Ma cacabane au fond du jardin.
Avec un titre de bédé aussi banal qu’un roman d’Alexandre, « Le Jardin » avait peu de chance d’exister aux yeux d’un bédéphile lambda. Ce « recueil de récits oubliés » est pourtant une découverte aussi inattendue qu’extraordinaire. Si toutes les historiettes ne tiennent pas nécessairement le haut du pavé, aucune ne démérite et quelques récits sont sidérants de concision et d’émotion retenue. Leurs contenus se passent de mots et s’expriment totalement par l’image. Ainsi de « Paris juin 1945 » paru initialement dans Comix 2000, l’album aux deux mille pages muettes édité par L’Association, collectif d’auteurs indépendants. Un déporté juif revient des camps de la mort et retrouve son appartement parisien occupé par un nouveau propriétaire qui se justifie en lui montrant ses titres. L’homme en pyjama rayé ne récrimine pas mais glisse son doigt derrière le miroir du salon pour en extraire une photographie de sa famille décimée. La derrière image briserait le cœur de n’importe qui en possédant un. La parodie de Blake & Mortimer en Swartz et Totenheimer parue en 2002 dans la défunte revue Ferraille n’est pas seulement grinçante à outrance, elle situe parfaitement bien l’œuvre d’Emile Bravo dans la droite raie de la ligne claire à travers laquelle Edgar Pierre Jacobs s’est lui-même illustré. Seulement là où Jacobs faisait ronronner ses deux gugusses aussi héroïques qu’inaltérables, Sir Francis Blake et Philip Mortimer, Emile Bravo les métamorphose en sbires patentés de la Solution finale. Alors que cela ne gaze plus trop pour Herr doktor Totenheimer confronté au doute, l’inflexible mais débonnaire Franzeskus Swartz le remet sur les rails rectilignes de l’idéologie nazie. La prouesse narrative est ensuite obtenue haut la main par « Young America ». Le récit en huit planches d’un jeune joueur de base-ball promis à toutes les joies de sa future belle vie américaine est totalement chamboulé en plein milieu. Les cases se répètent à l’identique dès le début de la cinquième planche mais les dialogues sont diamétralement opposés. Le résultat obtenu est du meilleur effet. L’album est cohérent de bout en bout. Les running gags sont réussis avec les lapins sauteurs ou encore la 4e de couverture répondant à la page de titre. Continuateur corrosif du trait épuré initié par Hergé, Emile Bravo est un auteur discret mais percutant qui se place du côté des rieurs à panache.
Je n'aurais pas grand chose à ajouter à l'avis de l'ami Sloane, qui est parfaitement bien dans mon esprit.
Ici, nous sommes dans un livre qui n'a plus grand chose à voir avec une Bande-dessinée, c'est de l'illustration pure, mais de par sa liaison avec la BD "Le voyage d'Ulysse", on pourra considérer légitime de le mettre avec les BD. Bref, c'est compliqué de parler de narration séquentielle, et plutôt qu'une BD avec histoire, c'est une histoire illustrée par laquelle il faudra se laisser porter.
Et c'est pour cela que j'ai beaucoup aimé cet ouvrage : c'est une longue lettre revenant sur la vie de Anna, dans laquelle on se laisse entrainer. C'est des voyages, des lieux, des gens. C'est des beaux paysages, une histoire de vie et d'amour assez jolie. Rien de bien extraordinaire, rien de neuf sous le soleil, mais une belle histoire qui donne envie de voyager.
C'est un ouvrage dispensable, mais simplement beau pour peu qu'on ait envie de se laisser porter. Les croquis, les peintures et les écrits se mélangent bien, l'ensemble se laisse contempler et relire. Et j'aime bien me laisser aller aux voyages dans ce genre !
Je n'aime pas les histoires absurdes de façon inconditionnelle, loin s'en faut. Qui a tué l'idiot ? par exemple, ne m'a absolument pas plu.
La lecture des avis précédents m'avait donc préparé à un album auquel - c'était sûr ! - je n'allais pas accrocher.
Intrigué tout de même par la référence au roman Le troisième policier de Flann O'Brien, j'ai été un peu voir de quoi il retournait. Et je dois avouer que la célèbre théorie atomique de la bicyclette qui postule le mélange inéluctable, au cours du temps, des atomes du cycliste avec ceux de sa bicyclette a éveillé mon intérêt, l'idée étant à la fois simple, originale et délicieusement absurde.
Armé de ces quelques informations, je me lançai dans cette lecture à laquelle, rappelons-le, je n'allais pas accrocher.
Première impression : ce dessin me plaît beaucoup, rond et mignon. Les personnages ont des expressions agréablement outrées, et c'est d'une manière générale toute la mise en scène qui l'est, gentiment outrée.
Deuxième impression : l'irruption du fantastique - le mystère de la disparition de Simplet - arrive brusquement, comme un choc. Et les tentatives pléthoriques des villageois pour expliquer ce mystère sont un plaisir à lire. Les théories sont toutes plus farfelues les unes que les autres, et je les ai trouvées très plaisantes.
Troisième impression : j'ai repensé au Horla de Maupassant. Le fantastique s'introduit dans l'histoire, et deux logiques s'opposent, l'une rationnelle, l'autre irrationnelle. On peut alors prendre son parti et considérer soit que le narrateur est devenu fou, soit que le surnaturel existe. Ici la chose est joliment différente. La disparition restera présentée comme objective, et les tentatives de rationalisation se heurteront à ce mur. Et c'est là que le fantastique se fond dans l'absurde.
Il n'y a donc en effet pas de réponse à cette énigme dans cet album. Mais le dessin, la mise en scène, les dialogues, le côté absurde qui m'a poussé à aller chercher plus d'informations, tout cela a fait que finalement cette lecture a été vraiment plaisante et m'a donné envie de découvrir Le troisième policier.
Note réelle : 3,5 / 5.
En flânant dans les rayons de ma bibliothèque communale, mon regard s'est rapidement posé sur cette bande dessinée. Tout de suite, j'ai été intrigué et je n'ai pas attendu pour la dévorer. En effet, j'ai trouvé cette couverture à la fois fascinante et terrifiante. J'ai tourné les premières pages et je n'ai ensuite su refermer l'album qu'après en avoir lu l'intégralité.
Tout d'abord, le dessin est incroyablement beau. Le tout en noir et blanc, avec une atmosphère angoissante tout au long. Pour autant, l'histoire n'est pas que suspens et angoisse. Nous avons droit à une belle relation entre une mère atteinte de troubles d'aphasie et une fille bavarde et pleine d'imaginations.
Tout au long de l'histoire, nous allons prendre du plaisir à découvrir cette belle relation dans un contexte rempli de mystères, de meurtres, d'enquêtes et de surnaturels.
L'histoire ne souffre d'aucun temps mort, le rythme est parfaitement maîtrisé et la fin est excellente.
Ma seule petite déception est que certains personnages ne sont que trop peu développés. On aimerait tellement en voir plus...
4.5 étoiles
MAUPERTUIS, OSE ET RIT !
Une très bonne série documentaire sur le sort d'un migrant qui a dû fuir sa Syrie natale à cause de la guerre.
J'ai trouvé son histoire passionnante du début jusqu'à la fin, malgré le fait qu'on sait déjà comment va être sa situation finale. C'est très intéressant comment la vie d'un jeune homme peut basculer alors que son futur semblait prometteur. On voit aussi qu'il n'a pas tout de suite pensé à venir en Europe, il a essayé des pays arabes et la Turquie, et la décision d'aller en France va venir ensuite et un peu par hasard. J'ai tout adoré dans cette série: la situation en Syrie, des réfugiés dans les pays musulmans (où on voit que ce n'est pas mieux qu'en Europe), les problèmes pour embarquer clandestinement, etc et etc. Il y a des passages terriblement émouvants et j'ai appris plein de choses.
Une œuvre à lire si on veut en apprendre plus sur un sujet terriblement d'actualité.
Dans la droite lignée de Le Spirou d'Emile Bravo - Le journal d'un ingénu, mais pouvant se lire indépendamment, cette histoire prévue en 4 tomes se déroule dans les mêmes décors et à la même époque à savoir la Seconde Guerre mondiale. On retrouve le beau style ligne claire d'Emile Bravo. A travers les yeux des héros, on voit la guerre côté belge dont on n'a pas forcément une bonne connaissance. Le jeune Spirou vit toujours dans sa modeste chambre, il est tellement empathique et généreux malgré sa misère, comme quand il rachète un ballon de foot aux gamins du quartier, qu'on se demande comment il peut être ami avec Fantasio, si égoïste et stupide. Le caractère énervant de Fantasio s'atténue un peu dans le deuxième tome, même si ce personnage reste un des seuls ressorts comiques car le reste est un peu tristoune. Un projet ambitieux, c'est bien dommage qu'il faille encore attendre plusieurs années avant d'en voir la fin.
Edit janvier 2022. Dans le tome 3 on est toujours sur ce ton mélancolique. La relation d'ados qui joue le chaud et le froid entre Spirou et Mieke prend un peu trop de place à mon goût. On découvre aussi l'engagement de tout un chacun pour résister à l'occupant à sa manière et aussi la montée en puissance des déportations.
Max Andersson est un auteur suédois, né en 1962, dont le travail est publié dans de multiples pays dont la France avec plusieurs ouvrages à l'Association. Il semble assez peu prolifique vu sa bibliographie. Je ne lui jette pas la pierre, il a peut-être un vrai métier à côté (joke). En tout cas je le découvre avec cet album qui est un recueil de plusieurs histoires de longueurs variées dont Lamort qui illustre la couverture et donne son titre à cet ouvrage paru chez nous en 1998.
J'ai beaucoup aimé, à la fois le dessin, superbe noir et blanc avec des pages très chargées et sombres - ça doit coûter cher en encre - mais cela reste lisible, mais aussi les histoires qui sont originales. C'est à la fois dans le registre de l'humour et un peu fantastique avec des objets qui s'animent, tout cela dans une ambiance à la fois poétique et dark qui imprègnent entre autres les courtes histoires de la voiture Bagnolet et de Flingo. Difficile à résumer car les histoires sont hétérogènes mais c'est à lire et je vais essayer de trouver d'autres travaux de cet auteur notamment Pixy.
Avec cet album, vous découvrirez l’étonnante histoire vraie de Saartjie Baartman, esclave sud africaine vendue pour une poignée de livres pour être exhibée à travers toute l’Europe au début du 19ième siècle. Elle possède une particularité physique bien particulière, elle a des fesses proéminentes ! Devenue une bête de foire, la Vénus Hottentote sera exploitée par ses maitres. Elle est maltraitée et même forcée à se prostituer. Elle finira ses jours loin des siens dans la misère la plus complète.
Le plus incroyable, sa dépouille, objet de nombreux examens, est restée au Muséum d’histoire naturelle de Paris jusqu’en 2002 avant d’être restituée enfin à son pays d’origine pour une sépulture digne.
Emotions garanties avec ce récit. C’est puissant. Vous ne sortirez pas indemne de la descente aux enfers de Saartjie Baartman, exploitée par des hommes cupides. Un sentiment de révolte et d’injustice viendront vous titiller bien évidemment.
Le graphisme est magnifique avec une colorisation sublime. Le trait est brut et rugueux. Mais cela colle parfaitement avec l’atmosphère sombre voulu. Visuellement c’est terrible.
Même si je n’ai pas découvert l’histoire de Saartjie Baartman, je me suis laissé embarqué dans ce récit dramatique et sordide. Une belle ode à la tolérance.
Sandoval est décidément un auteur que j’aime beaucoup. C’est la troisième création de lui que je lis, et c’est encore une lecture très agréable.
D’abord le dessin, très particulier, fragile, original, avec une colorisation elle aussi simple et quelque peu inattendue. Vraiment chouette.
Quant à l’histoire, elle joue encore sur les mêmes ressors : la jeunesse, le passage de l’adolescence, la naissance de l’amour, avec une nouvelle fois des ados comme quasi uniques personnages. Et, au milieu de cette fragilité, surgit un fantastique noir et quelque peu brutal – même si, ici, je l’ai trouvé beaucoup moins présent que pour Le Serpent d'eau, ou Mille tempêtes.
Tony Sandoval est un auteur attachant, que je vous encourage à découvrir.
Gally reprend à son compte un thème où on ne l'attendait pas forcément. Retournée dans le passé quand elle avait 10 ans, avec ses souvenirs et sa connaissance et mentalité d'adulte, elle gère les choses d'une façon bien différente que dans son passé "réel". Elle en profite pour éliminer ce et ceux qui l'embêtaient, et pour faire tourner les choses plus à son goût.
J'avoue aimer le style de Gally, à la fois pour l'humour et le dessin. J'avais donc un a priori positif, mais force est de constater que cette histoire fonctionne très bien et qu'on prend un plaisir presque cathartique et suivre cette refonte du passé faite avec un plaisir un poil revanchard. Elle maîtrise très bien les expressions et l'outrance, et on en profite ici à plein.
Note réelle : 3,5 / 5.
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Le Jardin d'Emile Bravo
Ma cacabane au fond du jardin. Avec un titre de bédé aussi banal qu’un roman d’Alexandre, « Le Jardin » avait peu de chance d’exister aux yeux d’un bédéphile lambda. Ce « recueil de récits oubliés » est pourtant une découverte aussi inattendue qu’extraordinaire. Si toutes les historiettes ne tiennent pas nécessairement le haut du pavé, aucune ne démérite et quelques récits sont sidérants de concision et d’émotion retenue. Leurs contenus se passent de mots et s’expriment totalement par l’image. Ainsi de « Paris juin 1945 » paru initialement dans Comix 2000, l’album aux deux mille pages muettes édité par L’Association, collectif d’auteurs indépendants. Un déporté juif revient des camps de la mort et retrouve son appartement parisien occupé par un nouveau propriétaire qui se justifie en lui montrant ses titres. L’homme en pyjama rayé ne récrimine pas mais glisse son doigt derrière le miroir du salon pour en extraire une photographie de sa famille décimée. La derrière image briserait le cœur de n’importe qui en possédant un. La parodie de Blake & Mortimer en Swartz et Totenheimer parue en 2002 dans la défunte revue Ferraille n’est pas seulement grinçante à outrance, elle situe parfaitement bien l’œuvre d’Emile Bravo dans la droite raie de la ligne claire à travers laquelle Edgar Pierre Jacobs s’est lui-même illustré. Seulement là où Jacobs faisait ronronner ses deux gugusses aussi héroïques qu’inaltérables, Sir Francis Blake et Philip Mortimer, Emile Bravo les métamorphose en sbires patentés de la Solution finale. Alors que cela ne gaze plus trop pour Herr doktor Totenheimer confronté au doute, l’inflexible mais débonnaire Franzeskus Swartz le remet sur les rails rectilignes de l’idéologie nazie. La prouesse narrative est ensuite obtenue haut la main par « Young America ». Le récit en huit planches d’un jeune joueur de base-ball promis à toutes les joies de sa future belle vie américaine est totalement chamboulé en plein milieu. Les cases se répètent à l’identique dès le début de la cinquième planche mais les dialogues sont diamétralement opposés. Le résultat obtenu est du meilleur effet. L’album est cohérent de bout en bout. Les running gags sont réussis avec les lapins sauteurs ou encore la 4e de couverture répondant à la page de titre. Continuateur corrosif du trait épuré initié par Hergé, Emile Bravo est un auteur discret mais percutant qui se place du côté des rieurs à panache.
Les Voyages d'Anna
Je n'aurais pas grand chose à ajouter à l'avis de l'ami Sloane, qui est parfaitement bien dans mon esprit. Ici, nous sommes dans un livre qui n'a plus grand chose à voir avec une Bande-dessinée, c'est de l'illustration pure, mais de par sa liaison avec la BD "Le voyage d'Ulysse", on pourra considérer légitime de le mettre avec les BD. Bref, c'est compliqué de parler de narration séquentielle, et plutôt qu'une BD avec histoire, c'est une histoire illustrée par laquelle il faudra se laisser porter. Et c'est pour cela que j'ai beaucoup aimé cet ouvrage : c'est une longue lettre revenant sur la vie de Anna, dans laquelle on se laisse entrainer. C'est des voyages, des lieux, des gens. C'est des beaux paysages, une histoire de vie et d'amour assez jolie. Rien de bien extraordinaire, rien de neuf sous le soleil, mais une belle histoire qui donne envie de voyager. C'est un ouvrage dispensable, mais simplement beau pour peu qu'on ait envie de se laisser porter. Les croquis, les peintures et les écrits se mélangent bien, l'ensemble se laisse contempler et relire. Et j'aime bien me laisser aller aux voyages dans ce genre !
La Montgolfière
Je n'aime pas les histoires absurdes de façon inconditionnelle, loin s'en faut. Qui a tué l'idiot ? par exemple, ne m'a absolument pas plu. La lecture des avis précédents m'avait donc préparé à un album auquel - c'était sûr ! - je n'allais pas accrocher. Intrigué tout de même par la référence au roman Le troisième policier de Flann O'Brien, j'ai été un peu voir de quoi il retournait. Et je dois avouer que la célèbre théorie atomique de la bicyclette qui postule le mélange inéluctable, au cours du temps, des atomes du cycliste avec ceux de sa bicyclette a éveillé mon intérêt, l'idée étant à la fois simple, originale et délicieusement absurde. Armé de ces quelques informations, je me lançai dans cette lecture à laquelle, rappelons-le, je n'allais pas accrocher. Première impression : ce dessin me plaît beaucoup, rond et mignon. Les personnages ont des expressions agréablement outrées, et c'est d'une manière générale toute la mise en scène qui l'est, gentiment outrée. Deuxième impression : l'irruption du fantastique - le mystère de la disparition de Simplet - arrive brusquement, comme un choc. Et les tentatives pléthoriques des villageois pour expliquer ce mystère sont un plaisir à lire. Les théories sont toutes plus farfelues les unes que les autres, et je les ai trouvées très plaisantes. Troisième impression : j'ai repensé au Horla de Maupassant. Le fantastique s'introduit dans l'histoire, et deux logiques s'opposent, l'une rationnelle, l'autre irrationnelle. On peut alors prendre son parti et considérer soit que le narrateur est devenu fou, soit que le surnaturel existe. Ici la chose est joliment différente. La disparition restera présentée comme objective, et les tentatives de rationalisation se heurteront à ce mur. Et c'est là que le fantastique se fond dans l'absurde. Il n'y a donc en effet pas de réponse à cette énigme dans cet album. Mais le dessin, la mise en scène, les dialogues, le côté absurde qui m'a poussé à aller chercher plus d'informations, tout cela a fait que finalement cette lecture a été vraiment plaisante et m'a donné envie de découvrir Le troisième policier. Note réelle : 3,5 / 5.
L'Homme gribouillé
En flânant dans les rayons de ma bibliothèque communale, mon regard s'est rapidement posé sur cette bande dessinée. Tout de suite, j'ai été intrigué et je n'ai pas attendu pour la dévorer. En effet, j'ai trouvé cette couverture à la fois fascinante et terrifiante. J'ai tourné les premières pages et je n'ai ensuite su refermer l'album qu'après en avoir lu l'intégralité. Tout d'abord, le dessin est incroyablement beau. Le tout en noir et blanc, avec une atmosphère angoissante tout au long. Pour autant, l'histoire n'est pas que suspens et angoisse. Nous avons droit à une belle relation entre une mère atteinte de troubles d'aphasie et une fille bavarde et pleine d'imaginations. Tout au long de l'histoire, nous allons prendre du plaisir à découvrir cette belle relation dans un contexte rempli de mystères, de meurtres, d'enquêtes et de surnaturels. L'histoire ne souffre d'aucun temps mort, le rythme est parfaitement maîtrisé et la fin est excellente. Ma seule petite déception est que certains personnages ne sont que trop peu développés. On aimerait tellement en voir plus... 4.5 étoiles MAUPERTUIS, OSE ET RIT !
L'Odyssée d'Hakim
Une très bonne série documentaire sur le sort d'un migrant qui a dû fuir sa Syrie natale à cause de la guerre. J'ai trouvé son histoire passionnante du début jusqu'à la fin, malgré le fait qu'on sait déjà comment va être sa situation finale. C'est très intéressant comment la vie d'un jeune homme peut basculer alors que son futur semblait prometteur. On voit aussi qu'il n'a pas tout de suite pensé à venir en Europe, il a essayé des pays arabes et la Turquie, et la décision d'aller en France va venir ensuite et un peu par hasard. J'ai tout adoré dans cette série: la situation en Syrie, des réfugiés dans les pays musulmans (où on voit que ce n'est pas mieux qu'en Europe), les problèmes pour embarquer clandestinement, etc et etc. Il y a des passages terriblement émouvants et j'ai appris plein de choses. Une œuvre à lire si on veut en apprendre plus sur un sujet terriblement d'actualité.
Le Spirou d'Emile Bravo - L'Espoir malgré tout
Dans la droite lignée de Le Spirou d'Emile Bravo - Le journal d'un ingénu, mais pouvant se lire indépendamment, cette histoire prévue en 4 tomes se déroule dans les mêmes décors et à la même époque à savoir la Seconde Guerre mondiale. On retrouve le beau style ligne claire d'Emile Bravo. A travers les yeux des héros, on voit la guerre côté belge dont on n'a pas forcément une bonne connaissance. Le jeune Spirou vit toujours dans sa modeste chambre, il est tellement empathique et généreux malgré sa misère, comme quand il rachète un ballon de foot aux gamins du quartier, qu'on se demande comment il peut être ami avec Fantasio, si égoïste et stupide. Le caractère énervant de Fantasio s'atténue un peu dans le deuxième tome, même si ce personnage reste un des seuls ressorts comiques car le reste est un peu tristoune. Un projet ambitieux, c'est bien dommage qu'il faille encore attendre plusieurs années avant d'en voir la fin. Edit janvier 2022. Dans le tome 3 on est toujours sur ce ton mélancolique. La relation d'ados qui joue le chaud et le froid entre Spirou et Mieke prend un peu trop de place à mon goût. On découvre aussi l'engagement de tout un chacun pour résister à l'occupant à sa manière et aussi la montée en puissance des déportations.
Lamort & Cie
Max Andersson est un auteur suédois, né en 1962, dont le travail est publié dans de multiples pays dont la France avec plusieurs ouvrages à l'Association. Il semble assez peu prolifique vu sa bibliographie. Je ne lui jette pas la pierre, il a peut-être un vrai métier à côté (joke). En tout cas je le découvre avec cet album qui est un recueil de plusieurs histoires de longueurs variées dont Lamort qui illustre la couverture et donne son titre à cet ouvrage paru chez nous en 1998. J'ai beaucoup aimé, à la fois le dessin, superbe noir et blanc avec des pages très chargées et sombres - ça doit coûter cher en encre - mais cela reste lisible, mais aussi les histoires qui sont originales. C'est à la fois dans le registre de l'humour et un peu fantastique avec des objets qui s'animent, tout cela dans une ambiance à la fois poétique et dark qui imprègnent entre autres les courtes histoires de la voiture Bagnolet et de Flingo. Difficile à résumer car les histoires sont hétérogènes mais c'est à lire et je vais essayer de trouver d'autres travaux de cet auteur notamment Pixy.
Vénus noire
Avec cet album, vous découvrirez l’étonnante histoire vraie de Saartjie Baartman, esclave sud africaine vendue pour une poignée de livres pour être exhibée à travers toute l’Europe au début du 19ième siècle. Elle possède une particularité physique bien particulière, elle a des fesses proéminentes ! Devenue une bête de foire, la Vénus Hottentote sera exploitée par ses maitres. Elle est maltraitée et même forcée à se prostituer. Elle finira ses jours loin des siens dans la misère la plus complète. Le plus incroyable, sa dépouille, objet de nombreux examens, est restée au Muséum d’histoire naturelle de Paris jusqu’en 2002 avant d’être restituée enfin à son pays d’origine pour une sépulture digne. Emotions garanties avec ce récit. C’est puissant. Vous ne sortirez pas indemne de la descente aux enfers de Saartjie Baartman, exploitée par des hommes cupides. Un sentiment de révolte et d’injustice viendront vous titiller bien évidemment. Le graphisme est magnifique avec une colorisation sublime. Le trait est brut et rugueux. Mais cela colle parfaitement avec l’atmosphère sombre voulu. Visuellement c’est terrible. Même si je n’ai pas découvert l’histoire de Saartjie Baartman, je me suis laissé embarqué dans ce récit dramatique et sordide. Une belle ode à la tolérance.
Le Cadavre et le Sofa
Sandoval est décidément un auteur que j’aime beaucoup. C’est la troisième création de lui que je lis, et c’est encore une lecture très agréable. D’abord le dessin, très particulier, fragile, original, avec une colorisation elle aussi simple et quelque peu inattendue. Vraiment chouette. Quant à l’histoire, elle joue encore sur les mêmes ressors : la jeunesse, le passage de l’adolescence, la naissance de l’amour, avec une nouvelle fois des ados comme quasi uniques personnages. Et, au milieu de cette fragilité, surgit un fantastique noir et quelque peu brutal – même si, ici, je l’ai trouvé beaucoup moins présent que pour Le Serpent d'eau, ou Mille tempêtes. Tony Sandoval est un auteur attachant, que je vous encourage à découvrir.
Sale morveuse !
Gally reprend à son compte un thème où on ne l'attendait pas forcément. Retournée dans le passé quand elle avait 10 ans, avec ses souvenirs et sa connaissance et mentalité d'adulte, elle gère les choses d'une façon bien différente que dans son passé "réel". Elle en profite pour éliminer ce et ceux qui l'embêtaient, et pour faire tourner les choses plus à son goût. J'avoue aimer le style de Gally, à la fois pour l'humour et le dessin. J'avais donc un a priori positif, mais force est de constater que cette histoire fonctionne très bien et qu'on prend un plaisir presque cathartique et suivre cette refonte du passé faite avec un plaisir un poil revanchard. Elle maîtrise très bien les expressions et l'outrance, et on en profite ici à plein. Note réelle : 3,5 / 5.