Les derniers avis (113470 avis)

Couverture de la série Stern
Stern

Stern propose un western décalé, subtilement loufoque, qui ne cherche jamais à cocher mécaniquement toutes les cases du genre. Le récit avance à hauteur d’homme, porté par un héros profondément attachant, dont le destin semble s’acharner avec une ironie presque fataliste. Cette dureté permanente du contexte n’empêche jamais l’empathie : la série reste touchante, sincère. L’écriture se distingue par une grande humanité. Les enquêtes servent surtout de prétexte à explorer des trajectoires de vie, des regrets, des zones d’ombre, dans une Amérique rude où chacun tente de survivre avec ses failles. La galerie de personnages est particulièrement soignée, tous traités avec finesse, et la diversité des lieux d’un tome à l’autre renouvelle efficacement l’intérêt sans casser la cohérence de l’ensemble. Graphiquement, le dessin est très expressif, lisible et précis, sans démonstration inutile. Le choix de couleurs relativement soutenues pour un western apporte une identité visuelle forte et participe au ton singulier de la série. L’ensemble se lit avec un réel plaisir, dans un équilibre maîtrisé entre légèreté, gravité et intimisme.

23/12/2025 (modifier)
Couverture de la série Danser avec le vent
Danser avec le vent

Il y a des incohérences dans mes réactions à cet album, en fait je n’arrive pas à avoir un avis, alors j’écris pour essayer d’en trouver un. Lorsque l’on ouvre un Lepage et que l’on a déjà lu l’auteur on sait globalement ce que l’on va trouver, une descente dans son quotidien de voyageur aventurier sans l’être, à la fois témoin et passeur d’un environnement dans lequel nous ne nous sentons pas légitimes d’aller. Cette fois ci c’est un retour ce qui détonne d’autant plus comment se renouveler ? que va-t-on voir de plus ou de moins ? Graphiquement, l’auteur murit, les illustrations sont maintenant des exercices de style tout à fait sublimes et je trouve un jeu entre les versions croquis et les versions travaillées au sein de la narration pour nous offrir des pauses et des moments de méditation. L’humain trouve dans ce récit toute sa place, et le témoignage sur ce que l’on ne doit pas communiquer pour ne pas sensibiliser le « grand public » à des choses pourtant nécessaires qui pourraient le heurter me parait un modèle de narration journalistique sans ligne éditoriale politique venant nous dire ce qu’il est bon ou mal de penser : Merci ! Tout ceci bien sûr très positif, oui mais que c’est lent, je ne me suis pas attaché aux personnages tant ils paraissent fugaces, trop étroitement décrit pour se les approprier et partager en quelques sorte le vécu. Il y a une frustration évidente à partager des moments dans l’intimité de Lepage sans pouvoir agir ou exister dans le sens où nous aurions un mot une attitude pour faire raisonner le moment selon notre sensibilité. La limite du récit de voyage se situe dans cette faille : l’auteur a été suffisamment subtil et sensible pour nous faire partager des moments de grâce et pourtant nous ne les avons pas vécu car tout ceci n’est qu’un récit tiers sur lequel nous n’avons pas prise et sur lequel nous sommes désespérément passifs. Cette conscience de notre incapacité à être actif dans l’aventure donne au lecteur une frustration évidente, non que nous aurions fait mieux, mais nous aurions fait nos propres erreurs et appris sur nous même ce que ce témoignage ne nous permet pas de faire… Je ne suis pour ma part pas certain qu’il y ait de la connerie à enlever aux uns où aux autres, elle fait partie de nous et permet à la vie d’être un apprentissage permanent, ce livre ne nous apprend pas grand-chose, il nous fait partager du vécu, un cheminement et comme toutes les sagesses de l’histoire le disent l’important n’est pas la destination mais le chemin. Apprenons de ce chemin et prenons ce qui en est bon pour nous, peu importe ce qui est une limite, une frustration !

23/12/2025 (modifier)
Couverture de la série Seul le silence
Seul le silence

Adaptation d'un roman, cette version BD propose un polar solide, bien construit, qui mise davantage sur la durée et l’atmosphère que sur l’esbroufe. L’intrigue est efficace, lisible, et bénéficie d’un étalement temporel bien géré, avec des ellipses pertinentes qui renforcent le poids du traumatisme et l’obsession du héros. Sans prétendre au statut d’œuvre majeure, le scénario tient parfaitement ses promesses. Les personnages sont crédibles et attachants, inscrits dans un contexte historique et social cohérent. Les thèmes périphériques aux meurtres — mémoire, culpabilité, violence diffuse de l’Amérique rurale — sont traités avec sérieux et apportent de l’épaisseur au récit, sans parasiter la trame principale. Graphiquement, un travail précis et maîtrisé. Le dessin reste sobre, lisible, au service de la narration, et les couleurs évoquent efficacement une Amérique campagnarde, poussiéreuse et mélancolique. L’ensemble fonctionne bien et installe une ambiance durablement sombre, sans excès de démonstration.

23/12/2025 (modifier)
Couverture de la série Roi Ours
Roi Ours

Visuellement, l’album s’impose immédiatement : un dessin très rond, séduisant, d’une grande lisibilité, qui installe avec naturel une ambiance de conte. Cette douceur graphique contraste fortement avec un propos souvent âpre. Le récit avance comme une fable, simple en surface, mais traversée par une violence sociale et rituelle qui renvoie à quelque chose de profondément humain, et parfois tristement crédible. Le fond est solide et maîtrisé. La vengeance y est montrée pour ce qu’elle est : un mécanisme stérile, destructeur, incapable de produire autre chose que de nouvelles souffrances. La métaphore animale fonctionne pleinement : les humains agissent comme des bêtes, tandis que les animaux incarnent une forme d’humanité plus juste, plus empathique. Le thème de la famille est également central, posé sans lourdeur : celle du sang face à celle du choix, de l’acceptation et de la protection. La seule réserve tient à son positionnement. Trop dur et cru pour un jeune public, mais formellement et narrativement très proche du conte, l’album occupe une zone volontairement floue. Cette ambiguïté est intéressante et assumée, mais peut désarçonner certains lecteurs. Elle participe néanmoins à l’identité singulière de l’ouvrage. 4.5/5

23/12/2025 (modifier)
Couverture de la série Quelques Mois à l'Amélie
Quelques Mois à l'Amélie

Le récit se lit sans déplaisir et propose une introspection honnête autour d’un écrivain en perte de repères, marqué par le deuil et l’épuisement créatif. Suivre ce personnage errant, tant géographiquement qu’intérieurement, fonctionne par moments : certains thèmes résonnent juste et l’observation de cette dérive douce a quelque chose de sincère et d’assez humain. En revanche, l’ensemble reste déroutant dans sa construction. La mise en abyme, présente mais jamais pleinement assumée ni menée jusqu’au bout, donne l’impression d’un propos qui hésite en permanence. Le récit avance pourtant avec son héros, laisse espérer un point d’aboutissement, une bascule ou une clarification… qui ne vient finalement pas. La conclusion, volontairement ouverte, renforce ce sentiment d’inachèvement plutôt que de contemplation maîtrisée. Graphiquement, le trait rétro de Jean-Claude Denis s’accorde avec l’ambiance mélancolique, mais reste très statique. Il manque ici un peu de dynamisme ou de tension visuelle pour soutenir un scénario déjà peu directif. Au final, l’album propose une parenthèse introspective agréable mais peine à s’imposer comme une œuvre marquante, laissant surtout l’impression d’un cheminement interrompu plutôt que pleinement abouti.

23/12/2025 (modifier)
Couverture de la série Muchacho
Muchacho

Récit solide et nuancé sur la révolution nicaraguayenne, Muchacho adopte clairement la forme d’un carnet de voyage révolutionnaire. La romanisation du contexte historique fonctionne bien : les clivages sociaux et politiques sont lisibles, incarnés, et les personnages dégagent une réelle humanité. Sans idéaliser naïvement la révolution, l’album parvient à en transmettre l’élan, presque séduisant, tout en laissant affleurer sa dureté latente. La première partie est la plus convaincante dans son articulation entre découverte politique, immersion sociale et regard extérieur du protagoniste. La seconde ouvre vers des thématiques plus intimes et spirituelles, en marge du strict cadre révolutionnaire. L’élargissement n’est pas incohérent et enrichit le portrait du personnage, mais n’apporte pas un gain narratif équivalent à la force du cœur politique du récit. La dimension religieuse et sa représentation graphique constituent un axe particulièrement pertinent, à la fois symbolique et charnel. Le dessin d’Emmanuel Lepage est très expressif, chargé de matière et d’atmosphère, au service du ressenti plus que de la lisibilité stricte. On peut parfois confondre certains personnages, mais l’immersion visuelle est telle que cela n’entrave pas réellement l’expérience de lecture.

23/12/2025 (modifier)
Couverture de la série Mattéo
Mattéo

Mattéo est une œuvre dense et exigeante, qui traverse près de quarante ans d’histoire européenne sans jamais s’appesantir inutilement. Le récit avance vite, parfois brutalement, à l’image d’un monde où tout bascule tous les dix ans. Cette accélération permanente sert le propos : le lecteur ressent la perte de repères, les glissements idéologiques et les fractures intimes d’une époque qui a profondément marqué l’Occident. Le scénario ne cherche pas la démonstration ni la relecture spectaculaire de l’Histoire. Il fonctionne plutôt comme une introspection historique, portée par des personnages crédibles et attachants, souvent dépassés par les événements. La richesse du contexte et la multiplicité des enjeux peuvent parfois désorienter, mais c’est aussi ce qui donne à l’ensemble sa profondeur. C’est clairement une lecture qui gagne à être revisitée avec le temps et une certaine maturité. Graphiquement, le dessin est élégant, réaliste sans rigidité, avec une identité forte qui évoque un vieux film d’époque. Les ambiances, les décors et les visages participent pleinement à cette fresque historique contemplative, sans jamais tomber dans la caricature ou l’emphase.

23/12/2025 (modifier)
Couverture de la série Le Voyage en Italie
Le Voyage en Italie

Voyage en Italie est une bande dessinée profondément introspective, qui saisit avec beaucoup de justesse une génération marquée par la fin des illusions et les cicatrices laissées par la guerre du Viêt Nam. Cosey met en scène une époque paradoxale, à la fois encore légère dans ses apparences et déjà lourdement chargée de désillusions. Art incarne parfaitement ce héros ordinaire, profondément humain, sans héroïsme forcé ni excès de bonté : un « bon type » crédible, dans lequel il est facile de se projeter. La relation entre les personnages constitue le cœur du récit. Les non-dits, les espoirs avortés et les blessures du passé affleurent constamment sans jamais être surlignés. La guerre, omniprésente mais souvent hors champ, agit comme une fracture durable dans les trajectoires individuelles. Shirley et Ian complètent ce trio fragile, tandis que Keo apporte une dimension supplémentaire, plus silencieuse encore, sur l’exil et l’innocence déplacée. Graphiquement, le dessin affiche aspect très rétro qui contraste avec la modernité des thèmes, du rythme et des dialogues. Ce décalage fonctionne pleinement et renforce l’ancrage temporel du récit. Les couleurs sont remarquablement exploitées, les planches très lisses et aérées accompagnant parfaitement le ton contemplatif. Peu d’action, mais une grande précision émotionnelle : une œuvre adulte, subtile et maîtrisée, qui trouve sa force dans l’introspection plutôt que dans le spectaculaire.

23/12/2025 (modifier)
Couverture de la série Silent Jenny
Silent Jenny

Signalons tout d’abord la qualité de l’édition de cet album qui fait de l’œil aussi bien par les commentaires que l’on peut en lire que par l’attention porté à l’objet tout à fait travaillé et soigné comme pour montrer un écrin à découvrir au-delà d’une couverture si chatoyante dans les couleurs tout en étant anguleuse et inhospitalière. Le récit commence et nous sommes immédiatement aspirés par un environnement étrange. En poussant les limites des erreurs humaines dans un environnement respirant les conséquences de nos manquements, nous nous sentons à la fois curieux, inquiets un peu coupables aussi mais surtout tellement sensible à l’humanité qui malgré tout continue. Et pourtant rien ne va humainement, socialement, climatiquement, bureaucratiquement… Mais le graphisme nous remplis de désir de poursuivre et d’envie de comprendre où tout cela va nous mener. Il faut un peu de temps pour commencer à saisir où nous sommes tombés, ce que constitue les missions, chaque page, chaque couleur nos accroche un peu plus à ce monde dont on perçoit petit à petit la complexité en ayant bien compris depuis le début le chaos initial, où tout cela va-t-il nous mener ? jusqu’à tiers album l’excitation monte. Et puis un doute s’installe, et si tout cela ne menait nulle part ? et si toute cette cohérence de couleur d’univers de détails et d’environnement n’existait que pour dépeindre un vide existentiel, un « no future » version post apocalyptique ? Les fourmillements de sensations annexes, de détails scénaristiques nous fait entrer petit à petit dans une sorte de témoignage plus qu’un manifeste, dans un documentaire d’arte plutôt que dans une fiction narrative menant à une idée. On s’installe dans un fauteuil et alors ce qui était inconfortable, à fleur de peau ce qui donnait envie de comprendre par le chaos et l’absurde devient un voyage, un chemin plus neutre où demeure un environnement graphique magistral mais où le narratif en a pris un sacré coup dans l’aile. Cet environnement se révèle magistralement dans le dessin, les parties d’expéditions microscopiques m’ont d’ailleurs fait penser dans le style graphique à Alpha La peur suinte, le chaos règle, l’absurde triomphe, mais l’espoir subsiste malgré tout. Les couleurs chaudes répondent aux traits durs, les angles aux rondeurs. Vous l’aurez compris je trouve le travail graphique tout à fait admirable d’adéquation avec l’environnement décrit ! Mais voilà je reste très largement sur ma faim sur ce qui dépasse la mi album, tout çà pour çà ai-je envie de me dire ? J’aurai tellement aimé que les efforts pour intégrer une dimension spirituelle, religieuse même avec ce rite de fin de vie, ces questionnements sur l’éducation nous emmènent ailleurs que vers un simple « mais la vie continue ». Tant de détails posés çà et là pour donner une richesse à un environnement social complexe permettent de rendre cette situation initiale si abstraite et loin de notre réalité plus proche et allégorique mais hélas comme nous arrivons finalement à un reportage j’ai totalement décroché de la fin d’un récit certes très travaillé, très joli, mais devenu tellement artificiel dans sa vacuité de sens. Par ailleurs cette quête de l’infiniment petit pour fuir une réalité absurde me semble tout à fait plaquée et je n’ai pas compris le chemin qui arrive là. Au final ce très bel objet ne sera probablement pas ré-ouvert de sitôt, c’est bien dommage j’aurai tellement aimé y replonger pour y trouver des significations cachées, des liens entre les multiples lieux permettant de donner un sens. Mes enfants n’ont pas résisté longtemps d’ailleurs à la lecture. Mon sentiment est donc aussi amer à la fin qu’il ne l’était devant cette société si amère qui nous est proposée à la narration. Je suis peut être passé à côté de certaines choses mais le nihilisme pur dans le message accompagnant un environnement aussi nihiliste par nature, c’est trop redondant.

23/12/2025 (modifier)
Par Gaston
Note: 4/5
Couverture de la série L'Histoire d'un vilain rat
L'Histoire d'un vilain rat

3,5 Une histoire terriblement actuelle alors qu'elle a plus de 30 ans ! Je pense que c'est la première fois que je lis un comics de Bryan Talbot où il est seul au scénario et le résultat est vraiment bon et me donne envie de mieux connaitre son œuvre. Il parle d'un sujet grave, l'inceste, sans tomber dans le sensationnalisme et j'aime bien comment cette partie du récit est amenée. Au début, l'héroïne ne semble pas comprendre ce que lui a fait subir son père et tout va devenir plus clair au fil de sa fugue. Les scènes-chocs sont bien écrites et sont mémorables. La fin est surprenante d'optimisme et je comprends que des services sociaux dans le monde anglophone utilisent ce comics parce que c'est très éducatif sans devenir chiant. Cela dit, il y a quand même quelques passages au milieu de l'album qui m'ont moins intéressé que le reste. Aussi, pour ce qui est du dessin, je ne suis pas trop fan de ce style réaliste, les personnages sont un peu moches, mais les décors sont bons et la mise en scène est très bien faite. Un album choc qui frappe là où ça fait mal.

23/12/2025 (modifier)