». Copuler, tuer, voler sont les trois actions les plus récurrentes. C’est bestial, organique et, je trouve, assez jouissif. D’autant plus qu’il y a une progression dans ce récit et dans le comportement des acteurs, mais aussi parce qu’il y a l’humour de Franz et un certain sens de la morale. Ses personnages, même s’ils tuent, violent, pillent, ont une conscience morale qui leur apporte une réelle profondeur. Et tout cela est enrobé d’un second degré léger mais omniprésent. Restent les trois derniers tomes, qui s’assimilent à un retour au foyer. L’aventure est encore au rendez-vous mais ça sent quand même la fin des vacances. Les tomes 7 et 9, surtout, m’ont paru très faiblards. Franz est malheureusement décédé durant la réalisation du dernier tome. Ses remplaçants sont parvenus à conclure le récit mais ces changements (surtout au niveau graphique, tant il est difficile, voire impossible de succéder à pareil monstre du pinceau), qui s’ajoutent à la chute de niveau des derniers tomes, me laissent sur une triste impression. Pour les six premiers tomes, j’accorderais un franchement bien enthousiaste. Pour les trois derniers, je dirais pas mal sans plus. Pas mal du tout pour l’ensemble, avec achat conseillé pour cette belle épopée barbare qui nous promène des steppes mongoles aux frontières de l’Asie en passant par tellement d’endroits qu’il m’est impossible de tous les citer. Et, une fois de plus, je sors de ma lecture en me disant que Franz avait vraiment un style unique, identifiable entre tous. Total Respect !

17/11/2010 (modifier)
Par Ems
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série L'Assassin qu'elle mérite
L'Assassin qu'elle mérite

Après la lecture du premier tome. Il y a des lectures qui ressortent du lot, pour ce premier tome de la série "L'Assassin qu'elle mérite" ce fut le cas. J'ai adoré ce récit, le seul reproche que j'ai trouvé concerne l'encrage un peu trop épais à mon goût. Sinon j'ai été surpris par cette histoire partant sur une idée farfelue mais bien exploitée. Comme beaucoup j'ai mal interprété le titre, d'autant qu'il y a une femme sur la couverture, juste en dessous du titre. Il y a peu de chances que le second tome soit au même niveau que celui-ci mais je ne bouderai pas mon plaisir actuel. La narration, le découpage, la maîtrise du scénario, etc... Tout est excellent, il suffit de tourner les pages et de s'abreuver de ce nectar. C'est un gros coup de coeur subjectif, le ressenti fut celui que j'aimerais avoir à chaque fois que je referme une BD. Ce niveau n'est pas souvent atteint, je me dois donc de défendre cette BD. Lupano et Corboz forment un duo d'une rare efficacité. Vivement la suite.

16/11/2010 (modifier)
Par Chalybs
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Le Chant des sabres
Le Chant des sabres

Il est rare que je sois en accord avec le texte de la présentation éditeur. Mais pour le coup, celle ci me correspond à 100%... Quelque part dans une Chine d’autrefois, fantasmatique et peut-être bien rêvée, le vieux mandarin Fu Zhu-Ing règne sur un royaume en déliquescence. L’opium se déverse sans retenue sur le pays, la révolte des Taiping gronde et peut-être bien que Fu Zhu-Ing n’a plus toute sa tête. Son fils se dresse contre lui, malgré la présence aux côtés du mandarin de So-eyon, garde du corps fidèle… Magnifique d’invention, d’audace et de liberté, Le Chant des sabres est une manière de poème haletant en bande dessinée, en même temps qu’une cavalcade graphique d’une inventivité inouïe. Magnifique. J’aime les couleurs, j’aime le découpage, j’aime la simplicité du trait, le tranché du trait, la symbolique des couleurs (rouge : la folie et la colère ; gris : le calme, l’apaisement, l'ennui ; bleu : la lucidité…), les couleurs utilisées. J’aime la mise en page, j’aime le rythme alternant violence et calme, j’aime le style de la narration. Même les passages violents m'ont semblé se dérouler calmement, presque sereinement ; je n'ai pas ressenti de haine. J’aime l’esprit et l’ambiance étrange qui se dégage de chaque page ; le léger souffle de folie qui plane au dessus de chacun des personnages, So-Eyon, le garde du corps, Jiang la fiancée au pouvoir insensé, absurde et inquiétant qui finira par prendre racine au sens propre, le mandarin, Fu Zhu-Ing fou, simplement, décadent. J’aime le style graphique soigné, tourmenté, radicalement original, alternant entre un sorte de découpage/collage, de hachuré, de crayonné simple mais pour moi terriblement efficace. Beau. L'histoire est poétique, lyrique, fantastique, cruelle, belle. Entre rêve, folie et dure réalité. A la limite du conte. Les lieux et le temps ne sont d'ailleurs pas vraiment fixés, sûrement fantasmés, sûrement aménagés pour l'occasion... En fait j'ai du mal à parler de l'histoire, du scénario, tellement mes émotions, mes sens ont pris le dessus. C'est une expérience rare pour ma part. Puissant. Une BD OVNI sûrement, étrange à tous les coups. Elle ne plaira pas à tout le monde, j'en conviens. Mais je suis conquis par ce mariage entre scénario/narration et graphisme déroutant.

16/11/2010 (modifier)
Par Erwelyn
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Hauteville House
Hauteville House

Critique sur le premier cycle (T1 à T4) Hauteville House fait partie des séries incontournables pour tout amateur de steampunk et d'uchronie. Nous sommes en 1864. Napoléon III, qui cherche à récupérer le Mexique en profitant de l'affaiblissement des américains engagés dans leur propre guerre civile, place Maximilien 1er sur le trône mexicain. Mais si Napoléon tient à garder un pied au Mexique c'est aussi parce qu'un fragment du manuscrit de Bernal Diaz Del Castillo (célèbre conquistador qui participa à la conquête du Mexique en 1517) indique que l'Eldorado n'est peut-être pas ce qu'on croit mais plutôt une entité d'une puissance extraordinaire enfermée dans un temple mayas. Et grâce à cette nouvelle arme, l'Empire pourrait aussi s'approprier le reste du continent américain en s'alliant aux sudistes. Dès lors, les services secrets européens, alertés de cette découverte, dépêchent leurs meilleurs agents pour déjouer le complot. Gavroche, personnage moins imaginaire qu'on a pu le penser, et sa coéquipières Eglantine se retrouvent projetés avec ses collègues dans cette grande aventure. Du Yukatan à Atlanta sous les flammes, ils devront à tour de rôle échapper à des automates, infiltrer l'entourage de Napoléon III, survivre aux champs de batailles de la guerre de Sécession et anéantir une des forces les plus démoniaques qu'il leur ait été donné de combattre. Cette série, absolument jouissive visuellement comme scénaristiquement, offre des pleines pages de champs de batailles (tome 4, surtout), des panoramas de villes et de ciels saturés de zeppelins et d'aérostats. Si la guerre de Sécession a vu naître un certain nombre d'innovations militaires, comme quelques frégates cuirassées, les auteurs nous donnent une vision de la guerre de Sécession qu'Albert Robida n'aurait pas reniée. Et puisque nous parlons de ce cher Robida, contemporain de Jules Verne, et néanmoins, trop souvent oublié, il est à noter que c'est lui qui est l'inspirateur le plus profond de l'imaginaire steampunk. Car en tant que caricaturiste et illustrateur, il avait dès la fin du XXe siècle anticipé les guerres du futur, évoquant les armes biologiques, l'aérostation militaire, les locomotives, chars et bateaux cuirassés etc. Et comme je ne peux me retenir de vous donner la preuve que nos auteurs se sont pleinement inspirés de lui (et notamment de La guerre au XXe siècle [1869] et des couvertures du feuilleton de La guerre infernale de Pierre Giffard [1908]) voici quelques planches comparatives : voir sur mon blog http://www.librairiesoleilvert.com

15/11/2010 (modifier)
Par Erwelyn
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Le Siècle des Ombres
Le Siècle des Ombres

Le Siècle des Ombres fait office de préquelle à une série fantastique au contexte plus contemporain : Le Chant des Stryges. Toutefois il n'est absolument pas nécessaire d'avoir lu cette dernière pour se plonger et se régaler de cette aventure qui nous fait remonter le temps jusqu'aux origines de ces mystérieux Stryges. Nous voici donc au XVIIIe siècle, au cœur même du siècle des Lumières, période éclairée s'il en est par la raison et le rationalisme. On désacralise la monarchie, on s'oppose au clergé et on met en avant l'esprit critique, scientifique et déiste. C'est aussi le siècle des grandes explorations, de l'Afrique à l'Amazonie. Un environnement intellectuel et naturaliste passionnant que Corbeyran et Suro ont su exploité. L'histoire s'ouvre sur un repas auquel assistent Diderot et d'Alembert, les auteurs de la célèbre Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers. Leur hôte est un mystérieux personnage à qui l'on vient de rapporter l'éclat d'une pierre étrange, extraite d'une mine amazonienne. Celle-ci est rapidement dérobée et il ne reste plus qu'à se rendre sur place pour retrouver le rocher originel. Nous nous embarquons donc à bord d'un magnifique bateau, avant d'être assailli par la moiteur de la jungle, puis enlevé par les indigènes locaux... Si vous aimez les vieux gréements, les explorations, l'aventure et le mystère alors il ne faut pas hésiter, c'est du sur mesure pour vous !

15/11/2010 (modifier)