Je me rends compte en écrivant mon avis sur Jean Doux et le Mystère de la Disquette Molle que je n'ai pas avisé cet autre chef d'oeuvre d'humour absurde. Les deux sont complètement cons et se passent au bureau, difficile de ne pas les avoir en tête en même temps.
Anouk Ricard dont j'apprécie beaucoup l'humour nous plonge dans un des ses univers où la débilité ambiante est reine. Richard, notre héros, se retrouve embauché dans une boîte de coucous suisses et découvre rapidement que ses collègues sont tous plus à côté de la plaque les uns que les autres.
Le dessin naïf est en total décalage avec les dialogues mordants et le ton résolument adulte. On pourrait croire à un univers enfantin avec ces animaux colorés, mais c’est bien tout l’inverse. Anouk Ricard balance un pastiche de la vie de bureau qui fait mouche, à la fois dans ses situations surréalistes et ses punchlines bien senties. Tout y passe : le management incompétent, les réunions absurdes, les sorties d’entreprise où tout le monde se tire dans les pattes. Et puis il y a cette pseudo-enquête sur un employé disparu, qui finit par devenir un prétexte pour des situations encore plus débiles.
L’humour est léger, presque con, mais c’est ce qui fonctionne. Le quotidien de Richard devient une succession de moments tragicomiques et ce n’est pas tant l’intrigue qui nous retient, mais bien la galerie de personnages tous plus barrés les uns que les autres.
Lecture recommandée comme Jean Doux et le Mystère de la Disquette Molle à ceux qui aiment l'humour bien décalé, pas sûr que cela fasse mouche avec tout le monde.
Un bon condensé de n’importe quoi très drôle dans un cadre auquel on ne s'attend pas vraiment de prime abord : un open space des années 90. Dans un style décalé qui m'a fait penser à Coucous Bouzon. Du pur plaisir d’assister à cette enquête avec des personnages aussi improbables que mémorables pour ceux qui aiment l'humour absurde (et je suis très bon public à ce sujet).
Le héros Jean Doux (tout le monde s'appelle Jean ou Jeanne quelque chose) découvre une disquette molle dans le faux plafond d’un bureau, et là, tout part en vrille. L’entreprise, qui fabrique des broyeuses de documents, devient le théâtre d’une quête complètement barrée à la recherche de la “broyeuse ultime”.
On se dit alors que l’histoire va partir dans un délire total, mais en fait, non, c’est bien tenu, le fil rouge de l’enquête reste crédible dans son absurdité. Bien joué par exemple le coup de la carte compressée pour tenir sur 256 ko. On est entre le polar et la grosse comédie potache, et ça fonctionne à merveille.
Côté dessin, c’est minimaliste mais juste avec ce style cubique, presque pixelisé qui fixe bien le décor. C’est drôle, bien ficelé, et ça replonge dans une époque avec juste ce qu’il faut de tendresse et de dérision.
Voici une bande dessinée qui réussit à transformer un sujet scientifique en une exploration visuelle et poétique des mystères de la forêt.
Loin de simplement vulgariser des faits biologiques, Bernard et Flao donnent vie aux arbres en les transformant presque en personnages à part entière. Le texte est bien documenté, mais jamais lourd, et chaque découverte sur les réseaux souterrains d’arbres ou les mécanismes de défense des forêts est enrobée d’une narration fluide et accessible.
Le dessin de Flao fonctionne très bien. Ses aquarelles et ses traits organiques capturent la beauté sauvage des forêts, mais aussi la complexité des systèmes végétaux.
Là où l’album est très bon, c’est dans sa capacité à faire réfléchir sans imposer de message moralisateur. Le lien entre les arbres et les humains est délicatement esquissé, et on ressort de cette lecture avec un sentiment de connexion renouvelée avec la nature. La bande dessinée donne envie d’aller marcher dans les bois, de s’arrêter et d’observer. Il y a cette idée récurrente que tout est interconnecté, que les arbres communiquent entre eux et forment une communauté, un réseau complexe que l’on commence à peine à comprendre.
L’aspect narratif, parfois, s’efface un peu derrière la pédagogie, c'est un peu le jeu dans ce genre de BD très documentées.
La Vie secrète des arbres n’est pas seulement une bande dessinée informative. Bernard et Flao réussissent à faire passer un message écologique fort, sans jamais tomber dans le didactisme. C’est une invitation à ralentir, à observer, à comprendre que la nature, loin d’être inerte, est un monde en perpétuel mouvement.
Je me suis enfin procuré cette BD que je n'ai lue qu'en empruntant à des amis. Voici une œuvre qui combine habilement la bande dessinée et la photographie, un mélange peu commun mais ici parfaitement maîtrisé et que je souhaitais avoir dans ma bibliothèque. Ce qui m’a frappé dès le départ, c’est la force du témoignage visuel. Le récit de Didier Lefèvre, photographe parti en Afghanistan avec une mission humanitaire de Médecins Sans Frontières, prend une dimension presque documentaire. On est plongé au cœur du conflit, sans fioritures, avec une approche très réaliste. Les photos, intégrées au dessin, donnent une profondeur et une véracité qui amplifient l’impact des scènes.
Le dessin de Guibert, simple et précis, accompagne ces photos de manière fluide. Il complète le récit sans jamais écraser les images. Les transitions entre les deux médiums se font naturellement, créant un rythme bien dosé, sans rupture. Le choix de cette narration visuelle permet d’aller au-delà du simple reportage photographique : on ne se contente pas de regarder des clichés, on vit littéralement l’expérience avec Lefèvre.
Côté scénario, c’est la dimension humaine qui m’a le plus marqué. Au-delà des images du conflit, c’est le quotidien des médecins, des populations locales, et surtout la prise de conscience progressive de Lefèvre qui donnent tout son poids à l’histoire. On ressent à chaque instant la tension de l’Afghanistan en guerre, mais aussi les moments de solidarité, d’échanges. Les difficultés, les doutes, les peurs sont montrés sans filtre, et c’est cette sincérité qui rend l’ensemble si puissant.
Malgré l’aspect documentaire, il n’y a jamais de sensation de voyeurisme ou de dramatisation forcée. Le photographe raconte son périple avec une certaine retenue, presque de manière factuelle, ce qui laisse toute la place à l’interprétation personnelle. C’est un témoignage sobre mais marquant, qui réussit à trouver un équilibre entre l’humain, le reportage, et la BD. Une œuvre à la fois simple dans son approche, mais profonde dans son impact et que j'ai pris beaucoup de plaisir à relire.
Dans la tête de Sherlock Holmes est un vrai coup de maître. Dès les premières pages, je me suis laissé emporter par l’ingéniosité de la mise en scène. On pénètre littéralement dans l’esprit de Sherlock, et tout est pensé pour refléter son processus de déduction, sans jamais tomber dans l’excès. Ce qui m’a particulièrement marqué, c’est l’originalité du découpage des planches, qui joue avec la forme des cases, parfois une loupe, parfois une coupe de bâtiment, et ce fameux fil rouge qui nous guide tout au long de l’enquête. C’est un procédé qui n’aurait pas pu exister autrement qu’en bande dessinée, et c’est ce qui rend cette œuvre unique.
L’intrigue elle-même est captivante, fidèle à l’esprit de Conan Doyle, tout en étant assez fluide pour ne jamais perdre en intensité. Les auteurs maîtrisent parfaitement l’art de raconter une enquête de Sherlock, avec ces petits détails que l’on découvre progressivement. Rien n’est laissé au hasard, chaque indice trouve son écho à un moment donné. Ce que j’ai apprécié, c’est que même si l’histoire semble parfois rocambolesque, tout finit par s’imbriquer de manière logique, comme une mécanique bien huilée.
Visuellement, c’est un régal. Chaque page est un vrai bijou, avec des dessins riches en détails qui plongent directement dans l’ambiance victorienne. L’idée de faire passer la pensée de Sherlock à travers une mise en page aussi élaborée est un pari osé, mais il fonctionne parfaitement. Le jeu sur les transparences, les pages à plier, tout cela ajoute un aspect ludique à la lecture, sans jamais en faire trop.
Au final, Dans la tête de Sherlock Holmes est une œuvre qui réussit à surprendre tout en restant fidèle à l’univers du célèbre détective. C’est brillant, inventif, et cela redonne vie à un personnage pourtant bien connu. Une lecture qui m’a tenu en haleine du début à la fin, avec un plaisir évident à suivre chaque déduction de Sherlock, tout en admirant le travail visuel impressionnant des auteurs.
Voici une œuvre marquante, à côté de laquelle je serais passé si ne fréquentais pas ce site. "Mauvaises Herbes" un témoignage puissant de l’histoire des “femmes de réconfort”, souvent passé sous silence. Cet album, réédité par Futuropolis, raconte avec une grande sensibilité le destin tragique de Oksun Lee, victime de l’esclavage sexuel sous l’occupation japonaise en Corée.
Dès les premières pages, on est frappé par la force brute du trait en noir et blanc. L’autrice joue habilement avec les épaisseurs de lignes pour donner à la fois un sentiment d’enfermement et de brutalité, tout en laissant place à une certaine douceur dans les paysages naturels. Ce contraste visuel reflète parfaitement le dilemme entre la beauté du monde et l’horreur des expériences humaines. Les mauvaises herbes, symboles de résistance et de résilience, parsèment l’œuvre comme un écho à la ténacité de ces femmes oubliées.
Le récit alterne habilement entre les souvenirs de Oksun et les entretiens que Keum Suk Gendry-Kim a menés avec elle. La structure narrative est fluide, permettant de ressentir le poids du traumatisme tout en étant guidé avec délicatesse à travers cette mémoire douloureuse. Gendry-Kim choisit d’aborder les moments les plus horribles avec pudeur, optant pour l’implicite plutôt que pour des représentations explicites, ce qui renforce la puissance émotionnelle de l’œuvre.
Le travail de l’autrice s’inscrit dans une démarche de mémoire, de réhabilitation de la parole des victimes, trop longtemps ignorée. Le ton est juste, sans voyeurisme ni surenchère dramatique, ce qui rend l’ouvrage d’autant plus poignant. On ne peut qu’être ébranlé par cette histoire, témoin d’une période sombre et encore taboue de l’histoire asiatique. C’est une œuvre nécessaire, un devoir de mémoire aussi essentiel que les autres récits historiques qui évoquent les grandes tragédies humaines.
Cet album est un coup de poing émotionnel, j'ai lu les 500+ pages d'une traite. Le dessin, brut mais subtil, la narration poétique et touchante, et surtout le sujet traité avec une sensibilité rare font de cette bande dessinée un véritable chef-d’œuvre qui devrait être lu et partagé largement. Je rejoins les avis précédents, une oeuvre magistrale et un grand coup de coeur.
C'est cette question de la sensation, vous comprenez ?
-
Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre. Sa première parution date de 2015 au Brésil, et de 2016 en France. Il a été traduit par Marie Zeni et Christine Zonzon. Il a été réalisé par Marcello Quintanilha pour le scénario et les dessins. Il compte cent-cinquante-six pages de bande dessinée, en noir & blanc, avec des nuances de gris.
Le soir, Rosângela, trentenaire, s’est couchée dans le lit conjugal, aux côtés de son mari Mario. Après avoir éteint la lumière, elle repense à cette histoire d’être, d’une certaine manière, supérieure. Non, ce n’est pas ça. En fait, c’est assez difficile à expliquer, parce que cette pensée là… Il ne s’agit pas d’une idée, comme on pourrait dire, tout simplement., Rosângela se sentait supérieure, car ce n’était pas ainsi qu’elle pensait. Du moins, on ne peut pas dire qu’elle pensait en ces termes-là. Non, ce n’est pas vraiment cela. C’est pourquoi il est difficile de l’expliquer, ce serait plutôt ? Comment dire ? Plutôt une espèce de sensation, vous comprenez ? Oui… Une espèce de sensation, vous savez ? Disons… Comme si … vous aviez le sentiment de faire partie d’une classe… disons… supérieure. Vous voyez ? Comme si vous apparteniez à un certain milieu social, c’est ce que je veux dire… Ce sont des gens qui vivent dans des conditions particulières, n’est-ce pas ? Le genre de personnes dont vous dites : Eh ben ! Pour être à cette place dans la peau de cette personne et vivre de cette façon, consommer, faire des voyages, faire l’amour, il faut appartenir à ce milieu ! Eh bien, c’était plus ou moins cela que Rosângela ressentait.
C’était ce qu’elle ressentait, et, curieusement, elle associait le fait d’être dans la peau d’une de ces personnes-là, dont tout le monde sait qu’elles appartiennent à une classe supérieure, à un moment précis, lorsqu’elle venait juste de faire l’amour avec son mari. Plus encore que lorsqu’elle descendait prendre sa voiture au garage, ou qu’elle laissait les enfants devant le collège, ou qu’elle rejoignait son cabinet. Et si vous pensez que personne ne s’en rendait compte, demandez donc au portier de l’immeuble, qui lui assène tous les matins son Bonjour Dr. Rosângela, demandez donc au gars du parking, demandez à tous ces gens qui regardent sa voiture du coin de l’œil, sans pouvoir s’acheter la même. Demandez-leur, et vous verrez… C’est plus ou moins comme si vous étiez dans la peau d’une personne à part, qui sait qu’il y a de la misère dans le monde, mais qui… Qui ne peut rien y faire, n’est-ce pas ? C’est embêtant, c’est triste, mais que faire ? Vous avez la chance d’être dans la peau de ce genre de personnes, un point c’est tout. Vous ne pouvez rien y faire, il vous faut donc vivre le mieux possible. La dentiste Rosângela est arrivée dans son cabinet de dentiste. Elle salue son assistante Irma, fait le point sur ses rendez-vous du matin. Elle doit recevoir sa cousine germaine Daniele qui vit dans le quartier populaire de Barreto, celle avec son père alcoolique dont, enfant, elle devait nettoyer le vomi, dont le premier mari lui crachait au visage. Celle qui est si jolie, une beauté incroyable, un sourire extraordinaire.
La quatrième de couverture présente Rosângela comme souffrant du syndrome de la femme parfaite : dentiste reconnue, un mari cardiologue à succès très amoureux d’elle, des enfants qui sont de véritables petites merveilles, une belle voiture, un compte bancaire bien rempli… Mais une cousine, pauvre et séparée de son mari, fait preuve d’une tranquillité d’esprit désarmante, dotée d’un sourire toujours éclatant. Une simple histoire de jalousie ? La narration apparaît tout de suite comme très personnelle. Des cases sans bordure, entre quatre et douze par page, avec des dessins naturalistes et descriptifs, et parfois des gros plan ou des contrastes qui aboutissent à une image abstraite si le lecteur la considère détachée des cases la précédant ou la suivant. Un flux de pensées qui n’est pas celui du personnage principal, mais celui du narrateur ou de l’auteur qui n’est pas omniscient. Ses remarques et ses observations oscillent entre des constats sur l’état d’esprit de Rosângela et ses pensées, et des interrogations dessus, comme s’il cherchait à comprendre ses émotions, leurs racines, comme s’il ne savait pas tout d’elle.
Le lecteur se retrouve immédiatement impliqué dans cette vie, dans les émotions de cette femme, vraisemblablement trentenaire qui fait l’objet de l’attention du narrateur qui s’interroge sur elle, tout en racontant son histoire. L’histoire se déroule à Niterói, ville située sur le côté est de l'entrée de la baie de Guanabara, face à Rio de Janeiro. Son nom est mentionné et Rosângela évoque d’autres villes et quartiers à proximité, pour souligner qu’elle a la chance d’habiter dans une zone privilégiée. On la voit emprunter le pont Rio-Niterói long de treize kilomètres, qui traverse ladite baie. De manière incidente, sans que la narration y fasse référence explicitement ou ne commente, certaines cases montrent des rues, des façades d’immeuble, les plages, les vagues de l’océan, avec ou sans êtres humains se livrant à leurs occupations. C’est une particularité narrative de cette bande dessinée que d’avoir parfois des cases qui ne se rattachent pas au sujet des réflexions du narrateur sur son personnage, mais qui viennent montrer le lieu, ou bien associer un lieu du quotidien de Rosângela, apportant un élément de sa vie. L’auteur montre ainsi de nombreux éléments de la vie de tous les jours de cette femme : le tableau de bord de sa voiture, sa chambre à coucher, la salle d’attente de son cabinet de dentiste, l’ascenseur qui y mène, un train sur la voie ferrée qui traverse le quartier où vit sa cousine germaine, son premier cabinet avenue Amaral Peixoto que lui avait offert son père, les immeubles le long de la baie vus depuis la mer, son fauteuil de dentiste avec les appareils, le salon de tante Bel avec son canapé très ordinaire recouvert d’un tissu pour le protéger, la mer venant lécher la base du rocher d’Itapuca pendant la marée, la grande salle de réception d’un appartement luxueux des amis de son mari, des immeubles d’autre partie de la ville, les lumières de la ville de nuit, des zones piétonnes, etc.
En plus de la diversité des lieux montrés au fil de l’eau, l’artiste se focalise parfois sur un détail, un gros plan : la plaque du cabinet dentaire, l’eau qui s’écoule dans un lavabo, une main sur laquelle on enfile un gant, le motif géométrique du plafonnier, une dentition, un lustre monumental dans un centre commercial, le motif du revêtement d’un trottoir, le chiffre d’un jour sur un calendrier, etc. Ces moments peuvent aussi bien correspondre à une vue subjective, ce sur quoi se concentre le regard Rosângela à ce moment-là, qu’un souvenir fugace dans son esprit. De temps à autre, ces images deviennent des très gros plans, sortant un détail d’une case vue précédemment, pour donner une figure abstraite qui ne fait sens que rattachée à la case ou à la séquence d’origine. Une forme conceptuelle comme si le réel perdait son sens pour ne plus être qu’un ressenti esthétique fugace. Ces caractéristiques de la narration visuelle génèrent un effet parfois sensoriel, parfois émotionnel, connectant ainsi directement le lecteur aux sens de la protagoniste. L’effet peut s’avérer d’autant plus troublant que les brèves cellules de texte déroulent une idée parallèle. Le lecteur se met alors à imaginer, ou plutôt à ressentir la connexion qu’il peut y avoir, soit directe les images fournissant le contexte du flux de pensées qui sont influencées inconsciemment par le lieu ou l’action, soit à retardement quand le souvenir revient par un mécanisme d’association sensoriel ou émotionnel, du grand art.
La qualité narrative fait de cette histoire banale tout autre chose qu’une télénovela produite industriellement au kilomètre. La banalité de la trajectoire de vie de Rosângela acquiert une profondeur extraordinaire, parfois sociologique, parfois émotionnelle, toujours personnelle. Certes les circonstances de sa naissance l’ont gâtée : parents aimants, attentionnés, financièrement à l’aise, bonne éducation, réussite scolaire, mariage très heureux avec un époux très attentionné, enfants agréables réussissant bien, confort matériel, réussite professionnelle, personnes à qui se comparer, dans son milieu social, mais aussi sa cousine germaine, sa tante et son oncle d’un milieu nettement moins favorisé, avec une histoire personnelle nettement moins heureuse (père alcoolique, mari méprisant, pas d’enfant). Rosângela sait qu’elle bénéficie d’une situation enviable, nettement meilleure que l’écrasante majorité de la population. Elle a conscience d’être regardée comme un modèle de bonheur, plus admirée qu’enviée. Au fil du récit, l’auteur aborde d’autres thèmes : une sensation de manque indéfinissable, une commisération de circonstance pour sa cousine germaine (pas vraiment de la peine, certainement pas de la jalousie), une forme d’injustice existentielle (le bon caractère et le plaisir de vivre évident de sa cousine, qu’y a-t-il dans son sourire ?), une interrogation sur ce qu’elle pourrait devoir d’une certaine manière (car elle n’a rien fait pour mériter tout ça, en fait si elle a mené sa vie en s’investissant pour construire cette forme de bonheur), une question de mérite… L’auteur ne se montre pas méchant avec son personnage, il fait tout pour se montrer le plus empathique possible pour la comprendre, ce qui incite tout naturellement le lecteur à faire de même. Soit il a développé de solides convictions sur le sens de la vie, et il n’éprouve alors aucune difficulté à se positionner par rapport à Rosângela, à trancher sur la nature de son mal-être. Soit il est plus dans l’empathie et il l’accompagne dans cette recherche de ce qui ne va pas, ce qui fait défaut, ce qui gêne, ce qui ne fait pas sens dans sa situation comparée au parcours de sa cousine Daniele. Au départ, il attend alors une sorte de révélation. Mais le récit s’avère beaucoup plus habile que cela, impliquant le lecteur tout en douceur dans la vie intérieure de la protagoniste, sans bulles de pensée. La compréhension ne se produit pas sous forme de révélation, mais en éprouvant ses ressentis. Aussi fort et intense qu’habile et élégant.
Une couverture peu parlante, un titre cryptique, une histoire banale de mère ayant tout réussi. Une narration personnelle faite de petites cases ouvertes, parfois en panoramique sur la largeur de la page, semblant très descriptives et très factuelles, tout en faisant ressentir l’état d’esprit de Rosângela de manière aussi douce qu’efficace. Le suspense se révèle d’ordre psychologique, voire existentiel, tout en sourdine, alors que le lecteur s’installe dans le quotidien de la protagoniste à Niterói, en profitant de son confort matériel. Une incroyable aventure dans le monde intérieur d’une femme, sans avoir accès à ses pensées. Extraordinaire.
Il n'y a pas grand chose à ajouter à l'avis de Mac Arthur juste en dessous qui résume parfaitement bien ce que ce copieux one-shot a à nous offrir : une intrigue basée sur Brazil (le film culte de ma jeunesse) et 1984 (le roman culte de ma jeunesse) synthétisée dans un bel écrin agréable au toucher et dont la couverture magnifique a eu un effet immédiat d'attraction.
Effectivement Corbeyran nous ressort la sempiternelle histoire d'une société oppressive et étouffante où seules 3 règles subsistent : créer, consommer, surveiller au travers d'une mégalopole morne à peine rehaussée par de splendides pancartes de pin-ups plantureuses et au regard doux. Soit une belle méthode pour contrôler la population et l'entrainer irrémédiablement en détention dès qu'un faux pas est détecté.
Une seule industrie existe pour du travail à la chaine dans des conditions inhumaines afin de créer des objets de consommation qui seront vendus dans le seul commerce autorisé.
Le tableau esquissé par Corbeyran reste bien classique et le serait tout autant sans le profil de personnages ordinaires irrémédiablement attachants. Il y a Annabelle, Anatole et Arsène. Tous vont subir les affres de cette société : licenciement abusif, abus de pouvoir et rejet de la société vous effaçant progressivement au sens propre comme au figuré.
Tout cela est admirablement construit par des dialogues et un rythme simples mais faisant mouche : le trait de Michel Colline y est évidemment pour beaucoup. Choisissant un style franco-belge délicieusement rétro-futuriste, ses personnages possèdent des expressions palpables et les décors sont un régal pour le lecteur. Un peu d'humour, du tragique et un soupçon d'aventure enveloppent cette histoire poétique, presque naïve mais terriblement attachante qui en fait à mes yeux la meilleure surprise de cette rentrée 2024.
Si la fin est rapidement expédiée, elle délivre un message peut être pas si manichéen que prévu et atteint son but : vive le changement mais pour quel avenir ?
Non vraiment je suis sous le charme absolu de ce livre que je relirais avec beaucoup de plaisir, tant pour l'objet en soi que les dessins et le scénario et vous invite vivement à en faire de même.
Nous voici plongés dans une ville qui se nomme Bassin City, avec ses sombres ruelles où l'on craint pour sa vie, qui sont faiblement éclairées par les néons de clubs de striptease, dont les malfrats, la mafia, les prostituées, flics et politiques corrompus y règnent sans vergogne.
Nous suivons dans chaque tome, différents protagonistes dopés sous stéroïde ou tout simplement avec une grosse paire de burnes, dans leurs petits tracas du quotidien que cette ville leur gage sans le moindre respect, qui faut se le dire ne sont pas les mêmes que les communs des mortels. Tous les personnages sont vraiment travaillés sur bien des aspects, mais c'est surtout sur leurs dialogues et punchlines qu'ils nous délivrent de vrais frissons, ce qui leur donnent une réelle authenticité.
Le noir et blanc du maitre Miller est vraiment maitrisé à la perfection, ça colle parfaitement à l'ambiance de la ville et à la personnalité de nos anti-héros. J'ai été submergé dans ce polar noir qui a réussi de plus, à croiser les scénarios dans des lieux communs à chaque tome, ce qui est vraiment bluffant.
Par une écriture, mais quelle ECRITURE !!! Une mise en scène incroyablement efficace par l'utilisation de la voie off de nos protagonistes avec une réelle profondeur, du vrai théâtre. Je tire mon chapeau à notre traducteur de renom, Henri Loevenbruck pour avoir réussi à nous faire ressentir ce que l'auteur voulait nous transmettre par sa vison de la mise en scène.
Une petite déception tout de même pour sa dernière histoire "Retour en enfer" qui utilise des codes différents, qui pourrait plaire car ça casse la routine des premiers tomes, mais pour ma part, ça ne m'a pas convaincu.
Sin city vous attend ... Marv, Dwight McCarthy, l'inspecteur John Hartigan et Wallace vous attendent énergiquement également ...
J'ai commencé par pester en empruntant cette série. Des tomes de 250 pages qui pèsent un tonne pour des enfants de 8/10 ans je ne trouve pas cela top pour un bon confort de lecture au fond de son lit.
Toutefois ma mauvaise humeur s'est bien vite éteinte avec le contenu de cette très bonne série jeunesse. Le récit et l'ambiance emprunte beaucoup au Seigneur des Anneaux mais Tim Probert a su y mettre son empreinte perso pour proposer un récit entrainant aux multiples rebondissements.
La jeune Béatrice n'est pas une héroïne conventionnelle gratifiée d'une multitude de super dons qui aplanissent toutes les difficultés rencontrées. Au contraire dans sa quête pour sauver son grand-père elle emmène ses angoisses paralysantes et ses pensées pleines d'un pessimisme démoralisant.
C'est une fragilité touchante qu'elle apprend à surmonter au contact de Cad. Cad est le dernier des Galduriens plein de force, d'optimisme et de gentillesse. Leur cheminement est l'occasion de dialogues d'un excellent niveau pour les enfants parfois même avec beaucoup de finesses sur les notions de confiance en soi, de doute et de positionnement face aux difficultés.
C'est très adroitement introduit dans un contexte classique de Bien contre Mal avec une métaphore de la lumière qui laisse place aux ténèbres mortifères si personne ne résiste .On reconnait là les codes de base du genre. Mais Tim Probert conduit sa narration de façon très dynamique sans dispersion à tel point que les 250 pages se lisent d'un trait avec l'envie de de continuer la découverte de la suite sans tarder.
Les phases d'actions parfois violentes ( pour des enfants) alternent avec les passages plus introspectifs pour former un ensemble équilibré et cohérent. Il y a même souvent un belle touche d'humour grâce au personnage de Cad qui est une vraie trouvaille de l'auteur.
Le graphisme est très moderne et soutient parfaitement le dynamisme de la narration. Ici encore il y un bon équilibre entre la narration du texte et celle des images. Une très belle mise en couleur permet de souligner les passages inquiétants ( à base de bleus) et les passages plus lumineux. C'est très réussi.
Une très belle série pour les enfants que j'ai eu beaucoup de plaisir à découvrir.
En France, les livres sont au même prix partout. C'est la loi !
Avec BDfugue, vous payez donc le même prix qu'avec les géants de la vente en ligne mais pour un meilleur service :
des promotions et des goodies en permanence
des réceptions en super état grâce à des cartons super robustes
une équipe joignable en cas de besoin
2. C'est plus avantageux pour nous
Si BDthèque est gratuit, il a un coût.
Pour financer le service et le faire évoluer, nous dépendons notamment des achats que vous effectuez depuis le site. En effet, à chaque fois que vous commencez vos achats depuis BDthèque, nous touchons une commission. Or, BDfugue est plus généreux que les géants de la vente en ligne !
3. C'est plus avantageux pour votre communauté
En choisissant BDfugue plutôt que de grandes plateformes de vente en ligne, vous faites la promotion du commerce local, spécialisé, éthique et indépendant.
Meilleur pour les emplois, meilleur pour les impôts, la librairie indépendante promeut l'émergence des nouvelles séries et donc nos futurs coups de cœur.
Chaque commande effectuée génère aussi un don à l'association Enfance & Partage qui défend et protège les enfants maltraités. Plus d'informations sur bdfugue.com
Pourquoi Cultura ?
Indépendante depuis sa création en 1998, Cultura se donne pour mission de faire vivre et aimer la culture.
La création de Cultura repose sur une vision de la culture, accessible et contributive. Nous avons ainsi considéré depuis toujours notre responsabilité sociétale, et par conviction, développé les pratiques durables et sociales. C’est maintenant au sein de notre stratégie de création de valeur et en accord avec les Objectifs de Développement Durable que nous déployons nos actions. Nous traitons avec lucidité l’impact de nos activités, avec une vision de long terme. Mais agir en responsabilité implique d’aller bien plus loin, en contribuant positivement à trois grands enjeux de développement durable.
Nos enjeux environnementaux
Nous sommes résolument engagés dans la réduction de notre empreinte carbone, pour prendre notre part dans la lutte contre le réchauffement climatique et la préservation de la planète.
Nos enjeux culturels et sociétaux
La mission de Cultura est de faire vivre et aimer la culture. Pour cela, nous souhaitons stimuler la diversité des pratiques culturelles, sources d’éveil et d’émancipation.
Nos enjeux sociaux
Nous accordons une attention particulière au bien-être de nos collaborateurs à la diversité, l’inclusion et l’égalité des chances, mais aussi à leur épanouissement, en encourageant l’expression des talents artistiques.
Votre vote
Coucous Bouzon
Je me rends compte en écrivant mon avis sur Jean Doux et le Mystère de la Disquette Molle que je n'ai pas avisé cet autre chef d'oeuvre d'humour absurde. Les deux sont complètement cons et se passent au bureau, difficile de ne pas les avoir en tête en même temps. Anouk Ricard dont j'apprécie beaucoup l'humour nous plonge dans un des ses univers où la débilité ambiante est reine. Richard, notre héros, se retrouve embauché dans une boîte de coucous suisses et découvre rapidement que ses collègues sont tous plus à côté de la plaque les uns que les autres. Le dessin naïf est en total décalage avec les dialogues mordants et le ton résolument adulte. On pourrait croire à un univers enfantin avec ces animaux colorés, mais c’est bien tout l’inverse. Anouk Ricard balance un pastiche de la vie de bureau qui fait mouche, à la fois dans ses situations surréalistes et ses punchlines bien senties. Tout y passe : le management incompétent, les réunions absurdes, les sorties d’entreprise où tout le monde se tire dans les pattes. Et puis il y a cette pseudo-enquête sur un employé disparu, qui finit par devenir un prétexte pour des situations encore plus débiles. L’humour est léger, presque con, mais c’est ce qui fonctionne. Le quotidien de Richard devient une succession de moments tragicomiques et ce n’est pas tant l’intrigue qui nous retient, mais bien la galerie de personnages tous plus barrés les uns que les autres. Lecture recommandée comme Jean Doux et le Mystère de la Disquette Molle à ceux qui aiment l'humour bien décalé, pas sûr que cela fasse mouche avec tout le monde.
Jean Doux et le Mystère de la Disquette Molle
Un bon condensé de n’importe quoi très drôle dans un cadre auquel on ne s'attend pas vraiment de prime abord : un open space des années 90. Dans un style décalé qui m'a fait penser à Coucous Bouzon. Du pur plaisir d’assister à cette enquête avec des personnages aussi improbables que mémorables pour ceux qui aiment l'humour absurde (et je suis très bon public à ce sujet). Le héros Jean Doux (tout le monde s'appelle Jean ou Jeanne quelque chose) découvre une disquette molle dans le faux plafond d’un bureau, et là, tout part en vrille. L’entreprise, qui fabrique des broyeuses de documents, devient le théâtre d’une quête complètement barrée à la recherche de la “broyeuse ultime”. On se dit alors que l’histoire va partir dans un délire total, mais en fait, non, c’est bien tenu, le fil rouge de l’enquête reste crédible dans son absurdité. Bien joué par exemple le coup de la carte compressée pour tenir sur 256 ko. On est entre le polar et la grosse comédie potache, et ça fonctionne à merveille. Côté dessin, c’est minimaliste mais juste avec ce style cubique, presque pixelisé qui fixe bien le décor. C’est drôle, bien ficelé, et ça replonge dans une époque avec juste ce qu’il faut de tendresse et de dérision.
La Vie secrète des arbres
Voici une bande dessinée qui réussit à transformer un sujet scientifique en une exploration visuelle et poétique des mystères de la forêt. Loin de simplement vulgariser des faits biologiques, Bernard et Flao donnent vie aux arbres en les transformant presque en personnages à part entière. Le texte est bien documenté, mais jamais lourd, et chaque découverte sur les réseaux souterrains d’arbres ou les mécanismes de défense des forêts est enrobée d’une narration fluide et accessible. Le dessin de Flao fonctionne très bien. Ses aquarelles et ses traits organiques capturent la beauté sauvage des forêts, mais aussi la complexité des systèmes végétaux. Là où l’album est très bon, c’est dans sa capacité à faire réfléchir sans imposer de message moralisateur. Le lien entre les arbres et les humains est délicatement esquissé, et on ressort de cette lecture avec un sentiment de connexion renouvelée avec la nature. La bande dessinée donne envie d’aller marcher dans les bois, de s’arrêter et d’observer. Il y a cette idée récurrente que tout est interconnecté, que les arbres communiquent entre eux et forment une communauté, un réseau complexe que l’on commence à peine à comprendre. L’aspect narratif, parfois, s’efface un peu derrière la pédagogie, c'est un peu le jeu dans ce genre de BD très documentées. La Vie secrète des arbres n’est pas seulement une bande dessinée informative. Bernard et Flao réussissent à faire passer un message écologique fort, sans jamais tomber dans le didactisme. C’est une invitation à ralentir, à observer, à comprendre que la nature, loin d’être inerte, est un monde en perpétuel mouvement.
Le Photographe
Je me suis enfin procuré cette BD que je n'ai lue qu'en empruntant à des amis. Voici une œuvre qui combine habilement la bande dessinée et la photographie, un mélange peu commun mais ici parfaitement maîtrisé et que je souhaitais avoir dans ma bibliothèque. Ce qui m’a frappé dès le départ, c’est la force du témoignage visuel. Le récit de Didier Lefèvre, photographe parti en Afghanistan avec une mission humanitaire de Médecins Sans Frontières, prend une dimension presque documentaire. On est plongé au cœur du conflit, sans fioritures, avec une approche très réaliste. Les photos, intégrées au dessin, donnent une profondeur et une véracité qui amplifient l’impact des scènes. Le dessin de Guibert, simple et précis, accompagne ces photos de manière fluide. Il complète le récit sans jamais écraser les images. Les transitions entre les deux médiums se font naturellement, créant un rythme bien dosé, sans rupture. Le choix de cette narration visuelle permet d’aller au-delà du simple reportage photographique : on ne se contente pas de regarder des clichés, on vit littéralement l’expérience avec Lefèvre. Côté scénario, c’est la dimension humaine qui m’a le plus marqué. Au-delà des images du conflit, c’est le quotidien des médecins, des populations locales, et surtout la prise de conscience progressive de Lefèvre qui donnent tout son poids à l’histoire. On ressent à chaque instant la tension de l’Afghanistan en guerre, mais aussi les moments de solidarité, d’échanges. Les difficultés, les doutes, les peurs sont montrés sans filtre, et c’est cette sincérité qui rend l’ensemble si puissant. Malgré l’aspect documentaire, il n’y a jamais de sensation de voyeurisme ou de dramatisation forcée. Le photographe raconte son périple avec une certaine retenue, presque de manière factuelle, ce qui laisse toute la place à l’interprétation personnelle. C’est un témoignage sobre mais marquant, qui réussit à trouver un équilibre entre l’humain, le reportage, et la BD. Une œuvre à la fois simple dans son approche, mais profonde dans son impact et que j'ai pris beaucoup de plaisir à relire.
Dans la tête de Sherlock Holmes
Dans la tête de Sherlock Holmes est un vrai coup de maître. Dès les premières pages, je me suis laissé emporter par l’ingéniosité de la mise en scène. On pénètre littéralement dans l’esprit de Sherlock, et tout est pensé pour refléter son processus de déduction, sans jamais tomber dans l’excès. Ce qui m’a particulièrement marqué, c’est l’originalité du découpage des planches, qui joue avec la forme des cases, parfois une loupe, parfois une coupe de bâtiment, et ce fameux fil rouge qui nous guide tout au long de l’enquête. C’est un procédé qui n’aurait pas pu exister autrement qu’en bande dessinée, et c’est ce qui rend cette œuvre unique. L’intrigue elle-même est captivante, fidèle à l’esprit de Conan Doyle, tout en étant assez fluide pour ne jamais perdre en intensité. Les auteurs maîtrisent parfaitement l’art de raconter une enquête de Sherlock, avec ces petits détails que l’on découvre progressivement. Rien n’est laissé au hasard, chaque indice trouve son écho à un moment donné. Ce que j’ai apprécié, c’est que même si l’histoire semble parfois rocambolesque, tout finit par s’imbriquer de manière logique, comme une mécanique bien huilée. Visuellement, c’est un régal. Chaque page est un vrai bijou, avec des dessins riches en détails qui plongent directement dans l’ambiance victorienne. L’idée de faire passer la pensée de Sherlock à travers une mise en page aussi élaborée est un pari osé, mais il fonctionne parfaitement. Le jeu sur les transparences, les pages à plier, tout cela ajoute un aspect ludique à la lecture, sans jamais en faire trop. Au final, Dans la tête de Sherlock Holmes est une œuvre qui réussit à surprendre tout en restant fidèle à l’univers du célèbre détective. C’est brillant, inventif, et cela redonne vie à un personnage pourtant bien connu. Une lecture qui m’a tenu en haleine du début à la fin, avec un plaisir évident à suivre chaque déduction de Sherlock, tout en admirant le travail visuel impressionnant des auteurs.
Mauvaises Herbes
Voici une œuvre marquante, à côté de laquelle je serais passé si ne fréquentais pas ce site. "Mauvaises Herbes" un témoignage puissant de l’histoire des “femmes de réconfort”, souvent passé sous silence. Cet album, réédité par Futuropolis, raconte avec une grande sensibilité le destin tragique de Oksun Lee, victime de l’esclavage sexuel sous l’occupation japonaise en Corée. Dès les premières pages, on est frappé par la force brute du trait en noir et blanc. L’autrice joue habilement avec les épaisseurs de lignes pour donner à la fois un sentiment d’enfermement et de brutalité, tout en laissant place à une certaine douceur dans les paysages naturels. Ce contraste visuel reflète parfaitement le dilemme entre la beauté du monde et l’horreur des expériences humaines. Les mauvaises herbes, symboles de résistance et de résilience, parsèment l’œuvre comme un écho à la ténacité de ces femmes oubliées. Le récit alterne habilement entre les souvenirs de Oksun et les entretiens que Keum Suk Gendry-Kim a menés avec elle. La structure narrative est fluide, permettant de ressentir le poids du traumatisme tout en étant guidé avec délicatesse à travers cette mémoire douloureuse. Gendry-Kim choisit d’aborder les moments les plus horribles avec pudeur, optant pour l’implicite plutôt que pour des représentations explicites, ce qui renforce la puissance émotionnelle de l’œuvre. Le travail de l’autrice s’inscrit dans une démarche de mémoire, de réhabilitation de la parole des victimes, trop longtemps ignorée. Le ton est juste, sans voyeurisme ni surenchère dramatique, ce qui rend l’ouvrage d’autant plus poignant. On ne peut qu’être ébranlé par cette histoire, témoin d’une période sombre et encore taboue de l’histoire asiatique. C’est une œuvre nécessaire, un devoir de mémoire aussi essentiel que les autres récits historiques qui évoquent les grandes tragédies humaines. Cet album est un coup de poing émotionnel, j'ai lu les 500+ pages d'une traite. Le dessin, brut mais subtil, la narration poétique et touchante, et surtout le sujet traité avec une sensibilité rare font de cette bande dessinée un véritable chef-d’œuvre qui devrait être lu et partagé largement. Je rejoins les avis précédents, une oeuvre magistrale et un grand coup de coeur.
Talc de verre
C'est cette question de la sensation, vous comprenez ? - Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre. Sa première parution date de 2015 au Brésil, et de 2016 en France. Il a été traduit par Marie Zeni et Christine Zonzon. Il a été réalisé par Marcello Quintanilha pour le scénario et les dessins. Il compte cent-cinquante-six pages de bande dessinée, en noir & blanc, avec des nuances de gris. Le soir, Rosângela, trentenaire, s’est couchée dans le lit conjugal, aux côtés de son mari Mario. Après avoir éteint la lumière, elle repense à cette histoire d’être, d’une certaine manière, supérieure. Non, ce n’est pas ça. En fait, c’est assez difficile à expliquer, parce que cette pensée là… Il ne s’agit pas d’une idée, comme on pourrait dire, tout simplement., Rosângela se sentait supérieure, car ce n’était pas ainsi qu’elle pensait. Du moins, on ne peut pas dire qu’elle pensait en ces termes-là. Non, ce n’est pas vraiment cela. C’est pourquoi il est difficile de l’expliquer, ce serait plutôt ? Comment dire ? Plutôt une espèce de sensation, vous comprenez ? Oui… Une espèce de sensation, vous savez ? Disons… Comme si … vous aviez le sentiment de faire partie d’une classe… disons… supérieure. Vous voyez ? Comme si vous apparteniez à un certain milieu social, c’est ce que je veux dire… Ce sont des gens qui vivent dans des conditions particulières, n’est-ce pas ? Le genre de personnes dont vous dites : Eh ben ! Pour être à cette place dans la peau de cette personne et vivre de cette façon, consommer, faire des voyages, faire l’amour, il faut appartenir à ce milieu ! Eh bien, c’était plus ou moins cela que Rosângela ressentait. C’était ce qu’elle ressentait, et, curieusement, elle associait le fait d’être dans la peau d’une de ces personnes-là, dont tout le monde sait qu’elles appartiennent à une classe supérieure, à un moment précis, lorsqu’elle venait juste de faire l’amour avec son mari. Plus encore que lorsqu’elle descendait prendre sa voiture au garage, ou qu’elle laissait les enfants devant le collège, ou qu’elle rejoignait son cabinet. Et si vous pensez que personne ne s’en rendait compte, demandez donc au portier de l’immeuble, qui lui assène tous les matins son Bonjour Dr. Rosângela, demandez donc au gars du parking, demandez à tous ces gens qui regardent sa voiture du coin de l’œil, sans pouvoir s’acheter la même. Demandez-leur, et vous verrez… C’est plus ou moins comme si vous étiez dans la peau d’une personne à part, qui sait qu’il y a de la misère dans le monde, mais qui… Qui ne peut rien y faire, n’est-ce pas ? C’est embêtant, c’est triste, mais que faire ? Vous avez la chance d’être dans la peau de ce genre de personnes, un point c’est tout. Vous ne pouvez rien y faire, il vous faut donc vivre le mieux possible. La dentiste Rosângela est arrivée dans son cabinet de dentiste. Elle salue son assistante Irma, fait le point sur ses rendez-vous du matin. Elle doit recevoir sa cousine germaine Daniele qui vit dans le quartier populaire de Barreto, celle avec son père alcoolique dont, enfant, elle devait nettoyer le vomi, dont le premier mari lui crachait au visage. Celle qui est si jolie, une beauté incroyable, un sourire extraordinaire. La quatrième de couverture présente Rosângela comme souffrant du syndrome de la femme parfaite : dentiste reconnue, un mari cardiologue à succès très amoureux d’elle, des enfants qui sont de véritables petites merveilles, une belle voiture, un compte bancaire bien rempli… Mais une cousine, pauvre et séparée de son mari, fait preuve d’une tranquillité d’esprit désarmante, dotée d’un sourire toujours éclatant. Une simple histoire de jalousie ? La narration apparaît tout de suite comme très personnelle. Des cases sans bordure, entre quatre et douze par page, avec des dessins naturalistes et descriptifs, et parfois des gros plan ou des contrastes qui aboutissent à une image abstraite si le lecteur la considère détachée des cases la précédant ou la suivant. Un flux de pensées qui n’est pas celui du personnage principal, mais celui du narrateur ou de l’auteur qui n’est pas omniscient. Ses remarques et ses observations oscillent entre des constats sur l’état d’esprit de Rosângela et ses pensées, et des interrogations dessus, comme s’il cherchait à comprendre ses émotions, leurs racines, comme s’il ne savait pas tout d’elle. Le lecteur se retrouve immédiatement impliqué dans cette vie, dans les émotions de cette femme, vraisemblablement trentenaire qui fait l’objet de l’attention du narrateur qui s’interroge sur elle, tout en racontant son histoire. L’histoire se déroule à Niterói, ville située sur le côté est de l'entrée de la baie de Guanabara, face à Rio de Janeiro. Son nom est mentionné et Rosângela évoque d’autres villes et quartiers à proximité, pour souligner qu’elle a la chance d’habiter dans une zone privilégiée. On la voit emprunter le pont Rio-Niterói long de treize kilomètres, qui traverse ladite baie. De manière incidente, sans que la narration y fasse référence explicitement ou ne commente, certaines cases montrent des rues, des façades d’immeuble, les plages, les vagues de l’océan, avec ou sans êtres humains se livrant à leurs occupations. C’est une particularité narrative de cette bande dessinée que d’avoir parfois des cases qui ne se rattachent pas au sujet des réflexions du narrateur sur son personnage, mais qui viennent montrer le lieu, ou bien associer un lieu du quotidien de Rosângela, apportant un élément de sa vie. L’auteur montre ainsi de nombreux éléments de la vie de tous les jours de cette femme : le tableau de bord de sa voiture, sa chambre à coucher, la salle d’attente de son cabinet de dentiste, l’ascenseur qui y mène, un train sur la voie ferrée qui traverse le quartier où vit sa cousine germaine, son premier cabinet avenue Amaral Peixoto que lui avait offert son père, les immeubles le long de la baie vus depuis la mer, son fauteuil de dentiste avec les appareils, le salon de tante Bel avec son canapé très ordinaire recouvert d’un tissu pour le protéger, la mer venant lécher la base du rocher d’Itapuca pendant la marée, la grande salle de réception d’un appartement luxueux des amis de son mari, des immeubles d’autre partie de la ville, les lumières de la ville de nuit, des zones piétonnes, etc. En plus de la diversité des lieux montrés au fil de l’eau, l’artiste se focalise parfois sur un détail, un gros plan : la plaque du cabinet dentaire, l’eau qui s’écoule dans un lavabo, une main sur laquelle on enfile un gant, le motif géométrique du plafonnier, une dentition, un lustre monumental dans un centre commercial, le motif du revêtement d’un trottoir, le chiffre d’un jour sur un calendrier, etc. Ces moments peuvent aussi bien correspondre à une vue subjective, ce sur quoi se concentre le regard Rosângela à ce moment-là, qu’un souvenir fugace dans son esprit. De temps à autre, ces images deviennent des très gros plans, sortant un détail d’une case vue précédemment, pour donner une figure abstraite qui ne fait sens que rattachée à la case ou à la séquence d’origine. Une forme conceptuelle comme si le réel perdait son sens pour ne plus être qu’un ressenti esthétique fugace. Ces caractéristiques de la narration visuelle génèrent un effet parfois sensoriel, parfois émotionnel, connectant ainsi directement le lecteur aux sens de la protagoniste. L’effet peut s’avérer d’autant plus troublant que les brèves cellules de texte déroulent une idée parallèle. Le lecteur se met alors à imaginer, ou plutôt à ressentir la connexion qu’il peut y avoir, soit directe les images fournissant le contexte du flux de pensées qui sont influencées inconsciemment par le lieu ou l’action, soit à retardement quand le souvenir revient par un mécanisme d’association sensoriel ou émotionnel, du grand art. La qualité narrative fait de cette histoire banale tout autre chose qu’une télénovela produite industriellement au kilomètre. La banalité de la trajectoire de vie de Rosângela acquiert une profondeur extraordinaire, parfois sociologique, parfois émotionnelle, toujours personnelle. Certes les circonstances de sa naissance l’ont gâtée : parents aimants, attentionnés, financièrement à l’aise, bonne éducation, réussite scolaire, mariage très heureux avec un époux très attentionné, enfants agréables réussissant bien, confort matériel, réussite professionnelle, personnes à qui se comparer, dans son milieu social, mais aussi sa cousine germaine, sa tante et son oncle d’un milieu nettement moins favorisé, avec une histoire personnelle nettement moins heureuse (père alcoolique, mari méprisant, pas d’enfant). Rosângela sait qu’elle bénéficie d’une situation enviable, nettement meilleure que l’écrasante majorité de la population. Elle a conscience d’être regardée comme un modèle de bonheur, plus admirée qu’enviée. Au fil du récit, l’auteur aborde d’autres thèmes : une sensation de manque indéfinissable, une commisération de circonstance pour sa cousine germaine (pas vraiment de la peine, certainement pas de la jalousie), une forme d’injustice existentielle (le bon caractère et le plaisir de vivre évident de sa cousine, qu’y a-t-il dans son sourire ?), une interrogation sur ce qu’elle pourrait devoir d’une certaine manière (car elle n’a rien fait pour mériter tout ça, en fait si elle a mené sa vie en s’investissant pour construire cette forme de bonheur), une question de mérite… L’auteur ne se montre pas méchant avec son personnage, il fait tout pour se montrer le plus empathique possible pour la comprendre, ce qui incite tout naturellement le lecteur à faire de même. Soit il a développé de solides convictions sur le sens de la vie, et il n’éprouve alors aucune difficulté à se positionner par rapport à Rosângela, à trancher sur la nature de son mal-être. Soit il est plus dans l’empathie et il l’accompagne dans cette recherche de ce qui ne va pas, ce qui fait défaut, ce qui gêne, ce qui ne fait pas sens dans sa situation comparée au parcours de sa cousine Daniele. Au départ, il attend alors une sorte de révélation. Mais le récit s’avère beaucoup plus habile que cela, impliquant le lecteur tout en douceur dans la vie intérieure de la protagoniste, sans bulles de pensée. La compréhension ne se produit pas sous forme de révélation, mais en éprouvant ses ressentis. Aussi fort et intense qu’habile et élégant. Une couverture peu parlante, un titre cryptique, une histoire banale de mère ayant tout réussi. Une narration personnelle faite de petites cases ouvertes, parfois en panoramique sur la largeur de la page, semblant très descriptives et très factuelles, tout en faisant ressentir l’état d’esprit de Rosângela de manière aussi douce qu’efficace. Le suspense se révèle d’ordre psychologique, voire existentiel, tout en sourdine, alors que le lecteur s’installe dans le quotidien de la protagoniste à Niterói, en profitant de son confort matériel. Une incroyable aventure dans le monde intérieur d’une femme, sans avoir accès à ses pensées. Extraordinaire.
Les Yeux doux
Il n'y a pas grand chose à ajouter à l'avis de Mac Arthur juste en dessous qui résume parfaitement bien ce que ce copieux one-shot a à nous offrir : une intrigue basée sur Brazil (le film culte de ma jeunesse) et 1984 (le roman culte de ma jeunesse) synthétisée dans un bel écrin agréable au toucher et dont la couverture magnifique a eu un effet immédiat d'attraction. Effectivement Corbeyran nous ressort la sempiternelle histoire d'une société oppressive et étouffante où seules 3 règles subsistent : créer, consommer, surveiller au travers d'une mégalopole morne à peine rehaussée par de splendides pancartes de pin-ups plantureuses et au regard doux. Soit une belle méthode pour contrôler la population et l'entrainer irrémédiablement en détention dès qu'un faux pas est détecté. Une seule industrie existe pour du travail à la chaine dans des conditions inhumaines afin de créer des objets de consommation qui seront vendus dans le seul commerce autorisé. Le tableau esquissé par Corbeyran reste bien classique et le serait tout autant sans le profil de personnages ordinaires irrémédiablement attachants. Il y a Annabelle, Anatole et Arsène. Tous vont subir les affres de cette société : licenciement abusif, abus de pouvoir et rejet de la société vous effaçant progressivement au sens propre comme au figuré. Tout cela est admirablement construit par des dialogues et un rythme simples mais faisant mouche : le trait de Michel Colline y est évidemment pour beaucoup. Choisissant un style franco-belge délicieusement rétro-futuriste, ses personnages possèdent des expressions palpables et les décors sont un régal pour le lecteur. Un peu d'humour, du tragique et un soupçon d'aventure enveloppent cette histoire poétique, presque naïve mais terriblement attachante qui en fait à mes yeux la meilleure surprise de cette rentrée 2024. Si la fin est rapidement expédiée, elle délivre un message peut être pas si manichéen que prévu et atteint son but : vive le changement mais pour quel avenir ? Non vraiment je suis sous le charme absolu de ce livre que je relirais avec beaucoup de plaisir, tant pour l'objet en soi que les dessins et le scénario et vous invite vivement à en faire de même.
Sin City
Nous voici plongés dans une ville qui se nomme Bassin City, avec ses sombres ruelles où l'on craint pour sa vie, qui sont faiblement éclairées par les néons de clubs de striptease, dont les malfrats, la mafia, les prostituées, flics et politiques corrompus y règnent sans vergogne. Nous suivons dans chaque tome, différents protagonistes dopés sous stéroïde ou tout simplement avec une grosse paire de burnes, dans leurs petits tracas du quotidien que cette ville leur gage sans le moindre respect, qui faut se le dire ne sont pas les mêmes que les communs des mortels. Tous les personnages sont vraiment travaillés sur bien des aspects, mais c'est surtout sur leurs dialogues et punchlines qu'ils nous délivrent de vrais frissons, ce qui leur donnent une réelle authenticité. Le noir et blanc du maitre Miller est vraiment maitrisé à la perfection, ça colle parfaitement à l'ambiance de la ville et à la personnalité de nos anti-héros. J'ai été submergé dans ce polar noir qui a réussi de plus, à croiser les scénarios dans des lieux communs à chaque tome, ce qui est vraiment bluffant. Par une écriture, mais quelle ECRITURE !!! Une mise en scène incroyablement efficace par l'utilisation de la voie off de nos protagonistes avec une réelle profondeur, du vrai théâtre. Je tire mon chapeau à notre traducteur de renom, Henri Loevenbruck pour avoir réussi à nous faire ressentir ce que l'auteur voulait nous transmettre par sa vison de la mise en scène. Une petite déception tout de même pour sa dernière histoire "Retour en enfer" qui utilise des codes différents, qui pourrait plaire car ça casse la routine des premiers tomes, mais pour ma part, ça ne m'a pas convaincu. Sin city vous attend ... Marv, Dwight McCarthy, l'inspecteur John Hartigan et Wallace vous attendent énergiquement également ...
Lightfall
J'ai commencé par pester en empruntant cette série. Des tomes de 250 pages qui pèsent un tonne pour des enfants de 8/10 ans je ne trouve pas cela top pour un bon confort de lecture au fond de son lit. Toutefois ma mauvaise humeur s'est bien vite éteinte avec le contenu de cette très bonne série jeunesse. Le récit et l'ambiance emprunte beaucoup au Seigneur des Anneaux mais Tim Probert a su y mettre son empreinte perso pour proposer un récit entrainant aux multiples rebondissements. La jeune Béatrice n'est pas une héroïne conventionnelle gratifiée d'une multitude de super dons qui aplanissent toutes les difficultés rencontrées. Au contraire dans sa quête pour sauver son grand-père elle emmène ses angoisses paralysantes et ses pensées pleines d'un pessimisme démoralisant. C'est une fragilité touchante qu'elle apprend à surmonter au contact de Cad. Cad est le dernier des Galduriens plein de force, d'optimisme et de gentillesse. Leur cheminement est l'occasion de dialogues d'un excellent niveau pour les enfants parfois même avec beaucoup de finesses sur les notions de confiance en soi, de doute et de positionnement face aux difficultés. C'est très adroitement introduit dans un contexte classique de Bien contre Mal avec une métaphore de la lumière qui laisse place aux ténèbres mortifères si personne ne résiste .On reconnait là les codes de base du genre. Mais Tim Probert conduit sa narration de façon très dynamique sans dispersion à tel point que les 250 pages se lisent d'un trait avec l'envie de de continuer la découverte de la suite sans tarder. Les phases d'actions parfois violentes ( pour des enfants) alternent avec les passages plus introspectifs pour former un ensemble équilibré et cohérent. Il y a même souvent un belle touche d'humour grâce au personnage de Cad qui est une vraie trouvaille de l'auteur. Le graphisme est très moderne et soutient parfaitement le dynamisme de la narration. Ici encore il y un bon équilibre entre la narration du texte et celle des images. Une très belle mise en couleur permet de souligner les passages inquiétants ( à base de bleus) et les passages plus lumineux. C'est très réussi. Une très belle série pour les enfants que j'ai eu beaucoup de plaisir à découvrir.