Les derniers avis (39359 avis)

Par Erik
Note: 4/5
Couverture de la série La Route de la Vie
La Route de la Vie

Rarement je n'ai lu un conte pour enfant aussi triste. Aussi, je me demande si c'est vraiment destiné à la jeunesse. Il faut dire que le siège de Léningrad durant la Seconde Guerre Mondiale a fait près d'un million de morts. Il n'y a pas eu autant de mort en France durant cette même guerre. C'est un chiffre effrayant qu'on a du mal à s'imaginer. Un million de personnes qui ont perdu la vie si ce n'est pas dans les combats, c'est par la famine. On observera que le peuple soviétique s'est battu courageusement pour être maître de son destin et non dans la fuite éhontée face à l'adversité. Ce conte slave met l'accent sur une petite fille qui vient de perdre sa famille et qui n'a plus rien à perdre que sa vie pour sauver celle de son peuple. Certes, il y a un côté fantastique qui mêle les saisons hivernales avec la déesse de la vie contre le démon de la mort. Je trouve que cette histoire est bien menée jusqu'au final époustouflant et dramatique. Le graphisme est d'ailleurs d'une grande beauté et d'une grande précision notamment dans les décors et les visages des personnages. Sinon, la pureté et l'innocence peut rencontrer l'horreur, la guerre ainsi que la mort.

22/10/2018 (modifier)
Par Blue Boy
Note: 4/5
Couverture de la série Les Filles de Salem
Les Filles de Salem

De l’histoire des sorcières de Salem, Arthur Miller en avait tiré une pièce de théâtre pour dénoncer le maccarthysme dans les années 50, pièce qu’il porta ensuite au cinéma (en 1996), quarante ans après une première adaptation française par Raymond Rouleau et Jean-Paul Sartre. Mais c’est la première fois que le neuvième art s’y est intéressé. Son auteur, Thomas Gilbert, à la fois à la plume et aux pinceaux, n’a pas retenu l’allégorie de Miller, se contentant d’en modifier la perspective. Bien plus que le maccarthysme, qui désormais appartient au passé, c’est le patriarcat tenace de nos sociétés qu’il dénonce, lequel continue à peser lourdement sur la condition féminine, malgré une évolution certaine depuis que les femmes ont commencé, au début du XXe siècle, à réclamer l’égalité de statut par rapport aux hommes. Pour mieux étayer ses propos, l’auteur a conçu un scénario bien structuré avec des personnages marquants. Dans ce paisible petit village du Massachusetts fondé par des colons protestants, tout a l’air presque idyllique, jusqu’au jour où Abigail, fille de paysans, va croiser le chemin d’un Indien rôdant autour du village, « L’homme en noir ». Cette dernière tombera vite sous le charme de ce personnage furtif, presque irréel, qui semble vivre en totale communion avec les éléments. Si les villageois l’ont surnommé ainsi, c’est en raison de son visage grimé en noir. Aucun doute pour eux, il ne peut s’agir que d’une incarnation du malin ! Avec sa seule flûte et son pas aérien, l’homme va entraîner Abigail et son amie Betty, fille du révérend, dans une folle sarabande champêtre de danse, de musique et de légendes tribales millénaires, à mille lieues de tout ce qu’elles ont connu jusqu’alors. Hélas, cette liberté nouvelle, que les jeunes filles tentent de garder secrète, sera de courte durée. Car les récoltes ont été mauvaises et l’impatience se fait sentir dans la communauté de Salem. En tant que « notable protecteur » grassement rémunéré par cette dernière, le révérend va devoir désigner des boucs-émissaires afin de détourner de sa personne la colère croissante des habitants. Ainsi, le village tout entier se verra submergé par un déferlement de haine et de violence hystérique d’une ampleur inédite. Abigail, ainsi que celles et ceux qui l’ont côtoyée, connaîtront une terrible descente aux enfers jusqu’au tragique dénouement que l’on connaît… Thomas Gilbert a mis en images son histoire de façon saisissante. Au fil des pages, la tension se fait de plus en plus palpable, contrastant avec les scènes du début tout en poésie légère où l’on voit danser Abigail avec son nouvel ami indien au beau milieu d’une nature luxuriante, lumineuse et protectrice. Mais à partir du moment où les choses se gâtent, le trait laisse progressivement ressortir ses aspérités et c’est alors qu’apparaissent des images « subliminales » tirées d’enluminures religieuses représentant des créatures sataniques. Alors que les couleurs s’assombrissent peu à peu, il ne reste que le rouge des flammes pour éclairer l’obscurité, car à Salem, l’enfer est arrivé sur Terre…. Les visages, eux, se font plus grimaçants et haineux. Quant au révérend, son personnage apparaît comme le plus terrifiant, bien davantage que « L’homme en noir » et tous ceux qu’il accuse d’accointances avec le démon. Comme si d’une certaine manière, il était gêné par son propre reflet au cœur trop pur, lui-même étant vêtu de noir des pieds à la tête et non exempt de tout soupçon… À quelques jours d’Halloween, une célébration qui continue à « diaboliser joyeusement » les sorcières, « Les filles de Salem » délivre non seulement un propos sociologique fort sur le traitement indigne du patriarcat à l’égard des femmes, mais constitue parallèlement une ode à la liberté et à la fête. De même, l’auteur nous met en garde sur les dangers de l’effet de meute en rappelant comment la haine peut être contagieuse. Transposé à notre époque où la tendance politique consiste de plus en plus à emprunter les chemins de l’intolérance sous les provocations d’un leader un peu trop charismatique (un peu comme dans les années 30...), où les réseaux sociaux jouent parfois le rôle de défouloir cruel, son livre équivaut à un acte de salubrité publique. Cette très belle relecture du « mythe » s’impose ainsi comme une des meilleures productions de l’année.

21/10/2018 (modifier)
Par sloane
Note: 4/5
Couverture de la série Irish Melody (Lester Cockney Jeunesse)
Irish Melody (Lester Cockney Jeunesse)

Magnifique ce diptyque, il donne envie d'aller se perdre sur la lande puis finir le soir au coin d'un feu de tourbe avec une Guiness à la main, puis alors que la nuit tombe une belle violoniste irlandaise aux cheveux roux viendra nous ensorceler avec une vieille ballade. Maitrise du dessin donc, des décors, des personnages avec de vraies trognes, comme celles des vraies gens quoi! Et puis il y a l'histoire qui n'oublie pas de s'entrechoquer avec la grande histoire, celle d'un territoire envahi et qui obligea des milliers de gens à émigrer quand ils avaient eu la chance de ne pas mourir de famine. Tout cela est véritablement prenant, personnellement j'en redemande, pendant le temps de ma lecture j'ai voyagé en Irlande aux côtés de Lester Cockney. Faites lire au plus grand nombre.

21/10/2018 (modifier)
Par sloane
Note: 4/5
Couverture de la série Marshal Bass
Marshal Bass

Ce franchement bien vient surtout de la grande originalité de cette BD, à savoir un héros noir. C'est une chose suffisamment rare pour quelle soit notée. Qui plus est notre héros n'est pas blanc bleu comme on dit et sans jeu de mots. Il cogne, il trucide et trompe allègrement madame. Une fois ces choses dites, le gros souci c'est justement la mise en scène de ce héros, en effet au sortir de la guerre de sécession il est hautement improbable qu'un noir soit enrôlé dans la brigade des U.S. Marshals. En ce qui concerne le scénario cela tient très bien la route, les codes du genre sont respectés, l'intrigue est bien ficelée et l'action n'hésite pas à être au rendez vous de manière particulièrement violente. Au final c'est une série plutôt sympa avec juste un petit bémol en ce qui concerne la colorisation; pas forcément d'option d'achat, à voir après un emprunt en bibliothèque.

20/10/2018 (modifier)
Par Erik
Note: 4/5
Couverture de la série La Partition de Flintham
La Partition de Flintham

Une très belle histoire de château anglais, romanesque et gothique à l'époque victorienne. Par ailleurs, c'est couronné par un graphisme pictural remarquable qui semble presque magique. On est réellement tout de suite subjugué par la grâce et la beauté de cette oeuvre. Enfin, on ne fera pas d'effort pour entrer directement dans le coeur du sujet tout en comprenant le sens. Chaque case est une pure merveille graphique avec pourtant de tristes paysages froids balayés par le vent, la pluie ou la neige. Les landes anglaises seront perçues comme réellement hostiles. Voilà pour le décor certes un peu lugubre ! Je suis étonné de savoir que c'est le premier roman graphique de l'auteure Barbara Baldi qui réussit tout de suite à nous impressionner sans crier gare. Il s'agit d'une histoire d'héritage entre deux soeurs très différentes dont l'une est plutôt douée pour un instrument de musique à savoir le clavecin. Il y a aura beaucoup d'épreuves pour la plus gentille avec un espoir de s'en sortir au bout du chemin. Une oeuvre esthétique d'une délicate beauté avec un scénario qui ne nous lâchera pas. Bref, une oeuvre rare car brillante.

19/10/2018 (modifier)
Par Ju
Note: 4/5
Couverture de la série C'était la guerre des tranchées
C'était la guerre des tranchées

J'ai le souvenir d'avoir lu cette bd pour la première fois alors que j'étais assez jeune (je devais être au collège) et elle m'avait marqué. L'horreur de la guerre est bien retranscrite par Tardi, aussi bien dans le dessin que dans le texte, et la narration donne un côté très humain à cette guerre inhumaine. C'est d'ailleurs l'ambition de Tardi : donner la parole aux hommes de l'ombre, à ceux que l'on a envoyé, quatre ans durant, se faire trouer la peau en première ligne. Ici, on nous décrit successivement plusieurs types ordinaires, pas des héros, pas des gentils ni des méchants d'ailleurs, juste des gars normaux qui forment l'ensemble de la société française. L'auteur veut nous démontrer l'horreur de la guerre, et pas nous raconter une histoire composée autour d'un seul et même personnage mais la diversité de l'horreur de la der des ders, et il y parvient tout à fait. Le seul reproche que je pourrais faire à cette bd est que je l'ai lue plus âgé, une fois adulte, et elle m'a moins touché, peut être parce que je m'attendais à être confronté à la mort et la misère. Néanmoins, cela reste une bd dont je conseille vivement la lecture.

19/10/2018 (modifier)
Couverture de la série Un peu de fumée bleue...
Un peu de fumée bleue...

Un peu de fumée bleue, voilà un titre intrigant, mais tout à fait adapté à cette histoire, qui se développe de façon parfois nonchalante, sur un rythme lent, qui s'échappe même parfois, comme les volutes relâchées par une cigarette, de la petite histoire, pour rejoindre la grande. Un beau poème de Tristan Corbière sert de fil rouge à l'histoire, qui se déroule dans un pays qui ne sera jamais nommé, même si on le situe facilement dans l'Europe centrale d'Après guerre. On peut même deviner - les indices sont nombreux - que la Tchécoslovaquie sert de modèle. Les méthodes de la dictature (torture, répression sanglante), sa fin, et le difficile retour à la démocratie - et les vengeances souhaitées par les victimes: l'inévitable débat autour de l'oubli, du pardon s'invite dans l'histoire. Voilà pour la Grande histoire. Mais au creux de celle-ci se développe une histoire d'amour, née de l'enfer répressif, une jeune fille échappant à sa routine avec un ancien prisonnier politique qui échappe lui à la torture. C'est cette femme qui raconte leur histoire à une photographe de passage. Le rythme lent que j'évoquais, laisse place au développement des sentiments, à l'imagination, se révèle approprié à cette intrigue, dans laquelle on entre par petits pas. J'aurais préféré une conclusion plus ouverte, plus en adéquation avec le reste de l'histoire, alors que Lapière a privilégié une fin positive, une sorte de happy end un chouia artificiel. Le dessin de Pellejero, avec un trait très gras, n'est pas forcément de ceux que je préfère, mais il se laisse apprivoiser. Note réelle 3,5/5.

19/10/2018 (modifier)
Par Erik
Note: 4/5
Couverture de la série La Tragédie Brune
La Tragédie Brune

C'est l'histoire vraie du premier reporter français assassiné par les nazis en 1935 après avoir mené une enquête en Allemagne en 1934. En effet, depuis 1933, les nazis se sont emparés du pouvoir et la société a bien changé pour ce germanophile qui va décrire la situation politique de ce pays. J'ai bien aimé ce reportage qui décrit le regard de ce journaliste au regard des scènes auxquels il assiste dans ce pays où la haine a prit le dessus dans des rêves de revanche. Son récit peut frapper par sa modernité car la tragédie brune a bien été écrit puis oublié dans cette période de l'avant-guerre. Tout ce qu'il avait senti est malheureusement arrivé par la suite avec cette guerre mondiale hautement destructrice. Oui, un regard vraiment lucide qui nous fait découvrir que le journalisme a toujours été un métier à risque lorsqu'on dénonce des régimes autoritaires.

17/10/2018 (MAJ le 18/10/2018) (modifier)
Couverture de la série Le Reste du monde
Le Reste du monde

Chauzy nous livre sa vision du monde post-apocalyptique tel que souvent exploré dans les récits de genre. Et si sa vision n’a rien de révolutionnaire, il n’empêche que son récit a réussi à m’accrocher au point que j’attends maintenant chaque nouveau tome avec impatience. Plusieurs raisons à cela. Tout d’abord, il y a l’aspect visuel du récit. Et là, clairement, certaines planches fichent le tournis tant elles ont une gueule infernale ! Notamment la scène du déluge orageux en pleine montagne qui sonne véritablement le début des hostilités. La composition et les couleurs choisies m’ont immergé dans cette nature fascinante et effrayante à la fois. Mais si ces scènes grandioses existent, elles ne composent pas la majeure partie de l’album, l’accent étant souvent mis sur les relations entre les personnages. Là aussi, Chauzy livre un beau travail même si moins spectaculaire. Les personnages sont bien typés, expressifs, vivants. Les compositions sont bien pensées, toujours lisibles, bien équilibrées. Le découpage ne casse jamais le rythme du récit. Du point de vue visuel, je pense que nous sommes face à une très grande bande dessinée. Du point de vue du scénario, je trouve que la série est peut-être un peu en-deçà du niveau que son aspect visuel laissait espérer. Non que ce soit mauvais, loin de là même, mais ce scénario n’offre fondamentalement pas grand-chose d’original. Le destin de cette mère de famille et de ses enfants est prenant mais pas poignant. On s’attache aux personnages sans qu’ils ne nous deviennent proches. Pourtant, les rebondissements ne manquent pas et le travail sur la psychologie de certains personnages est très intéressant. En conséquence, le scénario tient la route, la progression narrative est bien maîtrisée mais il manque ce choc qui m’émouvrait au point de réellement craindre pour les personnages. Après trois tomes, je continue de rester témoin de cette histoire. J’aime la lire, j’attends le prochain tome avec impatience… mais je ne peux pas dire que je me sente proche des personnages comme c’est le cas pour d’autres séries. En résumé, voici une très bonne série, avec un dessin parfois tout simplement grandiose et un scénario certes classique mais qui, dans le genre post-apocalyptique, fait mieux que simplement tenir la route. Cerise sur le gâteau : le premier diptyque nous offre une conclusion satisfaisante. Du coup, si vous n’accrochez pas, il n’est pas obligatoire de continuer l’aventure. Ceci dit, le troisième tome est très bon et offre l’un ou l’autre rebondissement qui me fait penser que vous rateriez quelque chose si vous vous en arrêtiez là… Mieux que « pas mal » mais « franchement bien » est peut-être un peu excessif. Bien, tout simplement bien. A lire et à posséder.

16/01/2017 (MAJ le 18/10/2018) (modifier)
Par Erik
Note: 4/5
Couverture de la série Moins qu'hier (plus que demain)
Moins qu'hier (plus que demain)

Je n'étais sans doute pas habitué à un humour aussi corrosif de la part de l'auteur qui explore les couples de manière bien cynique. Bien entendu, il y a certaines vérités inavouables qui ressortent dans toutes ces situations désopilantes sur la vie conjugale. Je dois dire que j'admire la capacité de Fabcaro à se renouveler même s'il s'agit toujours du même genre humour. Qu'en sera-t'il le jour où il abordera une bd plus dramatique ? Une oeuvre un peu dérangeante par moment car le couple n'est pas montré sous son meilleur jour. Cependant, les chutes fonctionnent toujours aussi bien. Les dialogues sont plus que piquants. En tous les cas, j'aime cette maturité d'esprit.

17/10/2018 (modifier)