Un polar qui débute dans la campagne des Etats unis à partir des années 30. La retranscription de l'époque, du lieu et des personnages sonne juste et c'est l'un des éléments qui participe à la réussite de cette tragédie qui va nous faire côtoyer la noirceur de l'âme humaine.
Le scénario place notre personnage principal au cœur d'une série de meurtres, les premiers commencent dès son enfance et les suivants le poursuivent tout au long de sa vie. Cette répétition donne à notre histoire l'impression que rien ne va s'arrêter, une quête de la vérité qui devient obsessionnelle dans une ambiance oppressante où l'auteur nous amène même à douter du héros. Nous sommes emmenés plusieurs fois vers de fausses pistes mais l'étau se resserre toujours autour de notre héros, une intensité qui ne faiblit pas tout au long de l'histoire.
Et comme tout bon polar, le suspense nous emmène jusqu'à la fin pour nous dévoiler le coupable.
Le dessin est classique, c'est la colorisation que j'ai le plus aimé. Guérineau utilise peu de couleur, il date le récit en étant proche d'un noir et blanc pendant la partie en Géorgie. Pour les scènes violentes, Guérineau colorise ses cases en rouge, il nous donne l'impression de voir le dessin à travers un filtre, le procédé est simple et efficace, dès l'apparition de cette couleur nous savons qu'un drame est en cours.
Palpitant
C’est l’histoire de deux veufs septuagénaires, Emile et Edmond. Leurs journées ne sont pas trépidantes mais cela le fait. Entre la pêche à la ligne au bord de la rivière et un coup au bistro du coin avec les copains, voilà en gros leur programme journalier jusqu’au jour ou Edmond casse sa pipe ! Le quotidien d’Emile s’en trouve chamboulé. Il est en plein désarroi. Il décide de retourner sur les lieux de son enfance avant de mettre un point final à cette vie sans saveur. Tout ne va pas se passer comme prévu !
L’histoire est plaisante et amusante. C’est une lecture divertissante. Le graphisme de Rabaté aux teintes douces est dépouillé et sans aucune fioriture. Pour être honnête ce n’est pas trop ma came mais je dois dire que j’ai quand même apprécié ce dessin un poil naïf. Le périple nostalgique d’Emile et ses rencontres improbables sont cocasses et magnifiquement décrites sans jamais être grivoises. Celles-ci lui redonnent le goût à la vie !
Voilà donc un récit tonique et ragaillardissant qui se lit d’une seule traite. C’est au final une lecture jubilatoire que je recommande. Sex, drug, and Rock’n roll !
Je ne connaissais ni Michel Magne, ni ce « manoir », et cet album, en plus de me les faire découvrir, a le mérite de nous faire visiter un pan de l’histoire culturelle et mondaine des années 1950 à 1980.
Car Magne a été au cœur d’une certaine agitation, créant un pont entre une certaine avant-garde – qu’il incarnait au niveau musical, mais aussi par ses actions proches de l’agit-prop lettriste, et la pop culture naissante dans l’après-guerre.
Et le fait est que ce bonhomme a vraiment brûlé la vie par tous les bouts, à tel point que sa fin est presque prévisible, tant sa santé devait en prendre un coup, et tant on pressent que les pique-assiettes, mais aussi la société et autres rapaces affairistes, ne manqueraient pas de lui transmettre la note.
Très intéressant sur le fond donc, au niveau sociologique, historique et culturel, cet album ravira aussi les amateurs du sujet car au milieu de la partie proprement BD, une biographie, mais aussi de nombreux documents (photos, articles de presse, etc.) donnent un petit air anthologique au travail des auteurs. Les auteurs ont fait le choix de tout centrer sur Magne, et sa biographie éclipse donc un peu l’activité du « château », ou les personnalités gravitant autour de lui (même si Marie-Claude sa dernière épouse apparait beaucoup, plutôt comme spectatrice d’ailleurs).
Reste quelques bémols. L’aspect touche-à-tout de Magne peut aussi avoir un côté gênant, surtout lorsque pointe son côté mondain (avec Sagan, Cocteau ou Barclay par exemple). De plus, si le personnage de Magne, haut en couleurs, toujours en mouvement, peut captiver, on comprend qu’il n’était pas facile de le supporter sur la durée. Et la violence qu’il a pu montrer envers ses proches, lorsque sa vie a commencé à mal tourner, détériore l’image que l’on pouvait avoir de lui.
Mais ça reste quand même un album intéressant, riche.
Cette histoire a pour décor une rue imaginaire du Bronx - Dropsie avenue – dont les habitants ont peuplé l’enfance et la jeunesse de Will Eisner. Le postulat de départ est, pour moi, d’emblée intéressant. Je ne me lasse pas des tranches de vie racontées et dessinées par Will Eisner dont le talent ne se dément pas au fil des albums. J’aime ses récits, ses personnages au caractère haut en couleur, évoluant dans la simplicité de leur quotidien. Un peu comme dans un film passant en accéléré, on assiste à une succession de vagues migratoires qui s’installent, s’approprient les lieux au grand dam de la précédente génération, puis voient arriver d’un mauvais œil la vague suivante qui, après un temps de cohabitation plus ou moins facile, finit par les remplacer. Ceux qui s’en sortent par le haut quittent le Bronx pour un autre quartier de New York où devrait les attendre une vie meilleure. C’est l’histoire du peuplement de New York qui défile sous nos yeux. Le quartier, lui aussi, évolue au fil des générations : les vieilles bâtisses disparaissent, des immeubles les remplacent. L’album est plus attaché au quartier qu’aux personnages auxquels on a à peine le temps de s’attacher. Les guerres mondiales, la crise économique des années 30, l’évolution technologique et industrielle, la politique, les syndicats marquent la vie et changent le visage de la rue. J’ai vraiment beaucoup aimé cette « une biographie d’une rue de Bronx ». Will Eisner est un très grand auteur, sa vision truculente de la société est un régal. Et ses dessins aussi. D’une grande élégance et d’une grande finesse, ils gagnent en liberté et en énergie en s’affranchissant du cadre. Une très belle histoire de voisinage.
Saviez-vous que des femmes servaient dans l'armée russe pendant la seconde guerre mondiale ? Et plus particulièrement comme tireuses d'élite. Elles furent deux mille, la plus connue était Lioudmila Pavlitchenko, trois cent neuf ennemis tués confirmés.
Cet album raconte l'histoire de plusieurs de ces snipers et plus particulièrement celle de Sara la meilleure de toutes. La meilleure pour tuer.
Pendant le deuxième hiver de l'opération Barbarossa, sept tireuses d'élite soviétiques font des ravages dans les rangs des nazis, en particulier Sara. Bientôt elles devront affronter un invisible sniper.
Le thème n'est pas nouveau mais le fait qu'il s'agisse d'une femme et du front de l'Est avec la vision soviétique du conflit, ça c'est nouveau et c'est surprenant.
Garth Ennis dépeint une guerre invisible dans toute son horreur, sans concession. Glaçant. Une guerre où l'ennemi n'est pas seulement dans le camp d'en face mais aussi en son sein. L'officier politique est toujours là, il encourage, il motive à grand coup de "mère patrie", de "éliminer les fascistes" et surtout il observe pour déceler la moindre défaillance.
Un récit dur où la voix off de Sara déshumanise toutes les atrocités des combats, un job comme un autre.
On vit aussi des moments intimes dans leur baraquement pendant leurs repos ce qui permet de découvrir de nouvelles facettes de nos tueuses et surtout ce qui ronge Sara.
Des femmes aux tempéraments très différents mais si complémentaires.
Une narration non linéaire sur trois espaces temps qui rend le récit captivant.
Une fin qui ne m'a pas surpris mais avec la touche personnelle de Sara.
Le dessin de Epting est magnifique, on ressent la morsure du froid. Un trait tout en précision constellé de détails.
Une recherche de l'authentique, aucunes fausses notes. Nous sommes littéralement plongés en 1942.
Un découpage dynamique et des prises de vue en contre-plongée saisissantes.
Des couleurs aux tons hivernales.
Une réussite sur tous les niveaux.
Cette magnifique série prouve à ceux qui ne le pensent pas que plaisir et culture peuvent faire bon ménage dans une BD.
L'excellent travail de Nancy Peña pour les dessins et de Blandine Le Callet pour le scénario en est la meilleure des preuves.
Blandine Le Callet revisite la légende noire de Médée d'une façon originale avec un parti pris réaliste qui se tient de bout en bout.
Point d'intervention divine, ni de sauveur de dernière minute mais tout bonnement un enchaînement de situations tellement logiques et vraisemblables que l'on a l'impression d'avoir un récit journalistique.
Le scénario suit évidemment les textes antiques mais Le Callet se permet quelques adaptations dans la mise en scène qui renforcent l'homogénéité et la puissance dramatique du récit.
Tout au long des cinq tomes (le tome 4 est composé de deux livres) ce n'est qu'un crescendo dans la tragédie qui se déroule sous nos yeux pour atteindre son climax en fin de tome 4 livre 1 mais qui ne retombe pas à plat pour autant ensuite.
Cette construction du récit est vraiment remarquable et très rare par sa qualité littéraire dans les séries que j'ai lues.
Le dessin de Nancy Peña est au même niveau. L'auteure joue avec les situations émotionnelles, les éclairages et les découpages.
Dans l'abécédaire de la fin de l'édition intégrale, elle s'amuse à nous présenter quelques-uns de ses anachronismes dans les styles d'architectures, de costumes ou de bijoux. Comme si les auteures nous invitaient à une relecture savante pour retrouver ces détails.
Un vrai régal.
La multiplicité des thèmes abordés d'une manière profonde vous conduit à une réflexion permanente sur l'utilisation du progrès, sur l'amour, sur le combat des femmes pour la liberté ou sur la violence.
La déconstruction de l'image du héros Grec au premier rang desquels Jason, est terriblement efficace et crédible. Cela me plait beaucoup.
De l'excellente BD. À lire à offrir, à posséder pour un public pas trop jeune.
Je n'étais pas un grand fan de Goldorak dans ma jeunesse mais cet album m'a insufflé une bouffée de nostalgie, réveillant des souvenirs oubliés, et je m'incline devant la qualité de sa réalisation. C'est de la belle ouvrage.
Graphiquement, il m'est difficile de réaliser la part de chacun mais les quatre dessinateurs ont su mêler les forces pour des planches de toute beauté, sublimées ensuite par une excellente colorisation. C'est surprenant de voir ces personnages dont on reconnait les traits identiques à ceux du manga tout en les voyant évoluer sans aucun faux pas dans un décor réaliste et soigné. Et il y a quelques très belles scènes et prises de vue.
Le récit tient très bien la route. Il respecte les personnages tout en leur ajoutant profondeur et intérêt, et il les plonge dans une situation qui est respectueuse de l'esprit de la série originelle tout en poussant la réflexion plus loin et en modernisant le propos.
Tout ne m'a pas forcément toujours convaincu, comme l'introduction d'un Actarus en héros brisé moralement, concept que j'ai trop souvent vu et qui m'ennuie. J'ai aussi été un petit peu frustré de ne pas voir un vrai gros combat de Goldorak comme s'il manquait la cerise sur le gâteau. Et à quelques pages de la fin de l'album, je croyais être aussi un peu déçu par la conclusion de l'intrigue, mais finalement la véritable conclusion de l'intrigue était assez inattendue pour moi et je l'ai trouvée bonne, même si je ne suis pas sûr que le sacrifice qu'il implique était vraiment obligatoire et qu'il n'y avait aucun moyen de sauvetage.
Néanmoins, malgré ces petites réticences, je retiens tout de même une excellente BD et un très bel hommage à une série de notre enfance.
Sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing et face à la crise pétrolière, nos instances décident que la seule solution pour que nous soyons autonomes énergiquement et affranchis de pays tiers, est d’accroitre le nombre de centrales nucléaires. Et pas n’importe où … en Bretagne notamment. La commune de Plogoff - à proximité de la pointe du Raz – est ainsi désignée comme site pouvant accueillir une centrale. Une décision qui ne passe pas pour les habitants. La résistance pour ce projet s’organise pour préserver l’une des plus belles côtes de France, son environnement et ses zones de pêches et peu importe les promesses d’une embellie économique et les emplois à la clé.
Cette lutte a un écho particulier pour moi. J’ai été à Plogoff avec mon père pour participer pacifiquement à différentes manifestions qui se sont souvent terminées par le jet - par de nombreux CRS - de gaz lacrymogènes. Hey hey du coup j’avais la permission de sortit mon lance-pierre !
La persévérance a payé. Comme pour la commune du Pellerin (c’est mon bled !). Plogoff et le Pellerin même combat. L’élection de François Mitterrand a mis un terme aux différents projets.
Cet album reprend les différentes étapes de cette bataille. Il était qu’une poignée au départ en 1978 contre le projet d’installation par EDF d’une centrale nucléaire. La mobilisation populaire a été extraordinaire jusqu’à ce rassemblement immense sur la plage de la baie des trépassés, de presque 150 000 personnes en mai 1980. J’y étais !
Cette BD m’a fait plonger dans une autre époque que j’ai vécue avec mon père. Juste pour ça je mets un 4 étoiles. J’ai adoré.
On ne le sait pas assez, mais cette opposition a donné naissance à l’écologie politique dans le monde entier. Vive la Bretagne ! La contestation du peuple est une arme incroyablement puissante.
Il y avait Walking Dead avec les adultes, Seuls avec les enfants, laissons maintenant la place aux ados avec "Gung Ho".
La colorisation numérique me rebute souvent mais celle-ci me fait penser au cell-shading de certains jeux vidéo ou de Spiderverse dans l'animation. Donc j'ai aimé.
L'aspect communautaire est bien mis en avant et, les personnages se différenciant bien les uns des autres, les auteurs peuvent ouvrir toutes les pistes possibles. Et si dans telle famille une brebis galeuse faisait telle chose, le résultat aurait-il été le même avec telle autre personne ? Petite communauté mais grosses responsabilités pour tous les personnages, des gros bras aux décideurs, personne n'est là pour le décor.
Bien sûr, les personnages sont stéréotypés mais cela permet aussi de s'installer rapidement auprès d'eux et d'assister au spectacle. Une bonne lecture qui valait le lllooonnnggg temps d'attente.
C'est purement du roman graphique, et j'aime ça ! Dans une BD bien dense, Luke nous parle de sa fascination pour les États-Unis et de son parcours progressif dans la perte de celle-ci. A travers son trail dans les États-Unis, il sera confronté à une difficulté physique puis mentale pour se dépasser. Et y parviendra en partie, même si cela prendra du temps et de l'énergie.
J'ai beaucoup aimé lire cette BD. Entre l'évocation des paysages américains, qui m'ont souvent fascinés (les grands espaces vides de la côte ouest ont quelque chose de fascinant) et les rencontres, les mentalités le long du treck, mais aussi les difficultés qu'il a en lui. C'est un combat rude et physique, autant contre les éléments que contre soi même. Il en faut, de la volonté, pour continuer alors que rien ne te donne envie sur cette route.
Le dessin est assez en adéquation avec le propos, retranscrivant bien l'immensité des espaces vides de présence humaine et la difficulté de cette marche. En la lisant, j'étais porté par le personnage et son envie d'aller de l'avant, jusqu'au bout, têtu comme un Irlandais. D'autre part, je trouve que l'on est rapidement en empathie avec Luke et ses interrogations intérieures. Entre la réalité brutale du rêve américain, dans la métaphore (réelle) de la chambre où fut crée Superman, mais aussi dans sa propre conception des choses, ou son ressenti. On se les gèle avec lui, on explore et j'ai ressenti la douleur physique qui l'accompagne de cette marche si longue.
Bref, je n'aurais pas envie de m'étendre trop longtemps, mais je trouve que la lecture est réellement plaisante. Prenant place dans une Amérique qui n'a pas encore connue Trump, on sent tout le poids de la représentation de ce pays dans l'imaginaire de l'auteur, mais aussi l'impact que cela fait lorsque la réalité frappe. Une sorte d'anti-utopie sur les Etats-Unis, présentant une facette ni sombre ni glorieuse, simplement réelle et terriblement humaine. C'est vraiment bon, le genre de lecture que je recommande.
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Seul le silence
Un polar qui débute dans la campagne des Etats unis à partir des années 30. La retranscription de l'époque, du lieu et des personnages sonne juste et c'est l'un des éléments qui participe à la réussite de cette tragédie qui va nous faire côtoyer la noirceur de l'âme humaine. Le scénario place notre personnage principal au cœur d'une série de meurtres, les premiers commencent dès son enfance et les suivants le poursuivent tout au long de sa vie. Cette répétition donne à notre histoire l'impression que rien ne va s'arrêter, une quête de la vérité qui devient obsessionnelle dans une ambiance oppressante où l'auteur nous amène même à douter du héros. Nous sommes emmenés plusieurs fois vers de fausses pistes mais l'étau se resserre toujours autour de notre héros, une intensité qui ne faiblit pas tout au long de l'histoire. Et comme tout bon polar, le suspense nous emmène jusqu'à la fin pour nous dévoiler le coupable. Le dessin est classique, c'est la colorisation que j'ai le plus aimé. Guérineau utilise peu de couleur, il date le récit en étant proche d'un noir et blanc pendant la partie en Géorgie. Pour les scènes violentes, Guérineau colorise ses cases en rouge, il nous donne l'impression de voir le dessin à travers un filtre, le procédé est simple et efficace, dès l'apparition de cette couleur nous savons qu'un drame est en cours. Palpitant
Les Petits Ruisseaux
C’est l’histoire de deux veufs septuagénaires, Emile et Edmond. Leurs journées ne sont pas trépidantes mais cela le fait. Entre la pêche à la ligne au bord de la rivière et un coup au bistro du coin avec les copains, voilà en gros leur programme journalier jusqu’au jour ou Edmond casse sa pipe ! Le quotidien d’Emile s’en trouve chamboulé. Il est en plein désarroi. Il décide de retourner sur les lieux de son enfance avant de mettre un point final à cette vie sans saveur. Tout ne va pas se passer comme prévu ! L’histoire est plaisante et amusante. C’est une lecture divertissante. Le graphisme de Rabaté aux teintes douces est dépouillé et sans aucune fioriture. Pour être honnête ce n’est pas trop ma came mais je dois dire que j’ai quand même apprécié ce dessin un poil naïf. Le périple nostalgique d’Emile et ses rencontres improbables sont cocasses et magnifiquement décrites sans jamais être grivoises. Celles-ci lui redonnent le goût à la vie ! Voilà donc un récit tonique et ragaillardissant qui se lit d’une seule traite. C’est au final une lecture jubilatoire que je recommande. Sex, drug, and Rock’n roll !
Les Amants d'Hérouville - Une histoire vraie
Je ne connaissais ni Michel Magne, ni ce « manoir », et cet album, en plus de me les faire découvrir, a le mérite de nous faire visiter un pan de l’histoire culturelle et mondaine des années 1950 à 1980. Car Magne a été au cœur d’une certaine agitation, créant un pont entre une certaine avant-garde – qu’il incarnait au niveau musical, mais aussi par ses actions proches de l’agit-prop lettriste, et la pop culture naissante dans l’après-guerre. Et le fait est que ce bonhomme a vraiment brûlé la vie par tous les bouts, à tel point que sa fin est presque prévisible, tant sa santé devait en prendre un coup, et tant on pressent que les pique-assiettes, mais aussi la société et autres rapaces affairistes, ne manqueraient pas de lui transmettre la note. Très intéressant sur le fond donc, au niveau sociologique, historique et culturel, cet album ravira aussi les amateurs du sujet car au milieu de la partie proprement BD, une biographie, mais aussi de nombreux documents (photos, articles de presse, etc.) donnent un petit air anthologique au travail des auteurs. Les auteurs ont fait le choix de tout centrer sur Magne, et sa biographie éclipse donc un peu l’activité du « château », ou les personnalités gravitant autour de lui (même si Marie-Claude sa dernière épouse apparait beaucoup, plutôt comme spectatrice d’ailleurs). Reste quelques bémols. L’aspect touche-à-tout de Magne peut aussi avoir un côté gênant, surtout lorsque pointe son côté mondain (avec Sagan, Cocteau ou Barclay par exemple). De plus, si le personnage de Magne, haut en couleurs, toujours en mouvement, peut captiver, on comprend qu’il n’était pas facile de le supporter sur la durée. Et la violence qu’il a pu montrer envers ses proches, lorsque sa vie a commencé à mal tourner, détériore l’image que l’on pouvait avoir de lui. Mais ça reste quand même un album intéressant, riche.
Dropsie Avenue
Cette histoire a pour décor une rue imaginaire du Bronx - Dropsie avenue – dont les habitants ont peuplé l’enfance et la jeunesse de Will Eisner. Le postulat de départ est, pour moi, d’emblée intéressant. Je ne me lasse pas des tranches de vie racontées et dessinées par Will Eisner dont le talent ne se dément pas au fil des albums. J’aime ses récits, ses personnages au caractère haut en couleur, évoluant dans la simplicité de leur quotidien. Un peu comme dans un film passant en accéléré, on assiste à une succession de vagues migratoires qui s’installent, s’approprient les lieux au grand dam de la précédente génération, puis voient arriver d’un mauvais œil la vague suivante qui, après un temps de cohabitation plus ou moins facile, finit par les remplacer. Ceux qui s’en sortent par le haut quittent le Bronx pour un autre quartier de New York où devrait les attendre une vie meilleure. C’est l’histoire du peuplement de New York qui défile sous nos yeux. Le quartier, lui aussi, évolue au fil des générations : les vieilles bâtisses disparaissent, des immeubles les remplacent. L’album est plus attaché au quartier qu’aux personnages auxquels on a à peine le temps de s’attacher. Les guerres mondiales, la crise économique des années 30, l’évolution technologique et industrielle, la politique, les syndicats marquent la vie et changent le visage de la rue. J’ai vraiment beaucoup aimé cette « une biographie d’une rue de Bronx ». Will Eisner est un très grand auteur, sa vision truculente de la société est un régal. Et ses dessins aussi. D’une grande élégance et d’une grande finesse, ils gagnent en liberté et en énergie en s’affranchissant du cadre. Une très belle histoire de voisinage.
Sara (Ennis/Epting)
Saviez-vous que des femmes servaient dans l'armée russe pendant la seconde guerre mondiale ? Et plus particulièrement comme tireuses d'élite. Elles furent deux mille, la plus connue était Lioudmila Pavlitchenko, trois cent neuf ennemis tués confirmés. Cet album raconte l'histoire de plusieurs de ces snipers et plus particulièrement celle de Sara la meilleure de toutes. La meilleure pour tuer. Pendant le deuxième hiver de l'opération Barbarossa, sept tireuses d'élite soviétiques font des ravages dans les rangs des nazis, en particulier Sara. Bientôt elles devront affronter un invisible sniper. Le thème n'est pas nouveau mais le fait qu'il s'agisse d'une femme et du front de l'Est avec la vision soviétique du conflit, ça c'est nouveau et c'est surprenant. Garth Ennis dépeint une guerre invisible dans toute son horreur, sans concession. Glaçant. Une guerre où l'ennemi n'est pas seulement dans le camp d'en face mais aussi en son sein. L'officier politique est toujours là, il encourage, il motive à grand coup de "mère patrie", de "éliminer les fascistes" et surtout il observe pour déceler la moindre défaillance. Un récit dur où la voix off de Sara déshumanise toutes les atrocités des combats, un job comme un autre. On vit aussi des moments intimes dans leur baraquement pendant leurs repos ce qui permet de découvrir de nouvelles facettes de nos tueuses et surtout ce qui ronge Sara. Des femmes aux tempéraments très différents mais si complémentaires. Une narration non linéaire sur trois espaces temps qui rend le récit captivant. Une fin qui ne m'a pas surpris mais avec la touche personnelle de Sara. Le dessin de Epting est magnifique, on ressent la morsure du froid. Un trait tout en précision constellé de détails. Une recherche de l'authentique, aucunes fausses notes. Nous sommes littéralement plongés en 1942. Un découpage dynamique et des prises de vue en contre-plongée saisissantes. Des couleurs aux tons hivernales. Une réussite sur tous les niveaux.
Médée (Le Callet / Peña)
Cette magnifique série prouve à ceux qui ne le pensent pas que plaisir et culture peuvent faire bon ménage dans une BD. L'excellent travail de Nancy Peña pour les dessins et de Blandine Le Callet pour le scénario en est la meilleure des preuves. Blandine Le Callet revisite la légende noire de Médée d'une façon originale avec un parti pris réaliste qui se tient de bout en bout. Point d'intervention divine, ni de sauveur de dernière minute mais tout bonnement un enchaînement de situations tellement logiques et vraisemblables que l'on a l'impression d'avoir un récit journalistique. Le scénario suit évidemment les textes antiques mais Le Callet se permet quelques adaptations dans la mise en scène qui renforcent l'homogénéité et la puissance dramatique du récit. Tout au long des cinq tomes (le tome 4 est composé de deux livres) ce n'est qu'un crescendo dans la tragédie qui se déroule sous nos yeux pour atteindre son climax en fin de tome 4 livre 1 mais qui ne retombe pas à plat pour autant ensuite. Cette construction du récit est vraiment remarquable et très rare par sa qualité littéraire dans les séries que j'ai lues. Le dessin de Nancy Peña est au même niveau. L'auteure joue avec les situations émotionnelles, les éclairages et les découpages. Dans l'abécédaire de la fin de l'édition intégrale, elle s'amuse à nous présenter quelques-uns de ses anachronismes dans les styles d'architectures, de costumes ou de bijoux. Comme si les auteures nous invitaient à une relecture savante pour retrouver ces détails. Un vrai régal. La multiplicité des thèmes abordés d'une manière profonde vous conduit à une réflexion permanente sur l'utilisation du progrès, sur l'amour, sur le combat des femmes pour la liberté ou sur la violence. La déconstruction de l'image du héros Grec au premier rang desquels Jason, est terriblement efficace et crédible. Cela me plait beaucoup. De l'excellente BD. À lire à offrir, à posséder pour un public pas trop jeune.
Goldorak
Je n'étais pas un grand fan de Goldorak dans ma jeunesse mais cet album m'a insufflé une bouffée de nostalgie, réveillant des souvenirs oubliés, et je m'incline devant la qualité de sa réalisation. C'est de la belle ouvrage. Graphiquement, il m'est difficile de réaliser la part de chacun mais les quatre dessinateurs ont su mêler les forces pour des planches de toute beauté, sublimées ensuite par une excellente colorisation. C'est surprenant de voir ces personnages dont on reconnait les traits identiques à ceux du manga tout en les voyant évoluer sans aucun faux pas dans un décor réaliste et soigné. Et il y a quelques très belles scènes et prises de vue. Le récit tient très bien la route. Il respecte les personnages tout en leur ajoutant profondeur et intérêt, et il les plonge dans une situation qui est respectueuse de l'esprit de la série originelle tout en poussant la réflexion plus loin et en modernisant le propos. Tout ne m'a pas forcément toujours convaincu, comme l'introduction d'un Actarus en héros brisé moralement, concept que j'ai trop souvent vu et qui m'ennuie. J'ai aussi été un petit peu frustré de ne pas voir un vrai gros combat de Goldorak comme s'il manquait la cerise sur le gâteau. Et à quelques pages de la fin de l'album, je croyais être aussi un peu déçu par la conclusion de l'intrigue, mais finalement la véritable conclusion de l'intrigue était assez inattendue pour moi et je l'ai trouvée bonne, même si je ne suis pas sûr que le sacrifice qu'il implique était vraiment obligatoire et qu'il n'y avait aucun moyen de sauvetage. Néanmoins, malgré ces petites réticences, je retiens tout de même une excellente BD et un très bel hommage à une série de notre enfance.
Plogoff
Sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing et face à la crise pétrolière, nos instances décident que la seule solution pour que nous soyons autonomes énergiquement et affranchis de pays tiers, est d’accroitre le nombre de centrales nucléaires. Et pas n’importe où … en Bretagne notamment. La commune de Plogoff - à proximité de la pointe du Raz – est ainsi désignée comme site pouvant accueillir une centrale. Une décision qui ne passe pas pour les habitants. La résistance pour ce projet s’organise pour préserver l’une des plus belles côtes de France, son environnement et ses zones de pêches et peu importe les promesses d’une embellie économique et les emplois à la clé. Cette lutte a un écho particulier pour moi. J’ai été à Plogoff avec mon père pour participer pacifiquement à différentes manifestions qui se sont souvent terminées par le jet - par de nombreux CRS - de gaz lacrymogènes. Hey hey du coup j’avais la permission de sortit mon lance-pierre ! La persévérance a payé. Comme pour la commune du Pellerin (c’est mon bled !). Plogoff et le Pellerin même combat. L’élection de François Mitterrand a mis un terme aux différents projets. Cet album reprend les différentes étapes de cette bataille. Il était qu’une poignée au départ en 1978 contre le projet d’installation par EDF d’une centrale nucléaire. La mobilisation populaire a été extraordinaire jusqu’à ce rassemblement immense sur la plage de la baie des trépassés, de presque 150 000 personnes en mai 1980. J’y étais ! Cette BD m’a fait plonger dans une autre époque que j’ai vécue avec mon père. Juste pour ça je mets un 4 étoiles. J’ai adoré. On ne le sait pas assez, mais cette opposition a donné naissance à l’écologie politique dans le monde entier. Vive la Bretagne ! La contestation du peuple est une arme incroyablement puissante.
Gung Ho
Il y avait Walking Dead avec les adultes, Seuls avec les enfants, laissons maintenant la place aux ados avec "Gung Ho". La colorisation numérique me rebute souvent mais celle-ci me fait penser au cell-shading de certains jeux vidéo ou de Spiderverse dans l'animation. Donc j'ai aimé. L'aspect communautaire est bien mis en avant et, les personnages se différenciant bien les uns des autres, les auteurs peuvent ouvrir toutes les pistes possibles. Et si dans telle famille une brebis galeuse faisait telle chose, le résultat aurait-il été le même avec telle autre personne ? Petite communauté mais grosses responsabilités pour tous les personnages, des gros bras aux décideurs, personne n'est là pour le décor. Bien sûr, les personnages sont stéréotypés mais cela permet aussi de s'installer rapidement auprès d'eux et d'assister au spectacle. Une bonne lecture qui valait le lllooonnnggg temps d'attente.
Americana
C'est purement du roman graphique, et j'aime ça ! Dans une BD bien dense, Luke nous parle de sa fascination pour les États-Unis et de son parcours progressif dans la perte de celle-ci. A travers son trail dans les États-Unis, il sera confronté à une difficulté physique puis mentale pour se dépasser. Et y parviendra en partie, même si cela prendra du temps et de l'énergie. J'ai beaucoup aimé lire cette BD. Entre l'évocation des paysages américains, qui m'ont souvent fascinés (les grands espaces vides de la côte ouest ont quelque chose de fascinant) et les rencontres, les mentalités le long du treck, mais aussi les difficultés qu'il a en lui. C'est un combat rude et physique, autant contre les éléments que contre soi même. Il en faut, de la volonté, pour continuer alors que rien ne te donne envie sur cette route. Le dessin est assez en adéquation avec le propos, retranscrivant bien l'immensité des espaces vides de présence humaine et la difficulté de cette marche. En la lisant, j'étais porté par le personnage et son envie d'aller de l'avant, jusqu'au bout, têtu comme un Irlandais. D'autre part, je trouve que l'on est rapidement en empathie avec Luke et ses interrogations intérieures. Entre la réalité brutale du rêve américain, dans la métaphore (réelle) de la chambre où fut crée Superman, mais aussi dans sa propre conception des choses, ou son ressenti. On se les gèle avec lui, on explore et j'ai ressenti la douleur physique qui l'accompagne de cette marche si longue. Bref, je n'aurais pas envie de m'étendre trop longtemps, mais je trouve que la lecture est réellement plaisante. Prenant place dans une Amérique qui n'a pas encore connue Trump, on sent tout le poids de la représentation de ce pays dans l'imaginaire de l'auteur, mais aussi l'impact que cela fait lorsque la réalité frappe. Une sorte d'anti-utopie sur les Etats-Unis, présentant une facette ni sombre ni glorieuse, simplement réelle et terriblement humaine. C'est vraiment bon, le genre de lecture que je recommande.