Les derniers avis (31222 avis)

Par Blue boy
Note: 4/5
Couverture de la série Aparthotel Deluxe
Aparthotel Deluxe

Le petit immeuble « Aparthotel Deluxe » est le lieu principal où se déroule l’action, il est aussi le nom éponyme de cette bande dessinée, avec une connotation gentiment ironique. En effet, il n’est pas question ici d’immobilier de luxe, ne serait-ce que parce que le bâtiment, bien qu’à l’architecture contemporaine, laisse apparaître des signes d’usure. Certains autres indices, tel ce mendiant assis à proximité, montrent qu’il n’est pas non plus situé dans les beaux quartiers. Les gens qui l’habitent font partie d’une classe moyenne subissant plus ou moins les effets de la crise économique, et ce sont eux qui vont intéresser Edo Brenes. Si ce récit choral a pour théâtre la ville de San José au Costa Rica, d’où l’auteur est originaire, il pourrait se dérouler (presque) n’importe où ailleurs. « Aparthotel Deluxe » parle du monde moderne, à travers les états d’âme de ses résidents, abordant des thèmes devenus universels. Plusieurs protagonistes vont ainsi défiler au fil des pages, qu’ils soient célibataires, en couple ou divorcés, avec des occupations très variées. Il y a tout d’abord cet homme qui vient de perdre son père (celui qui est mort en sortant de sa douche) et doit organiser le tri dans son appartement. Puis l’épouse du concierge qui part visiter sa mère et tente de culpabiliser son mari enclin à l’alcoolisme, cet homme qui aime s’habiller en femme et a une relation d’amitié avec Tina, une prostituée, puis ce jeune père en instance de divorce qui tire le diable par la queue, ou encore ces jeunes parents qui pouponnent tout en matant des séries… A travers les discussions ou états d’âme de ces personnages, Edo Brenes nous fait pénétrer leur intimité. C’est bien sûr d’abord du deuil dont il est question avec ce fils tout juste orphelin qui inaugure le récit. Celui-ci est en proie à mille questionnements, perdu dans les souvenirs incarnés par divers objets probablement voués à disparaître dans les cartons. Mais d’autres thèmes sont développés, et ceux-ci sont en corrélation avec un monde qui change, hésitant entre l’archaïsme et la modernité, notamment celui de l’orientation sexuelle. C’est par le biais du personnage de Garçon, un homme qui aime porter des vêtements féminins, que cette question de l’acceptation de l’autre dans ses différences qui va se poser au lecteur. Et ici, on est bien au-delà des clichés. Certes, s’il songe à se faire poser des implants mammaires, il tient à conserver son pénis. Et qui plus est, il est profondément croyant. Un passage qui déroutera sans doute les esprits les plus réactionnaires, ceux qui, pour reprendre une citation de Garçon, « n’arrivent pas à comprendre que l’essence de la moralité réside dans l’absence de jugement ». Plus globalement, c’est le poids des valeurs catholiques sur la société qui apparaît en filigrane — même si le Costa Rica compte un nombre de pratiquants similaire à celui des pays « développés » — mais comme en France ou ailleurs, on ne se débarrasse pas aussi facilement de mœurs imposées par deux mille ans de christianisme. L’approche d’Edo Brenes, tout en nous faisant découvrir une des facettes d’un pays davantage connu pour son côté « carte postale », nous livre une œuvre profondément humaine, faisant confiance à la capacité empathique de ses lecteurs. Ses personnages sont plutôt attachants car d’une certaine manière, c’est avec nous qu’ils conversent, avec les mêmes questionnements, les mêmes préoccupations, celles d’un monde où les rapports sociaux se distendent, souvent avec notre consentement, sous l’influence de Netflix et d’’internet. Car à l’exception de la jeune Istaya, quel autre voisin se serait rendu compte si rapidement qu’il se passait quelque chose d’anormal chez monsieur B. ? La ligne claire, simple et agréable, est bien en phase avec le propos, certes audacieux mais sans volonté de provoquer gratuitement. Cadrage impeccable, couleurs sobres, Brenes maîtrise parfaitement les codes de la BD franco-belge avec une touche de modernité. Œuvre sensible invitant à la réflexion, « Aparthotel Deluxe » est la quatrième bande dessinée d’Edo Brenes dont on a pu découvrir récemment « Touristes à la Havane », et, nous prévient l’éditeur, le premier roman graphique créé directement pour lui. Ainsi, on ne sera guère surpris de voir cet auteur, déjà récompensé par divers prix à l’étranger, émerger doucement mais sûrement dans le petit monde du neuvième art. Et on est d’autant plus ravi quand celui-ci vient d’un pays qui n’est pas forcément connu pour sa production en la matière.

14/08/2024 (modifier)
Couverture de la série L'Eau et la Terre
L'Eau et la Terre

Je rejoins en partie les remarques de Ro et Noirdésir sur les difficultés de cette série. Toutefois la thématique est tellement bouleversante que je ne peux me résoudre à mettre une note moyenne. Je connais assez bien cette tragédie humaine qui renvoie vraiment à Ubu tellement les situations furent absurdes, criminelles et de pure folie. La construction assez décousue de Séra renvoie à cette incohérence criminelle édifiée par les Khmers rouges au rang de pensée idéologique révolutionnaire. Par exemple le rappel que le port de simples lunettes vous condamnait à mort reste un sommet d'inhumanité du siècle dernier. Séra ne fait pas dans le voyeurisme morbide par respect pour les millions de morts. C'est comme si il voulait nous amener devant un tableau géant avec le visage souriant des victimes que l'on se doit de ne pas oublier. C'est un devoir de mémoire que nous nous devons de perpétuer d'autant plus que nombres de criminels n'ont pas été jugés mais pire n'ont eu aucun remords et pour certains ont continué les actions armées pendant des années. Le graphisme de Séra est hyper réaliste à la limite de la photographie. Le noir des tenues Khmers, le brun de la terre et le rouge du sang dominent dans une atmosphère lourde d'angoisse. Aucune éclaircie ne vient alléger cette ambiance. Une lecture mémoire d'une série au visuel et à la construction singulière mais pour un résultat très touchant.

14/08/2024 (modifier)
Par Présence
Note: 4/5
Couverture de la série Batman et les Monstres
Batman et les Monstres

La fraîcheur des débutants - Matt Wagner est un familier de Batman : il l'a déjà mis en scène, entre autres, dans Trinité - Batman/Superman/Wonder Woman et Batman/Grendel. Il revient au personnage pour développer l'une de ses premières aventures qui se situe un an après la première apparition de l'homme chauve-souris. Dans ce tome, il affronte les machinations d'Hugo Strange. Dès la première page, la maîtrise de Matt Wagner (ici au scénario et aux dessins) éclate et le lecteur est immédiatement en immersion grâce à une référence à un fait bien connu du mythe. Un personnage sirote son café en lisant son journal qui fait sa une sur la disparition de Red Hood (futur Joker, évoqué dans The Killing Joke). L'histoire est campée à la fois au début du Batman, et à la fois elle a sa place dans la perspective de ce qu'il deviendra. Matt Wagner mêle adroitement les aspects très ordinaires, mondains de la vie Bruce Wayne, ses rendez-vous amoureux manqués, ses échanges sarcastiques avec Alfred, et ses acrobaties en tant que Batman. Il a choisi de situer son histoire au tout début du mythe ce qui lui permet de nous faire découvrir le métier de Batman en même temps que son personnage principal, et d'inclure des erreurs de débutant qui lui donne plus crédibilité et d'humanité. Ce point de vue procure une fraîcheur bienvenue à l'histoire et la naïveté de Bruce Wayne confronté à ses premiers véritables monstres fait surgir, par contraste, des instants poétiques inattendus. Je ne saurais trop vous recommander cette histoire qui sait nous faire redécouvrir un personnage que l'on croyait connaître. De plus Matt Wagner est un professionnel chevronné qui donne un ton unique à sa narration à la fois par le point de vue de débutant qu'il fait adopter à Batman, et à la fois par des dessins d'une précision exquise où chaque trait est nécessaire, où il n'y a pas de place pour le superflu ou l'esbrouffe gratuite. Tout est parfaitement maîtrisé. Et le mieux, c'est qu'après ce tome, il y en a un deuxième dans la même veine : Batman et le Moine Fou, encore meilleur.

14/08/2024 (modifier)
Par Alix
Note: 4/5
Couverture de la série À moindres risques - Immersion en
À moindres risques - Immersion en "salle de shoot"

J’ai lu cet album car j’espérais m’informer sur un sujet dont je sais peu de choses, et à ce titre, il a parfaitement rempli son rôle. Mat Let, dont c’est le premier album BD, a passé du temps avec les volontaires de diverses associations s’occupant d’une « salle de shoot », où les drogués peuvent venir s’injecter en toute sécurité. Les questions abondent : les associations fournissent-elles les drogues ? Quel genre de personne visite ce genre d’établissement ? Qu’en pensent les résidents du coin ? Il y a-t-il une suivie, des aides pour aider les usagers à arrêter ? Les nombreux témoignages de volontaires mais aussi d’usagers permettent d’apporter des réponses à ces questions cruciales. La postface de Médecins du Monde résume parfaitement la situation, et propose même des solutions sur le long terme à nos politiciens. La réalisation de l’album est excellente, la narration est fluide, le dessin est élégant et lisible. Si je devais chipoter, je dirais que les fonds souvent clairs font qu’il est parfois difficile de voir à qui sont rattachés les phylactères. Un album « témoignages » intéressant et instructif, qui me laisse sur la même impression que le récent Traversées - La Route de l'aventure chez le même éditeur, à savoir une admiration et un respect sans fin pour ces volontaires, véritables héros des temps modernes.

14/08/2024 (modifier)
Couverture de la série Nailbiter
Nailbiter

Thriller horrifique en plein, Nailbiter a réussi à me tenir en haleine jusqu’au dernier tome. Et même si je n’ai pas trop apprécié ce dernier et les explications qu’il apporte (il y a je pense certaines incohérences avec des événements décrits précédemment), je trouve que la série est réussie dans l’ensemble et vaut le détour. De quoi ça cause ? D’un étrange bled perdu des Etats-Unis duquel sont issus un nombre étonnant de tueurs en série. Et non seulement le nombre a de quoi effrayer, mais en plus ces tueurs ont tous un modus operandi différent et des manies étranges. Warren, un de ces tueurs assez étonnamment acquitté, va vite se retrouver associé à l’inspecteur Finch dans une quête de la vérité qui tient quelque peu du jeu du chat et de la souris. Autour d’eux gravitent moult personnages, apportant à l’intrigue une richesse en profondeur et matière à renouvellement. Le suspense est constamment relancé. Les scènes d’horreur s’enchainent. Mais surtout, les personnages ne cessent de se dévoiler, et c’est certainement l’aspect que j’ai préféré. A commencer par Warren dont on ne sait jamais trop s’il est à plaindre ou à blâmer. Le dessin est agréable, très lisible. Les personnages sont bien typés. Les scènes d’horreur sont très gores à défaut d’être réellement angoissantes mais ce n’est pas un réel problème. Franchement, dans l’ensemble et dans son genre, c’est une série qui vaut le coup d’œil. Avec une conclusion plus convaincante, j’aurais poussé jusqu’au 4/5 avec coup de cœur. Ici, mon ressenti oscille entre le 3/5 et le 4/5.

14/08/2024 (modifier)
Couverture de la série Merel
Merel

Et bien ! Pour un premier album, je trouve que Clara Lodewick nous sort un très bel album. Son récit, qui s’articule autour de la médisance, de la mesquinerie et de l’effet de masse, m’a semblé très juste dans son analyse. Il s’en dégage beaucoup d’humanité, dans le bon sens comme dans le mauvais. Au niveau du dessin, c’est sans doute plus perfectible mais l’autrice a déjà une belle patte. Son découpage est clair, les personnages sont faciles à distinguer et leurs émotions passent au travers du dessin. Les cadrages proposent finalement peu de gros plans mais plutôt des tableaux d’ensemble qui permettent de visualiser plusieurs protagonistes dans un même temps, ce qui, je trouve, est très judicieux par rapport à l’histoire qui nous est racontée. L’histoire, elle, m’a beaucoup touché. Clara Lodewick nous plonge au cœur d’un petit village flamand, son concours avicole, son club de foot, son épicerie… et sa mentalité de village. A partir d’une répartie bien sentie, et peut-être un peu maladroite, la médisance va sévir au détriment de Merel, célibataire à l’âge mûr. La rumeur enfle, et avec elle, la méchanceté et l’hypocrisie. J’ai beaucoup aimé le fait que l’autrice ne pousse pas le bouchon trop loin. On reste sur une histoire réaliste, avec des personnages que l’on a le sentiment d’avoir croisés dans la vie réelle, avec des comportements, des réactions parfois stupides de méchanceté, parfois touchants et humbles. Vraiment un album qui m’a beaucoup plu, et qui devrait plaire aux amateurs de romans graphiques.

14/08/2024 (modifier)
Par Montane
Note: 4/5
Couverture de la série Corentin
Corentin

Corentin est l’une des séries les plus anciennes du Journal Tintin puisque ce héros est présent dès 1946 dans l’hebdomadaire. Avec Hergé et Jacobs, Cuvelier est donc un des fondateurs du journal Tintin. Les deux premières histoires de Corentin font 64 et 62 pages ( L’extraordinaire odyssée de Corentin, les nouvelles aventures de Corentin). C’est l’époque où les rebondissements devaient s’enchaîner pour tenir en haleine le lecteur, parfois sans grande cohérence dans le récit. Les dialogues sont également très fournis un peu comme avec Jacobs. Tu n n’en reste pas moins étonnamment surpris par la qualité réaliste du dessin de Cuvelier; un dessin bien moins figé que celui d’un Jacques Martin par exemple qui officiait dans le journal Tintin à la même période. Puis Cuvelier pour qui la Bd était un art mineur repris la série quelques années plus tard en faisant cette fois appel à des scénaristes ( Van Hamme, Greg), et pas des moindres. «  Le poignard magique » est un album de transition: énormément de cases par planche pour rester dans les clous des 62,planches, beaucoup de texte et un dessin qui évolue. A partir du « signe du Cobra » la série gagne en qualité: les récits sont plus structurés malgré les 44 planches, les couleurs de qualité pour l’époque, et le dessin des Cuvelier est toujours plus remarquable. Une des particularités de cette courte série est que le personnage de Corentin vieilli ce qui est très rare dans le monde de la Bd, et très novateur pour l’époque. La série prend fin en 1976 dans le Journal Tintin. On peut s’y replonger avec plaisir pour s’imprégner de cette bd d’aventures, ou un jeune breton se retrouve au Royaume des Indes en quête d’exotisme et d’aventures comme l’était le public de la Bd à cette époque d’après guerre.

14/08/2024 (modifier)
Par roxy
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Mortelle Adèle
Mortelle Adèle

J'aime beaucoup Mortelle Adèle. Et j'ai déjà 6 livres ,1 roman et 3 grandes aventures ! J'aime beaucoup, car grâce à Adèle, je me sens moins seule, des fois. J'aimerais bien être comme Adèle des fois, car elle dit ce qu'elle pense sur celles qui les embêtent, et j'aime sa personnalité, ses cheveux roux, avec deux grosses couettes derrière et son uniforme. Elle montre qu'on peut être qui on veut, où on veut. Et les dessins sont bien faits et l'imagination ne manque pas. Poussez vous les moches !

13/08/2024 (MAJ le 14/08/2024) (modifier)
Par Jeïrhk
Note: 4/5
Couverture de la série FreakAngels
FreakAngels

Je me suis régalé. Ça m'aura occupé 2 belles soirées. Petite appréhension au début par rapport au dessin, que j'ai fini par vraiment apprécier au fil des tomes (même si j'ai toujours eu un peu de mal avec les visages). Friand des séries post-apocalyptiques, il ne m'en faut pas beaucoup pour apprécier une lecture de ce genre. J'ai rarement eu l'occasion de lire une série de ce type sur plusieurs tomes, donc c'était d'autant plus cool, surtout que j'ai adoré du début à la fin. Le scénario, qui pourrait sembler de déjà vu au premier abord, se révèle finalement vachement original, intéressant, et franchement bien construit. Les 12 (13 avec Alice) sont tous attachants à leur manière, j'ai eu un gros coup de coeur pour Arkady, que j'ai particulièrement appréciée pour sa douceur et sa joie de vivre.(Et c'est aussi le seul visage dont j'ai aimé le dessin et les expressions) Comme Gaston, j'ai vraiment bien aimé les dialogues, surtout l'humour souvent sarcastique que j'ai trouvé très réussi. Il n'y a pas énormément de violence (quoique), mais quand il y en a, il faut admettre que le dessinateur n'a pas été timide sur l'hémoglobine. Alors c'est vrai qu'en général, j'aime que la violence, s'il y en a, soit réaliste, mais ici c'était peut-être un peu trop ? La mise en page souvent découpée en 4 grandes cases, voire moins, est vraiment agréable à lire. Les cases sont la plupart du temps bien remplies, et en tant qu'amateur de post-apo, j'ai été servi comme il se doit en détails et décors. Mention spéciale pour les ciels magnifiques, très réalistes, on a l'impression que ce sont de vraies photos (peut-être que c'est le cas), en tout cas, ça n'a rien à voir avec le reste, et pourtant, ça colle parfaitement au décor. En bref, une très bonne histoire, j'ai vraiment passé un bon moment. Je ne pense pas spoiler en disant que c'est du post-apo fantastique. Il ne me reste plus qu'à découvrir d'autres séries de cet auteur...

14/08/2024 (modifier)
Par Présence
Note: 4/5
Couverture de la série Grendel
Grendel

Une enquête visuellement envoûtante - Ce tome regroupe les 6 épisodes de la minisérie parue en 1993. L'histoire se déroule après les évènements de Devil's Reign. Quelque part dans un tripot, un homme joue et gagne au poker, de grosses sommes. Il s'appelle Calhoun, c'est un Grendel, une sorte de templier dédié au culte de Grendel, ayant prêté serment aux valeurs d'Orion Assante, premier Grendel-Khan du nom. Calhoun redistribue l'argent qu'il a gagné à des institutions charitables comme des orphelinats. Josef Mantovani n'est pas un Grendel, il a échoué aux tests. Il exerce le métier de détective privé et un propriétaire de restaurant lui a demandé d'enquêter sur meurtre de son frère. Son enquête l'amène à la nouvelle Orléans. Il y a également Alfred Bixby qui était comptable pour un groupe de Grendel, qui a pété les plombs, qui a revêtu l'habit et qui se prend pour un chevalier pourfendant les dragons (sa consommation de psychotropes est franchement déraisonnable). Il y a Gloria DeVere, une Grendel anglaise dont l'objectif est de sauvegarder les œuvres d'art des siècles passés. Justement un de ses informateurs lui a indiqué la présence d'une pièce inestimable à la Nouvelle Orléans. Dan cette ville se trouve également Renute, un autre Grendel qui est attiré par les pratiques vaudous. En 1989, Matt Wagner estime qu'il a dit tout ce qu'il avait à dire avec le concept de Grendel. Il décide donc d'ouvrir le monde qu'il a créé à d'autres auteurs. Il ouvre sa création à un moment qui se situe plusieurs siècles dans l'avenir, après un effondrement global de la civilisation humaine et sa reconstruction par Orion Assante, un visionnaire exceptionnel qui a utilisé l'image de Grendel comme symbole de ses actions. Après sa mort le monde est toujours en phase de reconstruction et Grendel est le symbole d'une forme de police hétérogène et avec des idéaux chevaleresques. James Robinson propose donc de suivre trois Gendel en titre et un en esprit dont les actions vont les amener à se rencontrer à la Nouvelle Orléans. le premier choc est visuel. le texte de Diana Schutz en fin de volume explique que Teddy Christiansen a mis 14 mois pour réaliser les 6 épisodes, et ça se voit. Il travaille directement à la peinture avec une vision pleinement formée de cet étrange future. La première page est une vue subjective d'un joueur de poker attablé à une partie, en pleine page. La fumée de cigarettes possède une densité impressionnante (elle est presque littéralement à couper au couteau). Les autres joueurs sont plongés dans une pénombre marron inquiétante. La deuxième page joue le contraste des couleurs puisqu'elle est dominée par une teinte rouge vive, dans le bureau de Mantovani. Les couleurs vertes de la jungle sud américaine où se trouve Bixby nagent dans une éclatante luminosité. Tout du long, Christiansen éclabousse ses pages de couleurs enchanteresses, osant tous les mélanges, y compris des compositions roses et vertes irrésistibles. Les qualités de cet illustrateur ne s'arrêtent pas aux couleurs vibrantes, il y a une densité dans vision créatrice qui transforme chaque scène en un voyage exceptionnel, sans recourir à des mises en page alambiquées ou des dessins indéchiffrables. Sous son pinceau chaque personnage acquiert une densité de caractère incroyable. Gloria DeVere a la fois l'allure d'un garçon manqué, une légère préciosité qui sied à sa qualité de conservatrice, une forme trapue qui trahit son habitude de se battre. Elle est à l'opposé de tout cliché pour être unique. Les crises d'hallucinations de Bixby constitue des gemmes graphiques de délire maîtrisé, avec une reprise des codes visuels créés par Bernie Mireault dans The Devil Inside. Christiansen s'extirpe des lieux communs habituels des comics pour créer un junky bien parti, dangereux, avec une forme de noblesse inattendue. le récit de Robinson se trouve littéralement transfiguré par les riches visuels de Christiansen. Le récit en lui-même s'avère intrigant pour le lecteur qui s'interroge sur la nature des liens qui rapprochent les quatre Grendel, sur la nature du complot ourdi à la Nouvelle Orléans et sur les raisons du meurtre initial pour lequel Mantoni a été embauché. Mais Robinson n'arrive pas à profiter pleinement de la thématique liée à Grendel. Il utilise les Grendel pour montrer que la violence corrompt cet ordre aux objectifs purs et altruistes. Mais les personnages ont du mal à dépasser leurs actions. Ils n'ont pas de vraie personnalité au-delà de la mission qu'ils se sont chacun assignés. Robinson privilégie franchement l'intrigue et le mystère lié à l'enquête aux dépends de vrais points de vue des Grendel. du coup le récit qui aurait pu donner des points de vue croisé sur les faits et les évènements reste dans le domaine de l'aventure, sans s'aventurer dans le polar psychologique ou social. Ce premier récit franchisé dans le monde de Grendel se révèle une aventure graphique épatante, un mystère intéressant, mais avec des personnages qui ont du mal à exister en tant qu'individus.

13/08/2024 (modifier)