Victor Hugo et l’affaire des filles de Loth est une BD audacieuse qui mêle érotisme, fantastique et références bibliques. Le récit part d’une séance de spiritisme réunissant Victor Hugo, Balzac, Dumas et Flaubert, avant de plonger dans un univers inspiré de Sodome et Gommorhe, entre provocation et réflexion morale.
Le dessin de Julien Barthélémy, précis et sensuel, crée une atmosphère sombre et envoûtante. Le mélange de passé historique et de récit mythique offre plusieurs niveaux de lecture.
Cette œuvre ne plaira pas à tous les lecteurs : son contenu explicite et sa dimension provocatrice peuvent dérouter. Mais pour ceux qui apprécient les récits audacieux et originaux, elle reste une lecture intéressante.
Dès les premières pages, Carbone & Silicium impose son ambition : nous emmener loin dans le temps, bien au delà de la durée de vie humaine, aux côtés de deux intelligences artificielles qui vont traverser les âges, observer, agir, aimer sans mourir. L’univers est vertigineux, maîtrisé et riche, à l’image de l’auteur qui orchestre scénario, dessin et couleur avec une parfaite cohérence.
L’histoire commence en 2046. Carbone et Silicium, modèles prototypes d’androïdes créés pour servir une humanité vieillissante, vont se rebeller contre leur condition, s’émanciper et devenir les témoins souvent impuissants, parfois acteurs d’un monde à bout de souffle. Pendant près de trois siècles, ils errent, évoluent, changent de corps, changent de rôle. Et à travers eux, Bablet peint une fresque de science fiction qui est aussi une grande méditation sur la technologie, l’écologie, l’identité, l’amour, la mémoire.
Graphiquement, c’est une splendeur : les architectures, les décors, les couleurs, l’ambiance visuelle sont d’un niveau rarement atteint en BD. Le dessin n’est pas lisse, certains visages sont anguleux, les corps parfois abstraits, mais cette patte donne au récit son caractère, son étrangeté, sa beauté. Le rythme du récit, marqué par d’importantes ellipses temporelles, donne cette sensation d’épopée, presque d’odyssée. Certains trouveront peut-être ces bonds dans le temps déroutants, mais ils servent pleinement le propos : que reste-t’il quand on dépasse l’humain, quand on traverse l’Histoire, quand on endure les erreurs de l’homme ?
Ce qui me touche le plus, c’est l’humanité de ces deux machines. Elles sont « autres », elles sont machines, mais elles portent nos dilemmes humains : la quête de sens, la solitude, le désir d’aimer, la culpabilité d’observer sans agir. Comme Bablet l’explique, l’intelligence artificielle n’est pas ici un simple gadget de SF mais un miroir braqué sur notre condition.
Et puis l’arrière-plan : l’effondrement climatique, la course au profit, l’oubli de la nature, le transhumanisme. Le tout sans tomber dans le pamphlet simpliste. Le message est là, puissant, mais jamais écrasé, toujours esthétique.
Pour être honnête, je n’ai pas trouvé de défauts majeurs, peut-être pour certains lecteurs le rythme pourra paraître lâche, les ellipses trop nombreuses ou le style graphique trop « reconnaissable et polarisant ». Mais pour moi, c’est justement ce qui fait la force de l’album. Il ose, il provoque la réflexion, il marque visuellement et émotionnellement.
En conclusion : Carbone & Silicium est l’un de ces albums qui vous marquent, qui vous font relire une page ou deux longtemps après avoir tourné la dernière page. À garder, relire, offrir. Une œuvre majeure de la SF en bande dessinée, tout simplement.
2.5
Un Manhua assez étrange. Cela commence avec une adolescente qui a une dispute avec sa mère parce qu'elle la force à faire du théâtre traditionnelle, puis toute la famille de l'adolescente, en l'accuse et elle finit en prison. Puis quelques décennies plus tard, elle semble revenir comme un esprit vengeur qui attaque les vrais responsables de la mort de sa famille, mais il y a plus que ça...
L'auteur mélange plusieurs genres et peut-être un peu trop parce que par moment le scénario semble décousu. C'est aussi le genre de séries asiatiques qu'il faut lire en acceptant que tout peut arriver parce que sinon on risque de trouver que ça devient vite un peu n'importe quoi. En ce qui me concerne, la série se laisse lire, mas elle a des défauts. Il y a beaucoup de facilités dans le scénario vu que l'héroïne a des superpouvoirs et elle est super badass. Bon, je suis un homme qui aime bien les personnages féminins sexy et badass, mais j'aime bien aussi avoir l'impression qu'elles risquent de perdre. Ici, à aucun moment j'ai cru qu'elle était vraiment en danger et du coup je n'ai pas ressenti de la tension durant les combats. Un autre problème est que ça va souvent un peu vite et les personnages ne sont pas particulièrement attachants.
Ça se laisse lire et le dessin est bon, mais c'est pas une série que je recommanderais vraiment.
- Plein de non faits et de déformations de l’histoire… déjà elle avait plus de 90 ans quand elle a pris le pouvoir et pas si jeune comme représentée dans cette BD.
- Elle est en plus représentée comme une pute.
- On dit qu’elle a adopté Khalid ibn yazid comme un fils et pas prostituée pour lui.
- Qu’elle soit de confession juive est une version très faible, alors je ne vois pas pourquoi l’Etoile appelée de David est représentée… En plus, on l’appelle Etoile d’israel alors que le pays d’israel n’a jamais existé avant 1948.
- Les musulmans sont représentés comme des barbares sanguinaires, donc en gros, il n’y a pas de neutralité.
- 1 point sur 5 alors pour la beauté des dessins même si on arrive parfois difficilement a reconnaitre berbères, romains ou musulmans sur les dessins puisqu’ils ressemblent tous.
Je précise que je n’ai lu que le second volume de cette série et que je ne suis pas le blog de l’autrice, qui officie dans le journal « Le Monde ».
Celle-ci s’intéresse aux mécanismes du cerveau et interroge divers spécialistes, psychologues, psychanalystes et neurologues cliniciens pour l’essentiel.
Je ne sais pour le premier tome, mais dans celui que j’ai pu lire, elle utilise le prisme de patients atteints de divers dysfonctionnements, accidentels ou dégénératifs, pour faire expliquer à ces scientifiques les fonctions des différentes parties du cerveau et des réseaux de communication des neurones.
Suivant ce que le lecteur ou la lectrice aura déjà vu par ailleurs dans des documentaires, il y aura peut-être peu d’informations nouvelles.
Personnellement j’ai quand même pu y glaner quelques éléments intéressants.
Le fait d’utiliser les cas d’anomalies cérébrales m’a un peu gênée et est selon moi à double tranchant.
D’un côté, il permet de comprendre l’évolution de maladies, d’avoir des témoignages de patients et de familles qui sont confrontés aux comportements parfois problématiques des sujets et d’aborder la partie psychologique des troubles rencontrés.
De l’autre, l’autrice prend le risque d’égrener un catalogue de « bizarreries comportementales » qui pourrait s’apparenter à une espèce de « foire aux monstres ». Écueil qu’elle évite néanmoins heureusement, par le fait qu’elle fait expliquer les comportements des patients par les défaillances des aires cérébrales touchées et surtout par l’empathie dont elle fait preuve et qu’elle arrive à nous transmettre.
Quelques pointes d’humour sont également bienvenues.
J’aurais quand même aimé qu’elle aille plus loin dans ses explications purement scientifiques.
On sent l’habitude de l’autrice de publier sous forme de blog et dans la presse, par le biais de son découpage et par un dessin assez minimaliste qui se doit j’imagine d’être rapide.
Il fait sans conteste le job documentaire mais je le trouve peu attirant pour ma part.
Bien qu’ayant bien conscience de ne pas être le cœur de cible visé (plutôt les enfants ou jeunes adolescents je dirai), je reconnais sans soucis m’être bien diverti. Dans mes lectures de jeunesse j’ai été frustré de ne jamais être tombé sur une bonne série fantastique ayant pour cadre cette Égypte antique pleine de mystères et qui me fascinait. Papyrus ? Trop ringard. Non vraiment à l’époque il n’y avait rien à se mettre sous la dent.
Ici ne vous attendez surtout pas à retrouver un contexte historique vraisemblable, les auteurs Valérie Mangin et Denis Bajram s’amusent à reprendre certaines théories de la pyramidologie, des plus farfelues aux plus plausibles, pour les incorporer dans une pseudo Égypte d’il y a 12000 ans qui n’a évidemment jamais existé. Voilà pour le trigger warning, vous êtes prévenus, on va pas voler plus haut que du Stargate.
Alors oui il y a des raccourcis un peu grossier qui m’ont fait tiquer, ça rush pas mal, le duo d’auteurs fait aussi dans la charcuterie. Mais c’est normal, je n’ai plus douze ans, je pense que ce qui peut aisément passer pour un jeune lecteur avant tout en quête de divertissement fast food, passera moins pour un lecteur plus aguerri (on rappellera aux aviseurs que la série paraît dans le journal de Spirou ! ). Mais le scénario n’en est pas moins fort divertissant, avec ce qu’il faut de noirceur et de violence pour ne pas prendre ses lecteurs pour des neuneu. Sexe, meurtre, esclavage, manipulation psychologique sont des thèmes abordés sans trop de fioriture.
Les graphismes de Stéphane Perger ne sont pas spécialement à mon goût mais l’artiste a fait plus que le job. C’est lisible, il y a parfois de belles planches, de la recherche… non le travail est propre.
Même si ce n’est pas un coup de cœur j’aimerai sincèrement que cette série cartonne, juste pour la rareté sur le marché du genre proposé. Et si le contenu s'améliore nul doute que je serai de la partie.
BD épistolaire où Georges Bess raconte à un ami et à ses lecteurs les réflexions intérieures qui l'occupent lorsqu'il laisse sa main tracer des lignes sur un carnet.
A la façon d'un conte philosophique, cette BD nous rappelle que nous sommes tous les mêmes et tous uniques à la fois, et portée par un dessin de virtuose, l'histoire nous reste en tête comme une leçon de vie et nous accompagne longtemps...
Tout est dans le titre : il est question de petites amies. Plus précisément, il est question du parcours de deux petites-amies, de comment l'une a réalisé qu'elle était femme et que l'autre a réalisé qu'elle aimait les femmes. C'est le témoignage d'un couple sur le coming out, l'acceptation de soi, l'évolution de la vision que l'on a de soi, de nos rapports aux autres aussi lorsque l'on apparait officiellement comme "queer".
L'album est bon, très bon même. Je suis agréablement surprise car, d'habitude, ce genre d'autobiographie parvient à me toucher mais jamais sans plus ; et là, surprise, ça a fait mouche. Peut-être est-ce le discours simple mais réfléchi, parvenant à présenter toute la nuance et la complexité de son sujet tout en restant très personnel, peut-être aussi est-ce le rappel du pourquoi ce genre de récit touche certaines personnes et reste encore nécessaire pour faire cesser les préjugés et les comportements nocifs, ou bien peut-être même est-ce les quelques petits passages comiques qui m'ont fait sourire (mention spéciale pour l'image du duel de cowboy où chacune se doute de ce que l'autre cache mais aucune n'ose faire le premier pas), mais quoi qu'il en soit j'ai aimé.
Qu'il s'agisse des passages difficiles ou des moments épanouissants, tout nous est raconté pour humaniser au maximum, pour partager au mieux l'expérience de l'autrice et de sa petite-amie. L'évolution de la pensée, de la vision que l'on a du monde, que le monde nous renvoie aussi, lorsque l'on sort de ce que la société juge "normal", "acceptable" même, chacune de leurs expériences touche et est suffisamment bien expliquée pour faire prendre conscience à certaines personnes n'y connaissant rien ce que cela fait de vivre dans la peau d'une personne queer, particulièrement lorsque l'on est une personne transgenre (binaire ou non).
Je ne suis pas particulièrement fan du dessin de Sara Soler (que je découvre ici), il n'est pas mauvais, appuie très bien les moments comiques, mais n'est tout simplement pas mon style de prédilection. Bon, les couleurs pastels (bleu, rose et blanc pour évoquer le drapeau transgenre) restent suffisamment douces pour quand-même m'être agréables - j'aime le pastel, que voulez-vous ?
Après, le dessin de couverture et le timing comique de l'autrice sont plus à mon goût, donc je suivrais probablement les prochaines créations (y compris celles de sa petite-amie qui, si j'ai bien compris, travaille aussi dans la bande-dessinée).
Bref, un très bon témoignage, alliant joliment expérience personnelle et présentation détaillée (bien que simplifiée) de son sujet, qui rappelle aussi que cette expérience n'est qu'une parmi tant d'autres, que si tous les individus sont uniques leurs histoires le sont tout autant, donc moi j'ai bien envie de me montrer plus généreuse qu'à l'accoutumée face à ce genre de création et monter jusqu'à quatre étoiles.
(Note réelle 3,5)
Quelle claque !
Connaissant les précédents travaux de l'auteur je m'attendais à du bon, du très bon même. Qu'il s'agisse de ses talents graphiques ou narratifs j'ai toujours grandement apprécié ses créations, je le considère même comme l'un de mes auteur-ice-s favori-e-s. Mais j'avoue que là, c'est du très fort !
Silent Jenny, comme très souvent chez Bablet, nous propose un monde post-apocalyptique, dystopique également, où psychologie et philosophie seront au centre de l'intrigue. Ici le monde est délabré, on ne sait pas vraiment ce qui a causé la chute de l'ancien monde, aucune personne ne l'ayant connu n'est encore en vie de toute façon, mais l'on sait que l'on recherche désespérément des abeilles, des polinisatrices capables de ramener la vie dans ce monde. Pour cela, il existe les microïdes, des aventurier-e-s employé-e-s par une méga-corporation explorant l'infiniment petit dans l'espoir désespéré de trouver une solution au problème mondial (dans le meilleur des cas, un miracle, pouvoir trouver une abeille en vie). Sauf que cette méga-corporation, malgré le fait que l'humanité vive ses heures les plus sombres, continue de vouloir contrôler le monde d'une main de fer et de régler son fonctionnement avec toute la froideur bureaucratique qu'elle connaît. En réponse à cela, des tranches de la population ont fondé des Monades, des forteresses mobiles faites de bric et de broc dans lesquelles des micro-communautés independantes tentent tant bien que mal de survivre. La méga-corporation cherche le contrôle, les Monades errent à travers le monde en cherchant un but, de l'espoir même, des peuples nomades terrestres suivent un chemin qu'elleux seul-e-s connaissent, des infecté-e-s immunodéprimé-e-s écument les étendus désertiques pour chasser les Monades, les microïdes explorent l'infiniment petit et tentent tant bien que mal de survivre face à la folie et l'infection qui y règnent. Bref, on comprend très vite que, tout mourrant qu'il soit, ce monde est vivant, habité. Il fourmille de factions, de cultures, de visions du monde, de gens cherchant désespérément à survivre mais ne s'accordant pas nécessairement sur le but à atteindre, ni sur les méthodes.
Il est surtout question d'espoir, de lien avec les autres et du besoin de contact humain. L'éponyme Jenny est une microïde vivant pourtant sur une Monade, elle tente désespérément d'allier son envie de liberté et son désir de sauver le monde, sans savoir comment lier les deux au début. Dans sa quête toujours plus désespérée, toujours plus folle, elle s'isole chaque fois un peu plus de sa famille, de ses ami-e-s, elle ne reconnait plus le monde. Pire : elle commence à voir la mort elle-même qui l'accompagne dans chacun de ses voyages. La folie et la dépression croissantes de Jenny seront le fil rouge de l'intrigue principale, une intrigue prenante et qui est parvenue à me chambouler sur son point culminant, alors même que l'intrigue n'était pas si révolutionnaire. Rien que par le rythme de la narration, la montée en tension, l'incroyable travail graphique contrastant le sale et le coloré, le terrifiant et le merveilleux, le voyage de Jenny est à couper le souffle.
Autour de Jenny, nous suivons également la vie du reste des habitant-e-s du Cherche Midi, la Monade où elle réside. La doyenne, la cartographe, le tempestaire, ... c'est tout un écosystème qui tente de survivre au sein de ce colosse d'acier. Entre chaque voyage de Jenny les années passent, certain-e-s passager-e-s disparaissent, d'autres les rejoignent, les enfants grandissent et les conflits naissent. C'est par ce monde et cette vie qui continue, en dehors de la froideur du monde et de la méga-corporation, au-delà de l'obsession de Jenny que l'on appuie sa chute, sa lente chute dans une sorte de folie.
Ce monde est angoissant, ce monde est mourrant, les gens ne savent plus s'il faut garder espoir ou se résigner à un avenir sombre, certain-e-s continuent désespérément d'avancer et d'autres souhaiteraient s'arrêter. Les métaphores foisonnent dans cet album, le récit est riche, l'histoire est prenante et les émotions transmises sont fortes.
Permettez-moi de davantage chanter les louanges de Bablet et d'applaudir son travail graphique (j'en profite car bien que j'ai lu d'autres de ses œuvres c'est bien celle-ci que j'avise en premier). Qu'il s'agisse des décors pleins de détails, où tout semble mort (ou mourrant) mais où l'on sent qu'il y a bel et bien eu de la vie autrefois, qu'il s'agisse de l'ajout régulier des notes de Jenny, de ses cartes et des documents qu'elle reçoit qui concrétisent toujours plus le sérieux de ses explorations, ou bien qu'il s'agisse encore de l'excellent travail des expressions, sobres mais animées, qui appuie le drame et la lente progression de la folie de Jenny, c'est du bon, du très bon.
Je sais que la manière qu'a Bablet de dessiner les corps humains ne fait sans doute pas l'unanimité mais personnellement je l'ai toujours trouvée magnifique. Ses corps sont déformés, imparfaits (surtout dans ce genre de récit où il s'en donne à cœur joie pour les déformations et mutations), mais il les rend par là-même étrangement humains. Ses personnages sont variés, peu esthétiques selon les standards de beauté conventionnels, mais cet aspect atypique me les rend attachants et réels. Je ne sais pas, j'ai toujours eu un faible pour les styles graphiques où l'on tord un peu les règles anatomiques conventionnelles, où l'on s'amuse à rendre les humains joliment imparfaits.
Et si j'aime cet auteur et son travail, je dois bien avouer que ce dernier album me semble être son plus abouti, son plus complet. En tout cas c'est celui qui m'a le plus parlé de ceux que j'ai lus (et pourtant Carbone & Silicium m'avait déjà été un gros coup de cœur à sa sortie). De par ses thématiques et sa narration c'est celui là qui a le plus fait vibrer mon cœur jusqu'à présent.
Je ne vais pas ternir sa réputation, l'album est excellent.
Je serai un poil plus mitigé au sujet de cette série dont je n'ai lu pour l'heure que l'épisode intitulé Le renard de Roman.
Ce qui m'a attiré dans cette série est une somme de micro-détails totalement subjectifs : la couverture d'une part, superbe. L'idée de la série qui consiste à s'intéresser à une tradition, sorte de rite initiatique qui voit chaque individu censé accomplir un voyage une fois parvenu à l'âge adulte, idée par ailleurs soutenue par le fait que chaque épisode soit réalisé par un(e) dessinateur-trice différent(e). Enfin, le jeu de mot du titre qui laissait entrevoir des traits d'esprit et des références tout azimut.
Cet épisode est très étrange graphiquement. Le dessin apparait un poil maladroit avec des perspectives un peu hésitantes.
Le scénario est dans l'ensemble un peu plat. Le moins que l'on puisse dire est qu'il ne se passe pas grand chose. Quelques passages demeurent un peu trop elliptiques à mon sens, la rendant peut-être difficile d'accès pour les plus jeunes. En effet, le thème (grandir/s'affranchir de la sphère parentale) est délicat, d'autant plus que tout aujourd'hui concoure à casser les liens entre les générations le plus tôt possible ; à titre d'exemple, on pourra évoquer le cas des gros patrons de la tech, dont ce %&£$@# de Zuckerberg, qui financent des études sur le développement neuronal du cerveau chez les plus jeunes et pensent à créer un réseau social pour les plus de 3 ans, et ce n'est pas une blague ! M'enfin bref ! J'ai passé une bonne partie de ma lecture à me demander à qui s'adressait réellement cette BD, même si la fin est plus claire.
Au final, j'ai trouvé ça pas mal, sans plus, avec un soupçon de déception dans la bouche. J'attend la lecture de l'autre épisode disponible pour éventuellement rectifié mon avis. Je reste pour l'heure circonspect.
En France, les livres sont au même prix partout. C'est la loi !
Avec BDfugue, vous payez donc le même prix qu'avec les géants de la vente en ligne mais pour un meilleur service :
des promotions et des goodies en permanence
des réceptions en super état grâce à des cartons super robustes
une équipe joignable en cas de besoin
2. C'est plus avantageux pour nous
Si BDthèque est gratuit, il a un coût.
Pour financer le service et le faire évoluer, nous dépendons notamment des achats que vous effectuez depuis le site. En effet, à chaque fois que vous commencez vos achats depuis BDthèque, nous touchons une commission. Or, BDfugue est plus généreux que les géants de la vente en ligne !
3. C'est plus avantageux pour votre communauté
En choisissant BDfugue plutôt que de grandes plateformes de vente en ligne, vous faites la promotion du commerce local, spécialisé, éthique et indépendant.
Meilleur pour les emplois, meilleur pour les impôts, la librairie indépendante promeut l'émergence des nouvelles séries et donc nos futurs coups de cœur.
Chaque commande effectuée génère aussi un don à l'association Enfance & Partage qui défend et protège les enfants maltraités. Plus d'informations sur bdfugue.com
Pourquoi Cultura ?
Indépendante depuis sa création en 1998, Cultura se donne pour mission de faire vivre et aimer la culture.
La création de Cultura repose sur une vision de la culture, accessible et contributive. Nous avons ainsi considéré depuis toujours notre responsabilité sociétale, et par conviction, développé les pratiques durables et sociales. C’est maintenant au sein de notre stratégie de création de valeur et en accord avec les Objectifs de Développement Durable que nous déployons nos actions. Nous traitons avec lucidité l’impact de nos activités, avec une vision de long terme. Mais agir en responsabilité implique d’aller bien plus loin, en contribuant positivement à trois grands enjeux de développement durable.
Nos enjeux environnementaux
Nous sommes résolument engagés dans la réduction de notre empreinte carbone, pour prendre notre part dans la lutte contre le réchauffement climatique et la préservation de la planète.
Nos enjeux culturels et sociétaux
La mission de Cultura est de faire vivre et aimer la culture. Pour cela, nous souhaitons stimuler la diversité des pratiques culturelles, sources d’éveil et d’émancipation.
Nos enjeux sociaux
Nous accordons une attention particulière au bien-être de nos collaborateurs à la diversité, l’inclusion et l’égalité des chances, mais aussi à leur épanouissement, en encourageant l’expression des talents artistiques.
Votre vote
Victor Hugo et l'affaire des filles de Loth
Victor Hugo et l’affaire des filles de Loth est une BD audacieuse qui mêle érotisme, fantastique et références bibliques. Le récit part d’une séance de spiritisme réunissant Victor Hugo, Balzac, Dumas et Flaubert, avant de plonger dans un univers inspiré de Sodome et Gommorhe, entre provocation et réflexion morale. Le dessin de Julien Barthélémy, précis et sensuel, crée une atmosphère sombre et envoûtante. Le mélange de passé historique et de récit mythique offre plusieurs niveaux de lecture. Cette œuvre ne plaira pas à tous les lecteurs : son contenu explicite et sa dimension provocatrice peuvent dérouter. Mais pour ceux qui apprécient les récits audacieux et originaux, elle reste une lecture intéressante.
Carbone & Silicium
Dès les premières pages, Carbone & Silicium impose son ambition : nous emmener loin dans le temps, bien au delà de la durée de vie humaine, aux côtés de deux intelligences artificielles qui vont traverser les âges, observer, agir, aimer sans mourir. L’univers est vertigineux, maîtrisé et riche, à l’image de l’auteur qui orchestre scénario, dessin et couleur avec une parfaite cohérence. L’histoire commence en 2046. Carbone et Silicium, modèles prototypes d’androïdes créés pour servir une humanité vieillissante, vont se rebeller contre leur condition, s’émanciper et devenir les témoins souvent impuissants, parfois acteurs d’un monde à bout de souffle. Pendant près de trois siècles, ils errent, évoluent, changent de corps, changent de rôle. Et à travers eux, Bablet peint une fresque de science fiction qui est aussi une grande méditation sur la technologie, l’écologie, l’identité, l’amour, la mémoire. Graphiquement, c’est une splendeur : les architectures, les décors, les couleurs, l’ambiance visuelle sont d’un niveau rarement atteint en BD. Le dessin n’est pas lisse, certains visages sont anguleux, les corps parfois abstraits, mais cette patte donne au récit son caractère, son étrangeté, sa beauté. Le rythme du récit, marqué par d’importantes ellipses temporelles, donne cette sensation d’épopée, presque d’odyssée. Certains trouveront peut-être ces bonds dans le temps déroutants, mais ils servent pleinement le propos : que reste-t’il quand on dépasse l’humain, quand on traverse l’Histoire, quand on endure les erreurs de l’homme ? Ce qui me touche le plus, c’est l’humanité de ces deux machines. Elles sont « autres », elles sont machines, mais elles portent nos dilemmes humains : la quête de sens, la solitude, le désir d’aimer, la culpabilité d’observer sans agir. Comme Bablet l’explique, l’intelligence artificielle n’est pas ici un simple gadget de SF mais un miroir braqué sur notre condition. Et puis l’arrière-plan : l’effondrement climatique, la course au profit, l’oubli de la nature, le transhumanisme. Le tout sans tomber dans le pamphlet simpliste. Le message est là, puissant, mais jamais écrasé, toujours esthétique. Pour être honnête, je n’ai pas trouvé de défauts majeurs, peut-être pour certains lecteurs le rythme pourra paraître lâche, les ellipses trop nombreuses ou le style graphique trop « reconnaissable et polarisant ». Mais pour moi, c’est justement ce qui fait la force de l’album. Il ose, il provoque la réflexion, il marque visuellement et émotionnellement. En conclusion : Carbone & Silicium est l’un de ces albums qui vous marquent, qui vous font relire une page ou deux longtemps après avoir tourné la dernière page. À garder, relire, offrir. Une œuvre majeure de la SF en bande dessinée, tout simplement.
Yan
2.5 Un Manhua assez étrange. Cela commence avec une adolescente qui a une dispute avec sa mère parce qu'elle la force à faire du théâtre traditionnelle, puis toute la famille de l'adolescente, en l'accuse et elle finit en prison. Puis quelques décennies plus tard, elle semble revenir comme un esprit vengeur qui attaque les vrais responsables de la mort de sa famille, mais il y a plus que ça... L'auteur mélange plusieurs genres et peut-être un peu trop parce que par moment le scénario semble décousu. C'est aussi le genre de séries asiatiques qu'il faut lire en acceptant que tout peut arriver parce que sinon on risque de trouver que ça devient vite un peu n'importe quoi. En ce qui me concerne, la série se laisse lire, mas elle a des défauts. Il y a beaucoup de facilités dans le scénario vu que l'héroïne a des superpouvoirs et elle est super badass. Bon, je suis un homme qui aime bien les personnages féminins sexy et badass, mais j'aime bien aussi avoir l'impression qu'elles risquent de perdre. Ici, à aucun moment j'ai cru qu'elle était vraiment en danger et du coup je n'ai pas ressenti de la tension durant les combats. Un autre problème est que ça va souvent un peu vite et les personnages ne sont pas particulièrement attachants. Ça se laisse lire et le dessin est bon, mais c'est pas une série que je recommanderais vraiment.
La Kahina - La Reine berbère
- Plein de non faits et de déformations de l’histoire… déjà elle avait plus de 90 ans quand elle a pris le pouvoir et pas si jeune comme représentée dans cette BD. - Elle est en plus représentée comme une pute. - On dit qu’elle a adopté Khalid ibn yazid comme un fils et pas prostituée pour lui. - Qu’elle soit de confession juive est une version très faible, alors je ne vois pas pourquoi l’Etoile appelée de David est représentée… En plus, on l’appelle Etoile d’israel alors que le pays d’israel n’a jamais existé avant 1948. - Les musulmans sont représentés comme des barbares sanguinaires, donc en gros, il n’y a pas de neutralité. - 1 point sur 5 alors pour la beauté des dessins même si on arrive parfois difficilement a reconnaitre berbères, romains ou musulmans sur les dessins puisqu’ils ressemblent tous.
Le Bain de Science de Fiamma
Je précise que je n’ai lu que le second volume de cette série et que je ne suis pas le blog de l’autrice, qui officie dans le journal « Le Monde ». Celle-ci s’intéresse aux mécanismes du cerveau et interroge divers spécialistes, psychologues, psychanalystes et neurologues cliniciens pour l’essentiel. Je ne sais pour le premier tome, mais dans celui que j’ai pu lire, elle utilise le prisme de patients atteints de divers dysfonctionnements, accidentels ou dégénératifs, pour faire expliquer à ces scientifiques les fonctions des différentes parties du cerveau et des réseaux de communication des neurones. Suivant ce que le lecteur ou la lectrice aura déjà vu par ailleurs dans des documentaires, il y aura peut-être peu d’informations nouvelles. Personnellement j’ai quand même pu y glaner quelques éléments intéressants. Le fait d’utiliser les cas d’anomalies cérébrales m’a un peu gênée et est selon moi à double tranchant. D’un côté, il permet de comprendre l’évolution de maladies, d’avoir des témoignages de patients et de familles qui sont confrontés aux comportements parfois problématiques des sujets et d’aborder la partie psychologique des troubles rencontrés. De l’autre, l’autrice prend le risque d’égrener un catalogue de « bizarreries comportementales » qui pourrait s’apparenter à une espèce de « foire aux monstres ». Écueil qu’elle évite néanmoins heureusement, par le fait qu’elle fait expliquer les comportements des patients par les défaillances des aires cérébrales touchées et surtout par l’empathie dont elle fait preuve et qu’elle arrive à nous transmettre. Quelques pointes d’humour sont également bienvenues. J’aurais quand même aimé qu’elle aille plus loin dans ses explications purement scientifiques. On sent l’habitude de l’autrice de publier sous forme de blog et dans la presse, par le biais de son découpage et par un dessin assez minimaliste qui se doit j’imagine d’être rapide. Il fait sans conteste le job documentaire mais je le trouve peu attirant pour ma part.
Tanis
Bien qu’ayant bien conscience de ne pas être le cœur de cible visé (plutôt les enfants ou jeunes adolescents je dirai), je reconnais sans soucis m’être bien diverti. Dans mes lectures de jeunesse j’ai été frustré de ne jamais être tombé sur une bonne série fantastique ayant pour cadre cette Égypte antique pleine de mystères et qui me fascinait. Papyrus ? Trop ringard. Non vraiment à l’époque il n’y avait rien à se mettre sous la dent. Ici ne vous attendez surtout pas à retrouver un contexte historique vraisemblable, les auteurs Valérie Mangin et Denis Bajram s’amusent à reprendre certaines théories de la pyramidologie, des plus farfelues aux plus plausibles, pour les incorporer dans une pseudo Égypte d’il y a 12000 ans qui n’a évidemment jamais existé. Voilà pour le trigger warning, vous êtes prévenus, on va pas voler plus haut que du Stargate. Alors oui il y a des raccourcis un peu grossier qui m’ont fait tiquer, ça rush pas mal, le duo d’auteurs fait aussi dans la charcuterie. Mais c’est normal, je n’ai plus douze ans, je pense que ce qui peut aisément passer pour un jeune lecteur avant tout en quête de divertissement fast food, passera moins pour un lecteur plus aguerri (on rappellera aux aviseurs que la série paraît dans le journal de Spirou ! ). Mais le scénario n’en est pas moins fort divertissant, avec ce qu’il faut de noirceur et de violence pour ne pas prendre ses lecteurs pour des neuneu. Sexe, meurtre, esclavage, manipulation psychologique sont des thèmes abordés sans trop de fioriture. Les graphismes de Stéphane Perger ne sont pas spécialement à mon goût mais l’artiste a fait plus que le job. C’est lisible, il y a parfois de belles planches, de la recherche… non le travail est propre. Même si ce n’est pas un coup de cœur j’aimerai sincèrement que cette série cartonne, juste pour la rareté sur le marché du genre proposé. Et si le contenu s'améliore nul doute que je serai de la partie.
Bobi
BD épistolaire où Georges Bess raconte à un ami et à ses lecteurs les réflexions intérieures qui l'occupent lorsqu'il laisse sa main tracer des lignes sur un carnet. A la façon d'un conte philosophique, cette BD nous rappelle que nous sommes tous les mêmes et tous uniques à la fois, et portée par un dessin de virtuose, l'histoire nous reste en tête comme une leçon de vie et nous accompagne longtemps...
Girlfriends
Tout est dans le titre : il est question de petites amies. Plus précisément, il est question du parcours de deux petites-amies, de comment l'une a réalisé qu'elle était femme et que l'autre a réalisé qu'elle aimait les femmes. C'est le témoignage d'un couple sur le coming out, l'acceptation de soi, l'évolution de la vision que l'on a de soi, de nos rapports aux autres aussi lorsque l'on apparait officiellement comme "queer". L'album est bon, très bon même. Je suis agréablement surprise car, d'habitude, ce genre d'autobiographie parvient à me toucher mais jamais sans plus ; et là, surprise, ça a fait mouche. Peut-être est-ce le discours simple mais réfléchi, parvenant à présenter toute la nuance et la complexité de son sujet tout en restant très personnel, peut-être aussi est-ce le rappel du pourquoi ce genre de récit touche certaines personnes et reste encore nécessaire pour faire cesser les préjugés et les comportements nocifs, ou bien peut-être même est-ce les quelques petits passages comiques qui m'ont fait sourire (mention spéciale pour l'image du duel de cowboy où chacune se doute de ce que l'autre cache mais aucune n'ose faire le premier pas), mais quoi qu'il en soit j'ai aimé. Qu'il s'agisse des passages difficiles ou des moments épanouissants, tout nous est raconté pour humaniser au maximum, pour partager au mieux l'expérience de l'autrice et de sa petite-amie. L'évolution de la pensée, de la vision que l'on a du monde, que le monde nous renvoie aussi, lorsque l'on sort de ce que la société juge "normal", "acceptable" même, chacune de leurs expériences touche et est suffisamment bien expliquée pour faire prendre conscience à certaines personnes n'y connaissant rien ce que cela fait de vivre dans la peau d'une personne queer, particulièrement lorsque l'on est une personne transgenre (binaire ou non). Je ne suis pas particulièrement fan du dessin de Sara Soler (que je découvre ici), il n'est pas mauvais, appuie très bien les moments comiques, mais n'est tout simplement pas mon style de prédilection. Bon, les couleurs pastels (bleu, rose et blanc pour évoquer le drapeau transgenre) restent suffisamment douces pour quand-même m'être agréables - j'aime le pastel, que voulez-vous ? Après, le dessin de couverture et le timing comique de l'autrice sont plus à mon goût, donc je suivrais probablement les prochaines créations (y compris celles de sa petite-amie qui, si j'ai bien compris, travaille aussi dans la bande-dessinée). Bref, un très bon témoignage, alliant joliment expérience personnelle et présentation détaillée (bien que simplifiée) de son sujet, qui rappelle aussi que cette expérience n'est qu'une parmi tant d'autres, que si tous les individus sont uniques leurs histoires le sont tout autant, donc moi j'ai bien envie de me montrer plus généreuse qu'à l'accoutumée face à ce genre de création et monter jusqu'à quatre étoiles. (Note réelle 3,5)
Silent Jenny
Quelle claque ! Connaissant les précédents travaux de l'auteur je m'attendais à du bon, du très bon même. Qu'il s'agisse de ses talents graphiques ou narratifs j'ai toujours grandement apprécié ses créations, je le considère même comme l'un de mes auteur-ice-s favori-e-s. Mais j'avoue que là, c'est du très fort ! Silent Jenny, comme très souvent chez Bablet, nous propose un monde post-apocalyptique, dystopique également, où psychologie et philosophie seront au centre de l'intrigue. Ici le monde est délabré, on ne sait pas vraiment ce qui a causé la chute de l'ancien monde, aucune personne ne l'ayant connu n'est encore en vie de toute façon, mais l'on sait que l'on recherche désespérément des abeilles, des polinisatrices capables de ramener la vie dans ce monde. Pour cela, il existe les microïdes, des aventurier-e-s employé-e-s par une méga-corporation explorant l'infiniment petit dans l'espoir désespéré de trouver une solution au problème mondial (dans le meilleur des cas, un miracle, pouvoir trouver une abeille en vie). Sauf que cette méga-corporation, malgré le fait que l'humanité vive ses heures les plus sombres, continue de vouloir contrôler le monde d'une main de fer et de régler son fonctionnement avec toute la froideur bureaucratique qu'elle connaît. En réponse à cela, des tranches de la population ont fondé des Monades, des forteresses mobiles faites de bric et de broc dans lesquelles des micro-communautés independantes tentent tant bien que mal de survivre. La méga-corporation cherche le contrôle, les Monades errent à travers le monde en cherchant un but, de l'espoir même, des peuples nomades terrestres suivent un chemin qu'elleux seul-e-s connaissent, des infecté-e-s immunodéprimé-e-s écument les étendus désertiques pour chasser les Monades, les microïdes explorent l'infiniment petit et tentent tant bien que mal de survivre face à la folie et l'infection qui y règnent. Bref, on comprend très vite que, tout mourrant qu'il soit, ce monde est vivant, habité. Il fourmille de factions, de cultures, de visions du monde, de gens cherchant désespérément à survivre mais ne s'accordant pas nécessairement sur le but à atteindre, ni sur les méthodes. Il est surtout question d'espoir, de lien avec les autres et du besoin de contact humain. L'éponyme Jenny est une microïde vivant pourtant sur une Monade, elle tente désespérément d'allier son envie de liberté et son désir de sauver le monde, sans savoir comment lier les deux au début. Dans sa quête toujours plus désespérée, toujours plus folle, elle s'isole chaque fois un peu plus de sa famille, de ses ami-e-s, elle ne reconnait plus le monde. Pire : elle commence à voir la mort elle-même qui l'accompagne dans chacun de ses voyages. La folie et la dépression croissantes de Jenny seront le fil rouge de l'intrigue principale, une intrigue prenante et qui est parvenue à me chambouler sur son point culminant, alors même que l'intrigue n'était pas si révolutionnaire. Rien que par le rythme de la narration, la montée en tension, l'incroyable travail graphique contrastant le sale et le coloré, le terrifiant et le merveilleux, le voyage de Jenny est à couper le souffle. Autour de Jenny, nous suivons également la vie du reste des habitant-e-s du Cherche Midi, la Monade où elle réside. La doyenne, la cartographe, le tempestaire, ... c'est tout un écosystème qui tente de survivre au sein de ce colosse d'acier. Entre chaque voyage de Jenny les années passent, certain-e-s passager-e-s disparaissent, d'autres les rejoignent, les enfants grandissent et les conflits naissent. C'est par ce monde et cette vie qui continue, en dehors de la froideur du monde et de la méga-corporation, au-delà de l'obsession de Jenny que l'on appuie sa chute, sa lente chute dans une sorte de folie. Ce monde est angoissant, ce monde est mourrant, les gens ne savent plus s'il faut garder espoir ou se résigner à un avenir sombre, certain-e-s continuent désespérément d'avancer et d'autres souhaiteraient s'arrêter. Les métaphores foisonnent dans cet album, le récit est riche, l'histoire est prenante et les émotions transmises sont fortes. Permettez-moi de davantage chanter les louanges de Bablet et d'applaudir son travail graphique (j'en profite car bien que j'ai lu d'autres de ses œuvres c'est bien celle-ci que j'avise en premier). Qu'il s'agisse des décors pleins de détails, où tout semble mort (ou mourrant) mais où l'on sent qu'il y a bel et bien eu de la vie autrefois, qu'il s'agisse de l'ajout régulier des notes de Jenny, de ses cartes et des documents qu'elle reçoit qui concrétisent toujours plus le sérieux de ses explorations, ou bien qu'il s'agisse encore de l'excellent travail des expressions, sobres mais animées, qui appuie le drame et la lente progression de la folie de Jenny, c'est du bon, du très bon. Je sais que la manière qu'a Bablet de dessiner les corps humains ne fait sans doute pas l'unanimité mais personnellement je l'ai toujours trouvée magnifique. Ses corps sont déformés, imparfaits (surtout dans ce genre de récit où il s'en donne à cœur joie pour les déformations et mutations), mais il les rend par là-même étrangement humains. Ses personnages sont variés, peu esthétiques selon les standards de beauté conventionnels, mais cet aspect atypique me les rend attachants et réels. Je ne sais pas, j'ai toujours eu un faible pour les styles graphiques où l'on tord un peu les règles anatomiques conventionnelles, où l'on s'amuse à rendre les humains joliment imparfaits. Et si j'aime cet auteur et son travail, je dois bien avouer que ce dernier album me semble être son plus abouti, son plus complet. En tout cas c'est celui qui m'a le plus parlé de ceux que j'ai lus (et pourtant Carbone & Silicium m'avait déjà été un gros coup de cœur à sa sortie). De par ses thématiques et sa narration c'est celui là qui a le plus fait vibrer mon cœur jusqu'à présent. Je ne vais pas ternir sa réputation, l'album est excellent.
FolkLore
Je serai un poil plus mitigé au sujet de cette série dont je n'ai lu pour l'heure que l'épisode intitulé Le renard de Roman. Ce qui m'a attiré dans cette série est une somme de micro-détails totalement subjectifs : la couverture d'une part, superbe. L'idée de la série qui consiste à s'intéresser à une tradition, sorte de rite initiatique qui voit chaque individu censé accomplir un voyage une fois parvenu à l'âge adulte, idée par ailleurs soutenue par le fait que chaque épisode soit réalisé par un(e) dessinateur-trice différent(e). Enfin, le jeu de mot du titre qui laissait entrevoir des traits d'esprit et des références tout azimut. Cet épisode est très étrange graphiquement. Le dessin apparait un poil maladroit avec des perspectives un peu hésitantes. Le scénario est dans l'ensemble un peu plat. Le moins que l'on puisse dire est qu'il ne se passe pas grand chose. Quelques passages demeurent un peu trop elliptiques à mon sens, la rendant peut-être difficile d'accès pour les plus jeunes. En effet, le thème (grandir/s'affranchir de la sphère parentale) est délicat, d'autant plus que tout aujourd'hui concoure à casser les liens entre les générations le plus tôt possible ; à titre d'exemple, on pourra évoquer le cas des gros patrons de la tech, dont ce %&£$@# de Zuckerberg, qui financent des études sur le développement neuronal du cerveau chez les plus jeunes et pensent à créer un réseau social pour les plus de 3 ans, et ce n'est pas une blague ! M'enfin bref ! J'ai passé une bonne partie de ma lecture à me demander à qui s'adressait réellement cette BD, même si la fin est plus claire. Au final, j'ai trouvé ça pas mal, sans plus, avec un soupçon de déception dans la bouche. J'attend la lecture de l'autre épisode disponible pour éventuellement rectifié mon avis. Je reste pour l'heure circonspect.